la réforme de l`administration italienne(*)

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la réforme de l`administration italienne(*)
Réformer l’ Etat:
la réforme de l’administration italienne(*)
Par Franco BASSANINI
Ancien ministre italien de l’Administration Publique et de la Réforme de l’Etat
Membre du Conseil d’Administration de l’E.N.A., Président de ASTRID
1. L'expérience de la Réforme de l’Etat et de l’Administration publique en Italie:
pouvons-nous en tirer quelques leçons générales?
Dans les dernières années du XX siècle, l’Etat et l’administration italienne ont été
bouleversés et largement transformés par un complexe et tumultueux processus de réforme.
Cette expérience peut être intéressante pour deux séries de raisons:
• à la fin des années 90, la condition de l’administration italienne était tout à fait
désastreuse: un État délabré, bureaucratique, interventionniste et centralisé et une
administration obsolète, inefficace et coûteuse (malgré quelques cas d’excellence)
freinaient sérieusement la croissance économique et sociale du pays; ils contribuaient
également à l’impressionnante croissance de la dette publique (qui était passée de 57,7%
du PIB en 1980 à 125% en 1994) (Tab. 1). Compte tenu de ce point de départ, les
résultats obtenus par la réforme italienne apparaissent très remarquables (Tab. 2 et suiv.).
• la réforme italienne, qui a débuté en 1990 et a reçu une forte impulsion à la fin de la
même décennie, a été conçue et mise en œuvre comme une réforme globale et complète
de l'Etat et de l'administration publique, a été projetée avec une optique
pluridisciplinaire, et a été réalisée avec la participation des citoyens, des entreprises et de
toutes les administrations publiques, centrales et locales. Elle est actuellement presque
complètement terminée dans ses aspects législatifs. Bien qu’elle n’ait été que
partiellement implémentée, elle a déjà provoqué de notables changements et elle peut
faire état de nombreux succès et de quelques échecs. Elle peut ainsi nous donner un bon
exemple, autant en raison de ses points de force et de ses réussites qu’en raison de ses
faiblesses et de ses échecs.
(*) Rapport présenté à Paris, le 5 mai 2004, Salle Victor Hugo de l’Assemblée
Nationale, Les Auditions de l’UMP : Réformer l’Etat (texte révisé – mai 2005)
1
Parmi les résultats positifs, on peut mentionner quelques exemples :
• le coût du personnel public est passé de 12,6% du PIB ( 1990) à 10,5% (2001) (Tab. 2 et
3), ce qui a contribué à la diminution spectaculaire du déficit public (qui est passé de
11,1% du PIB, en 1990, à 0,8% en 2000) (Tab. 5) et à la réduction de la dette publique,
passée de 125,3% du PIB en 1995 à 108,3% en 2002 (voir Tab. 4, 6);
• grâce aux lois de simplification (réductions des démarches bureaucratiques), le nombre
de certificats expédiés par année est passé de 70 millions en 1996 à 25 millions en 2001
(près de 45 millions ont été remplacés par l’auto-certification effectuée par les citoyens);
et le nombre des signatures certifiées requises par l’administration publique est passé de
38 millions en 1996 à 4,5 millions en 2001 (voir tableaux 7, 8, 17)). De plus, ont été
supprimés près de 200 types d’autorisations administratives;
• 100% des déclarations d’impôts sur le revenu (près de 33 millions par an) sont
actuellement envoyées à l'administration de finance et examinées avec des procédés
électroniques et la signature électronique a une totale valeur légale en Italie depuis 1998,
quoiqu’elle soit encore peu employée (800.000 chartes de signatures délivrées jusqu’à
maintenant);
• l’Italie a réalisé le plus grand programme de privatisation de tous les pays de l’OCDE
(qui, de 1993 à 1999, a fourni à l’État des revenus pour un total de 103 milliards d’Euros
– voir tableaux 9 et 10) et un important processus de libéralisation, grâce auquel les
secteurs du crédit, de la métallurgie, de l’électricité et des télécommunications ne
dépendent plus du monopole du gouvernement et ont été soumis à la libre concurrence;
• les opinions positives concernant la qualité des services (satisfaction du client) de
l’administration publique italienne sont passées de 38% (1996) à 59% (2001) (voir
tableau 11);
Le Rapport 2001 de l’OCDE sur la Réforme de la Réglementation en Italie (OECD 2001
Report on Regulatory Reform in Italy) faisait état des «impressionnants» succès de la
réforme italienne: «l’Italie de 2001 est très différente de l’Italie de 1990. De façon
graduelle, l’État interventionniste des années de l’après guerre, orienté vers les produits,
rigide et centralisé, s’est transformé en un État décentralisé, d’économie de marché, orienté
vers le consommateur. Ceci a pu se faire grâce à un programme continu de privatisation, de
libéralisation et d’ouverture du marché, de dérégulation suivie d’une nouvelle régulation, de
création d’institutions et d’initiatives de qualité normative. En tenant compte du point de
départ et des difficultés dans la réalisation de réformes lorsque les gouvernements sont
éphémères, le progrès est impressionnant ». Le rapport de l’OCDE soulignait en particulier
les résultats obtenus dans les domaines de la réglementation de haute qualité (voir tableaux
12 et 13) et du gouvernement électronique.
On sait que dans les domaines des réformes normatives et administratives, les
particularités nationales des systèmes constitutionnels n’ont pas une importance
remarquable. Ainsi, l’échange d’expériences et meilleures pratiques et le benchmarking
international sont des instruments importants pour l’amélioration de la qualité des
administrations publiques et pour faire face aux défis du Nouveau Millénium. Cependant,
chaque Pays a ses propres caractéristiques. Par conséquent, il n’existe pas un modèle
unique, mais plutôt quelques « ingrédients de base » , tels que
• une stratégie de changement claire;
• un leadership fort au plus haut niveau politique;
• une claire définition des responsabilités;
2
•
•
•
•
•
•
un appui politique soutenu à la réforme, de préférence bipartite;
une optique multidisciplinaire;
des objectifs précis et une mesure des résultats;
la participation des citoyens, des entreprises, des syndicats et d’autres «bénéficiaires»;
la formation managériale de la haute fonction publique: capacity building;
l’utilisation prudente et systématique des TIC pour restructurer l’administration
publique.
Quels sont donc les « ingrédients de base » de la réforme qu’on peut retrouver dans
l’expérience italienne?
2. Réforme et consensus. Plus un Etat est délabré, plus il est facile de trouver le
consensus nécessaire pour une réforme radicale.
Il y a vingt-cinq ans, Massimo Severo Giannini, le bien connu maître du droit public
européen, fut nommé ministre de la Fonction publique. Dans son rapport sur la situation du
gouvernement italien, il qualifia de désastreuse l’administration publique en Italie. Dix ans
plus tard, à la fin des années 80, il remarqua avec désespoir que personne n’avait pu
contester la vérité de cette conclusion, mais que rien n’avait changé et aucune réforme
n’avait été introduite. Cependant, la divulgation de ce constat si négatif sur la condition de
l’administration publique italienne et la conséquente conviction de la nécessité d’une
réforme radicale ont constitué des facteurs clés pour la réussite du processus de réforme au
cours des années suivantes. Au début des années 90, la nécessité de changement alimenta
une forte demande de réforme et facilita l'obtention d’un vaste consensus en faveur de
projets radicaux de modernisation de l’administration parmi :
- les citoyens,
- les entreprises,
- les syndicats,
- le Parlement, (une réforme bipartite),
- les gouvernements locaux.
De ce qui précède, trois leçons peuvent être retenues:
I. le consentement social et l'appui des citoyens, des organisations d’entreprises et des
travailleurs, des partis politiques et des gouvernements locaux sont les facteurs clés du
succès de toute réforme radicale de l' État;
II. les États avec une administration efficace en général affrontent de plus grandes
difficultés dans la projection de réformes radicales (plus inefficace est une administration
publique, plus facilement on obtient l'appui social nécessaire pour la réformer) ;
III. il est plus facile d’obtenir l’appui des syndicats pour des réformes administratives
rigoureuses et courageuses lorsque ceux-ci représentent en même temps les travailleurs
du secteur public et du secteur privé, car ils représentent ainsi tant les acteurs que les
bénéficiaires de la réforme.
Le deuxième point explique les fortes résistances rencontrées en France au cours des
années 90 pour réaliser des projets radicaux de réforme du gouvernement (voir par exemple
R. FAUROUX – B. SPITZ, Notre État, Paris 2001) et l’échec du projet de réforme du
ministère des Finances français (la «Réforme de Bercy»).
