Revue Weleda 127
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N°127 PRINTEMPS 2009 La Grenade, reine de beauté Comment recréer un lien avec la Nature Editorial Sommaire Retrouver des sensations vraies Opter pour le naturel, consommer des éco-produits entre peu à peu dans nos habitudes. Les solutions plus éco-responsables ne manquent pas en matière de gestion des déchets et des ressources, de construction, etc., à l’échelle individuelle et collective. Nous savons de mieux en mieux comment préserver la nature. Pourtant, il reste encore fort à faire en faveur de cette planète que nous aimerions léguer propre à nos enfants. 6 On parle beaucoup de consommation durable. Certes, c’est une nécessité, mais est-il juste de tout ramener à un problème de consommation ? Comme l’a souligné Jean-Marie Pelt dans une interview publiée par Nouvelles Clés* : « il y a un problème fondamental de valeurs. Tant que nous sommes dans une civilisation de l’objet (…), nous restons dans un système où les valeurs écologiques auront du mal à s’incarner concrètement. Par conséquent, c’est au niveau des racines qu’il faut s’interroger. » Toute l’intelligence humaine – remarquable, au demeurant – mise en œuvre dans la recherche scientifique et les rouages économiques suffira-t-elle à sauver la nature ? Selon Jean-Marie Pelt : « la dimension contemplative, qui se cultive, sera absolument nécessaire pour faire un autre monde »*. Dans ce numéro de la Revue Weleda, nous avons invité Jean-Michel Florin à nous apporter son éclairage sur la question. S’inspirant de la démarche scientifique de Goethe, il nous fait toucher du doigt la nécessité du lien à cultiver avec cette nature qui est le substrat de notre vie. Réapprendre à regarder la nature, retrouver des sensations vraies, rafraîchir ses sens, voir avec les yeux et le cœur, descendre de l’ « étage supérieur » de la tête pour investir tout son corps, être vraiment là, présent, retrouver ses racines, se relier aux sources de la vie, de cette même vie qui circule dans la sève des plantes, palpite dans le corps des animaux et vibre dans nos cellules. Une vie qui peut s’épuiser si nous ne la préservons pas. Or l'on ne préserve que ce que l'on aime … Cultiver son lien avec la Nature, c’est aussi vivre au rythme des saisons. Notre vie s'écoule également selon des rythmes. A l’instar de la Nature, nous avons notre printemps, notre été et notre automne : au point d’équilibre entre jeunesse et vieillesse. Une belle saison pour les femmes, dont la beauté rayonne de l’intérieur, enrichie des expériences de la vie et à qui nous dédions tout particulièrement cette revue. Pour la Rédaction Danielle Friedrich *« Sauver la nature revient à nous sauver nous-mêmes ! », interview de Jean-Marie Pelt, parue dans Nouvelles Clés, N°58, été 2008 : « 20 ans d’entretiens visionnaires ». www.nouvellescles.com La R e v u e W e le da est éditée par les Laboratoires Weleda – BP 152 – 68331 Huningue Cedex – Tel. 03 89 69 68 00 – www.weleda.fr Elle paraît en France depuis 1960. Sa fréquence de parution est actuellement de 3 numéros par an : au printemps (vers Pâques), en automne (vers la St-Michel) et en hiver (vers Noël). Elle est distribuée gratuitement sur abonnement. Pour l’obtenir, il vous suffit d’adresser votre demande par le biais du site internet www.weleda.fr dans la rubrique contacts/nos publications ou par e-mail au [email protected] ou encore en vous adressant aux Laboratoires Weleda – Service Consommateurs – BP 228 – 68332 Huningue Cedex – N° Consommateurs : 0 811 02 5000 (coût d’un appel local) de 9h30 à 12h–14h30 à 17h en précisant votre nom et votre adresse complète. Chaque auteur est respons able de ses propres articles. Toute reproduction de texte, d’illustration ou de photo doit faire l’objet d’une demande auprès de Weleda. Rédactrice en Chef : Danielle Friedrich. Mise en page : René Uhlmann. Photos : Angelika Salomon, Camille Stoos, Scorp Images, Alessandro Trovati, Frédéric Furgol, Richard Griffin, Frédéric Desmesure, Odilon Dimier, Gresei, Michael Peuckert, Aleksander Pilat, Ciaran Griffin, Image Source, René Uhlmann, Pascal Bastien, archives Clinique Ita Wegman, archives Weleda. Impression : Corlet Roto, F 53300 Ambrières-lesVallées. Imprimé sur papier Cyclus Print, 100% recyclé. 2 Revue Weleda 127 10 26 18 34 6 La maturité – une beauté qui rayonne 26 Chaque âge a sa beauté. A quarante ans, les femmes d’aujourd’hui croquent la vie à pleines dents. Elles prennent conscience de qui elles sont, et portent un regard plus lucide autour d’elles et sur leur vie. Jardiner, c’est établir une relation particulière avec la Nature. Un engagement se prend entre la terre et nous. Nous lui confions nos graines et nos maladresses ; elle nous offre ses fruits et nous fait grandir. Les mains vertes ont leur baume réparateur : la Crème aux Plantes médicinales Weleda. 10 La grenade, reine de beauté Pomme d’amour, symbole de beauté et de fécondité, la grenade fait partie des cultures les plus anciennes de l’humanité. L’huile de ses graines est particulièrement efficace pour le soin des peaux matures. Weleda l’a choisie pour ses nouveaux soins du corps régénérateurs à la grenade. 18 Notre lien avec la nature Qu’est-ce qui nous pousse à faire des efforts pour la planète ? Comment recréer notre lien avec cette nature qui nous est devenue étrangère ? 28 Mains de jardin Le rhume des foins Faites-vous partie de ceux que le retour du printemps incommode ? Souffrez-vous de cette affection liée à une allergie aux pollens ? Il existe des solutions naturelles pour vous soigner. 34 Le massage du bébé Des ballons gonflables et des poupées pour apprendre à masser les bébés : un cours donné aux élèves de l’Institut Régional de Formation en Puériculture de Strasbourg, fruit d’une rencontre avec Weleda. Revue Weleda 127 3 Actualités Marie Marchand-Arvier vice-championne du monde de Super-G La jeune skieuse de 23 ans, ambassadrice de Weleda depuis plus de 4 ans pour l’Huile de Massage à l’Arnica a offert une médaille d’argent en super-G à la France lors des Championnats du Monde de Ski à Val d’Isère 2009. Retrouvez-la sur www.weleda-sport.fr. A partir du 1er mai sur ce site, participez à notre jeu concours en partenariat avec Mondovélo. 1er prix : un V TT. Weleda au salon Planete durable La Parisienne : entraînez-vous avec Weleda Partenaire de cette course à pied féminine de 6 km qui aura lieu le 13 septembre 2009 au cœur de la capitale, Weleda vous propose son passeport « Entraînements Weleda à La Parisienne », soit 12 séances d’entraînement aux Bois de Boulogne et de Vincennes avec coach sportif de début avril à mi-septembre. Inscriptions à l’Espace Weleda, 10 av. Franklin D. Roosevelt, Paris 8e. Pour plus d’infos : www.weleda-sport.fr 100% d’electricite verte pour Weleda En février 2009, Weleda France a conclu un accord avec la société Hunelec pour bénéficier d’électricité verte certifiée RECS (Renewable Energy Certificate System) sur l’ensemble de son site de production en Alsace. Ce geste de soutien à des filières de production d’énergie renouvelable s’inscrit dans la politique de développement durable de Weleda France, qui bénéficie aussi de la certification ISO 14001 pour le management de l’environnement. 4 Du 2 au 5 avril 2009, vous pourrez retrouver Weleda au salon Planète durable, Porte de Versailles à Paris. 1er salon du développement durable, il a pour objectif de mettre à l’honneur l’éco-consommation dans notre vie quotidienne. www. planete-durable.com Compost bio-dynamique contre gaz a effet de serre Depuis l’automne 2008, Weleda PaysBas et Weleda Belgique compensent leurs émissions de CO2 en achetant des crédits carbone à la société néerlandaise Soil & More, qui dispose d’installations de compostage au Mexique, en Egypte et en Afrique du Sud. La méthode utilisée pour le compostage est directement issue de l’agriculture bio-dynamique. Tout en contribuant à la réduction des gaz à effet de serre, cette initiative permet d’améliorer la qualité des sols et des éco-systèmes et de soutenir les économies locales. Le groupe Weleda envisage une extension de ce projet à plus grande échelle. Revue Weleda 127 5 Point de vue la maturite Une beaute qui rayonne La belle saison de la vie des femmes : après quarante ans, riches des expériences de la vie, elles s’épanouissent ... Texte : Danielle Friedrich Photos : Frederic Desmesure/Signatures et Odilon Dimier/PhotoAlto 6 Revue Weleda 127 Chaque âge a sa beauté, son sens, ses joies. Après quarante ans, la femme d’aujourd’hui croque la vie à pleines dents. Elle bénéficie d’une grande vitalité tout en étant riche des expériences de la vie. D’un certain point de vue, elle gagne en force. Elle prend réellement conscience de qui elle est, et porte un regard différent autour d’elle, plus lucide et plus intense. Les premiers signes de l’âge lui rappellent que le temps passe, mais le rayonnement de la maturité lui donne la capacité d’éclipser ses premières rides. A l’approche de la cinquantaine et au-delà, libérée de certaines obligations, la femme épanouie peut trouver en elle une énergie jusque là insoupçonnée, qu’elle investit dans un nouveau projet de développement personnel ou spirituel, une nouvelle orientation professionnelle, un engagement social … Souvent, après des interrogations approfondies sur sa vie, son couple, son foyer, sa place dans la société. Oui, vous êtes belles, femmes de la quarantaine et de la cinquantaine, n’en déplaise aux idées reçues nourries par les modèles qu’a engendrés notre « culture » médiatique … Le paradoxe Certes, la maturité s’accompagne d’un processus de vieillissement. Mais comment pourrait-il en être autrement ? Au printemps succède l’été, puis l’automne, qui prodigue à l’être humain toutes les richesses de la terre sous forme de fruits … Il en va de même pour les fruits de l’expérience, comme l’a exprimé Annie Hubert, anthropologue et Directeur de Recherche au CNRS, dans son très beau livre « Eloge de la maturité – la belle saison de la vie des femmes »1. Bien sûr, le temps signe son passage et remodèle les contours du corps : « le miroir est bien là : il me renvoie une image de moi un peu plus floue, des traits quelque peu affaissés, un corps devenu moins ferme et moins tonique, qui se transforme lentement. Comme au moment de l’adolescence, j’ai vécu ces mutations avec curiosité. Cela fait partie du grand processus de la vie. Cela pourrait faire penser à un déclin, mais ce n’est qu’une étape : on devient autre chose, autrement. » 1 Revue Weleda 127 7 Point de vue Dans son bestseller « le mythe de la beauté » 2, l’activiste américaine Naomi Wolf parle des rides qui signent les pensées et les sentiments d’une vie. Celles qui rayonnent du coin de l’œil, fines lignes en éventail, racontent des années de sourires et de fous rires. Celles qui traversent le front entre les sourcils y gravent la concentration ou, lorsqu’elles le barrent à l’horizontale, l’étonnement, la joie, la compassion, l’écoute… Parler, embrasser, pleurer pendant des décennies