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Observatoire du Management Alternatif Alternative Management Observatory __ Fiche de lecture The White Man’s Burden William Easterly 2006 Guillaume Tellez – Novembre 2010 Majeure Alternative Management – HEC Paris – 2010-2011 Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 1 The White Man’s Burden – Why the West’s effort to aid the rest have done so much ill and so little good Cette fiche de lecture a été réalisée dans le cadre du cours « Grands Défis» donné par Denis Bourgeois au sein de la Majeure Alternative Management, spécialité de troisième année du programme Grande Ecole d’HEC Paris. Oxford University Press, Oxford, 2006 Première date de parution de l’ouvrage: 2006 Résumé : Les tentatives de développement des pays pauvres par l’intermédiaire de l’aide internationale depuis la Seconde Guerre mondiale et les indépendances se sont soldées par des échecs. La planification et les volumes de l’aide n’engendrent pas nécessairement le développement et peuvent même avoir les effets inverses. Il faut donc laisser aux acteurs locaux la possibilité de répondre réellement aux besoins réels des populations des pays censés être coincés dans une « trappe à pauvreté ». Mots clés : Aide, Développement, Pauvreté, Néocolonialisme The White Man’s Burden – Why the West’s effort to aid the rest have done so much ill and so little good This review was presented in the “Grands Défis” course of Denis Bourgeois. This course is part of the “Alternative Management” specialization of the third-year HEC Paris business school program. Oxford University Press, Oxford, 2006 Date of first publication: 2006 Abstract : The attempts to develop the poor countries through international aid plans have failed since the end of World War II and the independences. Planning and increasing amounts of aid do not lead to development and can even have counterproductive effects. One must leave the development to local actors so as to address the real needs of the populations of countries that are stuck in a so-called ‘’poverty trap’’. Key words : Aid, Development, Poverty, Neocolonialism Charte Ethique de l'Observatoire du Management Alternatif Les documents de l'Observatoire du Management Alternatif sont publiés sous licence Creative Commons http://creativecommons.org/licenses/by/2.0/fr/ pour promouvoir l'égalité de partage des ressources intellectuelles et le libre accès aux connaissances. L'exactitude, la fiabilité et la validité des renseignements ou opinions diffusés par l'Observatoire du Management Alternatif relèvent de la responsabilité exclusive de leurs auteurs. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 2 Table des matières 1. L’auteur et son oeuvre ..........................................................................................................4 1.1. 1.2. Brève biographie .........................................................................................................4 Place de l’ouvrage dans la vie de l’auteur ..................................................................4 2. Résumé de l’ouvrage .............................................................................................................6 2.1 2.2 Plan de l’ouvrage ........................................................................................................6 Principales étapes du raisonnement et principales conclusions .................................7 3. Commentaires critiques......................................................................................................10 3.1 3.2 Avis d’autres auteurs sur l’ouvrage ..........................................................................10 Avis de l’auteur de la fiche .......................................................................................10 4. Bibliographie de l’auteur ...................................................................................................12 Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 3 1. L’auteur et son œuvre 1.1. Brève biographie William Easterly est un économiste américain né en 1979 en Virginie occidentale, aux Etats-Unis. Il obtient un doctorat du MIT (Massachussetts Institute of Technology) en 1985 avant d’occuper un poste de chef économiste à la Banque Mondiale pendant seize ans, où il est notamment chargé des questions macro-économiques et de croissance. Entre 2001 et 2003, il travaille à l’institut Peterson, think tank privé à but non-lucratif et non partisan, et au Center for Global Development. Depuis 2003, il est professeur de sciences économiques à la New-York University. Dans ce cadre, il est aujourd’hui codirecteur avec Yaw Nyarko, chercheur ghanéen, du Development Research Institute de NYU (New York University). Il est par ailleurs coéditeur de la revue scientifique Journal of Development Economics. Spécialiste des questions de développement, il critique dans ses ouvrages les politiques d’aide internationale en direction des pays pauvres et cherche via son activité de recherche à élargir la communauté réfléchissant autour des thèmes économiques de croissance et de développement. Il est notamment l’éditeur du blog aidwatchers.com, qui milite afin que l’aide bénéficie effectivement aux populations pauvres. Sa vision libérale et alternative dans le monde du développement lui a valu de nombreux articles dans la presse anglophone. 