Numéro 6 - Blida 2 university
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Numéro 6 - Blida 2 university
Université LOUNICI Ali - Blida 2 Faculté des Lettres et des Langues Département de français DIDACSTYLE 6 L’ÉVALUATION : QUELS ENJEUX ET QUELLES PERSPECTIVES ? ISSN : 1112-2080 ISBN : 2013-8009 Décembre 2014 Éditions de l’Université Lounici Ali – Blida 2 NUMÉRO COORDONNÉ PAR : NASSIMA MOUSSAOUI Prochains numéros de Didacstyle : — Didacstyle n°7 :« La littérature africaine » — Didacstyle n°8 : « L’interculturalité en classe de langues » Comité scientifique Amina BEKKAT (Professeur, Université de Blida 2) ; Malika KEBBAS (Professeur, Université de Blida 2) ; Dalila BRAKNI (MC- HDR, Université de Blida 2) ; Nacereddine BOUHACEIN (Professeur, Université de Blida 2), Amar SASSI (Professeur, Université de Blida 2) ; AttikaYasmine ABBESKARA (Professeur, ENS d’Alger) ; Saliha AMOKRANE (Professeur, Université d’Alger 2) ; Safia ASSELAHRAHAL (Professeur, Université d’Alger 2) ; Hadj MÉLIANI (Professeur, Université de Mostaganem) ; Marielle RISPAIL (Professeur, Université Jean Monnet – St Etienne) ; Claude CORTIER (MC, Université de Lyon) ; Claude FINTZ (Professeur, Université Stendhal-Grenoble 3). Président d’honneur Monsieur Saîd BOUMAIZA – Recteur de l’université de Blida 2 Directrice de la revue et Responsable de la publication Dalila BRAKNI – Doyenne de la faculté des Lettres et des Langues Responsable de la revue Ouardia ACI Rédactrices en chef Djazia HABET Houda AKMOUN (chargée de la post-graduation) Comité de rédaction Sid-Ali SAHRAOUI Ouardia ACI Hakim MENGUELLAT Abderrezak TRABELSI Nassima MOUSSAOUI Secrétariat de rédaction Djazia HABET Abderrezak TRABELSI Contacts Université de Blida 2 – El Affroun – Blida. [email protected] ÉDITIONS DE L’UNIVERSITÉ DE BLIDA 2 DIDACSTYLE Politique éditoriale La revue Didacstyle est une revue annuelle éditée en version papier qui se veut diffuseur de recherches interdisciplinaires, menées au sein et en dehors du département de français de la faculté des Lettres et des Langues de l’université de Blida 2. Ces recherches s’inscrivent dans divers domaines : Didactique, sociolinguistique, sociodidactique, littérature… C’est ainsi qu’en prolongement d’une démarche engagée depuis plusieurs années (1998), Didacstyle publie des numéros thématiques qui font l’objet d’appels à contribution. Un numéro varia est publié tous les cinq numéros. Tous les articles, sous anonymat, sont soumis à lecture et à expertise des membres du comité scientifique et de lecture. Ce comité est international et est composé de différents professeurs et maîtres de conférence HDR d’Algérie et d’ailleurs. Il est à préciser que la revue Didacstyle décline toute responsabilité quant au contenu des articles. Seuls les auteurs en sont responsables. Consignes éditoriales Les marges à respecter sont : Échelle « papier » : hauteur 23 cm / largeur : 15.5 cm Marges : haut, bas, droite, gauche : 02 cm ; Les coordonnées de l’auteur (Prénom, NOM, université d’appartenance et courriel) doivent être rédigées et placées en haut et à gauche de la page en police Californian FB – N° 11 ; Les articles doivent être écrits : Normal, police Times New Roman – N°12 ; Le titre de l’article en police Californian FB – N°16 ; Les sous-titres en en police Californian FB – N°14 ; Interligne simple (01 pt) ; Les articles ne doivent pas dépasser les 40.000 signes (espaces inclus) ; Les citations de plus de 03 lignes doivent être mises à la ligne, centrées et en retrait de 02 cm par rapport au texte ; La résolution des images / photos doit être de 300 pixels (au minimum) et de format « JPEG » ; Les tableaux et figures doivent être maintenus dans un format « Word » (ne pas convertir en image) Les références bibliographiques : Dans le texte : (Nom, année : page) Bibliographie : (NOM, P., (année), Titre, éditions, ville, p./pp. SOMMAIRE Nassima MOUSSAOUI Avant-Propos Yasmine ADIB Les critères docimologiques de l’évaluation Samia AID L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/apprentissage des langues en Algérie Noureddine BAHLOUL Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives et l’appropriation du savoir grammatical Khadidja NAIMA BELDJERD Évaluation des productions écrites et intégration des TICE — entre intérêts et obstacles — Soraya BELKHITER Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? Abdelnour BENAZZOUZ Vers un élargissement du cadre d’analyse pour l’apprentissage des langues de scolarisation et étrangère en Algérie : plaidoyer pour une (re) valorisation de la notion de représentation (langagière) dans le processus d’évaluation Djemâa BENSALEM & Samra BENSALEM Approche par compétences et évaluation des acquis Radhia CHERAK L’évaluation dans le système éducatif algérien : renversement des buts et des moyens Fatiha OUSSEUR Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit : quel transfert de compétences et quelle place pour l’évaluation ? Sihame KHERROUBI L’évaluation dans le système éducatif algérien Ghazala MERAZGA Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE…le LMD, un dispositif à respecter. Évaluer…le LMD, un nouveau dispositif ! Habiba BENAOUDA–ZEMOULI L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? Naciba ZIANE L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et l’approche par les compétences modifient les fonctions de l’évaluation Dalila MORSLY Algérie : 50 ans de pratiques plurilingues Moussa HADJ-MOUSSA Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles à l’école algérienne ? Amina AZZA–BEKKAT La mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne francophone (Paris, L’Harmattan, 2012) 10 16 38 50 64 76 100 112 124 132 168 180 194 206 226 230 248 Avant–propos AVANT–PROPOS Le numéro 06 de la revue Didacstyle intitulé « L’évaluation : quels enjeux et quelle perspectives ? » est consacré à l’évaluation et aux pratiques évaluatives des enseignants. Les différents articles dont est composé ce numéro portent sur trois axes : Axe /1 : l’évaluation dans le système LMD ; Axe /2 : L’évaluation dans le système éducatif algérien ; Axe / 3 : l’évaluation et l’approche par compétences. Yasmine ADIB, dans son article intitulé « Les critères docimologiques de l’évaluation », définit la docimologie et aborde les critères de validité, de fidélité et d’objectivité. Elle ne manque pas, en outre, de citer les critères parasites qui nuisent à la fidélité, citons à titre d’exemples : l’effet d’ordre, de contraste, de halo, de contamination. Après avoir donné les trois formes de l’objectivité (l’objectivité de passation l’objectivité de dépouillement ), l’auteure termine son article en convoquant les différents niveaux d’objectifs et en montrant la relation étroite qui existe entre la définition des finalités, buts, objectifs généraux et objectifs pédagogiques (et spécifiques) et l’évaluation. Dans son article intitulé « L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/apprentissage des langues en Algérie » Samia AID définit la compétence, en donne les différentes caractéristiques et les différents types. L’auteure aborde l’enseignement/ apprentissage dans une approche par compétences, pour ce faire, elle convoque la notion de transfert dans la mesure où celle-ci est liée à la situation d’enseignement/apprentissage car l’apprenant n’opère un transfert que lorsqu’il est en mesure d’établir des similitudes entre les différentes situations. Samia AID donne les différents types d’évaluation en vigueur dans une approche par compétences (diagnostique-formative- sommative- formatrice). 10 Avant–propos Dans sa contribution intitulée « Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives et l’appropriation du savoir grammatical », Noureddine BAHLOUL pose le problème épineux des pratiques évaluatives et de leur impact sur la formation des apprenants. Ces dernières participent –elles de « cet acte formatif » ? L’auteur investit le terrain de la classe en vue d’y mesurer l’impact de l’évaluation, il analyse des énoncés proposés aux apprenants en vue d’interroger les niveaux purement linguistiques qui relèvent de la systématicité de la langue et les niveaux sémantico – discursifs qui revoient aux subtilités de la langue et renforcent ce faisant la communicabilité des messages. Khadidja-Naima BELDJERD, dans sa contribution intitulée « Évaluation des productions écrites et intégration des TICE – entre intérêts et obstacles », s’intéresse à l’activité de production écrite, notamment aux pratiques évaluatives à travers l’usage de l’outil informatique. Après avoir donné les deux fonctions principales de l’évaluation (formative et sommative), l’auteure aborde l’évaluation de la production écrite, elle cite, en conséquence, les travaux du groupe EVA et les trois points de vues retenus lors de l’évaluation de l’écrit (pragmatiquemorphosyntaxique et sémantique). L’auteure montre ensuite comment s’effectue le passage de l’écriture à l’écrit numérique en présentant les différentes fonctions du traitement de texte (rédactionnelles- méta-scripturales et de mise en forme). Enfin, elle rend compte d’une expérience menée dans le cadre d’une recherche au cours de laquelle les apprenants ont rédigé grâce au logiciel de traitement de texte « word ». Soraya BELKHITER, dans son article intitulé « Quelle (s) évaluation (s) pour les futurs enseignants de français » pose le problème de la formation des enseignants. Elle présente les résultats d’une enquête sur les difficultés que rencontrent les enseignants débutants lors de l’exercice de leur métier. Ces difficultés relèvent de plusieurs ordres (didactiques/pédagogiques, psychologiques et socioprofessionnels). Elle analyse également leurs représentations quant aux différentes fonctions de l’évaluation. 11 Avant–propos Elle propose enfin que la formation des enseignants soit moins académique et plus ancrée dans la réalité du terrain. Abdenour BENAZZOUZ se penche, quant à lui, sur les représentations langagières des apprenants. Après un aperçu théorique de la notion de représentation langagière, l’auteur propose une approche permettant de cerner l’évaluation des représentations linguistiques à deux niveaux (micro et macro) autrement dit une évaluation individuelle et collective. Cette évaluation se fera sous forme de tests qui cibleront trois processus : la nomination, la catégorisation et l’appréciation). L’auteur conclut son article en insistant sur « la prise en compte de la représentation socio-langagière de l’apprenant dans son parcours de langue et d’évaluation de la langue. » BENSALEM Djemaa et BENSALEM Samra, dans leur contribution intitulée « l’approche par compétence et évaluation des acquis », présentent les nouveaux programmes, inscrits dans une approche par les compétences, pour ce faire, elles proposent des définition de la notion de compétence, elles établissent , également, un parallèle entre l’approche par objectifs et l’approche par compétence en insistant sur les objectifs assignés à un enseignement/apprentissage inscrit dans une approche par compétences. Les deux auteures ne manquent pas d’insister sur les savoirs visés dans une telle approche (savoir-agir en situation) et sur la nécessaire formation des enseignants. Dans sa contribution intitulée « L’évaluation dans le système éducatif algérien : renversement des buts et des moyens », CHERAK Radhia présente la réforme, ses principes et ses objectifs. Elle s’attarde sur les différents savoirs et insiste sur le savoir –agir propre à un enseignement/apprentissage inscrit dans une approche par compétences. La pédagogie du projet a également été interpellée en tant que principe méthodologique. L’auteure se penche également sur L’évaluation. Si Ahmed KHARROUBI s’intéresse à l’évaluation dans le système éducatif algérien. Il rend compte d’une expérience au cours de laquelle une seule copie, une production écrite fut 12 Avant–propos corrigée par trois enseignants. Il entreprend la même expérience avec des enseignants de mathématiques, l’analyse des résultats de cette expérience mettent en exergue les disparités aux niveaux des pratiques évaluatives. L’auteur se penche également sur la l’expression orale et montre que les critères d’évaluation ne sont pas respectés. Il regrette, par ailleurs, l’absence de continuité et de coordination entre les cycles scolaires et l’université. MERAZGA Ghazala, se penche sur l’évaluation de l’écrit universitaire en FLE. Après un bref aperçu sur le système LMD en Europe, elle évoque l’application de la réforme dans les universités algériennes. Elle propose des orientations quant aux pratiques évaluatives au sein de l’université (être en harmonie avec son institution, être efficace, adopter un véritable programme…) Elle aborde l’évaluation des écrits à l’université et, ce faisant, elle propose comme référentiel d’évaluation la grille EVA et les critères du CECR. BENAOUDA Habiba s’interroge sur les pratiques évaluatives des enseignants à l’université. Elle insiste sur l’importance des critères et de la consigne lors de la réalisation de la tâche et de son évaluation. Elle regrette l’absence de coordination et de concertation entre les enseignants universitaires lors de l’élaboration des sujets d’examen et l’évaluation des travaux des étudiants. Pour étayer ses propos, l’auteure analyse des sujets dans lesquels la consigne n’est pas précisée, la tâche à réaliser est problématique dans la mesure où les verbes utilisés sont des verbes mentalistes non des verbes d’action. Dans sa contribution intitulée, « L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et l’approche par les compétences modifient les problèmes de l’évaluation des compétences. ZIANE Naciba aborde la notion de compétence en montrant les réserves émises par Perrenoud quant à la définition chomskyenne. L’auteure passe en revue les fonctions de l’évaluation, elle ne manque également d’insister sur l’implication de l’apprenant dans l’évaluation de ses travaux. 13 Avant–propos Dans son article intitulé le « Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit : quel transfert de compétences et quelle place pour l’évaluation ? » OUSSEUR Fatiha se penche sur un principe de l’approche par compétences : la situation d’intégration. Après l’avoir définie l’auteure s’attarde sur la situation d’intégration dans l’enseignement/apprentissage et dans l’évaluation des écrits des apprenants du cycle secondaire en Algérie. Elle rend compte d’une expérience menée auprès d’enseignants et auprès d’apprenants de 3°AS. Dans la rubrique VARIA, Mme MORSLY Dalila rend compte d’un colloque auquel elle a assisté et dont l’objectif était d’examiner si et comment les évolutions politiques, sociales et culturelles qui ont marqué le pays durant ce premier demisiècle de son indépendance avaient influé sur la distribution des variétés d’arabe et de tamazight, sur les normes d’arabe institutionnel (arabe dit standard, scolaire etc.) et de français, sur le poids des langues et des variétés, les formes de contacts entre langues et variétés. Le colloque s’est tenu sous forme de séances plénières et sous forme d’ateliers, les questions ont porté sur comment décrire et analyser la complexité du paysage plurilingue de l’Algérie. Les travaux en ateliers ont été consacrés aux pratiques linguistiques : - en contextes ordinaires et non formels, en contextes institutionnels (universitaire et scolaire) dans les médias, dans les réseaux sociaux. AZZA–BEKKAT Amina rend compte de la lecture de l’ouvrage « La Mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne francophone » de Désirée SCHYNS, auteure et professeure en traduction en Belgique. Mme BEKKAT donne le corpus d’étude de l’auteure, corpus constitué de textes de neuf écrivains algériens ayant retracé dans leurs écrits les événements 14 Avant–propos de la guerre d’Algérie et de la décennie noire appelée par SCHYNS « la deuxième guerre d’Algérie ». L’auteure se propose, dans les 9 chapitres constituant l’ouvrage, d’explorer la guerre à travers l’évocation de la mémoire dans la mesure où (selon les propos de Mme BEKKAT) « les œuvres littéraires sont non seulement un réceptacle, un dépôt de traces mémorielles mais elles sont aussi constitutives de mémoires » La première partie de l’ouvrage évoque l’engagement de certains écrivains, la mémoire officielle en Algérie (à travers la récupération du roman de Mammeri « L’opium et le bâton », le désenchantement, l’insatisfaction et l’échec de la révolution. La deuxième partie est consacrée à la torture à travers des témoignages d’Algériens ayant subi la tortures ou de français ayant aidé des Algériens. La troisième partie évoque la décennie noire que beaucoup d’écrivains rapprochent de la guerre d’Algérie. Moussa HADJ-MOUSSA s’interroge sur l’adéquation entre le statut officiel de la langue française en Algérie et les besoins réels des utilisateurs dans les établissements scolaires et dans la vie sociale. Il aborde les caractéristiques de la méthodologique du FLE, pour ce faire, il passe en revue les différentes méthodologies. Il s’intéresse particulièrement à la prise en charge de la dimension culturelle dans les situations d’enseignement/apprentissage du FLE. Il interpelle, par ailleurs, le statut de la langue française dans le système éducatif algérien. L’auteur conclut son article en affirmant que le français est une langue de scolarisation et de travail et par conséquent le statut qui lui est affecté ne convient pas aux réalités et aux besoins de la société algérienne. Nassima MOUSSAOUI 15 Yasmine ADIB Centre Universitaire de Tissemsilt [email protected] Les critères docimologiques de l’évaluation Résumé L’objectif de cet article est d’essayer de développer et d’étudier les différents critères docimologiques de l’évaluation « la validité, la fidélité et l’objectivité », pour expliquer les trois méthodes de la validité et les critères parasites qui empêchent l’enseignant d’être fidèle ainsi que les trois formes d’objectivité. Nous avons montré la relation qui existe entre l’objectif et l’évaluation. Nous avons fini en donnant des définitions des concepts de notation et de test. الملخص الغرض من هذا المقال هو محاولة لتطوير واستكشاف معايير التقييم الدوسي الموثوقية والموضوعية" لشرح األساليب الثالثة لمعايير الصالحية،مولوجي المختلفة "الصحة واالسباب لتي تمنع المعلم ليكون صحيحا وموصوعيا وكذالك األشكال الثالثة الخاصة كما أنهينا المقال بإعطاء بعض. لقد أظهرنا العالقة بين الهدف والتقييم.بالموضوعية .التعريفات كالتنقيط واالختبار Les critères docimologiques de l’évaluation La docimologie Ce terme est proposé par Piéron1, il combine deux mots grecs : « dokimé » qui signifie « épreuve » et logo « science », la docimastique « dokimastikos » désigne l’étude des techniques d’examens. Cette discipline est née pour objectiver, sur des bases scientifiques, les critères de l’évaluation scolaire pour élaborer des techniques d’examen et le contrôle des résultats des élèves. C’est la science de « l’évaluation en pédagogie ». Une des caractéristiques de l’attitude docimologique est le recours à la technique statistique comme support pour accorder la plus grande objectivité aux examens. C’est une science qui a pour objet tout ce qui est connexe à la mesure et à l’évaluation dans le domaine éducatif. En 1922, Henri Piéron introduit le terme de docimologie, il le définira en 1951 comme : L’étude systématique des examens (modes de notation, variabilité interindividuelle et intra-individuelle des examinateurs, facteurs subjectifs). Il a comparé les moyennes des notes données par des jurys parallèles du baccalauréat français. Les différences atteignaient 4 à 5 points sur 20, en mathématique et en physique. Avec son collègue Laugier, ils comparaient les résultats obtenus par un même groupe d’élèves aux tests et les résultats obtenus au certificat d’études primaire du mois de juin 1922. Ils constatèrent que le degré de correspondance entre les deux types de résultats était très faible. Avec sa femme et Laugier, ils posent les fondements de cette nouvelle discipline avec « L’étude critique de la valeur sélective du certificat d’études et la comparaison de cet examen avec une épreuve par tests. »1 En 1938, Laugier et Weinberg2 mènent une expérience en distribuant des copies à corriger à des jurys parallèles, ils trouvent différentes moyennes de 2 à 3 points en mathématique 1 H, PIERON. »Examens et docimologie », Paris, PUF, 1969. H, LAUGIER. D, WEINBERG. « Recherche sur la solidarité et l’interdépendance des aptitudes intellectuelles d’après les notes des examens écrits du baccalauréat », Paris, CHantenay, 1938 2 17 Yasmine ADIB et en physique, et de 4 points en français et en philosophie. Il y a eu un écart de 13 points sur 20 entre deux examinateurs. En docimologie, il s’agit d’exclure l’influence des variables qui ne sont pas liées à ce qu’on veut mesurer (comportement de l’enseignant, mauvaise formulation des consignes des devoirs) et de rendre l’évaluation plus objective. Bonniol1 propose le terme de « docinomie » pour nommer l’aspect prescriptif éventuel de la docimologie. L’objet travaillé est la fabrication des notes. On étudie les examens pour identifier les biais, les effets perturbateurs qui expliqueraient les variations entre les notations. Il s’agit de trouver des lois qui rendraient compte des problèmes de la fidélité des notes (aboutir au même résultat quelque soit le nombre de passations ou de correcteurs), de la validité des examens (n’évaluer que ce qui est affiché) et de la sensibilité des outils d’évaluation (utiliser harmonieusement les échelles de mesure).1 Pour qu’un test dénote d’un bon sens et convienne à l’évaluation, il doit répondre aux exigences des critères scientifiques suivants : La validité Un test n’est valide que lorsqu’il est adéquat et pertinent pour l’enseignant et pour les élèves et que lorsqu’une relation tangible existe entre le contenu du test et l’objectif d’apprentissage déterminé au début de la tâche d’apprentissage. L’association américaine de psychologie distingue quatre sortes de validité : validité de contenu, prédictive, courante et validité des concepts psycholinguistique. Les validités prédictive et courante sont regroupées sous le concept de « validité en fonction des critères empiriques ». La validité est caractérisée par trois méthodes suivantes : 1 J-J, BONNIOL. M, VIAL. : « Les modèles de l’évaluation », Paris, Bruxelles, De Boeck, 1997, p.58 18 Les critères docimologiques de l’évaluation — Validité de contenu « Un test est valide quand son contenu constitue un échantillon représentatif des objectifs définis. »1 On ne peut se passer de la validité du contenu quand il s’agit de tests orientés vers les objectifs de savoirs. Les procédés statistiques ne déterminent pas la validité du contenu. Les objectifs d’apprentissage sont comparés avec le contenu du test et la nature des épreuves. La validité d’aspect concerne les contenus des tests de langue étrangère, c'est-à-dire que les épreuves semblent adéquates et pertinentes au destinataire et à l’utilisateur. — Validité en fonction de critères empiriques Cette validité est déterminée par la comparaison d’un résultat obtenu dans le test à d’autres observations. Il s’agit d’une validité déterminée empiriquement qui a besoin d’un ou plusieurs critères externes pour la comparaison, par exemple les observations de comportement ou les résultats d’un autre test poursuivant le même objectif. — Validité des concepts psycholinguistiques Cette forme de validité concerne les compétences langagières et les capacités sur lesquelles doit porter le test et qu’il doit mesurer. D’après Morrow1 : « Le test reflète avec précision les principes d’une théorie valide de l’apprentissage d’une langue étrangère. »2 Les compétences à tester doivent être définies comme des objectifs de comportement. Les activités que le candidat doit exécuter doivent être fixées avec précision pour montrer qu’il possède une compétence bien déterminée. De cette analyse nous pouvons dire que les validités de contenu et des concepts psycholinguistiques concernent surtout les tests de langue étrangère, car les deux reflètent les théories et 1 S, BOLTON. « Évaluation de la compétence communicative en langue étrangère », Hatier-Crédif, coll.LAL, Paris, 1987, p.11 2 K, MORROW. « Communicative Language testing: revolution or evolution? », 1979, p.147, cité par S, BOLTON. « Évaluation de la compétence communicative en langue étrangère », Hatier-Crédif, coll.LAL, Paris, 1987, p.11. 19 Yasmine ADIB les hypothèses de la linguistique et de la psychologie de l’apprentissage. Lado1, considère qu’un test de performance n’est valide que s’il contrôle les éléments et les structures de la langue étrangère. Pour être pertinent, un test doit être valide. C’est–à–dire qu’il doit mesurer exactement et exclusivement ce qu’il est censé mesurer. Il doit donc y avoir correspondance entre le contenu du test et l’objectif visé, mais aussi entre l’objectif du test et l’objectif de l’apprentissage.2 La fidélité L’évaluation doit s’appuyer sur des instruments de mesure fiables. Le concept de « fidélité » se fonde sur l’hypothèse que chaque valeur se compose d’une valeur vraie en points et d’une erreur de mesure. Plus cette dernière est faible, plus s’accroît la fiabilité du test. La fiabilité du test augmente dès que les erreurs sont faibles. Prenons le cas de tests objectifs influencés par des facteurs individuels. (Par exemple : fatigue, angoisse, difficulté à deviner la solution), ou conditionnés par des facteurs qui relèvent de la situation d’examen. (Par exemple : interaction entre l’examinateur et le candidat). Ainsi que les constructions faibles des tests (par exemple : mauvaise formulation des questions, imprécision des consignes de passation).Tous ces éléments diminuent de la fiabilité d’un test (voulu) objectif. Une série de variables influençant les notations sont mises à jour. Elles sont appelées « effets » : effets d’ordre et de contraste dans la succession des copies, effet de contamination de l’opinion des examinateurs, effet de stéréotypie systématisant les appréciations antérieurs, effet de halo des représentations sociales du candidat chez le correcteur. D’après Abernot3, plusieurs critères parasites empêchent l’enseignant à être fidèle. Parmi ces variables : 1 R, LADO. « Language testing », New York, 1961, cite par S, BOLTON. « Évaluation de la compétence communicative en langue étrangère », Hatier-Crédif, coll.LAL, Paris, 1987, p.11. 2 CH, TAGLIANTE. « L’évaluation », Paris, Clé international, 2001, p.26. 3 Y, ABERNOT. « Les méthodes d’évaluation scolaire », Paris, Bordas, 1988. 20 Les critères docimologiques de l’évaluation L’effet d’ordre Les correcteurs sont plus sévères à la fin d’une série de copies. Quelques enseignants surévaluent les dernières copies en les recorrigeant. — L’effet de contraste La plus part des correcteurs notent par contraste c'est-à-dire qu’une copie moyenne risque d’être mal / mieux notée par rapport à la copie qui la précède ou la suit. La note d’une copie dépend en partie de la copie précédente d’où le risque de manque d’objectivité. En 1972, J-J, Bonniol1présenta une thèse sur l’estimation par contraste. À partir de cet effet il utilise la notion d’ancre (référence à l’instrument de marine). Dans une série de copies sélectionnées après plusieurs « bonnes » copies (ancre hautes) ou mauvaises copies (ancres basses) pour découvrir leurs effets sur les copies suivantes. — L’effet de contamination Le point de vue des confrères influe sur le jugement du correcteur. En 1975, J-P, Caverni2 a mené une expérience sur l’évaluation, il a proposé à deux groupes d’enseignants de sciences naturelles de corriger quatre copies différentes. Il a donné à chaque correcteur un faux dossier scolaire par copie. Le premier groupe de correcteurs dispose d’appréciations préalables élevées et stables, le deuxième groupe se fonde sur des dossiers aux notes faibles et irrégulières. Les résultats font paraître le peu d’écart absolu du à l’influence d’un dossier pour une copie notoirement faible. L’écart grandit au fur et à mesure que la qualité des copies augmente. 1 J-J, BONNIOL. « Les comportements d’estimation d’une tâche d’évaluation d’épreuve scolaire, étude de quelques-uns de leurs déterminants », Thèse de 3e cycle, Aix-en-Provence, Université de Provence, 1972. 2 J-P, CAVERNI. J-M, FABRE. G, NOIZET. « Dépendance des évaluations scolaires par rapport à des évaluations antérieures, études en situation simulée », Le travail humain, 1975, p.38 21 Yasmine ADIB En conclusion, un dossier ne rachète pas une mauvaise copie ; toutefois, il influe sur l’évaluation. Chaque enseignant a des informations sur ses élèves, s’il sait qu’un tel élève vient d’un milieu social favorisé, sa note est sans doute plus élevée, car il va chercher dans sa copie les indices attendus de sa part, ainsi un bon dossier scolaire influe sur une bonne copie. — L’effet de stéréotypie Lorsqu’un enseignant établit un « jugement » (subjectif) sur un élève, il a tendance à s’en tenir à ce jugement. Certains enseignants jugent le niveau de connaissances de leurs élèves à partir des notes obtenues au premier examen. Par conséquent, même si les élèves font des efforts durant le reste du cursus, leurs notes ne changeront pas surtout pour ceux qui ont obtenu de mauvaises notes. Souvent leurs notes sont une référence pour l’enseignant qui, par la suite, a du mal à noter différemment. Ces élèves vont être jugés une fois pour toutes au début de l’année. « L’effet de stéréotypie est une systématisation de l’appréciation établie. »1 — L’effet de halo Les variables telles l’habillement, la verbalisation, les attitudes face à l’école, la sympathie, sont nécessaires dans la relation pédagogique et se retrouvent dans l’évaluation, c’est ce que l’on nomme l’effet de halo. Un élève faible à l’écrit et qui s’exprime bien à l’oral est généralement mieux noté qu’un autre dans une situation inverse même s’il a un bon niveau à l’écrit. Aussi, une copie dont le contenu n’est pas assez construit, bien organisée et avec une bonne écriture donne généralement une bonne impression à l’enseignant qu’un bon travail mal présenté avec une mauvaise écriture. Les notes sont relatives, non seulement au groupe de référence, et à l’établissement scolaire, mais aussi à l’enseignant qui les distribue. 1 J-J, BONNIOL. M, VIAL. « Les modèles de l’évaluation », Paris Bruxelles, De Boeck, 1997, p.60 22 Les critères docimologiques de l’évaluation Le favoritisme : Chaque enseignant a un préféré ou un favori en classe qui n’obtiendra jamais de mauvaises notes bien qu’il soit faible. La fatigue : Par fatigue du correcteur, la moyenne des notes attribuées à tendance à baisser. Un enseignant fatigué qui corrige des copies tard le soir, devant la télévision, n’est pas plus équitable qu’un autre qui corrige le matin assis à une table de travail. De ce fait, les conditions de correction sont nécessaires pour la fiabilité de l’évaluation vu la différence de procédé. — La variable de débordement Une copie d’élève risque d’être mal notée quand l’enseignant accomplit un grand effort pour deviner la solution dans des réponses justes mais pleines de fautes d’orthographe, sans ponctuation et avec une écriture indéchiffrable. — La variable choc : Il en existe deux sortes : La négative Les mêmes fautes répétées dans des réponses justes ou l’emploi des abréviations qui font diminuer parfois la note ; La positive Une idée jugée pertinente dans une copie moyenne peut plaire à l’enseignant et peut être à l’origine d’une bonne note. — La mesure de l’écart type Chaque enseignant a son écart-type. Par exemple, sur une échelle de notation, de zéro à vingt, un enseignant n’utilise que la fourchette comprise entre sept et douze. Son écart-type est de cinq points. Un autre enseignant notera de deux à seize. Un troisième enseignant notera encore de manière différente. Mais, si la grille d’évaluation de l’épreuve était bien conçue, chacun de ces trois enseignants devrait donner la même note à une même copie. 23 Yasmine ADIB — L’évaluation extérieure Le monde extérieur juge l’enseignant à partir de ses notes données aux élèves, s’ils n’obtiennent que des bonnes notes, il est jugé comme étant « un bon enseignant » ; et inversement. La validité est considérée comme un degré de stabilité des résultats à un test. S, Bolton1estime qu’un test fiable et non valide n’a pas de valeur, et qu’il faut d’abord assurer sa fiabilité pour déterminer après sa validité. La note à un même devoir doit être stable et constante quelles que soient les conditions de la correction et les correcteurs. Pour cela l’enseignant devra utiliser des critères d’appréciation qui permettront de chiffrer la valeur d’une production. La grille de correction ou d’évaluation est indispensable, c’est à partir de cette dernière que l’enseignant doit établir les critères de mesure et d’appréciation qui seront dotés de coefficients pour que l’élève sache sur quoi sa production va être évaluée. Par ailleurs, elle permet à différents correcteurs d’avoir les mêmes critères d’évaluation. Donc, elle diminue sa subjectivité. Le barème de notation est important, et permet de définir le nombre de point sur lequel sera noté chaque critère choisi. Les facteurs relevant de la situation d’examen : « l’horaire, les questions mal formulées, l’angoisse, l’interaction « enseignant-élève » à l’oral » peuvent aussi empêcher la fiabilité d’un test. Alors, les consignes de passation et de correction doivent être formulées de manière plus précise et doivent comporter plusieurs items afin de fournir des résultats stables. La fiabilité d’un test concerne l’exigence de reproductibilité des résultats. C’est la qualité du test qui fait que, quelles que soient les conditions de correction, les résultats seront constants. 1 S, BOLTON. « Évaluation de la compétence communicative en langue étrangère », Hatier-Crédif, coll.LAL, Paris, 1987, p.12. 24 Les critères docimologiques de l’évaluation L’objectivité Selon S, Bolton1 : « Le critère d’objectivité se rapporte à la passation du test ainsi qu’au dépouillement et à l’interprétation des résultats.»1 D’après lui, il y a trois formes d’objectivité : — L’objectivité de passation Elle garantit des tests pour tous les candidats dans les mêmes conditions. À l’avance sont fixés la durée de l’épreuve, le barème de notation, la nature de la consigne et les outils qui peuvent être utilisés par les élèves ; — L’objectivité de dépouillement Elle garantit que les objectifs visés dans le test correspondent aux performances du candidat. Le barème de notation correspondant à chaque bonne réponse doit être fixé à l’avance pour garantir que les résultats sont indépendants de la subjectivité des correcteurs ; — L’objectivité d’interprétation Elle assure une notation d’ensemble unifiée des résultats obtenus, le rapport entre les notes partielles et globales est fixé d’emblée. Ces trois formes d’objectivité sont nécessaires pour la fiabilité d’un test, car un test ne peut aboutir à une évaluation sure si les résultats varient à chaque passation ou en fonction du caractère du correcteur. De Landsheere2définit le concept d’objectivité comme : « Le caractère de ce qui donne une image non déformée des choses ». D’après lui, l’objectivité d’un test est : « Le fait qu’il est relativement exempt d’erreurs de jugement ou de correction…..que ses résultats dépendent seulement de la performance du sujet. »1 1 S, BOLTON. « Évaluation de la compétence communicative en langue étrangère », Hatier-Crédif, coll.LAL, Paris, 1987, p.09 2 G, DE LANDSHEERE. « Dictionnaire de l’évaluation et de la recherche en éducation », Paris, PUF, 1979. 25 Yasmine ADIB L’assurance de cette objectivité réside dans l’emploi de règles de correction et de notation précises. L’objectivité est donc, pour De Landsheere, l’une des qualités métrologiques d’un test et non pas une valeur. J-M, De Keteleet A, Rogiers2 estiment que : L’évaluation signifie recueillir un ensemble d’informations suffisamment pertinentes, valides et fiables, c’est examiner le degré d’adéquation entre cet ensemble d’informations et un ensemble de critères adéquats aux objectifs fixés au départ ou ajustés en cours de route.1 La docimologie a montré que la notation, outil habituel et prédominant d’évaluation dans notre système scolaire est peu fiable. Elle se déplace vers le fonctionnement des évaluateurs correcteurs de copies, vers l’étude des comportements des examinateurs et des examinés en milieu scolaire. Plusieurs chercheurs s’interrogeaient sur les sources d’erreurs des procédures d’évaluation. F, Bacher2, distingue trois sources d’erreurs : — La première renvoie à l’évaluateur lui-même, ses notes sont dispersées autour d’une moyenne plus ou moins élevée. De plus les évaluateurs ne classent pas dans le même ordre une même série de travaux ou de réponses. — La deuxième se trouve dans les examens traditionnels, au choix du sujet même de l’examen, aux conditions de passation. — La formulation du sujet de l’examen peut-être source d’erreurs et la note de l’examiné ne reflète pas sa propre valeur. — La troisième vient des élèves. Deux facteurs sont difficiles à maîtriser et à estimer : la variabilité des candidats et les conditions extérieures lors du déroulement des opérations. J-P, Cuq1 définit la docimologie ainsi : 1 J-M, DE KETELE et A, ROGIERS. « Méthodologie du recueil d’information », Bruxelles, De Boeck, 1993. 2 F, BACHER. « La normalisation de la notation », Paris, BINOP, 1969, p.p.25.75-.90. 26 Les critères docimologiques de l’évaluation Docimologie : terme proposé par Henri Piéron 1922, la docimologie désigne une science qui a pour objet l’étude des systèmes de notation appliqués lors des examens. Elle concerne essentiellement le rapport entre l’appréciation des examinateurs et la traduction de cette appréciation en points. La docimologie étudie les écarts de notes entre correcteurs, l’application des barèmes, les échelles de notes, l’intercorrélation entre examinateurs et la précision des correcteurs. Elle cherche à atténuer dans toute la mesure du possible le rôle du hasard dans les notations attribuées. 1 L'analyse par objectif Elle fut appliquée à l'éducation par Rice (vers 1914), elle introduit la mesure par les tests et par l'observation des élèves. Elle facilite la tâche à l'enseignant pour élaborer des tests d'évaluation et s'intéresse aux différentes notions correspondantes au cursus de formation « finalité, but, objectif, etc. » — Une finalité C'est l'affirmation du principe représentant des valeurs morales citées dans un discours officiel et à travers lesquelles une société ou un groupe social identifie et véhicule ses valeurs. Elle fournit des lignes directrices à un système éducatif et la manière de dire du discours sur l'éducation. — Un but C'est un énoncé définissant des intentions poursuivies par un groupe ou par un individu à travers une action déterminée de formation. Il est circonscrit à un temps et à une population précise, il est opératoire et n'implique pas des valeurs, il est qualitatif et moins lointain. Il s’agit de la manière de juger le programme ou la séquence didactique. — Un objectif C'est l'énoncé d'intention éducative et pédagogique, il traduit le but en terme précis, et indique le résultat à atteindre, il définit ce que l'élève saura ou saura faire grâce à ce qu'il apprend. 