Civ. 3 e , 22 octobre 2014, n° 13-24.834

Transcription

Civ. 3 e , 22 octobre 2014, n° 13-24.834
CIV.3
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 22 octobre 2014
Rejet
M. TERRIER, président
Arrêt no 1245 FS-P+B
Pourvoi no N 13-24.834
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE,
a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1o/ le syndicat des copropriétaires 11-13 mail du Centre Ville,
93110 Rosny-sous-Bois, dont le siège est 11-13 mail du Centre Ville, 93110
Rosny-sous-Bois, représenté par son syndic la société Gestion immobilière
Dubourg, domicilié 28 avenue Gabriel Péri, 93160 Noisy-le-Grand,
2o/ Mme Nicole Izard, épouse Weybel, domiciliée 1 rue Lucien
Piron, 93110 Rosny-sous-Bois,
3o/ M. Jean Weybel, domicilié 1 rue Lucien Piron, 93110
Rosny-sous-Bois,
4o/ Mme Sophie Planchais, épouse Letendre, domiciliée 4 rue
des Tulipiers, 93110 Rosny-sous-Bois,
2
1245
5o/ M. Daniel Salvi, domicilié 1 passage de Picardie, 93110
Rosny-sous-Bois,
6o/ Mme Christine Graff, épouse Salvi, domiciliée 1 passage de
Picardie, 93110 Rosny-sous-Bois,
contre l'arrêt rendu le 15 mai 2013 par la cour d'appel de Paris (pôle 4,
chambre 5), dans le litige les opposant :
1o/ à la société Le Dôme, société civile immobilière, dont le
siège est, domiciliée 28 rue Escudier, 92100 Boulogne-Billancourt,
représentée par son gérant la société Interconstruction,
2o/ à la société Axa France IARD, dont le siège est 26 rue
Drouot, 75009 Paris, pris en qualité d'assureur des sociétés SFICA, AMR,
Sogep,
3o/ à la société Sfica, société par actions simplifiée, dont le
siège est 40 rue Letort, 75018 Paris,
4o/ à la Compagnie de construction parisienne, société à
responsabilité limitée, dont le siège est 23-25 avenue des Frères Lumière,
93370 Montfermeil,
5o/ à la Société mutuelle des architectes français (MAF), dont
le siège est 9 rue de l'Amiral Hamelin, 75783 Paris cedex 16,
6o/ à la société MMA IARD, dont le siège est ACS,
25 boulevard des Bouvets, 92000 Nanterre, constitution en lieu et place de
la SCP Ménard, Scellet Millet,
7o/ à la société Sogep, société par actions simplifiée, dont le
siège est Zone industrielle de Compans, 11 rue Marc Seguin, 77290
Mitry-Mory,
8o/ à la compagnie AGF IART, venant aux droits d'Allianz en
qualité d'assureur de la société Allard l'Eloge, dont le siège est 87 rue de
Richelieu, 75002 Paris,
9o/ à la société Acte IARD, société par actions simplifiée, dont
le siège est 12 avenue de l'Europe, 67300 Schiltigheim, pris en qualité
d'assureur de la société Sogep,
10o/ à la société Thélem assurances, dont le siège est Le Croc,
BP 63130, 45431 Checy cedex,
3
1245
11o/ à la société Dalsa, dont le siège est 10 ter due des
Tournelles, 94240 L'Hay-les-Roses,
12o/ à la société MMA IARD, venant aux droits de la
société Winterthur assurances, pris en qualité d'assureur de la société CCP,
Compagnie de construction parisienne et de la société Dalsa,dont le siège
est 10 boulevard Alexandre Oyon, 72000 Le Mans,
13o/ à la société Grégoire et fils, société à responsabilité
limitée, dont le siège est Saint-Martial d'Artenset, 24700
Saint-Martial-d'Artenset,
14o/ à la société Serma, dont le siège est 16 rue René Thibert,
94800 Villejuif,
15o/ à la société Allard, dont le siège est L'Eloge, BP 10, 16710
Saint-Yrieix-sur-Charente,
16o/ à la société Décoration De Sousa frères, dont le siège est
Zone industrielle des Graviers, 94190 Villeneuve-Saint-Georges,
17o/ à la société SMABTP, dont le siège est 114 avenue Emile
Zola, 75739 Paris cedex 15,
18o/ à la société Etablissements Dionneau, société à
responsabilité limitée, dont le siège est 58 rue Lardin de Musset, 49000
Angers,
19o/ à la société Gan Eurocourtage IARD, venant aux droits de
Gan incendie accidents, pris en qualité d'assureur de la société Serma, dont
le siège est 8-10 rue d'Astorg, 75008 Paris,
20o/ à la compagnie Générali IARD, dont le siège est
7 boulevard Haussmann, 75009 Paris, pris en qualité d'assureur de la
société Guilde métal,
21o/ à la société SCP Moyrand-Bally, société civile
professionnelle, dont le siège est 14-16 rue de Lorraine, 93000 Bobigny,
mandataire judiciaire, prise en la personne de M. Jacques Moyrand, pris en
qualité de liquidateur judiciaire de la Compagnie de construction parisienne,
défenderesses à la cassation ;
4