3
La troisième règle découle d’une comparaison entre les expériences françaises et
italiennes (voir Tab. 3). En Italie, les principaux syndicats du secteur public ont accepté et
même appuyé les mesures de réforme les plus rigoureuses qui concernaient les travailleurs
de la Fonction Publique: la décentralisation, la privatisation de l'administration publique, les
contrôles des coûts et des résultats, les primes rapportées à la productivité, etc. Au
contraire, en France, la résistance syndicale a fortement contribué à l’échec de la Réforme
du ministère des Finances. Il faut noter la grande différence entre les syndicats italiens et
français du secteur public: en Italie, les principaux syndicats du secteur public représentent
les travailleurs des secteurs publics et privés, alors qu’en France ils ne représentent que ceux
de l’administration publique. Dans la mesure où ils englobent les utilisateurs/clients de
l’administration publique et les travailleurs de cette administration, les syndicats italiens ont
été et se trouvent plus impliqués pour faire comprendre à ceux-ci la nécessité de moderniser
l’administration. Ils ont compris que la réforme, la modernisation de l’administration et
l’amélioration de la qualité des services publiques sont aussi des conditions nécessaires pour
la valorisation du travail et du rôle des fonctionnaires
3. Réforme complète, vision globale .
De 1865 à 1990, aucune réforme complète et globale de l’Etat et de l’administration
publique n’a été réalisée en Italie. De nombreuses réformes partielles ont été tentées, mais
toutes ont échoué; le système administratif s’est simplement amplifié par «accumulation de
couches ».
Par contre, ainsi que je l'ai souligné, dans la seconde moitié des années 90, le processus
de modernisation de l'Etat italien s'est achevé par une réforme complète du système
constitutionnel et administratif, avec une grande variété de buts:
• restructuration de l’État;
• modernisation des structures et des fonctions d’organisation;
• réinvention de la mission du secteur public;
• focalisation des activités de l’administration publique sur les besoins et les demandes des
citoyens;
• introduction de méthodes de benchmarking des résultats, certifications de qualité et
vérifications de la satisfaction du client;
• simplification des charges normatives et administratives;
• augmentation de la reddition des comptes, de la transparence, de la légalité et de la
compréhension des administrations publiques;
• actualisation de la culture des institutions publiques et des fonctionnaires publics;
• réforme du statut des fonctionnaires publics;
• utilisation des TIC pour la restructuration des procédures et de l’organisation.
La quatrième leçon que nous pouvons tirer de l’expérience italienne est donc la
suivante :
4
IV. Lorsque des innovations radicales sont nécessaires, les initiatives de réforme intégrale
et globale sont plus efficaces que les processus graduels. La tronçonneuse a quelques fois
plus chances de succès que l’anesthésie. Les réformes sectorielles sont plus au risque d’
échouer.
4. Méthodes et techniques de réforme.
Une des caractéristiques de la Réforme italienne est la connexion de tous les points de vue
présentés succinctement plus haut en un plan global organique réalisé à travers plusieurs
instruments, et chacun d’eux a été appliqué correctement avec des actions et des instruments
spécifiques.
Par ailleurs, quelques mécanismes et appareils de coordination et de connexion ont été
très importants. La réforme italienne a dû affronter de fortes résistances bureaucratiques et
sectorielles. Pour dépasser ces résistances, un rôle fondamental, au moment des décisions
stratégiques. a été joué par le premier Ministre. Les trois Premiers ministres au cours de ces
années (Romano Prodi, Massimo D’Alema et Giuliano Amato) ont toujours montré un
« strong commitment », un grand intérêt pour la réforme et un fort engagement personnel :
l’énergique appui qu’ils ont donné au ministre de l’Administration publique et de la
Réforme de l’Etat a constitué un facteur décisif de succès.
La décision de donner à un seul ministre, en force de délégations spécifiques du Premier
ministre au ministre de l’Administration publique, tous les pouvoirs et toutes les
responsabilités pour coordonner toutes les politiques de réforme et modernisation de l’Etat
(réforme administrative, amélioration de la qualité de la réglementation, réforme de l’emploi
public, délégation des pouvoirs aux autorités régionales et locales, gouvernement
électronique, innovation de l’administration publique), a joué elle aussi un rôle décisif.
Maintenant, le cabinet de M. Berlusconi, en charge depuis juin 2001, a divisé ces pouvoirs
et ces responsabilités entre quatre ministres (administration publique, TIC et
cybergouvernement, questions régionales, réforme constitutionnelle et décentralisation).
Par conséquent :
V. dans le processus de réforme, le rôle du «chef du gouvernement» (qu’il soit appelé
Président, Premier ministre ou Chancelier) est crucial dans tous les cas. Parmi les
facteurs clés de la réussite de la Réforme on doit rappeler sans doute :
• une stratégie de changement claire au plus haut niveau de décision politique ;
• un ferme appui politique de la part du chef de gouvernement;
• un leadership énergique de la part du ministre chargé de la réforme;
• la concentration , dans ses mains, de tous les pouvoirs et de toutes les responsabilités
nécessaires pour coordonner le processus de réforme.
Dans le cas de l’Italie, le gouvernement a sollicité et obtenu de puissants outils pour mener à
bien le processus de réforme de l'Etat. Selon la Constitution italienne, le Parlement peut
donner au Gouvernement le pouvoir d’adopter des décrets législatifs (sources primaires)
dans certaines matières, dans le cadre de critères établis par la loi: ainsi, en 1997, avec la
«première Loi Bassanini», le Parlement italien a investi le gouvernement du pouvoir
d’adopter, dans le cadre des principes généraux établis par cette loi, une très vaste gamme
de «décrets législatifs» pour la réalisation de la Réforme. Grâce à quatre lois successives
5
proposées par le Ministre de la Fonction Publique (de 1997 à 2000), le Parlement a autorisé
le gouvernement à substituer (et modifier) un grand nombre de lois primaires par des décrets
gouvernementaux (règlements de deuxième niveau) surtout dans deux secteurs principaux:
procédures administratives et organisation de bureaux d’administration publique, la
réglementation de ces secteurs étant ainsi, sauf que pour les grands principes, établie par le
gouvernement. Cependant, dans les deux cas, les décrets gouvernementaux devaient être
approuvés par le Gouvernement avec l'avis préalable d’un comité parlementaire spécial et
avec l'avis préalable de la Conférence nationale permanente des autorités régionales et
locales.
Ces avis n'étaient pas qualifiés par la loi comme contraignants. Mais le gouvernement a
décidé, comme ligne générale de conduite, d’accepter les intégrations et les modifications
proposées par les deux organismes consultatifs et, de plus, de suivre une méthode de
coopération journalière avec les autorités régionales et locales et avec le Comité
parlementaire.
En ce qui concerne les gouvernements régionaux et locaux, le gouvernement s’est
efforcé de trouver une combinaison correcte entre un leadership fort à l’échelle nationale et
la nécessité de préserver l’autonomie des gouvernement locaux dans le choix de solutions
qui, d’une part, prendraient en compte les différences et, d’autre part, permettraient
d’atteindre les objectifs communs de tout le système, en se basant sur le principe de
subsidiarité : l’association avec les autorités régionales et locales a constitué l’autre élément
clés de la réussite de la réforme.
La même méthode de dialogue social ouvert a été adopté avec les autres acteurs et
parties intéressés de la société – comme les syndicats, les organisations de chefs
d’entreprises, les associations de consommateurs – tous également intéressés au succès de
la réforme, bien que pour des motifs différents.
Cette décision s’est appuyée sur deux motifs: il est plus facile d’obtenir le consensus
nécessaire à la réussite d’une réforme radicale si à sa planification participent les acteurs
sociaux les plus importants; par ailleurs, si un leadership fort et une direction centralisée
sont indispensables à la planification et à la mise en oeuvre du processus de réforme,
l’implantation de ce processus réclame une participation directe de toutes les
administrations publiques, de tous les hauts fonctionnaires et d’une large variété d’acteurs
sociaux. Enfin, une direction énergique à la tête du processus de modernisation de l'Etat
permet de maintenir la cohérence du plan de la réforme, bien qu’il y ait de nombreux
participants.
