Que reste-t-il du music-hall à la française

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N° 232 Semaine du 01 octobre 2001 au 07 octobre 2001
La superproduction Moulin-Rouge, avec Nicole Kidman, ressuscite la folle époque des revues
parisiennes. Mais le glorieux passé du music-hall n'est qu'un souvenir. Pour qu'il gagne une deuxième
jeunesse, il doit impérativement sortir de son rôle d'annexe d'Eurodisney.
Auteur : Duteurtre Benoît
MOULIN-ROUGE
Quel est le point commun entre Pierre Boulez et Mistinguett, entre Colette et Charlie Chaplin, entre Jean Gabin et
Sarah Bernhardt ? Par goût ou par nécessité, tous ont
contribué à la gloire du music-hall: Boulez aux
Folies-Bergère, où il gagnait sa vie en jouant des ondes
Martenot; Chariot dans la même salle, où il se produisait
en compagnie d'une troupe d'acrobates; Colette au
Moulin-Rouge, où elle se présentait en «danseuse
égyptienne», Sarah Bernhardt à New York, où elle
déclamait un acte de Phèdre parmi d'autres attractions.
Quant aux jambes de Mistinguett, leur gloire a franchi les
générations et les frontières. Mais le music-hall fut aussi
cet incroyable carrefour des métiers, ce tremplin des
débutants, ce spectacle multiforme où chacun trouvait sa
place. Aujourd'hui, même quand les ballets de girls se
sont transformés en produits formatés pour touristes,
affleure encore la nostalgie de cette histoire étonnante:
dans un spectacle de Jérôme Savary consacré à
Mistinguett, dans les nouvelles revues du Moulin-Rouge
ou du Paradis latin, qui évoquent le Paris d'autrefois, ou
dans le nouveau film de Baz Luhrmann, Moulin-Rouge,
qui vient jeter des ponts entre l'esprit du rock et celui du
cancan.
Création européenne
Aujourd'hui, Las Vegas a planté sa propre tour Eiffel et accommodé à sa sauce les spectacles de cabaret du monde
entier. L'archétype du music-hall contemporain (celui que les Français découvrent en Amérique et que les
Américains découvrent en France) fait toujours appel au même genre de mélange: quelques chorégraphies de
jazz-dance; un tableau déshabillé à la cour de Louis XV, un voyage érotique vers l'Orient mystérieux et cruel, un
final à paillettes sur le grand escalier. Les cuisses et les seins défilent sur un rythme disco, entrecoupés par
d'habiles numéros de jongleurs ou de ventriloques... Comme les filles elles-mêmes sont censées arriver
d'outre-Atlantique et qu'elles chantent à la façon de Céline Dion, on finirait presque par oublier que le music-hall est
une vieille création européenne, née au XIXe siècle sur les bords de la Tamise.
Lorsqu'il ouvre, en 1861, son Oxford Music Hall, Charles Morton n'invente aucun genre à proprement parler; mais il
veut rassembler sur une même scène toutes les sortes de numéros et de divertissements: certains viennent du
cirque, d'autres du café-concert, sans négliger quelques actes de théâtre, des airs d'opérette et le fameux french
cancan, «une drôle de danse qui fait du bruit et qui vient de France», au cours de laquelle les filles relèvent leurs
jupons. Certains music-halls présentent des animaux sauvages; le genre s'apparente encore au fourre-tout. Dès la
fin du siècle, le phénomène s'étend dans plusieurs pays: aux Etats-Unis, où le music-hall prend d'abord le nom de
Vaudeville; en Allemagne, où le Wintergarten de Berlin accueille les chanteuses et les danseuses françaises:
Yvette Guilbert ou Cléo de Mérode.
A Paris, le genre du café-concert occupe longtemps toute l'attention. Depuis le Second Empire, des vedettes
populaires ont conquis la gloire au Café des sauvages, au Café des aveugles ou au Bataclan. Les artistes
d'avant-garde se retrouvent au Chat noir - où Erik Satie joue au piano et accompagne Paulette Darty dans sa valse
Je te veux. Le music-hall proprement dit apparaît en 1871 aux Folies-Bergère, avec son alternance de scènes
comiques, de chansons, de numéros divers et de petits ballets. Un peu plus haut, dans le quartier Pi-galle, le
Moulin-Rouge (surnommé «Palais de la femme») n'est pas un music-hall mais un bal, où les aristocrates éméchés
retrouvent les filles des rues. Chaque soir, on y danse le cancan, un peu avant 22 heures. Penché sur son verre
d'absinthe, Toulouse-Lautrec se lie d'amitié avec les vedettes de la maison: Grille d'égout, la Môme Fromage,
Valentin le Désossé et La Goulue. Au fond du jardin se dresse un éléphant de stuc, grandeur nature. Sur une petite
scène, on peut apprécier les numéros d'illusionnistes ou les «phénomènes physiques et mentaux». Dans son livre
sur le music-hall (PUF), l'historien Jacques Feschotte évoque le transformiste italien Fregolmi qui joue à lui seul des
pièces à 20 personnages ou le «phénomène» MacNorton, qui avale des litres d'eau, des grenouilles et des
poissons vivants puis restitue le tout.
