Modifier les règles relatives au contrôle Urssaf

Transcription

Modifier les règles relatives au contrôle Urssaf
Simplification des relations entre les Urssaf
et les entreprises
Le Conseil supérieur a été sollicité par Messieurs Bernard Gérard (député du Nord) et Marc
Goua (député du Maine et Loire), pour être auditionné dans le cadre de la mission qui leur a
été confiée sur la simplification des relations entre les Urssaf et les entreprises.
L’objet de la mission est d’établir « un état des lieux des difficultés qui peuvent naître avant
même la phase de contrôle, formuler toute proposition susceptible d’améliorer la relation
entre les URSSAF et les cotisants en amont de la procédure de contrôle et dans une optique
de sécurisation juridique et de prévention des démarches contentieuses, favoriser la sécurité
juridique par un renforcement de l’information, examiner les modes de recouvrement
amiable ». A l’issue de leurs travaux, les deux députés devront établir des propositions au
sein d’un rapport qui sera remis au Premier Ministre début mars 2015.
Les sujets présentés par le Conseil supérieur, représenté par Arnaud Debray, assisté d’Alice
Fages, sont les suivants.
Contenu
1.
Relations Urssaf / entreprises en amont du contrôle ........................................................ 2
A. Rescrit social .................................................................................................................... 2
a. Rescrit à l’initiative des entreprises............................................................................. 2
b. Rescrit à la demande de certaines institutions ........................................................... 3
B. Création d’une base ........................................................................................................ 3
2.
C. Facilités accordées aux tiers déclarants .......................................................................... 3
Modalités du contrôle Urssaf ............................................................................................. 4
A. Lieu du contrôle et compétence territoriale de l’Urssaf ................................................. 4
a. Lieu du contrôle ........................................................................................................... 4
b. Compétence territoriale .............................................................................................. 4
B. Limitation de la durée des contrôles............................................................................... 5
3.
C. TESE ................................................................................................................................. 5
Objet du contrôle : chefs de redressement ....................................................................... 6
A. Calcul de la réduction « Fillon » ...................................................................................... 6
B. Protection sociale complémentaire ................................................................................ 7
4.
C. Déplacements professionnels ......................................................................................... 7
Délais de paiement ............................................................................................................. 8
Simplification des relations Urssaf / entreprises – Audition Assemblée nationale 17 février 2015
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1. Relations Urssaf / entreprises en amont du contrôle
Afin d’améliorer les relations entre les entreprises et l’Urssaf et d’éviter des redressements,
un certain nombre de mesures ont été prises. Il faut les développer car elles sécurisent les
relations entre les entreprises et l’Urssaf et s’inscrivent dans une démarche de prévention
des contentieux.
A. Rescrit social
a. Rescrit à l’initiative des entreprises
Le rescrit social, instauré par une ordonnance du 6 juin 2005, permet d’obtenir une décision
explicite des organismes de recouvrement (Urssaf et CGSS dans les DOM) sur l’application de
certains points de législation.
Le champ d’application du rescrit est très large, puisqu’il vise les exonérations ou réductions
de cotisations, les avantages en nature et frais professionnels, les règles de déclaration et de
paiement des cotisations (art. L 243-6 CSS).
Selon la documentation de l’ACOSS1, en 2013, 490 demandes de rescrit ont été faites.
Le rescrit est donc relativement peu utilisé par les entreprises. Les raisons les plus souvent
invoquées sont les suivantes :


procédure trop longue : l’organisme de recouvrement dispose d’un délai de 30
jours pour examiner si le dossier est complet ; passé ce délai de 30 jours, il
dispose d’un délai de 3 mois pour instruire le dossier ;
crainte d’attirer l’attention de l’organisme de recouvrement sur une pratique
de l’entreprise.
Par ailleurs, il est prévu par la documentation de l’ACOSS2 que les demandes de rescrit et les
réponses apportées font l’objet d’une intégration dans une base nationale qui assure une
mutualisation des questions et positions. Mais il s’avère en pratique que, sur le site securitesociale.fr, seules 6 décisions sont publiées, ce qui est peu. Il serait souhaitable que le nombre
de rescrits publiés soit plus important ; il faudrait également communiquer sur ces rescrits.
Rapport d’activité de l’ACOSS sur la sécurisation juridique 2013, page 12
http://www.acoss.fr/files/contributed/Rapports_d_activite/Fichiers%20imprimables/SecuJuridique_2013.pdf
2
Rapport d’activité de l’ACOSS sur la sécurisation juridique 2013, page 11
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b. Rescrit à la demande de certaines institutions
Certaines institutions telles que les organisations patronales, l’Ordre des expertscomptables… sont régulièrement sollicitées par leurs ressortissants pour avoir des éclairages
sur des points de droit.
