En couverture - Cercle de Wallonie

Transcription

En couverture - Cercle de Wallonie
En couverture
Belga
Entre deux verres et loin
des regards indiscrets,
les décisionnaires
refont le monde, comme
ici dans les salons
namurois du Cercle de
Wallonie.
Les décisions politiques ne se prennent pas
qu’au Parlement et au conseil des ministres.
Lobbies, clubs d’influence et mouvements
spirituels mènent aussi la danse.
Au point de nuire à la démocratie?
télé moustique 11/08/2010
La politique belge sous inf luence?
Les
vrais
lieux
du
pouvoir
Les lois se préparent de préférence à l’abri des regards,
dans des salons discrets. Enquête sur ces zones grises
où pouvoirs économique, politique et spirituel se tutoient.
P
arlement(s), conseil(s) des ministres,
Palais royal, palais de Justice, palais
provinciaux, hôtels de ville… Tels sont,
officiellement, les lieux de pouvoir en
Belgique. Mais en réalité, ils font office
de symboles. En Belgique, comme dans les
autres démocraties occidentales, le vrai pouvoir
réside souvent ailleurs, dans l’intimité de salons
plus feutrés que l’hémicycle de la Chambre ou la
salle d’un conseil communal. Les actuelles négo­
ciations prégouvernementales le rappellent: c’est
d’abord entre directions de parti que se décident
les politiques menées dans notre pays.
Les partis, vrais patrons de la Belgique? Ce
serait trop simple. Lors de sa mission d’informa­
tion, Bart De Wever avait entendu d’autres ac­
teurs. Des leaders syndicaux, des secrétaires de
fédérations patronales… Des associations qui,
par leur poids économique et social, pèsent plus
ou moins lourd sur les décisions politiques.
D’autres, qui ont moins pignon sur rue, exercent
une pression plus discrète, jouant sur les convic­
tions philosophiques, les affinités culturelles et
linguistiques de nos élus. Et puis il y a les lob­
byistes européens, dont on connaît la capacité à
infléchir les politiques de l’Union, ou les clubs
mondiaux, fantasme de gouvernement mondial.
Plus prosaïquement, ce sont les clubs de
sport, cafés et restaurants fréquentés par le
personnel politique qui font office de temple du
pouvoir. On y noue des contacts informels, on y
discute boulot, on peaufine les projets. Du très
sélect groupe Bilderberg au café bruxellois l’Ar­
chiduc, du Cercle de Wallonie aux ramifications
du Mouvement ouvrier chrétien, ces lieux rappel­
lent combien la gestion des affaires publiques
est une matière où le jeu démocratique peut,
parfois, être confronté à ses propres limites. Où
l’intérêt supérieur de l’Etat semble pris en otage
par d’autres intérêts plus particuliers.
Auteur d’un ouvrage de référence sur les inter­
actions entre médias et pouvoirs, Geoffrey
Geuens est chargé de cours en Communication
à l’Université de Liège. Grand pourfendeur des
“thèses du complot”, il reconnaît toutefois les
jeux d’influence entre cercles de pouvoir aux
intérêts connexes.
Warande. Les patrons de presse francophone
(comme Rossel), au Cercle de Wallonie. Les
clubs bilingues sont aussi les plus huppés et les
plus fermés. Ils profitent aux gros réseaux d’af­
faires, où la question de la langue ne peut consti­
tuer un obstacle. Ce n’est pas un hasard si Rik
De Nolf, patron de Roularta qui a fait des affaires
dans les médias avec Albert Frère, a été le pre­
mier président d’honneur du Cercle de Lorraine.
Cela démontre la volonté de ce cénacle de se
poser en trait d’union entre les milieux du busi­
ness flamand et francophone.
k
Un cercle comme De Warande a-t-il contribué au triomphe de la N-VA le 13 juin?
