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La suite ne dépend pas de nous. On subit la situation. Mais en prenant l’initiative d’une réconciliation par exemple, on devient par là même libre, on reprend en main la situation, on en regagne la maitrise. On est libéré. Le quatrième fils de la hagada est celui qui ne sait pas demander, questionner. Le Rabbi de Riminov (ibidem p. 63) explique ainsi ce passage : l’enfant qui ne sait pas demander est celui qui ne sait pas prier, supplier, demander à D.ieu [il ne sait pas parce qu’il n’a pas appris ou parce qu’il n’en a pas la volonté ou qu’il ne croit pas en la prière ou qu’il ne sait pas quoi dire ou demander]. Face à lui et pour lui, le père se tourne vers D.ieu : « Maître du monde, ate peta’h lo, ouvre lui Toi-même les portes de la miséricorde comme Tu le fis au moment de la sortie d’Egypte où Tu passas au-dessus de l’éveil d’en bas ! ». Ici, la hagada devient tefila, prière. Mitsraïm est une existence où l’on ne s’adresse plus à D.ieu. La sortie de Mitsraïm, c’est tous les possibles et les impossibles qui s’annoncent à l’horizon car on y a invité D.ieu. On peut encore ajouter : il y a des gens qui font du mal, qui blessent, qui détruisent et qui ne savent pas demander pardon (eyno yodéa lichol). Ils sont prisonniers de leur suffisance. Un enfant a fait une bêtise, il a été insolent, il ne veut pas le reconnaître ; alors il est encore plus insolent. Il ne sait plus comment sortir de cette situation. Ate peta’h lo, si tu aimes ton enfant, ouvre-lui une porte. Parfois, il faut lui ouvrir une porte à laquelle il frappe sans même en avoir conscience. On le libère ainsi. Pour ouvrir cette porte, c’est « ate », c’est toi la maman pleine de douceur, qui doit intervenir et dessiner une issue de secours pour son enfant même si toi, le père, fait mine d’attendre que l’enfant s’amende de lui-même. A qui l’initiative ? C’est à cette question que nous réfléchissons, non seulement au niveau des relations familiales et sociales mais aussi au niveau de notre lien avec D.ieu. C’est pourquoi après le birkat hamazone, on ouvre la porte pour inviter D.ieu, si l’on peut s’exprimer ainsi. On ouvre la porte pour faire techouva. Et si on n’y est pas parvenu, alors il faut demander de l’aide, savoir demander de l’aide ( yodé’a lichol). C’est pourquoi, un peu plus loin dans le hallel, on dit : « Ouvrez moi les portes de la justice, j’y viendrai ! ». La Page דף הברית de l'alliance israélite Sommaire PESSAH… Comme la Matsa L’Initiative ou la Voie de la Libération Rabbin Jacky Milewski בס''ד universelle OMME LA MATSA ertaines versions de la hagada débutent par une expression surprenante : « Keha la’hma ania, Comme ce pain de misère, nos ancêtres ont mangé », comme ce pain posé sur la table. Le Rav Amiel (Derachot el ami II, p. 115 à 121) ajoute un autre élément : qui est comme ce pain de misère ? C’est nous qui sommes réunis autour de la table du séder, c’est le peuple juif qui au soir du séder célèbre sa naissance. Et le Rav Amiel propose le développement suivant : le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haïm 460, 4, Roma) énonce que l’on ne doit pas faire monter les matsot, on doit les confectionner telles des galettes et non comme du pain épais car les galettes prennent du temps à fermenter. Il y a des périodes dans l’histoire où les nations ont piétiné, foulé, écrasé les juifs ; elles n’ont pas laissé Israël s’élever. C’est là la crainte de pharaon : de voir Israël « monter de la terre». Le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haïm 459, 2) énonce qu’on ne doit pas laisser la pâte sans s’en occuper ne serait-ce qu’un instant car tant qu’on pétrit la pâte, elle ne fermente pas. Il y a des époques de l’histoire récente où il ne se passait pas un jour sans que les juifs soient confrontés à de nouvelles difficultés, à de nouvelles interdictions, règlementations. Chaque jour de la Choah apportait son lot de malheurs. Chaque jour voit les médias professer de nouvelles-anciennes accusations portées contre le peuple d’Israël Directeur Rédacteur Publication E.Benarroch Jacky Milewski A I U Nice Copyright © 2015 - AIU NICE Nous vous remercions de ne pas transporter le Daf le Chabbat PESSAH DU VENDREDI 3 AVRIL AU SAMEDI 11 AVRIL 2015 בס''ד Le Choul’han