In June 2010, the Calvin College centers and institutes (http://www

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In June 2010, the Calvin College centers and institutes (http://www
In June 2010, the Calvin College centers and institutes (http://www.calvin.edu) along with other college
leaders, in partnership with the International Association for the Promotion of Christian Higher Education
(http://www.iapche.org), organized a conference. The purpose of this conference was both to strengthen the contribution of Reformed Christian faith for world Christianity and also to listen to some global Christian partners.
Richard Mouw, president and professor of Christian philosophy at Fuller Theological Seminary
(http://www.fuller.edu), delivered the opening address; this document presents his address in translation.
A book containing many of the lectures from this conference is now published: Shirley J. Roels, ed., Reformed Mission in an Age of World Christianity (Grand Rapids, MI: Calvin Press, 2011). This volume, written in
English, is available for purchase from the Calvin College campus store (http://store.calvin.edu) and from most
major bookstores. Also, the individual chapters in this book are available (in English only) as PDF files, available
for download free of charge from the Calvin Center for Christian Scholarship (http://www.calvin.edu/admin/
cccs/rcc).
We gratefully acknowledge the efforts of Shirlene Abma in preparing this translation.
Elu pour une mission mondiale :
L’appel à élargir le programme Réformé
Richard J. Mouw
Il y a une peu plus de dix ans, j‟ai trouvé un livre avec un titre fascinant, La Néo-Orthodoxie Mormone.
J‟étais curieux de la proposition qu‟il y avait quelque chose qui était « néo » qui se passait dans le mormonisme. Puis j‟ai lu ce que l‟auteur voulait dire.
Il s‟est passé que l‟auteur O. Kendall White, professeur de sociologie, est lui-même mormon, et qu‟il a
écrit le livre parce qu‟il était inquiet concernant ce qu‟il voyait comme des développements nouveaux dans la
pensée mormone. Plusieurs spécialistes mormons de nos jours, le professeur White a raisonné, glissent loin des
enseignements essentiels du fondateur du mormonisme, Joseph Smith. En plus, j‟étais vraiment étonné quand j‟ai
lu que le fond des soucis du professeur White était que les mormons commencent à trop ressembler aux calvinistes !
Il a condamné cette idée parce que Joseph Smith a établi une religion qui s‟oppose complètement aux enseignements fondamentaux de la Réformation Protestante. Les réformateurs du 16ième siècle Ŕ et les calvinistes
étaient particulièrement directs ici Ŕ ont enseigné trois thèmes, selon professeur White : que Dieu est un être souverain qui est complètement « autre » que la création ; que les êtres humains sont des pécheurs dépravés qui ont
désespérément besoin d‟être sauvés par Dieu ; et que le salut est uniquement par la grâce. Ces trois thèmes, le
professeur White a insisté, s‟opposent directement à l‟insistance de Joseph Smith que Dieu est soumis à des limites ; que les êtres humains peuvent s‟améliorer ; et que nous pouvons mériter le salut par les bonnes œuvres.1
Même si le professeur White avait voulu décrire ce qu‟il voyait comme les défauts de la perspective réformée, j‟ai aimé lire ce qu‟il disait. Il avait bien raison de mettre en contraste les accents réformés avec une
image d‟un Dieu limité qui nous encourage à nous engager à nous améliorer pour mériter notre salut par les
bonnes œuvres. Cette image devrait sonner sérieusement faux pour n‟importe que chrétien réformé tenant compte
du message merveilleux qu‟un Dieu souverain a envoyé un Sauveur pour faire pour nous ce que nous ne pouvons
pas faire pour nous-mêmes.
Mais je dois promptement ajouter que les thèmes calvinistes que le professeur White choisit ne comprennent pas l‟histoire réformée complète. Ces thèmes sont la manière dont les chrétiens réformés répondent à la question fondamentale : comment est-ce qu‟un individu se justifie devant Dieu ? Néanmoins, s‟arrêter simplement à
notre réponse à cette question est à rester avec une perspective théologique vraiment étroite. Notre tradition a
toujours insisté que la grâce que nous recevons de Dieu doit nous inciter à une obéissance engagée, et à une vie
chrétienne avec une perspective ouverte.