Il faudrait alors prévoir la possibilité pour ces institutions de faire un rescrit directement
auprès de l’ACOSS ; ces institutions pourraient ensuite communiquer les réponses obtenues
auprès de leurs ressortissants, ce qui éviterait la multiplication de rescrits au niveau des
entreprises.
Il serait souhaitable de raccourcir les délais de traitement de la procédure de rescrit et de la
promouvoir auprès des entreprises.
Il faudrait publier un nombre plus important de décisions de rescrit et communiquer sur les
rescrits publiés.
Il serait souhaitable de permettre à certaines institutions de faire un rescrit auprès de
l’ACOSS.
B. Création d’une base
Pour accéder aux textes existant en matière de sécurité sociale, il faut procéder à des
recherches sur différents sites internet et notamment le site securite-sociale.fr et le site
urssaf.fr.
Toutefois, rien ne permet d’affirmer que ces sites recensent l’intégralité des textes
opposables aux cotisants.
Il existe par ailleurs une base juridique qui recense les questions soumises par l’Urssaf à leur
correspondant juridique régional mais les cotisants n’y ont pas accès3. Cette production
serait pourtant très utile et éviterait des contentieux.
En matière fiscale, le BOFIP est une base unique et consolidée de l'ensemble des
commentaires de la législation fiscale publiés par la Direction Générale des Finances
Publiques (DGFiP).
Pourquoi ne pas créer l’équivalent du BOFIP en matière de sécurité sociale ? Cela faciliterait
la recherche des textes et favoriserait une meilleure application de la législation sociale.
Il serait souhaitable de créer l’équivalent du BOFIP en matière sociale.
C. Facilités accordées aux tiers déclarants
Dans certaines Urssaf, les tiers déclarants bénéficient de contacts privilégiés avec les
correspondants de l’Urssaf et en particulier les correspondants juridiques.
3
Information donnée par le Rapport d’activité de l’ACOSS sur la sécurisation juridique 2013, page 9
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Il serait souhaitable d’étendre ces pratiques à l’ensemble des Urssaf et de permettre aux
tiers déclarants d’avoir une « hotline » dédiée pour mieux les renseigner.
2. Modalités du contrôle Urssaf
Les personnes qui font l’objet d’un contrôle disposent d’une charte du cotisant contrôlé qui
résume les dispositions mises en œuvre en matière de contrôle par les organismes du
recouvrement. Elle présente, de façon synthétique, les modalités de déroulement d’un
contrôle ainsi que les droits et les garanties de l’assuré.
Cette démarche facilite l’information des assurés. Mais certains points pourraient être
améliorés.
A. Lieu du contrôle et compétence territoriale de l’Urssaf
a. Lieu du contrôle
En principe le contrôle a lieu sur place, c'est-à-dire dans les locaux de l’entreprise.
Toutefois, dans un souci de simplification des relations avec l’Urssaf, les agents de contrôle
peuvent être amenés à proposer aux assurés d’opérer le contrôle dans les locaux de l’expertcomptable du cotisant, avec l’accord de ce dernier.
La pratique du contrôle dans les locaux de l’expert-comptable est à préconiser dans la
mesure où une partie significative des documents vérifiés est généralement tenue par le
cabinet comptable.
On constate toutefois que les contrôleurs Urssaf ne sont pas toujours enclins à opérer le
contrôle dans les locaux de l’expert-comptable.
b. Compétence territoriale
Par ailleurs, l’Urssaf compétente pour le contrôle est celle dans le ressort géographique de
l’entreprise contrôlée. Toutefois, une Urssaf peut déléguer ses compétences à une autre
Urssaf, en vertu d’une convention de réciprocité.
Dans le cas d’un groupe de sociétés où la holding est située dans une ville et les filiales dans
une autre ville (du ressort de la même Urssaf régionale), le contrôle Urssaf s’effectue en
principe dans chaque entreprise. Le contrôleur peut refuser d’effectuer le contrôle au niveau
de la holding pour l’ensemble des sociétés.
Il est souhaitable de développer la pratique du contrôle dans les locaux du cabinet
comptable. Cette modalité, qui est actuellement « proposée » par l’inspecteur, devrait
pouvoir être demandée par l’assuré, sans possibilité de refus par l’Urssaf.