dessinent autour de la bouche une fine trame semblable à une feuille en mouvement … Faut-il y voir avant tout une dégradation de la peau ? Faut-il effacer à tout prix tout ce vécu pour simuler la première jeunesse, en recourant au bistouri ou au botox ? Faut-il rester page blanche et lisse comme un livre qui ne raconte rien ? Les critères de la beauté Annie Hubert porte un regard sans concession sur les normes de la beauté omniprésentes dans notre champ visuel, et qui constituent une cause de frustration pour bien des femmes : « dans l’avalanche d’images qui marque notre quotidien, sur le mur des villes et dans tous les médias, la jeunesse est éclatante, lisse, omniprésente et, bien entendu, toujours belle, selon le modèle quasi unique de notre culture médiatique, hors duquel il n’y a point de salut. Cette beauté impersonnelle et inaccessible, nous n’y ressemblons pas, d’autant plus que ces images ont été retouchées, remodelées, virtualisées et optimisées sur des écrans d’ordinateurs. » Nous nous projetons constamment dans ces mirages de la beauté – dont le but est avant tout de nous amener à consommer toutes sortes de choses – et ils exercent un effet déformant sur la perception que nous avons de nous-mêmes. « Vieillir, particulièrement pour les femmes, serait mal. Le vieillissement, les rides, la perte d’élasticité, le poids seraient des ennemis insidieux, dangereux, voire mortels, car ils menacent notre bonheur. Il faut partir en guerre très tôt, combattre le vieillissement, et lutter avec énergie jusqu’au bout … Jusqu’au bout de quoi ? » 8 Revue Weleda 127 Toujours à l’affût des multiples manifestations de la beauté humaine dans les nombreux pays où son travail d’anthropologue l’a conduite, Annie Hubert a su trouver des mots simples et justes pour exprimer la beauté féminine : « c’est un mélange subtil où le mouvement, la personnalité et la voix fusionnent de façon harmonieuse. Même les corps les plus beaux doivent être « habités » par le regard, l’expression du visage, la pose, le mouvement, la manière de parler … » La beauté est plus une question de présence que de canons. Les cycles de la biographie La maturité est une période de la vie qui ne concerne pas que les femmes … chez les hommes, elle est plutôt bien venue. A l’apogée de la vie, période qui se situe entre 40 et 60 ans, la plupart des hommes et des femmes se voient au maximum de leur puissance, à supposer qu’ils ne souffrent pas de graves difficultés matérielles. Mais si l’on parle des meilleures années pour l’homme, ce serait le début du déclin pour la femme. Il est urgent de dépasser cette discrimination arbitraire … Au-delà de la différenciation des sexes, en observant ce qui se passe à ce moment de la vie d’un point de vue purement humain, on constate qu’émerge la question du sens. La perspective s’élargit, comme du sommet d’une montagne que l’on a longuement gravie. Après avoir jeté un regard en arrière, vers son passé, on est en mesure de porter de nouvelles interrogations sur ce que l’on a construit, on se met en quête de nouvelles valeurs, on cherche à connaître plus en profondeur la nature du monde, et en même temps sa propre nature. La question existentielle n’est plus « qu’estce que je dois faire dans la vie ? », que l’on se posait dans la jeunesse, mais « quelle est la valeur de ce que je fais dans la vie ? » Selon Rudolf Treichler, psychiatre allemand qui s’est beaucoup intéressé aux travaux de Rudolf Steiner sur les cycles de sept ans de la biographie humaine, la question fondamentale qui émerge vers 35–42 ans et se poursuit au-delà est : « comment accéder à l’essence du monde et à la mienne propre, comment réaliser mon être dans le monde ? » 3 Au point d’équilibre entre jeunesse et vieillesse, il est possible de faire émerger en soi une nouvelle faculté de l’âme, que Steiner a appelée « âme de conscience ». Elle permet de pénétrer davantage dans les expériences de la vie, pour les « éclairer » de l’intérieur. « L’âme de conscience vit à partir de son centre lorsqu’en elle ce qui est éternel répand sa lumière. » Grâce à elle, notre pensée s’émancipe, nous pouvons nous percevoir et rencontrer le monde, l’Autre, différemment. Cette évolution n’est possible qu’à partir du moment où notre courbe biologique commence à s’infléchir. Notre conscience s’éclaire davantage dès lors que le bouillonnement de la vie se calme. Quelque chose en nous ne demande qu’à grandir. Mais contrairement à la puberté, qui modifie aussi complètement notre relation au corps, cette maturation ne se fait pas automatiquement, il faut en être l’acteur conscient et agissant. C’est cette possibilité de transformation de l’être avec le vieillissement du corps qui donne à celui-ci tout son sens. Faire la paix avec soi et respecter son corps Accepter son âge ne veut pas dire pour autant se résigner, bien au contraire. C’est porter un regard bienveillant sur soi tout en s’occupant de soi. Si le ralentissement des processus de régénération est un phénomène naturel, l’accélération du vieillissement, liée au stress et à une hygiène de vie défaillante, ne l’est pas. Il est tout à fait possible et souhaitable de prévenir un vieillissement précoce en prenant des habitudes saines en matière d’alimentation, de soin, d’activité physique et de repos. Des repas équilibrés riches en fruits et légumes frais – le fameux régime crétois, par exemple –, ainsi qu’une activité physique régulière et suffisante, mais sans excès, sont indispensables pour maintenir sa forme et sa santé, sa ligne et une belle peau. Tous les experts s’accordent au sujet des bienfaits de la marche pour la souplesse du corps, le système cardio-vasculaire, le métabolisme des graisses … A cela s’ajoutent des soins de la peau naturels et régénérateurs, pour soutenir les échanges vitaux au sein du tissu cutané … et aussi s’accorder quelques instants de tendresse, des gestes doux et réconciliants. Sans oublier le sommeil : c’est pendant que nous dormons que nos cellules se régénèrent. Il existe toute une littérature à ce sujet, où l’on peut trouver des conseils utiles, même s’il s’agit avant tout d’une question de bon sens. Pour finir, voici un dernier message d’Annie Hubert ; il est très simple : « votre apparence est belle dès lors que vous êtes en accord avec vous-mêmes. L’élégance, c’est l’aisance que l’on a avec soi-même et son corps. » 1. Eloge de la Maturité. La belle saison de la vie des femmes, Annie Hubert, Editions Aubanel, 2005. (Ce livre n’est plus disponible en librairie, mais sur internet.) 2. The Beauty Myth – How images of beauty are used against women, Naomi Wolf, HarperCollins Publishers, 2002 3. Les troubles psychiques au cours de la vie, Rudolf Treichler, Editions Triades. Disponible en librairie ou sur le site www.editions-triades.com La beauté, c’est un mélange subtil où le mouvement, la personnalité et la voix fusionnent de façon harmonieuse. Revue Weleda 127 9 Dossier : La grenade La Grenade reine de beaute Pomme d’amour, symbole de beauté et de fécondité Texte : Danielle Friedrich Dossier technique : Corinne Naboulet Photos : Gresei, Michael Peuckert et Angelika Salomon 10 Revue Weleda 127 La grenade fait partie des cultures les plus anciennes de l’humanité : on la cultive depuis des millénaires dans les pays méditerranéens, au Moyen-Orient et en Inde. Elle apparaît dans de nombreux mythes comme symbole de vie, de beauté, d’amour, de fécondité et d’abondance. La légende veut que le prince troyen Pâris rendit hommage à Aphrodite en lui offrant une grenade. Avec le myrte, la rose et la pomme, la grenade fait partie des attributs de la déesse de l’amour et de la beauté. Dans la tradition persane, le grenadier est l’arbre du Paradis, l’arbre de vie. D’ailleurs, à propos du Paradis, selon certaines sources, le fruit donné par Eve à Adam dans la Genèse aurait été une grenade et non une pomme. La grenade apparaît à plusieurs reprises dans l’Ancien Testament : dans le Cantique des cantiques, dans l’Exode, et le roi Salomon la glorifia comme l’un des sept fruits de la Terre Sainte. En Chine, la tradition veut que l’on offre une grenade aux jeunes époux en guise de promesse d’une longue descendance. Au Maroc, les jeunes Berbères procèdent à un rituel divinatoire Le rouge colore la grenade à tous ses stades de développement, du bourgeon à la fleur puis au fruit. Revue Weleda 127 11 Dossier : La grenade pour connaître le nombre d’enfants qu’elles mettront au monde : en jettant une grenade à terre, dans un cercle, puis en comptant les grains expulsés hors du cercle. Des grains de vitalité couleur rubis De couleur jaune, rouge clair ou rouge profond, la grenade cache sous ses rondeurs le secret de la vitalité. Son écorce épaisse et coriace recouvre une multitude de pépins enrobés d’une pulpe rouge translucide, tendre et juteuse. On les appelle arilles. Ils valent à la grenade son nom, qui viendrait de l’ancien français pume grenate, autrement dit pomme grenue. Agglutinés en grappe, ils luisent au soleil tels des gemmes de rubis dès lors qu’éclate le fruit. La saveur à la fois douce et légèrement acidulée de la grenade est le résultat d’un équilibre harmonieux entre sucres et acides organiques. Son jus revitalisant est riche en vitamine C (avec un taux de l’ordre de 20%, bien supérieur à celui de nombreux fruits frais), en vitamines du groupe B, en minéraux et en oligo-éléments. Chacune de ses graines contient une goutte d’huile précieuse, aux propriétés régénératrices pour la peau. Capable de stimuler le renouvellement cellulaire et de réduire les tâches pigmentaires, elle est particulièrement indiquée pour le soin des peaux matures. L’analyse chimique révèle une grande richesse en acides gras mono et polyinsaturés : acide linoléique conjugué dont l’acide punicique est l’isomère majoritaire, et les acides oléique et linoléique aux propriétés hydratantes et assouplissantes particulièrement intéressantes. S’y ajoutent des phytostérols, qui stimulent la synthèse de collagène, des polyphénols et de la vitamine E aux pouvoirs anti-oxydants : un véritable cocktail de jouvence pour la peau. Un secret de beauté dévoilé Riche en symboles, gage de vitalité et de beauté, la grenade a inspiré nos services de 12 Revue Weleda 127 développement cosmétique. « Cela fait plus de trois ans que je pense à elle », avoue Leo Zaengerle, ingénieur chimiste et responsable du développement chez Weleda Suisse. « L’idée est née de la convergence de diverses approches : les résultats scientifiques très prometteurs sur les propriétés de l’huile de pépins de grenade, l’étude de la riche symbolique de ce fruit à travers les civilisations perse, égyptienne, hébraïque, grecque et jusqu’au Moyen Âge, et enfin, l’observation naturaliste selon la méthode goethéenne, que j’ai effectuée avec d’autres spécialistes. Finalement, le choix de cette plante pour le soin des peaux matures à partir de la quarantaine m’est apparu comme une évidence. » Si l’analyse chimique a levé le voile sur les propriétés régénératrices de l’huile de pépins