Nous, la famille réformée, avons toujours aimé la doctrine de l‟élection divine. Mais nous avons aussi su
qu‟il ne suffit pas d‟insister que l‟élection est un évènement. Imaginez, par exemple, qu‟un homme ou une femme
politique a été élu au gouvernement fédéral et n‟a depuis concentré que sur son élection. Imaginez que ce chef a
1
O. Kendall White Jr., Mormon Neo-Orthodoxy: A Crisis Theology (Salt Lake City: Signature Books, 1987), xiŔxviii.
fait des enquêtes répétées sur son élection. Imaginez qu‟il a toujours parlé au peuple du privilège de son élection.
« C‟est incroyable, n‟est-ce pas, » il dirait, « que c‟est moi qui a été élu ? » Finalement les électeurs demanderaient de bon droit, « Pour quel travail est-ce que nous vous avons élu ? Qu‟est-ce que vous allez faire maintenant
que vous occupez cette charge ? » C‟est le même cas pour nous, les élus de Dieu. Nous devons sérieusement considérer ce que notre élection nous fait faire dans le monde.
Ceci a certainement été un point soutenu par l‟Alliance Réformée Mondiale et le Conseil Œcuménique
Réformé, les deux configurations des églises qui se réunissent maintenant pour créer cette nouvelle Communion
mondiale d‟Eglises réformées. Les organisateurs de cette assemblée s‟en rendent bien compte de cette pensée
réformée et bien ancrée. Ils nous demandent de considérer ensemble comment nous pouvons faire appel à notre
passé réformé Ŕ aussi bien que les ressources des autres traditions spirituelles et théologiques Ŕ pour adresser les
questions complexes de notre monde contemporain. Puisque nous avons longtemps professé : « un Dieu, une foi,
un baptême » comment est-ce que nous devons nous engager ensemble à poursuivre l‟obéissance à la volonté de
Dieu dans un contexte culturel de plus en plus difficile ? Aussi, en face de la croissance des agences, des ministères et des organisations qui travaillent en dehors de l‟église elle-même, même ceux qui sont nommés « séculiers
» qui sont au service des buts du règne de Dieu dans ce monde, alors quel est le rôle de l‟église institutionnelle Ŕ
les assemblées locales aussi bien que les assemblées ecclésiastiques Ŕ pour promouvoir ces buts-ci ?
Bien sûr, cette situation est complexe à cause du fait que, depuis l‟époque de la Réforme il y a quatre
siècles, la foi réformée est devenue un phénomène universel Ŕ comprenant environ 700 corps ecclésiastiques réformés-presbytériens autour du monde. Nous entamons ce dialogue ayant conscience des voix qui représentent
plusieurs tribus et langues et nations de la terre. C‟est aussi un encouragement que des gens des autres traditions
spirituelles et théologiques ont choisi de nous joindre aussi. Nous devons sans faute faire appel à l‟abondance des
expériences, des mémoires, et des perspectives que cette assemblée a rendues possible. Il y a un portrait merveilleux dans Esaïe 60 v. 16 où le prophète nous dit que le Seigneur veut que le peuple réuni du Royaume de Dieu «
suce le lait des nations ». C‟est une image remarquablement nourrissante Ŕ la réalité que plusieurs cultures et
identités nationales puissent être une source vivifiante et une occasion pour la croissance et l‟encouragement mutuels dans le plan de Dieu pour le renouvellement de la création.
Quant à mes réflexions depuis des années concernant l‟engagement multiculturel auquel nous les disciples du Christ avons été appelés, j‟ai reçu beaucoup d‟assistance de la part de ceux qui ont exploré les bienfaits
qui peuvent provenir d‟un sens du besoin de connaître le contexte théologique. Un de mes auteurs favoris à ce
sujet est le théologien défunt japonais-américain, Kosuke Koyama, particulièrement quand il examine ces sujets
dans son livre La Théologie des Kérabaux [des buffles d’Asie]. Là Koyama pense à la période quand son église
japonaise l‟a envoyé comme missionnaire au nord de la Thaïlande.
Koyama avait habité en ville jusqu‟à ce temps-là, et tout d‟un coup il s‟est trouvé dans un endroit entouré
par des rizières. Quand il se déplaçait en scooter autour de la campagne, il a vu plusieurs gens qui passaient des
2
jours et des jours en se tenant debout dans l‟eau à côté des kérabaux ; et après ces jours une saison a commencé en
laquelle il fallait trouver une manière de rester au sec pendant l‟assaut des pluies de la mousson.