Aroukh dit encore que l’on ne pétrit pas la matsa sous le soleil ou face au soleil (Ora’h ‘Haïm 459, 1) car la chaleur réchauffe la pâte et favorise la fermentation. Les nations avaient ainsi proclamé qu’il n’y a pas de place sur cette terre, sous le soleil, pour les juifs. Il a été dénié aux juifs d’avoir leur place au soleil ; on les relégua dans des froides contrées, dans des zones sombres et obscures. Lycée de l'alliance israélite universelle www.aiu-nice.org 22, rue Michelet 06100 NICE Tél. 04.92.07.88.10 Fax 04.92.07.88.11 Email : [email protected] Le Choul’han Aroukh enseigne encore que l’eau utilisée pour pétrir la matsa doit être de l’eau qui a passé la nuit (Ora’h ‘Haïm 455, 1). En effet, au mois de nissan, les sources sont chaudes. Après le puisage, on attend que la nuit passe pour rafraichir l’eau. L’eau renvoie à la subsistance. On laissait aux juifs l’eau d’hier, les restes, ce qui restait. « Lé’hem ‘oni » car dit la Guemara, de ce pain, « onine alav », on parle beaucoup. Des juifs, on parle trop. Ils sont toujours les sujets de conversation, les sujets de polémique, au centre de l’actualité médiatique. Même quand ils sont absents, ils sont toujours coupables ! Mais le Rav Amiel poursuit en disant que la comparaison est aussi à comprendre dans un sens positif. Faisons l’exercice : « Keha la’hma ania », le pain de pauvre. Le Talmud a déjà averti : « Veillez aux enfants des pauvres car c’est d’eux que la Torah surgira ». Israël est fin comme la matsa, telle une galette, humble, simple, modeste ; qualités indispensables pour accéder à la Torah. Cette Torah dont on s’occupe constamment, est comme la matsa que l’on ne cesse de pétrir, Torah dont on s’occupe dans toutes les circonstances et situations car elle éclaire tous les domaines de la vie. On ne pétrit pas la matsa sous le soleil car le peuple juif n’évolue pas sous le soleil, selon les cycles naturels et les lois physiques. Israël évolue au-delà du soleil, maitrisant sa nature, attaché aux cieux qui surpasse le ciel. « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil » dit Kohélet mais « au-dessus », dit le Midrach « il y a du nouveau ». Israël ne se nourrit pas de l’eau puisée aujourd’hui, de la Torah inventée et réinventée par la modernité et ses admirateurs de tous types qui confondent souvent la civilisation de la technique et les progrès en humanité. Israël se nourrit de la Torah d’hier, de la Torah qui a traversé les âges, de cette Torah immuable, quelques soient les révolutions de mentalité. Enfin, « lé’hem chéonine alav », on parle beaucoup d’Israël car comme le rapporte le Midrach sur le premier verset de la Torah : « C’est pour Israël désigné par le terme de « réchite » que D.ieu a créé le ciel et la terre ». C’est pour le peuple juif que la Torah a tant et si bien parlé. C’est pour le peuple juif et sa continuité que les parents racontent à leurs enfants le récit de la sortie d’Egypte, la vocation exaltante offerte à Israël, la splendeur de la Torah et la beauté de nos mitsvot. Mais il ne suffit pas de dire ou de raconter. « J’ai fait peser sur son cœur et sur le cœur de ses serviteurs afin que Je place Mes signes en son sein ; et pour que tu racontes aux oreilles de ton fils et au fils de ton fils ce que J’ai accompli en Egypte… et vous saurez que Je suis Hachem ». Le Rav Stern (Sifté Yehouda p. 132) explique ce verset ainsi : si tu aspires à ce que tes paroles concernant le service de D.ieu imprègnent ton fils et ton petit-fils (« pour que tu racontes aux oreilles de ton fils et au fils de ton fils »), alors vous-même devez montrer que vous connaissez D.ieu («et vous saurez que Je suis Hachem »). Si le parent lui-même ne montre pas son implication religieuse, l’enfant comprend que le sujet en question importe peu. Si tu désires que tes enfants restent juifs, tu dois l’être en premier lieu. Si tu n’observes pas le chabbat ou les lois de la kacheroute, ton fils risque d’aller bien plus loin dans le rejet du judaïsme. Donc, si tu montres combien tu es attaché aux mitsvot, si toi-même reconnais le D.ieu d’Israël, alors tu pourras raconter à ton fils ainsi qu’à ton petit fils qui restera juif. Rabbin Jacky Milewski « t D.ieu sautera au-dessus de la porte ; ‘al hapéta’h » (Ex 23, 23), de la porte des maisons des enfants