1 J- P, CUQ. « Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde», ASDIFLE, Clé international, Paris, 2003, p.75 27 Yasmine ADIB Les objectifs doivent indiquer de façon claire et précise ce qu'on attend de l'apprenant pour que celui-ci puisse adopter les attitudes et utiliser les connaissances et les habiletés qu'il a acquises. Ils rendent possible une évaluation plus ou moins permanente, ils permettent une réelle communication entre l’enseignant et l’enseigné. Grâce aux objectifs, la relation éducative devient réellement un contrat bilatéral négocié. — Les objectifs généraux Ils expriment des intentions éducationnelles abstraites et dessinent l'orientation d'un enseignement, à établir, les instructions officielles qui l'expliquent et indiquent les résultats espérés à la fin d'un cursus. Ce sont des énoncés qui décrivent en termes de capacité de l'élève à des résultats attendus d'une séquence d’apprentissage. La décomposition ou la démultiplication d'un objectif général en objectifs spécifiques facilite l'évaluation. — Les objectifs spécifiques Ils affirment et précisent l'objectif général afin de réaliser le programme, ils sont issus de la démultiplication de l'objectif général. Ces objectifs vont permettre de passer du stade d'enseignement à celui d'apprentissage. Ils combinent une attitude et un contenu particulier et limité. — Les objectifs opérationnels Ils résultent de la décomposition des objectifs spécifiques et reformulent ceux-ci en fonction de l'évaluation. Rendre un objectif opérationnel c'est décrire d'une manière précise et observable l'activité que l'on veut faire maîtriser par l'élève. Ameline (1990) cité par Tagliante, nous apprend que Il s'agit principalement de : - L'activité à réaliser en termes d'univocité. - La marge d'erreur, critères d'acceptabilité permise, - Le temps alloué, - Le matériel ou les ressources nécessaires, 28 Les critères docimologiques de l’évaluation - Les conditions de réalisation de l'activité. 1 De là, nous pouvons dire qu'un objectif est opérationnel s'il respecte les quatre exigences suivantes : — La consigne ne doit jamais être équivoque c'est-à-dire qu'il faut décrire de façon univoque le contenu de l'intention pédagogique. — La performance réalisée par l'élève doit être observable, donc il faut décrire une activité identifiable à l'élève grâce à un comportement observable. — La clarté et la formulation des conditions de passation par la mention des conditions dans lesquelles le comportement souhaité doit se manifester. — L'indication du seuil d'acceptabilité c'est-à-dire, indiquer à quel niveau d'activité terminale l'élève doit se situer et quels critères serviront à évaluer le résultat. Relations objectif/évaluation L'évaluation n'a de sens que par rapport aux objectifs d'apprentissage visés, définis par une analyse détaillée des besoins et vice versa ; un objectif n'est cohérent que s'il inclut ses modes d'évaluation. Les deux notions sont totalement liées et affiliées, l'évaluation ne peut être définie sans y joindre la notion d'objectif d'apprentissage : « aucun processus d'évaluation n'a de sens indépendamment, un objectif n'existe véritablement que s'il inclut, dans sa description même, ses modes d'évaluation.»2 Toute évaluation se fait ou devrait se faire par rapport à des objectifs explicites ou implicites, alors que les notions d'objectif et d'évaluation sont indissociables. Une définition souvent citée est celle de Ralph-W, Tayler3 : Le processus d'évaluation consiste essentiellement à déterminer dans quelle mesure les objectifs éducatifs sont atteints par les 1 2 CH, TAGLIANTE. « L’évaluation », Paris, Clé international, 1991, p.25 L, PORCHER. « Note sur l’évaluation », langue française, n 36, Paris, p. 111 3 W-R, Tayler (1950) p. 69 cité par K, LETHANK. « Éducation comparée », Paris, collection Armand colin, 1981, p.9-7 29 Yasmine ADIB programmes d'étude et l'enseignement. Cependant, puisque les objectifs éducatifs visent à produire certains changements désirables dans les comportements de l'élève alors l'évaluation est le processus qui détermine le point auquel ces changements de comportement ont effectivement lieu.1 Il insiste sur l'évaluation comme un processus, un parcours établi selon un procédé dans la pratique en s'attachant aux produits. La décomposition ou la démultiplication d'un objectif général en objectifs spécifiques facilite l'évaluation, autrement dit, l'objectif général ne peut être évalué directement ; il doit être démultiplié en objectifs spécifiques, puis en objectifs opérationnels, ces derniers sont reformulés en fonction de l'évaluation. Ce schéma présente les objectifs pédagogiques appliqués à l'enseignement des langues vivantes étrangères et résume ce que nous venons de définir. Finalités de l'enseignement Buts Objectifs généraux Objectifs spécifiques Évaluation Objectifs opérationnels La notation Elle est considérée comme une mesure particulière, là ou un nombre est attribué à une performance. La note de langue correspond à l’estimation donnée d’une performance appréciée. Elle est considérée comme une indication de chemin parcouru quand l’objectif est clairement fixé du moment qu’elle mesure le degré d’atteinte de ce dernier, et comme une mesure particulière, là ou un nombre est attribué à une performance. 30 Les critères docimologiques de l’évaluation L’évaluation scolaire ne se distingue pas de la notation. H, Piéron1 propose d’utiliser la méthode psychométrique pour améliorer la fidélité des notations. La note reste souvent le seul outil d’évaluation, attribuée par les enseignants et est souvent subjective. Elle est influencée par le sexe, la classe sociale ou le comportement du candidat. Le barème de notation sert à préciser la pondération de chaque critère de correction. Il sert à distinguer les critères minimaux et les critères de perfectionnement. Les critères minimaux sont ceux qui déterminent la réussite, c'est-à-dire la maîtrise de la compétence. Les critères de perfectionnement sont ceux qui situent les productions des élèves entre une production satisfaisante et une production excellente. La correction des copies est une activité lourde du côté des correcteurs et celui des corrigés. Elle est impliquée dans le vécu des uns et des autres. Quelle que soit l’application qu’ils mettent à cette tâche, il reste une certaine insécurité. Parfois la correction n’est pas juste, par cause de subjectivité des enseignants, cela est dû à l’importance qui varie des mêmes choses tels que : la présentation, l’orthographe, la ponctuation, le style et la correction de la langue : « Certains regardent plus comment est écrite et rédigée la copie, d’autres regardent la réflexion et l’attention portée au sujet, d’autres regardent les deux. »2 Les notes, les examens et les diplômes sont la forme principale d’évaluation des apprenants dans le système éducatif : « La note s’intègre dans un système de sanctions positives et négatives. Elle récompense les progrès dus aux efforts, elle est le juste châtiment de la paresse. »3 Préférer la note au classement, pour améliorer les relations entre élèves. Le mérite de la note est de sécher l’élève et de le renvoyer à lui-même. Le mot vient du latin nota qui, en latin classique, signifie : marque, par exemple tracer des caractères d’écriture. Ainsi on note les esclaves ou les bêtes de somme pour les reconnaitre (pourquoi pas 1 H, PIERON. « Examens et docimologie », Paris, PUF, 1969. O et J, VESLIN. « Corriger des copies, évalué pour former », France, Edition Hachette, 1993, p.67 3 2 , J, VOGLER, « L’évaluation », Hachette édition, France, 1997, p.21 2 31 Yasmine ADIB par un tatouage ?) On trouve, chez Cicéron notamment, des emplois de noter au sens actuel de : prendre des notes ou même de remarquer (noter que) Comme c’est souvent le cas dans l’histoire du vocabulaire, on passe de la présentation de l’action à celle de ses effets : notare signifie aussi : faire reconnaitre désigner d’une manière caractéristique et souvent péjorative. Ainsi, les censeurs de la République romaine (comme ceux des lycées !) notaient le nom des citoyens qui avaient fauté et le mot noter en vient pour signifier : blâmer, flétrir. » L’indicateur est une information précise que l’on recueille pour opérationnaliser les critères et pour se prononcer sur la maîtrise d’un critère par les élèves. Il y a deux types d’indicateurs : — Un indicateur qualitatif lorsqu’il précise une facette du critère. Il reflète soit la présence ou l’absence d’un élément, soit un degré d’une qualité donnée. — Un critère qualitatif, quand il fournit des précisions sur des seuils de réussite du critère. Il s’exprime alors par un nombre, un pourcentage, une grandeur. L’échelle de notation relève soit de l’appréciation : A : Assez bien B : Bien C : Mauvais Soit une fourchette qui varie entre zéro et vingt (0 à 20), soit un pourcentage : 80%, 100%. La grille de correction est un outil d’appréciation d’un critère à travers des indicateurs précis. Elle constitue un outil d’aide à la correction des productions des élèves. Dans le système scolaire, la notation, outil habituel et prédominant est peu faible. La docimologie révèle des représentations, des attentes sociales, culturelles et idéologiques, un contexte historique, une idée des sciences de l’éducation. Le test Il s’agit d’un mot d’origine anglo-saxonne, importé par les anglicistes et les germanistes. Le test se compose d’une batterie d’exercices répondant à des critères bien précis, il doit comporter un nombre suffisant 32 Les critères docimologiques de l’évaluation d’items pour fournir des résultats stables. Il doit mesurer le censé être mesuré, il sert à évaluer le degré de connaissance d’une langue étrangère que possède l’élève.« L’utilisation d’une batterie de tests reste le meilleur moyen d’évaluer les connaissances acquises avec le maximum d’objectivité. »1 Les types de tests ou d’examens qui évaluent le degré de sa connaissance de la langue déterminent souvent les méthodes et les techniques que les enseignants utilisent pour l’enseigner. Le testing est une activité qui peut occuper une bonne portion de l’ensemble des tâches professorales, soit par l’administration des tests, soit par le choix des tests ou par leur composition même. Il est donc important que le maître sache ce que contiennent les tests et de quelle façon ils sont différents les uns des autres. 2 Les tests de langue diffèrent les uns des autres en fonction de leurs objectifs, leur élaboration, et leur acceptabilité. Les types et les caractéristiques d’un test Il existe quatre types de tests de langue différents en fonction de : — L’élaboration (les types de questions, de réponses, de correction et de barème proposés). — L’acceptabilité (le but dans lequel il est utilisé). — Les objectifs (ce que nous espérons tester). Les tests d’aptitude Ces tests ont une valeur pronostic et permettent de savoir ce qu’un élève est capable d’apprendre, et de porter un jugement sur ses chances de réussite. Les tests d’orientation ou de niveau de connaissance Leur but est de découvrir la somme de connaissances d’une langue que l’élève a acquise, ces tests n’ont pas de relation avec ce que l’élève a étudié, ils ne sont pas liés aux cours et aux méthodes donnés par l’enseignant. 1 I-Y, LANCHEC. « Psycholinguistique et pédagogie des langues », France, PUF, 1976, p.130 2 W-F, MACKEY. « Principe de didactique analytique, analyse scientifique de l’enseignement des langues », Paris, PUF, 1972. p.540. 33 Yasmine ADIB Les tests d’acquisition Ce sont des épreuves de contrôle qui portent sur la matière enseignée et servent à évaluer la somme des éléments linguistiques et communicatifs acquis grâce à une méthode ou une technique utilisée par l’enseignant. Les tests diagnostiques Ils permettent aux enseignants de déterminer ce qu’il reste à enseigner aux élèves et recueillir des renseignements sur leurs connaissances linguistiques pour révéler les fautes les plus élémentaires. Conclusion En résumé, la docimologie est la science qui a pour objet l’étude systématique des examens en particulier des systèmes de notation et du comportement des examinateurs et examinés. Pour qu’un test dénote d’un bon sens et convienne exactement à l’évaluation, il doit répondre aux exigences des critères docimologiques qui sont : la validité, la fidélité et l’objectivité. La note est la forme principale d’évaluation des élèves. Elle s’intègre dans un système de sanctions positives et négatives. Elle récompense les progrès dus aux efforts. Nous avons pu voir, grâce aux différentes définitions que le mérite de la note c’est de sécher l’élève et de le renvoyer à luimême. L’enseignant note, juge, oriente et certifie les apprenants à différents niveaux, il les classe et les sanctionne par la réussite ou l’échec. 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La réforme de l’enseignement s’inscrit dans le cadre d’une dynamique nouvelle qui vise la qualité de l’enseignement, la transmission des savoirs, savoir-faire, attitudes et valeurs fondamentales. Un apprentissage par les compétences qui permettra aux apprenants d’intégrer des connaissances, savoir et savoir-faire dans des situations réelles. Doter les apprenants d’un ensemble de compétences pour leur insertion dans la vie sociale et économique. C’est à cela que vise l’approche par les compétences. Comment se fait l’enseignement/apprentissage avec cette nouvelle approche ? Comment l’apprenant acquiert-il des compétences ? De quels types ? Qu’en est-il de l’évaluation ? Comment évaluer dans une approche par compétences ? Peuton évaluer des compétences ? الملخص وان اإلصالح في التعليم.في هذه السنوات األخيرة عرف النظام التعليمي الجزائري تغيرات جذرية يسجل في إطار جديد يهدف إلى نوعية التعليم ونقل المعارف والمهارات والكفاءات والقيم األساسية .التي ستسمح للمتعلمين باكتساب معارف ومهارات في وضعية حقيقية تخصيص المتمدرسين بمجموعة من القدرات لتكييفهم في الحياة االجتماعية واالقتصادية وهذا هو التعليم بهذه المقاربة الجديدة؟ وكيف يستطيع المتعلم/ فكيف يتم التدريس.هدف المقاربة بالكفاءات اكتساب الكفاءات؟ ومن أي نوع هي هذه الكفاءات؟ وماذا عن ما يخص التقويم؟ وكيف نقوم بالتقويم عن طريق المقاربة بالكفاءات؟ وهل بإمكاننا تقويم الكفاءات؟ L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … Autrefois, dans l’enseignement traditionnel, la priorité était donnée au savoir sur le modèle encyclopédique. L’enseignant, dispensateur de ce savoir, était chargé de le transmettre et l’apprenant, récepteur, prenait note, se l’appropriait pour le restituer au moment des contrôles, sans appréciation des acquis dans la durée. Le savoir était considéré comme une fin. Dans cet enseignement, il n’y avait pas de communication ni entre l’enseignant et l’apprenant, ni entre les apprenants. L’objectif était de couvrir la matière en accumulant le plus de connaissances possibles. À ce propos, Roegiers (2000 :16) déclare : (…) Les apprenants habitués, dès leur jeune âge, à aborder des savoirs de façon séparée, continuent souvent à raisonner plus tard de façon cloisonnée, même dans les situations simples. Des recherches internationales comme celle de Carraher & Schliemann (1985), Sotto (1992) ou encore Stomayor (1995) ont par exemple montré combien il existait à travers le monde ce qu’on appelle des « analphabètes fonctionnels », c’est-à-dire des personnes qui ont acquis des connaissances à l’école, mais qui sont incapables d’utiliser ces connaissances dans la vie de tous les jours. Le système éducatif algérien a connu ces dernières années une réforme qui a touché les fondements même des finalités éducatives. Il semblerait vouloir rendre l’école plus performante et son enseignement plus efficace. De ce fait, l’approche par les compétences et la pédagogie du projet, en tant que nouveaux cadres méthodologiques de l’enseignement (outils d’apprentissage, d’accès aux savoirs, de construction des connaissances et de communication interculturelle) semblent, selon les initiateurs de cette réforme, les cadres les plus appropriés, les plus à mêmes de relever ces nouveaux défis. L’approche pédagogique par les compétences L’approche pédagogique par les compétences est « une pédagogie de construction de compétences qui se préoccupe de doter les apprenants de moyens d’apprendre, d’apprendre à agir et d’apprendre à être » (Bosman-CH, Gerard-M, RoegiersX, 2000 :66). Ceci signifie que cette pédagogie permet 39 Samia AID d’ « apprendre à apprendre » (Zimmerman-B.J, Bonner-S, Kovach-R, 2000 :2), d’apprendre à partager et à échanger mais également à coopérer avec les autres. Pour une meilleure gestion des apprentissages, on part du principe que l’apprenant doit gérer ou autoréguler lui-même son apprentissage, ce qui certainement renforcera son autonomie intellectuelle. « Développer des compétences à l’école, ce n’est plus donc apprendre aux apprenants une pensée unique et standardisée-la bonne réponse-mais les inciter à analyser une situation, dans toutes ses dimensions ». (Bosman-CH, GerardF.M, Roegiers-X, 2000 :99-100) En outre, l’approche s’appuie sur une conception de l’apprentissage, de l’enseignement qui est à la fois cognitiviste et socioconstructiviste. En d’autres termes, elle vise à relier les apprentissages acquis et les divers contextes d’exploitation hors de l’école dans la mesure où : — Dans la perspective cognitiviste de l’apprentissage, on accorde une certaine importance aux stratégies dans l’assimilation, l’acquisition et le réinvestissement des connaissances acquises et les compétences développées à l’école ; — L’apprentissage, dans la conception cognitiviste, est considéré comme un processus dynamique de la construction des savoirs. En effet, un intérêt essentiel est à la fois porté sur le processus d’apprentissage mais aussi sur les savoirs eux-mêmes ; — Dans l’optique socioconstructiviste, on met l’accent sur l’interaction avec les autres, à savoir, sur des relations pédagogiques médiatrices avec la présence d’un enseignant-médiateur et d’un groupe-classe. L’apprenant sera dans ce cas motivé, actif et constructif, ce qui favorisera une construction de savoir visant à un meilleur développement des compétences. Ces dernières « supposent l’intégration fonctionnelle de ressources cognitives diverses (savoir, logique naturelle, concepts, schèmes spécifiques, capacités de régulation et coordination de l’ensemble) » (Paquay-L, Altet-M,Charlier-E, Perrenoud-PH,2001 :249). 40 L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … L’approche par les compétences a des répercussions sur la façon dans le sens où les programmes ne se font plus en termes de contenus, mais plutôt par des savoir-faire à installer chez l’apprenant dans le but de résoudre des situations-problèmes. Définition de la compétence Selon De Ketele (2001 :65) « la compétence est un ensemble ordonné de capacités (activités) qui s’exercent sur des contenus dans une catégorie ordonnée de situations pour résoudre des problèmes posés par celle-ci ».Dans ce sens, la compétence est un savoir-agir qui intègre un ensemble de capacités et qui s’exerce dans des situations-problèmes bien précises, d’où la délimitation de contenus et de capacités mobilisables, qui se combinent en objectifs spécifiques à atteindre. Ainsi, la compétence est dépendante du contexte où elle se manifeste, en tenant compte que « c’est l’apprenant qui est acteur de la situation » (Roegiers, 2000 :127) dans la mesure où elle l’amène à mobiliser diverses capacités et connaissances en situation dans le but d’intégrer des acquis à long terme et de manière significative. Caractéristiques d’une compétence Parmi les caractéristiques essentielles caractérisant une compétence donnée dans son ensemble, il ya : Mobilisation d’un ensemble de ressources Cet ensemble de ressources est composée de connaissances, des schèmes, de capacités. Ces ressources variées sont à leur tour mobilisées en situation répondant à divers paramètres et exigences, du moment que l’apprenant est amené à être confronté à une variété de situations d’intégration grâce auxquelles il crée des liens entre divers apprentissages acquis de façon significative. Compétence à caractère disciplinaire Ce caractère disciplinaire se produit au fait qu’une compétence appartient à une catégorie de situations correspondant à des problèmes liés à la discipline étudiée ou 41 Samia AID enseignée et qu’elle repose aussi nécessairement sur des connaissances disciplinaires. Compétence à caractère finalisée Ce caractère se traduit par le fait que « cette mobilisation (de diverses ressources) ne se fait pas gratuitement, fortuitement, scolairement même » (Roegiers-X, 2000 :68).Ceci explique que toute compétence a toujours une fonction, un intérêt et une utilité sociale, d’où le caractère significatif des apprentissages en lien avec la réalité. Toute compétence est ainsi « inséparable de la possibilité d’agir » (Ibid). Typologie des compétences Il existe d’une manière globale trois types de compétences, qui sont : Compétence disciplinaire Les compétences disciplinaires sont liées à la discipline étudiée ou enseignée. « Elles exigent une appropriation des savoirs entourant chaque discipline » (Paquay-L, Altet-M, Charlier-E, Perrenoud-PH, 2001:69). Ex : des compétences communicationnelles, des compétences linguistiques, textuelles, etc. Compétence culturelle ou de communication C’est le fait d’acquérir un savoir-être, un savoir-vivre, un savoir devenir et un savoir se comporter en établissant des relations avec autrui. C’est aussi un savoir-intégrer pour résoudre des situations-problèmes. Ce savoir-être est en permanence sollicité, ce qui permettra aux apprenants d’accomplir des tâches à travers la réalisation de projets en étant coopératifs les uns avec les autres. Exemple : développer des connaissances sur d’autres cultures. C’est ainsi apprendre à établir des relations basées sur le respect de l’autre et le partage coopératif. 42 L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … Compétence transversale Cette compétence nécessite des compétences dans d’autres domaines et disciplines, autres que ceux et celles étudiés et enseignés. Les compétences transversales sont nécessaires à la réalisation de projets car l’approche par les compétences nécessite une situation de résolution de problème, ce qui amène l’apprenant à revoir d’autres domaines et disciplines lors de la réalisation de son projet. Exemples : connaissances sur les fléaux sociaux, sur l’outil informatique, sur la géographie et l’histoire…etc. La capacité et aptitude de l’apprenant à présenter son opinion sur un thème donné en l’étayant par des arguments et des exemples puisés de ses connaissances dans divers domaines. Enseignement/apprentissage dans l’approche par les compétences Tout enseignement/apprentissage vise à installer chez l’apprenant, une compétence qui permet une application des connaissances acquises en classe à des situations rencontrées ultérieurement en classe ou en hors de la classe. C’est l’une des compétences que l’on veut installer chez lui. En effet, si l’apprenant n’utilise pas cette compétence, elle risquerait à la longue de s’oublier. Mais il est constaté que ces compétences et connaissances acquises ne sont utilisées qu’en classe. Confronté à d’autres situations, l’apprenant/élève est incapable de réaliser le transfert attendu comme s’il n’avait rien assimilé. Philippe Meirieu (1996 :54) définit la notion de transfert de connaissances comme : « le mouvement par lequel un sujet s’approprie les savoirs, les intègre à sa personne en les réutilisant à sa propre initiative ». Pour l’auteur, mettre l’apprenant en projet1, c’est lui faire saisir toute utilité du matériau qui lui est enseigné en le La pédagogie du projet met l’apprenant au centre de l’apprentissage. Le projet est un ensemble d’activités qui met l’apprenant face à des situations d’apprentissage, pour une réalisation concrète de tâches. Le but étant 1 43 Samia AID préparant à surmonter les éventuels obstacles rencontrés en dehors de la situation d’apprentissage. L’action didactique consiste à organiser l’interaction entre un ensemble de documents ou d’objets et une tâche à accomplir. En outre, Meirieu soutient que ce transfert ne peut avoir lieu que si l’apprenant reconnait les points communs entre la situation d’apprentissage et la situation dans laquelle il (l’apprenant) réinvestit les connaissances apprises pour accomplir une tâche, et réaliser ainsi son projet. L’activité d’expression écrite offre un exemple concret de ce type de situation. Les diverses démarches de projet sont autant de manières de confronter l’apprenant à des situations et à des problèmes complexes comme la rédaction d’un texte descriptif ou argumentatif. C’est là le but de l’approche par les compétences, où l’apprenant gère son apprentissage. Le véritable apprentissage, c’est d’amener l’apprenant face à des difficultés, face à des situations complexes. C’est comme ça qu’il peut assimiler le savoir. Faire passer l’apprenant d’une phase de dépendance à une phase d’autonomie. Essayer de se construire par ses propres stratégies pour atteindre les objectifs fixés. L’enseignant doit maitriser la didactique, doit guider, orienter, animer, faciliter, aider l’apprenant à surmonter les obstacles et développer des stratégies d’apprentissages. Il doit utiliser le savoir comme une ressource, considérer l’élève/ l’apprenant comme un acteur de son propre apprentissage afin qu’il puisse développer des compétences par « le savoir intervenir et agir ». Apprendre à parler et à écrire une langue c’est d’abord apprendre à communiquer. Il faut fournir à l’apprenant les outils nécessaires à la réalisation de sa tâche en le plaçant dans une situation qui lui permettra de mettre en œuvre des savoirs, savoir-faire et d’attitudes pour assurer la maitrise des compétences fixées. C’est en interaction constante qu’il devra construire ses connaissances. L’enseignant doit proposer des activités correspondant au besoin d’agir et de créer de l’apprenant. Ce dernier devient ainsi d’acquérir des compétences grâce à la réalisation de situations-problèmes s’inscrivant dans un contexte bien déterminé. 44 L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … un acteur dynamique, qui apprend progressivement à gérer son savoir par son apprentissage, à son rythme avec l’aide de l’enseignant. La mission de l’enseignant n’est plus de délivrer un savoir que l’on trouve dans les livres, mais d’entreprendre une recherche personnelle pour déterminer, après avoir étudié son public, quel est le savoir-faire « faire apprendre » qui correspond le mieux au processus d’apprentissage. Impliquer dans l’appropriation de connaissances, etc. Proposer des activités de telle sorte que l’apprenant puisse gérer seul son apprentissage. En conséquence, l’enseignant n’interviendra que si l’apprenant fait appel à lui en cas de blocage. Si l’enseignement a pour fonction de permettre à l’apprenant de mieux organiser et de rentabiliser ses apprentissages, alors une démarche d’enseignement doit être lisible pour l’apprenant. Cette lisibilité méthodologique lui permet de savoir quelle est la finalité de chaque activité, comment elle se relie aux autres et comment on vise à atteindre les objectifs fixés. On fait l’hypothèse , de bon sens ( ce qui ne saurait certes suffire !) qu’une lisibilité de type, qui permet à l’apprenant de savoir à chaque moment, pourquoi il fait ce qu’il fait, est de nature à favoriser les processus d’apprentissage, au style d’apprentissage près. (Beacco, 2007 :26) L’évaluation Dans le cadre de l’approche par les compétences, la pédagogie du projet implique une évaluation continue en aidant l’apprenant à acquérir des savoirs, savoir-faire et savoir-être en développant des compétences. Évaluer n’est pas noter comme on le croit trop souvent. L’enseignant n’évalue pas l’apprenant pour le sanctionner, le classer dans un niveau définitif par l’attribution d’une note ou d’une appréciation. Évaluer, c’est identifier, déterminer et définir les lacunes de l’apprenant pour y remédier éventuellement. C’est aussi déceler ses capacités pour les améliorer et les développer. L’enseignant n’évalue que ce qu’il a enseigné. 45 Samia AID L’évaluation sera régulière. Elle accompagne l’apprenant dans tout son cursus d’apprentissage : diagnostique au début, formative en cours de séquence et sommative à la fin. L’évaluation diagnostique On ne parle pas d’évaluation pronostique dans l’approche par les compétences. Ce terme étant remplacé par l’évaluation diagnostique. Celle-ci se fait par le biais d’un profil d’entrée, au début du projet, en faisant un état initial des connaissances élémentaires dont dispose l’apprenant. En d’autres termes ceci est en réponse à la question suivante : est-ce que l’apprenant a suffisamment de connaissances pour aborder ce sujet ? L’évaluation formative Elle est intégrée aux apprentissages et permet de réguler un enseignement et de remédier aux difficultés en cours d’apprentissage. Elle comprend trois moments : — Avant l’apprentissage : vérification des acquis préalables, portrait socio-affectif de l’apprenant, validation de la planification ; — Pendant l’apprentissage : observer l’apprenant en train d’apprendre, évaluation de sa performance et réajustement au fur et à mesure ; — Après l’apprentissage : vérifier l’atteinte des objectifs avec l’intention de corriger les lacunes s’il y a lieu. L’évaluation formative permet à l’enseignant de guider l’apprenant en lui donnant des directives et des orientations qui l’aideront à surmonter ses lacunes et difficultés. En outre, cette évaluation a pour but d’informer l’enseignant et l’apprenant du degré de maitrise des compétences en cours de développement. L’évaluation est ainsi « formative et interactive ». (Paquay-L, 2001 :175) Par ailleurs, elle nécessite une grande disponibilité de l’enseignant « Elle assure le repérage, la mise à jour, l’identification et l’analyse des difficultés cognitives de chaque apprenant, à élaborer des dispositifs de remédiation ».(MinderM,1999 :288) 46 L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … En somme « C’est donc essentiellement dans une perspective d’une démarche de diagnostic-remédiation qu’il faut savoir l’évaluation formative » (Roegiers-X, 2000 :257). Il importe donc de repérer les forces et les faiblesses des apprenants en se basant sur des appréciations sans pour autant leur attribuer une note chiffrée. L’évaluation sommative Permet de faire le point à la fin d’un projet pour mesurer la maitrise des compétences attendues. Elle est basée sur l’élaboration de tests et d’examens. Elle intervient au bout d’un trimestre, d’une année pour établir les profils de sortie des apprenants en leur attribuant des notes chiffrées. Cette évaluation permet aussi de prendre une décision pédagogique : régulation, remédiation ou poursuite de l’apprentissage. Elle constitue ainsi de repère pour l’apprenant et ses parents ainsi que pour l’enseignant et l’administration. L’évaluation formative L’évaluation peut être faite par l’enseignant, par l’apprenant lui-même ou par les autres apprenants de la classe. On aboutit ainsi à trois catégories possibles : — L’évaluation magistrale où l’enseignant évalue une tâche effective ; — L’auto-évaluation où l’apprenant évalue sa propre tâche pour une meilleure prise de conscience de ses erreurs, dans le but de se corriger et d’améliorer son apprentissage. Ceci renforcera son autonomie intellectuelle ; — La co-évaluation où la tâche est évaluée par la classe ou d’un groupe d’apprenants, en dehors de l’enseignant et de l’élève qui l’a effectuée. Si un type d’évaluation est employé de façon continue, il devient monotone et lassant. L’idéal est donc de varier les types d’évaluation et de les faire alterner dans la classe. Il est nécessaire de construire des grilles d’évaluation dont chaque item constitue à lui seul un critère. En évaluation formative, des 47 Samia AID listes de vérification permettront à l’apprenant de revoir sa production (écrite ou orale) afin de l’améliorer. La différence entre une grille d’évaluation formative et une grille d’évaluation sommative est que dans cette dernière, on attribue à chaque critère une note chiffrée. On mesure la maitrise d’une compétence à travers « un produit », un résultat. Pour cela, il est important de dégager des critères d’évaluation. En d’autres termes, il s’agit de nommer tous les paramètres qui permettent de vérifier si une compétence est maitrisée. Énoncer de façon claire et précise, ces critères aideront les enseignants à sélectionner, avant chaque projet ou production à réaliser par l’apprenant, les éléments les plus importants en fonction des apprentissages visés. Ces critères permettent également d’évaluer, en fin d’apprentissage, le niveau de réussite d’une compétence. Conclusion L’approche pédagogique par les compétences place celui qui apprend au sommet du triangle didactique (c’est l’apprenant qui devient le nouveau centre d’intérêt), confère à celui qui enseigne le rôle de guide, dans la construction des connaissances de l’apprenant. Elle vise l’acquisition de connaissances, savoirs, compétences que l’apprenant réinvestit dans des situations réelles, dans des situations-problèmes. Malheureusement, il suffit de lire les copies des élèves et des étudiants pour se rendre compte de leurs lacunes et difficultés car ils arrivent mal à réinvestir le savoir et les connaissances apprises, dans des situations réelles, complexes. Pour la plupart, leurs copies sont pleines d’erreurs et d’incohérences. Ils ne maitrisent pas totalement la compétence linguistique et surtout pas la compétence communicationnelle. Les enseignants, quant à eux, se plaignent du fait que non seulement ils n’ont pas été associés à ces réformes, mais qu’ils n’ont pas été formés à de telles conceptions et pratiques. Ils s’indignent : « Nous nageons », « Nous pataugeons », « Nos inspecteurs eux-mêmes sont incapables de nous apporter les moindres clarifications. Leurs discours, sont contradictoires d’une conférence pédagogique à l’autre ». Les programmes d’enseignement universitaires l’attestent aussi. 48 L’évaluation et l’approche par compétences dans l’enseignement/ … En somme, nous dirons que pour développer chez l’apprenant des compétences (linguistiques, communicationnelles, etc.), il faut le confronter à la difficulté et ne pas morceler son apprentissage en situations éloignées, dans le temps, les unes des autres. Bibliographie — BEACCO ET AL., Jean-Claude, (2007), L’approche par les compétences dans l’enseignement des langues, Didier (Coll.Langues &Didactique), Paris. — BOISSONETTE, S., & RICHARD, M., (2001), Comment construire des compétences en classe. Des outils pour la réforme, Les éditions Chenellière/McGraw-Hill, Montréal. — BOSMAN, CH., GERRARD, M., ROEGIERS, X., (2000), Quel avenir pour les compétences ?, 1 ère édition Boeck université, Bruxelles. — MEIRIEU, PH., (1987), Apprendre…oui, mais comment ?, 20e édition ESF, 2007. (Coll. Pédagogies), Paris. — MEIRIEU, PH., DEVELAY, M., DURAND, C et MARIANI, Y., (1996), Le concept de transfert de connaissances en formation initiale et en formation continue, CRDP, Lyon. — PAQUAY, L., ALTET, M., CHARLER, E., PERRENOUD, PH., (2001), Former des enseignants professionnels, quelles stratégies ? Quelle compétence ?, 3e édition De Boeck Université, Bruxelles. — ROEGIERS, X., (2000), Une pédagogie de l’intégration de compétences et intégration des acquis dans l’enseignement, Bruxelles : De Boeck Université. — ZIMMERMAN, B-J., BONNER, S., KOVACH, R, (2000), Des apprenants autonomes, autorégulation des apprentissages, Ed Boeck, Bruxelles. 49 Noureddine BAHLOUL Université d’Annaba [email protected] Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives et l’appropriation du savoir grammatical Résumé L’activité de l’évaluation en contexte d’enseignement/apprentissage demeure de tout temps un sujet de débat entre concepteurs de manuels, didacticiens et praticiens du terrain. La tradition scolaire en contexte scolaire algérien a perduré des démarches de classe ayant privilégié l’évaluation sommative comme outil de mesure exclusif. Cette posture méthodologique, moins fructueuse en termes de rentabilité, a eu un impact considérable sur l’appréciation des apports individuels des groupes-classes. Un regard critique sur l’évaluation de l’activité de grammaire en classe de 4ème année de cycle moyen est à même de nous renseigner sur l’articulation entre les modalités d’évaluation, leur justesse et les contenus enseignables que propose le manuel scolaire. الملخص يبقى نشاط التقويم في سياق التعلم والتعليم موضوعا للنقاش بين واضعي الكتب .المدرسية والمهتمين بالتعليمية وممارسي التعليم في الميدان لقد كرس التعليم التقليدي المدرسي في الجزائر خطواته العملية داخل الفصل الدراسي ويعد هذا اإلجراء المنهجي أقل.بطريقة التقويم التلخيصي وسيلة وحيدة لقياس النجاعة وقد كان له تأثيرا معتبرا على تقدير اإلسهام الفردي،تحصيال من حيث المردودية .للمجموعات المدرسية Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … La didactique des langues étrangères ne cesse de porter un regard critique sur les situations de classe qui se caractérisent d’une manière ou d’une autre par leur complexité. Celle-ci se justifie du point de vue de la transposition didactique des savoirs savants et de leur optimisation concrète sur le terrain. Le formateur en tant que médiateur et passeur de langue, met au point des objectifs d’apprentissage dans le cadre des activités pédagogiques qu’il entreprend et dont il définit et spécifie les outils de mesure et d’appréciation. Sur ce point, veut-on souligner que l’activité d’évaluation est une pratique de classe qui revêt un intérêt crucial pour le progrès de l’apprenant et sa réussite scolaire. Vues sous cet angle, les pratiques évaluatives participent à cet acte formatif qui s’inscrit de manière inéluctable dans le continuum de l’apprentissage (CUQ J-P : 2002). Partant de cet état de fait, faudrait-il supposer l’idée que toute action pédagogique demeure tributaire du seuil de mise en application de l’appareillage de contrôle et de son degré d’efficacité pour la validation des « savoirs enseignés et leur légitimation » (Y. CHEVALARD : 1985). Serait-il donc un leurre de penser que l’accès aux savoirs capitalisables s’effectuerait sans la mise en exécution des procédés de contrôle de l’action pédagogique ? Des entrées à la formation scolaire par la pédagogie du projet et l’approche par les compétences en contexte algérien, vont nous permettre d’observer et d’identifier sur le terrain l’implication du dispositif d’évaluation et son impact sur les pratiques pédagogiques conduites en classe de français langue étrangère (FLE). À ce sujet, nous voudrions rendre compte d’une synthèse de lecture sur l’activité de grammaire au niveau du manuel scolaire de la 4ème année moyenne ainsi que son implication didactique dans le cadre des pratiques de classe. Notre objectif est de déterminer les modes d’évaluation en fonction des contenus enseignables en matière de grammaire, ce qui nous permettra de définir a fortiori l’ancrage méthodologique de cette activité métalinguistique et son apport en tant que composante contributoire de la compétence communicative. 