G.G. - Il est incontestable
qu’il y a, à la N-VA, plu­
sieurs anciens membres
actifs du Warande, et que
celui-ci est la vitrine fla­
mande à Bruxelles. Ce
club a été fondé à l’initia­
tive du patronat flamand,
dont les intérêts sont
plus diversifiés qu’on le
Geoffrey Geuens
croit. Certaines familles
issues de la bourgeoisie
anversoise sont plutôt “belgicaines”. Mais l’in­
fluence des “Top West Vlamingen” (les grands
chefs d’entreprise ouest-flandriens) est devenue
prépondérante et comporte de nombreux sou­
tiens à la N-VA. Le personnage clé de cette mou­
vance est Philippe Muyters, ministre flamand du
Budget et des Finances, de l’Aménagement du
ê
territoire, de l’Emploi et du Sport.
cercles
“Lesinternationaux
servent d’absorbeurs de chocs.
k
Selon vous, quels sont les grands lieux
d’échanges et d’influences de notre pays?
Geoffrey Geuens. - En Belgique, l’establishment
politico-économique est très éclaté. Vous avez
d’une part De Warande, et de l’autre le Cercle de
Wallonie. Entre les deux, des passerelles comme
le Cercle de Lorraine et le Cercle gaulois. Les
groupes de presse flamands tel Roularta sont au
”
11/08/2010
télé moustique
PhotoNews
En couverture
Cercles privés
A
Liège, à Bruxelles ou à Anvers, trois cercles
privés réunissent gratin de la politique et
hommes d’influence. Y fomente-t-on l’ave­
nir de la Belgique à l’abri du regard des élec­
teurs? Marqués linguistiquement, passerelles
entre mondes politique et économique, ils font
en tout cas office de chambres de réflexion sur
la bonne marche des affaires du pays.
Le Cercle de Wallonie
Au cercle de Wallonie, installé dans le château du Val Saint-Lambert, ténors
politiques et patrons de PME entretiennent des liens d’un nouveau genre.
On fantasme beaucoup sur des cercles internationaux comme le Bilderberg
ou la Trilatérale. Quelles est leur influence réelle?
G.G. - Le Bilderberg fait l’objet d’une littéra­
ture “conspirationniste”. Mais si la théorie
du complot est bancale, on ne peut nier que
ces cénacles sont intéressants à étudier.
S’ils sont secrets, on retrouve néanmoins
les membres qui les composent dans
d’autres mouvements ayant pignon sur rue.
Le Bilderberg est victime de sa politique de
discrétion extrême doublée du fait qu’il ras­
semble le gratin de l’establishment. Ce n’est
pas le lieu où se fomentent des complots,
puisqu’il fonctionne selon une répartition de
membres par blocs de nations dont les inté­
rêts sont parfois très divergents. Il n’y a pas
d’élite unifiée. On pourrait leur accorder la
fonction d’”absorbeurs de chocs” entre des
groupes qui auraient des difficultés à
s’accorder.
k
Le Belge Etienne Davignon, ancien
commissaire européen, ancien chef de
cabinet, et qui a été membre de pratiquement tous les conseils d’administration
en Belgique, est président du Bilderberg.
Le rôle de ce personnage clé n’est-il pas
ambigu, selon qu’il agit pour le privé,
l’Etat ou lui-même?
G.G. - Je dirais plutôt qu’il est à la fois cari­
catural et emblématique. Caricatural, par la
multiplicité des capitaux relationnels, politi­
ques et financiers qu’il cumule, et embléma­
tique du fonctionnement des classes diri­
geantes en Belgique. On aurait tort de le
considérer comme un personnage à part.
Il suffit de prendre l’exemple du socialiste
télé moustique 11/08/2010
Karel Van Miert. Issu de la social-démocratie,
il a été commissaire européen, est passé
par la Trilatérale et le Bilderberg et a siégé
au conseil d’administration des plus grandes
entreprises belges et étrangères, notam­
ment Solvay et Goldman-Sachs. C’est typi­
que d’une élite économique et financière
belge, belgicaine, proche des familles politi­
ques traditionnelles et atlantistes. Jean-Luc
Dehaene en est un autre exemple: il occupe
encore des fonctions électives, préside une
banque privée à l’actionnariat public et siège
comme administrateur dans de grosses en­
treprises privées (AB Inbev, Lotus Bakeries,
Thrombogenic).
k
Est-ce éthiquement admissible?
