Le marché des ETF - Exchange Traded Funds-en Euro
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Le marché des ETF - Exchange Traded Funds-en Euro
133 Le marché des ETF - Exchange Traded Funds-en Euro-méditerranée Enjeux et perspectives pour les marchés développés et les marchés émergents Philippe GIVRY Département finance et économie, Sup de Co Montpellier. [email protected] Karine JEANNICOT Euromed-Marseille. École de Management et GREFI Université Paul Cézanne, Aix-Marseille. [email protected] Introduction Saidi [1997] préconisait pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord d’encourager le développement des marchés de capitaux afin de soulager le système bancaire d’un risque de crise tout en promouvant l’épargne domestique et en attirant les capitaux internationaux. Il recommandait également aux décideurs de développer des institutions de régulations en s’appuyant sur les standards et critères internationaux. L’objet de cet article est de présenter le rôle que peut jouer une des innovations financières majeures des marchés développés, les Exchange Traded Funds (ETF) appelés aussi Trackers, pour accompagner les marchés émergents dans leur évolution et discuter de ces opportunités dans la zone Euro-méditerranée. Les trackers sont des fonds collectifs indiciels dotés d’un marché secondaire. C’est l’opportunité de pouvoir directement négocier un tracker sur le marché à des conditions similaires à celles des actions individuelles, et ses difficultés sous-jacentes, qui est à l’origine du caractère innovant de ces instruments et de leur potentiel pour le développement des marchés. Dans une première partie, nous exposerons un certain nombre de constats observés sur les marchés développés: nous introduirons la nécessité de ces instruments financiers et de leur mécanisme pour répondre à la fois aux exigences des investisseurs et aux contraintes de fonctionnement, d’efficience, de liquidité et de viabilité des marchés d’actions. Dans une deuxième partie, nous illustrerons avec Nextrack, le marché des Trackers sur Euronext, l’organisation de marché qui est nécessaire pour le fonctionnement de ces instruments. Nous situerons ensuite les marchés Euroméditerranéens de trackers par rapport à l’offre de trackers dans le monde. En dernier lieu, la contribution des trackers au développement des marchés 134 émergents ainsi que les contraintes pour le gérant du fonds seront soulevées. Une première analyse nous amènera à discuter du potentiel d’évolution de ce type d’instrument en Euro�méditerranée en mettant en avant trois possibilités: la création de trackers représentatifs d’un seul marché émergent au sein de ce marché ou bien à l’initiative d’un marché étranger et la création d’un tracker diversifié lié à plusieurs marchés émergents n’ayant pas les caractéristiques suffisantes pour servir d’unique support. Le raisonnement intègre à la fois des éléments du débat sur les effets de la compétition, la fragmentation ou la segmentation des marchés en concurrence, ainsi que les contraintes de liquidité et les enjeux informationnels habituels aux marchés émergents. 1. Ce que les marchés émergents peuvent retenir de l’expérience des marchés développés Ce n’est pas parce qu’un marché dit développé a pris de l’avance sur un autre, qualifié d’émergent, que le chemin parcouru par le premier est celui qu’il faut suivre. La plus grande difficulté à gérer dans la transmission de l’expérience est certainement de faire abstraction du chemin parcouru pour ne retenir que les seules vraies étapes à franchir, celles qui conservent leur utilité lorsque l’objectif est atteint. C’est cette réflexion qui va nous guider au travers de cette première partie consacrée à un certain nombre de mutations ou de réalisations observées dans l’industrie du titre. Qu’il s’agisse du rôle moteur des investisseurs institutionnels pour attirer des capacités de financement sur les marchés et contribuer à leur fonctionnement, ou bien de la diversification internationale des portefeuilles ou, encore de la perte de monopole des marchés qui peut les contraindre à l’innovation, ces constats ne décrivent pas un chemin à suivre: ils représentent l’environnement avec lequel les marchés émergents doivent se développer et dans lequel ils doivent s’inscrire pour assurer leurs fonctions. Il en est de même avec l’antinomie entre les exigences des investisseurs et les nécessités de fonctionnement des marchés: le paradoxe de l’efficience informationnelle en était un exemple; les conséquences de la Théorie Moderne du Portefeuille quant à la survie des marchés des titres individuels illustrent à leur tour cette antinomie face à laquelle les marchés doivent organiser leurs réponses. C’est ce que nous verrons avec l’émergence des marchés macro dédiés à l’échange de portefeuilles. 1.1 Les 3i: Institutionnalisation des marchés, Internationalisation des portefeuilles et Intensification de la concurrence entre les marchés organisés Institutionnalisation des marchés Le phénomène d’institutionnalisation des marchés décrit le rôle croissant des investisseurs institutionnels dans l’actionnariat des sociétés cotées, développant ainsi l’intermédiation de bilan, c’est-à-dire les participations indirectes des investisseurs individuels dans les sociétés cotées via leurs investissements dans les portefeuilles collectifs gérés par les institutionnels. Les chiffres les plus marquants sont certainement ceux annoncés dans le fact book 2001 de 135 la Securities Industry Association (SIA) concernant les marchés américains: répartissant les titres listés sur les marchés US entre le secteur des ménages et celui des institutionnels, la SIA indique qu’en 1965, la détention des ménages représentait 83,8% contre 16,2% pour les institutionnels, alors qu’en 2000 le pourcentage n’est plus que de 41,1% contre 58,9% pour les institutionnels. L’étude «Les tendances du patrimoine financier des ménages français»1 montre que la part d’actions cotées directement détenues par les ménages français a diminué de 8,1% à 3,4% entre 1990 et 2003 alors que la part représentée par les montants confiés aux institutionnels est passée de 31,7% à 51,6% pour les mêmes dates. Ce phénomène est également souligné par une étude de la Fédération européenne des bourses de valeurs (FESE)2 , même si des différences subsistent entre les pays analysés: l’étude met à jour les précédents résultats de 1993, 1995 et 1998 en croisant des statistiques nationales provenant de plusieurs sources afin d’évaluer la structure de l’actionnariat des sociétés cotées dans les différents marchés européens suivants : Helsinki, Borsa Italiana, Ljubljana, Londres, Madrid, Lisbonne, Stockholm, Varsovie, Athènes, Deutshe Börse, Oslo, Paris, Copenhague. Les données les plus récentes correspondent généralement à l’année 2000 et les résultats pour les marchés les plus significatifs sont présentés par le graphique 1 ci-après. Les auteurs de l’étude remarquent cependant un phénomène de stabilité des investissements collectifs domestiques en même temps qu’une augmentation de la présence d’investisseurs non-résidents dont une part importante est représentée par des institutionnels. Ainsi, l’institutionnalisation de l’actionnariat des entreprises cotées dans un pays semble passer par l’internationalisation des portefeuilles gérés collectivement. Graphique 1.Source des données: étude «Share ownership structure», FESE 2002. 1. 2. Revue mensuelle de l’Autorité des Marchés Financiers, N°13, avril 2005. «Share ownership structure in Europe», FESE, 2002. 