Les derniers diagnostics du Dr House (3)

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Les derniers diagnostics du Dr House (3)
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Les derniers diagnostics du Dr House (3)
Dans quelques mois nous ne parlerons plus
de notre néo-confrère Grégory House. Il est
écrit qu’il va disparaître (Rev Med Suisse 2013;
9:214 et 294). Nous attaquons aujourd’hui
avec lui les cinquième et sixième étapes
d’un chemin de croix qui, nous dit le divin
producteur, en comporte vingt-deux. Une
sorte de Tour de France en somme ; avec dopage, flonflons, télévision et jolies filles pour
le vainqueur. La diffusion, en France, de la
dernière saison de la série médicale offre
d’étonnants bonus. Elle apparaît comme en
résonance avec l’actualité immédiate. Aujourd’hui, au menu : la confession de Lance Armstrong, les violences générées par la sexualité
et le dilemme des recherches en paternité.
Disséquons rapidement le cinquième épisode.
On offre à House un homme devenu héros
dans son village. L’homme parfait, l’époux de
rêve. Trop beau pour durer. Son martyre
commence avec une relation hétérosexuelle
et adultérine. L’équipe depuis peu reconstituée des servants de House évoque d’emblée
une fibrillation ventriculaire ? Classique. Et
puis non, tout bien pesé ce n’est pas une FV.
Comme toujours chez House, c’est aussitôt
l’entrée dans le labyrinthe des hypothèses
et des essais thérapeutiques plus ou moins
Primes payées en trop : la colère
des cantons lésés ne retombe pas
La colère ne retombe pas après la décision de la
Commission de la santé du Conseil des Etats
(CSSS-E) de classer le dossier des primes payées
en trop par les assurés de plusieurs cantons. Au
contraire : elle gagne en ampleur. Et la résistance,
lancée sur les bords du Léman, s’organise désormais aussi bien à Zurich qu’au Tessin.
Les neuf groupes du Parlement zurichois ont ainsi
déposé lundi un postulat demandant au gouvernement d’agir et d’étudier les mesures possibles. (...)
Le gouvernement zurichois aura ensuite quatre semaines pour répondre. La semaine dernière, Thomas Heiniger, ministre PLR en charge de la Santé,
a exprimé son mécontentement dans la presse.
Dans l’immédiat, précise son porte-parole, la priorité reste toutefois de trouver une solution à Berne.
Rappelons en effet que le Conseil des Etats dans
son ensemble ne s’est pas encore exprimé dans
ce dossier.
Au Tessin, le Grand Conseil juge pour sa part tout à
fait «compréhensibles» les mesures de rétorsion proposées dans les cantons. Dans une lettre ouverte
adressée à Christine Egerszegi, la présidente de
la CSSS-E, ils qualifient la décision de cette commission d’«incompréhensible, inacceptable et contraire à l’esprit de cohabitation fédérale». Elle serait perçue dans le canton comme un «vol légalisé»,
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éthiques. Le patient dégrisé confessera vite
son histoire de fesses. Puis, c’est la décomposition après la confession. Tumeur périglottique, désintégration hépatique, peau en
lambeaux. C’est alors un écorché vif qui passe
à la grande confession publique néo-baptiste. Assez joli spectacle d’autoflagellation
satanique. Confession pathologique aussi ;
l’homme commence à avouer des délits, puis
des crimes qu’il n’a jamais commis. Tromper sa femme, passe encore, mais voler, puis
tuer. Cela fait décidément beaucoup pour
un honnête homme.
Un moment l’équipe de House est perdue.
Elle songe au syndrome décrit (1922) par
les deux pédiatres américains Albert Mason
Stevens (1884-1945) et Franck Chambliss
Johnson (1894-1934) – ainsi, en France, que
par Noël Fiessinger (1881-1946) et Henri
Rendu (1844-1902). De nos jours, cette spectaculaire et rarissime ectodermose érosive
est généralement désignée «syndrome de
Lyell» sous nos longitudes (Alan Lyell, dermatologue écossais, 1917-2007). House, lui,
ne lâche pas le morceau. Ces aveux pathologiques ont un siège anatomique qui renvoie
à une pathologie systémique. D’abord un
anévrisme dans la zone cérébrale «modérant
affirme encore le Parlement tessinois, avant d’appeler le plénum du Conseil des Etats à corriger le
tir.