d’Israël dont les linteaux et poteaux seront maculés du sang de la circoncision et du sacrifice de Pessa’h. Après le séder, on a l’usage de lire Chir haChirim. Un verset (5, 2) y rapporte les propos de D.ieu adressés à l’Assemblée d’Israël : « La voix de Celui qui m’aime frappe, ouvre-moi, pit’hi-li ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite ». Le Midrach Chir haChirim Rabba (sur le verset) commente : « HKBH a dit à Israël : mon fils, ouvre-moi une porte de techouva à la mesure du chat d’une aiguille et Moi Je vous ouvrirai des portes par lesquelles des chariots et des chars peuvent entrer ! ». La techouva est mise en lien avec la porte ; elle est ouverture. La techouva à la mesure du chat d’une aiguille suggère qu’une transformation minime peut avoir des implications considérables (le chat de l’aiguille se transforme en route). Cette techouva permet la réconciliation (l’aiguille rapièce les déchirures). Rabbi Tsvi haKohen de Riminov explique (Beérat haMaïm p. 38): au moment de la sortie d’Egypte, D.ieu a sauté au-dessus de ce péta’h, de cette ouverture demandé, Il n’a pas attendu que se produise hit’oréroute chel mata, l’éveil d’en bas, l’initiative d’en bas. « Et D.ieu sautera au-dessus de la porte ; ‘al hapéta’h ». Comment peut-on dire que les enfants d’Israël n’ont pas suscité l’éveil d’en haut ? Ne se sont-ils pas circoncis ? N’ont-ils pas offert l’agneau, divinité égyptienne, un sacrifice mettant leur vie en danger ? La question ne se pose pas que sur cet enseignement du Rabbi de Riminov ; elle aussi valable pour le Midrach selon lequel au moment du passage de la mer des Joncs, les anges ont accusé les enfants d’Israël d’être des idolâtres au même titre que les égyptiens. Comment comprendre cette accusation alors qu’ils ont offert à D.ieu la divinité égyptienne ? Rav Yits’hak Tsvi Ever (Yisma’h Yits’hak, p. 223-4) rapporte un bel enseignement qui répond à la question suivante : est-il vraiment possible que nous-mêmes n’ayons jamais pu ouvrir une porte à la mesure du chat d’une aiguille ? Avons-nous vraiment été incapables du moindre changement ? C’est qu’il existe deux catégories d’orifice : le trou que l’on perce dans une plaque de fer et qui subsistera et le trou que l’on creuse dans du sable et qui sera à nouveau comblé dans quelques instants. Pour durer, le trou doit perforer la matière de part et d’autre. Le chat d’une aiguille n’est pas un simple trou ; c’est un passage. Autrement dit, il y a deux types de techouva : une première qui s’épuise dans l’accomplissement d’une mitsva. La mitsva a été accomplie mais elle n’a pas transformé l’homme qui est redevenu ce qu’il était. L’autre techouva est celle qui perdure ; la mitsva réalisée a bouleversé l’homme qui en est sorti transfiguré. Il existe une techouva factuelle et il existe une techouva existentielle. A priori, après la circoncision et le sacrifice de Pessa’h, les enfants d’Israël sont restés ce qu’ils étaient. Le trou s’est vite refermé. « Bené ‘horine » veut dire libres. ‘Horine vient de ‘hor, un trou. Il ressort de II Rois 12, 10, d’Ezéchiel 8, 7, de Chir haChirim 5, 4, que ‘hor est un trou qui transperce une matière de part et d’autre. Le Bèn ‘horine est l’homme libéré car sa techouva a métamorphosé sa personnalité. Dans les lois relatives à la recherche du ‘ hamets, le texte précise qu’il faut le traquer « be’horine oubissedakim », dans les trous et les fissures des maisons (CH, O’H, 431, 1) car c’est le mauvais penchant qui se dresse sur la route de cette métamorphose de la personnalité. Il y a dans cette interprétation du Rabbi de Riminov un message éthique considérable : souvent, très souvent, les gens interagissent. « J’accepte de faire un pas si toi aussi en fais de même ; si tu y vas, je te suis ; fais un geste, une concession, j’en ferai également ». On attend qu’autrui agisse en bien pour en faire de même. La leçon de cette interprétation bouscule notre orgueil : il nous demande de ne pas attendre l’éveil d’en face, il nous demande de prendre l’initiative du bien, d’être le moteur de l’interaction, de suivre D.ieu dans son saut au-dessus de la porte. Cette posture revient à sortir d’Egypte, cette posture est libératrice. En effet, quand on attend que l’autre prenne l’initiative, on est comme prisonnier, enchaîné.