136 Internationalisation des portefeuilles Cet autre phénomène, la diversification internationale des portefeuilles, a été facilité par l’élimination, au fil des années quatre-vingt-dix et encore récemment, des barrières à l’entrée sur les marchés boursiers: en particulier, le développement de cross memberships permettant à deux marchés de reconnaître mutuellement leurs membres respectifs comme habilités à intervenir en direct dans la négociation, puis l’habilitation de remote members, c’est-à-dire de membres non-résidents du marché pouvant conserver leur siège dans leur pays d’origine et ainsi intervenir à distance. L’attrait de telles opportunités réside évidemment dans la réduction des coûts mais ne peut fonctionner que par la confiance: cette ouverture des marchés à l’international a été largement facilitée et accompagnée par l’automatisation des systèmes de transaction (ou tout au moins de ceux qui ne l’étaient pas encore) offrant donc un accès équitable et aussi transparent que pour les membres résidents et permettant une meilleure traçabilité des échanges réalisés. Un autre aspect est encore celui de l’évolution des systèmes de compensation et de règlement à l’international3. Une des conséquences notables de ces faits concerne l’activité d’échange sur les marchés. Le tableau 1 ci-dessous illustre, dans le cas de la France, l’évolution de la répartition (en pourcentage) des montants échangés entre les différentes catégories d’investisseurs en distinguant les actions françaises cotées des actions étrangères cotées en France. Ce tableau fait apparaître deux constats fondamentaux: d’abord, plus de 90% des montants échangés semblent le fait des non résidents et des institutionnels français, qu’il s’agisse d’actions françaises ou étrangères; ensuite, si en 1998 on constatait que les actions françaises étaient échangées par les non résidents et les actions étrangères par les institutionnels français, ce partage de l’activité n’est plus. En 2002, les non résidents sont responsables de plus des 2/3 des montants échangés sur les valeurs étrangères cotées en France et continuent de représenter près des 3/4 des montants échangés sur les actions françaises cotées4. 3. 4. Voir Giordano [2002]. Le Bulletin de la Banque de France n°125 de mai 2004 rapporte une étude intitulée «Une détention internationale des titres européens plus centrée sur l’Europe». Comme son titre l’indique, les non résidents, du point de vue de la France, sont essentiellement européens (Royaume-Uni, Allemagne, Luxembourg, Pays-bas, Belgique, Italie), mais considérés individuellement, le principal acteur reste les Etats-Unis. 137 Tableau 1 Répartition des montants annuels échangés sur le marché français des actions entre les différentes catégories d’investisseurs. (ANF est l’abréviation de Agents Non Financiers). Données: Bulletins de la Banque de france, avril (2003), avril (2002) mai (2001), avril (2000), et mai (1900) 2002 2001 2000 1999 1998 Actions françaises cotées Ménages 1,6 % 1,9 % - 1,6 % 2,8% Sociétés 2,2 % 2,1 % - 0,7 % 1,2 % Autres ANF 0,1 % 0,1 % - 2,5 % 0,1 % Institutionnels 23,0 % 18,9 % - 13,8 % 20,9 % Non résidents 73,1 % 76,9 % - 81,4 % 74,9 % Actions étrangères Ménages 0,7 % 1,1 % 1,9 % 2,1 % 4,1 % Sociétés 0,5 % 0,4 % 0,5 % 1,4 % 2,7 % Autres ANF 0,1 % 0,1 % 0,1 % 0,2 % 0,2 % Institutionnels 30,5 % 32,1 % 41,3 % 53,3 % 75,1 % Non résidents 68,2 % 66,4 % 56,2 % 43,0 % 17,9 % La forte implication des non résidents dans la détention des titres et l’activité d’échange pourrait apparaître comme une source de risque supplémentaire pour un marché donné: source d’une plus grande fragilité face à un retrait massif de ces capitaux étrangers. Il ne faut cependant pas négliger le fait que ce phénomène correspond à une véritable internationalisation des flux d’investissement, en ce sens qu’elle est réciproque entre les marchés. Ainsi, ces grands investisseurs ne se contentent plus uniquement d’éliminer l’influence des sources de risque spécifique au niveau de portefeuilles, ils diversifient également les risques systémiques entre pays comme s’ils acceptaient d’assumer, ensemble, les différents risques par un partage global. Cette simple illustration des conséquences de l’internationalisation des portefeuilles est aussi à rapprocher du troisième phénomène cité: l’intensification de la concurrence entre les marchés organisés. Intensification de la concurrence entre les marchés organisés La parenté en revient certainement à la bourse de Londres qui avec le SEAQ I, son compartiment des valeurs internationales, offre la particularité de coter les titres de sociétés étrangères dans leur devise d’origine (pas de risque de change, facilité d’arbitrage et de transaction, etc.). Cette concurrence de Londres, renforcée par la pression créée par Instinet (voir ci-après) ou les possibilités d’échange de portefeuilles offertes aux institutionnels américains par des systèmes comme POSIT, a conduit le NYSE à proposer des sessions de transactions hors séance (after-hours trading session) en juin 1991. Une autre conséquence, par exemple, a été la réaction du marché français face à ce 138 risque de perte d’activité sur ses principales valeurs également listées à Londres par la création du marché de blocs fin 1994 afin de s’adapter aux exigences des investisseurs mis en évidence par cette concurrence5. Au niveau pan-européen, cette concurrence continue aujourd’hui depuis Londres avec Virt-X, à l’initiative en partie du marché suisse, qui offre à ses membres un point d’entrée unique, avec des règles de marchés de compensation et de règlement harmonisées, pour échanger électroniquement les valeurs constituant les principaux indices de 16 marchés européens en respectant les devises d’origine. Un autre exemple est celui du Nasdaq qui non seulement organise la concurrence avec les autres marchés américains en permettant l’échange des titres qui y sont listés (sans qu’ils le soient sur le Nasdaq), mais organise aussi sa propre concurrence en autorisant et encourageant la création d’ECN ou Electronic Communication Networks. Les ECN sont des systèmes de transaction alternatifs qui permettent l’échange de titres du Nasdaq sans passer par son système de Dealers6. La Revue de la Stabilité Financière7 remarquait récemment cette concurrence accrue entre marchés organisés sous la forme de listage de produits identiques avec la montée en puissance de ces systèmes de transactions alternatifs (Alternative trading System ou ATS) ou autres multilateral trading facilities8. Si l’on peut en attendre des conséquences positives en terme de diminution des coûts de transaction, grâce encore à l’automatisation des systèmes de cotation, la question de la fragmentation du flux d’ordres et de l’activité de marchés en concurrence sur les mêmes titres reste posée. D’autres structures ont choisi de partir à la recherche de la taille critique en abandonnant leur dimension régionale pour consolider leur rôle pour un ensemble de pays: c’est le cas en Europe d’Euronext qui regroupe ainsi les marchés de valeurs mobilières d’Amsterdam, Bruxelles, Lisbonne et Paris; c’est encore avec Euronext et ses partenaires (Atos Euronext, LCH. Clearnet et Euroclear) que le Dubai International Financial Exchange envisage de développer le premier marché international de capitaux pour le Moyen-Orient. Peut-il y avoir segmentation9 lorsque deux marchés se retrouvent en concurrence? Les bases de ce débat entre segmentation et fragmentation ont été alimentées par Harris [1990] et Stoll [1992] en analysant les conséquen5. 6. 7. 8. 9. On peut retrouver des éléments d’analyse de cette concurrence entre Paris et Londres dans le chapitre 2 de l’ouvrage «Microstructure des marchés financiers: institutions, modèles et tests empiriques», Biais B., T. Foucault et P. Hillion. PUF, 1997. Les ECN fonctionnent généralement sur la base d’un carnet d’ordres qui a la particularité de ne pas consolider l’intégralité du flux d’ordres, contrairement à ce qui caractérise un marché dirigé par les ordres, puisque chacun est en concurrence avec les autres pour attirer les investisseurs. Instinet, qui est le principal ECN capture environ 30% du volume des transactions traitées sur le Nasdaq; ce gain en part de marché face au système du Nasdaq a conduit ce dernier à proposer en réaction l’anonymat complet des transactions à ses clients. Instinet est également partie prenante avec Archipelago, un autre ECN, dans le projet Virt-X évoqué précédemment. Banque de France, Revue de la Stabilité Financière, n°4, juin 2004, pp 42-46. La création de ces systèmes de transactions satellites rattachés à un marché introduit le débat sur l’internalisation, c’est-à-dire l’exécution des ordres clients par leurs intermédiaires financiers en dehors du marché principal. Le lecteur pourra approfondir ce débat en se référant à l’article suivant: «Internalization, investor protection and market quality», Biais B., D. Davydoff, Working paper IDEI, 2002. Le terme segmentation suppose la complémentarité des deux marchés, par les services qu’ils procurent aux différents investisseurs, et non la concurrence entre les deux ni la dominance de l’un ou l’autre comme le supposerait en revanche le terme fragmentation qui sera employé ultérieurement. 