G.G. - Les affaires ne reposent pas sur l’éthi­
que ou la morale, mais sur les rapports de
force politiques et sociaux. Dehaene pourra
certainement justifier du bien-fondé de sa
situation, en arguant que servir l’entreprise,
c’est servir la société. De façon générale, la
grille déontologique et éthique ne fait pas
partie de la lecture politique et économi­
que. Ce qui ne veut pas dire qu’il faille né­
gliger l’éthique! Mais si on se limite à cela,
on ne va pas loin dans l’analyse. Reconnais­
sons cependant que dans une vision idéa­
liste de l’Etat, on pourrait attendre autre
chose de ce qu’on appelle un homme
d’Etat. Même si je reste persuadé que la
majorité des hommes politiques obéissent
à des règles éthiques.
Gil Genappe, avec Damien Bodart
“Tous pouvoirs confondus. Etat, capital
et médias à l’ère de la mondialisation”,
éd. EPO.
PhotoNews
k
Au sud du pays, le club le plus sélect s’appelle
le Cercle de Wallonie. Selon l’annuaire des mem­
bres, seule Joëlle Milquet, parmi les ténors poli­
tiques francophones, n’y a pas ses habitudes. Il
succède au vacillant Cercle de Lorraine, rendezvous de tout ce que Bruxelles et le Brabant wallon
comptaient de particules, de présidents de
conseils d’administration et de politiciens snobs.
Pour le patron du Cercle de Wallonie et ex-poids
lourd des médias André Van Hecke, ce type de
cercle à l’ancienne, refermé sur lui-même, ne
présente plus d’intérêt. Sa formule à lui, celle de
son indéniable succès, tient en trois lettres: PME.
En mars dernier, Belgique et Chrétienté
organisait une marche contre l’avortement.
C
onstitués en ASBL, plusieurs mouve­
ments spirituels ont multiplié les actions
pour promouvoir leurs idées et y sensibi­
liser les politiques. Derrière leur discours plein
de bon sens se cachent la tentation obscuran­
tiste et le retour à des valeurs que ne partagent
plus l’immense majorité des Belges.
Belgique et Chrétienté
En 2007, une action de représailles est
menée contre RTL, “coupable” d’avoir diffusé
une promotion pour Plug TV montrant un Christ
ventripotent en limousine avec des filles légè­
rement vêtues. En avril 2010, à l’aube de la
célébration des 20 ans de la loi dépénalisant
l’avortement, une manifestation était organi­
Les vrais lieux de pouvoir
Les chefs de petites entreprises gèrent 80 % de
la richesse wallonne. C’est donc eux, plutôt que
les grandes familles ou les capitaines d’industrie
d’antan, qu’il faut choyer désormais. A l’étroit
dans son château des débuts, sur les hauteurs
de Namur, Van Hecke a réussi un coup de génie
en s’installant dans une aile du château du Val
Saint-Lambert. Les patrons de PME du bassin
liégeois s’y retrouvent le midi pour des déjeunersconférences, des séminaires ou tout simplement
pour un moment de détente. Là, le maître des
lieux leur fait rencontrer, le plus naturellement du
monde, tout ce que le sud du pays compte com­
me responsables politiques. Et s’enorgueillit de
contribuer, par cette proximité d’un nouveau
genre, à la croissance économique locale.
Le Cercle gaulois
Beaucoup plus belgicain et officiel est le Cer­
cle gaulois. Fondé en 1848, installé dans le Parc
de Bruxelles, ce cercle “artistique et culturel”
compte environ 1.200 membres, dont des gens
aussi influents qu’Etienne Davignon, Gérard
Mestrallet ou Albert Frère, mais aussi des diplo­
mates et des représentants des institutions
européennes.
De Warande
Faut-il s’étonner du score de Bart De Wever aux
élections du 13 juin? Oui, si l’on considère que
son parti n’était encore, il y a trois ans, que le
“Petit Poucet” accroché aux basques du CD&V.