1.2. Place de l’ouvrage dans la vie de l’auteur Dans son premier livre, The Elusive Quest for Growth : Economists' Adventures and Misadventures in the Tropics, 2001, William Easterly s’attache aux raisons pour lesquelles les différents mécanismes d’aide aux pays du Tiers Monde ont échoué à créer un réel développement durable. Il passe en revue les différentes recettes utilisées pour aider au développement des pays pauvres et notamment la suppression de la dette dont les effets ont été plus souvent néfastes que positifs. The White Man’s Burden, fait suite à ce premier ouvrage. Easterly y développe sa critique des modèles en vigueur et développe la figure du searcher, qui s’attache aux besoins des populations et agit localement, face aux planners dont les mécanismes Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 4 massifs d’aide au développement n’ont pas eu les effets escomptés. Cité parmi les meilleurs ouvrages de l’année 2006 par The Economist et le Financial Times, ainsi que dans de nombreux journaux de la presse anglophone, il est à l’origine d’une polémique avec les défenseurs de l’aide internationale comme Jeffrey Sachs, conseiller spécial de Kofi Annan pour les objectifs du Millénaire. Dans son livre, The End of Poverty, l’économiste appelle à un doublement de l’aide internationale. De même Amartya Sen, prix Nobel d’économie, a dénoncé la critique systématique des mécanismes d’aide existants dans le livre d’Easterly. The White Man’s Burden et a ainsi permis à William Easterly de faire connaître largement sa vision alternative du développement, tout en apportant une réponse politique et profondément libérale aux problèmes du développement au-delà des articles scientifiques dont il est coutumier. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 5 2. Résumé de l’ouvrage 2.1. Plan de l’ouvrage Chapitre 1 Planners versus Searchers Partie I : Why planners cannot bring prosperity ? Chapitre 2 : The legend of the big Push Chapitre 3 : You can’t plan a market Chapitre 4 : Planners and gangsters Partie II : Acting out of the burden Chapitre 5 : The rich have markets, the poor have bureaucrats Chapitre 6 : Bailing out the poor Chapitre 7 : The healers : triumph and tragedy Partie III : The white man’s army Chapitre 8 : From colonisation to post-modern colonialism Chapitre 9 : Invading the poor Partie IV : The future Chapitre 10 : Homegrown development Chapitre 11 : The future of western assistance Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 6 2.2. Principales étapes du raisonnement et principales conclusions Easterly introduit son livre sur une comparaison brutale : l’inefficacité de l’aide sanitaire basique et l’efficacité impressionnante d’une opération comme la sortie internationale d’un nouveau volume d’Harry Potter. L’enjeu pour l’aide, c’est qu’elle parvienne aux pauvres. Why planners cannot bring prosperity ? Le cercle vicieux de la pauvreté, où se maintiendraient les pays les plus pauvres, et sur lequel reposent les mécanismes d’aide, n’est pas réel. Les conséquences d’un gouvernement corrompu et non-démocratique le sont en revanche. L’aide internationale planifiée n’a jusqu’à présent pas favorisé la croissance des pays pauvres. Partant de ce constat d’échec, on a tenté de planifier des marchés libres dans les pays pauvres, tentatives qui ont de même échoué, omettant qu’un marché ne peut pas être créé ex nihilo. Il existe en effet des conditions nécessaires à la réussite d’une telle entreprise: la confiance des acteurs économiques et la protection de la propriété privée qui se construit progressivement et de manière locale. De la même manière que pour un marché, la démocratie peut aider au développement, mais pas nécessairement lorsqu’elle est imposée de l’extérieur. L’auteur dénonce les liens entre l’aide et l’absence de libéralisme politique : les planificateurs sont obligés de traiter à un niveau national ou régional avec une forme d’autorité, c’est-à-dire avec des responsables qui peuvent être corrompus. Ils alimentent ainsi l’illusion d’un fonctionnement démocratique et d’une stabilité profitable. Il y a un antagonisme évident : les financements du Nord répondent aux impératifs politiques des pays développés alors que les populations du Sud ne peuvent pas peser sur les mesures qui sont destinées à leur venir en aide. Acting out of the Burden Une approche bottom-up du développement permet en revanche de se recentrer sur les réels besoins des individus et de sortir du schéma du donneur d’ordre étranger et des bureaucraties intermédiaires d’attribution de l’aide. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 7 Cette aide est aujourd’hui d’autant plus inefficace que personne n’est responsable de ses résultats. Les seuls indicateurs disponibles sont macro-économiques (IDH ou Indice de Développement Humain, PIB, ou Produit Intérieur Brut,…), qui empêchent de distinguer le réel impact des multiples agences de développement et les dynamiques endogènes. Au contraire d’une entreprise, ces agences ne peuvent donc pas s’adapter aux populations qu’elles sont censées servir. L’auteur dénonce aussi les institutions financières internationales, non pas leur volonté de solvabiliser les pays créditeurs, mais leur volonté d’orienter les politiques publiques de ces pays. Cela crée un déséquilibre profond, néfaste au développement, sans pour autant rétablir une situation macro-économique saine. L’introduction du critère de gouvernance ne permet pas d’établir une corrélation significative entre les volumes d’aide et les performances économiques. L’expansion du VIH illustre bien cela dans le champ humanitaire : personne ne s’est intéressé aux réels besoins des populations et le problème n’a fait que s’accroître. The white man’s army Les conséquences de la colonisation et de la décolonisation discréditent les politiques intrusives promues actuellement. Les interventions militaires ne sont pas