139 ces de la perte de monopole d’un marché. Un problème majeur apparaît lorsque les règles de négociation ne reposent plus que sur la priorité par les prix, c’est-à-dire lorsque les investisseurs privilégient le marché permettant d’échanger au meilleur prix. La priorité par le temps, celle qui récompense l’initiative de prix en garantissant au premier investisseur à avoir proposé des conditions d’échange données d’être prioritaire si une transaction est possible, s’en trouve ignorée et ce, d’autant plus que les possibilités de surenchère sont importantes10. Cela a pour effet de freiner le processus de découverte du prix11 et de réduire la liquidité du marché sur le marché concurrencé. C’est ce que montre également Madhavan [1995] et, en ce sens, la consolidation des flux d’ordres pour concentrer l’activité semble profitable aux investisseurs (Pagano [1989 a et b]). Parmi les paramètres importants qui semblent conditionner l’issue d’une concurrence entre les marchés il y a l’accessibilité de l’ensemble des investisseurs à chacun des marchés et l’importance du risque d’asymétrie d’information. Intuitivement, le fractionnement entre les marchés des volumes à échanger s’avère coûteux (Bernhardt et Hughson [1997]), mais lorsque de larges investisseurs non informés ont une liberté d’accès que ne possèdent pas de petits investisseurs, ces premiers ont la possibilité de profiter de la présence des derniers pour fractionner optimalement leur volume à échanger afin d’éviter de subir un impact de marché (Chowdry et Nanda [1991]); cela ayant pour effet d’accentuer la migration d’activités vers les marchés concurrents correspondants et d’accroître la volatilité et les fourchettes de prix sur le marché concurrencé. Quelle pourrait en être l’issue dans le cas où un marché émergent venait à être concurrencé par un ou plusieurs marchés organisés? La première analyse de cotations multiples consacrée à un marché émergent est celle de Domowitz, Glen et Madhavan [1996]. Elle offre l’avantage de décrire le comportement d’investisseurs ayant accès aux mêmes moments à la possibilité d’échanger directement des actions listées sur la Bolsa Mexicana de Valores ou de négocier des ADRs (American Depositary Receipts) représentatifs de ces actions mais émis et négociables sur les différents marchés US. Leurs résultats distinguent les cas des titres mexicains accessibles aux investisseurs non résidents avant qu’ils deviennent support d’ADRs des cas des titres mexicains protégeant le capital (la détention directe est réservée aux investisseurs domestiques; elle est associée à un droit de vote restreint ou ne dispose d’aucun droit de vote) servant également de support à des ADRs. Pour les premiers, les auteurs constatent une migration des investisseurs non résidents qui semblent privilégier les «échanges à domicile» dans leurs propres structures de marché. Les conséquences pour le marché émergent domestique se traduisent par un accroissement de la volatilité indépendamment du volume, une plus grande sensibilité des prix aux volumes, ce qui tend à affecter la liquidité du marché pour les titres concernés, mais des fourchettes de prix plus étroites. Ce dernier point proviendrait d’une réaction des négociateurs domestiques pour retenir le flux d’ordres et conserver une certaine liquidité en améliorant 10. C’est en particulier le cas lorsque l’échelon de cotation (tick size) est petit et qu’il est a priori peu coûteux de proposer l’échange à un prix légèrement plus élevé (pour un achat) ou plus faible (pour une vente) que les conditions courantes. 11. Il n’y a plus d’incitation à proposer des prix et le risque d’asymétrie d’information devient plus grand. 140 les conditions d’échanges en terme de prix. Cette fragmentation du flux d’ordres entre marché mexicain et marchés des ADRs donnant lieu en réalité à une meilleure qualité des conditions d’échanges pour des petits ordres sur le marché mexicain, les auteurs vont dans le sens d’une segmentation des marchés. L’autre résultat marquant, lorsque les titres support n’étaient pas initialement accessibles aux non résidents ou disposaient de droits restreints, est l’impossibilité de conclure à un quelconque impact de la concurrence des ADRs à l’exception d’un accroissement de la volatilité non lié au volume d’échange. Que connaît-on des risques de concurrence concernant l’offre de trackers? La seule étude, à notre connaissance est celle de Boehmer et Boehmer [2002] concernant la concurrence introduite par le NYSE sur des trackers existants déjà sur l’Amex. Ils concluent à une amélioration de la qualité des conditions d’échange: la liquidité s’est globalement améliorée sans affecter le processus de découverte du prix et le partage du flux d’ordres semble répondre à une segmentation du marché pour ces trackers, i.e. les deux concurrents attirent des ordres dont les caractéristiques diffèrent et offrent ainsi des services complémentaires aux investisseurs. 1.2 L’émergence de marchés macro (de portefeuilles) dépendant des marchés micro (des titres individuels) L’attrait croissant de la diversification et la recherche d’économies d’échelle L’étude conduite sur les marchés américains par Campbell, Lettau, Malkiel et Xu [2000] met en évidence un accroissement du risque total12 des titres individuels alors que ni la volatilité du marché ni celle du secteur d’activité ne montrent de tendance particulière. De fait, ils mettent en évidence une augmentation du risque spécifique qu’ils estiment avoir plus que doublé entre 1962 et 1997. En conséquence, le nombre de titres nécessaires pour atteindre un niveau suffisant de diversification est plus élevé de nos jours qu’auparavant: ils observent, par exemple, que dans les décennies 1963-73 ou 1974-85 un portefeuille équipondéré de 20 titres permettait d’atteindre le même niveau de risque qu’un portefeuille incluant 50 titres dans la décennie 1986-97. La diversification devient donc d’autant plus nécessaire que le risque spécifique est élevé. Cela devrait représenter une incitation à la détention de portefeuilles de plus en plus larges et devrait encourager la gestion collective. Bien que la finance moderne soit née de cette acceptation, la nécessité de la diversification est bien celle qui a accompagné récemment un certain nombre d’innovations financières. La diversification a toutefois un coût: celui de gérer un nombre important de lignes en portefeuille, sans compter les coûts nécessaires à l’identification du portefeuille à gérer et à la sélection des titres qui le composent. En référence à cela, Gammill et Perold [1989] notaient déjà la forte influence des 12. Les auteurs ont décomposé le risque total en une somme de trois composantes (le niveau du marché, le niveau du secteur d’activité, le niveau de l’entreprise isolée) qui sont donc estimées indépendamment des bêtas ou des covariances et permettent ainsi d’éviter les biais d’estimation. 