Ainsi:
VI. la participation d’une grande variété d’acteurs institutionnels et sociaux (Parlement,
administrations centrales et gouvernements locaux, syndicats, organisations d’entreprises
et de consommateurs) élargit le consensus et facilite la mise en place de la réforme. Plus
le leadership est fort, plus il est facile d’obtenir la participation d’un grand nombre
d’acteurs sans que le plan de réforme perde sa cohérence.
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5. La réorientation des missions de l'Etat: un gouvernement plus compact mais plus
efficace. Succès et échecs.
L’examen des principales lignes directrices de la réforme italienne permet de dégager
quelques autres leçons importantes .
Tout d’abord, une réforme radicale ne peut concerner seulement l’organisation de l'Etat
mais doit en même temps (ou même, avant) reconsidérer et réinventer la mission des
institutions publiques.
Au début des années 90, l'Etat italien était à la fois trop interventionniste et intrusif et
tout à fait inefficace. Il fallait donc, tout d'abord, s’efforcer de recentrer et refocaliser les
institutions de l'Etat sur ses missions fondamentales, au moyen de:
•
l’élimination des activités gouvernementales superflues;
•
la libéralisation et la privatisation des public utilities;
•
l'outsourcing d’autres activités et des services publics que le secteur privé
(organisations commerciales et organisations sans buts lucratifs) pourrait réaliser et
délivrer plus efficacement et avec une meilleure combinaison entre les coûts et la qualité
des services.
Ainsi que nous l’avons déjà souligné, en Italie, les succès du programme de
libéralisation et de privatisation ont été remarquables, principalement dans huit secteurs.
Cinq d’entre eux étaient encore, au début des années 90, assujettis à un régime de
monopole public (électricité, fourniture et distribution du gaz, télécommunications,
chemins de fer, courrier et télégraphe), deux étaient dominés par des oligopoles
d’entreprises d’Etat (crédit et transports locaux) et le dernier était soumis à une
réglementation très intrusive et à un régime d'autorisations administratives qui en fait
protégeaient les oligopoles locaux (commerce de détail). Le processus de libéralisation de
tous ces secteurs est maintenant achevé ou se trouve dans une phase très avancée.
Dans de nombreux cas, les citoyens ont déjà commencé a percevoir les bénéfices de la
libre concurrence. En tout cas, le programme italien de libéralisation peut être considéré
comme un des plus remarquables en termes de revenus totaux (voir tableaux 9 et 10: près
de 130 milliards d’Euros entre 1977 et 2002, 14% du PIB, dont plus de deux tiers réalisé
dans les années 1996-2000) et il a beaucoup contribué à la croissance du marché
actionnaire du pays (passé de 11,5% du PIB en 1992 à 77% en 2000). (voir tableau 14).
D’importants progrès ont également été réalisés dans l'outsourcing d’un grand nombre
de services et d’activités des administrations centrales et locales.
Cependant, de fortes résistances (bipartites) ont bloqué l’approbation par le Parlement
des projets de lois relatives à la libéralisation des activités professionnelles libérales et des
fonctions d’entreprise des services publics locaux (public utilities), qui avaient été
proposés par les gouvernements de centre-gauche, et de nombreux gouvernements
régionaux ont freiné la libéralisation du commerce au détail, établie en principe par un
décret législatif du gouvernement national, dans le cadre de la réforme de l'Etat.
De plus, des résistances culturelles et idéologiques puissantes n’ont pas cessé d’
entraver ou de freiner l’exécution de cette partie de la Réforme. Des résistances très fortes
étaient prévues parmi les bureaucrates et les partis politiques de gauche; mais elles se sont
révélées encore plus fortes dans les partis politiques de droite ainsi que dans les tribunaux
et les organes de contrôle.
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On peut en tirer les réflexions suivantes:
VII. la Réforme doit reconsidérer la mission de l'Etat, la refocaliser sur ses tâches
principales, chercher à réaliser un gouvernement plus compact et plus efficace: un État
qui fasse moins, mais mieux;
VIII. les processus de libéralisation, de privatisation et d'outsourcing se heurtent à de
plus grandes difficultés et à de plus grandes résistances lorsqu’ils affectent les oligopoles
locaux plutôt que les oligopoles nationaux.
6.
Décentralisation: rapprochement des services publics vers les citoyens.
La governance démocratique des sociétés modernes complexes, à l’époque de la
mondialisation et des TIC, demande une division raisonnée du travail, des tâches et des
responsabilités entre les gouvernements centraux, régionaux et locaux, ainsi qu’un
gouvernement local plus fort et plus efficace, conformément à ladite règle de subsidiarité.
De fait, la mondialisation n’a pas diminué, bien au contraire, elle a amplifié le rôle des
institutions locales de gouvernement. L’économie de la connaissance n’élimine pas la
valeur de la proximité sociale et culturelle. Plus encore, le besoin de coordination qui,
dans le passé, pouvait être satisfait correctement en centralisant les décisions concernant
les politiques publiques à une échelle territoriale plus vaste, trouve aujourd’hui une
réponse adaptée avec la nouvelle possibilité de coordination entre égaux (peer to peer)
que le TIC ont permise. La pluralité des décideurs n’est plus une source d’anarchie, au
contraire, elle garantit la cohérence avec les besoins et les demandes des citoyens.. Le
modèle de fonctionnement d’Internet, basé sur une combinaison expérimentale efficace
d’autonomie et de coopération, suggère l’application de modèles analogues pour le
gouvernement.
Pour cette raison, au début des années 90, l’Italie a décidé de convertir son système
institutionnel centralisé en un système fédéral. Pour ce faire, une vaste réforme
constitutionnelle était bien évidemment nécessaire. Cette réforme a été approuvée par
référendum en 2001, elle doit être complétée par une réforme du Sénat et se trouve en
attente d’un travail assez complexe d’exécution, détenu jusqu’à présent par le changement
de la majorité parlementaire, suite aux élections de 2001. Cependant, au cours des années
90, dans le cadre des «Lois Bassanini», la Réforme fédérale avait été préparée et anticipée
par une vaste série de mesures de décentralisation, destinées à préparer les gouvernements
régionaux et locaux à leurs nouvelles tâches et responsabilités, en renforçant:
•
la stabilité des gouvernements locaux (élection directe des maires, des présidents
provinciaux (1993) et des présidents régionaux (2000));
•
l’autonomie financière des gouvernements locaux («fédéralisme fiscal»:
transformation des transferts financiers de l’État aux collectivités locales, en recettes
locales ou participation locale dans les principaux impôts de l'Etat (TVA, impôts sur les
revenus...);
•
l’efficacité des gouvernements locaux (réforme des mécanismes de contrôle, «citymanagers» (directeurs généraux des villes), hauts fonctionnaires recrutés, à titre
temporaire, dans le secteur privé, salaires des fonctionnaires basés sur les résultats) (voit
Tab. 15);
8
•
l’autonomie organisationnelle des gouvernements locaux et régionaux (liberté
d'établir des normes autonomes pour l’organisation de leurs structures et pour la
réglementation de leurs activités administratives).
Ce n’est qu’à la fin de cette phase préliminaire que le Gouvernement a transféré aux
institutions locales et régionales une vaste série de compétences, de pouvoirs et de tâches
de l'administration centrale, avec les ressources humaines et financières qui s’y rapportaient
(sur la base légale d’une loi de délégation qui avait établi une liste fermée obligatoire des
tâches du gouvernement central, ainsi que le transfert de toutes les autres tâches aux
organismes locaux et régionaux: ledit «fédéralisme administratif»).
Ainsi, l’État a gardé une compétence administrative exclusive en matière de politique
étrangère, défense et forces armées , justice, monnaie , péréquation des ressources
financières, ordre public et sécurité des citoyens, protection du patrimoine culturel,
éducation nationale, recherche scientifique et université, immigration, sécurité sociale,
télécommunications. •Les Régions et les collectivités locales ont obtenu la compétence
administrative et réglementaire en toutes les autres matières, avec des pouvoirs tout à fait
nouveaux en matière de travail, industrie, équipement (par exemple: plus de 60% des routes
de l’État ont été transférées aux Régions et déléguées ensuite aux Provinces; les Communes
reçoivent toutes les compétences pour le cadastre et pour les autorisations pour les nouveaux
établissements industriels).
Enfin, la réforme constitutionnelle de 2001 a transféré des pouvoirs législatifs généraux
aux assemblées régionales.