Koyama a décidé de lire la Bible comme s‟il se tenait debout à côté d‟un kérabau dans une rizière. En faisant cela, des passages et des images auxquels il n‟avait jamais pensé lui ont sauté aux yeux. Il a découvert qu‟il y
a beaucoup de passages et d‟idées dans la Bible concernant l‟eau. Dieu règne d‟un endroit au-dessus des pluies et
des déluges. Dieu reste au sec ! Ces thèmes sont devenus de plus en plus importants alors que Koyama présentait
l‟Evangile aux gens qui habitaient la région.2
A la fin de son livre, Koyama a généralisé sur la méthode qu‟il avait utilisée en essayant de comprendre
ce que la Bible dit à la culture du peuple du nord de la Thaïlande. Les missionnaires, il a écrit, doivent trouver une
place où ils sont « pris en sandwich » entre la Bible et la culture à laquelle Dieu les appelle. Ils doivent utiliser
une exégèse bilatérale en travaillant à deux exercices interprétatifs : ils doivent interpréter les questions et les
réponses de la culture où ils se trouvent, et puis ils doivent apporter ces questions et ces réponses à la Bible, pour
interpréter de nouveau ce que Dieu dit concernant telles matières.3
Le chant de Noël bien connu l‟exprime bien en décrivant la naissance du Sauveur à Bethléem : « les espoirs et les craintes de tous les siècles se trouvent en toi ce soir ». Les mots « tous les siècles » sont vraiment importants. Pendant qu‟il se trouvait « pris en sandwich entre » la Bible et les réalités quotidiennes de la Thaïlande
rurale, Kosuke Koyama faisait une exégèse des espoirs et des craintes des gens qui ont travaille à côté des kérabaux dans les rizières. Nous devons aussi faire cette exégèse pour nos propres situations sociales. En parlant ensemble de nos contextes culturels individuels nous pouvons obtenir un sens global pour comprendre comment la
foi réformée peut s‟adresser « aux espoirs et aux craintes de tous les siècles ».
Nous avons une excellente occasion pendant cette assemblée, donc, pour apporter les expériences de plusieurs contextes culturels à nos réflexions partagées ici concernant l‟importance d‟une perspective réformée dans
l‟arène globale contemporaine. Il y en a parmi nous qui y pensent dans notre vie quotidienne dans les grandes
villes, d‟autres qui y pensent en termes de la souffrance unique qui est endurée dans l‟environ de l‟administration
dans ou près des rizières, et même d‟autres Ŕ ces voix à qui nous devons écouter attentivement et avec soin Ŕ qui
se mettent en rapport direct avec les plus pauvres des pauvres et avec les plus opprimés de tous qui souffrent sur
la terre.
Entrer ensemble en discussion variée et « en sandwich » de cette sorte n‟est pas simplement « une bonne
chose ». Ce n‟est pas simplement un choix, si nous désirons penser à la vie réformée d‟aujourd‟hui. C‟est simplement vrai que les éléments qui ont réussi à conserver et à perpétuer l‟identité réformée au passé ne peuvent
plus y réussir. La loyauté confessionnelle, la solidarité d‟un groupe ethnique, la répétition des méthodes du passé
Ŕ tout cela ne peut nous aider aujourd‟hui. Nous devons construire une théologie bien posée, en travaillant dur à
appliquer les bonnes leçons du passe à notre contexte multiculturel contemporain.
2
3
Kosuke Koyama, Water Buffalo Theology (Maryknoll, NY: Orbis Books, 1974), viiŔviii, 32Ŕ40.
Koyama, Water Buffalo Theology, 91.
3
Et ceci est un défi vraiment saisissant. Herman Bavinck, théologien hollandais du 19ième siècle, a fit remarquer qu‟il y a un lien entre la manière dont Dieu s‟engage dans le monde et l‟idée de l‟image de Dieu qui souligne l‟importance de l‟exploration des contextes culturels divers. Il a observé que la création des êtres humains à
l‟image divine selon le récit de la Genèse « n‟est pas la fin mais le début du voyage de Dieu avec les gens ».