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Faut-il vraiment rêver sur les exploits du Pétomane qui enchantait le public des années 1900 par les sonorités
variées qu'il produisait au moyen de son tube digestif ? Certains y voient plutôt une faute de goût de la Belle
Epoque; mais, au même moment, les chansons réalistes d'Yvette Guilbert donnent ses lettres de noblesse au
music-hall (Freud est l'un de ses fervents admirateurs). Affaibli par la Première Guerre mondiale, le genre va
connaître son apogée dans les Années folles, dans une forme de divertissement qui n'appartient qu'à lui: la revue à
grand spectacle.
L'apogée, les Années folles
Lancée au Casino de Paris en 1917, cette nouvelle féerie combine chanson populaire, grand orchestre, toiles
peintes et escaliers art-déco, costumes à plumes, plaisanteries sur l'actualité. Les plus brillants artistes apportent
leur contribution. Dans Paris qui danse ou Cach'ton piano, les refrains sont interprétés par Mistinguett et Maurice
Chevalier, bientôt rejoints par Joséphine Baker. Maurice Yvain compose la musique de Mon homme, dont Albert
Willemetz signe les couplets. Quelques directeurs et metteurs en scènes inspirés - Léon Volterra, Henri Varna,
Jacques Charles - supervisent le tout. A cette époque, une carrière de chanteur passe obligatoirement par le
music-hall: si Mistinguett, âgée de 50 ans, atteint l'apogée de sa gloire, d'autres, comme Arletty, Henri Garat ou
Jean Gabin débutent sur les mêmes scènes. A New York, Florenz Ziegfeld s'inspire des spectacles parisiens pour
19/02/2007 01:10
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créer les nouvelles revues de Broadway. Les spectateurs accourent du monde entier, mais le public reste
principalement composé d'amateurs bourgeois qui travaillent le jour et sortent le soir. En 1926, Mistinguett passe du
Casino de Paris au Moulin-Rouge,
dans une nouvelle
série de spectacles
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tourne. En 1940, les envahisseurs allemands
se hâtent encore d'aller sabler le Champagne sur les fameux lieux de
MARIANNE EN LIGNE - 32, rue René Boulanger - 75484 Paris cedex 10
plaisir ! Au lendemain de la guerre, le music-hall parisien
de(0)1
tremplin
pour
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(0)1 53encore
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53 72 29
72 les jeunes
chanteurs. Dès la Libération, Yves Montand se produit en première partie d'Edith Piaf au Moulin-Rouge. Line
Renaud se fait remarquer comme meneuse de revue. Mais la vie des spectacles subit de profonds
bouleversements: la radio, le disque, le cinéma et la télévision concurrencent sérieusement la vie nocturne. Les
auteurs-compositeurs délaissent le music-hall pour les cabarets de la rive gauche; bientôt, les vedettes yéyé
préféreront les tours de chant à l'Olympia. Le music-hall est passé de mode avec ses numéros, ses costumes et
ses décors. Pour survivre, il se transforme progressivement en distraction pour tour operators; ce qui impose aussi
de nouvelles règles: un spectacle immédiatement compréhensible par le public international; moins de chanson
française, davantage d'effets spectaculaires et, surtout, le fameux dîner-spectacle, pierre angulaire de cette
industrie touristique. Des établissements comme le Lido, sur les Champs-Elysées, tirent parti du nouveau style,
tandis que les Folies-Bergère s'efforcent de perpétuer la tradition. Jean-Marie Rivière, en chapeau haut de forme,
ravive un style parisien fondé sur l'humour et la dérision. Quelques grandes figures apparaissent encore,
notamment celle de Zizi Jeanmaire et de son «truc en plumes». Mais, désormais, leur talent compte moins que les
recettes obligées du music-hall international.