Les primes maladie payées en trop ont également
occupé les discussions, hier, du Grand Conseil
vaudois. Là, les députés ont voté à l’unanimité une
résolution dans laquelle ils soutiennent leur Conseil d’Etat dans toutes les démarches qu’il entreprendra pour obtenir le remboursement des primes
payées en trop. Contrairement à la motion votée par
le Grand Conseil genevois, qui demande le gel du
paiement de la contribution à la péréquation fédérale, ce texte ne donne toutefois aucune précision
sur les mesures. (...)
Avant toute chose, les députés vaudois ont invité
eux aussi le Conseil d’Etat à privilégier le dialogue.
Et à rencontrer le conseiller fédéral Alain Berset et
les présidents des commissions de la santé du
Conseil des Etats et du National.
Caroline Zuercher
Tribune de Genève du 30 janvier 2013
Pierre-Yves Maillard : «non, je n’ai pas
torpillé le projet du Conseil fédéral»
(...) Selon Christine Egerszegi, la présidente de la
Commission du Conseil des Etats, Pierre-Yves
Maillard porterait une très lourde responsabilité
dans l’échec du projet. Le Vaudois aurait laissé en-
l’impulsivité et la compulsion». Puis le diagnostic : maladie de Tomisaku Kawasaki, pédiatre japonais qui observa, dès 1961, un
premier cas de syndrome adéno-cutanéomuqueux et en fit la première description
publiée en 1967.
Maladie de Kawasaki, cette passion des
internistes, aujourd’hui comprise comme une
vascularite systémique fébrile qui, en l’absence de traitement, peut se compliquer
d’anévrismes coronaires. Maladie de Kawasaki, cause la plus fréquente de cardiopathies
acquises chez les enfants dans les pays industrialisés, et qui peut constituer un risque
de cardiopathie ischémique de l’adulte. Maladie de Kawasaki rapportée dans le monde
entier, mais nettement plus fréquente dans
les populations asiatiques, et tout particulièrement au Japon. Incidence chez les enfants
de moins de cinq ans estimée à 17,1/100 000
aux Etats-Unis et à 112/100 000 au Japon.
Tableau : fièvre (constante), signes cutanéomuqueux (conjonctivite, pharyngite, langue
framboisée, chéilite, éruption cutanée polymorphe, desquamation des extrémités) et
adénopathies cervicales. Pathogénie : inconnue. Test diagnostique : inexistant. Diagnostic : critères cliniques après exclusion d’autres
maladies comportant une fièvre élevée et
persistante. Traitement : après diagnostic rapide (fondamental), administration précoce
d’immunoglobulines par voie intraveineuse
associée à l’acide acétylsalicylique, ce qui
tendre qu’il ne soutenait pas la proposition du
Conseil fédéral. Pierre-Yves Maillard réplique.
Que répondez-vous aux accusations de Christine Egerszegi ?
En tant que président de la Conférence des directeurs de la Santé (CDS), j’ai défendu jusqu’au bout
la solution du Conseil fédéral ! En décembre 2011,
alors que j’étais candidat au Conseil fédéral, deux
anciens conseillers d’Etat élus aux Chambres fédérales ont même dit devant le groupe PLR que
j’étais trop autoritaire dans la défense de cette solution. Je suis le dernier à qui on peut reprocher de
ne pas avoir soutenu ce projet !
Pourquoi alors avoir proposé un autre modèle
de remboursement ?
En juin 2012, la Commission des Etats n’est pas
entrée en matière sur la solution du Conseil fédéral
et a demandé aux cantons de se mettre d’accord
sur une solution. En août, je suis retourné devant la
commission avec le nouveau président de la CDS,
Carlo Conti, pour discuter de toute une série de
sujets qui concernaient les cantons. Et c’est là,
comme j’avais été chargé de le faire par la CDS,
que j’ai signalé que nous étions bien avancés sur
une solution pour le remboursement des primes,
soutenue par tous les cantons. Cela aurait dû enchanter la commission et sa présidente puisque
c’est ce qui nous avait été demandé, mais j’ai senti au
contraire un gros embarras, comme si tout le monde
attendait que nous n’y arrivions pas. Et j’ai encore
Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 6 février 2013
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D.R.
diminue la fréquence d’anomalies des artères coronaires à moins de 5%. Une recherche
bibliographique approfondie ne retrouve pas
de confessions spontanées itératives et délirantes dans le cortège symptomatique ; encore moins de confessions survenant chez
un adulte au décours d’une relation sexuelle
adultérine.