1245
La société Allard a formé, par un mémoire déposé au greffe, un
pourvoi provoqué contre le même arrêt dirigé contre la SCI Le Dôme, la
Mutuelle des architectes français, Mme Planchais et M. et Mme Salvi ;
La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l’appui de
son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du
code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du
23 septembre 2014, où étaient présents : M. Terrier, président, M. Pronier,
conseiller rapporteur, M. Mas, conseiller doyen, MM. Jardel, Maunand,
Mme Le Boursicot, M. Bureau, conseillers, Mmes Vérité, Abgrall,
Guillaudier, Georget, Renard, conseillers référendaires, M. Petit, avocat
général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Pronier, conseiller, les observations de la
SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat du syndicat des copropriétaires 11-13
mail du Centre Ville, 93110 Rosny-sous-Bois, de M. et Mme Weybel, de
Mme Letendre et de M. et Mme Salvi, de la SCP Boulloche, avocat de la
société Mutuelle des architectes français, de la SCP Odent et Poulet, avocat
de la société Allard, de la SCP Capron, avocat de la société Le Dôme, l'avis
de M. Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte au syndicat des copropriétaires des 11-13 mail du
centre-ville à Rosny-sous-Bois, à M. et Mme Weybel, à Mme Planchais et à
M. et Mme Salvi du désistement de leur pourvoi principal ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2013), que la
société civile immobilière Le Dôme (la SCI) a fait édifier une résidence
composée de deux bâtiments, qu'elle a vendue en état futur d'achèvement ;
qu’une police « tous risques chantier » a été souscrite auprès de la
société Mutuelle des architectes français (la MAF) ; qu’est notamment
intervenue à l'opération de construction la société Allard chargée du lot
plomberie, assurée auprès des AGF ; que des dégâts des eaux étant
survenus, le syndicat des copropriétaires et certains copropriétaires ont,
après expertise, assigné les intervenants à l’acte de construire et leurs
assureurs en indemnisation de leurs préjudices et que des appels en
garantie ont été formés ;
5
1245
Attendu que la société Allard fait grief à l’arrêt de la condamner,
d'une part, à garantir la SCI et la MAF des condamnations prononcées au
titre des préjudices immatériels, soit la somme de 30 000 euros à
Mme Planchais et celle de 15 000 euros aux époux Salvi, que la
société Allard devait régler in solidum avec la SCI et la MAF, celle-ci
garantissant celle-là et, d'autre part, à garantir la MAF quant à la
condamnation in solidum de la MAF assureur TRC et de la société Allard à
payer à la SCI la somme de 29 296 euros au titre des préjudices matériels
du logement Planchais, la somme de 27 660 euros au titre des préjudices
matériels du logement Salvi, outre la somme de 44 519,47 euros au titre des
préjudices immatériels réglée par la SCI, alors, selon le moyen, que
l'assurance tous risques chantiers est une assurance de dommages pour le
compte de tous les participants à l'opération de construction ; que, partant,
la cour d'appel ne pouvait condamner la société Allard, nécessairement
couverte par cette police, à garantir la MAF, prise en sa qualité d'assureur
tous risques chantiers, quant aux condamnations prononcées à l’encontre de
ce dernier au profit des acquéreurs d'un immeuble vendu en l'état futur
d'achèvement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé
l'article L. 112-1 du code des assurances ;
Mais attendu qu’ayant relevé que l’article 2 des conditions
particulières de la police « tous risques chantier » précisait que seul le maître
de l’ouvrage avait la qualité d’assuré, la cour d’appel en a exactement déduit
que la société Allard devait garantir la SCI et la MAF des condamnations
prononcées au profit de Mme Planchais et des époux Salvi ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Allard aux dépens des pourvois ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la
société Allard à payer à la société Mutuelle des architectes français la
somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Allard ;
6
1245
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre
civile, et prononcé par le président en son audience publique du
vingt-deux octobre deux mille quatorze.