Non, si l’on connaît le jeu d’influence en sa fa­
veur, via le patronat flamand et le club très privé
De Warande, logé dans l’ancien hôtel Empain, le
long du Parc de Bruxelles. Le leader nationaliste
a pu y compter sur les voix du VOKA (puissante
fédération des PME flamandes), du VEV (Union
des entreprises flamandes) et d’une frange du
très catholique Boerenbond, lesquels constituent
le noyau dur de la Warande, qui compte près de
1.800 membres triés sur le volet. Au départ, De
Warande vise à assurer une représentation et
une présence flamandes fortes à Bruxelles. Plu­
sieurs de ses membres ont publié, en décembre
2005, un manifeste appelant à l’indépendance
de la Flandre pour raisons économiques. C’est
de là que viennent les affirmations (statistique­
ment sans fondement) selon lesquelles les trans­
ferts Nord-Sud coûteraient 1.800 € par an à
chaque Flamand. Rassemblant des patrons pour
qui l’autonomie de la Flandre est la garantie d’une
meilleure croissance économique, il compte
parmi ses piliers quelques politiques très “enga­
gés”, dont Jan Jambon (N-VA) et le boss du
Vlaams Belang, Bruno Valkeniers.
L’ordre du prince d’Orange
Dans la même mouvance, il faut citer Orde van
den Prince, association tentaculaire pour la dé­
fense de la langue néerlandaise et de l’unité
territoriale flamande de Dunkerque à Terneuzen.
Riche de 3.000 membres, basé à Anvers, l’Ordre
se dit apolitique et areligieux, mais on y trouve
nettement plus de sympathisants du CD&V que
du SP.a! En bonne place dans l’organigramme de
la section de Rhode-Saint-Genèse: un certain
Herman Van Rompuy. Son frère Eric anime, lui, la
section de Zaventem.
mouvements spirituels
sée à Bruxelles. A l’origine de
ces actions, l’ASBL Belgique et
Chrétienté, dont l’objet est de
“combattre tout acte de racisme antichrétien” et qui lutte
contre l’avortement, le mariage
homo et l’euthanasie… Proche
de l’extrême droite, l’associa­
tion appelle aussi à boycotter
des marques ou firmes, telles
que les glaces Ola ou Walt
Disney, prétextant des publici­
tés jugées “blasphématoires”.
Pro Vita
Jouissant du soutien affiché du primat de Bel­
gique, Mgr Léonard, cet autre lobby très catholi­
que est aux commandes de toutes les manifes­
tations contre l’avortement, pudiquement
rebaptisées “pour la vie”. Créée en 1973 par des
disciples de Mgr Lefèbvre, l’association a compté
dans ses rangs plusieurs anciens proches du
parti fasciste Rex.
Opus Dei
En 1995, la banque anversoise Anhyp était la
vedette d’une célèbre affaire de fraude fiscale.
Plusieurs de ses cadres étaient inculpés. A l’ex­
ception miraculeuse de son P.-D.G. Claude de
Villenfagne de Vogelsanck, dignitaire bien connu
de l’Opus Dei. Rien à voir? Pas sûr. On sait que
plusieurs des membres de l’Œuvre de Dieu, qui
noyaute la plupart des mouvements sociétaux
et/ou politiques liés à la droite catholique, ont
joué un rôle essentiel dans l’économie belge.
Confirmation avec la suite de l’affaire AnHyp. En
1999, la banque était reprise par Axa, le bancas­
sureur français des très catholiques Claude Bé­
béar et Henri de Castries. On reste en famille.
Renouveau charismatique
Mouvement catholique mystique davantage
que lobby, le Renouveau charismatique compte
néanmoins en ses membres des personnages
influents dans l’Etat: le chef de cabinet du roi
Albert II, Jacques van Ypersele de Strihou, et la
reine Fabiola. Feu le roi Baudouin était également
l’un de ses plus fervents adeptes.
Action pour la famille
Théoriquement “apolitique” et “neutre sur le
plan confessionnel”, l’ASBL bénéficierait pour­
tant du soutien d’élus MR, CDH, CD&V et CDF.
Elle participe aussi aux “Marches pour la vie”,
dans le but de “sensibiliser la société civile et
d’interpeller le monde politique sur la probléma-
tique de l’avortement”. Confessionnellement
neutre? Son président est prof de philosophie
et de théologie à l’UCL. Son secrétaire, ancien
élu CVP, se dit “chrétien évangéliste”, son tré­
sorier est président du CDF (ancienne aile
droite du PSC).