de grenade, le fruit mûr nous parle déjà par son aspect. Le grand Paracelse n’a-t-il pas dit que la Nature est un grand livre, qu’il faut le parcourir pour en feuilleter les pages, autrement dit l’observer avec tous ses sens et tout son être pour comprendre les liens intimes qui l’unissent à l’homme… Le geste de la grenade : équilibre entre jeunesse et maturité Sortie d’un bourgeon couleur corail – qui fait penser à un petit fruit au lieu d’être vert comme la plupart des bourgeons – la fleur de grenade, rouge et chiffonnée, émerge d’une couronne de sépales charnus, et non pas fins et feuillus comme chez la plupart des plantes. Elle ne se répand pas non plus en parfum comme la plupart des fleurs, elle garde son secret. Quant au fruit, au lieu de passer du vert au rouge comme la plupart des fruits, il apparaît rouge au départ et verdit en grossissant, pour rougir à nouveau en mûrissant. On dirait que la tendance « fruit », qui est une dynamique centripète, toute en retenue et en concentration, s’annonce déjà aux stades précoces du développement. Mais ce n’est pas tout : à tous les stades de sa croissance, la grenade garde les traces de son passé, de sa jeunesse. Ainsi, son fruit rond se pare d’une couronne de sépales bien proéminents et pourvus d’étamines, ce qui est inhabituel puisque ces organes sont les attributs de la fleur. Alors que la plupart des plantes suivent un schéma de développement bien net, en passant par une succession d’étapes distinctes, la grenade vit dans la simultanéité et la continuité. Elle réussit à superposer le passé et l’avenir, en équilibrant de façon dynamique les processus de jeunesse et de maturation. C’est le secret de la grenade, que Weleda a choisi de mettre à contribution pour préserver la peau du vieillissement précoce. Prévenir le vieillissement cutané prématuré A partir de la quarantaine apparaissent les premiers signes de l’âge, la peau se régénérant plus lentement. Jusque là, les cellules cutanées se renouvelaient en une trentaine de jours ; après 40 ans, ce cycle s’allonge jusqu’à 40 à 60 jours. A cela s’ajoute une diminution de l’activité des glandes sébacées et sudoripares, qui entraîne une sécheresse cutanée accrue et une plus grande sensibilité aux agressions extérieures. La peau se relâche peu à peu ; elle perd en élasticité, en fermeté et en éclat. Ce processus normal fait que la peau a tout naturellement d’autres besoins après 40 ans. Peut-on ralentir ce phénomène ? Oui, dans une certaine mesure. Le vieillissement cutané a principalement deux causes : le vieillissement intrinsèque, d’ordre physiologique et génétique et lié au temps qui passe, et le vieillissement prématuré, lié à des facteurs extérieurs comme la pollution, les UV, les intempéries, le tabac, etc… C’est sur ce second facteur que l’on peut intervenir, en adoptant un mode de vie permettant d’agir globalement de l’intérieur comme de l’extérieur : une alimentation naturelle riche en anti-oxydants, une activité physique Les Grenades Dures grenades entr’ouvertes Cédant à l’excès de vos grains, Je crois voir des fronts souverains Eclatés de leurs découvertes ! Si les soleils par vous subis, Ô grenades entre-baillées, Vous ont fait d’orgueil travaillées Craquer les cloisons de rubis, Et que si l’or sec de l’écorce A la demande d’une force Crève en gemmes rouges de jus, Cette lumineuse rupture Fait rêver une âme que j’eus De sa secrète architecture. Paul Valéry modérée mais régulière, des moments de détente et de relaxation, et des soins quotidiens spécialement conçus pour les peaux matures, comme la nouvelle gamme de soins du corps à la grenade Weleda. L’huile de pépins de grenade bio, aide la peau à lutter contre les radicaux libres, facteurs importants de vieillissement cutané. Par de petits efforts réguliers, soutenus, on arrive à de grands effets : l’aspect de la peau s’améliore visiblement, elle est plus ferme, plus lisse, se régénère mieux. Mais au-delà de la quarantaine, la beauté d’une femme ne dépend pas seulement de l’état de sa peau, mais de sa présence, du rayonnement qui se dégage de toute sa personne. A cette période de la vie, des transformations profondes aux plans physiologique et psycho logique modifient l’image qu’elle a d’elle-même. En prenant conscience de sa force intérieure, elle renforce ce rayonnement, et cela se voit. Revue Weleda 127 13 Dossier : La grenade Les nouveaux soins du corps à la Grenade Weleda La grenade, source millénaire de jeunesse et de beauté, active le renouvellement cellulaire ; elle est hydratante, assouplissante, antioxydante… La grenade pour activer le renouvellement cellulaire P our permettre aux femmes d’épanouir pleinement leur beauté à partir de la quarantaine en répondant aux besoins spécifiques de leur peau, Weleda fait appel à l’huile de pépin de grenade bio, capable de capter les radicaux libres responsables du vieillissement cutané prématuré et de stimuler le renouvellement cellulaire. Dans la nouvelle gamme de soins du corps à la Grenade Weleda, elle est associée à d’autres huiles végétales et extraits végétaux pour un effet globalement anti-oxydant : huiles de 14 Revue Weleda 127 germe de blé, de noix de macadamia bio, de jojoba bio, de sésame bio, de tournesol bio et d’olive, extraits de flocons de millet et de pétales de fleurs de tournesol. Des huiles essentielles de davana, une plante médicinale du Sud des Indes, de néroli et de bois de Santal leur confèrent une note orientale, chaude et sensuelle. Les premiers-nés de cette nouvelle gamme sont l’Huile régénératrice à la Grenade et la Crème de Douche à la Grenade : deux soins quotidiens à utiliser sans modération pour une peau éclatante de beauté après 40 ans. Huile régénératrice à la Grenade Après la douche ou le bain, elle régénère significativement la peau grâce à sa richesse en actifs anti-oxydants. Sa formule naturelle stimule le processus de renouvellement cellulaire et protège la peau des effets des radicaux libres, cause principale du vieillissement cutané prématuré. Jour après jour, elle prévient le dessèchement de la peau et préserve son élasticité, son lissé et sa fermeté. Son parfum, à base d’huiles essentielles de davana, néroli et santal est une invitation à l’éveil des sens. Bio à plus de 70%, ce produit est certifié NaTrue✶✶ : cosmétique naturelle certifiée, majoritairement bio. Crème de Douche à la Grenade Sans savon, au pH physiologique, sa base lavante végétale particulièrement douce et 100% biodégradable respecte l’équilibre naturel de la peau. De texture onctueuse, enrichie en huiles végétales, elle préserve l’épiderme du dessèchement et apporte un réel confort cutané. Déployant des effluves d’huiles essentielles de davana, néroli et santal, elle fait de la douche un intense moment de plaisir. Ce produit est certifié NaTrue✶ : cosmétique naturelle certifiée. Pour plus d’info : www.natrue.fr En vente en pharmacie, parapharmacie, magasin de produits naturels et à l’Espace Weleda de Paris. Revue Weleda 127 15 Dossier : La grenade La Grenade bio de Turquie Weleda l’a choisie pour sa nouvelle gamme de Soins du corps régénérateurs à la Grenade. Texte : Ingrid Reissner et Danielle Friedrich Photos : Michael Peuckert et Angelika Salomon C ’ est du Sud-Est de la Turquie, au climat particulièrement doux, que proviennent les grenades dont Weleda a choisi les bienfaits pour sa nouvelle gamme de soins du corps. Les plantations se trouvent dans les environs de la ville côtière de Mersin. Le village de Karahacılı, à 300 m du niveau de la mer, en constitue le centre de gravité. Courant octobre, des tracteurs tirant des remorques chargées de fruits et de cueilleurs sillonnent les chemins poussiéreux pour acheminer la récolte vers les granges où les grenades sont triées avant de poursuivre leur périple. Là, des familles entières de paysans – hommes, femmes et enfants assis sur des cageots – s’affairent à emballer les plus beaux spécimens par un ou par deux pour les marchés de Turquie et pour l’export. Les fruits de second choix, moins beaux mais dont la qualité n’est pas moindre, seront pressés pour en extraire le précieux jus vitaminé. Selon le chef du village, un millier de paysans de cette vallée sont impliqués dans la culture de la grenade, et parmi eux, une cinquantaine 16 Revue Weleda 127 de familles en pratique la culture biologique. La vallée de Karahacılı est un lieu idéal pour cette culture tant par la nature de son sol que de son climat contrasté. Cuvette verdoyante et fertile, à laquelle on accède par une étroite cluse rocheuse, elle est située à quelques kilomètres seulement de la mer tout en étant protégée par une ceinture montagneuse qui s’élève jusqu’à 1000 m de hauteur. Au fond de la vallée comme sur les versants aménagés en terrasses, on y cultive partout des arbres fruitiers : essentiellement des grenadiers, mais aussi des citronniers, orangers et autres variétés de Citrus, des plaqueminiers (arbres à kaki), des abricotiers et des figuiers. Au cours des dernières années, le prix au kilo de la grenade n’a cessé de grimper, incitant de plus en plus d’agriculteurs à se convertir à sa culture. Aujourd’hui, la région connaît une pénurie en eau, alors que cette culture nécessite une irrigation importante. Ainsi, de nombreux paysans ont aménagé des réservoirs de fortune avec des bâches de plastique dont le bleu vif tranche dans le paysage vert intense de la vallée et où pointe aussi, ici et là, la blancheur des minarets. La récolte débute tôt le matin et s’effectue à la main, à l’aide de couteaux. Remci Genç est là avec sa femme Ülkü, leur fille et leurs deux garçons. Leurs plantations s’étendent sur 25 hectares, surtout des grenadiers. Chaque année, Remci élague les arbres à hauteur d’homme mais ils repoussent de plus belle et au moment de la récolte, il faut souvent grimper dans les hautes branches pour y atteindre les lourds fruits juteux. A eux quatre, ils devront remplir une centaine de caisses avant midi. Remci cultive deux variétés de grenades : la première donne des fruits gros et plutôt clairs, la seconde des fruits plus petits et d’un rouge plus profond. Ces dernières ont plus de valeur à la pièce, mais elles ont plus d’acidité. Après la récolte, les grenades sont acheminées pour y être transformées à Nigde, à 100km au Sud de la ville florissante de Kayseri en Cappadoce, par l’entreprise Göknur qui produit des jus de fruits et de légumes frais. Avant de passer dans la presse, les grenades sont encore une fois triées et leur pulpe est contrôlée par Fatma Akbulut, ingénieure agro-alimentaire au laboratoire d’analyse de Göknur. On ne presse que l’intérieur des fruits, qui sont d’abord épluchés par une machine. Au sortir de la presse, les grains ont viré au violet. Seule une petite partie passera au séchoir que la société a construit pour répondre aux besoins de Weleda. Après séchage, ils sont envoyés à la société allemande All Organic Trading qui se charge d’en extraire la précieuse huile pour Weleda. Il faut 500 kg de grenades pour produire 1 kilo d’huile. Ceci