51 Noureddine BAHLOUL L’impact de l’évaluation en contexte de classe Les pratiques évaluatives, telles qu’elles sont mises en situation d’enseignement /apprentissage, se caractérisent de manière singulière par leur ancrage motivationnel lequel agit sur l’acte de « l’apprendre ». Elle se définit « comme un ensemble de processus par lesquels on mesure les effets des actions menées sur un public déterminé » (L. PORCHER : 1994). L’intérêt porté à cette pratique de classe n’est pas fortuit du fait que le succès scolaire se mesure de facto par la manière dont s’exécute cette activité au sein du projet pédagogique. La mise en application systématique des procédés de contrôle au sein des activités de classe, permet de rendre compte de la capacité voire de l’aptitude de l’apprenant à mettre en exécution des connaissances stratégiques qui ont été soumises à une appréciation systématique des contenus notionnels que soustend la progression pédagogique en vigueur . L’apprentissage d’une langue cible, en l’occurrence le FLE, a pour objectif de doter l’apprenant de savoirs procéduraux lui permettant d’agir dans la langue et par la langue. Les savoirfaire traduisent des modes de pensée qui se convertissent en termes d’outils conceptuels opératoires voire d’objets de savoir réutilisables en situation d’échange entre groupes d’individus. L’enseignement des langues étrangères comme d’autres disciplines, repose sur un des objectifs clés. Ces savoirs sont à même de faire l’objet d’une exécution des procédures évaluatives de façon progressive et continue. Un apprenant dont les tâches ne font pas objet de mesure et de contrôle n’est pas situé par rapport aux progrès qu’il réalise. Au contraire, il peut adopter un comportement passif parce qu’ « il aura appris à ne pas apprendre, c’est-à-dire à ne pas changer. Il a donc appris » (TROCMÉ-FABRE, H : 1987). Cette passivité peut traduire une situation d’échec de l’apprenant et une rupture avec le contrat didactique dans son contexte écologique, soit la classe où il est supposé réaliser des performances en exerçant « son métier d’élève » (PERRENOUD : 1994). Il est difficile de concevoir une mise en œuvre d’un dispositif pédagogique sans l’intégration de 52 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … l’évaluation en tant que tâche constitutive de l’ossature du projet de classe en cours de réalisation ou en devenir. Le travail collaboratif ainsi que les prises d’initiatives individuelles s’inscrivent dans un parcours de formation dont l’enseignant régule les procédures de médiation pour une appropriation optimale des savoirs savants. L’apprenant qui prend conscience des objectifs et des buts qui sous-tendent son propre apprentissage, est en mesure de procéder de manière réfléchie à un exercice d’auto-évaluation. Celui-ci est à définir comme « un mode de régulation de la classe que l’enseignant emploie pour rectifier son cours, le rééquilibrer (…) conduire son groupe ». (L. PORCHER : 1996). Dans le même contexte et pour paraphraser une idée de (L-J GAJO : 2000), tout apprenant engagé dans un processus de formation au sein de l’école comme institution social, est en fait, un citoyen en devenir. Les pratiques évaluatives sont aussi des procédures de jugements et d’appréciations pour la promotion sociale et l’accès à la certification. À ce propos, nous convenons dans le sens de (Y. CHEVALARD : 1985), avec le principe selon lequel le savoir est validé institutionnellement et admis dans sa légitimation par rapport à son impact social. L’école permet donc le transit des « savoirs à savoir ». Faudrait-il que les enseignants et les formateurs arrivent à cibler et cadrer les savoirs à transmettre, à se fixer des objectifs d’apprentissage bien précis et à intervenir sur les tâches pédagogiques les plus préoccupantes : Quoi évaluer ? Quel (s) type (s) d’évaluation ? Et comment évaluer. Que faut-il évaluer : les connaissances ou les compétences ? À quel (s) moment(s) ? Ceci permet d’attirer l’attention sur les modes d’évaluation à négocier en référence aux contenus ciblés en situation d’enseignement/apprentissage. Une donne reste incontestée : « L’étude des outils d’évaluation constitue donc un bon analyseur des contenus d’enseignement et des compétences visées. »(C. GARCIADEBANC : 1999). L’évaluation fait partie intégrante de l’action pédagogique dans le système éducatif et s’articule autour du rapport ternaire : savoir-savant/savoir à savoir/savoir-faire. Ainsi, les objectifs d’apprentissage assignés à l’enseignement des langues dont le français, ont-ils à effectuer un 53 Noureddine BAHLOUL décloisonnement par rapport à des pratiques évaluatives ritualisées : bien souvent, le mode d’évaluation sommative l’importe sur le type formatif lequel est fondamental du fait qu’il rend compte des difficultés des groupes-classes et de leurs dysfonctionnements langagiers résistant à l’apprentissage. Ceci est à même de nous permettre de réfléchir aux postures méthodologiques consacrées à l’évaluation de l’activité de grammaire en contexte algérien. Les pratiques de la grammaire en contexte scolaire algérien Les pratiques pédagogiques consacrées à l’activité de grammaire en milieu scolaire s’inscrivent de façon singulière dans la tradition d’une grammaire scolaire privilégiant un enseignement directif et systématique de la langue, en l’occurrence le français. Face à un public non natif, selon le milieu géographique, - et en référence aux sphères linguistiques en articulation dans le paysage sociolinguistique algérien -, enseignants et formateurs interviennent sur le terrain pour enseigner le « bon usage » de la langue à partir d’une approche descriptive qui se résume à une théorisation sur le fonctionnement des parties du discours dans le cadre d’une analyse grammaticale visant la maîtrise de la norme objective. L’enseignement de la grammaire semble bénéficier, de tout temps et en tout lieu, d’un étiquetage le définissant comme étant une tâche moins interactive pour ne pas parler de « cours ennuyeux ». Un nombre de facteurs est à même d’alimenter le débat dans ce sens, à savoir la complexité des contenus, les outils méthodologiques mis en exécution, la formulation des consignes ainsi que la question problématisant cette préoccupation majeure du savoir-faire/savoir-agir de l’enseignant. De même que les pratiques de classe consacrées à l’enseignement de la grammaire, si elles sont jugées inopérantes, cautionnent quelque part cette résistance dont l’impact est mesurable du côté de l’apprenant. Le discours métalinguistique voire les difficultés d’ordre terminologique négociées à l’école comptent parmi les contraintes pédagogiques responsables du rejet de la grammaire. 54 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … Ce constat nous paraît au titre d’un atout voire un véritable prétexte pour faire le point sur l’ensemble des contraintes pesantes sur la didactique de la grammaire de FLE, telle qu’elle est conduite dans son ancrage méthodologique dans le manuel scolaire algérien. Faudrait-il noter au passage une quasi-absence d’une démarche progressive par une entrée éclectique des grammaires notionnelle/fonctionnelle dépassant l’étude systématique de la langue. L’étude de la grammaire, c’est aussi le fait d’envisager le maintien d’une articulation entre les contenus enseignables et le métalangage grammatical qui se développe en situation de classe. Il s’agit là d’une donne cruciale en rapport avec le contexte d’apprentissage qui tient compte à la fois des aspects linguistiques et pragmatiques en tant que composantes de la situation de communication. En effet, « l’activité métalinguistique constitue l’essence même de l’interaction en classe de langue » (S. RUGGIA et J-P CUQ : 2008). Une lecture de la typologie des exercices du livre de la 4ème année moyenne permet de renseigner sur l’approche d’une grammaire explicite qui propose une constellation d’exercices au service d’une pratique systématique de la langue : on y trouve un nombre de consignes illustrant des exercices de types contraignant/semi-contraignant, exercices à trous lesquels sont d’une fréquence incontestée. Les objectifs d’apprentissage retenus pour l’activité de grammaire privilégient l’installation d’une compétence linguistique beaucoup plus que « des savoirs à savoir », soit « des savoirs sûr » pour reprendre un propos d’ (Y. CHEVALARD : 1985). Le savoir grammatical se construit à la lumière d’une instruction des règles normatives sur les faits de langue au niveau de la rubrique « Faisons le point ». Le discours métalinguistique quant à lui, use d’une terminologie qui, parfois peut donner lieu à une confusion dans la détermination et la spécification des parties du discours dans la phrase. Une illustration de mots ou d’expressions retenues dans le manuel, permet de rendre compte d’une terminologie moins précise pour l’analyse syntaxique. Quelques cas de figure : Nous retenons dans le manuel des écrits de types : « Quelle est la nature grammaticale des groupes de mots exprimant le but » (p. 151), « Dans quelle phrase l’idée 55 Noureddine BAHLOUL exprimée est-elle implicite ? Explicite ? » (p. 72), «Les homophones grammaticaux - classes grammaticales - » (p. 77), « Complète par l’articulateur logique qui convient » ( p. 52), « Dans le texte suivant, souligne les connecteurs logiques » ( p. 71), « Relève, dans chacun des énoncés, le thème et la thèse défendue » ( p. 32), « Complète chacune des phrases selon les indications données », ( p.49 ). L’expression « nature grammaticale » en tant que référent terminologique, est inappropriée ; le terme nature revoir à un trait grammatical, à une catégorie intrinsèque au mot. Faudrait-il sur ce point définir la relation syntaxique du rapport duel nature/ fonction au niveau de la phrase canonique du français ? Cette information, nous semble-t-il, est restée jusque-là ignorée dans le discours métalinguistique pour ce qui concerne le cours de grammaire. L’ensemble des termes mis en relief témoigne d’un usage terminologique à orientation éclectique dans sa conception méthodologique. Mais, il n’en est pas ainsi de la démarche préconisée par l’analyse grammaticale telle qu’elle est envisagée dans le projet pédagogique pris en charge par le manuel. Quand nous avons fait allusion au passage, à un enseignement explicite en matière de grammaire, nous voulions attirer l’attention sur une mise en œuvre d’une grammaire pédagogique, restrictive en termes de choix méthodologiques. Celle-ci vise, à notre sens, l’appropriation de « connaissances brutes » dans la langue, autrement dit « l’étude de la langue pour elle-même et en elle-même » pour dévier vers un postulat Saussurien qui n’est pas le moindre dans le cadre d’une analyse structurelle des faits de langue dans un système donné. Nous adoptons l’expression de « grammaire ordinaire » à l’instar de (R. PORQUIER : 2007) parallèlement à l’appellation « grammaire explicite ». Une pratique de la langue par une entrée à la grammaire ordinaire, permet d’intervenir, dans le sens de l’auteur, sur les structures de langage : aborder la langue dans ses aspects latents, sous-jacents au niveau des énoncés et des productions contextualités dans leur articulation avec l’oral et l’écrit. Le langage courant / langue soutenue sont des outils de réflexion sur les normes objectives/ subjectives et la question 56 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … des usages de ces normes et leur impact du point de vue de leur contextualisation. Place de l’évaluation dans le projet pédagogique de la 4ème année du cycle moyen Le manuel scolaire de la 4ème année se compose de trois projets lesquels sont construit à partir de 3 séquences. Chacune d’entre elles énonce des objectifs d’apprentissage qui mettent en exergue le passage de la documentation à la rédaction. Les activités métalinguistiques sont abordées dans une rubrique dite « Des outils pour DIRE, LIRE et ÉCRIRE », ce qui laisse entendre une prise en compte de la jonction entre actes de parole et activité scripturale. Cependant, il n’en est pas ainsi. Les exercices de grammaire se limitent à la seule mise en exécution de la norme grammaticale (norme prescriptive) à laquelle sont initiés les apprenants. Il s’agit d’une évaluation des acquis intériorisés en matière de grammaire dans le cadre d’une analyse logique de constructions phrastiques complexes ou de résolution d’exercices de substitution sur la distribution des connecteurs. Autour de chaque projet pédagogique sont consignés trois modes d’évaluation. En premier lieu, il est fait allusion à une évaluation diagnostique introduisant la thématique du projet. Il s’agit d’une phase d’imprégnation qui permet à l’apprenant de découvrir des écrits thématisés et de s’exercer à des tests visant la compétence de la compréhension et de la production. Il est initié à la typologie textuelle de l’argumentation, un objectif d’apprentissage pris en compte dans tous les contenus du manuel. En second lieu, nous retenons à la fin de chaque projet, une rubrique nommée « Atelier d’écriture ». Elle propose un exercice d’auto-évaluation sur un ensemble d’éléments axiologiques, en tant que savoirs et connaissances articulant tout le projet pédagogique. Il est question de grille d’évaluation des connaissances soumises à l’appréciation l’apprenant. Au terme de chaque projet, il est proposé à l’apprenant des activités dans le cadre d’un exercice de contrôle des connaissances « Je me prépare au brevet ». Cette tâche pédagogique se conçoit au titre d’un exercice de rappel des connaissances supposées être assimilées et acquises par l’apprenant. Il lui est donné l’occasion de vérifier, de 57 Noureddine BAHLOUL contrôler et de valider l’intégration des savoirs enseignés et des connaissances capitalisées dans son parcours de formation et par rapport à « son itinéraire d’apprentissage » (A. COÏANIZ : 1996). En ce sens, les compétences acquises ont-elles un impact en termes de rentabilité. Le manuel scolaire est un outil de connaissance, un outil pédagogique qui permet d’assurer une médiation pratique entre l’apprenant non expert et l’enseignant en qualité de guide et de facilitateur d’apprentissage. À ce propos, veut-on souligner l’importance, en termes d’articulation, entre les objectifs d’apprentissage retenus dans les orientations méthodologiques du manuel et les contenus de ces derniers. L’enseignement du français est conduit dans le cadre d’une méthodologique de type éclectique. Il est question de mise en exercice d’un appareillage conceptuel inhérent à la pédagogie de projet en complémentarité avec les principes fondateurs de l’approche par les compétences. Un intérêt est porté aux procédures pédagogiques opérantes, permettant de développer chez l’apprenant des habiletés de savoir-faire en langue à partir d’une mise en œuvre d’un enseignement stratégique. Toutefois, cet objectif d’apprentissage n’est pas atteint du fait que les contenus curriculaires tels qu’ils se maintiennent dans les programmes officiels, ne permettent pas le transit méthodologique entre les grammaires de référence, les grammaires pédagogiques ainsi que les grammaires d’apprentissage. Force est de constater que les pratiques de la grammaire en contexte scolaire algérien demeurent inopérantes par leur cloisonnement méthodologique. Celui-ci est nourri par une tradition scolaire qui accorde plus d’attention à la norme prescriptive qu’à d’autres critères opératoires tels que le sens et la dimension énonciative en tant qu’éléments indiciels susceptibles de figurer dans une phrase. Il faudrait en effet, retenir d’une part, l’idée d’avoir Recours à tout ce qui peut donner du sens au travail sur la grammaire et la langue et, d’autre part, (penser à) déceler les caractéristiques cognitives des différents types d’exercices. (M. PANDANX : 1998). 58 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … À ce sujet, il nous a semblé intéressant de nous référer à certaines constructions phrastiques du manuel scolaire pour soulever de facto la prééminence du sens et son impact sur l’interprétabilité de la phrase. Les pratiques de classe en matière de grammaire sont à même de prendre en compte à la fois la systématicité des outils régulant la norme prescriptive mais aussi de porter un regard sur les aspects sémantico-discursifs enfuis dans la langue ; ce qui permettrait de sensibiliser les apprenants à la subtilité de la langue pour en faire leur outil de communication. En effet, Il serait plus opératoire de centrer les discours sur l’acquisition graduelle des règles, c’est-à-dire de la précision ou de la correction de la forme dans la production de la parole, plutôt que sur l’objet à apprendre : la grammaire. (J. COURTILLON : 2001). Soit une illustration d’énoncés du manuel : P1. « Si tu peux m’aider, ce sera formidable ». P.2 « La forêt amazonienne doit être sauvegardée parce que c’est « le poumon de la terre ». P.3 « Tu iras en voyage à condition d’avoir ton BEM ». P.4 « En cas de doute, demandez l’avis de votre médecin ». P.5 « Au cas où tu verrais Sonia, dis-lui de m’appeler ». Une analyse des énoncés retenus dans les pages 73 et 52 du manuel, soit les exemples P1 et P2, témoigne de l’emplois de tournures moins marquées du point de vue normatif : les marqueurs introductifs des deux subordonnées (ce / c’est) énoncent des usages appartenant à la langue courante ; ces emplois ne sont pas affectés de la norme distributionnelle attestée (ce est une contraction de (cela), alors que dans la p. 52, il est question d’introduire la subordonnée par une anaphore : «C’est le poumon de la terre / Elle est le poumon de la terre ». La question de registre de langue, permet en fait, de spécifier la conceptualisation des usages de la langue et de déterminer l’implication du sujet parlant par rapport à son projet expressif. Les particules syntaxiques introduisant une notion de condition (En cas de / Au cas où), sont des outils de langue marqués par le critère de fréquence en termes d’usage (En cas de) est d’un emploi plus soutenu que (Au cas où) lequel permet la réalisation d’énoncés prenant en charge diverses situation de communication du sujet parlant : Au cas où il pleut, je prends mon parapluie. Au cas où tu changes d’avis, tu me fais signe…, 59 Noureddine BAHLOUL etc. Ce type de tournure syntaxique peut faire l’objet d’une systématisation aidant à une maitrise progressive de la combinatoire. Par ailleurs, sommes-nous exposé dans la lecture des phrases (P3/P5) à des contraintes d’ambigüité d’ordre sémantique. P.3 « Tu iras en voyage à condition d’avoir ton BEM » / P.5 « Au cas où tu verrais Sonia, dis-lui de m’appeler ». Le jugement d’appréciation des faits de langue fait intervenir la norme et les critères de grammaticalité / acceptabilité. L’énoncé P5 est acceptable — bien sûr, il s’agit d’une construction normée — et peut se réaliser selon la norme prescriptive : « P3 bis. Tu partiras en voyage à condition d’avoir le BEM opposé à « Tu partiras en voyage à condition d’avoir un permis de conduire. L’ajout retenu, soit l’adjectif possessif (ton) dans P3. « Tu iras en voyage à condition d’avoir ton BEM », est d’un emploi indu si bien qu’il affecte l’énoncé dans sa grammaticalité. L’énoncé de départ ainsi réécrit : « Tu iras en voyage est un calque syntaxique emprunté à l’Anglais : « You walk along the road ». Le français admet beaucoup plus la tournure : « Tu partiras en voyage » opposée à « Tu iras en voyage ». Ces illustrations sont prétextes à une systématisation de la difficulté dans des contextes d’utilisation diversifiées, ce qui permettrait d’intervenir sur les normes et ou / la Norme attestée / d’usage et faire ainsi de la grammaire. La question est de savoir comment approcher les formes de la langue et discriminer leurs emplois pour identifier les variantes dans leur réalisation en vue de penser cette articulation entre langue et discours. Nos convictions nous permettent d’arguer que les pratiques évaluatives en matière de grammaire, ne couvrent pas l’ensemble des difficultés de la langue auxquelles se trouve exposé l’apprenant en situation d’apprentissage. Dans ce cas, convient-il d’attirer l’attention sur l’aspect complexifié des « savoir à savoir » et de leur ancrage du point de vue méthodologique. Faudra-t-il aussi que les intervenants du terrain, donc de la classe, soient capables de porter un regard critique et distancié par rapport à leurs habitus de classe dont il importe de revisiter les pratiques évaluatives en fonction des 60 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … objectifs d’apprentissage préalablement définis (N. BAHLOUL : 2008). La proposition d’exercices de discrimination entre norme prescriptive et norme d’usage peut sensibiliser l’apprenant à la notion de distance interlinguistique et de facto à celle de d’écart dans la langue/ les langues en contact ; cela peut influer positivement sur les représentations. Les tâches individuelles instruisant des exercices d’auto-correction, donc d’autoévaluation dans le cadre d’exécution de consignes diversifiées en matière d’écrit, s’inscrivent dans une posture méthodologique de renforcement des acquis et leur conceptualisation. Une manipulation bien réfléchie des outils heuristiques par le métalangage grammatical traduit en fait des savoir-faire nécessaires à l’apprenant qui devrait se forger son propre discours, conduire son apprentissage et progresser vers l’autonomie. Note Nous signifions par sphères linguistiques, celles constituant une constellation des parlers en usage en contexte algérien : les sphères impliquant l’arabe et ses variétés, le tamazight, le chaoui et le targhi. Le locuteur algérien en tant que non natif étudie le français comme langue étrangère. Conclusion Une entrée à l’étude de la langue par le biais de la grammaire, a permis de porter un regard critique sur les procédures d’évaluation telles qu’elles sont édictées par le manuel scolaire de la 4ème année du cycle moyen. Le constat est que l’ensemble des activités pédagogiques fait l’objet d’un enseignement théorique tout à fait réducteur pour ce qui concerne l’approche de la grammaire. Les typologies d’exercices consacrées à l’activité de grammaire se focalisent beaucoup plus sur une étude de la norme prescriptive, nécessaire, disons-le, mais insuffisante pour assurer cette articulation entre les « savoirs à savoir » de la langue et les savoir-faire en contexte par la langue. Les objectifs d’apprentissage en matière de grammaire visent à développer de façon progressive une compétence linguistique soucieuse de faire acquérir les règles de fonctionnement de la langue par la description. Aussi, les procédures évaluatives ont61 Noureddine BAHLOUL elles à mesurer, par l’exécution de tests et de consignes écrites, le niveau atteint en langue : ceci se traduit par un recours systématique à une évaluation sommative. À ce sujet, il nous semble utile d’attirer l’attention sur cette nette distinction entre « savoir » et « connaissance ». En ce sens, on se demande si nos apprenants cumulent seulement des savoirs constitués en grammaire et non des connaissances réutilisables relevant de l’ordre de la grammaire, c’est-à-dire des connaissances qui permettent le passage au savoir-faire discursif (J-P CUQ et A. QUÉFFELEC : 2005). Mais il n’en est pas ainsi. En classe, la priorité est accordée à un discours métalinguistique sur la description des faits et l’analyse logique des parties du discours de langue : une théorisation ritualisée sur le savoir grammatical. Bibliographie — AYAD HAMRAOUI, M. et al. (2009). Mon livre de français. Alger : ONPS. — BAHLOUL, N. (2008). De la grammaire, encore et toujours… Qu’en est-il des pratiques de classes de FLE en contexte algérien ? Synergie-Algérie. — COLOMB, J. CHEVALLARD, Y. (1986). La Transposition didactique : du savoir savant au savoir enseigné : Revue française de pédagogie. — COÏANIZ, A. Faute et itinéraire d’apprentissage en français langue étrangère. — GARCIA-DEBANC, C. (1999). Évaluer l’oral. Toulouse : Pratiques. — COURTILLON, J. La mise en œuvre de la « grammaire du sens » dans l’approche communicative : Analyse de grammaires et manuels. Paris : ELA, N° 122. — CUQ, J-P. (2003) (Dir). Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde. Paris : Clé International. — Cuq, J-P. (2002). Cours de didactique du français langue étrangère et seconde. Grenoble : PUG. — TROCMÉ-FABRE, H. (1997). J’apprends, donc je suis. Paris : Les Éditions d’organisation. — PERRENOUD, P. (1994). Métier d'élève et sens du travail scolaire. Paris : ESF, 4e éd. 62 Pour une articulation méthodologique entre les pratiques évaluatives … — PANDANX, M. (1998). Les activités d’apprentissage en classe de langue. Paris : Hachette. — PORCHER, L. (1994). Évaluation, régulation, optimisation » : Les cahiers de l’Asdifle, 5, 6-8. — PORCHER, L. (1996). Le français langue étrangère. Paris : Hachette. — PORQUIER, R. (2007). Grammaire ordinaire, source d’activités. Paris : LFDLM, p. 27 : Paris : Hachette. — PY, B. (1992). Regard croisée sur le discours du bilingue et de l’apprenant. Grenoble : LIDIL 6. 63 Khadidja Naima BELDJERD Centre Universitaire de Relizane [email protected] Évaluation des productions écrites et intégration des TICE1. — Entre intérêts et obstacles — Résumé Le présent article traite des questions relatives aux apports du logiciel de traitement de texte « WORD » pour des activités de production et d’évaluation des expressions écrites chez des lycéens algériens de 1AS. Après quelques éléments théoriques mettant en relation la problématique de l’évaluation de l’écrit et la question du traitement informatique des productions écrites, nous exposons les résultats d’une expérience menée afin de mettre en relief quelques conclusions qui approuvent la nécessité d’une coordination entre la formation universitaire et les pratiques des enseignants de manière à bien exploiter les apports des TICE dans l’apprentissage et l’évaluation des productions d’apprenants. الملخص WORD يعالج هذا المقال قضايا تتعلق بتبيان فوائد برنامج معالجة النصوص في بعض األنشطة التي تتعلق بالتعبير الكتابي وتقويمه لدي تالميذ السنة األولى بعد عرض نظري لقضية العالقة بين تقويم التعبير الكتابي ومعالجة هذا. ثانوي النشاط باستعمال وسائل اإلعالم اآللي نعرض نتائج بحث يبين ضرورة التنسيق بين التكوين الجامعي والممارسات التعليمية لتحديد أفضل الطرق لالستفادة من تكنولوجيا .المعلومات واالتصال في تعليم وتقويم التعبير الكتابي 1 TICE : technologies d’information et de communication pour l’enseignement. Évaluation des productions écrites et intégration des TICE… Sous l’impulsion conjointe d’une série d’innovations technologiques et d’une puissante politique d’optimisation des rendements d’investissements publics, nous assistons à l’expansion d’un débat sur la question de l’intégration des TICE dans le domaine de l’enseignement en Algérie. Dans une perspective qui vise la bonne intégration de ces outils à l’enseignement du FLE1, nous nous intéressons dans cet article à l’activité de production écrite et précisément aux pratiques évaluatives lors de l’usage d’un outil informatique. Enfin nous espérons dégager les principales raisons qui freinent ce développement. L’évaluation reste un thème épineux qui a fait apparaître des divergences entre les spécialistes de différentes disciplines. Selon le Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, L’évaluation des apprentissages est une démarche qui consiste à recueillir des informations sur les apprentissages, à porter des jugements sur les informations recueillies et à décider sur la poursuite des apprentissages compte tenu de l’intention d’évaluation de départ. (CUQ, 2003 : 90.) Le Dictionnaire de didactique reconnait à l’activité d’évaluation « deux fonctions principales liées à deux types de décision impliquant l’enseignant dans la salle de classe : la fonction sommative et la fonction formative. » (Ibidem : p.91) Par conséquent, l’évaluation sommative est la démarche qui vise à porter un jugement sur le degré de maîtrise des apprentissages à la fin d’une formation. Son but est de classifier et vérifier les progrès réalisés par les élèves ainsi que l’efficacité de l’enseignement dispensé. Quant à l’évaluation formative, c’est l’évaluation continue qui a pour rôle de guider l’apprenant dans son travail, de cerner ses difficultés pour pouvoir lui présenter l’aide efficace. Il existe un troisième type d’évaluation, appelée « évaluation diagnostique ». Elle est considérée comme « une démarche visant l’identification des causes persistantes des faiblesses et des difficultés des apprenants même après avoir été soumis à un enseignement correctif » (Ibid : p69.)Ce type d’évaluation demande une 1 FLE : français langue étrangère. 65 Khadidja Naima BELDJERD intervention et une remédiation individualisée. Elle se limite souvent au dépistage des élèves en difficulté dans des domaines spécifiques d’apprentissage. En d’autres termes, il s’agit d’identifier les causes des problèmes en analysant les résultats des tests diagnostiques. L’évaluation de la production écrite Pour évaluer les productions écrites de l’apprenant, il existe un ensemble de critères censés rendre compte de la qualité de production écrite du scripteur. Ces critères sont d’abord considérés comme appuis efficaces pour corriger erreurs et anomalies contenues dans les productions. Par ailleurs, ils répondent à une démarche tendant à cerner les différentes caractéristiques des productions en question. Ces critères permettent de présenter différentes grilles d’évaluation qui s’avèrent nécessaires dans l’activité évaluative, car elles garantissent l’efficacité dans l’évaluation des écrits d’apprenants. Dans leur ouvrage intitulé « corriger des copies : évaluer pour former », Odile et Jean Veslin présentent quelques critères d’évaluation : L’enseignant peut, au travers des annotations qu’il porte sur la copie s’appuyer sur les critères pour communiquer à l’élève quelque chose de précis. Par exemple, s’il annote les productions de ses élèves en signalant : - critère a : action faite et réussie - critère b : action non faite - critère c : action faite et non réussie L’élève devra traduire ces annotations par : - La façon dont je m’y suis pris pour réaliser cette action-là est efficace : je continuerai à la mettre en œuvre. - Il faudra que j’essaie de réaliser cette action. - j’ai eu raison d’essayer cette action : je continuerai à penser à le faire ; mais il faudra que j’essaie de m’y prendre autrement si je veux réussir. Ce sont là des informations importantes pour l’élève. (VESLIN, 1992 : P72.) On constate d’après cette citation que les critères communiqués aux apprenants les aident à mieux cerner et réaliser la tâche qui leur est confiée. Ceci leur évite de passer à côté de ce qui est demandé. 66 Évaluation des productions écrites et intégration des TICE… En parallèle, expliciter les critères d’évaluation aux apprenants, lors de la production écrite, n’est pas une solution définitive aux problèmes rencontrés au moment de la réalisation de la production. En effet l’appropriation de ces critères signifie que les apprenants sont appelés à les utiliser, ce qui impose à l’enseignant de les élaborer progressivement, car la liste des critères risquerait forcément d’apparaître comme une masse très lourde, difficile à utiliser. Parmi les listes des procédures à mettre en œuvre pour réaliser et évaluer des productions écrites nous citons le tableau EVA. Le tableau EVA C’est un outil qui sert de référence depuis plusieurs années à l’évaluation des productions d’élèves. Il est extrait de l’ouvrage Évaluer les écrits à l’école primaire, produit collectivement en 1991 par le groupe EVA, dans le cadre de l’INRP (institut national de recherches pédagogiques). — les unités prises en compte dans le tableau EVA Le texte dans son ensemble et les relations entre les phrases. Ces unités permettent d’intégrer, de manière organisée, les faits relevant de la grammaire de texte à côté des éléments, plus classiques, relevant de la phrase ; — les trois points de vue retenus dans le tableau EVA Pragmatique, morphosyntaxique, et sémantique. Le point de vue pragmatique concerne la relation entre le message et ses utilisateurs. L’écrit est considéré par rapport à la situation dans laquelle il fonctionne. Quel est l’enjeu de cet écrit ? Qui parle ? À qui ? Pour quoi faire ? Etc. Le point de vue morphosyntaxique concerne la relation des signes entre eux. C’est le recours à la grammaire traditionnelle. Habituellement appliqué à la phrase, ce point de vue peut s’étendre au texte dans son ensemble et aux relations entre phrases. Il porte sur l’organisation et la relation des éléments entre eux. 67 Khadidja Naima BELDJERD Le point de vue sémantique concerne la relation entre les signes et leurs référents. C’est donc un des éléments majeurs de la construction du sens. À ces trois points de vue ont été ajoutés les aspects matériels (typo et topographique) faciles à repérer, qui peuvent relever de chacun des trois points de vue. Le tableau EVA constitue un outil de formation non négligeable. Il apparaît que les professeurs, comme les apprenants, peuvent construire ou affiner des savoirs indispensables en analysant des textes d’élèves au moyen de ce tableau. Il met en jeu, un répertoire exhaustif des compétences à construire en matière de production d’écrits. Le tableau EVA permet de repérer les lieux d’intervention possibles, mais il ne décharge pas le maître de la responsabilité de choisir ce qu’il retient ou écarte. Informatique et production écrite L’ordinateur est aujourd’hui omniprésent dans le monde du travail, notamment pour les activités de production écrite. Par conséquent, le passage du support papier au support informatique dans ces dernières tâches semble présenter des caractéristiques intéressantes pour la pédagogie. L’ordinateur est un outil qui renvoie aux apprenants une image de leur processus cognitif, il permet un apprentissage par stimulation. Selon Jacques Anis, L’écrit a changé. Il est aujourd’hui volatil, modifiable, démultiplié. Moins différencié de l’oral, d’un côté, mais de l’autre, de plus en plus visuel, associé aux langages non verbaux (image et son), plus proche du monde techno-scientifique, l’écrit se désacralise» (ANIS, 1998 : p 107). Le chercheur analyse le passage de l’écriture à l’écrit numérique et montre comment l’informatique est venue au service du papier. Il avance que l’acte d’écriture est multidimensionnel, car il associe des mises en œuvre de système symbolique et des routines motrices. Ces dernières se présentent sous deux formes : 68 Évaluation des productions écrites et intégration des TICE… — l’écriture manuscrite, caractérisée par la continuité du tracé et par l’appropriation des formes de lettres ; — l’écriture mécanique, caractérisée par la discontinuité de la frappe et par des formes de lettres générales qui ne peuvent être appropriées. Toujours dans son ouvrage « Texte et ordinateur », Jacques Anis présente l’apport du traitement de texte : « Le traitement de texte est encore aujourd’hui l’application la plus populaire de l’informatique. » (Ibid. 37). L’auteur présente les différentes fonctions du traitement de texte : Des fonctions rédactionnelles Insérer/copier /coller/déplacer/rechercher/remplacer. Des fonctions méta-scripturales sélectionner/annuler/répéter/ afficher/enregistrer/imprimer/courrier personnalisé Des fonctions de mise en forme et de structuration du texte : caractères (polices), organisation des paragraphes, césure (couper), gestion de la page (marges, en-tête, pieds-de-page, notes de bas de page…), ouverture sur le non verbal (tableurs, dessin), table des matières, Index. Outils méta-textuels : annotations (commentaires), compte des mots, archivage, marques de révision (texte barré), vérification orthographique, grammaticale et stylistique, dictionnaire. Les effets du traitement texte En se basant sur les recherches dans le domaine de l’apport des outils informatiques pour l’activité d’écriture, Crions (2000 : 49) évoque trois types d’effets du traitement de texte. — Effets quantitatifs et qualitatifs : il s’avère que les écrits des apprenants avec le traitement de texte sont un peu plus longs que ceux qu’ils écrivent sur papier. En ce qui concerne la qualité des écrits, les améliorations sont légères, elles concernent surtout la présentation formelle ; — Effets sur le processus d’écriture : selon l’auteur, les différentes recherches attestent que le traitement de texte 69 Khadidja Naima BELDJERD ne semble pas un outil très favorable à la planification et à son apprentissage. En revanche, le traitement de texte facilite différentes opérations de révision comme supprimer, remplacer, insérer ou déplacer des éléments d’un texte. Par contre, cette révision reste de surface plus que de sens. En effet le scripteur qui révise sur écran n’a pas l’ensemble de son texte, alors que la révision nécessite de lire la version antérieure du texte ; — Effets sur le contexte pédagogique : Les recherches montrent l’effet positif du traitement de texte sur la question de la motivation. Les apprenants, lorsqu’ils écrivent sur ordinateur semblent apprécier les tâches, ils ont moins peur du jugement négatif et ont l’impression de progresser, surtout ils sont fiers de leurs productions. En effet les différentes recherches prouvent que le traitement de texte provoque des modifications radicales dans le déroulement des cours et dans les interactions au sein de la classe. Objectifs et enjeux d’une expérience menée Dans le cadre d’une recherche doctorale, nous nous intéressons à des productions écrites d’apprenants rédigées avec le logiciel de traitement de texte « WORD », en les comparants à des productions écrites sur papier. Les différentes questions qui se posent sont : Pourquoi et comment utiliser l’outil informatique dans l’enseignement et l’évaluation des productions écrites ? Quel est l’apport évaluatif de l’outil informatique ? Quels sont les obstacles qui freinent l’intégration des TICE dans les séances de FLE en Algérie ? Hypothèses de la recherche Cet ensemble de questions nous amène à avancer l’hypothèse suivante : l’évaluation des productions écrites numériques nécessiterait une formation universitaire adéquate voire un développement dans les pratiques pédagogiques des enseignants. 70 Évaluation des productions écrites et intégration des TICE… Échantillon et protocole de recherche Nous menons une expérience avec deux groupes de vingt élèves de première AS du lycée Intissar à Relizane. Cette expérience consiste à demander à un premier groupe de rédiger une lettre administrative sur double feuille et à un second groupe de rédiger la même lettre sur document « WORD », afin de vérifier si l’outil informatique aide à améliorer les productions écrites des élèves. Avant d’analyser les copies des élèves, nous avons enregistré les cours de production écrite (lettre administrative) chez les deux groupes, puis nous avons présenté un questionnaire aux apprenants et un autre à soixante enseignants afin d’identifier leurs pratiques pédagogiques ainsi que leurs représentations sur l’intégration des TICE dans leurs séances de productions écrites. Pour l’analyse des copies des apprenants, nous recourons à la grille d’analyse du groupe EVA. Présentation des résultats En comparant les productions écrites numériques et les productions sur papier, nous relevons les similitudes et les écarts suivants : — Au niveau pragmatique : nous constatons que dans les productions numériques, les apprenants prennent en compte la situation d’énonciation et le type d’écrit (lettre administrative) plus que les apprenants qui rédigent sur papier ; — Au niveau sémantique : En comparant les productions numériques avec les productions sur papier, nous constatons qu’avec des dictionnaires à la portée du scripteur, le logiciel offre la possibilité de trouver rapidement la traduction ou le synonyme des mots. Ce qui a permis d’obtenir des productions avec un vocabulaire thématique plus riche ; — Au niveau morphosyntaxique : Toujours en comparant les productions numériques avec les productions sur papier, « WORD» permet de corriger principalement des erreurs d’orthographe d’usage, de conjugaison et 71 Khadidja Naima BELDJERD d’accord. Alors que dans les expressions sur papier c’est l’enseignant qui se contente de souligne ces erreurs ; — Au niveau de l’aspect matériel : en comparant les deux types de productions d’apprenants (numériques et papier), nous constatons que le logiciel « WORD » est une aide précieuse pour l’organisation de la page, la segmentation des paragraphes, les majuscules, notamment en début de phrases ou de paragraphes. Enfin nous constatons que le logiciel de traitement de texte apporte une aide considérable dans l’activité de révision, il permet aux scripteurs de réviser, modifier et réécrire facilement leur texte. L’évaluation des productions écrites Dans le questionnaire présenté aux enseignants figurent des questions qui visent la comparaison des pratiques évaluatives chez nos deux types d’enseignants. La question « Utilisez- vous des grilles d’évaluation pour corriger les productions des élèves ? Si oui citez-en une. » Nous révèle que 51 enseignants interrogés déclarent ne pas recourir aux grilles d’évaluation dans la correction des copies. La deuxième partie de la réponse à la question révèle une méconnaissance de la signification d’une grille d’évaluation chez les 09 enseignants qui répondent positivement à la question : ils parlent des types d’évaluation et des grilles d’autoévaluation pour apprenants. En comparant l’évaluation des copies numériques avec les copies sur papier, nous constatons que les deux types d’enseignants utilisent les mêmes pratiques évaluatives : souligner les erreurs en rouge, prendre l’initiative d’en corriger quelques-unes, puis porter des annotations. Or l’enseignant qui a utilisé l’outil informatique n’a pas utilisé l’icône « révision » disponible sur le logiciel « WORD » pour ajouter des commentaires constructifs aux textes des apprenants. Il s’est contenté de souligner quelques erreurs morphosyntaxiques pour mettre des annotations qui ne servent pas à apporter une aide significative aux scripteurs. 