Action pour la famille ouvre ses portes et ses
conférences au collectif Présence musulmane,
caisse de résonance de Tariq Ramadan en
Belgique. Homophobe notoire et assimilé aux
redoutables Frères Musulmans, il partage beau­
coup de vues avec Mgr Léonard sur les ques­
tions dites “éthiques”. Présence musulmane
possède de bons relais au sein du MRAX (Mou­
vement contre le racisme, l’antisémitisme et la
xénophobie).
Vigilance musulmane
Sous la bannière médiatique de “l’islamopho­
bie” , ce think tank multiplie les prises de posi­
tion réactives dans tous les débats de société
tournant autour des questions religieuses. Il est
notamment animé par Mehmet A. Saygin, le
représentant en Belgique du parti islamoconservateur turc au pouvoir, l’AKP, et trouvant
notamment des relais au sein du conseil
d’administration du MRAX.
11/08/2010
ê
télé moustique
En couverture
federations et syndicats
ê
lobbies europeens
L
Saint-Pierre d’Ottignies, devenu ministre des
Affaires économiques dans le gouvernement
Tindemans et président du Conseil d’adminis­
tration de l’UCL.
Mais d’autres réseaux économiques pè­
sent à l’occasion sur la gestion du pays. Par
exemple, le MOC (Mouvement ouvrier chré­
tien) est connu pour placer ses pions dans
tous les coins d’influence, à l’image de son
ancien président André Oleffe, l’un des fonda­
teurs de Louvain-la-Neuve et de la clinique
Quant à l’ACW, équivalent flamand du MOC,
elle regroupe sous son aile toutes les organi­
sations des travailleurs chrétiens et toucherait,
via ses ramifications, deux Flamands sur trois.
L’ACW travaille aussi en collaboration très étroi­
te avec nombre d’autres organisations chré­
tiennes, comme Welzijnszorg et Pax Christi.
Naguère, elle regroupait également la banque
Bacob et les assurances DVV. Il y a quelques
années, l’ACW a supprimé sa banque et s’est
acheté le droit d’entrer au sein du groupe ban­
caire Dexia où, avec 15,3 % du capital, elle est
l’un des principaux actionnaires. Il faut dire
qu’elle y compte un sympathisant de choix: le
président du Conseil d’administration himself,
l’ex-Premier ministre et toujours membre du
CD&V et de l’ACW, Jean-Luc Dehaene.
es fédérations multisectorielles (Fédéra­
tion des entreprises de Belgique, Union
des classes moyennes...) sont de puis­
sants lobbys auxquels les politiques n’ont pas
grand-chose à refuser. Difficile de résister à
l’argument massue mille fois resservi: aider
les entreprises, c’est - paraît-il - créer de l’em­
ploi. Mais refuser, c’est s’exposer à une cam­
pagne de dénigrement qui peut se payer cash
aux élections. Ces fédérations font-elles les
lois pour autant? Notre monde globalisé réduit
effectivement la marge de manœuvre des po­
litiques, souvent aux prises avec les exigences
princières de la “main invisible” du marché.
loges francs-maçonnes
es “affaires”
cer leur carrière,
qui ont en­
ne viennent plus
glué des
que sporadique­
mandataires so­
ment aux réu­
cialistes à Charle­
nions. Et s’ils en­
roi en 2007 et
trent alors qu’ils
dans les affaires
sont déjà politi­
Agusta et Das­
ciens, on ne les
sault en 1993 ont
voit que quelques
révélé les liens
fois avant qu’ils
maçonniques
d i s p a ra i s s e n t ,
unissant la plu­
comme c’est le
part des protago­
cas pour un célè­
nistes. La francbre ancien com­
maçonnerie
missaire euro­
serait-elle aussi
péen libéral
un levier d’in­
wallon.
fluence politique
et financière?