7
1245
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi provoqué par la SCP Odent et Poulet, avocat aux
Conseils, pour la société Allard
II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société ALLARD d'une
part à garantir la SCI LE DOME et la société MAP des condamnations,
prononcées au titre des préjudices immatériels, soit la somme de 30.000 €
à Madame PLANCHAIS et celle de 15.000 € aux époux SALVI, que la
société ALLARD devait régler in solidum avec la SCI LE DOME et la
société MAP TRC, celle-ci garantissant celle-là et, d'autre part, à garantir la
société MAP TRC quant à la condamnation in solidum de la société MAP
assureur TRC et de la société ALLARD à payer à la SCI LE DOME la somme
de 29.296 € au titre des préjudices matériels du logement PLANCHAIS, la
somme de 27.660 € au titre des préjudices matériels du logement SALVI,
outre la somme de 44,519,47 € au titre des préjudices immatériels réglée par
la SCI LE DOME ;
AUX MOTIFS QUE, sur les désordres du logement PLANCHAIS.
Madame PLANCHAIS épouse LETENDRE a acquis son logement en
novembre 1999 et la livraison en était prévue le 31 décembre 2000 au plus
tard, que le procès-verbal de livraison est du 1er mars 2001, que
Madame PLANCHAIS s'est plainte d'infiltrations dès le 16 mars 2001, que
l'expert judiciaire les a constatées et décrites page 51 de son premier
rapport, en précisant que les cloisons étaient gorgées d'eau ; qu'il les a
attribuées à la rupture de manchons posés sur une canalisation d'eau
encastrée dans la dalle entre le logement de madame PLANCHAIS et celui
situé au-dessus ; qu'il a mcriminé la responsabilité de l'entreprise ALLARD
qui a posé des manchons inadaptés aux tuyauteries ; qu'il a préconisé la
réfection intégrale de l'appartement ; qu'il l'a chiffrée à la somme de
29.395 €, que le tribunal de grande instance a alloué en deniers ou
quittances cette somme à Madame PLANCHAIS, outre une somme de
3.500 € au titre des frais de maîtrise d'oeuvre et a également chiffré à
15.000 € le montant des préjudices financiers, frais divers et préjudices de
jouissance de Madame PLANCHAIS ; que celle-ci demande la confirmation
du jugement en ce qui concerne la somme de 29.395 € mais demande que
les autres réparations soient portées à 59.256,10 €, que la SCI LE DOME
demande que la somme de 29.395 € lui soit versée par les constructeurs et
assureurs ainsi que les autres sommes qu'elle a versées pour indemniser
Madame PLANCHAIS ;
Qu'il résulte des pièces produites que la SCI LE DOME a réglé la somme de
29.295 € le 10 avril 2002 en réparation des désordres affectant le logement,
qu'elle est donc seule légitime à en réclamer le remboursement ;
8
1245
Qu'elle a également versé à Madame PLANCHAIS pour assurer son
relogement provisoire et partie de ses frais de restauration entre juillet 2001
et juin 2002 la somme de 44.519,47 € ; que ces sommes sont justifiées au
regard des factures produites qui correspondent aux besoins de
Madame PLANCHAIS et seront retenues ;
Que Madame PLANCHAIS a de son côté supporté des frais divers résultant
des dommages à ses meubles, des déménagements multiples rendus
nécessaires, de la précarité de sa situation pendant la période de relogement
provisoire, des frais financiers occasionnés par le retard de livraison, et d'une
manière générale un trouble dans ses conditions d'existence qui justifient sa
réclamation à hauteur de 30.000 €, en ce compris les frais d'architecte qu'elle
a exposés pour la constatation des dommages, cette seule somme lui sera
allouée ;
Que le désordre est survenu après la livraison mais avant la réception ; qu'il