Prouesses et paillettes
Les ailes du Moulin-Rouge tournent toujours place Blanche. On peut les apercevoir entre les autocars qui déversent
les groupes de spectateurs. La grande salle conserve une belle allure des années 50, pimentée par quelques
oeuvres de Toulouse-Lautrec. La maison affiche encore grand train avec son menu riche en saumon, Champagne
et foie gras (de 500 F à 1 000 F par personne, avec deux représentations chaque soir, dans la salle bondée où
s'entassent quelque 500 convives). La direction de Jacki Clerico n'a pas lésiné sur les moyens pour la création de
Féerie, nouvelle revue à grand spectacle, dont la sortie coïncide avec celle du film Moulin-Rouge. Girls et boys
recrutés aux quatre coins du monde possèdent tout ce qu'il faut, à commencer par un solide métier de danseur.
Trois tableaux nous font découvrir successivement le repaire des Pirates; le cirque Doris; et surtout l'authentique
french cancan du Moulin-Rouge, avec ses jupons tricolores et ses acrobates. Sur scène se succèdent 100 artistes,
60 Dorriss Girls, 1 000 costumes et 500 paires de chaussures sur mesure. Pendant les changements de décor,
quelques prouesses funambulesques et numéros de ventriloques constituent le sel du spectacle: le public ne s'y
trompe pas et applaudit.
On le voit, le music-hall contemporain ne manque ni de prouesses, ni de paillettes, ni de formes arrondies. Sa
faiblesse réside plutôt dans la pauvreté des tours de chant qui constituaient, autrefois, le clou de la revue à grand
spectacle. On cherche vainement l'esprit ou la gouaille dans ces refrains mélos qui ponctuent le spectacle et
rappellent plutôt un bar d'hôtel à Hollywood. Le style des chanteuses rappelle trop péniblement les poncifs de la
variété internationale, avec ces voix bêlantes au mélo exagéré, qui triomphent dans Notre-Dame-de-Paris. Une
nouvelle fois, la revue apparaît comme un miroir de l'esprit du temps, pour le pire et pour le meilleur. Le solide
métier de Pierre Porte, le compositeur de Féerie, brille davantage lorsqu'il orchestre des tableaux pittoresques.
Mais, dans les nouvelles revues du Moulin-Rouge ou du Paradis latin, l'esprit de Paris se réduit à quelques
stéréotypes: une réminiscence d'Offenbach ou un rythme de java. On regrette aussi la disparition des orchestres de
variété qui donnaient au music-hall sa richesse. Celui du Moulin-Rouge a survécu jusqu'en 1992... Les directeurs
de revue ne manquent jamais d'arguments pour présenter cette disparition comme un progrès. Les musiques sont
désormais réalisées en studio avec une gamme de synthétiseurs et d'effets spéciaux. Les enregistrements diffusés
chaque soir ont coûté plusieurs millions de francs - à peu près l'équivalent du budget annuel d'un orchestre. Sauf
que la même musique servira pendant six ans, économie notoire !
Dans son histoire, le music-hall parisien se trouve aujourd'hui à un carrefour: emporté d'un côté par l'économie
touristique qui l'a transformé en annexe d'Eurodisney au coeur de Paris; mais, simultanément, envahi par des
vagues de nostalgie. En 1953, Moulin-Rouge de John Huston cherchait à recréer le monde de Toulouse-Lautrec et
de Jane Avril. Aujourd'hui, le Moulin-Rouge de Baz Luhrmann regarde l'époque de La Goulue comme une
inépuisable source d'énergie moderne. Et l'on se prend à rêver que les temples du music-hall parisien se lancent
dans l'aventure, cherchent à conjuguer tous les arts du spectacle, attirent sur scène de nouvelles générations
d'interprètes - sans négliger le grand escalier ni les danseuses nues ! Gageons que le touriste moyen, après avoir
visité la tour Eiffel et passé la soirée au Moulin-Rouge, pense avoir découvert les charmes de Paris. Mais ce n'est
pour lui qu'un circuit parmi d'autres. Il reviendrait sans doute plus volontiers, si les faux bistrots de luxe n'avaient
pas remplacé les vrais bistrots populaires, et si les spectacles de cette ville conservaient un parfum unique
* Le Moulin-Rouge, 82, bd de Clichy, 75018 Paris. Tél.: 01 53 09 82 82.
A noter: «Toulouse Lautrec ressuscité à Beaubourg», cent graphistes affichistes-graphistes rendent hommage au
peintre. Centre Pompidou, 75001 Paris.
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19/02/2007 01:10

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