Dans le cadre de cette réforme:
•L’État garde la compétence législative exclusive dans un petit nombre de matières, énumérées
dans la Constitution
•Il reste aussi à l’État le pouvoir d’établir avec ses lois les principes fondamentaux dans les
matières partagées entre l’État et les Régions
•Les compétences législatives exclusives sur toutes les autres matières appartiennent aux
Régions
•Les pouvoirs réglementaires sont toujours attribués aux Régions, sauf pour les matières de
compétence exclusive de l’État
•Les pouvoirs administratifs appartiennent aux Communes et aux Provinces , sauf exceptions
établies par les lois de l’État ou des Régions (principes de subsidiarité et de proportionnalité).
Parmi les matières qui restent dans la compétence législative exclusive de l’ État :
•la politique étrangère et les relations internationales de l'État; l’ immigration;
•la défense et les forces armées; la sécurité de l'État; les armes, munitions et explosifs;
•la monnaie, la protection de l'épargne et les marchés financiers;
•la protection de la concurrence;
•la péréquation des ressources financières;
•l’ordre public et la sécurité, à l'exclusion de la police administrative locale;
•la juridiction et les règles de procédure; la loi civile et la loi pénale; la justice administrative;
•la fixation des niveaux essentiels des prestations se rapportant aux droits civils et sociaux qui
doivent être garantis sur l'ensemble du territoire national
•les normes générales en matière d'éducation;
•la sécurité sociale;
•la législation électorale, les organes et les fonctions fondamentales des Communes, des
Provinces et des Villes Métropolitaines;
•la coordination des informations, la coordination statistique et informatique des données des
administrations centrales et locales;
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•la protection de l'environnement, de l'écosystème et du patrimoine culturel.
Parmi les matières partagées entre l’État et les Régions:
•les relations des Régions avec l'Union européenne; le commerce extérieur;
•la protection et la sécurité du travail;
•l'éducation scolaire, sans préjudice pour l'autonomie des établissements scolaires;
•les métiers;
•la recherche scientifique et technologique et le soutien à l'innovation pour les secteurs
productifs;
•la protection de la santé; l'alimentation; la sécurité sociale complémentaire et supplémentaire;
•la protection civile;
•l'aménagement du territoire; les ports et les aéroports civils; les grands réseaux de transport et
de navigation; le système des communications;
•la production, le transport et la distribution nationale de l'énergie;
•l'harmonisation des budgets publics et la coordination du système fiscal;
• la mise en valeur des biens culturels et environnementaux et la promotion et l'organisation
d'activités culturelles;
•les caisses d'épargne, les caisses rurales, les établissements bancaires à caractère régional.
Il n'y a plus de contrôles préalables sur les lois régionales: de même que les lois de l’État, les
lois régionales doivent être conformes à la Constitution, aux traités internationaux et aux
règlements et directives européennes. Il n'y a plus de contrôles préalables sur les actes
administratifs des Régions et des pouvoirs locaux. La constitutionnalité des lois régionales est
jugée a posteriori par la Cour constitutionnelle, la légitimité des actes administratifs est jugée a
posteriori par les tribunaux administratifs et le Conseil d’État. Mais le Gouvernement peut se
substituer aux organes des Régions, des Villes Métropolitaines, des Provinces et des Communes
en cas de:
• non-respect des normes et des traités internationaux ou des normes communautaires, ou de
• danger grave pour la sécurité publique, ou bien encore
• quand cela est demandé afin d’assurer l'unité juridique ou l'unité économique du pays et,
notamment, afin de protéger les niveaux essentiels des prestations en matière de droits civils et
sociaux, indépendamment des limites territoriales des pouvoirs locaux.
L’unité et l’indivisibilité de la République sont donc assurées:
- par l’obligation des législateurs régionaux de respecter la Constitution et les normes
communautaires;
- par l’exercice de la compétence exclusive de l’État dans des matières-clé (ex.: toutes les
fonctions régaliennes de l’État) et dans des matières « transversales »: fixation des niveaux
essentiels des prestations, protection de la concurrence, droit civil, protection de
l’environnement; emploi privé et public;
- par la détermination de principes fondamentaux dans les matières de compétence
partagée;
- par l’exercice par le Gouvernement des pouvoirs de contrôle substitutif.
Le Parlement a aussi les pouvoirs nécessaires pour défendre l’autonomie des Communes et
des Provinces contre les tentations centralistes des Régions.
Enfin, la Constitution a établi les principes du fédéralisme fiscal:
•Les Communes, les Provinces et les Régions disposent d ’autonomie financière des recettes
et des dépenses; les recettes doivent être suffisantes pour financer intégralement toutes les
fonctions qui leur sont attribuées.
•Elles établissent et appliquent des impôts et des recettes propres, suivant les principes de
coordination des finances publiques et du système fiscal établis par une loi de l’ État.
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• Elles disposent de co-participations aux recettes fiscales du Trésor public rapportables à
leur territoire.
•Un fonds de péréquation et des ressources additionnelles affectées par loi de l’ État servent
à réaliser un rééquilibre entre les Régions riches et les Régions plus pauvres.
•Les Communes, les Provinces et les Régions ne peuvent avoir recours à l'endettement que
pour le financement des dépenses d'investissement. Toute garantie de la part de l'État sur les
prêts qu'elles contractent est exclue.
Tout le processus de décentralisation a été conçu et exécuté sur la base d’une coopération
continue entre le gouvernement central et les organismes représentatifs des institutions
locales et régionales (qui ont approuvé à l’unanimité les 113 décrets établissant les
compétences, les pouvoirs et les ressources que le gouvernement national devait transféré
aux gouvernements locaux et régionaux). Mais les lois de finance de 2002 et de 2003 ont
réduit sévèrement les recettes locales et régionales, ce qui a produit de sérieux conflits entre
ces organismes et le nouveau gouvernement du Premier ministre Silvio Berlusconi : les
autorités locales et régionales se plaignent de l’insuffisance de leurs moyens financiers pour
faire face aux tâches récemment transférées, ainsi que du conséquent risque d’échec du
processus de décentralisation dans sa totalité.
Nous pouvons en tirer la leçon suivante:
IX. pour assurer un bon governance des sociétés complexes modernes, il faut déléguer de
vastes pouvoirs et responsabilités aux gouvernements locaux et régionaux, suivant le
principe de subsidiarité, mais cette délégation :
• doit être précédée de mesures destinées à renforcer la stabilité et l’efficacité des
autorités locales;
• elle doit s’accompagner de l’apport des ressources humaines et financières
correspondantes;
• elle doit être négociée et concertée avec les organismes représentatifs des autorités
locales et régionales.
7. Le contrepoids de la décentralisation: la réorganisation du gouvernement central.
La governance démocratique des sociétés complexes modernes, à l’époque de la
mondialisation et des TIC, a besoin également de gouvernements centraux plus forts et plus
efficaces. Le transfert de pouvoirs, tâches et ressources financières aux gouvernements
régionaux et locaux et, dans le cas de l’Italie, à l’Union européenne, restreint les missions
des Gouvernements nationaux et exige de nouvelles capacités de coordination et de
dialogue. En conséquence, pour adapter les gouvernements à leurs nouvelles missions et
responsabilités, il faut faire appel à une vaste réforme des ministères et des agences et
organismes publics et à une réforme focalisée du «centre du gouvernement».
En Italie, l’organisation générale du gouvernement central avait été conçue et
réglementée en 1865 et avait été ensuite modifiée, mais partiellement, en fonction des
besoins sectoriels. En 1999, dans le cadre de la Réforme, cette structure a été complètement
remodelée, moyennant :
11
• la fusion d’organismes avec des missions similaires et, en conséquence, l'élimination
des duplications et des fragmentations;
• la réduction des ministères, qui sont passés de 22 (en 1990) à 12 (en 2001: mais le
gouvernement de M. Berlusconi les a ramenés à 14);
• l'attribution à chaque ministère de la faculté de choisir le modèle d’organisation le
mieux adapté à sa mission, y comprise la faculté d' abandonner le traditionnel «modèle
pyramidal» (auparavant obligatoire selon la loi);
• la réorganisation des services déconcentrés du gouvernement, en les fusionnant, dans
la plupart des cas, en un seul organisme interdépartemental déconcentré qui devra travailler
pour différents ministères;
• le transfert aux administrations sectorielles des tâches exécutives assignées aux
services de la Présidence du Conseil des Ministres, avec une réorientation de ces services ,
dans le cadre d'une structure plus forte et plus flexible, vers l'activité de soutien à l'activité
propre du Premier ministre, c'est-à-dire la direction, la coordination et la stimulation du
travail de tout le cabinet;
• la restructuration des organismes de décision et de consultation inter-institutionnels
pour la coopération entre le gouvernement national et les autorités régionales et locales.