signifie que pour les 1500 kilos d’huile de grenade dont a actuellement besoin Weleda, il faut mettre en œuvre 300 tonnes de fruits frais. L’huile extraite des pépins de grenade prévient le vieillissement précoce de la peau. On presse le jus des grenades puis l’on extrait l’huile de leurs pépins. Revue Weleda 127 17 Ecologie Recréons notre lien avec la Nature Le problème de base de l’écologie est la motivation. Qu’estce qui nous pousse à faire des efforts pour sauver la planète ? Au-delà des nécessités et des mots d’ordre, il faut recréer le lien avec la nature. Texte : Jean-Michel Florin Photos : Aleksander Pilat, Odilon Dimier et Ciaran Griffin C onsidérons le déroulement classique de notre journée. Combien de temps, à quels moments sommesnous en relation avec la nature ? Au cours des dernières décennies, notre vie quotidienne a changé de manière radicale. Nous passons la majeure partie de notre temps à l’intérieur, dans un univers hyper mécanisé : écrans, véhicules et autres machines électroménagères ou industrielles. Une grande 18 Revue Weleda 127 Hêtre en Forêt Noire. Dessin à la plume d’Henri Ulrich. Paru dans Baumgestalten, Editions Urachhaus, Stuttgart, 1984. Ecologie partie des matériaux qui nous entourent sont synthétiques : du faux bois, des arômes, des odeurs, des couleurs artificielles ... Et pour nous promener, nous munissons nos sens de « prothèses » : appareil photo, jumelles et lecteur mp3, au cas où le chant des oiseaux serait trop monotone … Que nous arrive-t-il ? Avons-nous encore les pieds sur terre ou vivons-nous dans une bulle virtuelle ? Comment nous réapproprier notre expérience du monde ? Les conséquences de cette situation sont plus importantes qu’on le pense. D’une part, nous avons tendance à appliquer à la nature les règles issues du monde des machines, d’autre part la difficulté à entrer en relation avec la nature est devenue un tel problème que l’on parle déjà de « syndrôme de déficit de nature » aux Etats-Unis. Les allergies croissantes à toutes sortes de substances naturelles, au soleil, à l’eau, etc., constituent un autre symptôme de notre éloignement de la nature. Quand mon corps réagit de façon exagérée à une substance issue de la nature, c’est qu’il ne parvient pas à la « reconnaître ». Ainsi, il existe des bébés qui ne supportent plus la moindre alimentation naturelle, si bien qu’il faut les nourrir avec des aliments totalement artificiels, comme des cosmonautes ! Rendons-nous compte de ce que cela veut dire : à peine né, un être humain ne supporte aucun élément de cette terre sur laquelle il vient d’arriver et qui est le substrat de toute vie … La nature n’est pas une marchandise Aujourd’hui, il est courant d’opposer l’homme et la nature comme s’il s’agissait de deux choses différentes. Ce point de vue occidental est assez récent dans l’histoire de l’humanité. L’ethnologue Philippe Descola montre que nombre de peuples d’Amazonie considèrent les plantes et les animaux comme des frères de l’homme sans différence fondamentale. Cette séparation de l’homme et de la nature, qui a essentiellement débuté à la Renaissance avec l’évolution des sciences, est allée de pair avec une réification ou chosification de la nature, c’est-à-dire la réduction des êtres vivants à de simples objets. Déjà Descartes, au XVIIe siècle, considérait les animaux comme des machines. Cette conception a abouti à ce qu’on appelle la marchandisation : tout est devenu marchandise. Tout est à vendre : la terre, l’eau, l’air, la lumière, les plantes, les animaux, à tel point que l’on cherche aujourd’hui à évaluer le prix de la nature pour la protéger car ce qui n’a pas de prix n’a pas de valeur. Cependant, c’est en se détachant de la nature que l’être humain a pu s’individualiser. S’étant progressivement, au cours des générations, affranchis de la nature, puis de leur clan, de leur famille, voire de leur peuple, nos ancêtres se sont mis en quête de liberté individuelle. Profitant de ces acquis, chacun d’entre nous est, dans une certaine mesure, séparé du reste du monde, mais il bénéficie de la liberté de créer les liens qu’il choisit avec les hommes et la nature. Les mouvements d’émancipation de l’être humain (féminisme, antiracisme, anticolonialisme, etc.), issus de ce processus d’individualisation, se sont finalement étendus à des mouvements de protection de la nature. L’être humain a extrapolé l’exigence du respect des droits de l’homme à ceux des autres êtres vivants que sont les plantes et les animaux. Aujourd’hui, nous naissons sans ce lien instinctif à la nature qu’avaient nos lointains ancêtres. Elle nous est étrangère, surtout à nous, habitants des villes. Pour retrouver ce lien et le cultiver, il nous faut le vouloir consciemment. On ne protège que ce qu’on aime Réapprenons cette faculté essentielle : l’étonnement. 20 Revue Weleda 127 De plus en plus de personnes, généralement regroupées dans des associations de protection de la nature, s’engagent de façon délibérée à préserver des biotopes, des plantes et des animaux. Ce phénomène a débuté il y a environ un siècle. Cette aspiration s’exprime aussi à travers l’actuelle profusion de magazines, films, séjours nature, etc. Le bio est très à la mode, et Nature Deficit Disorder : une génération en manque de nature Dans son livre The Last Child in the Woods*, le journaliste et éditorialiste américain Richard Louv fait un troublant constat : de nombreux enfants, trop peu en contact avec la nature, souffriraient du « nature-deficit dis order », autrement dit d’un trouble déficitaire lié à une carence en nature. Études scientifiques et interviews de parents et d’environnementalistes à l’appui, il démontre les vertus du simple fait d’être dehors. Son livre est un vibrant plaidoyer pour un contact régulier et durable avec la nature. Pour en savoir plus : www.espaces.qc.ca/espaces/ html/rencontres/rencontres38.shtml *Paru en américain chez ALGONQUIN BOOKS OF CHAPEL, en 2006. pourtant, la destruction de la nature continue. Où est le problème ? Un premier constat : les résultats d’enquêtes sur l’effet des politiques d’éducation à l’environnement, débutées il y a une trentaine d’années, ont montré qu’il ne suffit pas d’expliquer aux citoyens, à grand renfort de vulgarisation scientifique, à quel point la nature est complexe, fragile, et qu’il faut la protéger. C’est-à-dire qu’il ne suffit pas de savoir pour vouloir changer son comportement. Chacun d’entre nous, s’il est honnête avec lui-même, sait très bien ce qu’il faudrait faire pour améliorer la situation écologique sur la planète. Mais, cherchons en nous-mêmes : qu’est-ce qui nous incite vraiment à changer de manière d’être et d’agir ? En général, l’élément déclencheur est un événement qui nous a touché au fond du coeur, la rencontre inopinée avec un être vivant, plante ou animal, avec lequel nous avons su entrer en contact. Il peut arriver que l’on se soucie beaucoup Revue Weleda 127 21 Ecologie Observer la nature comme Goethe : partir des phénomènes Au cours des 5 derniers siècles, en marge du courant dominant de la science matérialiste, un courant de penseurs s’est attaché à l’étude du vivant selon une approche non réductionniste. L’un des grands noms de cette mouvance est Goethe, qui, au XVIIIe siècle, développa une méthode d’observation phénoménologique fine et différenciée : partant des phénomènes, il observait une roche, une plante ou un animal selon des approches différentes, et sans jamais projeter dessus un modèle scientifique préétabli. Une plante ne se réduit pas à un mécanisme capable de produire de la chlorophylle à partir de la lumière solaire. Pour découvrir ce qu’elle est réellement, il faut observer comment elle déploie la richesse de ses formes à travers tous les stades de son développement. Elle ne se révèle que dans la durée, comme une partition musicale. Cette approche du vivant a été développée par tout un courant de pensée aux XVIII e et XIXe siècles. En Allemagne, on peut citer Herder, C. G. Carus, Novalis et tout le courant de la « Naturphilosophie » ; aux Pays-Bas, Louis Bolk ; dans les pays nordiques, Steffens. En France, certains auteurs romantiques comme Rousseau et Georges Sand ou des scientifiques comme Geoffroy St Hilaire se sont rapprochés de cette recherche. Aux Etats-Unis, des philosophes et naturalistes de la même lignée ont fondé le groupe des transcendantalistes, avec notamment Emerson et Thoreau, qui ont écrit des pages splendides sur la nature. A la fin du XIXe siècle, Rudolf Steiner se consacra à l’étude des travaux scientifiques de Goethe, pour en expliciter la méthode, ce qui fit l’objet de publications comme par exemple « la métamorphose des plantes »*, Aujourd’hui, des scientifiques comme les anglais Rupert Sheldrake et Henri Bortoft et l’allemand Wolfgang Schad s’inspirent de la méthode goethéenne pour élargir leur champ d’investigation au-delà des méthodes analytiques. * Editions Triades, Paris 22 Revue Weleda 127 plus d’une simple plante d’appartement avec laquelle on a tissé un lien que des nombreuses autres plantes de la forêt tropicale, que l’on sait menacées, mais que l’on ne connaît pas. Réapprendre à créer des liens avec la nature, telle est la condition d’une réelle attitude écocitoyenne, librement choisie. Il ne suffit pas de comprendre avec la tête , il faut aussi sentir avec le cœur. St Exupéry n’a-t-il pas dit : « on ne voit bien qu’avec le coeur » ? Eco-attitude : prise de conscience individuelle ou règles imposées ? Je veux évoquer ici une nouvelle tendance, que l’on appelle l’éco-attitude. Bien entendu, plus il y aura de consommateurs responsables et respectueux de la planète dans leurs gestes et attitudes au quotidien et mieux notre Terre s’en portera. Bien entendu, il est bon d’être informé sur les bonnes habitudes à prendre. C’est ainsi qu’au nom de l’éco-attitude, on voit fleurir une multitude de conseils et de directives en tout genre, partant généralement d’une bonne intention : éteignez la lumière, baissez le chauffage, faites ceci, faites cela. Mais quelle image de l’homme se cache finalement derrière cela ? Faut-il que nous soyons littéralement dressés pour devenir éco-responsables ? Les actes éco-citoyens doivent-ils être imposés par des lois, des règles, ou choisis librement ? De nos jours, la tendance forte de l’éducation à l’environnement est le ton de l’autorité, du commandement. Même si l’information et certaines obligations sont utiles et nécessaires, en allant jusqu’au « dressage », on rabaisse l’humain à l’animal. Ne l’oublions pas : dans « éco-responsable », il y a responsable. Il nous faut donc trouver une méthode nous permettant de nous relier activement à la nature pour que, peu à peu, nous nous sentions responsable d’elle. Auprès de mon arbre… Choisissez un grand arbre et mettez-vous à l’observer. En étant honnête avec soi-même, on se rend compte que seul devant son arbre, on ne sait pas vraiment comment établir un lien. La Observer le vivant en élargissant notre champ de vision Biodynamis, la revue de l’agriculture, du