Profession:troubadour,saltimbanque
Transcription
Profession:troubadour,saltimbanque
8 MARDI 24 MARS 2009 LE BERRY REPUBLICAIN Berry Le portrait du mardi DUN-SUR-AURON ■ Le chanteur Thibaud Dumaine écume les scènes de la région avec plusieurs formations Profession : troubadour, saltimbanque Vivre ses rêves d’adolescent : c’est ce que Thibaud Dumaine met en pratique, depuis bientôt vingt ans. Et il ne regrette pas ce choix. L ■ BIO EXPRESS 1970 Naissance à Bourges. Lycée Pierre Thiesset C’est au lycée Raoul-Follereau de Nevers que Thibaud découvre sa passion pour la musique. Après quelques mois en fac, il décide de s’y consacrer à temps plein. a musique, ce n’est pas la représentation qu’en donne le petit écran. D’ailleurs, les star lettes fabriquées en quel ques semaines, étiquetées et prêtes à être consom mées sitôt sorties de leur poulailler bondé de camé ras, ça commence à lasser. Les audiences de ces émissions décervelantes s’érodent. Bon, on n’assis te pas encore à un revire ment complet des entre prises qui fournissent du temps de cerveau humain disponible pour cocaco la*. Mais, parfois, quel ques initiatives méritent d’être saluées. Des camé ras de TF1 sont venues à Levet, samedi, s’intéresser à un groupe berrichon, le Gospel Mind. Un reporta ge sera diffusé dans le JT de Pernaut, s’il vous plaît, pendant la semaine précé dant Pâques. Voilà qui changera des « artistes » formatés. 1989 Premiers « vrais » concerts, avec le groupe Aimsight. 1996 Parti à Lyon suivre une formation de musicien professionnel, Thibaud Dumaine obtient le statut d’intermittent du spectacle en 1997. 2003 Retour à Bourges. Il joue notamment avec le groupe Desert bag. 2009 Malgré la réforme du statut de l’intermittence, menée six ans plus tôt par le gouvernement Raffarin, Thibaud Dumaine est toujours chanteur professionnel et tourne dans plusieurs groupes : Gospel Mind, Taboo, Little circus, Desert bag, Spicy soul… « Quand quelque chose nous anime, il faut aller au bout » Thibaud Dumaine est l’ u n d e s c h a n t e u r s d u g ro u p e d e g o s p e l . L e s strass et les paillettes, ce n’est pas son genre : « Les musiciens gnangnan, le microcosme parisien qui se regarde le nombr il, c’est insupportable. Moi, mes modèles, ce sont BB King, Joe Cocker, Lennon, la musique noire améri caine, le blues, le gospel, le jazz, le rock anglais, Hendrix, toute la période des années 65 à 75, où il y avait un énorme élan créatif… En fait, ce sont tous les musiciens qui mettent leurs tripes, qui donnent tout pour faire vi brer le public. » C’est pour ces choses vraies que le Berruyer a choisi de lier son existence à la musique. « Quand j’étais enfant, je voulais être médecin, se remémo retil. La musique, c’est venu au lycée, avec les rencontres. J’ai côtoyé un guitariste, et j’ai eu la ré SUR SCÈNE. Thibaud Dumaine n’aime pas les artistes formatés. Pour lui, la musique, ça vient « des tripes ». vélation : quand j’ai vu l’état d’esprit du groupe, tout ce que ça représen tait, ça m’a pris. Et ça ne va pas en s’améliorant. » Premier concert devant les camarades du lycée, bœufs entre copains… « Au départ, je voulais fai re de la guitare. Et comme on ne trouvait pas de chanteurs, je m’y suis mis. Je suis parti de r ien du tout, je n’avais pas de for mation, juste l’envie. » De ■ Le CD de Gospel Mind disponible Gospel Mind n’a été créé qu’en 2006. Composée de musiciens aguerris, la formation commence à se faire un nom. Samedi, son concert à l’église de Levet affichait complet. La prochaine prestation aura lieu le 5 avril, à l’église de SaintAmand-Montrond. En attendant, vous pouvez