Le fantasme du
C’est plus com­ Les temples franc-maçons seraient-ils le siège
tremplin maçonni­
plexe. La franc- de pouvoirs occultes? Pas si vite…
que viendrait
maçonnerie ne
d’une phrase ri­
serait pas à proprement parler un “réseau”, tuelle qui prescrit que “à compétence égale, tu
mais un conglomérat de cercles privés (les lo­ choisiras un frère”. Ce qui se pratique aussi
ges) sans grands liens les uns avec les autres. bien chez les anciens de Polytechnique, de
Ce qui n’empêche pas les membres de se ren­ Solvay, des Jeunesses socialistes, de la Besace
contrer en d’autres circonstances et de nouer libérale, ou des scouts catholiques. Le copi­
des relations. Il est toutefois communément nage est une pratique universelle qui touche,
admis que les hommes (et femmes) politiques, sans distinction, tous les milieux sociaux quels
s’ils sont déjà initiés au moment de commen­ qu’ils soient.
10
télé moustique 11/08/2010
Plus qu’au niveau belge, c’est donc au Parle­
ment européen ou à la Commission que se
manifestent avec le plus d’évidence ce qu’on
appelle poliment les “réseaux d’influence”. Par­
fois, cela va jusqu’à la corruption de mandataire
public, comme le révélèrent, en 2008, les “Worst
lobby awards”. Lauréate dans la catégorie du
clubs mondiaux
Belga
L
A
Bruxelles, 15.000 lobbyistes “officiels” ont
été répertoriés. Leur fonction: empêcher
les parlementaires européens de voter
des réglementations défavorables à leur secteur.
Exemple: les lobbys pharmaceutiques ont réussi
à berner l’Organisation mondiale de la Santé et
le monde entier pour faire croire à une pandémie
mondiale de grippe A et écouler leurs vaccins.
Actuellement, ce sont les lobbyistes du secteur
de l’alimentation industrielle qui sont sur les
dents. Ils négocient pour empêcher que l’on vote
l’étiquetage détaillé des produits d’alimentation
industrielle, et masquer les tombereaux de sucre
et de sel dont ils bourrent leurs préparations.
D
ans ces réunions entre politiciens de
très haut vol et patrons de grands grou­
pes industriels ou financiers se discu­
tent, en cercle très restreint, les grandes lignes
de la politique économique mondiale.
Le groupe Bilderberg
Ce club des “maîtres du monde” rassemble
annuellement politiciens, stratèges, hauts
fonctionnaires et P.D.G. Soit environ 130 per­
sonnes. Tout ce qui s’y dit est marqué du
sceau du secret. Né en 1954 à l’hôtel Bilder­
berg situé à Oosterbeek aux Pays-Bas, il comp­
te, parmi les fondateurs, le prince Bernhard
des Pays-Bas, David Rockefeller et l’ex-Premier
ministre belge Paul Van Zeeland.
La Commission trilatérale
Sous-groupe du Bilderberg né en 1973,
cette organisation privée regroupe 300 à 400
personnalités parmi les plus influentes du
globe. Objectif: promouvoir la coopération poli­
tique et économique entre ces trois zones. Sur
le mode de la mondialisation, bien sûr.
Le Forum de Davos
Ce grand raout des gens les plus puissants
de la planète a symbolisé durant les années
90 tout ce que les altermondialistes repro­
Les vrais lieux de pouvoir
Où croiser nos politiques?
Citons encore Klaus-Heiner Lehne, député
européen, nominé pour sa double casquette de
député européen et d’avocat pour les ques­
tions de concurrence et de réglementation, et
pour avoir utilisé son statut de député afin de
permettre à des avocats de s’adonner à du
lobbying dissimulé. Ou Caroline Jackson, sélec­
tionnée pour sa double compétence: représen­
tante élue en charge des sujets environnemen­
taux et conseillère en environnement mandatée
auprès d’une société privée de gestion des
déchets, Shanks.
chaient au néolibéralisme sauvage. La petite
station suisse et chic des Grisons où se tient
cette réunion annuelle se souvient encore des
heurts qui s’y sont déroulés. Créé en 1971 à
l’initiative d’une professeur suisse d’Econo­
mie, le Forum mondial de Davos réunit diri­
geants d’entreprise, responsables politiques
du monde entier ainsi que des intellectuels et
des journalistes qui débattent des “problèmes
les plus urgents de la planète”. A savoir, sur­
tout de l’économie, mais aussi, à l’occasion,
de la santé et de l’environnement.