jardinage et de l’alimentation bio-dynamique en France, a consacré son hors-série n°5 à l’observation du vivant selon la méthode de Goethe. Elle s’applique aussi bien à la botanique et la zoologie qu’à la géologie et la météorologie, comme l’évoquent les auteurs de cet ouvrage. Au sommaire : •Goeffroy Saint-Hilaire et Goethe - la naissance de l’idée de l’évolution des espèces ; •L’approche goethéenne – vers un partenariat avec les êtres de la nature ; • Quelle importance a, pour nous, la terre ? •La lune, cet astre si contradictoire ; •La météorologie et les 7 processus de vie ; • Introduction à l’approche de la nature selon Goethe ; •Les animaux domestiques – une autre façon de les regarder •L’évolution des animaux •Le développement de l’enfant et l’évolution du règne végétal… Des contributions originales et non conformistes, qui élargissent notre champ de vision sur cette nature qui est le substrat de notre vie. Pour les passionnés de nature et les curieux de nature. O bs e rv e r le v i va nt, 80 pages, peut être commandé sur la boutique en ligne de www.bio-dynamie.org ou par courrier au Mouvement de Culture Bio-Dynamique (cf adresse page 24). Son prix : 5 € + 3 € de frais de port. nature ne nous parle plus directement comme c’était encore le cas pour Paracelse, qui lisait le « langage de la nature ». Le grand écrivain allemand Hermann Hesse décrit ce fait dans un très beau texte en hommage à Goethe : « d’autres époques, des époques anciennes à la conquête de la terre par la technique et l’industrie, ont été sensibles à la merveilleuse langue des signes de la nature, l’ont comprise et ont su la lire plus simplement et plus innocemment que nous. Cette sensibilité n’était absolument pas sentimentale. Le rapport sentimental de l’homme à la nature est relativement nouveau ; peut-être n’est-il né que de notre mauvaise conscience vis-à-vis d’elle … » 1 Alors, comment faire ? Devant mon arbre, un certain nombre d’idées toutes faites me viennent à l’esprit, selon mon niveau de formation scientifique et mon intérêt personnel : son nom, le fait que ses feuilles servent à la photosynthèse, des schémas de molécules, etc. Mais tout cela ne m’aide guère à me relier à l’arbre concret qui est devant moi, ici et maintenant. Pour véritablement « rencontrer » la nature, il me faut d’abord me libérer de tous les modèles intellectuels qui encombrent ma tête. Je dois créer un espace ouvert en moi pour accueillir ce que « dit » cet arbre à mes sens. Et il me faut réapprendre cette faculté essentielle : l’étonnement. Laissons à nouveau la parole à Revue Weleda 127 23 Ecologie Hermann Hesse : « les choses commencent avec l’étonnement et finissent aussi avec lui, et pourtant le chemin parcouru n’est pas vain… Chaque fois que j’appréhende par le regard ou un autre sens une fraction de la nature, qu’elle m’attire ou m’envoûte, qu’un instant j’en découvre l’existence, qu’elle se révèle à moi, … je ne fais rien d’autre que m’étonner à la manière de Goethe … » 1 Ainsi, tous mes sens en éveil, je découvre de multiples aspects de l’arbre observé : la compacité du tronc, sa densité, la rugosité de l’écorce, le mode de ramification des branches, l’épaisseur des rameaux, l’implantation des feuilles, leur forme, leur couleur … Dans un deuxième temps, je peux essayer de recréer intérieurement l’image de l’arbre en me remémorant toutes mes perceptions. En répétant régulièrement ces observations au fil des saisons et même au fil des années, je ferai l’expérience concrète de la croissance de l’arbre. Et, pas à pas, je me lierai toujours plus intimement à cet arbre ; j’aurai l’impression d’avoir fait connaissance avec un être qui vit, et plus seulement une chose. Je commencerai à le saisir de l’intérieur, à comprendre sa nature profonde … Ainsi, au lieu de se dissoudre dans un univers cérébral et froid, fait de représentations, de définitions, et de formules chimiques, mon arbre prendra toujours plus de relief, de texture, de couleurs, en bref, de vie … Des stages d’initiation Pour vous initier à cette méthode d’observation sensible de la nature, vous pouvez aussi suivre l’un des stages qu’anime JeanMichel Florin, conférencier et Rédacteur en chef de la revue Biodynamis. Pour toute information complémentaire : Mouvement de Culture Bio-dynamique - 5, Place de la Gare - F 68000 COLMAR - Tél : 03 89 23 35 49 - Fax : 03 89 24 27 41 www.bio-dynamie.org [email protected] Et finalement, si je poursuis ces observations régulièrement, comme le Petit Prince de Saint Exupéry avec sa rose, je me sentirai lié à cet arbre que j’aurai « apprivoisé » et je m’en sentirai responsable. Pour véritablement respecter la nature, il faut recréer des liens avec elle ; des mots d’ordre et des lois n’y peuvent suffire. Se régénérer par la rencontre avec la nature Ce faisant, on se rend compte que cette rencontre active, sensible, avec la nature apporte de multiples bénéfices : elle renforce le sentiment d’exister sur terre, nourrit et vivifie nos organes des sens hypersollicités, sacrifiés par la civilisation moderne . Cultiver sa faculté d’étonnement et d’émerveillement enrichit notre vie intérieure, et elle est bénéfique pour notre équilibre psychique. On se « pose », on s’apaise : c’est ici et maintenant, on prend le temps, on goûte au moment présent, intensément. On cesse pour un moment de courir après le temps perdu … En redécouvrant les rythmes de la nature, du cycle des saisons, on se ressource et l’on percevoit la réalité du temps qui s’écoule avec ses multiples nuances. Avec le temps, il arrive qu’une telle démarche éveille de nouvelles sensations, un écho intérieur : je sens que ce que je perçois dans la nature « extérieure » a quelque chose à voir avec ma nature « intérieure ». Comme le dit si bien le philosophe anglais Samuel Coleridge : « en regardant les objets de la nature, il semble que je cherche, que je demande en quelque sorte un langage symbolique pour quelque chose en moi qui existe déjà et pour toujours plutôt que d’observer quoi que ce soit de nouveau. »2. Ainsi je me sens moins coupé du monde avec lequel je crée des liens. Le chant printanier de la mésange, le bleu intense du bleuet, l’évanescence des petits nuages blancs commencent à me parler. Je découvre que la Nature se dévoile comme un être qui se développe dans le temps. 1. Hesse Hermann, Brèves nouvelles de mon jardin. Calmann-lévy 2005 2. Samuel Coleridge, Carnets Belin 1987. 24 Revue Weleda 127 « L’on va dans les étoiles mais on ne sait toujours pas ce qui se passe au bord du talus » Jean Giono Sorties Nature : comment observer ? Voici quelques idées pour se relier à la nature seul, en famille ou entre amis, issues des stages et activités pédagogiques de Jean-Michel Florin. • Un coin de nature Choisissez un endroit près de chez vous pour pouvoir y retourner régulièrement. Cela peut être ce que vous voyez de votre fenêtre. Observez ce même lieu pendant une demi-heure chaque mois. Pour cela, oubliez tout ce que vous savez, abandonnez tout préjugé, regardez d’un œil neuf les formes et les couleurs, comme si vous contempliez un tableau impressionniste. Contemplez la richesse des couleurs, les différentes nuances de vert … Un moyen très simple est de dessiner ce paysage : avec de l’aquarelle, des crayons, des pastels … Cela oblige à mieux regarder. Une simple esquisse suffit. Pas doué ? Cela n’a pas d’importance, c’est ce qui se passe en vous qui importe. Rafraîchissez votre vue : de temps à autre, fermez les yeux, faites l’effort de vous rappeler ce que vous avez vu pendant quelques instants, puis regardez à nouveau. Au bout d’une année, vous regarderez votre coin de nature d’une toute autre manière. • la croissance d’une plante Choisissez une plante sauvage au début du printemps : dans un coin du jardin ou même dans une jardinière (si vous vivez en ville). Observez-la régulièrement, chaque semaine, en l’esquissant et surtout en faisant l’effort de vous souvenir à chaque fois de son aspect au stade précédent. Vous serez étonné : tiens, la croissance s’accélère, tiens elle s’arrête de pousser, que se passe-t-il ? Un bouton. Que va-t-il en sortir ? En griffonnant des notes dans votre carnet de croquis, sur le temps qu’il fait, l’état du terrain, les plantes compagnes de celle que vous observez, vous créerez le journal de votre plante, que peu à peu vous apprivoiserez. Des croquis pour suivre l’évolution du paysage au fil des saisons. Revue Weleda 127 25 Spécial main verte C Jardiner, c’est établir une relation avec la Nature. MAINS DE JARDIN 26 Revue Weleda 127 itadin, je ne m’étais jamais imaginé un jour faisant du jardinage. Cela me semblait plutôt réservé aux personnes d’un certain âge, ayant acquis un savoir au fil des années. Je me suis rendu compte avec le temps combien je me trompais. Pratiquer le jardinage, c’est s’ouvrir à un monde jusqu’alors ignoré. C’est échanger avec d’autres, se transmettre tout un savoir-faire et un savoir-être. Chaque saison a ses rythmes et ses gestes. Retourner la première fois son coin de terre procure une vraie joie. Mais avant d’arriver à cela, il aura fallu se poser bien des questions : quelles seront la forme et l’orientation de mon jardin? Que planter, en quelle quantité ? Jardiner, c’est s’initier ; une métamorphose s’opère malgré nous, une intention positive, un engagement se prend entre nous et la terre. Nous lui confions nos graines et nos plants, nos maladresses et nos erreurs. En retour, elle nous offre ses fruits, et aussi une partie de nous-mêmes transformée. Le jardinage n’est pas simplement faire pousser, il nous fait grandir ! Jardiner, c’est établir une relation particulière avec la nature, faite d’équilibre et d’harmonie. Pour respecter la terre, l’apprenti jardinier apprend les techniques qui enrichissent naturellement le sol. Comme les anciens, il choisit le bon moment pour ses semis, plantations, tailles et greffes en fonction des cycles planétaires, en particulier de la lune. Bon nombre de jardiniers travaillant en biodynamie* constatent une nette amélioration de la qualité du sol et des légumes ! Il y a quelque chose de sensuel à travailler la terre. C’est solliciter tous nos sens, être attentif au temps, à ce qui se passe alentours … Ce matin, tôt, un rouge gorge s’est posé délicatement à côté de moi. Je n’osais plus bouger. Il voletait, de motte en motte, me regardant, sa petite tête de travers … Faire son jardin donne aussi envie d’écrire : le programme des cultures, le plan du jardin, les futures rotations, les astuces transmises par d’autres, des collages d’articles, des croquis… A travers ce journal, qui narre la vie de notre jardin, il devient aussi une part de nous-même, et fertilise notre esprit. Le jardin, c’est aussi la fête quand vient le moment de la récolte. Il ne s’agit pas de cueillir par brassées, mais de bien choisir ses légumes : les plus beaux, les plus mûrs. La cueillette est proportionnelle au besoin ; on prélève ce que l’on consomme. Si tout est mûr, tout sera conservé : confitures, conserves, entreposage