plus souhaitables comme en attestent les exemples de la Guerre Froide et les forces de maintien de la paix, qui ont mis en place des systèmes inadaptés aux conditions locales. Les agences, conscientes du problème, ont mis en place des programmes de participation des populations et de la communauté civile. Mais celles-ci s’appuient sur des dirigeants qui laissent peu de place à la critique. On peut donc douter des résultats de ces enquêtes. Par ailleurs les objectifs des agences sont tellement précis et contraints que les enquêtes sont le plus souvent de simples confirmations des plans déjà établis : pour améliorer l’efficacité des mécanismes d’aide, les pays occidentaux ont en effet mis en place des formes de conditionnalité à l’aide. Pour être éligible à l’aide, il faut que les pays concernés remplissent un certain nombre de conditions concernant l’endettement, la législation, la libéralisation du marché,… La vérification de ces conditions impose aux pays pauvres la publication de rapports pour leurs donateurs, qu’ils n’ont pas les moyens de faire. Ils pourraient dépenser les subsides internationaux selon leurs propres critères et avec une plus grande connaissance des besoins. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 8 The future Les exemples de pays autrefois pauvres ayant réussis à se développer démontrent que les pays sont les propres responsables de leur propre développement. C’est une multiplicité d’acteurs locaux qui ont permis de trouver une formule de développement local adaptée et non-reproductible. L’aide occidentale peut néanmoins être utile sous certaines conditions: elle doit se concentrer sur les biens de première nécessité et évaluer l’impact direct sur les destinataires. Il faut adopter une véritable démarche de recherche, sans mener de programmes trop complexes, afin de comprendre ce qui fonctionne ou non et adopter des buts très concrets. On peut même envisager de nouveaux modèles, comme l’émission de chèques de développement laissant ainsi le choix aux populations d’acheter les produits et services dont elles ont besoin. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 9 3. Commentaires critiques 3.1. Avis d’autres auteurs sur l’ouvrage La presse a salué The White Man’s Burden, qui a notamment été classé parmi les meilleurs livres de l’année 2006 par The Economist et le Financial Times. Si les raisons de l’échec des politiques d’aide sont partagées par les spécialistes du sujet, Jeffrey Sachs et William Easterly en tirent des conclusions opposées. Sachs accuse Easterly d’être excessivement pessimiste, de surestimer les coûts de l’aide et de négliger certains succès des mécanismes d’aide internationale. Jeffrey Sachs, inventeur de la thérapie de choc en Europe de l’Est au début des années 1990, a notamment développé la théorie de la « trappe à pauvreté » dont Easterly nie l’existence : seule une aide massive pourrait en faire sortir les pays pauvres, même si une activité économique en développement est à long-terme la seule solution. De son côté Amartya Sen fait un véritable éloge de l’analyse conduite par Easterly des échecs de l’aide au développement actuelle. Il critique en revanche vivement son rejet de toute forme de planification des mécanismes d’aide au profit d’une liberté des acteurs locaux sans stratégie globale et dénonce son incapacité à distinguer les échecs réels de l’aide et l’utilité de la planification, ne serait-ce que pour sa capacité à faire apparaître les échecs de l’aide. 3.2. Avis de l’auteur de la fiche Le point de vue très libéral et laisser-faire d’Easterly est une alternative très solide aux échecs dénoncés dans le livre. Il s’attache, avec des exemples d’actions très précises, voire parfois compassionnelles, à mettre en avant le rôle positif des acteurs locaux. On peut, grâce à ce livre, se livrer à un parallèle entre sa vision des pays et des économies et un écosystème biologique. On peut cependant lui reprocher de ne pas prendre en compte les évolutions des actions des institutions financières internationales, des ONG (Organisations Non Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 10 Gouvernementales) ou de l’influence croissante, même à l’Ouest, des principes du social business et de son exemplarité. L’a priori d’un développement nécessairement orienté vers l’apparition d’un marché libre et de régimes politiques libéraux est sans doute aussi idéaliste que les utopies des planificateurs. Enfin, il nie le besoin des pays de l’Ouest à protéger leurs intérêts contre des mouvements capables de les menacer et l’aide a eu pour ambition aussi de créer des pays stables et mesurés. On peut certes critiquer ou dénoncer ces approches, mais il faut prendre en compte les mécanismes politiques intérieurs des pays donateurs. Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 11 4. Bibliographie de l’auteur Livres : • 2006 – The White Man’s Burden, Oxford, Oxford University Press, 380 p. • 2002 – The elusive Quest for Growth, Cambridge (MA), MIT Press, 342 p. Ouvrages collectifs récents: • 2009 – Skilled Migration Today, edited by Jagdish Bhagwati and Gordon Hanson, Council on Foreign Relations, Oxford University Press, USA, 416 p. • 2009 – Development Economics through the Decades: A Critical Look at Thirty Years of the World Development Report, World Bank Publications, 218 p. Articles universitaires récents: • 2010 – Was the Wealth of Nations Determined in 1000 B.C.?, with Diego Comin and Erick Gong, American Economic Journal: Macroeconomics • 2009 –The European Origins of economic Development, with Ross Levine, NYU Tellez G. – Fiche de lecture : “The White Man’s Burden” – Janvier 2011 12