Cafés, restos, clubs de sport:
visitez leurs lieux de rendez-vous favoris.
L’intimité des salles de fitness permet de muscler bien des relations politiques.
V
ous connaissez l’aire
d’autoroute de Nivelles
Nord? En Wallonie, elle
est sans doute le plus impro­
bable des “lieux de pouvoir”
de nos politiques. Elio Di Rupo
et Joëlle Milquet y ont paraît-il
l’habitude de prendre, ensem­
ble, un petit-dé­
jeuner de travail,
avant de “monter”
à la capitale…
manière générale, tous les
restos qui jouxtent le Parle­
ment, réservent leur lot de
bonnes (ou mauvaises) sur­
prises.
Les boîtes de nuit
Pour les politiques noctam­
bules logeant à
Bruxelles, le Mi­
rano (avant 23 h)
reste une valeur
sûre. Les plus bo­
bos-B.C.B.G. pré­
féreront le Woods,
dans le bois de la
Cambre, ouvert
par le roi du peo­
ple Carl De Mon­
charline.
Le plus improbable lieu
de pouvoir en Wallonie?
L’aire d’autoroute
de Nivelles-Nord!
En Belgique, les
rencontres entre
politiques qui
comptent se font
souvent en toute
discrétion. Soit
dans des lieux incongrus, soit
au domicile de l’un ou de
l’autre, loin des journalistes.
Mais cer tains profitent
d’autres structures. Cafés,
restos ou salles de sport se
prêtent bien à l’exercice. At­
tention: il suffit que trop de
monde connaisse leurs lieux
privilégiés pour que les politi­
ques changent de crémerie.
Reporters
Les clubs de foot
Le président Sarkozy au Forum de Davos.
Yves Leterme, Michel Daer­
den). A Sclessin, tout un mi­
crocosme, toutes tendances
confondues, se tape dans le
dos, les seuls à ne pas se par­
ler étant les deux sections ri­
vales du PS liégeois (Michel
Daerden-Alain Mathot).
Reporters
pire conflit d’intérêt: Piia-Noora Kauppi, députée
européenne finlandaise, qui participait depuis
1999 à l’illustre Commission économique et
monétaire du Parlement en charge de la législa­
tion sur les marchés financiers. Madame Kauppi
a entretenu des relations très étroites avec de
grands lobbyistes du milieu bancaire. Elle est
parvenue à aider les lobbies à promouvoir la
réglementation la plus légère et minimale.
L’idéal, pour rencontrer les
politiciens en goguette, reste
les loges d’Anderlecht (Guy
Van Hengel, Etienne Davignon,
Herman Van Rompuy) ou du
Standard (Didier Reynders,
Les restaurants
On sait que le goût du
bourgmestre de Bruxelles
Freddy Thielemans pour la
cuisine italienne le mène à la
Pergola, près du Heysel, ou
au Brigantino, boulevard Le­
monnier. Que Marie Arena
apprécie les cocktails de l’Ar­
chiduc, rue Dansaert. Que
Mischaël Modrikamen a ses
aises chez Mamy Louise, à
Uccle. On rencontrera les res­
ponsables socialistes bruxel­
lois à la Vieille Halle aux Blés,
soit au Novo, soit à la Brasse­
rie de Bruxelles. Ou encore
rue de Rollebeek, en face du
boulevard de l’Empereur. De
Les salles de fitness
L’homme d’affaires, comme
le politique, creuse sa tombe
avec les dents. Pour évacuer
les kilos en trop, nombre
d’entre eux fréquentent les
salles de fitness. D’autant
que l’intimité d’un bon sauna
peut délier quelques langues.
Les clubs les plus discrets et
les plus huppés s’appellent
Aspria (rue de l’Industrie ou
avenue Louise), Lloyds (drève
de Lorraine) ou le SainteAnne, derrière Val Duchesse,
lieu de ralliement des familles
d’eurocrates.
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