Quand le premier couple a reçu le mandat : « soyez féconds et multipliez », Bavinck a raisonné, Dieu voulait faire
comprendre que « ni l‟homme seul, ni l„homme et la femme ensemble, mais seulement toute l‟humanité ensemble
est l‟image complètement développée de Dieu ». C‟est pourquoi, il a dit, « l‟image de Dieu est bien trop magnifique de se trouver complètement dans un seul être humain, même s‟il est magnifiquement talentueux ». De plus,
ce sens collectif de l‟image divine, Bavinck a insisté, «n‟est pas une créature immobile mais il s‟élargit et
s‟expose » dans la diversité riche de l‟humanité à travers les siècles. Selon Bavinck, nous ne comprendrons pas
complètement l‟image véritable de Dieu jusqu'à la fin du temps, quand, presqu‟à la fin de l‟Apocalypse de Jean,
l‟apôtre Jean envisage que, dans la nouvelle Jérusalem, on apportera « la gloire et l‟honneur des nations » à la
Ville Sainte (L‟Apocalypse de Jean 21 v. 26).4
Pour nos discussions du moment, ceci propose que nous puissions penser au Créateur qui a distribué des
aspects différents de la divinité parmi des groupes culturels variés, pour que chaque groupe reçoive, pour ainsi
dire, une tache unique pour le développement d‟un aspect ou l‟autre de l‟image divine. Donc, seulement à
l‟assemblée finale du peuple de la terre, quand plusieurs tribus et langues et nations apparaitront dans leur honneur et gloire dans la nouvelle Jérusalem, c‟est seulement à ce moment-là qu‟on verra l‟image magnifique de Dieu
en son entier.
Cette image frappante devrait informer notre point central ici à cette assemblée pendant que nous nous
engageons dans des discussions plus détaillées. Nous avons toutes les raisons, par exemple, d‟aborder
avec confiance une perspective vaste pour nous-mêmes pendant que nous pensons aux défis complexes
d‟être des disciples dans notre monde. Depuis longtemps cette confiance a été le point fort pour la communauté réformée. Bien sûr, dès le commencement de notre tradition, nous nous sommes chargés de la
tâche de penser en gros à la mission chrétienne. Jean Calvin a eu un intérêt profond pour les affaires
sociales, politiques, et économiques, aussi bien que d‟autres sujets culturels. Il a transmis cet intérêt à
beaucoup de ses héritiers spirituels ; en effet, ils s‟occupaient souvent de tels soucis. C‟était certainement vrai en Ecosse. Comme un spécialiste a dit en décrivant une étude des premiers siècles de la pensée réformée en Ecosse, l‟accent théologique et immédiate de la Réformation était la proclamation
merveilleuse que «personne ne peut sauver sauf le Christ » Ŕ un thème qui était partagé par les autres
Protestants pendant cette époque Ŕ et, ici je l‟ajoute Ŕ aussi partagé par plusieurs Catholiques ! Mais
4
Herman Bavinck, Reformed Dogmatics, Vol. 2: God and Creation, ed. John Bolt et trad. John Vriend (Grand Rapids:
Baker Academic, 2004), 577Ŕ78.
4
assez tôt, le commentateur a remarqué, les premiers Presbytériens ont ajouté une autre proclamation au
credo réformé : « c‟est le Christ seul qui règne ».5
Malheureusement, les efforts de ces premiers Presbytériens pour encourager la cause du règne souverain
du Christ ont souvent pris la forme de batailles sanglantes pour le contrôle politique Ŕ ce qui s‟est aussi passé
ailleurs dans le monde réformé. Mais au cœur de ces campagnes regrettables il y avait une importante idée réformée : que le Dieu qui élit les individus par la grâce souveraine a aussi l‟intention d‟incorporer ces individus dans
une communauté d‟alliance qui montrera activement l‟autorité souveraine du Christ sur toute la création. Abraham Kuyper, le grand théologien et homme d‟Etat hollandais du 19ième siècle, a bien exprimé cette idée quand il
a fait son manifeste souvent cité à l‟occasion de l‟établissement de l‟Université Libre d‟Amsterdam ; « Il n‟y a pas
un seul centimètre dans tout le domaine de l‟existence humaine sur lequel le Christ souverain ne crie pas : « C‟est
à moi ! » »6
Cela va sans dire que nous, les gens réformés, ne sommes pas les seuls qui nous occupons de promouvoir le règne du Christ sur tout. Nous pouvons beaucoup apprendre de ces autres traditions aujourd‟hui.