vous procurer leur premier album*, qui vient tout juste de voir le jour. « On a enregistré à l’ancienne, avec un magnéto à bande, précise Thibaud Dumaine. On a recherché le grain, l’émotion et l’énergie du live, sans fioriture. » (*) http://www.gospelmind.fr/. rencontre en rencontre, le projet s’est construit. Après le bac, l’intermède à la fac a été de courte du rée. « J’ai arrêté en 1991, je n’en pouvais plus. Ça me démangeait de ne faire que de la musique. » Faire ce que l’on aime, ne pas vivre par procuration : « Quand quelque chose nous anime, il faut aller au bout. Surtout maintenant. Les conditions n’ont ja mais autant été réunies. Qu’estce qu’il y a à per dre, quand on essaie de concrétiser les choses qui nous animent ? Par rap port à ce que cela peut apporter, les risques de viennent ridicules. » Le jeune chanteur n’a pas hé sité pour franchir le pas. Certes, les premières an nées ont été… rock & roll. « Au début, c’était un peu la vie de bohème, au jour le jour. On vivait à plu sieurs dans une maison, on faisait beaucoup la fête et on se contentait de peu. On vivait simplement le moment présent, à fond. » Ap r è s s e s d é b u t s a ve c Aimsight, sa carr ière prend un tournant avec Chacal. De 1993 à 1995, le groupe joue dans toute la France, fait les premières parties de Hugues Aufray ou des Garçons Bou chers… « Ça a fait un peu de bruit à l’époque », se souvient Thibaud Dumai ne. Le batteur, Raphaël Chassin, a depuis fait une carrière prolifique, en ac compagnant, entre autres, Salif Keïta ou Sergent Gar cia. Mais en 1996, le grou pe se sépare, et Thibaud décide de suivre une for mation de musicien pro fessionnel à Lyon. Il ob tient le tant convoité statut d’intermittent du spectacle, et joue avec Big Circus, Blues de vache, fait les premières parties des Commitments ou de Ma ceo Parker… Jusqu’à ce que le gouvernement Raf farin ne s’attaque à l’in termittence : « Ça nous a coupé dans l’élan. On a eu de plus en plus de mal à se retrouver, chacun s’est jeté partout, pour trouver suffisamment de dates et garder son statut. » Plus de mille concerts Revenu en 2004 dans le Cher et installé depuis peu dans la campagne de DunsurAuron, Thibaud Dumaine multiplie lui aussi les formations. Par nécessité, mais surtout pour varier les plaisirs. « Les musiciens méritent leurs surnoms de trouba dours, ou de saltimban ques. La vie est faite pour vivre plein d’expériences, rencontrer plein de gens, voyager… » Aujourd’hui, il joue avec Gospel Mind, Taboo, Little circus, Desert bag, Spicy soul, et écume toutes les scènes des alen tours. « J’ai aussi écrit des musiques de courtsmé trages, et créé un specta cle musical avec mon frè re. Mais c’est difficile de tout concilier, reconnaît l’auteurcompositeurin terprète. Beaucoup de projets sont en attente. Démarcher, faire la pro motion, ça prend beau coup de temps et ça peut empiéter sur le travail de création. » Après plus de mille con certs, l’enthousiasme reste néanmoins intact : « Pas une seule minute, je ne re grette mon choix. Je fais ce qui me plaît. La musique, ça permet de communi quer, de faire s’évader les gens… On peut partager des moments vraiment forts. Dans les concerts de Gospel Mind, toutes les générations se retrouvent, alors qu’aujourd’hui, ça devient difficile de regrou per des gens de différents âges. La récompense est là. Le reste, c’est accessoi re. Je ne suis pas matéria liste, il me suffit d’avoir assez pour vivre. Être in dépendant, libre, faire de la musique à temps plein, c’ e s t q u a n d m ê m e u n luxe. » ■ (*) Selon la célèbre expression de Patr ick Le Lay, exPDG de TF1.