au frais. Rien ne sera gaspillé. Le jardinage amène la mesure, pas la sur-consommation. Je ne pensais pas qu’un simple jardin pouvait, au fil du temps, nous communiquer autant de sagesse. Travailler la terre, c’est se reconnecter aux choses simples et vraies. Loin du virtuel, on se relie à l’essence même de la vie. Jean-Yves Udar * Calendrier des semis : fruit de 50 années de recherche de Maria Thun concernant l’influence du calendrier lunaire sur la croissance des plantes, ce guide pratique donne des conseils avisés pour les travaux au jardin selon les méthodes de la bio-dynamie. Il est édité par le Mouvement de Culture Bio-Dynamique – 5, place de la Gare – 68000 Colmar - Tél : 03 89 24 36 41 - www.bio-dynamie.org Crème aux Plantes médicinales Weleda La passion du jardinage met-elle vos mains à rude épreuve ? Essayez ce soin réparateur et protecteur entièrement naturel, concentré en extraits de plantes médicinales (pensée sauvage, camomille, romarin et calendula), dans une base riche en huiles d’amande douce et de tournesol et en cire d’abeille. Pour en savoir plus : www.weleda.fr Revue Weleda 127 27 Conseils : la rhinite allergique Au secours, c’est le printemps, voilà le rh ume des foins ! Si vous souffrez de rhume des foins, vous faites malheureusement partie de cette catégorie de plus en plus nombreuse de personnes que le retour du printemps, au lieu de les réjouir, remplit d’une appréhension résignée. Mais la nature ne recèle pas que des pollens. Elle nous donne également des plantes capables de soigner. Texte : Dr François Hibou. Photos : René Uhlmann L a rhinite allergique saisonnière, nom médical du rhume des foins, est considérée comme affection bénigne. Et pourtant elle « empoisonne », pendant de trop longues semaines tous les ans, la vie quotidienne de ceux qui en souffrent, par les éternuements incessants et épuisants, les démangeaisons du nez, des yeux, de la gorge, l’obstruction nasale complète gênant la respiration, les troubles du sommeil, la difficulté à se concentrer. C’est un médecin homéopathe anglais, Charles H. Blackley, qui découvrit le rôle déclenchant des pollens, à la suite d’expériences minutieuses poursuivies en solitaire de 1859 à 1877 dans sa maison à la campagne près de Manchester. Atteint lui-même de cette affection déjà connue à cette époque sous le nom latin de « catarrhus aestivus » (catarrhe estival) et en anglais sous celui de « Hay fever » (littéralement « fièvre des foins »), Blackley chercha à isoler quel facteur précisément causait cette affection dont il pouvait, dans une certaine mesure, 28 Revue Weleda 127 se protéger en respirant à travers une boîte garnie de plusieurs couches de mousseline. A l’aide d’adhésifs de surface déterminée, fixés à différents supports, dont ses propres lunettes et un cerf-volant, il détermina le rapport précis entre les quantités de certaines espèces de pollens, en particulier de graminées, et les symptômes dont il souffrait. L’histoire ne dit pas s’il élabora un traitement homéopathique du rhume des foins. Un adulte sur cinq en France Il fallut attendre le début du XXe siècle pour que l’on commence à élucider le phénomène immunitaire de l’allergie, qui consiste à réagir de plus en plus fort à une substance relativement anodine en soi, au lieu de l’éliminer ou de s’y habituer, comme on le fait par exemple vis-à-vis d’une bactérie ou d’un virus. Les pollens n’ont rien de toxique en soi, et la majorité des gens les tolère très bien. Si ces particules naturelles ne provoquent le rhume des foins que chez certaines personnes, c’est donc qu’il doit y avoir d’autres causes que les seuls pollens. Et c’est bien ce qu’a depuis longtemps maintenant confirmé la recherche. Les pays développés ont vu depuis un demi-siècle une augmentation spectaculaire du nombre de patients souffrant d’allergies respiratoires (rhume des foins, rhinite perannuelle ou asthme) : on considère qu’actuellement près du tiers de la population des pays à niveau de vie élevé est allergique, alors que la proportion n’était que de 10 à 15% il y a une vingtaine d'années … contre 1% au début du XXe siècle. On estime que près d’un adulte sur 5 en France souffre de rhume des foins, une proportion que l’on retrouve à peu près dans tous les pays riches. Est-ce donc la richesse qui rend allergique ? John Bostock, médecin anglais qui le tout premier décrivit en détail (il en souffrait également lui-même) le « catarrhus aestivus » en 1819, note que cette affection ne touche que les personnes de « classe moyenne ou supérieure », jamais de classe pauvre. Presque deux siècles plus tard, de très nombreuses études ont confirmé que les allergies prédominent dans les pays industrialisés à niveau de vie élevé, tandis qu’elles sont quasiment absentes dans les pays dits « en voie de développement ». Les pollens n’ont rien de toxique en soi. Le fait qu’ils provoquent le rhume des foins chez certaines personnes est lié à un terrain allergique. Les facteurs de l’allergie En dehors des pollens, de nombreux facteurs contribuent individuellement au terrain allergique. Les plus connus sont la pollution atmosphérique et le tabagisme actif ou passif. On connaît moins d’autres facteurs qui jouent dès l’enfance : l’absence d’allaitement maternel, la prise d’antibiotiques dans la première année Revue Weleda 127 29 Respirez en toute liberté ! Conseils : la rhinite allergique Un système immunitaire mal préparé et sur-sollicité L’une des théories actuellement en faveur est la théorie « hygiéniste » : les maladies infectieuses « classiques », fébriles, éduquent le système immunitaire. En leur absence, le système immunitaire se développe de façon biaisée, donnant naissance, très tôt dans l’existence, au terrain dit « atopique », ou allergique. Ce terrain repose sur le fait que le système immunitaire est en quelque sorte « sur-informé » et développe des modes de défense sophistiqués (des anticorps hyperspécialisés, appelés IgE) en 30 Revue Weleda 127 réponse à des substances d’apparence anodine qu’il est incapable de détruire. Ce mode réactionnel présente une forte analogie avec notre civilisation elle-même, qui réagit par la peur et des réactions inadaptées à une profusion d’informations que nous ne pouvons digérer. Rhinodoron CE spray nasal Au départ, un terrain allergique Il est également significatif que la rhinite allergique saisonnière ne survient pas complètement à l’improviste : elle est souvent le résultat de l’évolution d’un terrain allergique qui a débuté dès l’enfance, et qui se déroule typiquement en trois actes. Le premier est le plus souvent l’eczéma atopique ou « dermatite atopique du nourrisson ». Fréquemment déclenché par des aliments, il peut aller de simples « plaques » de peau sèche, jusqu’à recouvrir la quasi-totalité de la peau. Le deuxième acte apparaît vers 3 à 4 ans, lorsque dans environ 30% des cas, l’eczéma se métamorphose en asthme ou en « bronchites asthmatiformes » qui en sont une forme; l’allergène ne se trouve alors plus à l’intérieur du corps mais dans l’environnement immédiat : les acariens ou les moisissures de l’habitation sont fréquemment en cause. Le troisième acte est le rhume des foins. Il commence classiquement aux alentours de la puberté, parfois bien plus tard, vers la trentaine ou la quarantaine, quoiqu’avec l’épidémie actuelle on en voie aussi apparaître des cas chez des enfants de plus en plus jeunes. Il s’agit en quelque sorte d’une spécialisation du terrain allergique au niveau des muqueuses du nez et des yeux, qui sont des muqueuses liées à des organes des sens. Les allergènes déclenchants sont maintenant localisés dans l’atmosphère extérieure à l’habitation : ce sont les pollens d’arbres ou de fleurs, que l’être humain rencontre alors que, naturellement, avec l’allongement de la durée du jour, les premiers rayons de soleil, l’éclosion des fleurs, des papillons, il tourne ses sens vers la nature extérieure à nouveau active dans un tourbillon de vie. La nature « explose » et l’organisation neurosensorielle de l’être humain, excitée par les conditions extérieures, est alors particulièrement sensible à l’action , à l’Aloé vera d’origine biologique Humidifie les muqueuses et nettoie les fosses nasales Sans conservateur, sans gaz propulseur DM09/01 de vie, la diversification alimentaire précoce, le lait homogénéisé (à la différence du lait de ferme frais), une alimentation pauvre en « oméga-3 ». Il faut encore ajouter le stress sous toutes ses formes, depuis les inquiétudes et les soucis de la mère pendant sa grossesse jusqu’au téléphone portable qui vous fait sursauter en sonnant inopinément. Cependant aucun de ces facteurs pris isolément n’explique cette augmentation massive des allergies. Il n’y a que peu d’allergiques dans les mégapoles hyperpolluées du « tiers-monde » et, inversement, les enfants des pays développés vivant en milieu rural ne sont pas globalement moins allergiques que les petits citadins. C’est véritablement le mode de vie contemporain dans les pays riches dans son ensemble, qui crée le terrain propice au développement des allergies. A contrario, dans une étude* réalisée en Suède, qui fit en son temps un certain bruit, il fut démontré que des enfants élevés dans un style de vie qualifié par les auteurs d’« anthroposophique » (ayant un plus faible taux de vaccination que les autres enfants, moins de prescription d’antibiotiques, un plus fort taux d’allaitement maternel, une alimentation plus fréquemment biologique, une scolarisation dans une école Steiner) avaient un plus faible taux de terrain allergique que des enfants vivant au même endroit mais avec un mode de vie « standard ». On sait également que les enfants vivant en compagnie d’animaux de la ferme présentent moins d’allergies. Dispositif médical Demandez conseil à votre pharmacien Revue Weleda 127 31 Conseils : la rhinite allergique des pollens. Tout se passe alors comme si, en réponse à l’explosion de la végétation et des pollens dans la nature extérieure, l’être humain répondait à cette provocation par ses propres réactions explosives. Une thérapie globale personnalisée La médecine anthroposophique considère l’être humain dans sa totalité, notamment dans sa relation globale avec son environnement. La façon d’envisager le diagnostic en découle, ainsi que la thérapeutique. Comme dans d’autres courants de médecine naturelle, le traitement de fond de la rhinite allergique en médecine anthroposophique prend en compte, par des médicaments et des mesures spécifiques, le terrain constitutionnel du patient, son état d’intoxication ou de surcharge digestive, ainsi que l’importante dimension du stress. Mais le point central du concept du traitement repose sur la prise en compte de cette dynamique singulière du rhume des foins : au niveau d’organes normalement dédiés à la perception, c’est-à-dire à l’intériorisation (les yeux, le nez), l’être humain manifeste de façon anormale une extériorisation centrifuge explosive : inflammation, éternuements, sécrétions. Si l’on veut rétablir le