Une des meilleures manifestations du 20ième siècle du besoin d‟une vision large and chrétienne de la
vie se trouve dans un document que les évêques catholiques rassemblés au deuxième Concile du Vatican
ont présenté à la dernière séance du Concile, en 1965. Le titre officiel est « La Constitution Pastorale de
l‟Eglise à l‟Epoque Moderne », mais on le connaît aussi sous le titre Gaudiam et Spes, les premiers mots
du document en latin. Voici les premières phrases du document :
Les joies et les espoirs, les douleurs et les angoisses des gens à cette époque, surtout ceux
qui sont pauvres ou affligés de n‟importe quelle manière, ce sont les joies et les espoirs,
les douleurs et les angoisses des disciples du Christ. Bien sûr, tout ce qui est véritablement humain réussit à faire naître un écho au cœur.7
« Tout ce qui est véritablement humain réussit à faire naître un écho au cœur [du chrétien] ». Les chrétiens réformés peuvent certainement affirmer cette déclaration merveilleuse, mais en plus, je suis convaincu que
Jean Calvin voudrait bien que nous fassions cette affirmation. Bien sûr il y a plusieurs personnes qui ne
s‟attendent pas que ce fond de la compassion vers le monde entier d‟être compatible avec une perspective réformée. L‟été passé, quand Nicholson Baker a fait un compte rendu intéressant du « Kindle » dans la revue New
Yorker, il a fait la critique de ce lecteur « e-livre » en remarquant que les mots ont l‟apparence terne à l‟écran du «
Kindle ». Il a trouvé qu‟il y avait des passages qui l‟ont fait rire quand il les a lus ailleurs, mais ces mêmes pas5
J. D. Douglas, Light in the North: The Story of the Scottish Covenanters (Grand Rapids: Eerdmans, 1964), 13.
Abraham Kuyper, “Sphere Sovereignty,” dans Abraham Kuyper: A Centennial Reader, ed. James D. Bratt, p. 461Ŕ90
(Grand Rapids: Eerdmans, 1998), 488.
7
Gaudiam et Spes, texte anglais disponable à http://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents
/vat-ii_cons_19651207_gaudium-et-spes_en.html.
6
5
sages mêmes n‟ont pas eu le même effet quand il les a lus au « Kindle ». Le problème, il a écrit, c‟est une question de fonte ; le « Kindle » utilise une fonte Ŕ ce sont ses mots précis Ŕ « sinistre et calviniste ».8
Voici un portrait de la foi réformée qui se présente souvent dans le commentaire culturel. Et nous devons
y prêter attention, car il y a eu un côté sinistre de la foi réformée telle que quelques gens l‟ont pratiquée.
L‟historien William Bouwsma, qui a écrit la biographie de Jean Calvin la plus positive, a raisonné que cette sévérité se présentait vraiment chez Calvin, mais que ce n‟était pas tout concernant le caractère de ce réformateur.
Bouwsma a ajouté qu‟il y avait des tensions dans la mentalité de Jean Calvin, et que ces tensions étaient si profondes qu‟il faut que nous pensions à « deux Calvins qui coexistaient avec une certaine inquiétude à l‟intérieur du
même personnage historique ». Selon Bouwsma, il y avait un Jean Calvin qui était « le Calvin philosophique ».
C‟était le Calvin qui a préféré « une orthodoxie figée » et qui « avait un besoin maladif d‟intelligibilité, d‟ordre,
de certitude » ; ce Calvin-ci se méfiait de l‟idée de la liberté, et il « avait beaucoup de mal à contrôler lui-même et
le monde ».