72 Évaluation des productions écrites et intégration des TICE… Interprétation des résultats Nous constatons que l’utilisation d’un outil informatique tel que le logiciel « WORD » peut aider les apprenants à améliorer leurs productions écrites. Certes les tâches de l’enseignant comme celles des apprenants sont allégées, mais beaucoup de travail reste à fournir. Si par exemple, le logiciel « WORD» aide à corriger quelques erreurs morphosyntaxiques, il reste aux enseignants à mettre en place des situations d’enseignement qui visent à aider les apprenants à améliorer le sens et la construction des phrases et des textes produits. À notre avis, il existe un manque de formation universitaire des enseignants concernant l’intégration des TICE notamment dans les modalités d’évaluation. Pour pouvoir parler d’intégration des TICE en classe de FLE, il faut penser à la formation des enseignants à ce genre de pratiques, ce qui nécessite un changement dans les gestes professionnels. Conclusion De nombreuses recherches confirment que la production écrite ainsi que son évaluation restent des activités complexes supposant la mise en œuvre d’un ensemble de processus mentaux ainsi que différentes connaissances et compétences langagières de la part des apprenants, de même un recours à des pratiques pédagogiques adéquates du côté des enseignants, essentiellement lors de l’intégration des TICE qui ont prouvé leurs apports positifs dans le domaine. Pour MANGENOT, « l’intégration des TICE, c’est quand l’outil informatique est mis avec efficacité au service des apprentissages». (MANGENOT, 2000 : 11). La bonne intégration des TICE signifie donc que l’outil informatique soit mis avec efficacité au service des apprentissages. Enfin, nous déduisons qu’il est nécessaire de repenser une bonne formation à l’enseignement de la production d’écrits et à l’évaluation. La recherche que nous avons effectuée confirme une fois encore que les TICE peuvent apporter une aide remarquable dans ce domaine. Quoique, de nombreux obstacles retardent leur intégration : l’insuffisance des ressources 73 Khadidja Naima BELDJERD financières en matière de TICE ; l’insuffisance relative, en quantité et en qualité, des ressources numériques ; une formation initiale et continue des enseignants qui met vaguement l’accent sur l’utilisation des outils informatiques dans l’enseignement. Par conséquent, il est primordial de penser la collaboration entre l’université et l’enseignement général pour bien mener cette intégration. À ce propos, nous assistons à un faisceau d’espoir au centre universitaire de Relizane avec un nouveau parcours de Master intitulé : « Didactique du FLE, contextualisation et innovation pédagogique » qui a comme principal objectif de savoir intégrer des activités créatrices en intégrant les technologies de l'information et de la communication pour l'éducation (TICE). Bibliographie — ANIS, J. (1998). Texte et ordinateur : l’écriture réinventée, Ed : de Boeck, Bruxelles, p 107. — CRINON, J, in ANIS J. et Marty N. (2000), Lecture – écriture et nouvelles technologies, Ed : CNDP, Paris, p.47. — CUQ J-P. et GRUCA I., (2003), Grenoble, Cours de didactique du Français langue étrangère et seconde, Ed : PUG, pp 69-91. — MANGENOT, F. (2000), Apprentissages collaboratifs assistés par ordinateurs appliqués aux langues. In R. Bouchard, F. Mangenot. Interaction, interactivité et multimédia, Notions en questions N°5 : ENS. p11 — VESLIN, O. J., (1992), Corriger des copies, évalué pour former, Ed : hachette, Paris, p72. 74 Soraya BELKHITER Université d’Oran Es-Sénia [email protected] Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? Résumé Nous abordons dans cet article la problématique de la formation des enseignants de français en général et celle de l’évaluation en particulier. Pour les besoins de la recherche que nous menons, nous procédons à une enquête sur le terrain auprès des nouveaux enseignants de français. Enfin nous abordons les résultats auxquels nous sommes parvenus. Ce travail n’a nullement pour visée de montrer aux formateurs la démarche à suivre pour mettre fin aux difficultés que rencontrent les étudiants de la licence de français, mais d’aider de repérer les lacunes de ces derniers et d’y remédier. الملخص تطرقنا في هذا المقال لمشكلة تكوين أساتذة اللغة الفرنسية بصفة عامة ولمشكلة كما قمنا بعمل ميداني تعرفنا من خالله على مختلف الصعوبات التي.التقييم بصفة خاصة هذا العمل ليس وسيلة. وأخي ار تم عرض النتائج التي توصلنا إليها.يتلقونها المعلمين الجدد تهدف إلى إجبار المدربين على انتهاج منهج معين يقضي بصفة نهائية على تلك ولكن المراد من هذا العمل تحديد الثغرات ومعالجتها،الصعوبات التي يلتفاه الطالب Ces dernières années, le système éducatif algérien a subi plusieurs changements. La réforme mise en place en 2002, appelée « Refonte Pédagogique », touche l’ensemble du système éducatif algérien (primaire, moyen, secondaire et supérieur). Elle touche également toutes les disciplines dont le français langue étrangère. L’enseignement/apprentissage du français langue étrangère traverse une crise caractérisée par une baisse du niveau des apprenants et une incompétence des enseignants fraîchement sortis de l’université. Il est vrai qu’aujourd’hui, les nouvelles recrues rencontrent des difficultés dans leur pratique enseignante1. Des difficultés qui se traduisent par l’inaptitude à installer des compétences chez des apprentis qui seront euxmêmes capables « d’apprendre à apprendre ». Azouz Abdennebi dit à ce propos : « l’enseignant digne de ce nom est avant tout une flamme qui allume d’autres flammes ». (ABDENNEBI 1993, p.115). Nous comprenons par cette citation, que l’exercice du métier d’enseignant nécessite des formateurs compétents formés pour ce faire. Nous pouvons également affirmer que l’enseignement est un métier qui n’est guère facile et que les compétences qui lui sont spécifiques se construisent en formation initiale et en formation continue. Mais qu’en est-il en réalité ? Afin d’objectiver les difficultés d’insertion professionnelle des nouvelles recrues du primaire, du moyen et du secondaire, une enquête a été réalisée. Notre échantillon se compose de cinquante nouveaux enseignants faisant partie de l’ancien2 régime et du nouveau3 régime, possédant une Licence d’Enseignement du FLE et ayant tous suivi leur formation initiale à la Faculté des Arts, des Lettres et des Langues Étrangères d’Oran. L’échantillon d’enseignants ayant répondu au questionnaire est variable : quinze enseignants du primaire, L’enquête menée pour les besoins de notre thèse de doctorat atteste que les nouvelles recrues rencontrent des difficultés à enseigner. 2 Il s’agit du régime classique où l’obtention de la licence se fait au bout de quatre ans d’études supérieures. 3 Il s’agit du nouveau régime universitaire appelé L.M.D. où l’obtention de la licence se fait au bout de trois ans d’études supérieures. 1 Soraya BELKHITER quinze enseignants du moyen et vingt enseignants du secondaire. Le but de cette enquête est d’identifier les difficultés des enseignants de français fraichement sortis de l’université et d’en chercher les causes. Nous avons choisi pour ce faire la technique du questionnaire. Celui-ci compte douze questions se rapportant, en grande partie, au métier d’enseignant, à la formation des enseignants et au programme de la licence de français. L’enquête faite pour les besoins de notre thèse de doctorat auprès d’enseignants de français fraichement sortis de l’université montre qu’ils ne sont pas en mesure d’exercer la fonction enseignante. Nous entendons par là, la capacité à animer des cours, à préparer des fiches pédagogiques, à évaluer des apprenants et à installer des compétences chez ces derniers. Des compétences aussi bien transversales que disciplinaires. Ces incompétences sont dues en premier lieu, d’après notre enquête, à une formation défaillante. En effet, la totalité des enseignants interrogés affirment que leur formation ne les a jamais préparés au terrain. Ils trouvent que les cours donnés durant la formation universitaire n’étaient pas du tout appropriés, d’où la difficulté de réaliser les tâches citées ci-dessus. Le présent article, centré sur la formation des enseignants de français, s’articule autour de quatre questions auxquelles une cinquantaine d’enseignants de français fraîchement sortis de l’université d’Oran ont répondu. Ces derniers sont formateurs dans les écoles primaires, les collèges et les lycées de la wilaya d’Oran. 78 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? Quelles sont les difficultés que rencontrent les nouveaux enseignants de français sur le terrain ? 100% 80% 60% 100% 40% 60% 20% 30% 0% 1 2 3 1= Didactique/Pédagogique ; 2= Psychologique ; 3= Autres. Nous avons regroupé les difficultés rencontrées par les enseignants débutants en trois catégories, à savoir les difficultés liées aux aspects didactiques et pédagogiques de la fonction, les difficultés d’ordre personnel et pour terminer les difficultés d’ordre socioprofessionnel. Les cylindres ci-dessus résument les résultats de ce classement en indiquant pour chaque modalité le pourcentage de difficulté avancé par les enseignants interrogés. Nous sommes parvenus aux résultats suivants : les difficultés d’ordre didactique/pédagogique sont rencontrées par tous les enseignants débutants. Cependant, les difficultés d’ordre psychologique et socioprofessionnel ne sont pas à négliger. Nous remarquons que 60% des interrogés éprouvent des difficultés d’ordre personnel et 70% ont globalement moins de difficultés de nature socioprofessionnelle. Seulement 30% des interrogés reconnaissent rencontrer des difficultés de cette nature. Les difficultés de la catégorie N°1 se traduisent par l’incapacité de réaliser les tâches suivantes : — préparation des cours (52%) ; — planification des objectifs (52%) ; — gestion de la classe (60%) ; — évaluation des élèves (94%) ; 79 Soraya BELKHITER — installation de compétences et le développement de savoir-faire chez les apprenants (70%) ; — choix d’outils didactiques adéquats (70%) ; — intervention auprès des apprenants en difficultés d’apprentissages ou ayant des lacunes (100%). Pour ce qui est des difficultés psychologiques, les étudiants sortants de l’université avouent ne pas être préparés à la relation pédagogique. Autrement dit, ils nient être formés à rencontrer des élèves (enfants et adolescents), à adopter une méthode pour parvenir à exercer efficacement leur métier d’enseignant. Les enseignants novices expriment des besoins en formation psychologique afin de pouvoir gérer et maitriser leurs apprenants. N’ayant pas suivis une formation psychologique solide, les nouvelles recrues, avouent être incapables de faire face aux difficultés auxquelles sont confortés leurs apprenants. Les enseignants interrogés éprouvent moins de difficultés à s’intégrer et à collaborer au sein de la communauté scolaire. Seulement 30% d’entre eux ne parviennent pas à établir des relations professionnelles avec leurs collègues et avec l’administration. À la lecture des statistiques de la liste des difficultés rencontrées par les interrogés, nous observons des écarts entre celles-ci. En effet, les attentes des interrogés se révèle, en grande partie, liée au domaine didactique et pédagogique. Cela serait-il dû à l’importance de ces deux disciplines comme le soulignent Biard et Denis dans le passage ci-dessous ou existe-t-il d’autres causes qui sont à l’origine de cet écart ? La pédagogie définit des méthodes, des démarches qui permettent de guider l’élève dans des apprentissages variés. La didactique, quant elle, s’affirme davantage comme une réflexion sur ce que l’on nomme les savoirs savants et la façon de les transposer-pour tout ou partie-afin de les rendre accessibles aux élèves. » (Biard, Denis1993, p.15). Mais, à quoi sont dues ces difficultés ? Ils soulignent l’insuffisance de la formation reçue à l’université du point de vue de la pratique professionnelle. Certes, une formation initiale ne pourrait préparer l’enseignant à gérer toutes les situations d’enseignement auxquelles il sera 80 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? quotidiennement confronté. Cependant, elle doit s’attacher à construire les compétences fondamentales à réinvestir sur le terrain car : « La formation est le lieu de la structuration identitaire professionnelle de formés. » (ALLOUCHEBENAYOUN, PARIAT 2000, p.119). Cela signifie que le formé doit avoir acquis un profil de sortie à la fin de son cursus universitaire. Hélas, les difficultés auxquelles les enseignants interrogés se heurtent quotidiennement certifient que leurs performances quant à la fonction enseignante sont dans l’ensemble faibles. En effet, 100% d’entre eux affirment être dans l’incapacité d’aider les apprenants à résoudre une situation problème et 94% ne pas être en mesure de les évaluer. Cela signifie que durant sa formation initiale, l’étudiant n’est quasiment pas formé à l’évaluation. Mais un contrat d’apprentissage, ne suppose-t-il pas l’engagement de deux parties : enseignant et apprenants ? Quel est le profil de sortie d’un futur enseignant de français ? L’enseignement est un métier qui suppose l’acquisition de compétences professionnelles de la part de l’enseignant pour qu’il puisse y rentrer progressivement et le mener à bien. C’est aussi un métier qui lui demande beaucoup d’efforts personnels, comme le fait de continuer à apprendre afin de se perfectionner. C’est ce que souligne Azouz Abdennebi, lorsqu’il évoque ce thème : « C’est le propre de l’enseignant digne de ce nom d’apprendre toujours davantage, chaque année, chaque mois, chaque semaine, si possible » (ABDENNEBI 1993, p.115). D’après le Dictionnaire Larousse, tout enseignant doit posséder les compétences suivantes : 1-Sens de la pédagogie pour transmettre des connaissances et des méthodes de travail. 2-Sens de l’observation pour repérer les progrès et les difficultés des élèves. 3-Sens des relations humaines afin d’établir un bon contact avec les élèves et dialoguer avec eux. (Dictionnaire Larousse 1998, p.118). Donc, il est indispensable que le formé s’approprie des savoirs professionnels, pédagogiques, didactiques, littéraires, 81 Soraya BELKHITER linguistiques, psychologiques et autre afin qu’il puisse les réinvestir sur le terrain. Autrement dit, la formation initiale doit garantir l’acquisition de compétences indispensables au métier d’enseignant comme il est souligné dans ce passage : On entend par formation initiale le premier programme d’études qui conduit à l’exercice d’un métier ou d’une profession. Elle est dite « initiale » parce qu’elle vise d’abord l’acquisition de compétences par une personne qui n’a jamais exercé la profession pour laquelle elle désire se préparer. Cette formation, de durées variables, peut être offerte par l’un ou l’autre des trois ordres d’enseignement (secondaire, collégial et universitaire). Elle est toujours sanctionnée par un diplôme. (Agence Française pour le Jeu Vidéo juin 2004) Le passage cité ci-dessus montre que le métier d'enseignant s'apprend et que sans une préparation préalable, l’enseignant ne sera en mesure de réaliser les tâches relatives à ce métier. À vrai dire, la formation est censée élaborer son profil de sortie. Un profil de sortie qui se traduit par l’aptitude : — — — — — — À animer des cours ; À évaluer des apprenants ; À gérer des apprenants ; À appliquer des approches pédagogiques ; À répondre aux besoins et aux attentes des apprenants ; À développer des compétences chez des apprenants. Il est clair que les enseignants interrogés n’ont pas ce profil de sortie, puisqu’ils reconnaissent être inaptes à réaliser les tâches citées ci-dessus. Alors, à quoi est due cette situation ? À quoi sont dues les difficultés rencontrées en classe par les nouvelles recrues ? S’agit-il d’une formation lacunaire dont les contenus d’enseignement ne répondent ni aux besoins ni aux attentes des formés ? 82 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? Quelles sont les causes des difficultés rencontrées par les nouveaux enseignants de français ? 100% 80% 60% 100% 95% 40% 40% 20% 0% 1 2 3 1= Déséquilibre entre la théorie et la pratique ; 2= Contenus d’enseignement lacunaires ; 3= Inefficacité du stage pratique. Face à leurs difficultés, les enseignants incriminent, en grande partie, leur formation universitaire. En effet, ils ne s’estiment pas suffisamment préparés par leur formation à la fonction enseignante. Nous avons classé les lacunes soulignées par les interrogés au niveau de leur formation dans un ordre décroissant. Les cylindres ci-dessus montrent le pourcentage d’enseignants ayant cité ces causes dans leurs réponses. Tous les enseignants interrogés soit un total de 100% trouvent que leur formation initiale est purement théorique et qu’elle n’articule guère entre la théorie et la pratique. Ce déséquilibre serait à l’origine des difficultés qu’ils rencontrent sur le terrain. Alain Peyrefitte ancien ministre de l’éducation en France avait soulevé ce problème en disant : La formation théorique des professeurs est trop souvent un compromis mal défini entre un enseignement d’érudition, dans la tradition universitaire, et un enseignement conforme aux méthodes et à l’esprit de l’enseignement. Quant à leur formation professionnelle proprement dite, elle est d’une insuffisance criante : la pédagogie, la connaissance des situations scolaires, tout ce qui est nécessaire aux pédagogues est pratiquement absent de la formation qui leur est donnée. (A. PEYREFITTE in A. ABDENNEBI 1993, p. 57) 83 Soraya BELKHITER Dans ce passage, Alain Peyrefitte met l’accent sur l’aspect professionnel que doit avoir la formation universitaire et sur l’équilibre entre la théorie et la pratique. Patrice Pelpel a également soulevé le problème des contenus théoriques de la formation universitaire. Il dit à ce propos :« la formation universitaire initiale est centrée sur des contenus scientifiques spécialisés et inspirée par des modèles pédagogiques rarement transférables au niveau de l’enseignement secondaire. » (PELPEL, 1998 : 128). Ainsi, il nous semble adéquat que tous les enseignants interrogés reconnaissent avoir des difficultés sur le terrain et qualifient leur formation de théorique. Il faut savoir que la réalité du terrain est toute autre ! Désormais, l’enseignant n’est plus appelé à réciter des savoirs ou à les transmettre, mais il est plutôt appelé à développer des compétences chez ses apprenants. Or, une telle formation leurs permet-ils de réaliser une telle tâche ? Il faut savoir que tous les enseignants ayant fait trois ans d’études supérieures (nouveau régime) pour obtenir une licence, n’ont jamais effectué de stage pédagogique. Alors, quelle aurait été dans ce cas l’utilité des connaissances théoriques si elles n’étaient pas mises en application ? Selon le ministère de l’éducation française, ces connaissances seront stériles et d’une inutilité absolue. Il trouve qu’une alternance entre la théorie et la pratique préparera mieux le formé à enseigner comme le confirme ce passage : Si les savoirs théoriques déconnectés de la pratique sont inefficaces, l’expérience des professeurs stagiaires n’est pleinement formatrice que si elle est analysée à l’aide d’outils conceptuels et des apports de la recherche universitaire. La formation initiale des enseignants est donc fondée sur une articulation entre des périodes de stage, moments de pratique dans une classe, et des temps de formation hors de la classe. (Ministère Éducation Nationale Mars 2007). En effet, nous ne pouvons pas se suffire d’un enseignement exclusivement théorique d’où l’utilité d’instaurer des stages pratiques qui s’étirent sur une durée plus longue. Les réponses obtenues pour cette question révèlent qu’il s’agit d’une formation dont le déséquilibre est flagrant entre la théorie et la pratique et que les études supérieures ne préparent 84 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? pas forcément le formé à sa future fonction. Michel LESNE trouve que Une connaissance concrète des réalités du travail semble constituer un des critères les plus retenus, liés à la nécessité de se référer à des exemples réels, à des expériences vécues, afin que l’enrichissement des personnels en formation, au niveau des connaissances méthodologiques et théoriques, puisse s’accompagner de possibilités réelles d’application. (LESNE. M, in ALLOUCHE-BENAYOUN 2000, p.127). Les enseignants novices rattachent les difficultés qu’ils rencontrent en classe au programme d’enseignement de la licence de français. Il s’agit, d’après eux, d’un programme lacunaire n’ayant point pallié leurs insuffisances. Ils pensent que les contenus des modules ne sont globalement pas pertinents dans la mesure où ils ne convergent pas vers le même objectif : former les étudiants à leur future profession. Ils citent comme exemple le module de didactique où les cours sont très enrichissants, mais insuffisants. Ils remettent aussi en cause le volume horaire des modules à visée psychologie et linguistique. Ils insistent sur le fait qu’il y a un grand écart entre les études supérieures et la profession enseignante. Cet écart est, d’après eux, lié aux programmes qu’ils enseignent. Qu’ils soient au primaire, au moyen et/ou au secondaire, ces enseignants ne sont pas appelés à enseigner la littérature française, mais à installer des compétences langagières. Nous entendons par compétences langagières : la capacité de lire, d’écrire, de parler et de comprendre la langue cible. Certes, il ne peut être affaire du même programme d’enseignement, le cycle supérieur en est une chose, et les autres cycles d’étude en est une autre. Cependant, c’est la formation universitaire qui garantit au formé l’acquisition d’une identité professionnelle. Philippe Perrenoud met l’accent sur l’installation de compétences professionnelles chez le formé lors de son cursus universitaire. Il dit à ce propos : Peut-on orienter la formation des maîtres autrement que vers l’acquisition de compétences ? Qu’y a-t-il de neuf dans une telle orientation ? Existe-t-il une alternative ? N’est-il pas évident qu’une pratique professionnelle complexe exige des compétences et que la formation a pour principale vocation d’en permettre le développement ? (PERRENOUD : 1993). 85 Soraya BELKHITER Les attentes des nouveaux enseignants se portent prioritairement sur l’acquisition d’une identité professionnelle et l’acquisition de compétences langagières. Il nous semble que leur choix est tout à fait justifié, si on revient aux programmes du FLE qu’ils enseignent. Le pourcentage d’enseignants ayant qualifié le stage pédagogique d’inefficace est de 40% soit la totalité des enseignants du secondaire. Ils trouvent que le stage interne n’est pas du tout pertinent pour la simple raison que le stagiaire dans cette formule de stage interne a affaire à des étudiants de 1ère année de licence , alors qu’en réalité il aurait dû avoir affaire à des écoliers , à des collégiens et/ou à des lycéens. Ils remettent également en cause la durée du stage qu’ils trouvent très courte. Pourtant, c’est à la formation de préparer le formé à sa future profession, afin qu’il mène à bien son travail. Luc Ferry, l’ancien Ministre de l’éducation dit à ce propos : « aider les enseignants à mener à bien les grands chantiers nécessaires pour relancer la dynamique de l'école, c'est d'abord leur assurer la meilleure formation initiale et continue possibles. »(FERRY : avril 2003). Les enseignants questionnés trouvent qu’il aurait été plus judicieux de suivre un stage pédagogique en dehors de l’université (école primaire, collège et/ou lycée), puisqu’ils sont appelés à enseigner dans l’un de ces établissements. Le stage pédagogique est un exercice qui permet au formé d’acquérir une certaine expérience et de vivre des situations d’apprentissage relatives à sa future profession. C’est aussi une pratique qui permet au stagiaire de mettre en application ses connaissances théoriques. Pour toutes ces raisons, nous pouvons certifier que la formation des enseignants de français est loin d’être pertinente, comme l’atteste d’ailleurs et à juste titre les réponses obtenues de l’enquête faite auprès de ces derniers. Sinon comment expliquerions-nous le fait que 94% des interrogés nient être en possession de la compétence à évaluer. Sachant que celle-ci relève de la compétence professionnelle. 86 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? Évaluer : pourquoi, comment et à quels moments ? Au sens habituel, l’évaluation consiste à attribuer une valeur à un objet, à une action ou à une attitude. En didactique du FLE, enseignant et apprenant devront procéder à des évaluations périodiques au niveau pédagogique (l’enseignant, pour s’auto-évaluer et se remettre en question ; l’étudiant, pour évaluer sa progression). L’évaluation serait donc une démarche d’observation des effets de l’enseignement et de l’apprentissage tel que le souligne CARDINET dans le passage suivant : L’évaluation vise le futur et se tourne vers le passé, elle décrit la situation présente pour permettre une intervention corrective immédiate, c’est la fonction de l’évaluation formative, ponctuelle de guider ces adaptations : apprécier le genre d’activité qu’est maîtrisé, déterminer les aspects qui ne sont pas acquis, sentir sur quelle motivation on peut s’appuyer, puis exploiter toutes ces informations dans le choix de nouvelles situations d’apprentissage. (CARDINET : 1986, p. 38). Nul ne peut nier que l’évaluation des apprentissages est l’élément clef de tout programme de formation, mais ça reste également un processus complexe. En effet, le développement de la compétence à évaluer chez le formé durant sa formation initiale n’est point une tâche aisée comme le souligne TAGLIANTE : L’évaluation est un objet de malentendus entre : — L’évaluateur et l’évalué, bien sûr et au premier chef (Pourquoi cette note, j’avais pourtant réussi ! Il note « à la tête du client » d’ailleurs, j’ai écrit la même chose que Untel, et il a une meilleure note que moi ! Etc.) ; — L’établissement et l’évaluateur, ensuite (Un professeur dont les élèves n’ont que de « mauvais résultat » est, bien sûr, un mauvais professeur …) ; — L’évalué et la société enfin, ou les parents (mauvais résultats scolaires= mauvais sujet, peut être inapte à l’entrée sur le marché professionnel. (TAGLIANTE 1994, p. 21). En effet, si l’évaluation est sujet de controverses, c’est parce que les nouvelles recrues, dans leur formation initiale, n’ont pas 87 Soraya BELKHITER été formés pour. L’enquête menée pour les besoins de notre thèse de doctorat atteste qu’une grande place est accordée à l’évaluation sommative à l’université. Telle était notre question : Pensez-vous que dans votre formation, une plus grande place est accordée à : L’évaluation sommative ; L’évaluation diagnostique ; L’évaluation formative. 100% 80% 60% 100% 40% 20% 0% 1 0% 0% 2 3 1- Évaluation sommative ; 2- Évaluation diagnostique ; 3- Évaluation formative. Nous remarquons que 100% des enseignants interrogés ont choisi l’évaluation sommative. Cela signifie que, dans leur formation universitaire, c’est ce type d’évaluation qu’on privilégie. Bien que la nouvelle méthode d’enseignement « approche par compétences » exige que l’apprenant soit impliqué davantage dans le processus de formation afin de se séparer de l’ancienne méthode où il était le plus souvent passif, nous remarquons que c’est l’évaluation sommative qui est pratiquée et non celle dite formative ou celle dite diagnostique. Il existe différents types d’évaluation : L’évaluation sommative Elle se situe à la fin d’un apprentissage. Elle sert à mesurer les changements survenus chez les participants et à juger de leur degré de maîtrise des objectifs. C’est la raison 88 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? pour laquelle l’évaluation sommative est dite certificative. Selon Braun et Forges : Elle sert à : — Fournir un instantané à un moment donné pour un élève donné. — Informer les parents. — Fournir des données pour gérer le progrès et la performance globale. — Informer d’autres professeurs.(Braun, Forges 1988, p.75). Nous pouvons dire que la fonction essentielle de ce type d’évaluation est de sanctionner des contenus d’enseignement, à travers une note chiffrée, qu’on accorde à l’apprenant pour le déclarer admis ou non admis en classe supérieure.En d’autres termes, il s’agit de contrôler les savoirs acquis et d’élaborer un bilan de la formation (résultats obtenus) sans plus. Cependant, le rôle du formateur peut-il se limiter au simple contrôle ? Est-il juste de se contenter d’attribuer une note au formé ? N’est-il pas temps que le formateur s’oriente vers une réflexion constructive sur son enseignement afin de guider l’apprenant vers l’acquisition des compétences ? L’évaluation formative L’objectif de l’évaluation formative est d’améliorer l’enseignement et l’apprentissage et non simplement classer ou noter les élèves, conduisant progressivement l’apprenant à s’auto-évaluer à partir d’informations sur ses points forts et ses points faibles, sur ses besoins et ses attentes tel que l’atteste De Landsheere dans le passage cidessous : L’évaluation formative est l’évaluation intervenant, en principe, au terme de chaque tâche d’apprentissage et ayant pour objet d’informer élève et maître du degré de maîtrise atteint éventuellement de découvrir où et en quoi un élève éprouve des difficultés d’apprentissage, en vue de lui proposer ou de lui faire découvrir des stratégies qui lui permettent de progresser. (DE LANDSHEERE, 1979 : 25). L’évaluation dite formative a deux effets positifs : le premier, est celui de donner clairement au professeur les points à 89 Soraya BELKHITER retravailler et les points bien acquis, le second, est celui de bien préparer les élèves pour l’évaluation sommative en fin de séquence. En d’autres termes, il s’agit d’une démarche pédagogique visant l’individualisation des apprentissages « apprendre à apprendre ». Si nous revenons aux statistiques concernant le type d’évaluation pratiquée le plus à l’université, nous dirons que celle dite formative reste inexistante. Et pourtant c’est grâce à celle-ci qu’une amélioration des apprentissages et des résultats peut avoir lieu. Elle a plusieurs fonctions bénéfiques quant à l’enseignement /apprentissage d’une matière. Dans le tableau ci-dessous, Minder oppose l’évaluation sommative à l’évaluation formative en citant les critères propres à chacune d’entre elles. Évaluation formative Évaluation sommative Elle est analytique : c’est l’évaluation spécifique d’un objectif opérationnel Elle est globale : c’est l’évaluation générale de l’assimilation d’une matière. Elle est continue : elle est fréquente, s’inscrivant dans le déroulement même de l’apprentissage (fin de leçon). Elle est diagnostique : elle situe l’élève par rapport à l’objectif, identifie les erreurs et décèle les faiblesses de l’apprentissage. Elle est ponctuelle : elle intervient à des moments précis, clôturant un chapitre (interrogation) ou une période scolaire (examen). Elle est statistique : elle situe les notes individuelles dans la distribution de l’ensemble des notes. Elle est corrective : elle débouche sur des activités d’ajustement, assurant ou renforçant la maîtrise de l’objectif. Elle est normative : elle réalise un constat en termes de réussite ou d’échecs. (MINDER 1999, p.287). Nous pensons qu’il est temps que les enseignants cessent de se plaindre du niveau de leurs apprenants après une évaluation sommative et s’orientent vers une évaluation formative s’intégrant au processus de formation et contribuant à son efficacité. Si nous souhaitons le passage d’un état initial à un étal final (atteindre des objectifs), nous devront retrouver ces 90 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? deux évaluations dans la formation. Désormais, l’évaluation à l’université doit être prise en charge d’une manière rigoureuse, car un étudiant évalué d’une façon efficace n’est qu’un futur évaluateur évaluant lui aussi ces apprenants efficacement. Comment remédier aux lacunes des enseignants de français fraîchement sortis de l’université ? La totalité des enseignants interrogés soit 100% avouent ne pas être aptes à enseigner. D’après leurs réponses, les difficultés à vaincre sont de plusieurs ordres. Les nouvelles recrues soulignent des lacunes aux niveaux didactique, pédagogique, linguistique et psychologique. Ils estiment que beaucoup de choses restent à faire pour pouvoir bien enseigner. Tous les enseignants interrogés avouent ne pas être satisfaits de leurs compétences langagières, psychologiques et pédagogiques. Ils trouvent que l’introduction de quelques changements dans le programme de la licence de français serait la solution qui pourra aider le formé à mieux affronter la situation d’enseignement /apprentissage du FLE. Alors, sur quoi ont-ils le plus insisté ? Quels sont les changements qu’ils ont proposés ? 100% des enseignants interrogés affirment qu’ils ont besoin d’une formation continue. Ils estiment que beaucoup de choses restent à faire après l’obtention de la licence, et que le nouvel enseignant se trouve plus souvent perdu pour pouvoir enseigner. Encore là, les interrogés soulignent que les cours donnés durant la formation universitaire n’étaient tout simplement pas appropriés : la réalité de la classe est différente des enseignements donnée à l’université, il y’a également un décalage entre la théorie et la pratique. Ces lacunes, les nouvelles recrues, souhaitent les combler en suivant une formation continue. Sachant qu’une formation initiale n’est jamais assez suffisante comme le montrent Collés, Dufays et Maeder : Il est certes utile de fournir aux futurs enseignants le kit de survie qui leur permettra de faire face dès le début de leur carrière, aux difficultés de gestion de classe et d’enseignement d’une matière. 91 Soraya BELKHITER Mais, on ne peut faire fi du long terme. (COLLÈS, DUFAYS, MOEDER, 2003, p.207). Le travail de perfectionnement d’un enseignant de langue étrangère répond à beaucoup d’impératifs tels que le souligne Limbos : « Le perfectionnement signifie une approche plus approfondie de certains aspects de la fonction d’animateur notamment au plan technique ou pédagogique ». (LIMBOS, 1979 :57). Nous entendons dire par perfectionnement : combler les lacunes d’une formation déficiente, mettre à jour les connaissances langagières et suivre le développement scientifique dans plusieurs domaines (pédagogique, didactique, psychologique).En effet, un savoir ou un savoir-faire n’est jamais appris d’une manière suffisante, un enseignant aura toujours besoin de s’instruire en vue d’une amélioration. Apprendre à devenir génial, enthousiaste, passionné… et communiquer cette flamme, est-ce que cela s’enseigne, est-ce que cela s’apprend suffisamment à l’université ? Est-ce un gage de qualité ? Je fais le pari que pour la profession enseignante – et pour bien d’autres-il y a là une avenue à explorer et à matérialiser. Je pense que l’on peut progresser sur ce terrain. (La maison des enseignants et de l’éducation tout au long de la vie 2006). Nous constatons d’après les réponses obtenues que l’aprèsformation initiale n’est pas à négliger si on vise à améliorer la qualité de l’enseignement tel qu’on le souligne dans le passage qui suit : La formation continue contribue à l'amélioration des pratiques professionnelles, des qualifications en vue de leur promotion ainsi qu'à l'enrichissement culturel et à la réalisation de projets personnels, et ce pour toutes les catégories, sans exception. Il faut donc augmenter substantiellement les crédits affectés à la formation continue et prendre en compte les demandes des personnels. La formation continue doit répondre de façon équilibrée aux exigences institutionnelles et aux aspirations de l'individu. (La maison des enseignants et de l’éducation tout au long de la vie 2006). Nous pensons qu’il serait temps qu’une stratégie claire et pertinente d’accompagnement des enseignants du FLE ait lieu, en vue d’améliorer la qualité de l’enseignement. Pour être efficace, la formation universitaire doit être suivie d’une 92 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? formation continue. Celle-ci sera un moyen de soutien adéquat qui aidera, sans doute, les nouvelles recrues à résoudre les difficultés qu’ils rencontrent sur le terrain. Si la formation initiale se préoccupe de multiplier les cours théoriques dont le contenu ne remédie point aux lacunes du futur enseignant, la formation continue accompagne ce dernier dans le but de l’aider à se construire une identité professionnelle. À la lecture des réponses, nous pouvons observer que les principales difficultés rencontrées par les nouvelles recrues sont d’ordre linguistique, pédagogique/didactique et psychologique. Les enseignants interrogés insistent sur les modules à visée linguistique, et psychopédagogique. Ils considèrent ces disciplines comme étant des disciplines-clés vu qu’elles ont pour objectif de favoriser chez le futur enseignant l’acquisition d’une formation approfondie aux plans méthodologique, technique et linguistique. Il faut savoir que la totalité des enseignants interrogés ont opté pour le module de Morphosyntaxe (système L.M.D) ou de pratique systématique de la langue (licence classique) pour la simple raison que la formation reçue à l’université ne s’est point assurée de faire d’eux de véritables spécialistes du français écrit et oral. Ils trouvent qu’un accroissement du volume horaire de ces modules permettrait une maitrise de la langue cible. Autrement dit, il s’agit plutôt de remplacer les nombreuses heures consacrées aux cours théoriques par des heures consacrées à des contenus d’enseignement plus pertinents, en grammaire, par exemple. La totalité des enseignants signalent qu’il y a un déséquilibre entre la théorie et la pratique et qu’ils n’ont bénéficié d’aucune formation pédagogique et d’aucun stage externe. Ils espèrent que les concepteurs du programme de la licence de français mettent en œuvre une formation initiale adaptée à la réalité du terrain. Ils insistent sur l’accroissement du volume horaire octroyé aux modules de didactique et de psychopédagogie. Ainsi, nous constatons que non seulement, la pratique est d’une insuffisance criante mais, par ailleurs, les acquis théoriques en didactique restent en dessous de ceux acquis en d’autres matières. 