Bien en amont du Kawasaki, on aurait
peut-être été jadis tenté, du moins en France,
par l’obsolète «congestion cérébrale». Une
entité qui connut une heure de gloire présidentielle avec Félix Faure. C’est là une histoire réelle, aussi riche d’enseignements que
le sixième épisode de la huitième saison de
Dr House. Une histoire qui démontre à tous
(hommes et femmes) que la petite mort n’est
jamais très loin de l’autre. Surtout aux femmes. Tout se noue dans le Salon d’Argent du
palais de l’Elysée, à Paris, le 16 février 1899.
La presse de l’époque – qui connaissait ses
lettres – parla aussi à cet endroit d’un «trop
grand sacrifice à Vénus».
Félix Faure voit le jour en 1841 sous le
signe du Verseau. Il a onze ans quand sa mère
meurt de tuberculose. A l’âge de vingtquatre ans, il épouse (à Amboise, Indre-etLoire) une prénommée Marie-Mathilde «de
laquelle il aura deux filles». L’une des deux,
sans enfant, fondera la Ligue fraternelle des
enfants de France. Franc-maçon, Félix Faure
entre vite en politique, s’oppose à Napoléon
III. Il a cinquante-quatre ans quand il est élu
président de la IIIe République française. Il
en a cinquante-huit quand il trouve la mort
au Palais de l’Elysée, en compagnie de Marguerite Steinheil, dite «Meg», épouse étiquetée volage. Il se raconte que, soucieux
d’une obligation de résultat, le président
français dut abuser d’une cantharide officinale, alors tenue pour être un aphrodisiaque
assez puissant. Il est acquis que son chef du
cabinet, alerté par des cris féminins, se précipita et découvrit le président sans autre
vêtement qu’un gilet de flanelle, râlant, allongé sur un divan les mains crispées dans
la chevelure de Meg. Cette dernière, entière-
ment nue, réajustait alors ses vêtements en
désordre. L’hypothèse d’un début de fellation est la plus plausible. Félix Faure mourut
quelques heures plus tard. Le terme officiel
de «congestion cérébrale» fut retenu.
On rapporte encore que, le 16 février 1899,
l’abbé Herzog, curé de la Madeleine, fut vite
mandé par Mme Félix Faure. Urgence : administrer coûte que coûte les derniers sacrements. Sans attendre son arrivée, il fut remplacé par un prêtre de passage devant l’Elysée. Aussitôt le prêtre – alors jamais loin du
médecin – s’enquiert : «Le président a-t-il toujours sa connaissance ?». Réponse des gardiens
du temple républicain : «Non, elle est sortie
par l’escalier de service !». En France, cette
répartie fait toujours sourire.
Que ferait aujourd’hui le Dr House d’un tel
dossier ? Sans doute observerait-il qu’Amboise (Indre-et-Loire) héberge le site producteur du premier érectile moderne pour
l’ensemble du Vieux Continent. Et que ferait
l’abbé Herzog s’il découvrait ce que fait
Gregory House dans le sixième épisode de
la huitième saison à propos d’un coup dans
un testicule adolescent ? Où l’on découvre
au final, que les services sociaux devraient
toujours s’intéresser aux clowns en herbe.
Où l’on voit aussi un joli cas, intrafamilial et
doublement contre nature, de transmission
de Treponema pallidum. A la fin du XIXe siècle,
comment évoquait-on l’existence de la syphilis dans les confessionnaux catholiques ? Sans
parler des conditions de sa transmission.
Aujourd’hui, devenus automatiques, les antibiotiques soignent. Guérissent-ils toujours ?
L’abbé Herzog ne saurait pas répondre et les
confessionnaux ont disparu. Quant à Gregory House, il va bientôt mourir, vraisemblablement sans bénéficier des derniers sacrements.
(A suivre)
Jean-Yves Nau
[email protected]
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