Par conséquent :
X. Dans un État centralisé, une plus grande capacité d’orientation et de coordination
du gouvernement central est nécessaire. Le changement des missions du gouvernement
central exige une structure gouvernementale plus flexible et plus compacte et de meilleurs
organismes inter-institutionnels de décision.
8. La réforme de l'emploi public : les fonctionnaires et employés publics au service
des citoyens.
Ce que l’on appelle la «privatisation de l’emploi public» peut être considérée comme
l’un des changements les plus radicaux que la réforme italienne ait engagé. L’Italie a ainsi
échangé le régime de droit public traditionnel en Europe continentale, encore en vigueur il y
a 15 ans, contre une réglementation de l’administration publique en grande partie similaire à
l’anglo-saxonne.
Droit privé pour les fonctionnaires publics: vis-à-vis de ses fonctionnaires et employés
l’administration publique a maintenant plus ou moins les mêmes droits, pouvoirs et
obligations que les employeurs du secteur privé; les fonctionnaires et les employés publics
ont pratiquement les mêmes droits et devoirs que les directeurs et employés des entreprises
privés. En ce qui concerne la réglementation des droits et devoirs des fonctionnaires et des
employés des administrations publiques, les lois et les décrets ont été remplacés par des
contrats sauf peu d'exceptions: celles ci concernent à peu près le 20% des fonctionnaires
publics (l’armée, les tribunaux, les diplomates et les préfets relèvent toujours du droit
public). Les contrats de travail nationaux, négociés collectivement, ont remplacé les lois
pour réglementer les conditions d’emploi, les rémunérations et les tâches. Dans ce contexte,
les salaires et les tâches individuelles sont définis par contrats individuels d’intégration qui
devraient mettre l’accent sur la promotion de l’efficience et du professionnalisme.
12
Juridiction des tribunaux civils. Les différends entre les fonctionnaires et
l’administration publique, relevant autrefois des tribunaux administratifs, ont été transférés
aux tribunaux civils.
Réforme de la représentation des travailleurs. Pour chacun des secteurs de
l’administration publique (ministères, éducation, santé, etc.), seulement les syndicats
représentant plus de 5 % des travailleurs dans ce secteur sont habilités à négocier avec
l’administration. Le consensus est fixé par élection: presque 80% des employés publics se
sont rendus aux urnes, lors des élections de 1998 et 2001. Une agence spéciale a été créée
pour représenter l’État, à la place des ministres, lors des négociations du travail (suivant,
bien entendu, les directives établies, en principes, par le gouvernement ou par les
administrations régionales ou locales).
Distinguer l’administration de la politique. Il s’agit là de l’une des lignes directrices les
plus importantes de la réforme. En principe, les politiciens (ministres, maires, etc.) sont
responsables des politiques, et les fonctionnaires de diriger et d’administrer. Les ministres
définissent les politiques et les stratégies, évaluent les résultats et nomment les directeurs
généraux, mais pour le reste, ils n'ont plus de pouvoir de gestion directe des activités et des
structures des administrations. Aujourd’hui, les hauts fonctionnaires publics ont davantage
de pouvoirs, mais également de responsabilités. Ils ont des salaires plus élevés mais ceux-ci
dépendent de leur résultats et de leur performances. Les ministres, les maires et autres
autorités politiques bénéficient de la coopération de structures en staff qui les aident dans la
définition des politiques et des stratégies, et dans l'évaluation des résultats: les directeurs, les
experts et les employés en staff, au service directe de l'autorité politique, sont sélectionnés
intuitu personae, sans passer par un concours ou une compétition publique (spoils system système de dépouilles). Les fonctionnaires et employés de l’administration et des
organismes publics, sauf rares exceptions, sont sélectionnés, au contraire, sur concours
publics, doivent respecter les lois et les règlements, exécuter le programme établi par
l’autorité gouvernementale, observer le principe constitutionnel d’impartialité de
l’administration publique. Ils ont, en principe, le droit d'être protégés contre les
interférences des politiciens dans leur gestion de l’administration.. Des mécanismes
objectifs d’évaluation des résultats doivent (rectius devraient) permettre la coexistence et la
cohérence entre l’orientation politique stratégique et l’autonomie et les responsabilités des
fonctionnaires publics dans la gestion de l’administration.
Plus d’«affectation à vie». Affectation, responsabilités, rémunérations, conditions
d'emploi et résultats font l'objet des contrats individuels (d’une durée maximum de 3 ans) ;
l’accès à la fonction publique se fait sur concours (à l'exception d'un 10% des hauts
fonctionnaires qui peuvent être recrutés du secteur privé par contrat temporaire).
Rémunération en fonction des responsabilités et des performances. Les salaires varient
en fonction des responsabilités et des performances. Dans le cas des hauts fonctionnaires
des administrations de l'Etat, la partie variable des salaires dépasse normalement 50 pour
cent du total.
13
Contradictions, incohérences, résistances. Cette partie de la réforme a été confrontée à
de sérieuses résistances parmi les fonctionnaires publics, mais aussi parmi les membres du
Parlement (où le choix en faveur de la méritocratie et de la qualité est contredit par trop de
lois en faveur de corporations et lobbies bureaucratiques: avancements “ope legis”,
recrutement sans concours etc.), dans les partis politiques (de droite, de centre et de gauche)
et dans les syndicats (dans lesquels le choix en faveur du professionnalisme, du mérite, de la
qualité et de la décentralisation, accepté au niveau national, a été confronté à de résistances
des organisations syndicales locales ou sectorielles défendant, d'un coté, le principe des
augmentations salariales généralisées, de l'autre le privilèges de certaines administrations et
la "jungle des salaires").
En conclusion, nous pouvons en tirer les leçons suivantes :
XI. L’adoption de contrats de droit privé collectifs et individuels pour les
fonctionnaires et agents du secteur public (privatisation de l’administration publique)
peut augmenter la flexibilité et l’efficacité de l’administration publique.
XII. Il est nécessaire de séparer clairement les tâches et responsabilités des politiciens
et des fonctionnaires publics. La définition des stratégies et des politiques est du ressort
des politiciens; la gestion de l’administration relève des fonctionnaires.
XIII. Lier l’affectation des postes et les rémunérations aux performances peut
améliorer la qualité des services publics et des activités administratives, mais seulement
sous deux conditions: que soit garantie l’autonomie des fonctionnaires publics face aux
pressions et aux interférences des politiciens, et qu’il existe des paramètres et des
procédures valables pour l’évaluation des performances et des résultats.
9. Vers une administration publique focalisée sur les résultats : une révolution
législative et culturelle (tant pour l’Italie que pour beaucoup d’autres pays européens).
Pour de nombreux pays, y compris l’Italie, la modernisation de l'Etat et de
l'administration passe par une grande révolution législative et culturelle: il faut quitter une
optique traditionnelle, formaliste, légaliste, procédurière et paperassière, et passer à une
administration focalisée sur les résultats et la satisfaction des usagers.
Dans la culture administrative traditionnelle de l’Europe continentale et dans les normes
juridiques cohérentes avec cette approche culturelle, l’obéissance aux lois et aux procédures
était, en général, l’unique objectif de la plus grande partie des administrations publiques,
sans se soucier de la qualité du service, des résultats, des bénéfices et de la satisfaction des
citoyens.
Au contraire, l’approche axée sur le citoyen
• prête une grande attention à la qualité des services;
• établit des contrôles de performance et des analyses comparatives de qualité qui
complètent les contrôles légaux traditionnels;
• promulgue des chartes de service public, reconnaît les droits des usagers et définit
des standards de qualité pour les services publics;
• se sert des certifications de qualité;
• évalue la satisfaction du client;
14
• promeut l’amélioration professionnelle avec des programmes spéciaux de formation;
• a pour objet de construire une «administration publique amicale», plus proche des
citoyens et des entreprises.
Dans ce domaine aussi, la réforme italienne s’est heurté à une sérieuse résistance.
Beaucoup d' administrations et de juges gardent encore une culture légaliste et étatiste, qui
reste puissante dans le Conseil d'Etat et dans la Cour de Comptes aussi. La culture de
l’évaluation et du mérite reste encore minoritaire dans beaucoup d'administrations.