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Par ailleurs, pour les groupes de société et les entreprises à établissements multiples,
l’employeur devrait avoir le choix du lieu de contrôle, dès lors que la paye est tenue dans
une seule société ou un seul établissement.
B. Limitation de la durée des contrôles
Jusqu’à l’intervention de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, aucun texte
ne limitait la durée des contrôles Urssaf : aucun délai n’était fixé entre le début du contrôle
première visite du contrôleur) et la fin du contrôle (envoi de la lettre d’observations). En
pratique, un délai très long pouvait s’écouler entre ces deux étapes.
La LFSS pour 2015, applicable depuis le 1er janvier 2015, limite la durée du contrôle Urssaf,
mais pour les seules entreprises de moins de 10 salariés ainsi que pour les travailleurs
indépendants.
La durée du contrôle est maintenant limitée à 3 mois (avec quelques dérogations). Cette
période de 3 mois est calculée à partir de la date de la première visite de l’inspecteur et la
date de la lettre d’observations.
Cette mesure sécurise le contrôle Urssaf et est très appréciable. Il faudrait l’étendre à plus
d’entreprises, en élevant le seuil d’effectif.
C. TESE
La loi de simplification des entreprises du 20 décembre 2014 a habilité le Gouvernement à
procéder par voie d'ordonnance afin de préciser et sécuriser diverses mesures en matière de
droit du travail, et notamment à prendre toute mesure afin de développer les dispositifs de
titres simplifiés.
A ce titre, il est prévu d’étendre le dispositif du Titre emploi services entreprises (TESE) aux
entreprises jusqu’à 20 salariés, ainsi que dans les DOM.
Actuellement, sur près d’1,2 millions d’entreprises employant du personnel, seulement
30 000 utilisent le TESE. De plus, le TESE est très majoritairement utilisé par des structures
ayant un effectif salarié limité (inférieur ou égal à 2 salariés), et en toute hypothèse très
éloigné du seuil de 9 salariés. On peut donc légitimement douter de l’utilisation massive du
TESE par les entreprises dont l’effectif est inférieur à 20 salariés.
L’Ordre des experts-comptables a déjà eu l’occasion de préciser non seulement que le TESE
ne permet pas une simplification des obligations sociales, mais encore qu’il est source
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d’insécurité juridique pour les employeurs, et de dégradation de la relation salarié –
employeur4.
Par ailleurs, il s’avère que les entreprises utilisant le TESE ne font pas l’objet de contrôle
Urssaf sur les payes TESE. Plusieurs cabinets comptables ont relaté ces faits au Conseil
supérieur.
Ainsi, dans le cas d’un cabinet médical ayant des payes TESE et des payes réalisées par un
cabinet comptable, le contrôleur Urssaf a indiqué à l’employeur qu’il ne contrôlerait pas les
payes TESE.
Sur quelle base légale peut-on justifier l’absence de contrôle Urssaf pour les payes TESE ?
Cet argument en faveur de la promotion du TESE n’est pas tolérable. Les entreprises
devraient être traitées sur un pied d’égalité, qu’elles aient ou non recours au TESE.
3. Objet du contrôle : chefs de redressement
Les chefs de redressement sont nombreux et cette note ne peut les recenser tous. Mais il y a
lieu d’attirer l’attention sur trois points particulièrement sensibles qui devraient faire l’objet
de modifications ou d’éclaircissements.
A. Calcul de la réduction « Fillon »
Les règles relatives au calcul de la réduction générale des cotisations, dite réduction
« Fillon » sont particulièrement complexes et sont souvent modifiées. Ainsi, à compter du
1er janvier 2015, de nouvelles modalités de calcul de la réduction sont entrées en vigueur.
En pratique, on constate qu’en raison de la complexité des modalités pratiques d’application
de cette mesure, les contrôleurs Urssaf ne peuvent pas toujours procéder au contrôle du
calcul de la réduction Fillon chez le contrôlé, au moment du contrôle. Ils font ces calculs dans
les locaux de l’Urssaf, après le contrôle, et communiquent à l’entreprise un montant global,
non détaillé, ce qui ne permet pas d’assurer le principe du contradictoire.
Il serait souhaitable qu’avant le contrôle et par anticipation, le contrôleur envoie à
l’entreprise le montant de la réduction Fillon applicable dans l’entreprise. Cela permettrait
au cabinet de vérifier les modalités de calcul et de pouvoir en discuter pendant le contrôle.
Il faudrait aussi que la lettre d’observations précise le détail du calcul de la réduction Fillon
et ne se limite pas à indiquer un montant global.
