Mars 2005 - Luc Jacquet, Kipling des temps modernes
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Mars 2005 - Luc Jacquet, Kipling des temps modernes
Luc Jacquet, Kipling des temps modernes SORTI EN SALLES LE 26 JANVIER, LE PREMIER LONG MÉTRAGE DE LUC JACQUET “LA MARCHE DE L’EMPEREUR” TOTALISAIT 353000 ENTRÉES SUR LES TROIS PREMIERS JOURS. RENCONTRE AVEC UN RÉALISATEUR HEU-REUX ! PRIS DANS LE TOURBILLON d’une promo aussi grisante qu’éreintante, Luc Jacquet a les yeux cernés et un large sourire aux lèvres… A 37 ans, le réalisateur de documentaires animaliers est abasourdi devant un tel succès : “Au départ, c’était un film-défi. Après avoir écrit le scénario, j’ai galéré pendant deux ans pour trouver un producteur. Finalement, l’équipe de “Bonne Pioche” a pris des risques colossaux et le film a bénéficié d’une énergie décuplée”. D’abord, il y a la magie du décor : l’antarctique. Ensuite il y a l’acteur : le manchot empereur, un drôle d’oiseau aussi puissant NOM : Jacquet PRÉNOM : Luc NÉ À : Bourg, le 5 décembre 1967 PARCOURS SCOLAIRE : collège Saint-Pierre et lycée du Sacré-cœur à Bourg, faculté Lyon I où il obtient une maîtrise de biologie des organismes et des populations à Lyon I. EXTRAITS DE SA FILMOGRAPHIE : “La marche de l’empereur” 2005, “Des manchots et des hommes” 2004, “Antarctique printemps express” 2004, “Sous le signe du serpent” 2003, “La part de l’ogre” 1998… SON SITE : www.luc-jacquet.com © Buena Vista International “La marche de l’empereur” a nécessité un an de tournage en autarcie totale et dans des conditions extrêmes sur la base Dumont-Durville en Terre Adélie. me contacte et me demande de lui ramener des images de ces oiseaux” raconte-t-il. En quelques jours, il apprend les bases en filmant des manchots en carton sur le glacier du Mont-Blanc puis s’embarque pour l’Antarctique avec dans une main une pince à baguer, dans l’autre, une caméra. Luc Jacquet ne se doutait pas qu’il tomberait amoureux de ce continent où il a séjourné à ce jour trois années complètes. “En ramenant mes images, le cinéaste m’a dit : Tu as l’œil” se souvient-il. A un moment sa vocation scientifique s’étiole. “J’aurais été un mauvais chercheur. L’objectivité scientifique et la concurrence ne me convenaient pas” assure-t-il. Il lui manquait l’imaginaire, l’émotion, l’aventure… Comme un défi, il se dit : “Je vais essayer d’être cinéaste”. De petits boulots en festivals, il saisit les opportunités à un moment où la télévision est en plein boom et manque de bras pour des documentaires animaliers. Ses études d’éthologie (sur le comportement animal) et son expérience sont un atout dans le métier. En 1995 sort son premier documentaire : “Le printemps des phoques de Weddell”. Puis il se penche tour à tour sur des petites bêtes et grosses bestioles : serpents, léopards de mer, tiques, baleines, lézards, chamois, salamandres et tritons… dans l’eau que maladroit sur terre, et dont le destin est un “scénario offert par la A la manière de Rudyard Kipling nature”. Et puis il y a la musique originale Encore et toujours, le souvenir des mand’Emilie Simon et enfin, les voix - celles de chots empereurs de Terre Adélie l’obsède. Romane Bohringer, Charles Berling et Jules L’idée est là mais il veut sortir Sitruk - qui vous invitent au “Ici, j’ai mes des carcans narratifs du docurêve… Un casting fantastique racines. mentaire animalier, amener qui contribue au succès de “La marche de l’empereur”. Je connais peu une originalité, alléger le commentaire. Le projet se dessine : d’aventuriers “Depuis toujours je suis fasciné De la science au cinéma qui n’aient pas par Rudyard Kipling et sa façon “Ce film est le fruit de rencontres de raconter des destins d’animaux incroyables, de hasards, un cadeau de point dans son Livre de la Jungle. Je de la vie. Aujourd’hui, je me d’ancrage. savais que je tenais un vrai dois de défendre ce travail Quand on a vécu scénario de cinéma : la dramad’équipe” souligne avec ardeur turgie du destin des manchots, Luc Jacquet. dans des la beauté de mon personnage Né à Bourg où il a effectué toute sa scolarité, Luc Jacquet est en grandes villes, principal… J’ai pensé au théâtre on apprécie grec, à un opéra, une comédie fac de biologie à Lyon lorsque son regard se pose sur une la qualité de vie musicale”. Et maintenant ? Comment rebondir après cette petite annonce du CNRS : “Recherche biologiste n’ayant de cette région.” spirale à succès ? “Le film a été vendu partout dans le monde, je me prépare peur de rien, prêt à partir 14 mois au bout à un an de promo sur tous les continents” du monde”. Sans hésiter, le jeune chercheur précise le réalisateur qui, avec deux films saisit sa chance et s’engage comme Volontaire en projet, n’a pas le vertige de la page aide technique pour accompagner un blanche. “Je veux aller jusqu’au bout de cette ornithologue en Terre Adélie et l’aider à aventure car j’ai l’intime conviction que cela compter et baguer des manchots empereurs. ne se reproduira pas à tous les coups”. ■ “Juste avant mon départ, un cinéaste suisse PORTRAIT DE BURGIEN(NE) N° 146 - MARS 2005 19 19