Mais Bouwsma a dit qu‟il y avait aussi un autre Jean Calvin. Ce Calvin-là faisait preuve d‟un esprit «
humaniste » ; il était « flexible au point de l‟opportunisme, et un révolutionnaire en dépit de lui-même ». C‟était
un Calvin qui « était porté à célébrer les paradoxes et les mystères au fond de l‟existence ».9
J‟avoue que je me trouve de plus en plus attiré par la perspective de la foi réformée que Bouwsma associe
avec l‟esprit « humaniste » de Jean Calvin, pendant que je fais mon pèlerinage de foi. Je suis attiré vers la perspective réformée qui prend grand plaisir à tout l‟ouvrage de Dieu, n‟importe où l‟on le trouve, et je l‟explore avec
désir et joie, en utilisant l‟expression que l‟écrivaine Susan Schreiner a choisi comme le titre de son livre au sujet
de la perspective de Calvin au sujet de la nature, qui est « le théâtre de la gloire de Dieu ».10 C‟est aussi la vision
que Lewis Smedes a découvert quand il a commencé à étudier à Calvin College il y a un demi-siècle. Smedes a
enseigné à Calvin College pendant plusieurs années avant de terminer sa carrière au séminaire Fuller. Il
était théologien d‟éthique et auteur des best-sellers qui a écrit le mémoire charmant Mon Dieu et moi, qui a été
publié peu après sa mort en décembre 2002. Dans ce livre, Smedes a décrit comment il s‟est déplacé à Calvin
College après quelques ans d‟études à l‟Institut de la Bible Moody à Chicago.
Smedes n‟avait pas été très heureux dans le climat fondamentaliste à l‟Institut Moody, et il est arrivé à
Calvin College en espérant de trouver une base plus solide pour sa foi. Il n‟a pas ete déçu. En fait, il raconte qu‟il
était étonné de découvrir des nouveaux aspects passionnants à sa foi pendant la première réunion du cours de
composition anglaise, un cours obligatoire pour tous les étudiants. Smedes écrit que le professeur Jacob Vandenbosch « m‟a introduit ce jour-là à un Dieu que je n‟avais jamais même connu ». C‟est un Dieu qui
8
Nicholson Baker, “A New Page,” New Yorker, August 3, 2009, http://www.newyorker.com/reporting/2009/08/03
/090803fa_fact_baker.
9
William Bouwsma, John Calvin: A Sixteenth Century Portrait (New York: Oxford University Press, 1988), 230Ŕ31.
10
Susan E. Schreiner, The Theater of His Glory: Nature and the Natural Order in the Thought of John Calvin (Grand
Rapids: Baker Books, 1995).
6
appréciait les phrases harmonieuses et haïssait les erreurs de grammaire. Si on le croit, où
peut-on s‟arrêter ? Si le Créateur de l‟univers admirait les mots bien choisis, on peut bien
considérer son admiration pour les pensées solides et bien construites, et s‟il aimait la
pensée solide, il devrait aimer un concerto de Bach, et s‟il aimait un concerto de Bach, on
peut bien considérer qu‟il prisait hautement tous les efforts humains qui s‟occupent
d‟inaugurer le royaume de la justice et la paix et la bonté aux victimes dans notre monde.
Enfin, j‟ai rencontré le Créateur de l‟univers qui a aimé le monde qu‟il a créé et qui s‟est
consacré à la rédemption du monde. J‟ai trouvé la joie du Seigneur dans la salle de classe
du cours de la composition anglaise 101, et non pas au culte.11
Bien sûr, quand on pense aux projets de Dieu parmi toutes les cultures du monde, on peut bien s‟ouvrir à
plus de variété que Smedes a suggérée. Par exemple, Dieu peut bien trouver désagréable les erreurs de grammaire
quand on les utilise en écrivant une sorte de littérature, mais Dieu peut bien les apprécier quand on les utilise en
créant une chanson « hip-hop » qui enrage contre l‟injustice. En réalité, Smedes souligne quelque chose de très
important Ŕ semblable à l‟idée des évêques catholiques quand ils ont affirmé que tous les efforts « véritablement
humains » doivent « faire naître un écho au cœur [du chrétien] ».
Si on se met à soutenir la capacité d‟entendre ces échos, on doit être prêt à examiner ensemble avec enthousiasme les profondeurs et les sommets de la création, car « à l‟Eternel la terre et ce qu‟elle renferme, le
monde et ceux qui l‟habitent ! » (Psaume 24 v. 1). Alors qu‟on essaie de comprendre les aspects variés de ce
monde, on doit se rendre compte de l‟abondance de la réalité créée que Dieu nous invite à aimer Ŕ et en aimant,
que Dieu nous invite à essayer de comprendre les mystères de cette réalité, pour qu‟on puisse établir des rapports
et cultiver un bon sens de la crainte révérencielle et de l‟émerveillement des complexités de la création, en dépit
de son état violé.