93 Soraya BELKHITER Les enseignants interrogés signalent à travers les changements qu’ils proposent les lacunes de leur formation et expriment leurs besoins et leurs attentes en matière d’enseignement / apprentissage du FLE. Nous avons relevé que la totalité d’entre eux remettent en cause la fréquence du module de didactique, de pratique systématique de la langue et de techniques d’expression écrite et orale. Pour eux, la clé de la réussite passe par l’étude de ces matières tout au long de la licence. Les enseignants interrogés souhaiteraient une formation continue orientée vers la pratique, leurs permettant de pallier les lacunes en matière d’enseignement. Ils insistent sur l’indispensable continuité entre la formation de base et la formation continue. Or, il serait absurde d’espérer qu’une formation initiale ou/et continue pourrait leurs apporter la totalité de la formation qui doit être la-leur, mais une formation continue stimulant régulièrement leur autoformation pourra contribuer à la construction de leur identité professionnelle. L’autoformation est une activité individuelle qui permet à l’enseignant de se forger et de s’autoévaluer. C’est la formation de soi par soi. Barry Nyhan définit l’autoformation comme suit : « Se former, c’est apprendre à connaître ce que l’on ne sait pas. (…). C’est apprendre à résoudre les problèmes (…).Bref, s’engager dans l’autoformation, c’est éveiller en soi des capacités d’autonomie et de responsabilité. » (NYHAN, in PRÉVOST, 1994 : 47). Le formé met en œuvre une méthode de formation active visant à l’acquisition des compétences et la construction des savoir, des savoir-faire et des savoir-être. La certitude est loin de régner sur la meilleure façon de former les futurs enseignants ou, plus exactement, de les aider à se former. L’attitude la plus sage est sans doute de les doter d’un solide bagage de référence et d’un esprit de recherche. À cette fin, il serait judicieux de mettre en œuvre une formation ayant lieu dans un milieu où la recherche scientifique se pratique et le formé est un partenaire actif. Les enseignants interrogés reconnaissent l’impact positif de l’autoformation, mais n’affirment point qu’ils la pratiquent. Ils proposent également une série de suggestions indispensables à 94 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? une formation efficace des futurs enseignants de français. Ils trouvent qu’il serait utile de : — Équilibrer entre la théorie et la pratique ; — Octroyer un volume horaire plus accru aux modules à visée didactique, pédagogique, psychologique et linguistique ; — Rendre le stage pédagogique obligatoire ; — Effectuer le stage pédagogique au niveau des trois paliers d’étude : Primaire, moyen et secondaire ; — Étaler le stage pédagogique sur une durée plus longue. Pour que cette formule porte ses fruits, elle doit être profondément ancrée dans la réalité du terrain. Autrement dit, les concepteurs du programme de la licence de français devront partir des besoins et des lacunes des étudiants lors de l’élaboration de ce dernier. Conclusion De quoi les nouveaux enseignants de français ont-ils besoin ? À quel niveau se situe l’obstacle qu’ils n’arrivent point à franchir ? Au terme de cette enquête, nous certifions qu’il est indispensable pour un futur enseignant d’avoir une double formation : scientifique et pédagogique ainsi qu’une articulation entre ces deux domaines tout au long de son cursus universitaire. Cependant, ni l’une, ni l’autre ne seront achevées. Une formation continue et une autoformation permanente comblera sans doute les lacunes de la formation initiale. En d’autres termes, il ne s’agit pas pour un enseignant de recevoir une formation une fois pour toute. Il est nécessaire que ce dernier puisse régulièrement mettre à jour ses connaissances et remettre en question ses méthodes et ses pratiques pédagogiques. Toutefois, dans diverses disciplines, on a souvent tendance à former les étudiants comme de futurs chercheurs, notamment en licence de français où la formation apparaît comme académique et la pratique demeure moins fréquente. D’où le décalage entre la théorie la pratique. Apparemment, on croit avoir trouvé la solution en multipliant les cours théoriques. Une solution qui n’est guère adéquate puisqu’elle ne permet aucune maîtrise du français et aucune acquisition de connaissances en didactiques, 95 Soraya BELKHITER en pédagogie et en psychologie de l’enfant et de l’adolescent. Claude Lessard et Philippe Meirieu soulignent ce problème en ces termes : La politique à l’égard des universités introduit la notion de performance des universités. Celle-ci s’articule autour de deux enjeux : la qualité de la formation et l’excellence des établissements par des activités d’enseignement et de recherche de haut niveau. Par qualité de formation, on entend une formation mise à jour et actualisée, contenant des connaissances à la fine pointe émanant des résultats de recherche récents, évoluant au rythme des connaissances. C’est aussi une formation pertinente répondant à la fois aux besoins de développement du personnel et fournissant des outils nécessaires à l’insertion sociale et professionnelle. Une formation de qualité se veut également durable ; elle vise à ce que les étudiants acquièrent des habiletés techniques spécialisées directement utilisables sur le marché du travail(…) Enfin une telle formation privilégie la culture générale, se veut transdisciplinaire, cherche à développer l’esprit critique(…). (LESSARD, MEIRIEU, 2005 : 151). Une formation de qualité serait celle qui trouve un équilibre entre les disciplines. D’ailleurs, c’est la transdisciplinarité qui facilite l’insertion professionnelle des nouvelles recrues. Cependant, la formation initiale toute seule ne peut suffire pour que le formé soit doté de toutes les compétences, il apprendra au fur et à mesure qu’il exercera son métier. L’autoformation n’est pas non plus à négliger car« Apprendre est quelque chose que l’on fait et non quelque chose qui nous arrive ». (DEGALLAIX, MEURICE, 2003 : 13). Donc, le formé est censé participer activement à son apprentissage afin d’être doté d’un savoir-faire, d’un savoir-être et d’un savoir-devenir, en suivant diverses démarches tel qu’on le montre dans ce passage : Comment créer des conditions d’un auto-apprentissage ? En favorisant les activités d’investigation, d’élaboration, de production par les élèves eux-mêmes. Grâce à des lieux de documentation, des multimédias, des ateliers, des travaux de groupe(…) ou encore par l’approche de situations réelles. (GIORDAN, GUICHARD, GUICHARD, 2001 : 08). Les enseignants interrogés ont des lacunes, ils avouent ne pas être capables d’enseigner, ne pas maîtriser la langue qu’on leur 96 Quelle(s) évaluation(s) pour les futurs enseignants de français ? demande d’enseigner et certains d’entre eux optent pour une deuxième formation. Pour toutes ces raisons, nous pouvons certifier que la formation actuelle est loin d’être pertinente, comme l’atteste d’ailleurs à juste titre, l’enquête menée sur le terrain. Bibliographie — ABDENNEBI, A. (1993). Pour un système éducatif efficient. Tunisie : Cérès. — ALLOUCHE-BENAYOUN, J. et PARIAT, M. (2000). La fonction formateur. Paris : Dunod. — BIARD, J. et DENIS, F. (1993). Didactique du texte littéraire. Paris : Nathan. — BRAUN, A. et FORGES, G. (1998). Enseigner et apprendre la langue de l’école vers une culture de la réussite pour tous, Paris : De Boeck. — CARDINET, J. (1986). Évaluation scolaire et pratique. Bruxelles : De Boeck- Wesmael s.a. — COLLES, L. DUFAYS, J-L. MAEDER, C. (2003). Enseigner le français, l’espagnol et l’italien, Bruxelles : De Boeck Duclot. — COMBS, B.et POPE, J. (2006). Motiver ses élèves. Bruxelles : De Boeck. — DEGALLAIX, E. et MEURICE, B. (2003). Être enseignant. Bruxelles : De Bœck. — De LANDSHEERE G. (1979). Dictionnaire de l’évaluation et de la recherche en éducation. Paris : Presse universitaires de France. — GIORDAN, A., GUICHARD F. GUICHARD, J.(2001). Des idées pour apprendre. Paris : Delagrave. — LESSARD C. et MEIRIEU Ph. (2005). L’obligation de résultats en éducation. Bruxelles : De Bœck. — LIMBOS E. (1979). La formation des animateurs de groupes de jeunes. Paris : ESF Entreprise Moderne D’Edition. — MINDER M. (1999). Didactique fonctionnelle. Objectifs, stratégies, évaluation. Bruxelles : De Boeck Université. 97 Soraya BELKHITER — NYHAN, B.in PREVOST H. (1994).L’individualisation de la formation. Lyon : Chronique Sociale. — PELPEL P. 1998. Conseil et formation. Paris : Centre Régionale De Documentation Pédagogique. Sitographie — Agence Française pour le Jeu Vidéo : annuaires des sociétés de jeux vidéo et multimédia. (Juin 2004). Qu’est-ce que la formation ? (En ligne). URL : «http://afjv.com/juridique/030707_formation_1.htm », consulté le 20/12/2007. — Luc F. (Avril 2003).Améliorer la formation des enseignants. (En ligne). URL : « http://www.education.gouv.fr/cid373/intervention-deluc-ferry-ameliorer-la-formation-des-enseignants.html », consulté le 23/03/2008. — Ministère Éducation National. Mars 2007. Principe de la formation initiale et continue. (En ligne). URL : « http://www.cndp.fr/savoirscdi/metier/le-professeurdocumentaliste-textes-reglementaires/acceschronologique-aux-textes-reglementaires/20002009/circulaire-n-2007-045-du-23-fevrier-2007extraits.html », consulté le 15/03/2008. — Philippe, P. (1993). La formation au métier d’enseignant : complexité, professionnalisation et démarche clinique. (En ligne). 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L’hypothèse de départ est celle de penser que la prise en compte de la représentation permet réellement d’optimiser le processus d’apprentissage d’une langue seconde et /ou étrangère chez le jeune l’apprenant. Plus concrètement, il est proposé une grille de saisie (et d’analyse) de cette notion pour faire d’elle un « objet » offert à l’appréciation du linguiste tout autant que du didacticien. المل َخص أهمية التكَلم واعادة تأهيل مفهوم "التمثيل اللغوي" في هذه المساهمة َ تختص بتأكيد َ أو األجنبية) في/تعَلم اللغات (األم و/عملية اكتساب َ مجال الدراسات والتفكير المجرى في أن أخذ بعين االعتبار "التمثيل اللغوي" يمكننا حقيقة َ فرضية االنطالق هي.الوسط الجزائري .أو أجنبية لدى المتعَلم الشاب/من تحسين عملية تعَلم لغة ثانية و نقترح جدول قبض (وتحليل) لمفهوم التحليل اللغوي لنصنع منه،بصفة ملموسة .حد سواء اللسانيات ودارس "موضوع" يعرض لتقدير دارس َ التعليمية على َ َ 1 Abdelnour, Benazzouz, Maitre de Conférences à l’Université de Mostaganem (Département de français). 100 Texte d’orientation : idée de départ Il est question ici d’un positionnement de recherche qui s’intéresse à la notion de représentation1langagière ou sociolangagière2 en essayant au passage de plaidoyer pour sa (totale) réhabilitation3 dans le champ des réflexions menées sur le processus d’acquisition/apprentissage des langues (maternelles et/ou étrangères) en contexte algérien. Cela autorise de notre point de vue, d’une part une compréhension plus en profondeur des processus qui président à un apprentissage maximal par les jeunes apprenants algériens, mais également dans un second temps contribue activement à l’évaluation concrète4 de ce dernier. Notre entrée est purement (nécessairement) linguistique5 et s’inscrit donc en amont du processus « évaluatif »6 à proprement parler pour semble-il assurer cette nécessaire continuité ou continuum entre les différents cycles scolaires et l’université en contexte d’apprentissage/évaluation. Plus concrètement, la présente recherche propose une grille de saisie (et d’analyse) de cette notion pour faire d’elle un « objet » offert à l’analyse et à l’appréciation du linguiste tout autant que du didacticien. S’inscrivant donc dans une perspective réflexive strictement linguistique (l’apprentissage des langues, le discours sur elles), cette réflexion part de l’idée de questionner la notion de « représentation » en discours par ceux-là qui apprennent, comme moteur ou comme frein à l’apprentissage et à l’évaluation d’une langue (et à fortiori étrangère en contexte scolaire algérien). En d’autres termes, il s’agirait de partir du linguistique (des mots pour dire l’objet d’apprentissage) pour arriver à du métalinguistique (discours sur l’objet Comme une des formes d’évaluation de l’enseignement. Qui concerne la langue que le locuteur parle ou sur laquelle il est amené à produire du discours (méta-discours). 3 Il faut dire ici qu’à notre connaissance peu de place est accordée aujourd’hui à l’étude de ce phénomène dans le champ des réflexions et travaux menés par les chercheurs algériens et autres en la matière. 4 Et c’est là le travail de l’institution de l’école. 5 Et englobe du coup le deuxième axe proposé dans l’argumentaire qui est « L’évaluation dans le système éducatif algérien ». 6 Qui intervient généralement en fin de parcours scolaire. 1 2 101 Abdelnour BENAZZOUZ d’apprentissage) pour mieux revenir vers le linguistique (apprendre, évaluer l’objet d’apprentissage) ; c'est-à-dire mettre à profit ce que dit et sait (du coup) un apprenant sur la langue qu’il est en train d’apprendre pour mieux l’amener à la cerner, la distancer en discours pour mieux l’appréhender pour enfin l’apprendre et l’adonner à l’exercice « évaluatif » par lui ou par son enseignant. Tout l’objectif est celui de faire passer l’apprenant d’un processus « langue-objet » virtuel, déroutant et opaque à un processus « objet-langue » plus matériel/matérialisable et plus proche de l’apprenant par le biais de la mise en mots. Cette mise en mots, c'est-à-dire la matérialisation de l’objet d’apprentissage par celui-là même qui apprend fait de lui un sinon le premier évaluateur de son propre apprentissage. Repères théoriques Sans doute partons-nous, comme postulat majeur dans ce survol théorique sur la notion de représentation et de représentation langagière du constat fait (très tôt) par Labov quand, en commençant à s’intéresser aux discours sur les langues, il avait noté un (nécessaire) décalage entre l’usage de la langue et sa représentation, ce qui constituait en soi un axe de réflexion, indépendamment de l’étude de la langue en tant que système. Ainsi, les premières recherches sur ce sujet ont été conduites par Labov (1976) mais aussi par P. Trudgill (1974) et sa fameuse étude sur les femmes1. Sonia Branca Rosoff (1996) de son côté, faisait remarquer que les représentations langagières sont nécessairement constitutives des faits langagiers, en d’autres termes, que chaque langue véhicule/véhiculerait son propre imaginaire et sa propre vision du monde : « les notions de représentation et d’imaginaire langagiers désignent l’ensemble des images que les locuteurs associent aux langues qu’ils pratiquent, qu’il s’agisse de valeur, d’esthétique, de sentiment normatif, ou plus largement 1 Dans une enquête qui touchait le public de femmes, Trudgill montre que les femmes sont nombreuses à déclarer qu’elles utilisent des traits phonétiques valorisés-ceux qu’elles aimeraient utiliser- alors qu’en fait, elles ne les emploient pas ou rarement. (Branca-Rosoff, 1996: 81). 102 métalinguistique » (S. BRANCA-ROSOFF, 1996 : 79). En France, on citera notamment les travaux du GARS sur le français parlé avec Cl. Blanche-Benveniste et C. Jeanjean qui font remarquer à propos de la nature des représentations linguistiques « combien on s’illusionne facilement lorsqu’il s’agit de sa langue » (S.BRANCA-ROSOFF, in Boyer, 1996 : 81). Nous reprenons également à notre compte ici la définition proposée par Guenier de la représentation qui voit en elle « une forme courante (et non savante) de connaissance socialement partagée qui contribue à une vision de la réalité commune à des ensembles sociaux et culturels » (GUENIER. H, 1996 :146). Remontant un peu loin dans l’histoire de la représentation, il faudrait en reconnaitre la paternité à Émile Durkheim et à ses théories empruntées à la psychologie sociale. Elle est proposée pour la première fois par S. Moscovici (1960)1, et reprise depuis par bon nombre de sciences sociales, en pensant que l’ordre symbolique de choses participe à leur constitution : C’est, au contraire, dans un effort pour montrer que l’ordre symbolique, qui donne un sens au monde, fait partie des modes de constitution des réalités sociales qu’ont été importées en linguistique les théories de la représentation développées en psychologie sociale par S. Moscovici. (BOYER, 1996 : 82). Ainsi, la représentation est définie en psychologie comme le processus par lequel une image est présentée aux sens ; c’est-àdire quel(s) sens, signification(s), interprétation(s) nous greffons sur une image, un objet du monde extérieur qui nous entoure. Ressort également la dimension plurielle de la représentation (on emploie souvent représentation au pluriel), et par là même subjective, car les représentations varient et sont fonction de chaque individu dans sa différence considérée par rapport aux autres individus (combien même ils appartiennent à la même communauté). Moscovici postulait que la représentation sociale pouvait se comprendre à travers trois éléments combinés : les opinions, les attitudes et les stéréotypes. Ainsi dans la perspective Moscovitienne « On s’intéresse particulièrement 1 Étude de la représentation sociale de la psychanalyse, 1960, 650 p. 103 Abdelnour BENAZZOUZ aux opinions stéréotypées qui renforcent les consensus et soustendent les pratiques » (BOYER, 1996 :82). Sur un autre plan, cette notion de représentation s’est vue sollicitée par bon nombre de chercheurs en sciences du Langage, en tentant de lui donner un statut théorique et méthodologique au travers d’appellations diverses : « imaginaire linguistique », « attitudes linguistique », « représentations sociolinguistiques » et même « idéologies linguistique » (Bourdieu, Boyer, Houdebine, Labov, Lafont, in Boyer, 1996 : 15). Aussi à la notion de représentation se voit associée la notion de « norme », c'est-à-dire de « sécurité » et d’« insécurité linguistique » (Labov, 1976), ou phénomène d’hypercorrection (Gadet, 1989). La sociologie et son évolution se trouve également impliquée ici (Bourdieu, 1975) en posant que « le regard que l’on porte sur la réalité, la perception qu’on en a, les propos que l’on tient sur elles, ont eux aussi une réalité et une efficacité. Ceci amène à privilégier le rôle pragmatique du langage dans la construction des croyances collectives » (BRANCA-ROSOFF, in BOYER, 1996 :82). Aussi ce lien entre pratique linguistique et représentation se trouve sollicité lors de : La prise en compte de la signification qu’ont les faits sociaux pour les sujets parlants s’impose particulièrement lorsqu’il s’agit de la notion de langue, réalité résultant d’interventions multiples où s’imbriquent des techniques de fixation conjointement descriptives et prescriptives. D’ailleurs, avant d’avoir établi la structure abstraite des signes qui justifie qu’il parle d’un système, le linguiste est bien obligé de prendre comme une donnée des entités telles que le français ou l’anglais. (BRANCA-ROSOFF, 1996 : 83). Aussi cela fait une vingtaine d’années que les sociolinguistes de Rouen qui se réclament de J.-B. Marcellesi, ou les linguistes de Montpellier influencés par Robert Lafont travaillent autour des représentations. Largement inspirés de la perspective Lacanienne, des auteurs comme J.-Cl. Milner (1983) distinguent deux opérations qui s’effectuent au niveau de la représentation : d’un côté, la séparation entre les langues par le biais de la nomination (langue, parler, dialecte, etc.), et de l’autre « l’attribution de propriétés permettant de les doter d’une représentation » (Branca-Rosoff, In Boyer : 84). Dans la même 104 perspective, A.-M. Houdebine (1994), à travers des recherches menées sur « l’imaginaire linguistique » analyse ce rapport qu’ont les locuteurs à la norme et l’influence, ainsi que le poids des représentations sur les comportements et les attitudes sociolangagiers. Ses analyses réhabilitent la place des locuteurs comme des acteurs déterminants dans la dynamique des langues « à la rencontre entre le rapport intime qu’ils ont établi à la parole et leurs attitudes face aux contraintes du système conventionnel » (BRANCA-ROSOFF, 1996 : 85). Aussi, souligne Branca-Rosoff (1996) que les Historiens des théories du langage ont contribué à mettre en question le dogme saussurien d’une masse parlante qui ne saurait agir volontairement sur une langue, et d’un système linguistique toujours déjà là que les locuteurs se bornent à actualiser. (Ibid. 85). Suite à cette brève présentation théorique, plusieurs points semblent plaider à la faveur de la prise en compte de la dimension « représentationnelle » d’une langue dans le rapport qu’a le locuteur à celle-ci. La question de la représentation supposerait donc le paradigme qui oppose la norme à l’usage, c'est-à-dire ce qui est prescriptif, c'est-à-dire les usages « normés, normaux » (Branca-Rosoff, 89), par opposition à des usages qui seraient plus individuels et particuliers par rapport à cette norme. Pourquoi nommer et en quoi est-ce utile ? Le postulat L’hypothèse adoptée est que le procédé nominatif d’une langue en situation d’apprentissage, ainsi que le fait de provoquer des discours épilinguistiques sur elle, (toujours au moment de l’apprentissage) engage un rapport positif (ou du moins pacifique) à cette dernière et contribue de façon optimale au processus d’apprentissage. D’autant plus que l’acte nominatif en lui-même (la mise en mots de l’objet-langue) permet de diminuer la distance entre l’apprenant et son objet d’apprentissage, et autorise une meilleure aptitude à apprendre. Nommer c’est matérialiser par des mots une pensée que l’on n’a pas exploré ni saisi auparavant surtout pour un apprenant qui 105 Abdelnour BENAZZOUZ s’initie à une langue étrangère (le cas du français ou de l’anglais). Mettre des mots sur une pensée est une forme de s’approprier la langue qui passe à ce moment d’une « langue-objet » distante de l’apprenant à un « objet-langue » plus accessible du coup. Nommer permet enfin d’ancrer1 la réalité de la langue et son sens dans le quotidien de l’apprenant. Plus encore, c’est un moyen d’évaluer combien la nomination peut exprimer le degré d’appropriation (ou pas d’ailleurs) de la langue objet d’apprentissage. Démarche proposée Nous proposons à ce stade un dispositif (stratégie) nominatif qui permet de cerner l’évolution de la représentation chez l’apprenant. Notre approche est diagnostique- diachronique de la représentation linguistique et de son impact sur le processus d’apprentissage de langue. Elle propose deux niveaux d’analyse : micro (évaluation individuelle) et macro (évaluation collective) : 1- Au niveau Micro : on se focalise sur chaque apprenant afin d’identifier/évaluer sa représentation en amont, au milieu et en aval de son parcours scolaire annuel. 2- Au niveau Macro : on se focalise sur les représentations collectives (par classe ou par niveau), en essayant d’observer la/les tendances qui se dégagent (positive(s), négative(s), valorisée(s)/valorisante(s), dévalorisée (s)/dévalorisante(s) par rapport au parcours commun d’apprentissage. Une fois regroupés les dossiers des apprenants « profilés », on procède à la systématisation des données recueillies (par classe, par établissement, par ville, voire par commune) afin de dégager une tendance générale qui va nous donner une orientation claire dans la structuration des représentations des apprenants d’une langue 2. Ces deux études auront pour finalité de dresser un parcours et même un profil de la représentation chez l’apprenant algérien qui s’initie à une langue seconde. 1 Et surtout de faire voir cet ancrage à l’observateur. 106 Sur un plan plus méthodologique, On propose parmi les tests afin d’évaluer la représentation, une batterie de questions informelles sur la langue en cycle d’apprentissage, mais ces questions interviennent à différents temps et sont modifiées en fonction de l’évolution du parcours de l’apprenant. Cette batterie de questions s’étale sur trois étapes réparties sur toute l’année scolaire, il s’agit en l’occurrence de trois processus qui sont : la nomination, la catégorisation et enfin l’appréciation. La nomination /identification : questions au large On aura en début de parcours (premier trimestre) des questions1 très larges sur la langue, des questions qui doivent se focaliser sur le (simple) processus de nomination/désignation de l’objet-langue. Les questions doivent induire inconsciemment chez l’apprenant des opérations mentales d’identification de l’objet d’apprentissage. Ces questions formulées au large ont pour but de faire parler l’apprenant au maximum (BRES, 1999 : 63) sans intervention de l’observateur qui peut influencer les réponses dans un sens ou dans l’autre : Qu’est-ce que tu penses de cette langue ? Est-ce que tu aimes cette langue ou pas ? Tu peux me dire pourquoi ? Que représente cette langue pour toi ? — La finalité de cette première étape est de dresser un (premier) imaginaire linguistique de la L2 chez l’apprenant/récepteur qui passe par la première forme d’appropriation d’une langue qui est la nomination ou la mise en mots. Mais aussi amener l’apprenant à matérialisé et à rationaliser via des mots son objet d’apprentissage, façon de se rapprocher de lui et de le saisir comme une entité, un tout qui fait sens et non pas comme un objet opaque, abstrait et difficile à saisir qui peut parfois faire peur parce qu’apprendre une (nouvelle) langue n’est jamais un processus rationnellement facile pour un jeune enfant. 1 Il est important de mentionner ici que les questions adressées à l’apprenant soient formulées dans sa langue maternelle, d’une part, parce qu’il est plus à l’aise à répondre dans la langue qui exprime au mieux ses ressentis, ses émotions ce qui peut assurer en un sens la fiabilité de son discours/dires et d’autre part parce qu’il ne possède pas assez de mots dans la langue 2 (la langue qu’il est en train d’apprendre) pour pouvoir exprimer correctement sa pensée réelle. 107 Abdelnour BENAZZOUZ La catégorisation : questions à l’étroit Au milieu du parcours scolaire (second trimestre), on établira des questions plus resserrées et plus tendancieuses donc qui vont se centrer sur le processus de catégorisation, de l’objet-langue ; ces questions doivent induire implicitement chez l’apprenant des opérations mentales de catégorisation et de sélection, et sont formulées ainsi : Est-ce que l’apprentissage de cette langue est facile pour toi ou au contraire, c’est un apprentissage difficile ? Tu peux me dire pourquoi ? La finalité de cette seconde étape est de visualiser le parcours d’apprentissage de l’apprenant, de pouvoir dresser une courbe ascendante ou bien descendante par rapport à ses motivations quant à la poursuite ou non de son apprentissage de langue. L’appréciation : questions ciblées En fin de parcours (troisième trimestre), on opte pour des questions plus tendancieuses et plus construites qui vont se centrer sur le processus d’appréciation de l’objet-langue. Ces questions doivent induire des opérations mentales de jugement et d’appréciation. Cette dernière série de questions est présentée comme suit : Est-ce que tu penses que ta vision a changé par rapport à cette langue. Qu’est-ce qui a changé selon toi ? Tu peux m’expliquer pourquoi ? Tu peux me donner des exemples ? Cette étape vise à noter les changements ou bien l’évolution dans les représentations socio-langagières de l’apprenant en fin de parcours scolaire, en vue de dégager ce (nécessaire) regard progressif1 de l’apprenant sur la langue qu’il est en train d’apprendre. 1 Nous faisons bien évidemment la distinction ici entre la capacité de l’apprenant, au passage jeune enfant, à saisir le réel qui l’entoure (la langue qu’il apprend) et la capacité à catégoriser la saisie de ce réel (produire un jugement sur la langue qu’il apprend en ayant parfaitement conscience de ce jugement). Il importe donc à l’observateur de déceler ce qu’il peut considérer comme étant une appréciation ou bien un jugement produit et en faire après des catégories d’analyse. 108 Pour finir La prise en compte de la représentation socio-langagière, de sa saisie et de son étude dans un parcours de langue et d’évaluation de langue est une donnée, qui nous parait non négligeable en contexte linguistique algérien où l’apprenant est exposé à l’apprentissage (forcé) de plusieurs langues étrangères en cycle primaire. Il importe d’insister plus globalement sur la revalorisation du terrain métalinguistique, pour englober toutes les facettes intrinsèques à l’apprentissage d’une langue dite seconde en contexte algérien (ou non maternelle, le français, l’arabe dit standard), mais aussi à son évaluation et contribue réellement de notre point de vue, à la réussite de l’acte pédagogique sur le double plan, puisqu’il permet de fournir à l’enseignant un maximum de données « linguistiques » observables et mesurables réelles sur ses apprenants (leur dispositions, enclins, penchants, préférences, répulsions, etc.,) et de l’autre côté installe l’apprenant dans une dynamique positive en lui permettant de« visualiser » son apprentissage dans le temps et dans le parcours pédagogique. Mettre des mots observables et vérifiables sur une entité virtuelle qui est la langue signifie une première exposition à la langue à apprendre et fonde ainsi un des actes de socialisation par le linguistique ce qui constitue en soi un des rôles majeurs assignés à l’organisme de l’école. Bibliographie — BENAZZOUZ, A., (2013), Spatialisation, territorialisation et mode(s) d’appropriation linguistique dans le quartier « huppé » de la Pépinière à Mostaganem, Thèse de doctorat. Université de Mostaganem. Département de français. — BLANCHE BENVENISTE, C., et JEANJEAN, C., (1978), Le français parlé, Paris, Didier érudition. — BOUKOUS, A., (1999), « Le Questionnaire », in L’enquête Sociolinguistique, Sous la direction de LouisJean Calvet et Pierre Dumont, Paris, L’Harmattan, pp.15-24. 109 Abdelnour BENAZZOUZ — BOURDIEU, P., BOLTANSKI, L., (1975), « Le Fétichisme de la langue », Actes de la Recherche en Sciences Sociales p.46 — BOYER, H., (1996), Sociolinguistique : territoire et objets, Sous la direction d’Henri Boyer, Paris, Delachaux et Niestlé S. A., Lausanne (Switzerland), 287 p. — BOYER, H., PRIEUR, J-M., (1996), « La variation (socio)linguistique », In Sociolinguistique : territoire et objets, Sous la direction d’Henri Boyer, 1996 Paris, Delachaux et Niestlé S. A., Lausanne (Switzerland), pp. 35-68. — BRANCA-ROSOFF, S., (1996), « Les imaginaires des langues », in Boyer, Sociolinguistique : territoire et objets, Paris, Delachaux et Nestlé, 79-114 : pp 79-81-8283-84-85-89. — BOYER, H., (1996), Sociolinguistique : territoire et objets, Paris, Delachaux et Nestlé, Paris, pp. 79-114., 1996. — BRES, J., (1999), « L’entretien et ses techniques », in L’enquête Sociolinguistique, Sous la direction de LouisJean Calvet et Pierre Dumont, Paris, L’Harmattan pp. 61-67. — GADET, F., (1989), Le français ordinaire, Paris, Armand Collin, 1989. — GUENIER. H., (1996), « Représentations linguistiques », in Moreau. M. L. Sociolinguistique, concepts de base, Mardaga, Liège,P. 146-147. — HOUDEBINE, A.M., (1994), « L’unes langue », in Floy J.M., La qualité de la langue ? Le cas du français, Paris, Champion. — LABOV, W., (1978), Le parler ordinaire. Paris : Éditions de Minuit., 1978. — MILNER, J.C., (1983), Les noms indistincts, Paris, Seuil, 1983. — MOSCOVICI, S., (1960), Étude de la représentation sociale de la psychanalyse, Presses Universitaires de France, 1960. 110 111 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, Université de Bordj-Bou-Arréridj ENS- Kouba, Alger. [email protected] ; [email protected] Approche par compétences et évaluation des acquis Résumé Dans tout acte d’enseignement apprentissage, l’évaluation occupe un statut important parce qu’elle permet de suivre la progression de l’apprenant tout au long de son parcours de formation et permet aussi de certifier ses résultats. La réforme, qu’ont connue tous les niveaux d’enseignement du cycle primaire à l’enseignement supérieur, particulièrement en adoptant l’approche par compétences, a eu des incidences sur les contenus d’enseignement et notamment sur la perception de l’activité évaluative et de ses fonctions. Cela nous amène à nous demander si ces réaménagements permettent-ils effectivement de passer d’une évaluation des connaissances à celle des compétences ? الملخص يحتل التقييم مكانة هامة ألنه يسمح بمتابعة تطور المتعلم،في كل عملية تعليم وتعلم اإلصالح الذي.طوال مشواره التكويني ويسمح أيضا بالحصول على شهادة تقيم نتائجه خاصة بإتباع،عرفنه كل المستويات التعليمية من الطور االبتدائي إلى التعليم العالي كانت له تأثيرات على المضامين التعليمية وباألخص على مفهوم العملية،المقاربة بالكفاءات .التقييمية ووظائفها وهذا يقودنا للتساؤل فيما إذا كانت هذه التعديالت تسمح فعال باالنتقال من تقييم .للمعارف إلى تقييم للكفاءات 112 Approche par compétences et évaluation des acquis Après une période de résistance au changement spécialement dans le domaine éducatif, notre système éducatif n'a pas pu échapper aux mutations survenues dans le monde. Il s'est fixé alors une finalité difficile mais ambitieuse qui consiste à revoir les contenus d'enseignement afin qu'ils deviennent plus appropriés aux diverses exigences de l'école de la société algérienne. Même si le changement a été difficile parce que le poids du passé demeure toujours et il est, selon les propos de Ferhani Fatiha Fatma, à l’origine de la difficulté à « injecter massivement du changement » (Ferhani, 2006 : p.14).Tous les niveaux d’enseignement ont été concernés par ces changements du cycle primaire à l’enseignement supérieur. Le réaménagement des méthodes d’enseignement et des contenus à enseigner indique une autre image de l’éducation qui serait, selon Sobhi Tawil, comme « une rupture pédagogique avec le passé. Cette nouvelle vision se définit par une approche par les compétences plaçant l’apprenant au centre de l’apprentissage et donnant une plus grande autonomie à l’enseignant ». (TAWIL, 2005 : p.34) La réalisation d’enseignement des nouveaux programmes Les nouveaux programmes ont été effectués en se référant à une nouvelle approche qu'est l'approche par les compétences dérivée du constructivisme et qui est centrée sur l'apprenant tout en se basant sur ses actions face à des situations-problèmes. En réalité, le recours à l'approche par compétences avait pour objectif que l'école arrive à satisfaire les exigences de la vie moderne et prépare l'élève à devenir un citoyen ayant la capacité d'agir dans des situations de la vie quotidienne et pouvant accéder au monde de l'information. En termes plus simples, ce qui constitue le principe de l'approche par compétences c'est que dans une telle approche, il n’est plus question de transmettre à l'apprenant des savoirs qu'il est sensé restituer le jour de l'examen mais plutôt de le doter d’aptitudes lui permettant un réinvestissement des savoirs acquis à l'école dans des situations de la vie quotidienne. Parlant toujours de ce concept, Le Boterf précise : 113 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, La compétence n’est pas un état ou une connaissance possédée. Elle ne se réduit ni à un savoir ni à un savoir-faire. Elle n’est pas assimilable à un acquis de formation. Posséder des connaissances ou des capacités ne signifie pas être compétent, (…) Il n’y a de compétence que de compétence en acte. La compétence ne peut fonctionner « à vide », en dehors de tout acte qui ne se limite pas à l’exprimer mais qui la fait exister. (LE BOTERF, 1994 : p.16) Alors, en adoptant une approche par compétences cela signifie « rendre les apprentissages plus actifs ». Dans cette approche, comme l'explique Xavier Roegiers, l’attention est centrée particulièrement sur l’organisation de situations d’apprentissage pouvant remplacer les cours magistraux basés surtout sur l’activité de l’enseignant. Il est question, dès lors, de « mettre l’élève au centre des apprentissages, au lieu de laisser l’enseignant au centre de ces apprentissages ». (ROEGIERS, 2006) L'adoption de l'approche par compétences dans le système rénové a eu certainement des incidences d'une part sur l'élaboration des programmes qui doivent s'inscrire dans une approche constructiviste en associant l'apprenant à la construction de ses savoirs. Et d'autre part, sur la perception même de l’activité évaluative et de sa fonction. Le recours à l’évaluation formative a ainsi pour finalité une remédiation des acquis au cours du processus d’apprentissage. De l'approche par les objectifs à l’approche par les compétences Dans le domaine de l'enseignement, l'approche par les compétences n'a pas évolué indépendamment de l'approche par objectifs. L'approche par les compétences est venue en réalité pour dépasser ou en quelque sorte couvrir les insuffisances qui ont été remarquées dans la pédagogie par objectifs. Beacco (2007) précise qu’il n’est pas facile, du moins dans le domaine de l'enseignement, de définir le concept de la compétence sans que celui de l'objectif pédagogique ne soit défini. Cela est dû au fait qu'une compétence n'est considérée, en fin de compte, que comme un objectif à atteindre par les programmes d'enseignement. 114 Approche par compétences et évaluation des acquis En réalité, ce qui distingue les deux approches c’est que dans l’approche par compétences le principe que l’élève peut apprendre mieux en agissant est développé, c’est-à-dire : — quand on met l'élève effectivement dans des contextes de production réelles ; — quand il est impliqué réellement dans la réalisation de diverses activités qui le poussent à mobiliser et à intégrer des acquis antérieurs (ce que Piaget appelle les schèmes antérieurs) ; — lorsque la situation d’apprentissage proposée est significative pour lui ; — lorsque les erreurs commises, lors du processus d'apprentissage et qui peuvent constituer un obstacle pour des apprentissages ultérieurs, sont utilisées par l’enseignant afin de réguler les apprentissages ; — quand l’élève interagit avec les autres pour la construction du savoir (cela se rapproche de ce que Vygotski nomme la zone proximale de développement). Ce que l'élève apprend à réaliser collectivement (avec l'aide des autres élèves ou de l'enseignant) peut l'amener à réaliser plus tard individuellement la tâche. L’approche par compétences permet également de développer diverses stratégies qui permettent d'impliquer l'ensemble des élèves dans le travail tel que le travail coopératif qui permet à l'ensemble du groupe de chercher la démarche convenable pour la réalisation de la tâche demandée. Certes, dans une approche par objectifs, des savoirs et des savoir-faire sont mobilisés afin de répondre à une consigne donnée mais, le problème réside dans le fait que la tâche s'effectue selon une consigne unique décidée préalablement par l'enseignant dans l'absence de toute négociation ou initiative de la part de l'élève. Pourquoi l'approche par compétences ? Dans un article publié par Johsua, l'auteur aborde la notion de « compétence » et précise que l'intérêt pour cette notion vient de la constatation d'une énorme distance entre le savoir formalisé à propos d'un domaine de pratique précis et la nature des techniques mises en œuvre dans celle-ci. 115 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, L'auteur explique cet intérêt pour les compétences dans ces propos : Une fois hors du système scolaire, c'est « la compétence » qui est plutôt la manifestation socialement exigible de la maîtrise d'un domaine de pratiques, on comprend que l'on cherche, et depuis longtemps, à l'atteindre le plus directement possible, par exemple en se passant au maximum de l'étude formalisée dans des institutions comme les écoles. (JOHSUA, 1999 : p.115) Le système éducatif en Algérie a connu, comme dans beaucoup de pays dans le monde, depuis quelques années des mutations. Ces changements se voient dans ce qui est appelé « le curriculum réel1 » : les pratiques de classe, les pratiques d'évaluation et les pratiques de formation des formateurs,… Actuellement, la plupart des systèmes éducatifs s’accordent pour mettre l'approche par les compétences au centre des curriculums. Cette opinion partagée par la majorité est le résultat d’une prise de conscience de l’importance de cette nouvelle approche pour faire face aux exigences de l’école et de la société actuelles que ce soit sur le plan économique ou social. Cependant, cette nouvelle notion n’est pas « entièrement stabilisée », c’est-à-dire que les significations qu’on lui attribue sont nombreuses et par conséquent elle est « traduite à travers un certain nombre de variantes dans les curriculums ». Toutefois, quelles que soient les diverses façons de concevoir cette approche, toutes s’accordent sur les aspects cités cidessous (ROEGIERS, 2008). Les contenus d’enseignement vont plus loin que les savoirs et les savoir-faire Aujourd’hui, en classe, celui qui détient le pouvoir n’est plus, comme autrefois, l’enseignant, parce qu’il représente celui qui sait tout, mais il est détenu plutôt par celui qui agit. 1 Selon le dictionnaire des concepts clés, un curriculum est « un énoncé d’intention de formation comprenant, un public cible, des finalités, des objectifs, des contenus, des modalités d’évaluation et la planification d’activités » C’est le concept approprié puisque nous trouvons également une partie de cette définition dans les livrets de l’enseignant. 