fonctionnement normal des organes des sens, il faut, en l’exprimant de façon imagée, inverser le courant et ramener tous ces liquides vers l’intérieur. On va donc rechercher dans la nature des plantes ou des parties de plantes exprimant un processus d’intériorisation qui s’oppose au processus centrifuge de la fleur productrice de pollen, tout comme au processus centrifuge du rhume des foins. On trouve par exemple cette dynamique dans le citron. Citron et coing contre le rhume des foins Le peintre de la renaissance Arcimboldo représente la saison d’hiver par un personnage grincheux formé d’une vieille souche portant en guise de cheveux quelques branches de lierre. Le bijou qu’il porte en sautoir n’est autre qu’un citron. Ce fruit qui effectivement mûrit en hiver représente bien par ses caractéristiques ce geste d’antipathie vis-à-vis du monde extérieur. Quel contraste avec le printemps aimable et souriant. Et en effet, le citron se construit en quelque sorte en s’excluant de son environnement méditerranéen chaud et ensoleillé, par une épaisse écorce protectrice : le zeste, riche en graisses et en huiles essentielles forme un cuir imperméable, tandis que le « blanc » est constitué d’une sorte de mousse isolante. A l’intérieur, à l’abri de l’air, se développent en direction du centre, les sacs qui accumulent le jus acide dépourvu d’arômes et de sucres. Arrivé à maturité en hiver, le citron peut rester sur l’arbre pendant des mois. Une fois cueilli, il laisse son écorce se dessécher et durcir superficiellement, gardant son jus intact à l’intérieur. On y associe un extrait de coing, fruit présentant des caractéristiques comparables à celles du citron. Bien que contenant comme les autres fruits charnus plus de 80% d’eau, le coing cru donne, lorsque l’on en pose un morceau sur la langue, une désagréable impression d’astringence et de sécheresse. La dynamique d’absorption des liquides que cela manifeste en fait un complément du citron. En médecine anthroposophique, on utilise depuis plus de 80 ans le citron et le coing dans le traitement du rhume des foins. Des extraits à différents degrés de dilution sont utilisés, soit par voie locale dans un but de soulagement des symptômes (Gencydo®, vendu en pharmacie), soit éventuellement par voie injectable sur prescription médicale dans le cadre du traitement de fond. Ainsi, lorsque notre organisme montre trop d’« empathie » avec les épanchements de la 32 Revue Weleda 127 * Alms JS et al. Atopy in children of families with an anthroposophic lifestyle. Lancet. 1999 May 1;353(9163):1485-8 Vous souffrez du rhume des foins ? Si vous vous soignez avec des médecines naturelles, prévoyez une consultation chez votre médecin pour un traitement de fond plusieurs semaines avant la date prévisible de vos allergies. Demandez conseil à votre • médecin ou votre pharmacien. Il existe des traitements homéopathiques de la rhinite allergique comme Gencydo® Si vous toussez ou êtes gêné pour respirer, il est impératif de consulter votre médecin car il peut s’agir d’asthme allergique. Pour éliminer les particules • allergisantes, nettoyez le nez en pulvérisant Rhinodoron® dans chaque narine 2 à 6 fois par jour. L’hiver, peint par Giuseppe Arcimboldo en 1573, exposé au Musée du Louvre. Il porte des citrons au cou. nature à la belle saison pouvons-nous faire appel aux propriétés contraires, également tirées de la nature. Des fruits que nous ressentons intuitivement comme « antipathiques », tels que le citron et le coing, recèlent dans leurs constituants la dynamique de concentration et d’intériorisation qui est utilisée en thérapeutique contre le rhume des foins. Avec cet exemple, la nature nous montre une de ses lois générales : certains processus naturels sont apparentés à certaines pathologies humaines, mais les processus inverses sont également présents dans la nature, et l’on peut les utiliser en thérapeutique. Suivez la « météo •pollinique » de votre région et les cartes nationales (par exemple sur le site du Réseau National de Surveillance Aérobiologique : www.pollens.fr/accueil.php) Les allergies de fin d’hiver ou début de printemps sont liées aux pollens d’arbres (cyprès, aulne, noisetier, bouleau, chêne), les graminées arrivent vers mai-juin. des lunettes de soleil • afinPortez de limiter le contact des pollens avec les yeux. Aérez brièvement votre • habitation, de préférence en l’absence de vent. Dormez en gardant les • fenêtres fermées, pour éviter l’apport d’air extérieur en fin de nuit (vers 4 et 5 h). vous partez en congés minimiser les pol• auSiprintemps, • lensAfindansde votre optez pour un chambre à séjour à la mer ou à la montagne, où le pollen est moins abondant. Une taille rigoureuse des • haies de cyprès, ainsi que la tonte à ras de votre pelouse (à faire effectuer par une personne non allergique !) minimise les productions de pollens (cyprès, graminées) coucher, laissez les vêtements à l’extérieur, et faites une toilette complète (cheveux compris) avant de vous coucher. Veillez à équilibrer votre • alimentation et votre flore intestinale. Le rhume des foins est souvent aggravé par des allergies alimentaires simultanées. Limitez les causes de stress ou faites • et détendez-vous • duPromenez-vous pour mieux sport quand l’air contient moins de pollens, par exemple après la pluie. vous protéger contre les agressions extérieures. Revue Weleda 127 33 Initiative Cours de massage du bébé pour les auxiliaires de puériculture. Le massagE DU Bébé Depuis trois ans, l’Institut Régional de Formation en Puériculture de Strasbourg intègre dans la formation de ses élèves une demi-journée consacrée au massage du bébé. Cette formation est assurée par Isabelle Gambet Drago, masseur kinésithérapeute, à l’initiative de Weleda. Texte : Félicie Caugek. Photos : Pascal Bastien O n va faire en 3 heures ce qu’on apprend normalement en deux jours. L’idée est de vous donner une approche de ce qu’est le massage du bébé pour que vous puissiez ensuite faire votre chemin ». Face à la formatrice, une trentaine d’élèves auxiliaires de puériculture -toutes des femmes-, certaines très jeunes, d’autres déjà mères de famille. « Moi je suis maman de 4 enfants âgés de 6 à 11 ans et je les masse depuis qu’ils sont nés ! Et vous, est-ce que vous avez des enfants ? Est-ce qu’il vous arrive de les masser ? », Petits sourires dans l’assemblée, haussements d’épaules … Isabelle Gambet Drago entre dans le vif du sujet avec simplicité et complicité. Son cours n’est surtout pas l’énoncé magistral d’une technique, il s’adapte au public concerné. Toutes ces femmes réunies ont sûrement un vécu à raconter. « Il y a quelques années on n’entendait pas parler de massage du bébé. Comment voyez-vous cela aujourd’hui ? Un effet de mode, une redécouverte ? » Une élève se 34 Revue Weleda 127 lance : « Moi j’ai une fille de 16 ans et à l’époque où elle était petite on en parlait déjà un peu ». Une autre : « et puis aujourd’hui on parle beaucoup plus de la relation mère-enfant ». Et encore : « si le massage fait du bien aux adultes, pourquoi ça ne ferait pas du bien aux enfants ? ». La discussion est engagée. « C’est vrai, le massage des adultes prend de plus en plus de place : on a besoin de se réconcilier avec le corps. Cela est lié au stress, à notre mode de vie. On assiste à une redécouverte du massage et quand le massage touche les mamans, elles ont envie de faire la même chose avec leur bébé », poursuit la formatrice. Une histoire du massage Cette réalité mérite un détour par l’Histoire : du Moyen-âge imprégné d’une culture de la transmission du massage à l’intervention de l’Eglise qui voit d’un mauvais œil la présence des petits garçons aux bains publics avec leur mère … A l’époque de la Renaissance le massage dit « spontané » disparait avec l’arrivée de la médecine : il y a désormais des savants et des incultes ... Voilà donc des parents « ignorants » pour qui l’intuition n’est plus une référence, ils ne cherchent plus la réponse chez eux mais auprès du médecin. Pourtant, le massage c’est précisément ce qui aide les parents à se rassurer. « Le toucher est accessible à tout le monde et c’est vous qui êtes les mieux placées pour le dire, parce que c’est à vous que les mamans vont s’adresser en maternité. Vous avez le privilège et le rôle de leur dire : faites-vous confiance, vous savez ! », affirme la kinésithérapeute. Massage contenant, massage glissant Des mains posées sur des ballons, des doigts qui cherchent la bonne position… « Détendus, les doigts ! Il ne doit pas y avoir de creux dans la paume de la main ! » Etonnante scène de recherche d’équilibre : les élèves apprennent à poser la main sur un corps de bébé. Le ballet est coloré comme une fête d’anniversaire. « Pensez à détendre le bras, le poignet doit être souple ». Suite de l’exercice : passer le ballon d’une main à l’autre. Que se passe-t-il si on le fait vite ? « Ca effraie », dit une élève, « on est moins sûre et ça empêche de respirer ». Comme une musique où il n’y aurait pas de silence. « Quand vous massez le bébé, le rythme est très important. Il y a le moment où on lui donne une information et le moment où il l’absorbe. Si on va trop vite on stresse le bébé au lieu de le détendre. » Isabelle Gambet Drago avance par petites touches dans son enseignement. Elle distille délicatement et par l’expérience l’essence même du massage, le toucher avec bienveillance. Et la pression ? Quelle pression doit-on exercer sur le corps d’un nourrisson ? « Légère ! dit une élève Revue Weleda 127 35 Initiative Interview de Nicole Dreyer, directrice de Elles jouent encore à la poupée : juste le temps d’apprendre les bons gestes pour masser les bébés. – Oui mais légère comment ? – Comme des caresses – Des caresses ? Essayez de masser votre bras du bout du doigt, ça chatouille ! Faites pareil avec la paume de la main, c’est plus agréable : c’est comme cela qu’il faut masser. La bonne pression, c’est celle qu’on exerce en fin de grossesse lorsqu’on pose ses mains sur le ventre. Vous voyez, c’est quand même lourd ! » Encore un exercice. Sans ballon cette fois. On offre une pression avec la main, dans le vide. Il faut ressentir la masse présente. « On sent la chaleur ! », s’exclame une élève. – Et c’est quoi cette chaleur ? – Du magnétisme, de l’énergie … – Et pourquoi je vous fais travailler cela aujourd’hui ? – « Parce que masser, c’est donner. » Une autre élève : « On donne et on prend aussi ». Isabelle Gambet Drago : « oui ! Masser, c’est échanger de l’énergie. Le bébé a besoin de chaleur et le massage commence avant le toucher. Avant même de toucher bébé on est déjà en communication avec lui. Cela se joue dans l’intention qu’on a. Le but n’est surtout pas de pomper l’énergie du bébé. Alors, à votre avis, quelle est l’importance du toucher ? » Les réponses fusent : « C’est vital ! », « Ça permet de connaître les limites de son corps ! », « Ça rassure ! » 36 Revue Weleda 127 – « C’est vrai, on va développer une communication entre celui qui reçoit et celui qui donne. C’est vraiment