141 investisseurs macro, ceux qui achètent et vendent des portefeuilles diversifiés par opposition aux investisseurs micro qui se concentrent sur les valeurs individuelles. L’apparition des contrats à terme et des options sur indice boursier, le program trading favorisant les transactions de paniers de titres, les systèmes comme POSIT et Instinet Crossing aux Etats-Unis facilitant l’échange de portefeuilles pour les institutionnels, la gestion indicielle puis l’émergence des Exchange traded Funds ou trackers en sont des exemples marquants que l’on pourrait qualifier d’instruments macro. La demande des investisseurs macro est encouragée par les économies d’échelle qu’ils obtiennent compararativement à l’échange de titres individuels: il apparaît d’abord moins coûteux d’échanger un portefeuille en une seule fois dans son ensemble plutôt que de réaliser autant de transactions que de titres inclus dans ce portefeuille. Ensuite, l’exposition d’un investisseur macro aux risques attachés à son portefeuille est plus facilement ajustable aux informations nouvelles – réduire ou augmenter le montant consacré au portefeuille selon la nature de l’information – que lorsqu’il faut procéder à la réallocation du portefeuille; enfin, la collecte et le traitement d’informations macro sont certainement moins coûteux que pour des informations micro concernant non seulement un ensemble plus large d’indicateurs mais aussi une très grande diversité de titres. Cette plus grande facilité d’accès à moindre coût pose cependant un problème de fond auquel l’organisation de marchés macro, comme celui des trackers par exemple, doit répondre: le rapport entre la liquidité des marchés d’instruments macro et celle des marchés des titres individuels ou marchés micro. En effet, la prédominance de marchés macro en termes de facilité d’accès et de coût pourrait conduire à la désertification des marchés micro. Or, si l’activité d’échange venait à migrer des marchés micro vers les marchés macro, comment pourrait-on valoriser un portefeuille de titres si ces mêmes titres ne font l’objet d’aucune transaction et que, par conséquent, les prix des titres individuels n’assimilent plus aucune information micro! Quelle place pour les marchés de titres individuels? Dans une réflexion qui est finalement proche de celle de Grossman et Stiglitz [1980] à propos du double paradoxe de l’efficience informationnelle, Gammill et Perold faisaient la prédiction d’une certaine segmentation entre marché macro et micro que l’on pourrait résumer de la façon suivante: la négociation d’instruments macro suppose la recherche d’informations macro; celles-ci étant communes à l’ensemble des titres individuels, elles participent à la corrélation des titres individuels avec les instruments macro dans leur ensemble et la justifient. En revanche, la réciprocité ne tient pas puisque certaines informations ne relèvent que des spécificités des titres individuels et la déconnexion semble de plus en plus marquée si l’on en juge par les résultats de l’étude de Campbell, Lettau, Malkiel et Xu citée précédemment. Aussi, une segmentation est possible sur la base des informations exploitées par les spéculateurs intervenant sur l’un ou l’autre des marchés. En effet, si l’attrait des instruments macro l’emporte pour un grand nombre d’investisseurs, il devrait subsister sur les marchés micro une activité d’échange vitale de par l’incitation à agir sur la base d’informations spécifiques. Bien sûr, la viabilité de l’activité sur les marchés micro ne peut dépendre des seuls spéculateurs infor- 142 més de ces signaux spécifiques comme nous l’a enseigné le paradoxe de l’efficience et les transactions nécessitent des motivations diverses pour être concrétisées. Qui seront donc les adversaires de l’échange? Si la plupart des investisseurs privilégient les instruments macro et que les spéculateurs informés d’informations macro préfèrent également intervenir directement sur les instruments macro, seuls des arbitragistes seront en mesure de prendre en charge la corrélation entre les instruments macro et les titres individuels en se basant sur des différences de valorisation au niveau des portefeuilles. Ce sont donc ces arbitragistes macro qui ont la responsabilité d’intégrer l’information macro dans les prix des titres individuels et ramener ainsi de l’activité sur les marchés micro, ce qui permettra aux spéculateurs et arbitragistes micro de contribuer à l’efficience des prix des titres individuels en répercutant les informations spécifiques qui les motivent. On remarquera, à l’instar de Gammil et Perold, que le risque d’asymétrie d’information devient nécessairement plus important sur les marchés micro que sur les marchés macro dans la mesure où l’on retrouve en plus grandes proportions des investisseurs concernés par la gestion de leur exposition au risque ou des motifs non informationnels comme l’investissement de sommes nouvelles, le réinvestissement de dividendes ou le désinvestissement. En conséquence, les conditions de négociations, concrétisées par les fourchettes de prix, devraient être plus élevées sur les marchés micro que sur les marchés macro. L’organisation de marchés macro doit donc encourager, voire institutionnaliser compte tenu de l’enjeu, cette relation avec les marchés micro afin d’entretenir ces derniers et assurer sa propre survie. Nous en verrons une traduction concrète dans le cas des marchés des trackers au travers du rôle joué par le marché primaire et les participants au fonds. 2. Une innovation financière majeure: Les trackers Les trackers sont des fonds indiciels ayant en France un statut juridique d’OPCVM (Organismes de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières) négociables en continu. Ils sont émis et gérés par un prestataire de services d’investissement (le «gérant du fonds») qui réplique sur le marché au comptant la composition de l’indice boursier pris en référence. Le capital du fonds est ouvert, c’est-à-dire qu’il y a émission de parts (trackers) au fur et à mesure des souscriptions; la valeur des actifs gérés, appelée valeur liquidative du fonds, est diffusée chaque jour. Elle est égale à l’actif net du fonds divisé par le nombre de parts émises. L’actif net est calculé sur la base des cours de clôture ou d’ouverture des titres composant le fonds. Acheter des parts du fonds, ou des trackers, revient ainsi à devenir propriétaire des actifs gérés par le gestionnaire du fonds. Le tracker peut donner droit aux dividendes qui ont été reçus sur les titres qui composent le fonds. Ils sont, selon le cas, distribués ou réinvestis, et les frais de gestion du fonds sont déduits de leur montant. L’achat de trackers garantit l’investisseur de la performance de l’indice puisque le fonds reproduit fidèlement l’indice. Néanmoins, cette parfaite corrélation entre l’indice et le tracker soulève quelques interrogations comme nous venons d’en discuter dans le cadre plus général des instruments macro. 143 Cette deuxième partie commencera donc par la présentation de la mécanique nécessaire à la coexistence et la corrélation entre le marché des trackers et celui des titres individuels qui lui sont liés. Nous décrirons ensuite l’implantation des marchés de trackers dans le monde en nous attachant particulièrement à la situation actuelle des marchés de la zone Euro- méditerranée. Le dernier point abordé envisagera la contribution des trackers pour accompagner les marchés émergents dans leur développement. 