116 Approche par compétences et évaluation des acquis Dans une approche par compétences, les savoirs ne sont plus considérés comme des préalables à toute activité scolaire mais, ils sont vus comme un élément en perpétuelle construction. Le but principal n’est plus de transmettre des « savoirs scolaires » qui peuvent emprisonner l’élève dans une habileté technique étroite, mais plutôt de permettre à l’élève de produire des savoirs dans l’activité afin d’aboutir à des résultats pratiques. Dans ce sens les savoirs visent le développement de ses capacités psychiques supérieures, au sens que donne Vygotski. Et c’est justement de cette manière que les diverses connaissances sont appelées à devenir des compétences. C’est l’élève qui est l’acteur principal de ses apprentissages Les recherches récentes en sciences de l'éducation ont démontré le rôle important de la mobilisation cognitive de l'élève pour assurer un enseignement efficace. C'est-à-dire que pour assurer un enseignement de qualité, l'élève doit jouer un rôle dans la construction de ses apprentissages. L’activité de l’élève peut se manifester de différentes façons : travail en petits groupes, réalisation de projets, recherche sur Internet, … Certes, en classe l'élève ne peut pas agir tout seul, il a toujours besoin de l'enseignant qui, au lieu de monopoliser la parole et faire des discours, joue le rôle de médiateur et de facilitateur de l’activité de l’élève. Le savoir-agir en situation est valorisé Dans une approche par compétences la place accordée aux situations complexes est reconnue par les défenseurs de cette approche. Certains, comme le précisent Gérard de Vecchi et Nicole Carmona-Magnaldi (De Vecchi, Carmona-Magnaldi, 2002 : p.95), voient plutôt les situations difficiles comme « source des apprentissages (situations d’exploration, situations de recherche, situations didactiques…) », d’autres les considèrent plutôt comme « aboutissement des apprentissages (situations d’intégration, ou « situations cibles »), d’autres encore insistent 117 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, sur leur fonction comme « moyen d’évaluer les élèves (situations d’évaluation) ». Malgré les différences existantes dans les différentes conceptions, toutes sont d’accord sur le fait que la complexité est « une composante des apprentissages à part entière ». On peut considérer que ces trois caractéristiques constituent aujourd’hui selon Linda Allal « les dénominateurs communs à toutes les manières de comprendre l’approche par compétences » (ALLAL, 1999). Aujourd'hui, le temps alloué aux études n'est pas suffisant pour l'acquisition du savoir nécessaire surtout avec toutes les mutations qu'a connues et connait toujours la société. La réalité vécue nous montre que les apprentissages pour un nombre élevé d'élèves sont superficiels car ils n'arrivent pas mettre en pratique ce qu'ils ont appris à l'école. Cela constitue un obstacle pour la réussite scolaire et professionnelle. Il arrive souvent que les élèves oublient des savoirs qu'ils ont mémorisés pour un examen. Même s'ils se souviennent, ils ne gardent qu'une infime partie des savoirs acquis tout simplement parce qu'ils n'ont pas eu la chance de mettre en pratique ses connaissances dans de véritables situations ayant un sens. Face à cette situation, l'école doit, comme le précise Xavier Roegiers (ROEGIERS, Op.cit), se tourner vers une méthode d'enseignement qui s'adapte aux perpétuelles progressions que connaît le monde. Une méthode qui favorise l'apprentissage actif et durable. Un apprentissage basé sur le principe de compréhension et de la mise en application des savoirs. En mettant l'accent sur l’aspect pratique, l'approche par les compétences vise à préparer l'élève à devenir autonome et savoir agir dans les différentes situations de la vie. Par ailleurs, avec cette méthode, la conception de l’évaluation change. Elle devient plus positive. Les nouveaux programmes d’enseignement basés sur l’approche par compétences imposent de nouveaux modèles d'évaluation : (BENBOUZID, 2009 : 116). L'évaluation ne doit pas se fonder sur l'appréciation du travail en se basant sur les erreurs mais elle doit être plus positive et servir à préciser les points forts de l'élève et doit également 118 Approche par compétences et évaluation des acquis permettre de repérer les difficultés afin d’y remédier en prenant les mesures convenables. L'évaluation doit s'effectuer en deux parties. D'abord, lors de l'évaluation formative l'enseignant vérifie la progression des apprentissages de l'élève. Il le guide et l'oriente afin d'atteindre les objectifs fixés au départ. Ensuite, l'évaluation sommative a pour but de vérifier si l'élève possède les compétences nécessaires lui permettant l’accès à l'étape suivante L’approche par compétences et la réalité du terrain L’évaluation occupe un statut important dans le parcours de formation de tout apprenant. À l’université, sa fonction ne se limite pas à attribuer à l’étudiant une note mais, elle lui assure l’accès à des paliers supérieurs de sa formation et elle devrait également permettre à tout enseignant évaluateur d’améliorer les enseignements qu’il dispense. Tout au long de son cursus, l’étudiant doit être évalué de manière permanente à travers les différents travaux de recherches et activités qu’il est appelé à effectuer soit pendant les cours ou ailleurs (fiche de lecture, exposés,…). Ces différentes tâches et activités d’évaluation permettent aux étudiants d’avoir des notes et de passer d’une année à une autre mais la question qui se pose : ces tâches permettent-elles réellement d’évaluer des compétences ? Ne serait-on pas dans une situation où on fait « passer tout le monde pour satisfaire tout le monde : les étudiants (en obtenant le fameux sésame qui leur ouvre la porte du travail) et la tutelle (pour dire que les réformes sont une véritable réussite) ? (MEKHNACHE, 2013 : 154). Si nous revenons à la réalité de ce qui est pratiqué sur le terrain (que ce soit dans nos établissements scolaires ou même à l’université), de nombreuses difficultés surgissent. Pour mettre l'élève réellement dans l'approche par compétences, il faut qu'il y ait d'abord certaines conditions parmi lesquelles : être dans une classe non surchargée (15 à 20 apprenants) et avoir également un emploi de temps allégé afin de permettre à l'élève de faire des recherches. Sans oublier aussi ceux qui sont chargés d'appliquer cette approche c'est-à-dire les enseignants qui doivent également être bien formés pour savoir ce qu'il faut faire 119 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, sur le terrain. Cependant, la réalité du terrain montre complètement le contraire. En réalité, la volonté et l'ambition des concepteurs des programmes d'introduire dans le nouveau programme certaines innovations les a poussés à agir de façon qu'ils ont perdu de vue que les meilleurs innovations sont celles qui prennent en considération le contexte dans lequel elles s'implantent. Au cas où ces conditions sont absentes, il est fort possible que ces innovations donneront leurs fruits uniquement dans les milieux favorisés et particulièrement avec des élèves favorisés et des enseignants privilégiés. Cette situation nous amène à nous interroger : est-ce que ce qui est pratiqué sur le terrain vise effectivement à développer et à évaluer les compétences des apprenants ? Parlant toujours de cette nouvelle démarche, Perrenoud ajoute : Une approche par compétences n’existant que dans les textes ministériels, à laquelle nombre d’enseignants n’adhéreraient pas, rendrait les règles du jeu scolaire encore plus opaques et les exigences des professeurs encore plus diverses, les uns jouant mollement le jeu de la réforme, les autres enseignant et évaluant à leur guise. (PERRENOUD, 2000) Donc, cela nous amène à dire que la formation des enseignants est indispensable. Former « des praticiens réflexifs » désigne : La personne qui se montre, d'une part, de décrire et d'analyser sa pratique ainsi que d'en examiner l'efficacité et d'autre part, de créer ou d'adapter ses propres modèles de pratique en tirant profit des modèles existants (...) afin de rendre sa pratique plus efficace.(LA FORTUNE et al., 2001 : 205) Dans l’absence d’une réelle formation des enseignants, les conceptions de l’évaluation pour les enseignants restent limitées « au stade de la certification sinon au stade de remédiation aux difficultés d’acquisition des savoirs disciplinaires au moyen de séquences reprenant ou réexpliquant les cours incompréhensibles ». (HAROUN, 2013 : 10) Il importe donc, comme le précisent Jonnaert et Vander Borght, de se demander si les systèmes éducatifs qui optent pour 120 Approche par compétences et évaluation des acquis l’approche par compétences disposent des moyens nécessaires qui leur permettent d’éviter ses dérives. Ils ajoutent : « le plus fou serait en effet de prétendre développer des compétences sans s’en donner les moyens pédagogiques ». (Jonnaert & Vander Borght, 1999) Les auteurs précisent également que l’un de ces moyens a trait à la formation des enseignants et leur adhésion aux nouvelles approches et modèles de l'apprentissage : le constructivisme et l'approche par compétences. Le pire serait, comme l’affirme Bassis (1998), que l’approche par compétences ne se concrétise pas dans les pratiques enseignantes qui demeurent enfermées dans une sphère d'enseignement et d'évaluation traditionnelle. Et de ce fait cette démarche ne sera « présente que dans les textes ». L'auteur ajoute que dans un cas pareil, les choses seront davantage compliquées pour l'apprenant parce qu'il est d'une part perdu entre les objectifs visés par le programme et d’autre part, avec la relation au savoir et aux compétences mises réellement en œuvre en classe. L'auteur précise enfin que « pour éviter le scénario catastrophe, il faut sans doute, à moyen terme, agir sur la formation initiale des professeurs. L’urgence n’est tant de les instrumenter que de leur donner des raisons d’adhérer à la réforme curriculaire ». Bibliographie — ALLAL, L., (1999). « L’énigme de la compétence ». Raisons éducatives, n°2. Bruxelles : De Boeck. pp.77-94. — BASSIS, O., (1998). Se construire dans le savoir, à l’école, en formation d’adultes. Paris : ESF. — BEACCO, J-C., (2007). L’approche par compétences dans l’apprentissage des langues. Paris : Éditions Didier. — BENBOUZID, B., (2009). La réforme de l’éducation en Algérie. Enjeux et réalisations. Alger : Casbah Éditions. — DE VECCHI, G., & CARMONA-MAGNALDI, N., (2002). Faire vivre de véritables situations-problèmes. Paris : Hachette. 121 Djemâa BENSALEM et Samra BENSALEM, — FERHANI, F-F, (2006). « Algérie, l’enseignement du français à la lumière de la réforme ». Le français Aujourd’hui, n° 154, pp.11-18 — HAROUN, Z., (2013). « L’évaluation dans l’espace « tutorat » du système LMD à l’université algérienne : quelle (s) formation (s) pour quel(s) enjeu (x) ? ». Actes du 25ème colloque de l’ADMEE-Europe Fribourg : Évaluation et autoévaluation, quels espaces de formation. — JOHSUA, S., (1999). « La popularité pédagogique de le notion de "compétence" peut-elle se comprendre comme une réponse inadaptée à une difficulté majeure ? ». In, Raisons Éducatives, L’énigme de la compétence en éducation. De Boeck-Université (Paris- Bruxelles), n°2. Coordonné par Joaquim Dolz et Edmie Ollagnier. — JONNAERT, Ph. & VANDER BORGHT, C., (1999). Créer des conditions d’apprentissage. Un cadre de référence constructiviste pour une formation didactique des enseignants, Bruxelles : De Boeck. — LAFORTUNE, L. ; DEAUDELIN, C. ; DOUDIN, P-A & MARTIN, D., (2001). La formation continue. De la réflexion à l'action. 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Elle permet de voir si ces derniers se sont approprié les connaissances dispensées par le professeur. La dernière réforme du système éducatif algérien voit qu’il est nécessaire de construire une véritable politique de l’évaluation des élèves au service des apprentissages et de la réussite de tous. Cependant, il est à remarquer qu’il y a une absence de continuité et de coordination entre les cycles scolaires et l’université au niveau de l’évaluation d’où l’échec des étudiants dû à l’absence de collaboration entre les deux secteurs. Cette contribution se donne pour objet de voir quelle place a-t-on accordé à l’évaluation et aux pratiques évaluatives ? L’évaluation est-elle appropriée par rapport aux situations d’enseignement / apprentissage ? Existe-t-il une continuité entre les trois cycles scolaires et l’université au niveau de l’évaluation ? الملخص انه يتيح معرفة إذا ما كان.التقييم المدرسي هو المراقبة والتحقق من المعرفة األكاديمية للمتعلمين االصالح األخير في نظام التعليم الجزائري يرى.المتعلمين قد التقطوا المعرفة المقدمة من قبل المعلم ومع ذلك تجدر االشارة إلى.ضرورة بناء سياسة حقيقية لقييم الطالب في خدمة التعلم والنجا ح للجميع أن هناك عدم االستم اررية والتنسيق بين أطوار المدرسة والجامعة في التقييم حيث بفشل الطالب لعدم .وجود تعاون بين القطاعين هدف هذه المشاركة هو معرفة ما المكان الممنوح للتقييم ولممارسات التقييم؟ هل التقييم مناسب التعلم؟ هل هناك استم اررية بين األطوار الثالثة للمدرسة والجامعة في/فيما يتعلق بأوضا ع التدريس التقييم؟ 124 L’évaluation dans le système éducatif algérien : renversement des buts … Le mot « réforme » désigne un changement fondamental apporté à quelque chose, en particulier à une institution. Ce changement vise dans la plupart du temps à améliorer le fonctionnement de cette institution par exemple réforme du système éducatif : il s’agit de donner une forme meilleure. La réforme est une étape très importante par laquelle devrait passer n’importe quel secteur vu les différentes mutations que connaît le monde actuellement. Perrenoud (2000) en parlant de l’approche par les compétences durant le 20e colloque de l’Association Québécoise de Pédagogie Collégiale voit que les réformes des systèmes éducatifs visent : — les unes à moderniser les finalités de l’enseignement pour mieux les ajuster aux besoins présumés des personnes et de la société ; — les autres à mieux atteindre des objectifs de formation donnés, à instruire plus largement et efficacement les générations scolarisées. La Borderie et Morandi (2006 : 12) se rejoignent et voient que : L’expression « système éducatif » recouvre plusieurs sens : celui de « somme de pratiques éducatives » (Durkheim), celui de « construction d’un ensemble cohérent à partir de noyaux éloignés et disjoints » (LESOURNE) ou celui d’organisation de l’enseignement, « architecture scolaire du déroulement général des études. (DURAND-PRINBORGNE, 1992) Le système éducatif algérien est passé par différentes périodes, chacune de ces périodes a ses avantages et ses inconvénients, comprend des décisions, des hésitations et des chemins. Il est passé aussi par plusieurs réformes d’où le changement systématique des manuels scolaires et des différents programmes. Donc l’école algérienne a lancé de nouveaux défis en suivant la mise en avant des divers systèmes éducatifs et institutions du monde entier. L’école algérienne, qui se veut moderne et ouverte sur le monde, se voit obligée de suivre le cours des changements qui ont bouleversé le monde entier qui voit prospérer plusieurs études dans le domaine de la didactique des langues étrangères. Avec le développement des sciences, la mondialisation de 125 Radhia CHÉRAK l’économie, l’intensification des contacts et l’avènement de nouvelles technologies de l’information et de la communication et leur introduction dans l’enseignement, notamment dans l’enseignement / apprentissage des langues étrangères, on assiste à une évolution du système éducatif au niveau mondial. La finalité de la réforme du système éducatif algérien, qui est en cours, est d’aligner les pratiques de classe avec les développements disciplinaires au moyen d’une redéfinition des objectifs d’enseignement et des principes méthodologiques et pédagogiques. En effet, ce projet de réforme vise particulièrement l’amélioration des programmes, des méthodes d’enseignement et des stratégies d’apprentissage. Le dossier de la réforme a été l’une des priorités du Prédisent Abdelaziz Bouteflika, à l’orée de son premier mandat en 1999.Cette volonté de réforme a conduit à la reconfiguration des programmes des différents paliers pour l’adaptation des apprenants et leur insertion dans ce nouveau monde en mutation. Comme il est dit se poser des questions est un premier pas dans la recherche de solutions aux problèmes, on va se poser ces questions : Quelle place a-t-on accordé à l’évaluation et aux pratiques évaluatives ? L’évaluation est-elle appropriée par rapport aux situations d’enseignement / apprentissage ? Y a-t-il une continuité entre les trois cycles scolaires et l’université au niveau de l’évaluation ? L’évaluation au sein de la réforme du système éducatif algérien L’année scolaire 2003 / 2004 en Algérie donc a été marquée par la mise en place d’une nouvelle réforme du système éducatif, plusieurs changements ont été effectués. Le premier grand axe de cette réforme est d’adopter l’approche par les compétences dans toutes les matières où l’élève est impliqué dans un travail de groupe et de recherche pour la réalisation d’un objectif collectif, tous les objectifs convergent vers la réalisation du projet. Ferhani (2006), une inspectrice de l’éducation affirme, concernant la nouvelle réforme, que : « sa grande nouveauté est d’avoir introduit pour 126 L’évaluation dans le système éducatif algérien : renversement des buts … l’ensemble des matières une entrée dans les programmes par les compétences. » Elle (Ibid.) ajoute que : L’Algérie rejoint le mouvement mondial en faveur d’une approche par compétences. L’ambition de la réforme consiste donc en une véritable révolution pédagogique, notamment au regard du retard accumulé au plan des méthodes et des pratiques d’enseignement et de certification. L’école algérienne découvre ainsi de nouveaux concepts et outils avec l’introduction de l’organisation du travail en projets, l’adoption de la démarche inductive, l’intégration de l’évaluation et des technologies de l’information et de la communication éducatives. Le deuxième grand axe de cette réforme est de faire travailler les élèves selon la pédagogie du projet. En effet, depuis les approches communicatives, de nombreux bouleversements ont eu lieu : il ne s'agit plus d'enseigner des savoirs linguistiques mais des savoir-faire, on passe donc de l'évaluation de savoirs à l'évaluation de ce que l'apprenant sait faire avec ce qu'il sait, c'est ainsi que la somme de ces savoirs et de ces savoir-faire participe à la création d'une compétence. L’évaluation est désormais une partie prenante des situations éducatives, une lecture des programmes de la réforme des trois cycles (primaire, moyen et secondaire) montre qu’elle est présente aussi bien en amont qu’en aval des situations d’apprentissage. ROEGIERS voit que (2005 : 15) : Les responsables du système éducatif algérien ont également bien compris les trois implications principales à leur niveau : (1) outiller les enseignants par des documents qui proposent des situations complexes à titre d’exemples de ce qui est attendu des élèves à chaque niveau, dans les manuels scolaires ou dans des banques de situations (2) former les enseignants à construire des situations d’évaluation, à corriger des copies d’élèves de manière critériée, et à exploiter les résultats des élèves à des fins formatives (3) assurer un accompagnement de ces enseignants dans leurs classes. » En effet, dans les documents officiels, il est question d’évaluation diagnostique, formative et certificative. Il s’agit de vérifier les compétences des élèves à chaque étape de l’apprentissage à travers des évaluations qui sont prévues au fur et à mesure de l’enseignement / apprentissage du FLE. Au 127 Radhia CHÉRAK début du projet, on parle de l’évaluation diagnostique qui est une situation problème et permet de connaître le niveau de l’apprenant par rapport à l’apprentissage visé, de repérer et d’identifier les difficultés rencontrées par l’élève afin d’y apporter des réponses pédagogiques adaptées, c’est un processus de mesure, de jugement puis de décision. Elle sert à évaluer les prérequis des apprenants avant le début de la formation mais elle cible principalement les apprenants en difficulté face à la tâche proposée. À la fin de la séquence, on parle de l’évaluation formative qui permet de faire des bilans ponctuels en cours en détectant les erreurs commises par l’apprenant et les difficultés qu’il rencontre pour éviter le cumul de lacunes éventuelles et lui venir en aide. Elle permet de comparer les performances des apprenants par rapport aux objectifs assignés afin d’apporter les régulations adéquates, les améliorations ou les correctifs appropriés si cela s’avère nécessaire. Et à la fin du projet, on parle d’une évaluation sommative (appelée aussi certificative) qui permet de se rendre compte du niveau de compétence réel de l’apprenant. C'est une évaluation dont la fonction est de certifier que les apprenants maîtrisent les objectifs définis par le système, elle vise avant tout à déterminer les acquis de l’apprenant tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif. L’évaluation : du lycée à l’université Pour savoir si une compétence est installée chez l’apprenant, il est essentiel de concevoir une situation d’évaluation pertinente. Actuellement, l’évaluation fait l’objet d’attention et d’intérêt de toute l’institution scolaire, la place qui lui est accordée dans la pédagogie marche de pair avec son importance. On ne peut que regretter et cela avant même la réforme le peu d’intérêt voire l’absence d’intérêt accordé à la formation, à l’évaluation, à l’enseignement et à l’apprentissage des étudiants ; il s’agira essentiellement de réfléchir sur l’adéquation entre la politique en matière d’évaluation telle que donnée à lire dans les textes officiels et les réalités du terrain. Une fois les apprenants quittent le lycée et rejoignent l’université, ils se sentent dépaysés car il n’y a pas de continuité 128 L’évaluation dans le système éducatif algérien : renversement des buts … entre ces deux secteurs. Cette absence de continuité et de coordination entre les cycles scolaires et l’université a souvent été critiquée et dénoncée, nombreux sont ceux qui incombent l’échec des étudiants à l’absence de collaboration entre les deux secteurs. On pense qu’il faut qu’il y ait continuité entre l’université et les cycles scolaires, mais il faudrait voir, tout d’abord, si cette continuité est assurée dans les trois cycles scolaires. Il est nécessaire de construire une véritable politique de l’évaluation des élèves, au service des apprentissages et de la réussite de tous. Une évaluation dont les objectifs, les principes et les modalités doivent être partagés par les élèves, les familles, les enseignants, les équipes pédagogiques et éducatives. Conclusion En fin de cette contribution, on peut dire que les travaux sur l'évaluation sont considérables et les nouveaux textes officiels ont donné, sur le papier, une grande importance à ce concept mais, les observations montrent qu’ils ont négligé le passage du lycée à l’université et ce prolongement qui doit être aussi important que l’évaluation elle-même. Il convient donc de s’attarder sur l’évaluation, ses principes, objectifs, modalités et instruments dans les écoles, collèges, lycées et universités. Il incombe donc aux professeurs universitaires d’en faire le meilleur usage en tenant compte du niveau des apprenants qui viennent du lycée, en d’autres termes, de l’utiliser comme source d’inspiration pour réaliser leurs propres moyens didactiques pour la réussite de leurs futurs étudiants. 129 Radhia CHÉRAK Bibliographie — FERHANI, Fatiha Fatma (2006). Algérie, l’enseignement du français à la lumière de la réforme(En ligne) Page visitée le : 08/06/2010. Disponible sur Internet : http://www.cairn.info/revue-lefrancais-aujourd-hui-2006-3-page-11.htm — LA BORDERIE, René ; MORANDI, Franc. Dictionnaire de pédagogie. Paris : Nathan, 2006. 271p — PERRENOUD, Philippe. L’approche par compétences : une réponse à l’échec scolaire ? Actes du 20e colloque de l’Association Québécoise de Pédagogie Collégiale. Septembre 2000. — ROEGIERS, Xavier. (2005). L'évaluation selon la pédagogie de l'intégration : est-il possible d'évaluer les compétences des élèves ?, in TOUALBI-THAÂLIBI, K. & TAWIL, S. (Dir.), La Refonte de la pédagogie en Algérie - Défis et enjeux d'une société en mutation, Alger : UNESCO-ONPS, pp.107-124. — ROEGIERS, Xavier. L'école et l'évaluation. Bruxelles : De Boeck, 2004. 367p 130 131 Fatiha OUSSEUR. Université de Khemis-Miliana [email protected] Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit : quel transfert de compétences et quelle place pour l’évaluation ? Résumé La situation d'intégration a été introduite en Algérie dans l’ensemble des activités à élaborer avec les classes de troisième année secondaire juste après la mise en place de la réforme du système éducatif algérien dans les années deux milles. Étudier ce genre d'activité devient essentiel tant il faut former nos apprenants comme futurs citoyens, pour aujourd’hui et pour demain. Pour cela, il est nécessaire de leur donner les moyens de se situer dans un contexte professionnel réel et non pas à l’extérieur de celui-ci, donc il est indispensable de les habituer à comprendre et à écrire dans un but et de ce fait la situation d'intégration semble être représentative du monde de demain. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes posé la question suivante : Quel rôle joue la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit ? Par ailleurs, produire de l'écrit n'est pas une accumulation de phrases correctes car la cohérence d'un texte dépend à la fois des plans pragmatique, syntaxique et sémantique. Les séances de compréhension élaborées dans les cours du programme auront sensibilisé l'apprenant à un certain nombre de notion qu'il faudra approfondir tout au long du projet. L'apprenant doit savoir qu'il écrit dans un but, à un lecteur particulier et doit avoir une présentation particulière. C'est pourquoi le professeur doit recourir à des situations de communication authentique en concevant des projets d'écriture véritables avec un enjeu et un destinataire précis. Ainsi, l’apprenant qui doit accomplir une tâche rédactionnelle lors de l’examen, doit d’abord faire preuve de compréhension. En outre, si l’élève éprouve des difficultés au niveau de la compréhension, la rédaction devient une activité difficile voire impossible. En revanche, on ne peut pas s’interroger sur les difficultés en compréhension/écriture si on ne connait pas les stratégies mises en place pour apprendre. C’est la raison pour laquelle nous allons tenter, dans le cadre de notre recherche, d’expliquer le processus cognitif sous-jacent, de mettre en place un protocole de recherche afin de pouvoir enfin proposer des remédiations et des pistes didactiques pour l’application de la pédagogie d’intégration. 132 … Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit الملخص قدمت الوضعية االدماجية ضمن جملة النشاطات لتهيئتها واعدادها مع أقسام السنة الثالثة ثانوي مباشرة بعد الوضعية الجديدة لإلصالح في المنظومة التربوية خالل سنوات .0222ان دراسة هذا النوع من النشاط أصبح ضروريا كونه يعمل على تشكيل واعداد المتعلمين على ان يصبحوا مواطنين في المستقبل اليوم وغدا .في حين أن الديمقراطية تعمل على تعميق هذا .فهدف السلك التعليمي تدارك أكثر االمر ليصبح تربية للمواطنة المسؤولة و الناقدة ،ضمن هذا الهدف وبداية من العام ، 0222تعليم أو تدريس الكتابة في الوضعيات االدماجية سجل رسميا في برنامج الفرنسية في الثانويات الجزائرية .من أجل تحضير الشباب و المراهقين ليصبحوا مواطنين نشطاء في مجتمع ديمقراطي ال يجب فقط جعلهم قادرين على فهم وظيفة هذا المجتمع بأبعاده السياسية ،االقتصادية و االجتماعية ،ولكن بمساعدتهم على االدراك كممثلين فاعلين في العالم من حولهم .من أجل هذا فاألمر ضروري إلعطائهم و منحهم الوسائل لوضعها في اطارها و مضمونها المهني الحقيقي و االحترافي ،و ليس خارج ذلك ،اذن فمن الضروري تعويدهم على الفهم و الكتابة بهدف و لهدف و جعل الوضعية االدماجية كممثل و نموذج لعالم الغد .انه السبب الذي قمنا من أجله بطرح السؤال التالي :ما هو الدور الذي تلعبه الوضعية االدماجية في اكتساب و تحصيل لغة مكتوبة ؟ فضال عن ذلك ،في امتحان الفرنسية كلغة أجنبية ،موضوع االختبار يتضمن جزئين :األول للبناء الفكري (الفهم) و الثاني للتعبير الكتابي ،مع أن موضوع التعبير الكتابي يهدف دائما لمجازفات (مراهنات) ض منية يعني الهدف من وراء العملية التواصلية (إخبار ،إقناع ،تنديد .)...بالمقابل ،انتاج الكتابة ليس عبارة عن تجميع لجمل صحيحة ،ألن التماسك و الترابط المنطقي لنص ما يعتمد و يتعلق بعدة مناحي براغماتية ،نحوية و داللية (علم األلفاظ)حصص الفهم المعدة ضمن دروس البرنامج وضعت لتحسيس المعلم بجملة من المعارف و المفاهيم التي يجب تعميقها على طول المشروع البيداغوجي .على المتعلم أيضا أن يعلم الهدف المنوط من وراء كتابة أو ما هو الهدف الذي يكتب من أجله) يكتب ضمن الهدف ( على أن يكون لديه مقرأة خاصة و عرض خاص .لهذا الغرض ،على المدرس (المعلم) أن يلجأ ويستعين بوضعيات تواصلية صحيحة بتصوير مشاريع كتابة حقيقية مع وضع أهداف محددة (تحيد الرهان و المتلقي) كما أن على المتعلم أن يقوم بإنجاز لمسة كتابية خالل اإلمتحان ،أوال بأن يظهر و يبدي فهمه الكامل (المجال الفكري) بهذا ،إذا وجد التلميذ صعوبات على مستوى فهم النص ،فإن الكتابة سوف تصبح عملية صعبة أيضا إن لم تكن مستحيلة .عالوة على ذلك فإنه ال يمكننا أن نستجوب (نسأل) على الصعوبات في ما يخص الفهم إذا لم نعرف و نكن على دراية باستراتيجيات التعليم المعمول بها .إنه السبب الذي من أجله نحاول و نسعى في إطار بحثنا لشرح السيرورة المعرفية ( le processus ) cognitifأو التطور المعرفي لوضع برتوكول للبحث بغية القدرة أخي ار على طرح حلول و آثار تعليمية إرشادية لتطبيق جيد لبيداغوجية اإلدماج. 133 Fatiha OUSSEUR Avec la réforme du système éducatif algérien, on introduit la situation d'intégration dans l’ensemble des activités à élaborer avec les classes de troisième année secondaire. Étudier ce genre d'activité d’écriture devient essentiel tant il faut former nos apprenants comme futurs citoyens, pour aujourd’hui et pour demain. C’est dans ce but qu’à partir de l’année 2004, l’enseignement de l'écrit dans des situations d'intégration s’inscrit officiellement dans le programme de français au secondaire algérien : « Une situation d'intégration est le reflet d'une compétence à réaliser chez l'élève. Elle peut être considère comme une occasion d'exercer la compétence chez l'élève, ou comme une occasion d'évaluer s'il est compétent » (ROEGIERS. X, 2004 :P109). Afin de préparer les jeunes adolescents à devenir des citoyens actifs d’une société démocratique, il faut non seulement les rendre capables de comprendre le fonctionnement de cette société dans ses dimensions politique, économique et sociale mais les aider à se percevoir comme des acteurs potentiels du devenir du monde qui les entoure. Une situation-problème « didactique » est une situation-problème que l'enseignant organise pour l'ensemble d'un groupe-classe, en fonction de nouveaux apprentissages : nouveaux savoirs, nouveaux savoir-faire, etc. (ROEGIERS. X, 2006 : 21). Pour cela, il est nécessaire de leur donner les moyens de se situer dans un contexte professionnel réel et non pas à l’extérieur de celui-ci, donc il est indispensable de les habituer à comprendre et à écrire dans un but et de ce fait la situation d'intégration semble être représentative du monde de demain. Ce souci de permettre aux jeunes de se situer eux-mêmes dans le monde de l'avenir se justifie aussi d’un point de vue psychologique : l’adolescence est une période de recherche identitaire et la construction de cette identité nécessite de prendre conscience de ses racines, de son milieu, de s’inscrire dans un contexte particulier : C’est le déséquilibre qui est formateur même s’il est inconfortable, et peut-être surtout parce qu’il est inconfortable ! Il correspond à un manque que l’élève a besoin de combler pour retrouver ce que nous pourrions appeler un équilibre cognitif, c’est-à-dire des savoirs qui 134 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … sont reliés entre eux pour former une cohérence utilisable dans d’autres situations. (DE VECCHI. G et, CARMONAMAGNALDI.N, 2002 : 93) On pourrait énoncer comme suit les caractéristiques d'une situation d'intégration : Elle mobilise un ensemble d'acquis. Ces acquis sont intégrés et non additionnés. 2. Elle est orientée vers la tâche, elle est significative. Elle possède donc une dimension sociale, que ce soit pour la suite du parcours de l'étudiant, pour sa vie quotidienne ou professionnelle. Il ne s'agit pas d'un apprentissage «scolaire».3. Elle fait référence à une catégorie de problèmes spécifiques à la discipline, ou à un ensemble de disciplines, dont on a spécifié quelques paramètres.4. Elle est nouvelle pour l'étudiant. » (ROEGIERS. X, 1999 : 30) Ainsi, la situation d'intégration est donc l'image de la situation dans laquelle l'élève est invité à exercer sa compétence Comme le dit Le Boterf : « À la différence de la pile bien connue, la compétence ne s'use que si on ne l'utilise pas » (Le Boterf. G, 1995 : 18 ). En revanche Jonnaert. P. (2000 : 54) dans son analyse de l’écart entre la « situation actuelle » et « la situation but » propose le schéma suivant : « situation actuelle Processus de formulation Situation but Ce qui se passe (composantes, acteurs, contexte) ce qui est visé par la formation Un problème ressenti amélioration attendue En outre, afin de contextualiser une situation actuelle, Jonnaert. P. (2000 :55) ajoute : «Nous serions réducteurs et nous ne pourrions effectivement comprendre la situation actuelle si nous l’isolons du contexte dans lequel elle est appelée à fonctionner et si nous négligions les interactions qui s’établissent entre elle et ce contexte » 135 Fatiha OUSSEUR En situation d’épreuve officielle (en examen), lorsque les élèves lisent le sujet de l'expression écrite, ils accomplissent non pas une, mais toute une série d’opérations mentales bien distinctes. Il y a tout d’abord la reconnaissance des mots, puis leur organisation en propositions et en phrases cohérentes. En parallèle avec ces opérations, ils activent des connaissances qu'ils intègrent au contenu du texte. Le processus d’intégration est essentiel dans la compréhension. En effet la plupart des textes que nous lisons sont incomplets, même s’ils nous paraissent à première vue parfaitement cohérents : « La compréhension peut donc se définir comme la capacité à construire, à partir du texte et des connaissances antérieures, une représentation mentale cohérente de la situation évoquée par le texte. » (Gaonac’h et Golder, 2001 : 86). Certes, rappelons-le, notre thème de recherche se base sur « le rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit en compréhension et en production », néanmoins, il est à noter que les termes « situation d’intégration » relèvent d’un discours purement scolaire qui reprend, entre autre, l’idée de la pragmatique du discours, un concept qui a ses origines épistémologiques. Ainsi, l'apprenant qui doit accomplir une tâche rédactionnelle lors d'un examen, doit d'abord faire preuve de compréhension. En outre, si l'élève éprouve des difficultés à ce niveau, la rédaction devient une activité difficile voire impossible. De ce fait, on ne peut pas s’interroger sur les difficultés en lecture/écriture si on ne connaît pas les stratégies mises en place pour apprendre. Cela justifie notre choix pour les champs de recherches en didactiques dans lesquels nous nous inscrivons afin de mener notre enquête dans le cadre de cette thèse de doctorat : Protocole de recherche Présentation du questionnaire destiné aux enseignants L’objectif principal de ce questionnaire est de vérifier la place qu’occupe l’écrit, dans des situations d’intégration, dans 136 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … l’enseignement du français au secondaire algérien. Ainsi, il nous permet de cerner les facteurs qui entravent l’écrit dans les classes terminales notamment ceux qui sont dus à la formation des enseignants au sein de la pédagogie de projet et d’intégration Conditions de passation Dans le cadre de cette recherche action, nous avons eu l’occasion de visiter le service de formation des enseignants au niveau de l’académie de AIN DEFLA. Le chef de service responsable de la formation nous a fourni des renseignements quant au nombre de jours de formation consacrés pour le français durant l’année scolaire. En effet, les enseignants du secondaire ont droit à six jours de formation annuelle : deux jours dans chaque trimestre. Nous pouvons donc jugé cela très insuffisant. En outre, dans le cadre de la passation du questionnaire, nous avons veillé à ce que l’échantillon soit représentatif : si on le distribue dans un seul établissement, cela est insuffisant car nous trouvons, en général, 04 à 06 enseignants de français par lycée qui forment ce qu’on appelle l’équipe pédagogique. C’est la raison pour laquelle nous avons contacté l’inspecteur de français du cycle secondaire, par l’intermédiaire de l’académie, qui nous a promis de nous inviter lors d’un séminaire programmé pour qu’on puisse effectuer notre enquête car le nombre des enseignants sera plus de 30enseignants présents. En effet, ce séminaire a eu lieu le05 février 2013 au lycée Malek Ibn Ennabi à AIN DEFLA. Algérie Présentation du public Notre public « enseignants » est constitué de 38 personnes représentant des établissements scolaires du secondaire algérien de 08 villes de la région « Ouest » de la wilaya de AIN DEFLA à savoir : Rouina, Bathia, Zeddine, El Amra, Ain Defla, Bourached, Mkhatria, El Attaf. Pour ce qui est du sexe de ces enseignants, nousavons24 femmes et 14 hommes.73%de l’ensemble représente une tranche d’âge de (22 ans à 25 ans) : il s’agit de28enseignants. De plus, six (06) du total, soit 137 Fatiha OUSSEUR 15,78%ont de 26 ans à 35 ans. Les 04 enseignants qui restent de l’ensemble, soit 10,52% ont un âge de 36 à 54 ans. En revanche, nous avons 20 enseignants qui ont la qualité de titulaires, soit 52,63%.Par ailleurs, 18 enseignants, soit 47,36% sont des stagiaires1 Analyse et commentaires des résultats — Q01 Que pensez-vous de l’enseignement du français en Algérie ? Nécessaire Progresse Régresse 24 réponses 05 réponses 09 réponses 63,15% 13 ,15% 23,68 % Il s’agit d’une première question sur les représentations qu’ont les élèves algériens vis-à-vis du français langue étrangère. Les apprenants sont censés s’exprimer leurs points de vue en choisissant une réponse de celles qui sont proposées, ou proposer eux-mêmes leurs propres informations. En effet, 63,15% pensent que l’enseignement de cette langue est « nécessaire », ce qui exprime le rôle crucial que joue le français dans notre société. Ce résultat reflète une certaine prise de conscience du rôle des langues étrangères dans notre pays. En outre, 13,15% croient que l’enseignement de cette langue s’épanouit et son état progresse. Enfin, 23,68% du total de notre échantillon estiment qu’ils y a une régression de cet enseignement — Q02/ Quel est votre avis à propos de l’enseignement du français avant la réforme du système éducatif ? Aléatoire 22 réponses 57,89 % Sans objectifs 16 réponses 42,10 % 1 Notons ici qu’il arrive des périodes où l’inspecteur ne titularise personne pendant 03 ans (Ce cas est enregistré au niveau de la wilaya de AIN DEFLA, selon des sources officielles). 