l’essentiel à retenir pour le massage du bébé. Il a encore d’autres effets bénéfiques : apaiser, améliorer le sommeil et la digestion, développer les défenses immunitaires et la fonctionnalité des organes ». Voilà les élèves stimulées elles aussi par un cours dense et captivant. « Mais si on masse mal, on ne risque pas de faire du mal au bébé ? » – Non, rassure la formatrice, si on donne avec le cœur il n’y a pas de risque. C’est mieux si on a une bonne technique mais le plus important c’est d’être présent. Le risque c’est de trop masser et de saturer le bébé, ça le rend nerveux et l’effet est inverse. – Quel est le meilleur moment pour faire un massage ? – Théoriquement 1h30 après le repas et à un moment où le bébé est réveillé. Dans la réalité chacun s’adapte ! l’Institut Régional de Formation en Puériculture (IRFP) des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg depuis 1975. L’IRFP de Strasbourg est l’un des instituts en France à former au Diplôme d’Etat d’infirmière puéricultrice (spécialisation) et au Diplôme d’Etat d’auxiliaire de puériculture (formation initiale). Dans les deux cas, la formation dure une année et s’adresse à des professionnels qui travailleront auprès des enfants et de leur famille, depuis la naissance jusqu’à l’adolescence, aussi bien en secteur hospitalier (maternité, néonatologie, pédiatrie, pédopsychiatrie…) qu’en secteur extra hospitalier (Protection Maternelle et Infantile, santé scolaire, Aide sociale à l’enfance, structures d’accueil de la Petite Enfance, crèches, multi accueils …) D Poupées et doudous Pour la dernière partie du cours, les ballons sont laissés de côté. Les poupées surgissent des sacs, quand ce ne sont pas de grands doudous en forme d’éléphant ou de personnages de dessins animés ! Des supports originaux pour une étape pratique qui commence par les manipulations précédant le massage. « Si on est à l’aise pour prendre bébé, le déshabiller, on est à l’aise pendant le massage. Sortir bébé de son lit, c’est déjà du massage », affirme la kinésithérapeute. Isabelle Gambet Drago révise ces petits gestes qui font appel aux réflexes physiologiques du bébé avant de dévoiler la « position magique* », un face à face avec le bébé qui permet de demander à l’enfant s’il est prêt pour un massage. Les gestes précis du massage lui-même sont abordés rapidement. Juste une évocation pour ouvrir un champ d’apprentissage. Libre à chaque élève de pousser plus loin son désir de connaissance et l’envie de transmettre à son tour cette confiance qui doit revenir aux parents. * à découvrir dans le guide du massage bébé, disponible gratuitement sur www.weleda-bebe.fr (rubrique conseils). Nicole Dreyer, directrice de l’Institut Régional de Formation en Puériculture de Strasbourg, seul institut de France à enseigner le massage du bébé. Le toucher est considéré comme une clef essentielle du lien d’attachement mère-enfant. epuis deux ans les élèves de votre institut bénéficient d’un cours sur le massage du bébé. Cet enseignement est spécifique à l’institut de Strasbourg. Comment en êtes-vous arrivée à proposer ce module aux élèves ? C’est la suite logique d’une réflexion qui a commencé dans les années 70. Dès cette époque, nous avions pris conscience que l’enfant doit être respecté en tant qu’être humain et qu’il était indissociable de son histoire, de sa culture et de son environnement. Ainsi les parents prenaient une place centrale et ils étaient reconnus comme les premiers éducateurs. Il faut se replacer dans le temps – aujourd’hui, cela paraît une évidence – mais en 1970, les enfants étaient passés par les « guichets » pour entrer en crèche, les enfants hospitalisés avaient droit à 2 fois deux heures de visite des parents par semaine et souvent derrière des vitres : l’enfant était un corps à soigner, un objet de soin. Dès cette époque, l’enseignement des pratiques professionnelles visait à aborder les soins dans une globalité avec une prise en compte du contexte physiologique, psychologique, social, économique, culturel et surtout en donnant une place centrale aux parents. Il s’agissait de les accompagner dans leur fonction éducative et non de les « modeler » pour qu’ils deviennent conformes aux références dominantes de la société. Revue Weleda 127 37 Initiative L’IRFP de Strasbourg est-il par cette démarche différent des autres instituts ? Nous avons sans doute été précurseurs ! Très tôt – peut-être trop tôt ? – nous étions sensibilisés à l’éveil des 5 sens, à la douleur de l’enfant, au respect des rythmes de l’enfant … En 1975 tout le monde se moquait de nous. On nous prenait pour des fous, des féministes, des soixante huitards ! Certains nous reprochaient d’entretenir la sensiblerie chez les élèves. Nous militions pour revenir à une prise en soin naturelle, autour de la naissance notamment, en demandant d’éviter le bruit, la lumière, pour limiter les agressions du nouveau-né. Nous dénoncions déjà cette trop grande médicalisation qui oublie l’être humain. On nous reprochait la « psychologisation » mais dans le fond ce sont les valeurs humanistes qui dérangeaient. Cette voie que vous choisissiez était-elle nourrie par votre propre expérience ? En effet, ces réflexions étaient issues de mon propre parcours. En 1970, année de ma spécialisation d’infirmière puéricultrice, j’ai effectué un stage de 2 mois au jardin d’enfants à l’école Saint-Michel de Strasbourg. J’y ai découvert la pédagogie Steiner, la démarche anthroposophe, l’eurythmie. J’ai eu la chance et le bonheur de travailler avec Mademoiselle Knecht. Et j’ai vu là sous mes yeux l’application théorique d’une intuition qui me taraudait depuis longtemps. J’ai donc continué à « creuser »… Entre 1970 et 1985, l’apport des sciences humaines a été fondamental dans la transformation des pratiques professionnelles. En 1978 se sont tenus à Paris les Etats généraux de la Petite Enfance. J’y ai découvert les travaux d’Emmi Pikler de l’Institut Loczy de Budapest. A la même époque Frédérick Leboyer osait affirmer que la naissance est une douleur pour l’enfant et les travaux des Drs Bernard. This et Michel Odent s’inscrivaient aussi dans ce courant humaniste. M. David et G. Appel publient le maternage insolite et F. Dolto ouvre la Maison Verte. Chacun à sa manière appelait au respect des rythmes de l’enfant, à l’individualisation 38 Revue Weleda 127 Informations médicales des soins, même dans l’accueil collectif et au retour aux valeurs humanistes dans la prise en soin. Ces apports théoriques seront rapidement enrichis par un concept supplémentaire, celui de la Culture. Les projets d’éveil culturels entrent dans les crèches à partir de 1989 et peu à peu trouvent leur place dans tous les lieux d’accueil du jeune enfant (musique – clown à l’hôpital …). Notre projet pédagogique s’appuie aujourd’hui sur 3 concepts, Santé, Education et Culture qui trouvent écho dans les valeurs de Weleda. Comment l’enseignement du massage at-il franchi la porte de votre institut ? Les principes éducatifs et de soins de la démarche anthroposophe rejoignaient naturellement nos enseignements des pratiques de puériculture. Nous nous sommes donc rapprochés des laboratoires de Weleda France et avons organisé des visites pour nos élèves, tout comme nous sommes allés dans des écoles Waldorf. C’est de ces rencontres successives qu’est né le projet d’enseignement du massage du bébé, pratique que les élèves peuvent soutenir durant leurs stages, particulièrement en maternité. Alors certes, le massage peut paraître un effet de mode. Mais dans les soins, le toucher a une place importante et cela quelque soit l’âge de la personne prise en soin. Entrer en relation avec l’enfant se fait par le regard, la voix, le toucher. Les professionnels de la petite enfance savent combien les soins de maternage sont du corps à corps. Ils savent aussi que pour la mère, le lien d’attachement passe par la relation corporelle. Or, nous sommes dans une société qui s’est éloignée de ces pratiques et quelques fois un réapprentissage est nécessaire. Les professionnels de la petite enfance pourront, par ces ateliers, se réapproprier les gestes, trouver la bonne distance par rapport aux enfants qui ne sont pas les leurs, pour ensuite accompagner les mères, les parents, dans leur rencontre avec leur enfant. Nouveau cycle de formation en soins infirmiers d’orientation anthroposophique A partir de juillet 2009 débutera la 3e promotion de cette formation professionnelle continue qui s’adresse aux infirmières et infirmiers diplômés de langue française. Elle se déroule sur 3 ans, à raison de 2 semaines par an (en été et en hiver) et débutera par une semaine complète du 4 au 11 juillet 2009. Les cours ont lieu à la Clinique Ita Wegman, près de Bâle, en Suisse allémanique. Cette formation, qui se caractérise par une approche globale de la santé du patient, comprend un enseignement théorique et pratique, notamment des thérapies dites externes (compresses, cataplasmes, enveloppements et bains ainsi que les effleurages rythmiques d’après les Docteurs Ita Wegman et Hauschka), à quoi s’ajoutent une initiation à l’art-thérapie et à l’eurythmie. Elle est assurée par des médecins, des infirmières et des thérapeutes d’orientation anthroposophique. Pour plus de renseignements, merci de prendre contact avec : Anne-Marie Malfroy – 4, chemin du Bâa – 68650 Lapoutroie – Tél : 03 89 78 35 47 – [email protected] ou Viviane Démarais – Maria Theresiastr. 10 – D 79199 Kirchzarten – Tél : (0049) 7661 90 93 752 Médicaments Weleda : suspension temporaire des collyres et de certaines ampoules injectables Suite à une décision des autorités sanitaires (AFSSAPS*), la production de certaines formes de médicaments Weleda est temporairement suspendue, au nom du principe de précaution, depuis le 20 février 2009. Sont concernés : les collyres et une partie des ampoules injectables. Certaines références seront à nouveau disponibles à partir de mai. Pour le reste, un délai d’au moins 6 mois sera nécessaire. Pour toute information complémentaire : [email protected] Tél : 0 811 02 50 00 Compresses, cataplasmes et enveloppements avec des substances naturelles. * Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé. Revue Weleda 127 39 Rubrik Un nouveau site internet pour l’Espace Weleda A partir d’avril, découvrez le nouveau site www.espace-weleda.fr qui vous mènera au cœur de l’Espace Weleda de Paris, avec •son aménagement haut-de-gamme mariant art et nature, • ses cabines de soin particulièrement spacieuses, pour un moment de ressourcement inoubliable, • ses ateliers de massage du bébé, de massage des seins, de remise en forme… • ses produits cosmétiques naturels et bio, ses objets et idées cadeau vendus en exclusivité… Un simple clic, et vous naviguerez dans ce lieu d’exception, ilôt de sérénité au cœur de la ville, entièrement dédié au bien-être. Espace Weleda – 10 avenue Franklin D. Roosevelt – 75008 Paris - Tél : 01 53 96 06 15 Mur végétal réalisé par Patrick Blanc, vasque et oeuvres de pierre par Yann Grégoire. 40 Revue Weleda 127