2.1. Le rôle fondamental joué par le marché primaire des trackers via les soucriptions/rachats en nature: l’exemple de Nextrack L’originalité du tracker par rapport à un portefeuille classique, qu’il relève de la gestion collective ou non, est sa négociabilité sur le marché. Autrement dit, il existe une offre et une demande de trackers qui s’exprime indépendamment des offres et demandes adressées sur le marché des titres individuels que représente ce portefeuille puisque cet instrument macro bénéficie de toutes les économies d’échelles évoquées dans la partie précédente. Or, ce portefeuille est également représentatif d’un indice dont la valeur relève de l’agrégation des prix des titres individuels qui le composent et ces prix résultent des offres et demandes de ce marché micro. On pourrait ainsi penser que des écarts de cours entre le tracker et l’indice devraient se produire, dans la mesure où les comportements des investisseurs et donc les prix qui en découlent sont déconnectés. Des écarts sont bel et bien observables même s’ils restent relativement faibles et limités à ± 1,5%13, mais ils témoignent au-delà de ce pourcentage de l’existence d’opportunités d’arbitrage. On aurait pu se contenter de laisser les intervenants libres d’identifier et de profiter de ces opportunités d’arbitrage, mais l’enjeu de la survie des marchés micro et donc des marchés macro est tel qu’il a été décidé de systématiser et d’institutionnaliser ce mécanisme. C’est la fonction des participants du fonds que d’assurer, outre la tenue du marché (en proposant en permanence une fourchette acheteur/vendeur) et le processus de souscription /rachat selon l’offre et la demande nettes de trackers, les opérations d’arbitrage qui permettent de maintenir un écart très faible entre les deux valeurs. Ces arbitrages assurant la quasi parfaite corrélation entre le tracker et l’indice vont pouvoir être facilement mis en œuvre par la dynamique du marché primaire des trackers et le travail conjoint des participants au fonds et du gérant du fonds. Le graphique 2 révèle cette parfaite corrélation entre l’indice CAC40 et son tracker le Lyxor ETF CAC40 géré par Lyxor Asset Management (filiale de la Société générale): 13. L’origine des écarts acceptables provient de la politique de réinvestissement des dividendes des titres constituant le fonds, des frais de gestion du gérant du fonds et, dans une moindre mesure, d’une légère modification de la composition du fonds par rapport à l’indice. 144 Graphique 2 Historique du CAC 40 et de son tracker Lyxor ETF CAC 40 depuis janvier 01 Si en cours de séance un écart de cours de +/- 1,5 % est possible compte tenu du fonctionnement du marché, nous pouvons observer en revanche sur moyenne période une parfaite synchronisation du CAC 40 et de son ETF Lyxor CAC 40. L’investisseur sur trackers qui ne se livre pas au day trading mais qui a un horizon de gestion de plusieurs jours, semaines ou mois, est ainsi garanti de capturer la performance du CAC 40. Les opportunités d’arbitrage sont saisies par le processus de souscription / rachat et le lien maintenu entre les marchés primaire et secondaire par les participants au fonds tel que l’illustre le graphique 3. Les trackers sont émis par le mécanisme de la souscription et du rachat. Le capital du fonds étant ouvert, s’il se produit une demande nette de trackers, les participants vont demander au gérant du fonds d’émettre des trackers en contrepartie de la livraison des titres répliquant l’indice14. Il s’agit alors d’une souscription en nature. En revanche, s’il se produit une offre nette de trackers, le participant du fonds se tourne vers le gérant pour qu’il rachète les trackers en contrepartie de la livraison des titres. Il s’agit alors du rachat en nature. La livraison des titres, du participant au gérant ou inversement du gérant au participant, s’accompagne d’un versement en espèces, appelé la soulte, constituée entre autres, des dividendes accumulés et non distribués par le fonds. 14. La souscription peut également se réaliser en numéraire. Les coûts de gestion sont alors plus élevés puisque le gérant du fonds est conduit à se procurer les titres sur le marché. 145 Graphique 3 - Les liens entre marchés primaire et secondaire Marché primaire Marché secondaire Vendeur Trackers Tracker Espèces Participant au fonds Émission de trackers Souscription en nature Rachat de trackers Gérant du fonds Achat / Vente Euronext NextTrack Rachat en nature Trackers Tracker Espèces Acheteur Les opérations de souscription ou de rachat s’effectuent pour une quantité minimum de trackers appelée unité de souscription ou de rachat. Cette unité est fixée par le gérant du fonds. Elle peut être un multiple de 10 000 ou 50 000 trackers. Lorsque la valeur liquidative indicative s’écarte du tracker d’un pourcentage supérieur à 1,5%, les participants du fonds mettent en place un arbitrage dont le processus est celui de la souscription/rachat afin de rétablir le déséquilibre momentané. Si par exemple le tracker est supérieur à la valeur liquidative, le participant du fonds vend des trackers pour lesquels une émission est nécessaire, en contrepartie de titres qu’il se procure sur le marché au comptant; les opérations étant ensuite dénouées pour capturer le différentiel de cours. La pression de l’offre de trackers induit une chute du cours du tracker jusqu’à ce qu’il rejoigne la valeur liquidative indicative. Si inversement, la valeur du tracker est inférieure à la valeur liquidative, le participant rachète des trackers et, le portefeuille du gérant est réduit de leur montant, la demande de trackers par les participants créant une pression à la hausse sur le prix du tracker. C’est ainsi que les ajustements de prix sur les marchés macro sont répercutés sur les marchés des titres individuels inclus dans l’indice support et réciproquement. De cette façon, l’information macro motivant les offreurs ou demandeurs de trackers affecte les titres individuels sans pour autant que les mêmes offreurs et demandeurs interviennent également sur les titres individuels. Malheureusement, le mécanisme d’arbitrage est peu discriminant quant aux motivations des investisseurs et ce même mécanisme peut tout aussi bien répercuter des variations de prix liées à des chocs non informationnels comme les chocs de liquidité. C’est la raison pour laquelle il est important que les participants au fonds jouent un rôle de teneurs de marché: en absorbant les chocs de liquidité, ils réduisent la transmission de bruit. Leur relation privilégiée avec le gérant du tracker leur offre alors l’avantage de pouvoir réagir prioritairement lorsque la nature du choc a été mal identifiée. Il faut donc bien comprendre que l’offre de trackers, dont la décision incombe aux seules autorités de marchés, est conditionnée par la gestion du 146 tracker, laquelle est étroitement liée au marché sur lequel cet instrument se situe, non seulement en termes de taille et d’activité mais aussi d’organisation des échanges. Il ne semble pas cependant que cela ait été un obstacle majeur à son intégration dans les différents marchés mondiaux comme nous allons le constater. 2.2. L’offre de trackers dans le monde et la situation des marchés Euro méditerranéens Pour présenter l’état des marchés de trackers dans le monde (on parle alors plus généralement d’ETF ou Exchange Traded Funds) nous retiendrons les trois zones internationales définies par la World Federation of Exchanges d’où proviennent les données. Le tableau 2 ci-après reporte le nombre d’ETF négociés sur les marchés ainsi que leur volume de transaction. Tableau 2 – Le marché des ETF dans le monde en juin 2005 Les marchés sont classés par zone géographique, par nombre d’ETF puis par importance de l’activité sur les ETF. Pour comparaison, sont également indiqués l’activité d’échange sur les actions individuelles ainsi que la taille du marché actions (capitalisation boursière).Source: World Federation of Exchange Places financières Nombre d’ETF ETF - Volume de transaction sur 6 mois (en millions USD) Marché actions Volume de transaction total sur 6 mois (en millions USD) Marché actions Capitalisation boursière (en millions USD) CONTINENT AMERICAIN 209 ETF American stock exchange (AMEX) 147 ? 253 270,0 91 677,0 Mexican stock exchange 22 724,5 26 085,4 190 087,3 NYSE 19 10 027,5 6 864 616,3 12 865 336,5 TSX group (Toronto) 17 10 307,3 409 251,5 1 239 049,0 Lima SE 3 1,2 885,1 20 414,1 Sao paulo SE 1 42,4 74 405,9 358 952,6 EUROPE – AFRIQUE 253 ETF dont 120 pour les marches Euro-méditerranéens Deutsche Börse 73 31 898,8 891 292,1 1 119 777,4 Euronext 64 11 869,1 1 403 902,9 2 285 874,8 Swiss Exchange 31 4 487,9 512 258,9 797 976,4 Tel Aviv SE 31 2 271,4 24 258,3 95 884,6 Borsa italiana 24 5 679,0 666 004,7 707 929,9 London SE 11 ? 