138 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … Les enseignants sont invités à exprimer leurs points de vue vis-à-vis l’enseignement du français avant la réforme du système éducatif. En effet, 57,89% du total pensent que l’enseignement du français est « aléatoire » voire anarchique, se fait sans planification ou sans qu’il y ait une étude établie à ce sujet. Rappelons ici que la grande majorité de nos enseignants a vécu le transfert des deux périodes (avant et après la réforme). En revanche, 42,10%des enseignants éprouvent une représentation négative et croient que l’enseignement de cette langue se faisait sans qu’il y ait des objectifs d’enseignement bien déterminés — Q03/ Quel est l’apport de cette réforme l’enseignement du français langue étrangère ? pour 04 réponses 05 réponses 13,15% 10,52 % 13,15 % les élèves 15,78 % L’approche par compétences 05 réponses 13,15 % 06 réponses Socialiser l’apprenant dans des situations d’intégration 05 réponses 07,89 % Autonomie dans les apprentissages Il y a des insuffisances 03 réponses Faire travailler Apprendre en définissant des objectifs 18,42 % 07,89% 07 réponses 03 réponses Réadaptation des méthodes d’enseignement et des contenus Tout dépend de la région Comme nous le remarquons d’emblée, nous avons obtenu plusieurs réponses qui ont enrichi notre enquête. En effet, l’apport de la réforme éducative dépend, selon les enseignants, de nombreux facteurs d’ordre : — géographique : « Tout dépend de la région », soit 7,89% — méthodologique : « réadaptation des méthodes d’enseignement et des contenus »18,42%, « approche 139 Fatiha OUSSEUR par compétences » 10,52%, « apprendre en définissant des objectifs » soit 7,8% — social : « socialiser l’apprentissage dans des situations d’intégration », soit 13,15 % — pédagogique : « faire travailler les élèves » 13,15%, « favoriser l’autonomie des apprentissages » soit 15,78%. . Ainsi les apports dès cette réforme sont jugés insuffisants par certains enseignants soit 13.15 % Q04 / Que pensez-vous des sujets de production écrite proposés au baccalauréat ? Facilitent la tâche rédactionnelle 10 réponses 26,31 % Ils répondent aux critères de la pédagogie de projet 28 réponses 73,68 % Dans cette dernière question sur les représentations des enseignants, notre échantillon doit exprimer son avis concernant les sujets des productions écrites proposés au baccalauréat. En effet, 26,31% pensent que les sujets facilitent la tâche rédactionnelle, c’est-à-dire ils favorisent l’expression personnelle de l’apprenant. De ce fait, c’est le critère thématique qui prime. Par ailleurs, 73,68% croient que ces sujets qui concernent l’épreuve écrite répondent aux critères de la pédagogie de projet. Autrement dit, il s’agit des sujets qui relèvent de la pédagogie de l’intégration des acquis scolaires, contenant les éléments constitutifs suivant : une situation contextuelle, une tâche rédactionnelle et une consigne bien déterminée. Q05/ Quelles sont les parties que comporte une épreuve de français au secondaire algérien ? 140 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … 02 parties : Compréhension de l’écrit /Production écrite 28 réponses 73,68 % 03 parties : Compréhension de l’écrit / Fonctionnement de la langue / Expression écrite 10 réponses 26,31 % Il s’agit de la première question dans la deuxième partie de notre questionnaire à savoir « les pratiques de classe ». Tout d’abord, nous avons enregistré 73,68% des enseignants qui ont affirmé qu’une épreuve de français au secondaire algérien comporte deux parties : la première partie : «la compréhension de l’écrit, la deuxième partie : Production écrite » ; c’est la nouvelle conception de l’épreuve de français en Algérie. Par contre, 26,31% de l’ensemble croient toujours qu’il y a trois parties, à savoir : « la compréhension écrite, le fonctionnement de la langue et la production écrite ».Cette dernière répartition concerne les pratiques de classe avant la mise en place de la réforme du système éducatif algérien. En revanche, comme nous le remarquons d’emblée, en dépit de tous les efforts fournis par l’institution afin de promouvoir cette réforme, nous enregistrons toujours des cas défaillants qui ont certainement des répercussions sur l’activité d’enseignement/apprentissage et par conséquent sur les résultats scolaires. Q06/ Pour l’enseignement de l’écrit, décrivez votre activité en classe (comment vous faites) ? Exploitation textuelle / Entraînement à l’écrit/ Rédaction à la maison 05 réponses 13,15% Sujet / Étude des mots clés /Rédaction en classe 05 réponses 13,15% Sujet/Plan/ Rédaction à la maison. 28réponses 73,68 % Dans cette question, nous avons demandé à nos enseignants de décrire leur activité en classe en matière d’écrit. Notons ici que peu d’entre eux se sont rendu-compte que la compréhension écrite fait partie des activités de la compétence écrite à effectuer 141 Fatiha OUSSEUR en classe ; certains enseignants ont nié la compréhension écrite de leurs pratiques écrites. Néanmoins, 13,15% ont affirmé qu’ils proposent une exploitation textuelle, ils élaborent une séance d’entraînement à l’écrit puis ils passent à la rédaction. Par ailleurs, un autre groupe soit13, 15% conçoit l’activité d’écriture comme étant une activité qui se base sur la proposition d’un sujet en étudiant les mots clés et en élaborant un plan puis on passe à la rédaction en classe. De plus, une autre catégorie d’enseignant soit 73,68% pense que l’enseignement de l’écrit contient nécessairement un sujet, exige un plan puis une rédaction à la maison. Comme nous le remarquons, a priori, peu d’enseignants intègre «la compréhension de l’écrit » dans leur enseignement de l’écrit. Autrement dit, nombreux sont les enseignants qui proposent un texte dans une séance de compréhension de l’écrit mais de manière séparée et non pas intégrée. C’est-à-dire, ils proposent ce texte car il faut effectuer une séance de compréhension écrite ; séance qui fait partie du programme mais sans qu’il y ait la moindre relation avec les activités de l’écrit. Donc ils choisissent un texte pour le type de cette activité uniquement 1sans prendre en considération la notion de transfert de compétences. Donc ce n’est pas un texte considéré comme modèle linguistique à imiter ou à reproduire dans les séances de l’écrit. De ce fait nous pouvons constater que peu d’enseignant comprennent la relation linguistique et cognitive qui existe entre les compétences langagières d’où la notion de transfert de compétences. Par conséquent, nos apprenants ne peuvent pas acquérir malheureusement les moyens linguistiques indispensables à la rédaction de leurs textes. Ils produisent un modèle pour lequel ils n’ont pas eu la moindre idée. 1 Q07/ Quand est-ce que vous procédez à l’écrit (Les moments dans le projet) ? C’est -à dire la compréhension de l’écrit 142 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … 08 réponses 21,05% À la fin du projet (01 moment) 08 réponses 21,05 % Évaluation diagnostique/ compréhension de l’écrit : 1er jet, production intermédiaire, production finale dans la séquence : trois (03) fois dans le projet = 15 moments dans le projet 03 moments dans le projet : à la fin de chaque séquence 03 moments dans le projet : Évaluation diagnostique / Compréhension écrite/ Production écrite 12 réponses 31,57% 10 réponses 26,31 % Enseigner /Apprendre une langue nécessite obligatoirement l’enseignement/apprentissage des quatre compétences. Dans un système qui se base sur l’écrit, on traite toujours toutes les compétences langagières sans se rendre compte. Mais quand-est ce que l’enseignant doit-il se rendre compte qu’il fait de l’écrit avec ses apprenants ? Est-ce uniquement dans les séances consacrées pour cette tâche ? Où d’autres activités sont prises en compte dans l’élaboration d’un processus d’écriture. Ce sont les questions majeures sur lesquelles se base la question n°07. En effet, 31,57% disent qu’ils font de l’écrit dans la séance de l’évaluation diagnostique (test écrit), la compréhension écrite et l’expression écrite. En revanche, 21,05 %affirment avoir effectué cette séance à la fin de chaque séquence, 26,31% à la fin du projet et enfin un autre groupe soit 21,05%ajoute qu’il fait de l’écrit dans les moments suivants : évaluation diagnostique, la compréhension écrite, dans la séquence (01er jet, 02ème jet, 03èmr jet) puis 03 productions séquentielles dans le projet. Q08 / Comment concevez-vous une séance de production écrite ? 143 Fatiha OUSSEUR Abstention Texte modèle en CE/ Production progressive : les 03 jets de la séquence/Rédaction en classe/ Comte –rendu de la PE/ Amélioration collective d’une production écrite Proposer un 01er jet qui sera amélioré au fur et à mesure des progressions dans les apprentissages 03 05 réponses 06 réponses % % % 07,50 15 % 12,50 10 % 17,5 12,50 % 05 réponses 07 réponses 07,50% 04 réponses Activité à faire à la maison 03 réponses % Proposer un texte modèle en compréhension de l’écrit (séance de découverte) /Entraînement à l’écrit / Rédaction en classe Présentation du sujet/Explication des mots difficiles/ Rédaction à la maison Entraînement à l’écrit/Production écrite/ Compte-rendu de la production écrite 05 réponses 12,50 Proposer un sujet en situation d’intégration À partir de cette question, nous avons pu obtenir plusieurs réponses. Les enseignants étaient invités à présenter leur propre conception pour une séance de production écrite. En effet, 12,50% pensent qu’il faut proposer un sujet en situation d’intégration. En revanche, 7,50% conçoivent l’écrit comme étant une étape d’un entraînement à l’écrit, une production écrite puis un compte-rendu d’expression écrite. Par ailleurs, un autre groupe soit 17,50% pensent qu’il faut écrire à la maison pour avoir plus de temps. Un autre groupe, soit 10% croient qu’il faut présenter un sujet en expliquant les mots difficiles puis une rédaction à effectuer en classe. Ainsi, 12,50% des enseignants préfèrent proposer un texte modèle en compréhension écrite qui sera considéré comme une séance de découverte linguistique du modèle à imiter en production écrite. En outre, 15,78% pensent qu’il faut proposer un 1er jet qui sera amélioré par les apprenants au fur et à mesure des apprentissages et de la progression dans le programme. De surcroit, 07,89% affirment avoir proposé un texte modèle en compréhension écrite puis il y a une production progressive (les 03 jets de la séquence) qui engendre une rédaction finale en classe suivie d’un compte-rendu d’expression écrite et une amélioration collective d’une production écrite. Une autre catégorie d’enseignants, soit 07,50%., s’abstient et n’arrive pas à 144 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … avoir une conception claire pour cette séance et préfère ne pas proposer une réponse afin de joindre une position de neutralité. Comme nous le remarquons d’emblée, la conception pédagogique d’une séance d’expression écrite est différente et change d’un enseignant à autre car l’objectif de l’écrit n’est pas bien assimilé de la part des enseignants ; faut-il écrire pour remplir, réécrire, rédiger pour être corrigé et de ce fait progressé ; apprendre à écrire, communiquer, transmettre ses idées ou encore être pragmatique… Q09/ Comment préparez-vous une épreuve écrite conçue pour examen (quels critères à prendre en considération ?) Un bon thème actuel (Un critère thématique) 06 réponses 15,78 % Contexte /Tâche/Co nsigne L’apprenant doit rédiger en suivant le modèle étudié en classe en Compréhension de l’écrit 22 réponses 10 réponses 57,89 % 26,31 % Notons ici qu’il s’agit des critères d’élaboration qui vont devenir des critères d’évaluation à la fin de l’activité de rédaction après la réalisation de la tâche rédactionnelle. Les enseignants doivent mentionner les critères à prendre en considération lors de la préparation d’une épreuve écrite conçue pour une épreuve d’examen. Pour certains enseignants soit15, 78% une épreuve pertinente est celle qui comporte un thème actuel (critère thématique). En revanche, 57,89% de l’ensemble pensent qu’il faut se baser sur trois points dans la formulation de ce sujet, à savoir : le contexte, la tâche rédactionnelle et la consigne. Par ailleurs, 26,31% croient que les élèves doivent rédiger en suivant le modèle textuel étudié en classe dans la séance de la compréhension de l’écrit (critère textuel, typologique). Q10/Proposez un sujet personnel pour une production écrite d’un examen ? 145 Fatiha OUSSEUR Nous avons obtenu 34 réponses, c’est-à-dire 34 propositions de sujets personnels de production écrite. Dans les 34 sujets des enseignants nous avons enregistré des lacunes1 Par ailleurs, nous avons enregistré 04 abstentions (absences de réponses). Commentaire Q10 : Comment un enseignant conçoit-il l’activité d’écriture : Est- il facile d’écrire pour lui ? Telle est la question que nous avons posée à un grand nombre de participants au séminaire de « formation » que nous avons animé. Pour la plupart d’entre eux, stagiaires et titulaires, la réponse était négative. Nous avons alors proposé à ces mêmes participants d’écrire «pour eux » ce qui leur passait par la tête à un moment donné, ou d’écrire sur un thème tout ce qu’ils sentaient, pensaient, en essayant de ne pas s’arrêter mais décrire en continu. Dans cette écriture, adressée à soi-même ou, en tout cas, non soumise à un jugement critique de la part des autres, nous avons pu constater avec surprise qu’au bout de quelques minutes chacun (e) écrivait avec facilité. Cela nous amène, aujourd’hui, à une évidence : chacun (e) a une pensée intérieure qui s’exprime avec les mots ; son expérience passée, accumulée dans sa mémoire, ressurgit souvent sous forme de phrases qu’il se dit à lui – même et retranscrira aisément sur une feuille de papier. D’où vient donc la difficulté, si écrire se révèle un acte facile dans le contexte évoqué précédemment ? Retranscrire, par des mots, ce qui vient à l’esprit est effectivement à la portée de tout scripteur. En revanche, au fond ce n’est pas «écrire » qui est difficile, c’est-à-dire l’acte, mais c’est dans la relation avec autrui qu’il y aurait, à notre sens, à savoir les conditions de la réalisation de la tâche rédactionnelle. Dans cette relation avec le lecteur, nous avons dégagé une difficulté majeure, il s’agit de« la crainte du jugement ».Et pour échapper à ce désagrément, le refus d’écrire s’avère la solution la plus radicale. Car écrire à 1 Il y a toujours quelque chose qui manque : un critère non respecté : programme, composantes de la situation de communication, visée conformes au programme, équivoque, langue incorrecte, pas motivant, ne comporte pas une situation contextuelle, une tâche d’expression et une consigne 146 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … autrui serait prendre le risque de susciter les mêmes jugements critiques. Pour se dégager de cette peur , il convient donc de transmettre son message écrit sans imaginer derrière le lecteur ce «juge , enseignant, parent, correcteur » prêt à repérer et sanctionner les fautes éventuelles .Car le lecteur n’est pas obligatoirement un juge ; il a probablement lui -même ses propres inhibitions , craintes , lacunes et ses difficultés d’écriture. Il s’agit de se situer dans un échange d’adulte à adulte. En effet, nous n’avons pas de méthode rigoureuse pour faire disparaître cette crainte du jugement de l’autre. C’est pour toutes ces raisons que nous avons enregistré les fautes1 commises dans les sujets d’expression écrite proposés par nos enseignants, de manière continue et sans révision. Et comme nous l’avons remarqué, les « abstentions de réponses » ne révèlent que le reflet de cette peur du jugement. Rappelons ici que nous avons effectué une analyse du discours qui nous a permis d’en tirer toutes ces conclusions. Q11/ D’après votre expérience d’enseignement, est-ce que vous pensez que tous les apprenants répondent au sujet d’une épreuve écrite au baccalauréat ? Oui Non 08 réponses 30 réponses 21,05 % 78,94 % Tout d’abord, 21,05% de l’ensemble des enseignants pensent que tous les candidats du baccalauréat répondent aux sujets d’une épreuve écrite et rédigent leur texte. Nous pouvons dire que ces enseignants considèrent les apprenants comme étant un public homogène qui ne manifeste guère des différences. En revanche, 78,94% croient qu’il y a quand même des apprenants qui ne rédigent pas et ils ne réagissent pas par rapport aux sujets proposés par les concepteurs des épreuves officielles. En effet, cette catégorie d’enseignants soulève un point important voire crucial en pédagogie et en didactique et qu’il faut toujours 1 Que nous avons représentées par des rubriques 147 Fatiha OUSSEUR prendre en considération dans les activités d’enseignement/apprentissage et qui a un impact sur la réussite scolaire : il s’agit de l’hétérogénéité ou les différences individuelles qu’on enregistre depuis toujours dans nos classes. Q12/ Comment expliquez-vous : 1. l’absence de rédaction (les apprenants ne rédigent pas)/2.la rédaction « 0 » zéro (Rédaction hors sujet ne répondant pas aux critères de cette épreuve ? Justification de l’absence de rédaction 01. L’élève ne sait pas rédiger 07 réponses 18,42 % 02. L’élève est faible 09 réponses 23,68 % 03. Manque de lexique 06 réponses 15,78 % 04. Absence de l’intérêt personnel 06 réponses 15,78 % 05. Le français est une langue difficile pour l’élève (Représentation négative sur la langue 04 réponses 10,52 % 06. Incapacité de rédiger dans une langue correcte (l’élève ne maîtrise pas la compétence grammaticale) 06 réponses 15 ,78 % Justification de la rédaction « 0 » : Hors sujet 01. La consigne est 08 réponses 21,05 % difficile 02. L’élève sait rédiger mais il n’a pas compris la consigne 12 réponses 31,57 % 148 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … 03. Sujet ambigu comprenant des mots difficiles qui bloquent l’expression de l’élève 10 réponses 26,31 % 04. L’élève veut faire preuve de compétence rédactionnelle en dépit du thème qui n’est pas motivant et ne favorise pas son expression personnelle. 08 réponses 21,05 % Nous avons interrogé nos enseignants sur leur justification pour « l’absence de rédaction »dans les copies des élèves lorsqu’il s’agit d’une épreuve représentant une évaluation sommative ou certificative. Nous avons obtenu des réponses variées, ce qui a enrichi notre enquête. Tout d’abord, en commençant l’analyse des résultats concernant l’absence de rédaction, nous avons enregistré18, 42% des enseignants qui pensent que l’élève « ne sait pas rédiger » ; c’est-à-dire l’exclusion de l’existence d’un processus d’écriture chez l’enfant. Cela est jugé invraisemblable car tout enfant scolarisé a appris les normes de la langue écrite. En outre, 23,68% des enseignants qualifient l’élève de « faible » ; ce lexique péjoratif, du moins de notre point de vue, pourra entraver l’activité de l’apprenant qui éprouvera un sentiment de stigmatisation et de ce fait on détruit la motivation de cet enfant. De plus, 15,78% pensent que «l’absence de rédaction »est due à « un manque de lexique » ; l’enfant ne possède pas les mots qui vont construire son texte lors de la production textuelle. Cela arrive souvent quand il s’agit d’un thème de rédaction étrange pour l’enfant pour lequel il n’a pas assez de vocabulaire. Donc, réellement le référent pourra constituer un obstacle dans le processus d’écriture chez l’individu lorsqu’il n’est pas familier pour l’enfant. 149 Fatiha OUSSEUR En revanche, 15,78% des enseignants pensent que certains élèves rendent la copie blanche car ils sont « désintéressés », il n’est pas important pour eux d’avoir une note dans la matière ; donc il s’agit d’une certaine indifférence1 de la part de l’enfant vis-à-vis de l’apprentissage des langues étrangères. Par ailleurs, 15,78% des enseignants pensent que les élèves ne rédigent pas car ils sont « incapables de produire un texte dans une langue correcte ». Autrement dit, ces élèves possèdent un lexique mais ils ne maîtrisent pas le fonctionnement de la langue ou le rôle d’un vocabulaire donné. Bref, ils ne savent pas combiner les éléments lexicaux afin d’obtenir une phrase grammaticalement jugée correcte. De surcroît, d’autres enseignants, soit 10,50 % pensent que les élèves ne rédigent pas à cause « d’une représentation négative » qu’ils ont sur le français. En effet, nombreux sont les élèves qui ont peur d’apprendre cette langue en raison d’une idée négative ou d’une conviction personnelle. D’ailleurs, l’Algérie représentée par son système éducatif a déjà effectué une expérience concernant ce sujet pendant les années 90oùde nombreux élèves ont choisi l’anglais en croyant que c’est la langue étrangère la plus facile à apprendre. D’autre part, nous allons entamer la deuxième partie de cette question à savoir la justification de la rédaction« 0 », c’est-à-dire la présence d’une rédaction ne répondant pas aux critères de production. Alors, nous avons enregistré 21,05% d’enseignants qui pensent que cela est dû à « une consigne difficile » proposée par l’enseignant / acteur, c’est-à-dire ce qu’on demande à l’élève est jugé difficile voire impossible2 à réaliser. En effet, 31,57 %pensent que l’élève « sait rédiger mais il n’a pas compris ce qu’on lui demande de faire » : ici, la consigne est jugée ambigüe et imprécise3. Alors ce sont les anaphores, ou toutes sortes de procédés de reprise employées par l’enseignant, qui constitue un véritable obstacle dans la Il n’a jamais eu une bonne note dans la matière, il s’est habitué ou il a échoué dans sa scolarité et il va quitter l’école 2 Parfois on interroge les apprenants sur des points pour lesquels il n’y avait pas un savoir fourni en classe durant l’année scolaire 3 Parfois, on trouve dans un sujet « tu me rédiges,…. Plus loin, tu rédiges à tes camarades » / « rédige un texte, rédige ce paragraphe » 1 150 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … compréhension de la consigne. Par ailleurs, 26,31% des enseignants pensent que l’élève est hors sujet car ce dernier comporte« des mots qui bloquent »l’apprenant. Alors l’enfant fournit un effort afin de résoudre ce problème en dépit de la fausse interprétation qu’il fait autour du sens d’un mot clé. En revanche, 21,05%des enseignants pensent que l’élève fait preuve de « compétence rédactionnelle ». Il veut montrer à son maître que ce n’est pas l’enfant qui ne sait pas rédiger mais c’est l’enseignant qui s’est trompé dans son choix du thème qui ne motive pas l’apprenant et ne favorise pas son expression personnelle. Expérimentation d’une situation d’intégration Présentation et déroulement de l’activité Nous avons proposé à nos apprenants deux sujets de production écrite. L’enfant, doit opter pour un choix en répondant aux questions qui accompagnent son sujet choisi. Rappelons ici, que l’objectif de cette petite expérimentation est de démontrer qu’un sujet d’expression écrite comportant les éléments d’une situation d’intégration, à savoir : le contexte situationnel, la tâche rédactionnelle et la consigne, favorise l’expression personnelle de l’apprenant. Comme nous l’avons dit plus haut1 , nous avons proposé deux sujets d’expression écrite : le premier ne prend pas en considération les critères de la formulation de ce sujet, par contre, dans le deuxième sujet, on a essayé, dans la mesure du possible, de respecter ce qu’on appelle une activité de production écrite dans une situation d’intégration. Ci- après, nous présentons l’activité : Sujet 01 : « Le mariage précoce est une pratique sociale connue dans les pays du tiers monde. Qu’en pensez-vous ? » Questions : 1. 2. 3. 1 Avez-vous compris le contenu du sujet ? oui non Avez-vous compris ce qu’il faut faire ?oui non Dites ce que l’enseignant vous demande de faire Dans la présentation de cette activité 151 Fatiha OUSSEUR 4. Votre rédaction ................................................................ Sujet 02 :« Le mariage précoce était une tradition au passé. Aujourd’hui, les jeunes ne se marient plus à un âge très jeune. Vous faites partie d’une association qui lutte contre cette pratique sociale. Et en réponse à une fille victime d’un père autoritaire, rédigez votre texte dans lequel vous lancez un appel à tous les parents pour les inviter à comprendre les exigences actuelles » Questions : 1. 2. 3. 4. Avez-vous compris le contenu du sujet ? oui non Avez-vous compris ce qu’il faut faire ?oui non Dites ce que l’enseignant vous demande de faire Votre rédaction :........................................................................... Commentaire des résultats Nous avons proposé en même temps un premier sujet qui manque de quelques critères : « Le mariage précoce est une pratique sociale connue dans les pays du tiers-monde : Qu’en pensez-vous ? »(Il n’y pas la tâche rédactionnelle, la consigne, le contexte) Nous voudrions détecter l’effet de ce dysfonctionnement sur la production écrite elle-même (en matière de quantité : les élèves ne produisent pas) et en matière de qualité même quand ils produisent quelques textes, on arrive difficilement à les définir voire les catégoriser. En revanche, le deuxième sujet : « Le mariage précoce était une tradition au passé. Aujourd’hui, les jeunes ne veulent plus se marier à un âge très jeune. Vous faites partie d’une association qui lutte contre cette pratique sociale. Et en réponse à une fille victime d’un père autoritaire, rédigez un texte dans lequel vous lancez un appel à tous les parents pour les inviter à comprendre les exigences actuelles. » Nous pouvons remarquer d’emblée, que les deux sujets abordent le même thème qui est «le mariage précoce », mais ils sont différemment formulés. Nous avons opté pour ce thème car il représente un contenu thématique en relation avec les thèmes inscrits dans le programme de 03ème année secondaire : « L’homme contemporain, les défis du troisième millénaire, la mondialisation des échanges, la solidarité, la justice, les droits 152 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … de l’homme, les ONG, réflexions sur les arts : théâtre, cinéma, musique, peinture ». De ce fait, un sujet d’expression écrite doit être pertinent. Selon les textes officiels, la sélection des contenus jugés indispensable, utiles, pertinents obéit à un certain nombre de critère : la nature des objectifs éducatifs, traduits en terme de compétences, de connaissances, d’attitudes et de valeurs ;la qualité objective des contenus c’est-à-dire qu’ils doivent contribuer à la formation intellectuelles des personnes et à l’acquisition de comportements sociaux favorisant une meilleure intégration de l’école au milieu ; la fréquence d’utilisation des contenus dans la vie individuelle et sociale. En revanche, pour ce qui est de notre sujet d’expression écrite proposé, nous avons choisi le texte exhortatif car il a « une fonction persuasive » où l’émetteur cherche à convaincre le lecteur, à lui faire partager ses vues en faisant appel à ses sentiments (persuader) ou sa raison (convaincre).Ainsi, nous avons tenté de développer chez l’apprenant sa compétence à rédiger un texte exhortatif. En outre, nous avons décidé de proposer une situation d’intégration car : Tout sujet doit être formulé de manière à inciter le candidat à respecter les paramètres de toute situation de communication (statut du récepteur, objet de la communication et visée communicative). C’est-à-dire qu’il faut mettre l’élève en situation d’intégration. En effet, la proposition de notre sujet d’expression écrite nous a permis d’atteindre les trois compétences majeures ciblées dans Le Cadre européen commun de références, à savoir les : — Compétences communicatives : communiquer en français dans des contextes et des conditions variés en fonction de différentes contraintes : — compétences communicatives / fonctionnelles : traiter en réception ou production toute production discursive, écrite ou orale (demander ou donner des informations, expliquer, … — compétences linguistiques : lexicales, grammaticales (comprendre et exprimer du sens par la reconnaissance et la production de phrases bien formées), sociolinguistiques : registres de langue, clichés…, sémantiques : connotation / dénotation…, phonologiques : accentuation 153 Fatiha OUSSEUR — compétences culturelles : Culture générale : connaissances des lieux, des institutions, des personnes, des événements du pays…, Savoirs socioculturels : connaissance de la société et de la culture locale), comportements rituels (naissance, mort, festivals…) Prise de conscience interculturelle entre le monde d’où l’on vient et le monde de la communauté cible. En effet, l’acquisition de toutes ces compétences citées ci-dessous permet à l’apprenant algérien de forger sa personnalité, de former son esprit intellectuel. Cet état de fait sera traduit, avec le temps, par le fait de devenir « un citoyen responsable et autonome ». Cela constitue le comportement social voulu et souhaité dans une communauté algérienne libre et contemporaine. Par ailleurs, notre expérimentation se donne d’emblée une tâche rédactionnelle. C’est la raison pour laquelle elle s’inscrit dans le protocole de « recherche action ». Nous voudrions, dans cette partie de la recherche, démontrer, par le biais d’un mode d’investigation mixte (qualitatif et quantitatif), que la formulation d’un sujet d’expression écriteau cycle secondaire nécessite la présence de plusieurs paramètres qui jouent un rôle crucial en matière de réussite d’un enseignement de l’écrit. Alors, nous avons distribué cette activité à deux classes de 03ème de langues étrangères de deux établissements différents. En ayant les deux sujets d’expression écrite, à la fois et qui traite le même thème, l’apprenant avait le choix entre les deux1. De ce fait la première chose à laquelle pense un élève est le sujet qui favorise son expression personnelle. — Les rédactions réalisées pour le premier sujet :(ce sujet ne respecte pas les cirières du contexte, la consigne et de la tâche rédactionnelle) Nous voulons démontrer que ce genre de sujet ne va pas inciter les apprenants à produire des textes cohérents) 1 Nous avons demandé à nos élèves de choisir entre les deux sujets qui traitent le même thème mais qui sont énoncés différemment, c’est cette façon de faire ou cette forme de l’énonciation qui a un impact sur la productivité des élèves 154 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … Sujet n°01 Le mariage précoce est une pratique sociale connue dans les pays du tiers-monde : Qu’en pensez-vous ?1 Rédaction Qui parle ? À qui ? Message (réponse à la question) TYPE/ But Contexte argumentat ion Socialetiers monde explication Tiers mondesousdéveloppé s- africain argumentat ion Société argumentat ion Algérietiers mondesociété Dénoncer le mariage précoce argumentat ion Sociale Les causes du mariage précoce explication Socialtiers monde Les origines explication Tiers 01 À mon avis / C’est un acte non culturel 02 / / Les conditions d’un mariage réussi 03 04 05 06 07 Je(à mon avis) / On- je - / Je Je Je / / / Dénoncer le mariage précoce Dénoncer le mariage précoce Certes, ce tableau ne montre pas que les élèves n’ont pas rédigé; les apprenants ont écrit , mais comme on l’a dit plus haut, il s’agit de petits écrits incohérents, c’est la raison pour laquelle on n’a pas consacré une colonne pour la visée communicative ; ce n’était pas par oubli ou par méconnaissance, mais cela a été voulu : en lisant ces petits écrit on n’a pas pu repérer cette visée : ils écrivent dans quels buts ? De plus, on n’a pas consacré une grande partie pour ce tableau car, rappelons-le, nous nous sommes focalisés sur le rôle et l’apport de la pédagogie d’intégration sur la production écrite des élèves. 1 155 Fatiha OUSSEUR du mariage précoce À mon avis 08 / Dénoncer le mariage précoce monde argumentat ion Sociale / 09 Moi / Inconvénients du mariage précoce argumentat ion Tiers monde 10 / / Les vertus du mariage précoce explication Tiers monde Dénoncer le mariage précoce explication Sociale Les vertus du mariage précoce explication Sociale 11 Je 12 / / / 13 / / Dénoncer le mariage précoce argumentat ion Tiers mondesociale 14 Je / Dénoncer le mariage précoce argumentat ion Socialetiers monde Par contre, par la suite, nous avons proposé une activité d’intégration afin de prouver que quand il y a un sujet d’expression écrite pertinent, il y a, par conséquent, des rédactions qui peuvent représenter des textes cohérents. Nous avons enregistré les résultats suivants : Total Sujet n°1 Sujet n°02 Groupe 1 : Groupe 2 : 14 élèves soit 20% 60 élèves soit 80 % 74 élèves 156 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … 1. « Le mariage précoce est une pratique sociale connue dans les pays du tiers-monde : Qu’en pensez-vous ? » 2. « Le mariage précoce était une tradition au passé. Aujourd’hui, les jeunes ne veulent plus se marier à un âge très jeune. Vous faites partie d’une association qui lutte contre cette pratique sociale. Et en réponse à une fille victime d’un père autoritaire, rédigez un texte dans lequel vous lancez un appel à tous les parents pour les inviter à comprendre les exigences actuelles. » — Pourquoi le deuxième groupe 1a–t–il choisi le deuxième sujet ? (Pourtant le premier est plus simple)2 Nous allons tenter de répondre à cette question en étudiant les résultats obtenus pour le sujet n°1. En effet, 20% des apprenants sont décidé de choisir ce sujet. Cela indique que si nous avons un sujet pareil le jour d’une épreuve de français, une minorité d’élève sera motivée pour rédiger. Et comme nous le savons tous, la motivation est le moteur des apprentissages. En revanche, nous avons tous eu l’occasion de corriger au baccalauréat, en passant d’une copie à l’autre, on tombe sur des copies où il y a de bonnes réponses de compréhension de l’écrit , mais pour ce qui est de la production écrite, on se trouve soit avec une rédaction « hors sujet », ou on se rend compte qu’il n’y a nullement la rédaction3. La majorité des élèves s’est abstenue car elle n’a pas compris le sujet : On ne comprend pas un sujet quand on ne connaît pas son statut par rapport à la situation de communication. Le deuxième sujet, nous a permis de sauver la situation, l’apprenant l’a choisi car il connait son statut ainsi que le statut de son interlocuteur. En outre, en analysant les copies du premier groupe (15 élèves soit 20% des copies), on n’a pas su comment pouvonsnous les appeler : récit ou discours ! 1 Le deuxième groupe est celui qui concerne les 60 élèves soit 80% de l’ensemble 2 Nous avons vérifié ce choix en faisant un dépouillement à partir duquel nous avons réparti le total des copies en fonction des sujets proposés 3 Ce n’est pas la seule raison qui justifie cette abstention mais il constitue le principal facteur 157 Fatiha OUSSEUR Ce ne sont pas des récits1 car ils ne sont pas toujours racontés à la troisième personne (04 rédactions uniquement, soit28, 58%). Les autres rédactions (10 rédactions, soit (71,43%) contiennent les pronoms (je/moi). En revanche, les 14 productions écrites, soit 100% ne contiennent pas des pronoms ou indices qui revoient à l’interlocuteur : l’élève rédige, remplit sa feuille, propose une idée, mais il le fait pour qui, dans quel but ? On ne sait pas ! C’est la raison pour laquelle, nous avons constaté qu’il est impossible de déterminer l’objectif rédactionnel ou la visée communicative. Généralement les rédactions réalisées par les apprenants étaient une sorte de réponse à la question posée dans le sujet n°1 : « qu’en pensez-vous ? » Pour ce faire, on n’a pas trouvé des indices spatiotemporels (circonstances) qui constituent le plan de l’énonciation. Pour ce qui est du contexte, les scripteurs des14 rédactions, soit 100%, ont indiqué des indices contextuels, ce qui signifie que ces apprenants savent qu’ils font partie d’un groupe, ils marquent une appartenance socioculturelle. Mais, malheureusement ils ignorent leurs statuts quant à ce groupe. Ainsi, ils n’arrivent pas à adopter un rôle précis pour lequel ils doivent accomplir des tâches en définissant des objectifs d’où la pragmatique du discours : « La situation-problème est une situation d’apprentissage permettant la construction des savoirs ayant un contexte et un but et pouvant servir de situation d’intégration » Présentation des paramètres L’énonciateur (indices d’énonciation) C’est l’ensemble des pronoms qui renvoient à la personne qui parle dans le texte, à savoir les pronoms personnels, possessifs… Ce que nous avons cité après, c’est le lexique, généralement mélioratif, qui renvoie à la prise de position de Un texte lorsqu’il est produit par un énonciateur, soit il relève du récit, soit du discours. Pour chaque type d’énonciation, il y a des indices qui nous permettent de catégoriser l’un de l’autre. Notons ici que l’institution veille à ce les élèves produisent des discours. 1 158 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … l’énonciateur. 1. Nous avons enregistré 80 %des apprenants qui ont adopté une position négative par rapport au thème « le mariage précoce »2. De ce fait, ils ont cité tout ce dont a besoin un être humain avant de parvenir au mariage : «les rêves, l’éducation, le travail, la responsabilité, la construction de la personnalité, les droits, les devoirs, la préparation, la protection… »3.. L’énonciataire4 (les indices de l’énonciation)5 C’est l’ensemble des pronoms et adjectifs personnels qui renvoient à la personne qui reçoit le message du texte produit par l’énonciateur, à savoir les pronoms personnels, possessifs… Ce que nous avons cité par la suite, c’est le lexique6, généralement péjoratif qui a été attribué par le locuteur à son interlocuteur. Les mêmes énonciateurs cités ci-haut, soit 80%des apprenant sont attribué des qualificatifs, actions, … qui peuvent être engendré de la réalisation de l’acte du « mariage précoce » : « violence, risque, mal, injustice, destruction… »7 D’une part, ces apprenants accusent ces parents autoritaires d’avoir adopté ce mariage. De ce fait, ils lancent des appels dans le but d’inciter à l’action8 D’autre part, ils sensibilisent les parents qui veulent prendre la même position9. Donc avant de commettre cet acte inhumain, nos apprenants donnent des informations autour du thème afin 1 En effet les énonciateurs ont pris une position négative par rapport au thème et ont tenté par la suite d’adopter une vision positive qui explique leurs attentes vis-à-vis d’un avenir radieux 2 Contre cette pratique sociale 3 Nous avons réalisé une synthèse des idées positives représentées par les élèves 4 Il s’agit de la personne physique qui reçoit l’énoncé 5 Sont les traces qui renvoient à cette personne dans le message 6 Généralement l’ensemble des modalisateurs qui font intervenir un jugement dans l’énoncé, porte trace de l’opinion, marque certaine distance (noms, adjectif, adverbe, interjection, temps, mode, ponctuation.. 7 Rappelons ici que nous avons réalisé également une synthèse des idées négatives représentées par les apprenants 8 Celle qui concerne la lutte contre la pratique et la propagation du mariage précoce au sein de la société algérienne 9 C’est-à-dire de ceux qui adoptent le mariage précoce 159 Fatiha OUSSEUR de clarifier les causes et les conséquences de cette mauvaise pratique sociale. Exemples : «copie 04 : les conséquences préjudiciables du mariage précoce, copie 08 et 12 : les causes du mariage précoce, copie 22 les conditions d’un mariage réussi, …. copie31 : conseils aux parents, copie 24 : le développement social,…copie 38 : comment définir le mariage ?,…copie 40 : le mariage d’hier à aujourd’hui…. » En outre, les apprenants ont tenté d’informer les parents dans le but de les sensibiliser et même, argumenter pour convaincre ou dénoncer. Exemple : « copie 09 : les inconvénients du mariage précoce,…copie 16 : le mariage précoce comme facteur de divorce,…copie 25 : le mariage précoce est une responsabilité,…copie 35 : contre le mariage précoce, ….copie 41 : le mariage précoce ; source de problèmes, ….copie …... » Le message produit Après avoir lu les productions écrites des apprenants, nous avons tenté de repérer l’idée principale abordée dans chaque rédaction : «appel aux parents : copies 2,3,6,10,14,,15,30,32,,43,,52, conseils aux parents : copies :31,45, , les causes du mariage précoce : copies 08,12,, les conséquences du mariage précoce : copies : 04,les inconvénients du mariage précoce ; copies 09, 28,41, 56, 58, des idées positives ;choix des conjoints copie 05, respect du choix personnel ; copie :07, les exigences actuelles ; copie 11, droit de décision ; copie 13, le droit de choisir ;copie 18,la responsabilité du mariage copie 20 les condition d’un mariage réussi copie 22,, le rêve des filles ; copie :26…….. …. ». Le but du message ou la visée communicative Cette partie de la recherche concerne l’aspect pragmatique du discours. Si l’apprenant décide d’accomplir une tâche rédactionnelle, cette dernière n’a aucun sens s’il ne la réalise pas dans un but précis. Ainsi, la définition de l’objectif d’écriture «pourquoi doit-on écrire ? »1 nait lorsque le sujet parlant 1 Certes l’appel est par essence « oral », et ici on le demande par écrit, c’est le verbe de la tâche rédactionnelle qui indique qu’il s’agit de produire par écrit « Rédige un texte dans lequel tu lances un appel » 160 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … «l’énonciateur »connait son statut par rapport à la situation d’énonciation : «je suis….tu es= pragmatique du discours ».1 Selon les textes officiels : « Les contenus ont été sélectionnés, et leur progression sur l’année a été établie sur la base de la prise en compte des types d’ancrage énonciatif : énonciation du discours écrit, celui-ci étant ancré dans une situation explicitée par le contexte et dont le référent textuel est le « je, ici, maintenant (ex : l’appel) ». En effet, dans un texte exhortatif, l’émetteur lance un appel à des destinataires pour les pousser à agir. C’est un type de texte qui contient en général : 1. « Une partie expositive contenant un constat négatif et insatisfaisant 2. Une partie argumentative contenant l’idée de la nécessité de changement avec indications sur l’action à entreprendre L’appel proprement dit qui sera la partie exhortative. Les circonstances ou le cadre spatiotemporel C’est l’ensemble des mots ou expressions qu’a choisis l’énonciateur pour déterminer le lieu et le temps où se déroule la parole humaine pour qu’elle devienne un acte de parole. C’est le plan de l’énonciation qui réfère à l’instance de l’énonciation. Afin d’illustrer nous citons par exemple : copie 1 : « pays, aujourd’hui, tard, copie 2 : époque, passé, jour, temps, aujourd’hui, copie 03 : avenir, avant, copie 04 : époque actuelle, copie 05 : le présent de l’énonciation, copie …. Copie 08 : quotidien, situation actuelle, ….copie 21 les années passées, pays, copie 22 : actuellement, avant…. Copie 51 : dernières années, années précédentes, aujourd’hui…. » 1 Dans les pratiques de classes, on demande aux élèves de rédiger des écrits qui seront publiés dans le journal du lycée. Nous avons démontré dans une recherche antérieure (dans le cadre du magister) que cet espace de publication a beaucoup d’avantages néanmoins il est absent du paysage médiatique scolaire. Certes, c’est bien de le citer dans les sujets des productions écrites mais à quoi ça sert, si ce n’est pas une pratique réelle dans la vie scolaire des enfants ! 