Je dois encore une fois me diriger vers une source catholique. Un prêtre m‟a raconté une histoire du Pape
Jean XIII quand il était encore cardinal italien. Un soir il dînait avec un vicaire qui lui faisait un rapport au sujet
d‟un autre prêtre, lui un vrai renégat qui s‟engageait dans des activités qui gênaient l‟hiérarchie ecclésiastique. Le
pape écoutait avec calme en buvant à petits coups d‟une coupe de luxe. Enfin l‟adjoint a crié d‟un ton fâché «
Comment pouvez-vous rester si calme ? Est-ce que vous ne vous rendez pas compte de ce que ce prêtre fait ? » Le
cardinal a répondu doucement « Père, à qui appartient cette coupe ? » « C‟est à vous, Monseigneur » le vicaire a
répondu. Le cardinal a jeté la coupe au plancher où elle a volé en éclats. « Et maintenant, à qui appartient la coupe
? » il a demandé. « C‟est toujours à vous » le vicaire a répondu. « Et ce prêtre aussi, il est toujours mon frère en
Christ » le cardinal a dit « même s‟il est brisé et rompu ».
La création peut être brisée et rompue à cause de notre péché, mais Dieu l‟aime toujours. C‟est pourquoi
Jésus est entré dans la création en mission rédemptrice avec le but de réparer ce que Dieu aime. Au quatrième
11
Lewis B. Smedes, My God and I: A Spiritual Memoir (Grand Rapids: Eerdmans, 2003), 56Ŕ57.
7
chapitre de l‟épitre de Paul aux Ephésiens, l‟apôtre nous fait bien rendre compte que nous ne pouvons pas bien
comprendre l‟Ascension du Christ au ciel jusqu'à ce que nous ayons bien saisi qu‟il « est descendu dans les régions inférieures de la terre…afin de remplir toutes choses » (Ephésiens 4 v. 9). L‟amour de Jésus pénètre à une
telle profondeur qu‟il souffre encore dans et sur l‟état violé du cosmos.
Cette image de l‟état violé se rapporte particulièrement à notre contexte culturel contemporain, étant donné le phénomène qui est associé avec l‟idée que nous vivons pendant une époque « postmoderne », c'est-à-dire, le
phénomène de fragmentation. Pendant les années 1930 Edna St. Vincent Millay, le poète américain bien connu, a
fait des vers dans un sonnet qui semble être une prophétie qui semble aboutir aujourd‟hui. Elle a décrit une «
époque surdouée » qui a assez de « pouvoir pour réveiller la lune avec ses pas ». Elle a dit que cette époque arriverait à « l‟heure obscure », une heure quand les faits tomberaient du ciel comme « une pluie météorique ». Le
poète a remarqué que ces faits sans rapport seront « incontestés et non joints ». Toute cette connaissance, si on
l‟intègre, filerait assez de tissu pour nous guérir tous. Mais elle regrette « qu‟il n‟y ait aucun métier pour le tisser
».12
Ça sonne sûrement moderne. Nous entendons souvent des plaintes ces jours-ci que les disciplines scolaires sont devenus si spécialisées qu‟il est difficile d‟atteindre des perspectives intégrées vers la connaissance que
nous avons. J‟ai vu ceci à l‟université que j‟ai visité où les professeurs de la faculté de la psychologie m‟ont dit
qu‟ils ne pouvaient pas se comprendre l‟un l‟autre. Chacun de leurs domaines de la recherche est si spécialisé
qu‟ils ne savent pas établir des rapports entre les domaines de recherche de leurs collègues. Citons la phrase du
poète : ils ne peuvent trouver aucun métier pour le tissage. Nous connaissons tous la manière dont les résultats de
nos recherches « Google » apparaissent à l‟écran de notre ordinateur : « incontestés et non joints ».