2 750 246,2 2 733 565,1 OMX Exchange 10 2 713,7 464 376,3 709 390,3 JSE South Africa 5 196,7 90 107,9 389 324,1 Oslo Bors 2 10,2 102 147,4 159 773,1 Istanbul SE 1 538,7 89 996,2 105 626,3 Irish SE 1 55,2 34 855,9 105 912,8 ASIE 57 ETF Tokyo SE 13 7 582,2 1 683 843,8 3 393 645,5 Hong Kong Exchanges 9 993,0 218 232,2 895 297,9 Australian SE 9 548,2 327 055,5 721 138,1 New Zealand Exchange 6 31,0 10 008,4 41 208,1 Singapore Exchange 6 13,5 52 452,7 235 506,5 National Stock Exchange India 5 40,0 136 105,5 397 446,8 Korea Exchange 4 910,2 470 629,2 496 924,4 Osaka SE 3 3 894,9 102 420,0 2 195 654,2 Shanghai SE 1 2 204,2 106 104,0 271 735,7 Taiwan SE corp. 1 1 213,5 263 308,6 456 291,4 BSE, the SE Mumbai 1, disparu 0,7 67 138,4 425 716,6 en juin 05 147 On ne peut que constater, à la lecture du tableau 2, l’ampleur du phénomène ETF dans le monde et le poids de la zone Europe Afrique en particulier. L’offre sur les marchés Euro-méditerranéens représente pratiquement ¼ de l’offre mondiale en terme de nombre d’instruments. L’analyse de l’activité ne peut malheureusement pas être menée à bien ici, du fait de l’absence de données pour le principal acteur qu’est l’Amex; elle serait quoi qu’il en soit relativement difficile à comparer tant l’évolution du nombre d’instruments listés est rapide et asynchrone entre les marchés. Le London SE (octobre 2004), la Deutsche Börse (février 2005), et plus récemment encore Euronext ont créé leur premier et seul ETF émergent sur la Chine, l’offre européenne étant quasiment inexistante sur ce type d’indice. Pour renforcer le rayonnement européen d’Euronext, malgré le rapprochement imminent avec le LSE, il serait aujourd’hui nécessaire d’emboîter le pas dans ce processus d’innovation et d’accélérer les appels d’offre en vue d’offrir le plus rapidement possible une gamme élargie de Trackers émergents. Le seul marché dans le monde à offrir un large panel de trackers émergents est l’Amex. Parmi les 147 ETF négociés sur l’Amex, une trentaine environ portent sur des indices internationaux dont la moitié sont des indices boursiers de marchés émergents. Les indices émergents servant de support sont par exemple: FTSE Xinhua china 25, MSCI emerging markets, MSCI Brazil, MSCI Hong Kong, MSCI Malaysia, MSCI Mexico, MSCI Pacific Ex-Japan, MSCI Singapore, MSCI South Africa, MSCI Taiwan, S&P Latin America 40, Emerging Markets VIPERs, Pacific VIPERs. On remarquera à partir du tableau 2 qu’il n’apparaît pas de lien immédiat entre le nombre d’ETF et l’activité ou la taille du marché d’actions. Même si les marchés à plus forte capitalisation sont tous présents sur ce type d’instruments, le critère n’est pas discriminant. Quel pourrait être le potentiel de développement de marchés d’ETF dans la zone Euro-méditerranéenne? Existe-t-il des caractéristiques concernant le marché des actions qui conduiraient à empêcher ou à gêner le développement de marchés d’ETF compte tenu de l’expérience de ce type d’instrument au niveau mondial? Bien que les ETF représentent l’instrument macro le plus récent, leur apparition sur un marché n’est pas nécessairement précédée et conditionnée par l’existence d’instruments plus expérimentés comme les options et contrats à terme sur indice: si Euronext, La Borsa Italiana et le Tel Aviv SE sont dotés d’un marché dérivé, la Bourse d’Istanbul, elle, n’en possède pas mais a pourtant inauguré son premier ETF en janvier 2005 avec un montant échangé de 50,4 millions de dollars sur le mois (environ 0,3% du montant total échangé sur l’ensemble du marché actions sur la même période; cette proportion a doublé depuis en 6 mois). Pour les trois premiers cités, la dynamique de création est telle que depuis le début de l’année 2005, quatre nouveaux ETF ont fait leur apparition sur la Borsa Italiana, 11 sur Euronext et 6 sur Tel Aviv SE. 148 Tableau 3- Caractéristiques des marchés Euro-méditerranéens Les marchés sont classés en fonction de leur capitalisation boursière. Source: World Federation Of Exchanges, Remarque: il manque les données concernant la Bourse de Tunis. Données world federation of exchanges Juin 2005 * Décembre 2004 Nombre de sociétés cotées Capitalisation (en millions USD) Montant échangés sur 6 mois (depuis 12 mois pour les marchés marqués par *) (en millions USD) Nombre d’ETFs listés ETFsMontants échangés sur 6 mois (en millions USD) 64 11 869,1 24 5 679,0 domestiques étrangères Fonds d’investissement 2 285 874,8 1 380 964,6 22 938,2 - - 920 479,5 798 521,8 14 149,3 0,0 9 278 707 929,9 625 035,2 40 789,9 179,7 310 2 312 120 045,9 28 915,9 212,4 232,7 Istanbul SE 298 0 298 105 626,3 89 996,2 0,0 0,0 1 5 38,7 Tel Aviv SE - - 586 95 884,6 24 258,3 0,0 0,0 31 2 271,4 Le Caire et Alexandrie* 795 0 795 38 533,1 5 485,8 0,0 0,5 Casablanca* 53 0 53 25 064,3 4 354,8 0,0 0,0 Amman* 192 0 192 18 383,4 5 350,2 0,0 0,0 Zagreb* 166 0 166 10 958,6 465,0 0,0 0,0 Cyprius SE* 124 0 124 4 880,0 264,7 0,0 21,6 Belgrade * 403 0 403 3 259,9 437,8 0,0 0,0 Malte 13 0 13 2 856,3 51,7 0,0 0,0 Beirut* 11 11 0 2 206,3 188,2 0,0 8,8 Palestine SE* 24 0 24 1 095,8 200,4 0,0 0,0 domestiques Etrangères total Euronext 980 313 1293 Espagne - - Borsa italiana 269 Athens SE Il apparaît clairement dans le tableau 3 que, comparativement à la seule zone Europe (voir Tableau 2) et en se référant aux critères de la capitalisation boursière et des montants échangés, l’Espagne et la Grèce montrent une lacune dans l’offre d’ETF. On notera cependant que les marchés espagnols ont élargi leur gamme d’indices boursiers pour inciter, entre autres, à la création d’ETF. L’existence ou non d’un compartiment de valeurs étrangères, supposant éventuellement que des investisseurs non résidents aient l’habitude de suivre les valeurs qui y sont cotées et donc seraient sensibilisés au potentiel du marché, ne semble pas non plus un critère discriminant pour la création de trackers, comme l’illustrent les bourses d’Istanbul et de Tel Aviv. Pour les autres marchés Euro-méditerranéens, le critère de la capitalisation boursière ne 149 devrait pas représenter une contrainte : si le plus petit des marchés de la zone Europe-Afrique proposant des ETF reste le Tel Aviv SE, le minimum est dépassé dans la zone Asie avec le New Zealand Exchange (41 210,1 millions USD) et avec le Lima SE (20 414,1 millions USD) sur le continent américain. Autrement dit, du point de vue de la capitalisation boursière, l’Egypte et le Maroc disposent de marchés d’actions dont la taille serait suffisante. On notera alors que le Amman SE n’est pas forcément très loin de ce seuil. Du point de vue du niveau d’activité sur le marché actions, si l’on garde en référence celles de New Zealand Exchange et plus particulièrement celle de Lima SE qui restent les plus faibles de leur zone, les marchés Egyptien, Marocain et Jordanien montrent encore un niveau d’activité suffisant15. Selon les données de la World Federation of Exchange à fin juin 2005, le Lima SE liste 222 sociétés dont 32 étrangères et le New Zealand Exchange liste 197 sociétés dont 38 étrangères. Ces deux références sont à nouveau parmi les plus petits marchés de leur zone (à l’exception, pour le continent américain, de Bermuda SE, Buenos Aires SE et Colombia SE). Or, cette fois, seul le marché égyptien propose un nombre supérieur de sociétés cotées, bien que le marché jordanien ne soit pas très éloigné. Ainsi, on peut s’attendre à ce que l’Espagne, la Grèce et éventuellement l’Egypte, voire la Jordanie, contribuent à leur tour à l’offre d’ETF dans la Zone Euro-Méditerranée du fait de leurs caractéristiques actuelles et comparativement aux expériences observées dans d’autres zones du monde. Les autres pays ne devraient pas pour autant ignorer le potentiel des ETF en attendant de faire évoluer leur nombre de sociétés listées, leur activité d’échange ou leur capitalisation boursière. 