4
Note du CSOEC du 17 juillet 2014 sur le TESE
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B. Protection sociale complémentaire
Quand une entreprise met en place une complémentaire santé, une prévoyance ou une
retraite supplémentaire par décision unilatérale (cas le plus fréquent dans les TPE), une
circulaire DSS du 30 janvier 2009, reprise par la circulaire DSS du 25 septembre 2013, indique
que l’employeur doit :


produire une copie de l’écrit remis aux salariés actant la décision unilatérale ;
justifier auprès du contrôleur la modalité de remise de cet écrit aux salariés
(remise en main propre…).
Selon la circulaire, la contribution patronale finançant le dispositif de prévoyance ou de
complémentaire santé n’est exclue de l’assiette des cotisations sociales que si l’employeur
peut justifier auprès du contrôleur que le document actant la décision unilatérale a été remis
aux salariés. A défaut, l’entreprise s’expose à un redressement Urssaf sur ce motif.
On constate que le nombre de redressements sur ce motif est en augmentation croissante.
On peut se demander pourquoi les employeurs qui mettent en place un avantage social pour
leurs salariés sont ainsi sanctionnés. Ce n’est pas la loi qui impose un tel formalisme mais
une circulaire, à laquelle les contrôleurs se réfèrent systématiquement. Il nous semble que le
non-respect de ces conditions de forme ne devrait pas justifier un redressement Urssaf.
Compte tenu de l’obligation de généralisation de la complémentaire santé au 1er janvier
2016, on peut craindre que les TPE, dépourvues de service RH, ne soient pas en règle au
regard de ce formalisme. Elles s’exposent alors à un redressement Urssaf, au motif qu’elles
ne pourront justifier auprès du contrôleur que le document actant la décision unilatérale a
été remis à chaque salarié.
Il serait souhaitable de modifier les règles concernant l’obligation pour l’employeur de
justifier auprès du contrôleur que le document actant la décision unilatérale a été remis à
chaque salarié.
A tout le moins, il faudrait préconiser que, lorsqu’à l’occasion d’un contrôle Urssaf, le
contrôleur constate que ce formalisme n’a pas été respecté, il enjoint au chef d’entreprise
de le faire, dans un délai donné, sans procéder à un redressement si la situation est
régularisée dans le délai imparti.
C. Déplacements professionnels
Le salarié engage généralement des frais professionnels lorsqu’il se trouve en situation de
déplacement professionnel, en dehors de « son lieu habituel de travail ». Ce déplacement
occasionne des frais de repas et de grand déplacement.
Aucun texte ne définit la notion de « lieu habituel de travail », ce qui est l’objet de
contentieux avec l’Urssaf lorsque le salarié effectue une mission durant une longue période
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sur un autre site que celui sur lequel est basé son employeur (cette hypothèse peut viser par
exemple la situation des consultants informaticiens en mission pour plusieurs semaines ou
plusieurs mois dans les locaux d’une entreprise cliente).
Afin de sécuriser les pratiques des entreprises, il serait souhaitable de préciser les conditions
dans lesquelles une mission, même d’une longue durée, permet le remboursement de frais
professionnels pour déplacement.
4. Délais de paiement
Quand une entreprise a des problèmes de trésorerie, et qu’elle ne peut pas régler la totalité
de ses cotisations à l’Urssaf, un délai de paiement peut être accordé, pour ce qui concerne
les cotisations patronales, les majorations et pénalités de retard. Pour bénéficier de ce délai,
l’employeur doit avoir réglé ses cotisations salariales et présenter des garanties. Seul le
directeur de l’Urssaf peut prendre la décision d’accorder cette mesure de faveur (art. R 24321 CSS).
En 2009, compte tenu du contexte économique, des mesures exceptionnelles avaient été
prises en vue de régler en amont les difficultés des entreprises :


mise en œuvre d’une procédure particulière pour faciliter ces demandes :
demande par téléphone (ligne dédiée) ou par internet ; la demande était
accompagnée d’un certain nombre d’informations sur l’origine des difficultés
de l’entreprise, l’estimation de la durée de l’étalement…
obligation pour l’Urssaf de répondre dans un délai très bref : la réponse devait
être faite dans les 3 jours ouvrables en cas de demande par courriel (5 jours
ouvrables en cas de demande téléphonique).
Il serait souhaitable d’améliorer l’information des cotisants sur les délais de paiement
existants, et de rétablir les facilités qui avaient été accordées en 2009.
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