Qu‟est-ce qu‟on peut dire au sujet de ces modèles fragmentaires de la vie contemporaine ? On peut dire
que c‟est évident selon l‟autorité de la Bible que la prophétie d‟Edna St. Vincent Millay est fausse, si on
l‟interprète dans son sens littéral : il y a un métier pour tisser ensemble tous les faits dans un tissu uni. En effet il y
a quelqu‟un qui est le Seigneur de ce métier, comme l‟apôtre l‟explique à l‟Epitre aux Colossiens au premier chapitre : « Car en lui [Jésus-Christ] ont été créées toutes les choses qui sont dans les cieux et sur la terre, les visibles
et les invisibles, trônes, dignités, dominations, autorités. Tout a été crée par lui et pour lui. Il est avant toutes
choses et toutes choses subsistent en lui ». Etant donné que la vie contemporaine est de plus en plus fragmentaire,
c‟est un défi urgent et attirant à explorer la signification du côté « subsistant » du personnage et du travail de Jésus-Christ.
A ce sujet, il faut que je souligne ma conviction grandissante que nous avons besoin d‟un nouvel accent
parmi les réformés sur l‟importance du culte de l‟église comme l‟arène principale où le Christ nous fait voir la
réalité de son ministère « subsistant ». C‟est vraiment dommage que plusieurs parmi nous, les chrétiens réformés,
aient réussi à réduire au minimum l‟importance d‟être nourri par la prédication du Verbe de Dieu et la vie sacramentelle du corps du Christ. Parfois nos communautés scolaires ont gardé leurs distances du culte de l‟église. En
12
“Sonnet,” 1939, http://www.amblesideonline.org/Millay.shtml.
8
d‟autres secteurs de la communauté réformée, nous avons eu tendance à comprendre la « souveraineté de sphères
» d‟une manière qui a mené à pousser au loin l‟église organisée. Certainement, nous avons si souvent souligné
notre engagement actif que nous avons parfois séparé la vie du disciple du rôle critique que l‟église remplit en
nous façonnant à être disciples quand elle nous appelle à rencontrer ensemble le Dieu vivant.
Le thème de cette assemblée est merveilleux : « la mission réformée pendant l‟époque du christianisme
mondial ». Il souligne le fait que Dieu nous envoie au monde pour promouvoir la cause du règne de Jésus-Christ.
Dieu nous appelle à travailler dans la création qu‟il aime toujours, même si elle est violée. Il est important que
nous nous fassions bien comprendre que nous avons un appel seulement s‟il y a quelqu‟un qui nous fait appel, et
celui qui nous fait appel mérite nos louanges.
Dans l‟œuvre classique intitulée Une Théologie de la Libération, l‟auteur Gustavo Gutierrez insiste qu‟il
faut que le programme politique qui s‟associe aux mouvements de libération fasse fortement appel à « une spiritualité de la libération ». Il est évident que Gutierrez est conscient des dangers de rendre absolu nos propres causes
politiques préférées. Alors, il y a aussi un danger que nous choisissons seulement les thèmes chrétiens qui servent
à promouvoir nos propres buts préétablis. Pour corriger cette tendance, Gutierrez raisonne qu‟il faut que la vie
chrétienne soit « vraiment remplie d‟un sens de la gratitude et de la reconnaissance. La communion avec notre
Seigneur et avec tous les êtres humains est surtout un don gratuit ». Quand on vénère Dieu, nous avons le « loisir
» de vénérer ; nous « perdons du temps pour nous rendre compte que notre Seigneur est au-delà des catégories de
ce qui est utile ou inutile ». Quand nous venons à cœur ouvert devant Dieu, Gutierrez nous dit que nous attendons
avec impatience l‟avenir quand Dieu nous invite à prendre part à la joie de l‟eschatologie.13
L‟apôtre Jean a décrit d‟une manière particulièrement inspirante et spectaculaire cette joie eschatologie
quand il a écrit qu‟il a regardé les cieux et il a vu « une grande foule, que personne ne pouvait compter, de toute
nation, de toute tribu, de tout peuple, et de toute langue. Ils tenaient devant le trône et devant l‟agneau ; revêtus de
robes blanches » et ils proclamaient la chanson joyeuse et victorieuse : « Le salut est à notre Dieu qui est assis sur
le trône, et à l‟agneau » (l‟Apocalypse 7 v. 9Ŕ10).
Que notre temps ensemble pendant cette assemblée nous donne un avant-goût de la plus grande assemblée de la fin du temps.
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Gustavo Gutierrez, A Theology of Liberation: History, Politics and Salvation (Maryknoll: Orbis Books, 1973), 206Ŕ7.
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