2.3. La contribution des trackers au développement des marchés émergents et les contraintes pour le gérant du fonds Dans le processus de globalisation actuel des économies, les marchés financiers sont devenus incontournables puisqu’ils apparaissent comme l’élément moteur de l’industrialisation et de la croissance économique. On peut affirmer que les mesures qui favorisent l’épargne et donc l’investissement sur les marchés ont un rôle majeur dans l’accroissement de l’expansion16. Ainsi, le taux de croissance économique dépend de la capacité des pays à mobiliser non seulement l’épargne locale mais aussi l’épargne extérieure pour accroître le stock de capital. Les critères essentiels qui font obstacle à la mobilisation de l’épargne et donc à la croissance des marchés émergents sont la volatilité, la réglementation liée au mouvement des capitaux, l’organisation relative au mode de règlement / livraison des titres, la carence en information et la liquidité17. 15. 16. 17. 18. Il est à noter que les données concernant ces trois marchés sont annuelles alors que celles concernant New Zealand Exchange et lima SE sont semestrielles. Voir, entre autres, Venet (1994), Arestis & Demetriades (1977) et Singh (1997). Critères mentionnés par l’IFC (International Finance Corporation). Global Emerging Markets Conference and Exhibition, organisée par International Federation Stock Exchange. April 1997. Nous éviterons la polémique qui consiste à rendre responsables les investisseurs internationaux 150 Un des objectifs, comme nous l’avons déjà souligné, est de rendre attractifs ces marchés émergents auprès des investisseurs internationaux afin de drainer les capitaux qui leur font tant défaut18. Le passage obligatoire est donc naturellement l’augmentation de la liquidité. S’il est clair que les autorités locales sont les seules à pouvoir agir sur les conditions macro économiques et la structure des marchés favorisant la participation des intervenants19, les autorités des marchés développés peuvent également apporter leur contribution en proposant à leurs investisseurs des trackers. En effet, les trackers, de par l’intervention des participants du fonds sur les titres composant les indices boursiers peuvent de fait améliorer la liquidité. Il est clair néanmoins, au regard du fonctionnement du marché primaire, que l’offre et la demande de trackers peuvent éventuellement impacter la valeur des indices boursiers émergents selon les volumes échangés et donc augmenter leur volatilité. La globalisation des marchés qui s’est accéléré ces dernières années a conduit la plupart des économies émergentes à un fort niveau de croissance et à un niveau d’organisation des marchés sur un plan technologique comparable aux marchés développés. Alors qu’historiquement l’attrait des marchés émergents se situait au niveau d’une faible corrélation, certains auteurs ont montré une augmentation de cette variable dans le temps, réduisant alors l’impact favorable sur le risque d’un portefeuille diversifié20. Malgré l’intégration des économies et des marchés, il apparaît à la lumière de certains travaux que la diversification internationale peut tout de même s’envisager, mais une attention particulière doit être apportée par l’investisseur au choix du ou des marchés émergents21. La richesse des ETF en tant qu’instrument macro est déjà de pouvoir jouer un rôle dans le financement d’une économie aussi bien en étant créée et gérée localement qu’en étant créée en dehors des frontières et gérée en collaboration avec le marché local. Son autre richesse est de pouvoir également pallier les problèmes de taille, de liquidité et de volatilité des marchés émergents par une diversification cross-nationale mise en œuvre à l’extérieur des frontières des pays concernés. Création sur un marché domestique ou étranger d’un ETF dédié: Nous appelons ETF dédié un fonds dont l’indice ne relève que d’un seul marché. La création d’ETF par le marché élargit la gamme d’instruments d’épargne proposés aux investisseurs. Elle facilite l’accès au marché d’investisseurs néophytes et simplifie la gestion passive de portefeuilles tout en permettant, par leur négociabilité, la mise en œuvre de stratégies de gestion dynamique et spé- 19. 20. 21. de l’instabilité des marchés par le retrait des capitaux opéré lors des récentes crises financières en Thaïlande (97) Russie (98), Argentine (98), Brésil (99)… Comme mener une politique de déréglementation financière et d’assainissement budgétaire, accélérer le processus de privatisation qui seul alimente le marché, organiser les échanges pour faciliter l’accès…Concernant le dernier aspect, voir Givry P. et Jeannicot K. [1998] (a). La baisse significative de la corrélation entre les marchés émergents et développés a été notamment étudiée par Groslambert [1998], Amato et Tsatsaronis [2001], Ceretta P., Da Costa N., Da silva S & Nunes S. [2005]. Voir à ce sujet, Harvey C. [2000], Li K., Sarkar A. & Wang [2003] et Gupta R. [(2005]. 151 culative ou encore un apprentissage des marchés simplifié à la gestion d’informations macro-économiques ou sectorielles. Pour un marché émergent seul, c’est par conséquent la possibilité d’attirer les capitaux des non-résidents en leur proposant un véhicule d’investissement moins risqué et moins coûteux que les traditionnels investissements directs en titres individuels: comme nous l’évoquions dans la première partie, l’investisseur non résident peut ainsi se concentrer sur l’information macro, plus accessible, affectant la valeur du portefeuille; la moindre complexité de cet ensemble d’informations et sa plus grande transparence réduisent non seulement la fréquence des ajustements de portefeuille (donc les coûts de transactions) mais aussi l’exposition aux risques d’asymétrie d’information (donc les coûts de collecte et de traitement de l’information). L’initiative et la profitabilité de la recherche d’informations micro sont laissées aux investisseurs domestiques qui disposent très certainement d’un avantage culturel et informationnel dans l’analyse des firmes individuelles. Les ETF créés dans ce contexte doivent être considérés comme des présentations et des accès simplifiés aux opportunités d’investissement présentes dans le pays. Cet aspect «marketing» joue dans le sens d’un noyau gravitationnel pour attirer les capitaux non résidents (on ne voit facilement que ce qui est visible facilement). Cela suppose: - La possibilité de pouvoir créer des indices suffisamment larges pour respecter les contraintes de diversification et donc de disposer non seulement d’un nombre suffisant de sociétés cotées mais aussi d’une diversité de caractéristiques pour ces titres. - De disposer d’une capitalisation boursière permettant l’accès à un ou plusieurs fonds d’investissements collectifs. La question du contrôle et de la protection du capital des sociétés incluses dans l’indice servant de support à l’ETF dépend de la nationalité du fonds et non du lieu de négociation du fonds. Comme toute société émettrice de titres, un fonds domestique peut émettre des parts négociables sur un marché étranger22 et conserver ainsi localement les titres individuels. Lorsqu’un ETF dédié est émis par un marché étranger, la situation est celle d’une offre concurrentielle. Que cet ETF existe déjà au niveau domestique ou non ne devrait pas en modifier les conséquences. Comme cela a été brièvement discuté en première partie, la concurrence entre deux marchés autour d’un même instrument aboutit à une meilleure qualité des conditions d’échange du fait de la compétition pour conserver le flux d’ordres et de la segmentation qui peut s’opérer entre les marchés. En revanche, comparativement à l’expérience des ADR sur les titres mexicains, le mécanisme des ETF offre l’avantage de répercuter une partie de l’activité d’échange sur le marché domestique des titres individuels lorsque des déséquilibres le nécessitent. 22. Seule se pose la question de l’harmonisation et de la compatibilité des réglementations entre le pays domestique et celles des pays ou marchés où seraient émis les titres. 