L'introduction de systèmes effectifs de bilans ponctuels des résultats s’en trouve freinée en
raison des résistances des fonctionnaires et des syndicats. Les principes d’impartialité et de
neutralité de l’administration sont souvent invoqués de façon indue pour éviter l’évaluation
des résultats et soutenir la permanence en place et l’irresponsabilité des hauts fonctionnaires
inefficaces.
On peut donc en tirer les réflexions suivantes:
XIV. La modernisation du gouvernement requiert le changement d’une optique
légaliste-formaliste à une optique focalisée sur la performance et la satisfaction de
l’usager.
XV. La conversion de l’administration publique à un nouveau modèle axé sur la
performance ne peut s’obtenir sans une véritable révolution culturelle où sont adoptés et
assimilés les nouveaux objectifs de
• récompenses accordées au professionnalisme et au mérite
• satisfaction du citoyen-usager
• promotion, encouragement et stimulation des citoyens et des entreprises
• innovation technologique et organisationnelle
• simplification (élimination des contraintes administratives inutiles)
• qualité du service et des performances.
10. TIC : un recours capital pour la modernisation des administrations publiques et
l’amélioration des services aux citoyens.
Comme on le sait, les TIC sont un recours formidable pour la réforme et la
modernisation de l'Etat. Elles peuvent permettre des progrès spectaculaires, un véritable
bond en avance dans le changement de qualité, ainsi que dans l’amélioration des services
aux citoyens et dans l’efficacité de l’administration publique. Les TIC peuvent être un outil
fondamental pour restructurer les procédures administratives et introduire des modèles
organisationnels, structurels, gestionnaires et opérationnels nouveaux. Les TIC peuvent
changer radicalement la prestation de services aux citoyens et aux entreprises, en leur
permettant de surmonter les obstacles logistiques et temporels qui empêchent l’accès à
l’information et aux services en temps et lieux désirés par les usagers. Par ailleurs, le
gouvernement électronique multiplie les possibilités de simplification des procédures
administratives. En supprimant les déplacements et les «pèlerinages» procéduriers inutiles,
il permet de réduire de façon significative les coûts liés à la production et à l’obtention des
15
informations et des services, produisant des avantages importants pour les budgets de
l’administration publique et des organisations privées.
Mais développer le gouvernement électronique n'est pas seulement installer des
ordinateurs dans les administrations publiques. Il requiert une réinvention totale de
l’organisation, des procédures et des activités de l’administration publique. Réinventer le
gouvernement avec l’aide des TIC implique d’écarter les modèles organisationnels fondés
sur la hiérarchie, adopter des modèles basés sur la décentralisation des responsabilités et
l'habilitation individuelle des travailleurs, conciliées avec la nécessité d’assurer le
leadership, la cohérence et l’efficacité.
Pour pouvoir réinventer l’administration publique avec les nouvelles technologies, il faut
également disposer des ressources humaines adéquates et surmonter la fracture numérique.
La première condition peut être remplie par le biais d’une combinaison correcte de
formation et de requalification du personnel existant, avec une série d’actions qui englobent
tant l’alphabétisation informatique que la formation supérieure technique et gestionnaire des
fonctionnaires. Pour répondre aux défis de l’ère numérique, les fonctionnaires publics
doivent savoir comment se transformer en administrateurs de l’information et de la
connaissance. La seconde condition dépend de la mise en place d’un vaste programme
d’apprentissage massif de l’informatique.
De plus, il est nécessaire de projeter et mettre en œuvre un mécanisme fiable
d’authentification pour l’accès aux services en ligne et aux données personnelles afin de
garantir que les services et les données soient délivrés à ceux qui ont le droit de les recevoir.
Les cartes électroniques intelligentes peuvent résoudre ce problème crucial dans la mesure
où on peut les combiner avec l’introduction de certains instruments légaux comme, par
exemple, les cartes d’identité électronique et/ou les signatures électroniques et les
documents numériques, dans le cadre d’une nouvelle réglementation de la documentation
administrative, basée sur les TIC.
À la fin des années 1990, dans le cadre de la réforme de l'administration, l’Italie
• a accordé (1997) pleine valeur légale aux contrats et aux autres documents
électroniques, ainsi qu’aux signatures électroniques certifiées par des autorités de
certification privées reconnues;
• a adopté (1998) et testé la carte d’identité électronique (mise en circulation depuis
2001);
• a introduit le procurement électronique, le service fiscal électronique et le cadastre
électronique. En l’an 2000, la totalité des déclarations d’impôts sur le revenu (33 millions
par an) et 80 p. cent des documents cadastraux ont été enregistrés et révisés
électroniquement.
Avec le plan d’action pour le gouvernement électronique italien, promulgué en l’an 2000
après avis et approbation des organismes représentant les autorités locales et régionales, le
gouvernement a approuvés les plans et les projets et assigné les ressources financières
nécessaires pour atteindre en cinq ans quatre buts fondamentaux que l’on peut résumer de
cette façon:
• chaque administration devra être capable d'accéder directement aux informations
nécessaires, indépendamment du lieu où elles se trouvent;
• tous les services publics seront délivrés en ligne (si les conditions techniques le
permettent);
16
• aucun citoyen ne sera tenu de communiquer plus d’une fois, à l'administration
publique dans son ensemble, les changements de ses coordonnées personnelles;
• les citoyens obtiendront les services publics sur simple demande à l’administration à
la charge de n’importe quel bureau d’attention au public.
Dans le cadre du plan d’action 2000, les cartes d’identité et les cartes de signatures
électroniques doivent :
• faire office de documents d’identité et de moyens pour que tout système
d’information public puisse authentifier un citoyen;
• permettre au titulaire de solliciter les services de l’administration en ligne avec une
seule procédure d’identification;
• servir pour «signer» tous les formulaires et transactions avec les administrations
publiques et autres organismes gouvernementaux exigeant du citoyen une signature
légalement valide.
Après les élections générales de 2001, la compétence pour le gouvernement électronique,
au sein du nouveau Cabinet de M. Berlusconi, est passée du Ministre de la Fonction
publique à celui de l’Innovation technologique. Le temps requis pour le transfert des
pouvoirs et la réorganisation consécutive, la décision initiale de reconsidérer les
caractéristiques du Plan d’Action 2000, et les difficultés liées au partage des responsabilités
et des fonctions entre le ministre responsable du gouvernement électronique et le ministre
responsable de l’application de la réforme administrative, ont retardé de deux ans la mise en
route du Plan d’Action susdit. Entre-temps, les ressources financières qui avaient été
assignées au Plan ont été, en grande partie, déviées vers d’autres buts. Il y a quelques mois,
le Gouvernement a pris la décision de relancer le Plan 2000 en y apportant quelques
modestes modifications. Mais il n’est plus possible de récupérer le temps perdu …
De cette expérience, nous pouvons tirer les leçons suivantes :
XVI. Les TIC peuvent apporter des améliorations spectaculaires à la qualité des
administrations et des services publics: mais elles ne peuvent être obtenues qu’à travers
une réinvention globale de l’organisation, des procédures et des activités des
administrations. C’est pourquoi, il ne convient pas de dissocier les responsabilités
politiques pour la réforme de l'Etat et pour la mise en place du «gouvernement
électronique».
XVII. La révolution électronique et le gouvernement en ligne impliquent l’abandon des
modèles d’organisation hiérarchique et l’adoption de modèles basés sur la
décentralisation et la délégation individuelle de responsabilités aux travailleurs.
XVIII. Des mécanismes d’identification fiables doivent être prévus pour accéder aux
services en ligne et aux données personnelles en ligne, afin de garantir que les services et
les données soient délivrés seulement à ceux qui ont le droit de les recevoir. Les cartes
électroniquse intelligentes sont en mesure de résoudre ce problème crucial.
XIX. La réinvention de l’administration publique fondée sur les nouvelles technologies
dépend également de la disponibilité de ressources humaines adéquates et de la maîtrise
de la fracture numérique. Il est indispensable d’introduire une formation spécialisée et
une éducation massive en matière de technologie de l’information.
17
11.
Allégement des démarches administratives et amélioration de la qualité de la
réglementation: la première étape de la réforme du point de vue de la satisfaction de
l’usager.