engage la responsabilité de plein droit de la SCI LE DOME ; que celle-ci
forme un appel incident contre la société MAP au titre de la police CNR mais
les dommages étant apparus avant réception cette police n'est pas
mobilisable ;
Que la police TRC de la société MAF garantit avant réception les dommages
consécutifs à un événement soudain et imprévu ; qu'en l'espèce il s'agit d'un
dégât des eaux provenant d'une rupture de pièces de canalisation et une
rupture est nécessairement de nature soudaine et imprévue ;
Que la SCI LE DOME, subrogée par ses paiements dans les droits de
Madame PLANCHAIS, sera également garantie par la société MAF et par la
société ALLARD ;
Qu'en conséquence la SCI LE DOME, les sociétés MAF TRC et ALLARD
seront donc condamnées à indemniser madame PLANCHAIS, les sociétés
MAF et ALLARD étant de plus condamnées à indemniser la SCI LE DOME
de ses propres dépenses ;
Qu'in fine la société ALLARD garantira la SCI LE DOME et la société MAF;
Que, sur les désordres du logement SALVI, les époux SALVI ont acquis leur
logement en août 1999 et la livraison en était prévue au plus tard fin
décembre 2000 ; qu'elle est intervenue le 16 mars 2001 ; que, dès le 6 avril
2001, les époux SALVI se sont plaints d'infiltrations et l'expert judiciaire a
constaté qu'il s'agissait de dommages provenant des mêmes causes que
celles relatives au sinistre subi par Madame PLANCHAIS ; qu'il a également
au vu de l'ampleur de dommages préconisé la réfection intégrale de
l'appartement ; qu'il a chiffré les réparations à 27.760 € ; que le tribunal de
grande instance a alloué cette somme aux époux SALVI ainsi qu'une somme
9
1245
de 3.500C au titre de la maîtrise d'oeuvre et une somme de 15.000 € au titre
des préjudices complémentaires ;
Que les époux SALVI demandent la confirmation de la condamnation du
montant de 27.760 €, outre une actualisation de la somme, et réclament en
sus une somme de 24.781,82 € en réparation de leurs préjudices
accessoires complémentaires ;
Que la SCI LE DOME déclare avoir réglé la somme de 27.760 € en avril
2002, sollicite le débouté des époux SALVI de ce chef, le débouté des autres
demandes et demande, outre la garantie des constructeurs et assureurs, à
ce que son préjudice soit évalué à cette somme ;
Que la somme de 27. 660 € a bien été réglée par la SCI LE DOME le 10 avril
2002, que seule celle-ci est légitime à en réclamer le paiement aux
constructeurs et assureurs ; que la somme est justifiée par les éléments de
l'expertise ;
Que le préjudice supplémentaire des époux SALVI n'est pas autrement
justifié que par la production de récapitulatifs effectués par eux des frais
qu'ils auraient supportés ;
Qu'au titre de l'ensemble des troubles, tracas et frais résultant des
dommages et de leurs réparations, en ce compris le frais d'assistance par un
architecte lors de la constatation des dommages, une somme de 15.000 €
doit leur être allouée.
Que les responsabilités et garanties sont identiques à celles retenues pour
les dommages PLANCHAIS ;
ALORS QUE l'assurance tous risques chantiers est une assurance de
dommages pour le compte de tous les participants à l'opération de
construction ; que, partant, la cour d'appel ne pouvait condamner la
société ALLARD, nécessairement couverte par cette police, à garantir la
société MAP, prise en sa qualité d'assureur tous risques chantiers, quant aux
condamnations prononcées à rencontre de ce dernière au profit des
acquéreurs d'un immeuble vendu en l'état futur d'achèvement ; qu'en
statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L.l 12-1 du code
des assurances.