152 Le facteur clé est alors la liquidité du marché concurrent puisque c’est une partie de cette liquidité qui va être importée sur le marché domestique et bénéficier à l’ensemble des acteurs locaux. Il importe donc peu que la négociabilité de l’ETF soit prise en charge par un marché étranger pour des raisons de proximité avec les investisseurs. La création sur un marché développé étranger d’un ETF dédié à l’indice d’un pays émergent agit comme le déplacement des frontières du pays émergent jusqu’au domicile des investisseurs non résidents: en investissant dans un ETF émergent au sein de leur propre structure de marché, ils permettent aussi au gérant du fonds de rapatrier des capitaux sur le marché émergent et de participer ainsi au financement de l’économie. L’une ou l’autre des solutions pourraient très bien convenir aux marchés Euro-méditerranéens mis en exergue précédemment pour des contraintes de taille et d’activité comme l’Espagne, la Grèce, l’Egypte et éventuellement la Jordanie. Les autres pays Euro-méditerranéens auraient cependant avantage à bénéficier de la mise en place, sur un marché développé, d’un ou plusieurs ETF émergents cross-nationaux. Création d’un ETF émergent diversifié: La principale faiblesse des marchés émergents est leur étroitesse et en particulier la faiblesse du nombre de sociétés listées. Cette faiblesse représente en effet une restriction du choix dont les conséquences peuvent se traduire par un plus faible niveau d’information: c’est la difficulté de choisir entre des investissements comparables qui incite à rechercher plus d’informations et à affiner les indicateurs de décision; sans difficulté de choix, autant d’efforts ne sont pas nécessaires. Si les processus de libéralisation doivent se poursuivre pour amener plus de sociétés sur les marchés, les ETF diversifiés constituent une solution pour accompagner ce développement; par la confrontation d’un plus grand nombre d’opportunités d’investissement, ils représentent un mécanisme d’incitations. Nous appelons ainsi un fonds dont l’indice support relèverait d’un ensemble de titres individuels provenant de marchés différents. L’idée est que si le nombre de sociétés listées est trop faible, comme dans le cas du Liban, Malte, du Maroc ou de Chypre par exemple et la diversité plutôt limitée, les caractéristiques d’un portefeuille global pourraient suffire à autoriser la création d’un ETF. Celui-ci pourrait être émis sur un marché développé comme Euronext et ouvrir ainsi l’accès de ces marchés aux capitaux étrangers avec les avantages déjà cités. Le gérant du fonds agirait alors comme un collecteur de ressources pour l’ensemble des marchés concernés et aurait la responsabilité de leur allocation. Afin d’éviter toute situation de monopole, il faudrait étudier les possibilités de multiplier les fonds (et leurs gérants) qui conserveraient ainsi une taille restreinte. Comme nous l’avons précédemment évoqué, les critères qui font obstacle à la croissance des marchés boursiers et qui freinent les investisseurs étrangers sont, outre la volatilité à laquelle sont associés le risque politique et monétaire, la réglementation liée au mouvement des capitaux, l’organisation relative au mode de règlement / livraison, la carence en information et l’organisation de la liquidité. Ces différentes contraintes sont naturellement à prendre en considération par l’émetteur de l’ETF dans le choix des pays cibles 153 dans la mesure où les participants du fonds sont investis sur des marchés émergents. Reprenons plus largement les différents critères: - la réglementation: l’investisseur non résident est nécessairement préoccupé par la fiscalité du pays émergent ainsi que par les règles relatives au contrôle des changes qui affectent sa capacité à rapatrier ses capitaux et ses revenus. De manière générale, les pays émergents se sont extrêmement développés; ils offrent aujourd’hui un environnement de marché très proche des normes internationales. - le système de règlement / livraison: le système de compensation est un des éléments indispensables à l’organisation d’un marché puisqu’il remplit une fonction de sécurité et d’efficacité des marchés. Ce système doit être pris en charge par des institutions qui garantissent l’exécution de bonne fin des transactions, à savoir la livraison et le paiement des titres qui doivent intervenir simultanément afin d’offrir la plus grande sécurité des acheteurs et des vendeurs. La plupart des marchés émergents sont dotés des nouvelles technologies financières. Certains ont développé des partenariats avec Euronext, comme l’Egypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie. Il existe par ailleurs des dépositaires internationaux (Morgan Stanley, Citibank, Bankers Trust…) mandatés par les investisseurs non résidents pour faire de la conservation délocalisée de titres. Plusieurs organismes fournissent également un service de conseil et d’assistance aux marchés émergents, comme l’IFC, l’IOSCO (International Organisation of Securities Commissions), l’U.S SEC (U.S Securities and Exchange Commission). - l’information: toute intervention sur un marché boursier nécessite une bonne connaissance non seulement des facteurs macro-économiques du pays mais, aussi des informations financières rigoureuses sur les perspectives de développement des entreprises. La publication de données financières doit se faire de façon autoritaire et réglementaire afin qu’elle soit la plus transparente et homogène possible. Rappelons encore une fois que les ETF offrent la possibilité de segmenter cette connaissance entre plusieurs acteurs. - la liquidité peut être améliorée par l’organisation des échanges. La liquidité plus précisément comprend trois dimensions: la largeur du marché qui fait référence au nombre de participants, la profondeur du marché définit le volume de titres proposés à chaque niveau de prix, et la résilience du marché représente sa capacité à absorber les chocs de liquidité afin de maintenir la largeur et la profondeur. Enfin, la littérature sur la microstructure des marchés a permis de révéler l’efficacité d’un marché centralisé et électronique dans l’amélioration de la liquidité23 et l’on retiendra de l’expérience de l’Amex que les marchés émergents choisis comme support d’ETF sont tous électroniques (Mexican Exchange, Sao paulo SE, JSE South Africa, Bursia Malaysia, Shanghai SE, Taiwan SE Corp). 23. Voir à ce sujet les travaux de Mendelson et Peake (1993), Glosten (1994), Givry et Jeannicot (1998) (b). 154 Conclusion Il apparaît que les trackers représentent une innovation financière majeure dont le processus d’apprentissage relativement récent, mené tant par certains marchés développés que par certains marchés émergents, a été fulgurant; mais de nombreuses disparités existent. Nous avons pu montrer les avantages que procurent ces supports d’investissements, à la fois pour les intervenants comme pour les marchés eux-mêmes. Ils participent à la complétude du marché en améliorant l’efficience et la liquidité. La zone Euro-méditérrannée montre un fort dynamisme dans l’offre de trackers avec Euronext, l’Italie, la Turquie et Israël. Si l’on attend encore l’offre des marchés Espagnol et grec, l’Egypte et la Jordanie pourraient également se porter candidates. Pour les autres marchés, les problèmes de listing, d’activité ou de capitalisation pourraient être palliés par l’expérimentation d’ETF diversifiés qui favoriserait l’importation de la liquidité d’un marché développé, comme Euronext par exemple. 155 Bibliographie - ARESTIS P. & Demetriades P. «Financial development and economic growth», The Economic Journal, May 1977. - Banque de France, Revue de la Stabilité Financière, n°4, juin 2004, pp 4246. - BERNHARDT D., E. Hughson, «Splitting orders», Review of financial studies, 10, 1997, pp 69-101. - BIAIS B., D. Davydoff, «Internalization, investor protection and market quality», Working paper IDEI, 2002. - BIAIS B., T. Foucault et P. Hillion, «Microstructure des marchés financiers: institutions, modèles et tests empiriques», PUF, 1997. - BOEHMER B., E. Boehmer, «Trading your neighbour’s ETFs: competition or fragmentation?», Working Paper University of Georgia, june 2002. - CAMPBELL J.Y., M. Lettau, B.G. Malkiel and Y. 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