En Italie, au début des années 1990, la principale pétition des citoyens et des
entreprises concernait l’allégement des démarches administratives et des coûts des
procédures bureaucratiques et réglementaires. En fait, parmi les principaux aspects négatifs
du système administratif italien, à cette époque, on pouvait évoquer notamment :
• la lourdeur, et souvent l’inutilité, des contraintes bureaucratiques qui pesaient sur
l’usager, les entreprises et même l’administration publique;
• l' inflation en matière de réglementation (plus de 35 000 lois primaires);
• une réglementation obscure, entortillée, peu transparente (ambiguïté , contradictions,
duplications et stratification des règles).
Pour ces raisons, il était fondamental, pour le succès de la réforme, d’élaborer une
stratégie intégrale permettant de réduire les coûts bureaucratiques et les contraintes
administratives et réglementaires pour les usagers et les entreprises. Afin d’obtenir le
consensus à la réforme de la part des citoyens et des entreprises, on a donc décidé de donner
priorité, dans le processus réformateur, à certaines innovations importantes et très
symboliques, fondées sur l’introduction de nouveaux instruments de simplification tels que:
• l'auto-déclaration des citoyens, en remplacement de la plupart des certificats délivrés
par les administrations publiques et exigés par d’autres administrations publiques;
• la déclaration de démarrage d’une activité, et le «consentement implicite de
l’administration», en remplacement d’un grand nombre d'autorisations et licences
administratives;
• une conférence de services, en remplacement de nombreuses démarches
administratives;
• des "lois annuelles de simplification" identifiant les procédures, autorisations et
licences que le Gouvernement était délégué à supprimer ou à simplifier par décret;
• des guichets uniques pour les usagers et pour les entreprises (pour l'ouverture
d’unités industrielles, pour le permis de construire, pour les automobilistes, etc.).
Je peux, à cet égard, mentionner ici seulement deux exemples (voir Tab. 7, 8, 16, 17) .
Le premier. Grâce aux nouvelles normes sur la documentation administrative (aujourd’hui
rassemblées en un seul code):
- plus de 95% des certificats ont été remplacés par des auto-certifications qui ne
requièrent que la signature de l’usager sur une «simple feuille de papier blanc» (exonérée
d’impôts) (voir tableaux 5,6)
- l’utilisation d’instruments électroniques et fax est toujours admise
- l’administration publique n'a plus le droit d'exiger de certification lorsque une autocertification peut être produite
- les fausses auto-certifications sont sévèrement punies (ainsi, en 2000, seulement
0,4% des contrôles ex-post ont détecté fraude en ce domaine)
- la législation prévoit une «décertification» complète avant la fin de l’année 2005,
grâce au développement des échanges électroniques de données des archives des
administrations publiques.
18
Je peux également faire état du «guichet unique» pour le démarrage d’unités
industrielles, qui est, actuellement, en fonctionnement dans 67% des municipalités
italiennes. Ce guichet a remplacé les 43 autorisations administratives requises avant la
réforme. Il fournit non seulement un accès unique, mais également une procédure unique,
un seul fonctionnaire responsable, une structure numérique accessible sur tout le réseau et
une réponse finale unique. Avant 1999, il fallait environ de deux à cinq ans pour obtenir une
réponse finale. Aujourd’hui, le délai fixé par la loi est, dans la majorité des cas, de trois
mois. Dans un panel de 996 guichets uniques, le délai moyen requis pour obtenir une
réponse finale a été de 32 jours, pour les cas les plus simples, et de 71 pour les autres.
En Italie, l’option stratégique pour une réglementation de haute qualité était, depuis le
début, parmi les objectifs fondamentaux de la réforme, pour des raisons bien connues: le
rôle fondamental des systèmes de régulation dans la promotion de la croissance
économique; la crise du système de régulation traditionnel de « commande et contrôle»; la
nécessité d’aller au delà de la simple dérégulation et de parvenir à une politique générale
pour la qualité de la réglementation, avec ses stratégies, ses instruments et ses structures
spécifiques.
Parmi ces instruments, il convient de mentionner :
• un programme de simplification échelonnée, fondé sur des lois de simplification
annuelles et permettant au gouvernement d’abolir ou de simplifier par décret les procédures,
les autorisations et les licences existantes (quoique établies en origine par la loi)
• la codification ou consolidation des lois et décrets en vigueur (parfois avec l’aide
d’un système de guillotine),
• un registre électronique central de formalités administratives (dont la réalisation est
actuellement en attente),
et surtout :
• l’analyse de l’impact de la réglementation (RIA), actuellement utilisée par 20 pays de
l’OCDE.
La RIA (Regulatory Impact Analysis):
• est un instrument fondamental pour mesurer le coût des nouvelles réglementations
pour l’usager et les entreprises, et améliorer leur qualité;
• est un instrument pour «conscientiser» les législateurs;
• loin de n’être qu’une simple analyse arithmétique, est un processus continu, évolutif,
pour servir de base aux décisions d’ordre politique;
• n’est pas une justification ex post mais une analyse qui doit être réalisée au début du
processus normatif ;
• doit considérer aussi bien différentes options juridiques que des alternatives à la
réglementation (y compris une utilisation sensée de l’auto réglementation);
• doit réunir toutes les opinions des parties concernées;
• est applicable à tout type de réglementation «significative».
En ce qui concerne les structures et les responsabilités, il est évident que le
Gouvernement et le Parlement sont conjointement responsables de l’application de la
politique de réglementation de qualité. Au sein du gouvernement, les ministres sectoriels
sont les principaux responsables, mais comme «il est parfois difficile que les ministères se
réforment eux-mêmes», il pourrait être utile que le P.M. délègue les facultés de coordination
à un ministre spécifique «pour exercer les pressions compensatoires et maintenir la
19
cohésion et la systématisation dans toute l’administration» (Rapport 2001 de l’OCDE sur la
réforme de la réglementation en Italie). À ces mêmes fins, il pourrait être également utile de
mettre en place une Unité centrale pour la qualité de la réglementation (d’ores et déjà en
place dans de nombreux pays de l’OCDE).
En ce qui concerne l’expérience italienne, l’Unité centrale consistait en un comité
d’experts établi dans le cadre de la Présidence du Conseil des Ministres, sous la
responsabilité et la direction politique du Ministre chargé de la Fonction Publique et de la
Réforme de l'Etat. Elle était exclusivement chargée de superviser la «qualité normative», la
RIA et les programmes de simplification et de codification. Elle a fait un excellent travail de
1999 à 2002, très apprécié par le Rapport OCDE sur la Réforme de la Réglementation en
Italie: "Depuis 1997, dans le cadre des «réformes Bassanini», de nombreuses mesures
concrètes ont été prises. Il en résulte que l’Italie fait des rapides progrès dans l’utilisation
des outils relevant des meilleures pratiques en matière de qualité réglementaire. Le
graphique suivant montre que l’utilisation de cinq outils de qualité essentiels recommandés
par l’OCDE a augmenté de manière importante en Italie au niveau national entre 1998 et
2000» (voir Tab. 12, 13, 16). Malgré cela, le nouveau Cabinet de M.Berlusconi a
inexplicablement supprimé l'Unité centrale et, à partir de la seconde moitié de l'année 2002,
a bloqué les activités prévues pour améliorer la qualité de la réglementation.
A coté de l'Unité centrale pour la qualité de la réglementation, je dois citer l'activité de
l' »Observatoire pour la simplification des lois et des procédures »: un organisme
consultatif, mais aussi un comité de surveillance, rassemblant les représentants des
administrations centrales, des gouvernements locaux, des organisations d’entreprises et des
travailleurs, des associations des consommateurs et autres parties concernées. Il a très bien
travaillé dans les années 1999-2001, mais il a été supprimé par le Cabinet Berlusconi pour
des raisons encore inconnues.
On peut en tirer les réflexions suivantes:
XX. L’allégement des démarches bureaucratiques et des coûts de réglementation est
fondamental pour toute réforme de l'Etat et a un impact significatif sur les usagers et les
entreprises.
XXI. La qualité des systèmes normatifs est un facteur clé pour la stimulation de la
croissance économique.
XXII. Une politique pour la qualité de la réglementation va au-delà d’une simple
dérégulation ; ce n’est pas une politique exceptionnelle, mais un processus, et elle
requiert des stratégies, des outils et des structures spécifiques.
XXIII. Les auto-certifications des citoyens, les guichet uniques, la codification, l’analyse
de l’impact de la réglementation, le registre électronique des formalités administratives et
une unité centrale pour la qualité de la réglementation sont des instruments importants
pour le succès des politiques de réglementation de qualité, ainsi que la mise en place
d'organismes consultatifs représentant les administrations, les usagers, les entreprises et
les travailleurs.
20
12. Stabilité du gouvernement : une condition pour la réussite de la Réforme.
Au début de ce nouveau millénaire, la réforme italienne, en ce qui concerne les lois et
les règlements, était pratiquement terminée; mais les lois, à elles seules, n’ont jamais changé
la vie des citoyens. Dans chaque processus de réforme de l'Etat, la phase de l'exécution et de
la mise en oeuvre est toujours cruciale. C’est au cours de cette phase que surgissent des
difficultés et des résistances inattendues et que, pour toute réforme, il y a un risque d’échec.
C’est la raison pour laquelle une réforme de l'Etat dans tous les azimuts prend toujours
beaucoup de temps: en général, une législature ne suffit pas pour la réaliser et la mettre en
pratique.
C’est aussi la raison pour laquelle chaque programme de réforme de l'Etat a besoin, non
seulement d’un vaste consensus, mais également de stabilité dans le gouvernement. Aussi,
est-il important pour le succès de la réforme d'obtenir un appui bipartite. Lorsqu’une
réforme est approuvée avec un appui bipartite, le processus de réforme ne s’arrête pas
obligatoirement lorsque les gouvernements et les majorités parlementaires changent.
La Réforme italienne a effectivement été approuvée avec un soutien bipartite, à la fin des
années 90. Malgré cela, depuis les élections de 2001, le nouveau gouvernement de M.
Berlusconi a freiné de façon sensible le processus de mise en œuvre de la Réforme et a
remis en question certains de ses piliers.
Je peux faire état de quatre exemples :
• la division des tâches et des responsabilités de la Réforme entre quatre ministres et,
par conséquent, le manque de coordination dans le travail d’exécution;
• la réintroduction, par décrets, de deux ministères sectoriels supprimés en 1999;
• le recul de la privatisation des hauts fonctionnaires publics et le retour, pour ceux-ci,
au régime de droit public;
• la suppression de l’Unité centrale pour la qualité de la réglementation et de
l'Observatoire pour la simplification des lois et des procédures, et l’échec des politiques
pour la qualité de la régulation.
On peut en tirer les dernières réflexions qui suivent:
XXIV. Les lois, à elles seules, n’ont jamais changé la vie des citoyens. Aussi, la phase d
d’exécution de la réforme est-elle toujours cruciale. Au cours de cette phase,
habituellement surgissent des difficultés et des résistances et la réalisation de la réforme
peut alors prendre beaucoup de temps. Une législature peut très bien ne pas suffire.
XXV. La stabilité du gouvernement est une condition de la réussite de la réforme.
XXVI. Les réformes approuvées avec un appui bipartite ont plus de chance de survivre
aux changements du gouvernement et de la majorité parlementaire, mais ceci ne suffit
cependant pas pour assurer la réussite de la réforme.
21
Tableau 1
Un État délabré:
Dette publique jusqu’à 1994 (% du PIB)
135
125
119,1
115
108,7
105
90,5
95
82,3
85
75
19
80
55
57,7
59,9
64,9
70
95,6 98
101,5
92,6
86,3
75,2
19
81
19
82
19
83
19
84
19
85
19
86
19
87
19
88
19
89
19
90
19
91
19
92
19
93
19
94
65
124,9
Source: Ministère du Trésor
22
Tableau 2
Coût des employés publics (% du PIB)
13
12,6
12,6
12,5
12,5
12,3
12
11,9
11,5
11,5
11,6
11,2
11
10,7
10,5
10,6
10,5
10,6
10
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
Source: OCDE e ISTAT (Institut national de Statístique d’Italie)
23
Tableau 3
Nombre des employés publics et
coût des employés publics (% du PIB)
Comparaison entre la France et l’Italie (2002)
France
Italie
Population totale
58 ml.
57 ml.
Employés publics
5,4 ml
3,4 ml.
Employés publics / population
9,30%
5,96%
Salaires publics / PIB
14,60%
10,50%
Source : OCDE e ISTAT (Institut national de Statístique d’Italie)
24
Tableau 4
Dette publique (% du PIB)
129
125,3
124,9
124
124,6
122,4
119,1
119
118,7
114,9
114
109
110,9
111,3
108,7
108,3
104
106,8
101,5
99
98
94
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Source : ISTAT (Institut national de Statístique d’Italie)
25
Tableau 5
-12
-11,1
-10
-8
-6
-10,1
Déficit public (% du PIB)
-9,2
-9,6
-8,5
-7,7
-6,6
-4
-2
-3,2
-2,7
-3,2
-2,8
-2,7
-1,7
-0,8
0
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003
Source : ISTAT (Institut national de Statistique d’Italie)
26
Tableau 6
Dépense primaire publique en Italie et en UE
1990-2000 (% du PIB)
45
45
44
44
43
43
42
42
41
41
40
40
39
39
38
38
37
37
1990
Italie
UE
2000
Source: Institut National de Statistique et Comm. Européenne
27
Tableau 7
Simplification
Nombre de certificats expédiés par an (en millions)
70
51
1996
1998
25
26
2001
2003
Source : Italie - Departement de l’Administration publique - ASTRID
28
Tableau 8
Simplification
Nombre de signatures certifiées à la demande de
l’administration publique par an (en millions)
38
4,5
1996
2001
Source : Italie – Département de l’Administration publique
29
Tableau 9
Recettes dérivées de la privatisation dans l’OCDE
(1993 - 1999)
102,9
71,1
66,4
mm €
69,3
40,4
33,1
25,5
m
ag
ne
Ca
na
da
Et
at
sU
ni
s
ni
7,8
Al
le
au
m
eU
ag
ne
Ro
y
Es
p
e
Fr
an
c
ra
lie
Au
st
n
Ja
po
Ita
lie
8,1
Source : OCDE
30
Tableau 10
Recettes dérivées de la privatisation en Europe, en mm de €
(1977 – 2002)
14%
Recettes en mm €
Recettes PIB en %
130
12%
11%
98
90
78
6%
47
4%
Italie
Allemagne
Royaume Uni
France
Espagne
Source : “La Repubblica” (journal italien), samedi 18 octobre 2003, p. 35
31
Tableau 11
Satisfaction du client :
% d’opinions positives concernant l’efficacité
du gouvernement italien
(1997 – 2001)
60
58,5
50
48,7
40
30
38,5
20
10
0
1997
1999
2001
Source : ISPO (Institut d’études d’opinion publique)
32
Tableau 12
Progression dans les indicateurs de capacité normative
(1998 – 2000)
100
Italie 1998
Italie 2000
80
60
40
20
0
Transparence
Utilisation de
l’analyse de l’impact
normatif
Processus de prise
de décisions
structurées
Indice d’activité de Communications de
révision
requis normatifs
Source: OECD, The Regulatory Reform in Italy, 2001
33
Tableau 13
Effets de la régulation de la competitivité
Plus de competitivité = 0
(vers le bas vers la gauche)
Compétitivité des pays de l’OCDE
Italie 97
2,4
Norvège
Grèce
France
Belgique
1,9
Régulation du marché des produits
Suisse
Italie 2000
Finlande
Portugal
Espagne
Japon
Canada
Italie 2001
Danemark
1,4
Allemagne
Autriche
Pays Bas et
Suède
Nouvelle
Zélande
Etats Unis
Australie
0,9
Irlande
Royaume Uni
0,4
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
4,0
4,5
Régulation du marché du travail
Source: OECD, 1999 et 2001
34
Tableau 14
Capitalisation de bourse/PIL 1992-2000
Le programme de privatisation et de libéralisation a contribué à la
croissance du marché actionnaire italien
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
77
66,4
45,7
30,8
11,5
1992
15,1
17,9
18,4
20,6
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
(feb.)
35
Tableau 15
Les “réformes Bassanini” ont-elles amélioré l’efficience des
administrations locales?
Ne sait pas
7,3
Oui 36,1
Non 24,9
Oui, en
partie 31,7
Source: Unicab- Il Sole 24 Ore – 06.03.2000
36
Tableau 16
La simplification des lois: 1997-2000
Réduction du stock normatif suite à la simplification (n. d’articles)
introduits 2286
13485
abrogés
0
5000
10000
15000
37
Tableau 17
La simplification 1997-2000
procédures pour la création d’entreprises
25
21
20
15
11
10
5
5
5
0
Avant 2000
Apres 2000
entreprises individuelles
société
Source: OCDE, Service de la gestion publique, 2000
38