161 Fatiha OUSSEUR Les indices contextuels socioculturels C’est l’ensemble des éléments qui indiquent que l’énonciateur appartient à une région déterminée, adopte une culture précise, pratique une religion donnée, fait partie d’un groupe social. Ainsi, nous citons les exemples suivants : «Copie 01 : tradition, religion, société, … copie 08 : vie, exigences familiales, sociales,… copie 10 : social, paternité, entourage, … copie 17 : musulman, religion, vie, … copie 21 : tiers-monde, ….copie 32 : association, tradition, coutume…..copie 39 : association, 08 mars, société…..copie 42 : coutume, traditions algériennes, social, historique, culturelle, mode, vie, Islam…. ». C’est également tout élément qui indique que l’énonciateur est un acteur social qui fait partie d’un groupe, qui agit en fonction des membres de ce groupe et pour l’intérêt de ce même groupe, c’est ce que nous appelons l’intégration sociale. Étant donné que la production écrite est considérée comme une compétence langagière et son enseignement/apprentissage est défini comme un moment d’évaluation formative1 ou sommative2, selon les textes officiels, elle ne doit être proposée qu’en situation d’intégration : « L’évaluation de la compétence ne peut se faire qu’à l’intérieur d’une situation d’intégration » » 1 Au cours d’une séquence d’apprentissage dans les rédactions intermédiaires 2 À la fin d’un trimestre ou d’un cycle, dans une épreuve officielle 162 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … Expérimentation de l’intégration dans le projet pédagogique Présentation et déroulement Dans le cadre de notre recherche, nous avons voulu démontrer, a priori, que l’élaboration du d’un projet pédagogique pourrait se faire dans une pédagogie de l’intégration. Nous citons, par exemple, « le journal lycéen ou scolaire » qui a un impact sur l’apprentissage du français notamment à l’écrit .Pour ce faire l’évaluation que nous adoptons s’inscrit dans les méthodes offline dans la mesure où on compte évaluer un produit final et qui est « le journal lycéen » réalisé par des lycéens algériens. À cet effet, nous avons pris un échantillon de 20 élèves réparti en deux groupes : — un 1er groupe composé de 10 apprenants qui ont collaboré dans la réalisation du journal ; — un 2ème groupe composé de 10 élèves d’une autre classe. Nous avons distribué le journal tel qu’il a été édité la première fois avec les fautes D’orthographe de conjugaison, de cohérence… Nous avons demandé à chaque élève de procéder à la correction des erreurs en prenant en considération les critères d’évaluation suivants : — Temps imparti à la correction. — Nombre d’erreurs corrigées. Nous avons abouti à la fin de cette partie aux résultats résumés dans le tableau ci-dessous : Groupe n°1 Groupe n°2 Critère n°01 : 01heure Critère n°01 : 02heures Critère n°02 : correction à100% Critère n°02 : correction 25% (Les résultats du test d’évaluation) 163 Fatiha OUSSEUR Interprétation des résultats Nous pouvons remarquer d’emblée que le groupe qui a répondu aux critères de réussite est, celui qui a contribué à l’élaboration du journal lycéen. Ce groupe a veillé à la gestion du temps car en élaborant le journal, il a appris, en plus du savoir linguistique, un savoir méthodologique. Quant à la nature des erreurs corrigées nous avons constaté que la totalité des erreurs a été corrigée. Le groupe a corrigé d’abord les fautes d’ordre orthographique (les « s » oubliés, les accents), et grammatical (accord des verbes, l’utilisation des auxiliaires ….) puis les élèves ont fait des relectures afin de cibler toutes les ambiguïtés qui peuvent induire le lecteur en erreur. Les différences entre les deux groupes sont vraiment nettes ce qui peut être expliqué par de nombreuses raisons : — Le projet débouche sur une fabrication concrète ; — Le projet a une prise de pouvoir sur le réel ; — Le projet s’accompagne d’une modification du statut de L’enfant, du formé, suscitée par une cogestion des projets unissant formés et formateurs ; — Le projet repose sur une autre approche du savoir ; — La pratique de ce projet favorise une autre conception de l’évaluation L’écriture des articles : Répartition des rôles : Les élèves étaient répartis en petits groupes en fonction des rubriques choisies. Ils se trouvent donc en situation d’échanges et d’interactions de communication à l’intérieur de cette organisation à gestion coopérative. Nous avons veillé à l’alternance de groupes affectifs (réunion d’amis), avec des groupes de besoins (des "forts avec des plus "faibles") et des groupes d’intérêt (élèves réunis par l’attrait d’un sujet). Caractéristiques des différents types d’articles Par la rédaction d’articles qui étaient insérés dans le journal lycéen, la production d’écrits des élèves a pris un tout autre sens. En effet, les élèves n’ont pas écrit pour "faire plaisir" à 164 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … l’enseignant comme cela se produit souvent mais pour informer leurs lecteurs : le journal avait donc une fonction d’écrit social, ce qui était très motivant pour les adolescents. Cette phase d’écriture a permis l’application d’une pédagogie différenciée, puisque chaque élève avait la possibilité de travailler en suivant son propre rythme, tout en gardant en tête la date butoir de remise des articles aux chefs de rubriques pour ensuite lancer la publication. Les textes de notre journal lycéen peuvent être classés de la sorte : — Textes à caractère expressif, type message personnel (Voir appendice I, l’article « pensée ») ; — Textes à caractère informatif, fait d’actualité comme le dossier du clonage : « La technique du clonage peut être revendiquée à titre médical. Plusieurs médecins ont admis qu’elle permettrait de disposer de greffons compatibles avec le récepteur (…..) le clonage est supposé capable de produire des organes comme pièces détachées de remplacement quand l’âge ou la maladie ont mis hors d’usage certaines parties du corps humain » ; enquête (la filière de l’économie et la gestion, interview (avec le censeur et le directeur) ; — Textes à caractère poétique ou ludique, poème, blague (du sourire au rire, extraits de poèmes…) Voici un exemple extrait du journal élaboré par les apprenants algériens : Le propriétaire d’un restaurant fameux aimerait bien engager un grand cuisinier. C’est dire ! demande un jeune homme. « J’appelle un grand cuisinier celui qui tous les soirs peut donner à la même soupe un nom différent » Les compétences développées par la création du journal lycéen : Ce projet de type interdisciplinaire a permis de faire prendre conscience aux élèves et aux enseignants d’une nécessaire transversalité de certains apprentissages, tant au niveau des opérations cognitives, qu’à celui de certains objectifs d’ordre méthodologique. Il a conduit aussi à travailler sur la dimension socio-affective, car les élèves étaient amenés à exprimer leurs 165 Fatiha OUSSEUR positions, à s’ouvrir à celles des autres et à vivre les conflits et la négociation. En, outre, il est certain que fabriquer un journal, le rédiger, l’imprimer, l’échanger, c’était un excellent moyen de percevoir les problèmes de l’information, et d’exercer l’esprit critique face à ce qui est écrit et par ce fait on répond à l’objectif défini par l’institution et qui est : « adopter une attitude critique face à l’abondance de l’information offerte par les médias ». Les compétences transversales 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. Construction de la personnalité ; Désir de connaître et envie d’apprendre ; Apprentissage de la vie sociale, écoute des autres ; Acquisitions de méthodes de travail ; Compétences dans le domaine de l’éducation civique ; Les compétences linguistiques acquises ou développées Pratique orale de la langue : -Lecture : - Productions d’écrits Nous avons essayé, après ce long parcours, de démontrer que le journal lycéen est utile en précisant comment cette expérience peut être bénéfique pour l’apprentissage de l’écrit en en intégrant les acquis scolaire en langue française. Conclusion Qu’est-ce que la didactique du FLE ? C’est « un cas particulier de l’étude de l’appropriation d’une langue étrangère en milieu non naturel ».En effet, quand on tente de définir la didactique des langues étrangères, elle s'échappe. Les trois éléments du triangle didactique : l'enseignant, l'apprenant et les contenus ne suffisent pas à Pierre Martinez pour rendre compte de la réalité de l'enseignement des langues aujourd'hui. À des questions telles que « Quels contenus enseigner ? Que signifie l'apprentissage d'une langue étrangère aujourd'hui ? « Ou » Qu'est-ce qu'une bonne description de la langue », on ne trouve pas de réponses définitives. Tout dépend de ce qu'on entend par « communiquer », par la découverte de l'autre langue, des conditions et du contexte de l'apprentissage et de l'enseignement, des politiques linguistiques. Car, pour nombreux 166 Rôle de la situation d’intégration dans l’acquisition du langage écrit … didacticiens, la didactique n'est ni une technologie, ni une science, c'est une "praxéologie " : une recherche sur les moyens et les fins, les principes d'actions, les décisions. Pour Martinez, la didactique s'inscrit dans " un ensemble de processus cognitifs, sociaux, institutionnels et idéologiques qui sont la trame de l'apprentissage ". En revanche, la mise en place d’un partenariat didactique entre les langues passe par une programmation serrée des acquisitions en L1 et en L2, dans le cadre d’un curriculum où l’étude des deux langues ne sera pas menée de façon strictement cloisonnée mais où les compétences acquises à propos de l’une contribuent à renforcer, par similarité ou par contraste, les aptitudes dans l’autre. Tous les domaines sont concernés, aussi bien linguistiques que culturels. Enfin, la formation des maîtres doit être également (re)pensée en ce sens, sans faire des maîtres des linguistes patentés mais en les entraînant à l’observation réfléchie de la langue des apprenants et à la mise en pratique de ce type d’activité auprès des élèves. Bibliographie — DE VECCHI.G et CARMONA-MAGNALDI.N. (2002), Faire vivre de véritables situations-problèmes, Paris : Hachette. — GAONAC’H, D et GOLDER, C. (2001), Enseigner à des adolescents, Paris : Hachette. — JONNAERT, P. (1993), De l’intention au projet, Bruxelles : De Boeck. — LE BOTERF, E.G. (1995), De la compétence : essai sur un attracteur étrange, Paris : Éditions d’Organisation — ROEGIERS, X. (1999), Savoirs, capacités et compétences à l'école : une quête de sens, Forumpédagogies. — ROEGIERS, X. (2004), L'école et l'évaluation des situations pour évaluer les compétences des élèves, Bruxelles : De Boeck. — ROEGIERS X. (2006), La pédagogie de l'intégration en bref, Rabat. 167 Sihame KHARROUBI Université Ibn Khaldoun – Tiaret [email protected] L’évaluation dans le système éducatif algérien Résumé L’évaluation est une opération très complexe, elle est chiffrée et ressentie comme une sanction qui punit chaque connaissance non acquise. Il faut s’adapter et adapter ses apprenants sur le travail à « réaliser » et sur lequel ils seront évalués à partir de là s’instaure une confiance réciproque entre enseignants et apprenants. En Algérie, nous stagnons encore sur une méthode dite conventionnelle, en effet le système éducatif algérien patauge dans deux cadres : enseignement et évaluation ! Notre système éducatif est mal classé au niveau international et gère des méthodes pédagogiques et évaluatives dépassées depuis bien longtemps ! Comment voit-on les différentes évaluations et leur impact dans notre système éducatif et surtout en langue française ? Une petite enquête, à ce propos, nous a permis de constater des lacunes flagrantes et un dysfonctionnement dans l’évaluation de l’écrit, à l’oral, c’est une autre variante d’évaluation qui elle aussi demande à être revue et « corrigée ». Ce mécanisme reste pour le moment obsolète tant que l’administration scolaire se base sur les notes et non sur les acquis des apprenants d’une manière générale. La continuité et la coordination entre les cycles scolaires et l’université sont totalement inexistantes, dans ce cadre ; il n’existe aucune approche pour le moment même à titre expérimental. الملخص ال نها مشفرة باإلضافة الى انه ينظر إليها على أنها عقوبة،التقييم هو عملية جد معقدة بخصوص العمل، فعليك التأقلم والتكيف مع متعلميها،يعاقب كل من لم يكتسب المعرفة كما يجب ان تكون، والذي سيتم تقييمه وتأسيسه،المراد انجازه او العمل الذي تريد تحقيقه .هناك ثقة متبادلة بين المعلمين والمتعلمين 168 L’évaluation dans le système éducatif algérien في الواقع فان النظام، ال نزال نعتمد على الطريقة التقليدية المعروفة،في الجزائر . التدريس او التعليم والتقييم:التعليمي الجزائري يتجسد في اطارين ألنه يدير االساليب التربوية،فنظامنا التعليمي تصنيفه سيء على المستوى الدولي .وتقييمية لم يتجاوزها منذ فترة طويلة كيف ترون مختلف التقييمات والتأثير في نظامنا التعليمي وخاصة فيما يتعلق باللغة .الفرنسية سمح لنا باكتشاف ثغرات صارخة والخلل في التقييم،استطالع صغير بهذا الخصوص . هذا المتغير هو االخر يتطلب المراجعة والتغيير،الكتابي والشفوي ،وتظل هذه اآللية في الوقت الحالي مهملة بما ان االدارة المدرسية تعتمد على النقاط .وليس إلنجازات المتعلمين بشكل عام في هذا اإلطار،االستم اررية والتنسيق بين المستويات الدراسية والجامعية تعتبر منعدمة .ال يوجد اي مبادرة حتى في إطار التجربة ******************** Le rôle de tout enseignant ne se limite pas uniquement à inculquer des notions aux apprenants, mais il doit aussi les évaluer et s’auto évaluer. Évaluer l’apprenant dans ce cas nous pousse à corriger, orienter, et parfois rectifier le tir, pour mieux cerner le problème. S’auto-évaluer, est une sorte de contrôle personnel afin de mieux gérer son travail dans deux axes différents : Jean Pierre Cuq dans le dictionnaire de didactique du français définit l’évaluation ainsi : C’est une démarche qui consiste à recueillir des informations sur les apprentissages, à porter des jugements sur les informations recueillies et à décider sur la poursuite des apprentissages compte tenu de l’orientation d’évaluation de départ. (J-P CUQ, 2003 : 90). L’évaluation De ce fait, on peut admettre que l’évaluation est une opération très complexe pour nous comme pour les autres. À propos de l’évaluation « il n’y a pas jusqu’ici de formation sérieuse, ni de perfectionnement aux pratiques de l’évaluation en 169 Sihame KHARROUBI France. Il n’y a pas de guide d’une telle formation, ni d’ingénierie suffisante »1 Chaque enseignant applique ces évaluations sans le savoir, parce que certaines vont par paires, l’une est le complément de l’autre, et inconsciemment nous procédons, nous appliquons ces données pour les paramétrer. Prenons l’exemple de l’évaluation du savoir (ou du niveau) est l’évaluation de l’atteinte d’objectifs spécifiques – elle porte sur ce qui a été enseigné en classe, par voie de conséquence, elle est en relation au travail fait dans l’heure, la semaine, le mois, au manuel, au programme. En parlant de programmes, nous visons les projets qui contiennent des séquences qui à leurs tours sont fractionnées en séances. — L’évaluation du savoir est centrée sur le cours. — L’évaluation de la capacité (mise en œuvre de la compétence ou performance), au contraire, est l’évaluation de ce que l’on peut faire ou de ce que l’on sait en rapport avec son application au monde réel. L’évaluation dans le système algérien : le cas de la langue française En Algérie, les professeurs s’intéressent plus particulièrement à l’évaluation du savoir qui leur renvoie un feed-back sur leur enseignement et parfois dans l’immédiat, nous citons une anecdote , lors d’une séance d’expression écrite , un élève qui n’avait pas de quoi écrire demanda à son enseignante s’il pouvait emprunter un stylo , celle-ci lui répondit «Ce n’est pas mon affaire » , et sous l’effet des nerfs, la professeure ajouta , on se casse la tête pour vous, on délaisse nos affaires rien que pour vous inculquer des notions, etc…. et la réplique de l’élève fut immédiate : « Madame ce n’est pas mon affaire». Alors, comment évaluer cet élève, deux cas se présentent : — Réaction vive du professeur, et une mauvaise note pour une réplique mal placée (le fameux moins deux au prochain devoir !) 1 Encyclopédie de l’évaluation en formation et en éducation. André DE Peretti collection Pédagogies/Outils –ESF Éditeur- 2ème édition 2000 170 L’évaluation dans le système éducatif algérien — Réaction vive du professeur et lui donne une bonne note, parce que l’apprenant a su utiliser un terme employé par son professeur et dans le même contexte. (Idem ; plus deux points au prochain devoir !) Dans les deux cas ; il y a une évaluation qui passe de l’appréciation verbale à la note chiffrée. Une deuxième variante, l’évaluation chiffrée : Évaluation chiffrée de la production écrite 1 Activité très complexe, ce que nous avons remarqué lors des journées pédagogiques, nous nous sommes investis dans ce cadre pour voir comment les enseignants évaluent cette activité. Nous avons remis une copie d’un élève dans le cadre de l’évaluation de la production écrite à trois professeurs de la wilaya de Tiaret ; pour voir l’appréciation en se basant sur quatre critères : — Le temps de la correction. — Le classement de la copie (36ème sur 42). — Outils de réinvestissement vus en classe. — Note à attribuer à la copie est sur vingt (20) Professeur 1 Professeur 2 Professeur 3 Juste après Le soir 8 4 7 10 9 10 1 semaine plus tard 5 6 7 Puis nous avons sollicité trois collègues d’une grande ville, où le niveau des élèves est plus élevé, concernant la langue française, que celui de notre région. (À signaler que c’est la même copie et le même procédé). 1 Journée pédagogique du 11 mars 2014- ITE Ibn Rochd TiaretThème : L’évaluation chiffrée. 171 Sihame KHARROUBI Professeur 1 Professeur 2 Professeur 3 Juste après 3 2 3 Le soir 4 3 4 1 semaine plus tard 3 4 4 Le problème qui surgit est que l’évaluation varie d’une région à une autre, d’un professeur à un autre, aussi nous ajoutons la période de la correction. L’écart entre les trois notes données par le professeur n’est pas trop important contrairement à la première expérience. Par contre, nous avons remarqué l’étude de texte (type sujet devoir ou composition) Compréhension de l’écrit : 12 points Production écrite : 08 points Compréhension de l’écrit Barème Prof. 1 Prof. 2 Prof. 3 Q1/ 3 3 3 2 Q2/ 2 2 2 2 Q3/ 2 2 2 1 Q4/ 2 2 2 1 Q5/ 1 0 ½ ½ Q6/ 2 1 1 1/2 P. Écrite 08 Total 3 3 4 13 13,5 11 20 Correction réalisées par d’autres enseignants. Professeur 1 Professeur 2 Professeur 3 Juste après 13 13,5 11 Le soir 10 13 11 1 semaine plus tard 10 11 10 Nous constatons, que lorsqu’une consigne est balisée par un barème précis l’écart n’est pas trop important, quel que soit la méthode ou modalité de la correction, mais le problème demeure toujours dans l’appréciation de l’expression écrite. Dans le même contexte, pour faire une comparaison entre le français et les mathématiques, nous avons sollicité nos collègues professeur de mathématiques, à qui nous avons remis (1) une copie de mathématiques pour la correction, sur les quarante correcteurs volontaires nous avons découvert que trois écarts allant d’une valeur d’un demi-point à un point, l’explication fut 172 L’évaluation dans le système éducatif algérien donnée ; cet écart est dû à la démarche et le raisonnement de l’apprenant lors de la réponse à l’exercice. Aussi, nous avons volontairement demandé de noter une question sur six (6), très difficile de telle manière à ce que l’apprenant n’arrive pas à trouver la solution, c’est pour cette raison que la note la plus élevée est de quatorze sur vingt (14/20). Notons à ce sujet, ce n’est qu’une seule copie qui a été remise aux enseignants pour la correction. Nous vous livrons ici le tableau de comparaison : Correcteurs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 Français 11 11 12 10 8 9 7 7 7 9 9 9 8 8 7 7 10 10 10 8 Maths 14 14 14 13,5 13 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 13 14 14 Correcteurs 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 Français 8 9 9 10 11 11 12 10 8 8 9 9 10 11 10 11 10 9 8 9 Maths 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 14 Le tableau comparatif 173 Sihame KHARROUBI 50 40 30 Copies 20 Français Maths 10 0 1 3 5 7 9 11131517192123252729313335373941 Il ressort de ce tableau comparatif, que l’évaluation chiffrée d’une copie en mathématiques ne représente pas ou presque d’écart, par contre la copie de français comme nous le montre la courbe ; l’écart est très important. Évaluation de l’oral et de l’écrit Si les directives pédagogiques ministérielles prônent de placer l’oral en premier lieu au dispositif d’apprentissage en tant que langue de communication, en favorisant la capacité de chaque apprenant à s’exprimer dans une situation bien déterminée. Les outils offerts par les différentes séances comme par exemple la reproduction immédiate, (expression orale, jeu de rôle etc.) sont nombreux, riches et variés. En revanche, ces séances de l’oral en classe nous amènent à constater un dysfonctionnement dans le temps de parole entre les apprenants et l’enseignant d’une part, le professeur monopolise la parole le plus souvent plus que ses élèves, d’une autre part la correction de la production orale des élèves par le professeur n’est que superflue. Certains enseignants préconisent les réflexes linguistiques, où le groupe d’apprenants est chargé de répéter une série de phrases plus ou plus complexes suivant le niveau de la classe, ou ayant trait au thème étudié en classe. Mais ce mécanisme reste insuffisant dans la mesure où il est entièrement basé sur la répétition, d’où l’acquisition et 174 L’évaluation dans le système éducatif algérien l’appropriation de cette langue reste maigre. Il nous faut donc une complémentarité entre l’écrit et l’oral mais il ne faut pas que l’écrit sanctionne l’oral. L’acquisition des compétences orales reste l’un des objectifs primordiaux dans le cadre de la communication Mais cette complémentarité entre l’oral et l’écrit pose un problème, quand il s’agit d’évaluer l’écrit (production écrite), Nous assistons impuissants devant les écrits « médiocres » de nos apprenants bien qu’à l’oral ils s’expriment plus ou moins bien. Ces écrits que nous nommons « médiocres » sont soumis à des critères à savoir : — Réalisation de la tâche : Le texte produit respecte la consigne et la situation d’énonciation (lettre, récit, prise de position personnelle…) — Cohérence et Lisibilité : Le texte est intelligible et cohérent. L’apprenant utilise des connecteurs simples (et, mais, parce que). — Richesse de la langue : Réinvestissement du vocabulaire acquis lors des séances d’apprentissages. — Correction de la langue : Emploie correctement d’un certain nombre de structures élémentaires. Tous ces critères sont pris en considération lors de l’évaluation de la copie, or qu’à l’oral certains critères ne sont pas comptabilisés faute de temps et le nombre d’élèves, et souvent l’enseignant s’adresse ou ne corrige que les réponses presque parfaites pour gagner du temps. C’est pour ces raisons ; que sur un barème fixé parfois sur huit points, rare sont les apprenants qui obtiennent la moyenne, et c’est cela qui provoque cet écart. Dans l’autre cas, l’administration scolaire en englobant toutes les matières s’intéresse plutôt au résultat dit « la moyenne trimestrielle et annuelle » en vue du passage en classe supérieure, et les apprenants tendent à s’intéresser plutôt à l’évaluation globale (ou performance) : c’est l’évaluation du produit, de ce qu’un sujet peut effectivement faire et par la même obtenir la fameuse moyenne du passage. L’avantage de l’évaluation du savoir réside dans le fait qu’elle est proche de l’expérience de l’apprenant. L’intérêt de 175 Sihame KHARROUBI l’évaluation de la capacité est de permettre à chacun de se situer, car les résultats ont une importance dite dans le classement et ici nous rejoignons le but de l’administration scolaire. — L’évaluation continue est l’évaluation par l’enseignant et, éventuellement, par l’apprenant de performances, de travaux et de projets réalisés pendant le cours. La note finale reflète ainsi l’ensemble du cours, de l’année ou du semestre d’où les compositions et devoirs dits surveillés et l’admission en classe supérieure ou le redoublement ; — L’évaluation ponctuelle se fait par l’attribution de notes ou la prise de décisions effectuées à la suite d’un examen ou d’une autre procédure d’évaluation qui a lieu à une date donnée, généralement à la fin du cours ou au début du cours suivant.( type devoir surveillé ou contrôle inopiné). On ne se préoccupe pas de ce qui s’est passé auparavant ; seul compte ce que l’apprenant est capable de faire ici et maintenant. On considère souvent l’évaluation comme extérieure à l’enseignement. Elle a lieu à des moments précis et débouche sur des décisions. Le contrôle continu suppose que l’évaluation soit intégrée dans le cours et contribue, de manière cumulative, au résultat final. Rare de voir les enseignants revenir en arrière lorsqu’un cours est mal « réceptionné » par les apprenants et cela pour diverses raisons, nous en citons qu’une au passage : « contrainte du programme». Évaluation sur une échelle ou Évaluation sur une liste de contrôle L’évaluation sur une échelle consiste à placer quelqu’un à un niveau donné sur une échelle constituée de plusieurs niveaux. Cependant il ne faut pas que cette évaluation entre dans la routine ou devient machinale, ne pas évaluer pour évaluer, ou pour donner uniquement des notes et rester « tranquille »… Comme nous le savons tous, et personne va nous contredire, le nombre d’élèves, la cadence des exercices, le nombre de 176 L’évaluation dans le système éducatif algérien copies, le temps imparti et tous les aléas qui s’imposent, bousculent parfois l’évaluateur à prendre cette opération à la légère, mais l’évaluation doit garder son authenticité et sa légitimité. Pour en conclure cette partie, la seule évaluation qui reste plausible, c’est celle des examens officiels type (6ème, BEM et BAC), puisqu’elle est supervisée sur place, suivie d’une double correction, voire la triple correction où l’écart est très minime. Continuité et de coordination entre les cycles scolaires et l’université Il n’existe aucune coordination entre le cycle scolaire et celui de l’université. Le nouveau bachelier est directement orienté dans une filière suivant des paramètres, forcé à suivre ce cycle imposé, d’où les mauvais résultats. Monsieur le Ministre ne fait que confirmer, ce que nous avons avancé, lors l’interview accordée au quotidien « Le Soir »1 Ce système d’orientation est pourtant l’objet de critiques. Est-il bien rodé ? Pourtant, beaucoup d’observateurs considèrent qu’imposer une fiche de vœux composée de dix filières complique le choix des nouveaux bacheliers… (Dix choix, cela paraît beaucoup mais nous on préfère que ce soit l’étudiant qui fasse son choix plutôt que ce soit l’administration qui décide pour lui. Nous insistons à chaque campagne auprès des bacheliers pour dire qu’il faut absolument bien classer ses dix vœux. C’est un système qui travaille de manière automatique, qui regarde le premier choix en fonction des critères puis les suivants jusqu’à ce qu’il puisse être orienté vers un de ces choix. Il n’y a pas d’autres méthodes qui me paraissent possibles hormis celle-là qui consiste à demander à l’étudiant d’exprimer ses vœux qui sont au nombre de dix et de les classer…) L’université reçoit des bacheliers qui, de l’avis des pédagogues, ne maîtrisent pas beaucoup de prérequis. Comment votre secteur s’adapte au niveau sans cesse en recul des bacheliers ? (Le système éducatif est unique. C’est une seule entité même s’il s’agit de paliers. Le lycée est le palier qui prépare à l’enseignement supérieur. L’important est de considérer le tout dans son ensemble. Il est clair que la prise en charge au niveau de l’université dépend du 1 Quotidien « le Soir » du mercredi 31 juillet 2014. 177 Sihame KHARROUBI produit que nous recevons et de la formation qu’ont reçue les bacheliers. Et de leurs compétences. Il est clair que ce niveau-là mérite d’être amélioré mais il n’y a pas que le système d’orientation qui est en cause. Il y a aussi les questions des langues d’enseignement à améliorer. Il y a aussi la problématique de l’orientation dès le moyen lors du passage au secondaire, l’articulation entre le lycée et la formation professionnelle. Beaucoup d’échecs au baccalauréat sont liés à la mauvaise orientation entre le moyen et le lycée. Même ceux qui réussissent à obtenir leur baccalauréat, le niveau avec lequel ils arrivent à l’université révèle des dysfonctionnements au niveau de leur orientation et qui remonte à loin dans leur cursus. Il faut tout reprendre. On s’attelle à travailler avec l’éducation nationale et la formation professionnelle pour améliorer notre système. Il y a une réflexion entre les trois départements. Il y a un débat au sein du gouvernement et nous finirons par trouver les outils nécessaires à améliorer L’ensemble du système). Conclusion On doit revoir la façon et tous les paramètres pour évaluer bien qu’il n’y ait pas jusqu’à l’heure actuelle une formation spécialisée, ni de perfectionnement aux pratiques de l’évaluation en Algérie ou ailleurs. Nos conceptions habituelles en matière d’évaluation sont réduites à des pratiques communes et répétitives (corrections des copies, interrogations et contrôles).Cette méthode ou ce mode opératoire est tellement machinal qu’il engendre l’inertie, la monotonie, et l’ennui. La fameuse réplique « J'ai 42 copies qui va les corriger ? », si ce n’est pas le triple … Aussi, certaines opérations (devoir, contrôle-surprise, ou l’expédition punitive) méthodes très prisées chez certains enseignants soit par manque de préparation, soit une sorte de désintéressement, dont l’évaluation n’a aucun sens dans ce contexte. Il devient lassant et décourageant lorsque les notes sont dites catastrophiques. À ce moment sommes-nous sûrs de notre efficacité et notre manière d’agir ? À notre avis pour ne pas tomber dans la lassitude et le rituel, osons sortir un peu de l’ordinaire et utiliser d’autres critères d’évaluation, ne serait-ce qu’une fois où l’apprenant sera luimême l’évaluateur… 178 L’évaluation dans le système éducatif algérien Aussi, pour en arriver à un contrôle continu, c’est-à-dire le suivi et pourquoi pas une fiche d’évaluation de l’apprenant qui doit être remise à chaque début d’année scolaire au professeur, au lieu que celui-ci procède à un contrôle des prérequis de l’année précédente par une sorte de prise de contact et des questions à la volée pour tester ses nouveaux apprenants. Bibliographie — CUQ, J-P., (2003), Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, CLE international, Paris, page 90. — De PERETTI, A., (2000), Encyclopédie de l’évaluation en formation et en éducation, collection Pédagogies/outils ESF Editeur, 2eme édition. — BELABES, N. A., (1999), Guide pédagogique à l’intention des enseignants de langue française de l’école fondamentale, Palais du livre, Alger. — BERTOCCHINI, P. et COSTANZO E., (2009), Manuel de formation pratique, pour le professeur de FLE, CLE international, Paris 179 Ghazala MERAZGA Université de Bordj Bou Arréridj [email protected] Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE…le LMD, un dispositif à respecter Évaluer…le LMD, un nouveau dispositif ! Résumé Les recherches sur le sujet de l’évaluation ont maintes fois montré que les évaluations des apprenants sont grandement influencées par les pratiques pédagogiques et, particulièrement, par les pratiques évaluatives qui peuvent en effet jouer un rôle significatif. Quant à l’université, notamment algérienne après l’adoption du LMD comme projet de réforme, l’évaluation est au cœur de ces préoccupations. En fait dans le système LMD, l’évaluation en général, et celle de l’écrit en français langue étrangère en particulier, constitue un moment important dépendant de beaucoup de détails et représentant un dispositif couplant formation et certification afin d’atteindre des objectifs dictés aussi par ce même dispositif. Basé donc sur l’accompagnement mais encore sur la mobilisation et l’actualisation, l’écrit en FLE fait appel à un type particulier d’évaluation au sens de la mise en œuvre de la compétence de la langue tout au long de son enseignement/apprentissage. Toutefois, cela n’occupe souvent pas la place qui devrait occuper au sein des pratiques pédagogiques effectives des enseignants. Pour nous, l’évaluation à ce stade devrait se débarrasser des conduites classiques dépassées par l’esprit du LMD car, nous pensons que : Évaluer…c’est être d’abord en harmonie avec son institution, Évaluer…c’est plus qu’un « programme » tracé et appliqué à la lettre, Évaluer…c’est en fait devenir efficace et Évaluer…l’écrit en FLE serait plus pertinent en se basant sur la « grille EVA » mais encore sur les « critères CECRL ». Bref, Évaluer…c’est mettre à jour ses pratiques pédagogiques sans écarter les contraintes du contexte 180 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… pour mieux l’appréhender et respecter un dispositif d’accueil et de l’offre de formation face à ce défi de l’université algérienne, le LMD. الملخص الدراسات حول موضوع التقييم أثبتت في جل الحاالت أن الطالب يتأثرون بكثرة فيما يخص باألساليب البيداغوجية خاصة منها التقييمية نظرا للدور الذي تلعبه بدا التقييم في، خاصة الجزائرية بعد تبنيها نظام ل م د كمشروع إصالحي،الجامعة التقييم بصفة عامة وتقييم الكتابة باللغة،قلب انشغاالتها على األرجح في نظام ل م د يعتبر نقطة مهمة ترتكز كثيرا على تفاصيل هيئة،الفرنسية كلغة أجنبية بصفة خاصة تعتمد أهدافها على التكوين و الشهادة باالرتكاز إذا على المرافقة ولكن أيضا على الكتابة باللغة الفرنسية تطالب بنوع خاص من التقييم للمهارات،الحركة و المواكبة التعليم وهذا ما يجب أن تنشغل به المواقف البيداغوجية/اللغوية طوال فترة التدريس التقييم في هذا المجال يجب أن يتجاوز األساليب،الفعلية لألساتذة في نظرنا هو أوال تناغما...الكالسيكية المقصاة أصال مع حلول نظام ل م د ألننا نضن أن التقييم .هو تعدي برنامج مسطر ليطبق حرفيا... التقييم،مع مؤسستنا التقييم ومواكبة أساليب بيداغوجية دون إقصاء العراقيل الظرفية وذلك،اختصارا من أجل اإللمام واحترام هيئة االستيعاب وعرض التكوين في ظل رهان الجامعة ل م د،الجزائرية ******************** L’évaluation est aujourd’hui au cœur des préoccupations des institutions universitaires aux niveaux national et international au regard de son importance pour les étudiants, les enseignants, les gestionnaires, ainsi que pour la société C’est avec ces propos qu’a été inauguré le colloque international ayant pour thème «L’évaluation dans le système LMD : regards croisés sur les deux rives de la méditerranée » organisé du 27 au 29 octobre dernier (2014) par le département de lettres et langue française de l’université Constantine1. Un peu plus loin, à partir de la journée scientifique «Réformes des Universités et Gouvernance», organisée par l’Université d’Oran et l’AUF (Agence Universitaire de la Francophonie) le 2 juin 2009 dans l’auditorium B. Talahite, on a eu vraiment l’occasion d’avoir un aperçu sur la question 181 Ghazala MERAZGA concernant l’Afrique de l’Ouest (Sénégal et Côte d’Ivoire) et surtout le Maghreb (Algérie et Maroc) pour développer certaines connaissances sur le système LMD notamment dans sa version algérienne. Du point de vue historique, le LMD (qui est d’origine un concept européen) a vu le jour le 25 mai 1998. Ce jour-là, les quatre hauts responsables (ministres chargés de l’Enseignement supérieur d’Allemagne, de France, de Grande-Bretagne et d’Italie) se retrouvent lors d’un colloque à Paris (Sorbonne), à l’occasion de la célébration du 800e anniversaire de l’Université de Paris, pour lancer un appel à la construction d’un espace européen de l’enseignement supérieur. Donc, lancé à l’initiative du ministre français de l’Éducation nationale (Claude Allègre), le processus a pour objectif surtout le fait de favoriser les échanges universitaires (étudiants, enseignants et chercheurs) et de faire concourir les systèmes universitaires vers des niveaux de référence communs et pourquoi pas avec un aspect mondial. En mai 1998 où on peut lire cette introduction : Sans uniformiser leurs systèmes, les pays d’Europe devront décider d’une certaine harmonisation des cursus et des diplômes et définir un modèle européen spécifique, ni bureaucratique ni asservi au marché. Lui seul aura la taille nécessaire pour maîtriser la mondialisation et promouvoir les valeurs propres à un continent où fut, pour la première fois dans l’histoire moderne, établie une université. En ce qui nous concerne, l’université algérienne a adopté ce projet de réforme, le LMD, désirant « innover » mais surtout « s’actualiser », d’assurer une meilleure qualité des diplômes universitaires de valeur internationale qui permettront une mobilité certaine des étudiants. C’est donc, anticiper une situation future du devenir universitaire Anticipe une situation future. C’est suspendre momentanément le cours des choses pour chercher à savoir comment ce cours va évoluer pour tenter le cas échéant d’infléchir la suite des événements. Une anticipation n’est donc pas passive. Il y a dans la notion de projet le désir de maîtriser ce futur voire même de le modifier » (ROEGIERS, 1997 :180–181). 182 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… En fait, l’Algérie a opté pour la réforme en entamant l’application du système LMD à l’aube de l’entrée universitaire 2004/2005.le but, nous l’avons déjà signalé, était le désire sérieux d’innover tout en suivant le fil promoteur de la mondialisation, Dans notre imaginaire public, souvent « réforme » engendre « parachute des programmes », car imiter ne correspond pas toujours à réussir. Tel était le sentiment de départ en adoptant par imitation d’un modèle européen, le LMD à l’université algérienne. Même si l’intérêt était clair : nos étudiants bien formés sous le système LMD seraient accueillis et appréciés même dans les laboratoires et universités étrangers pour poursuivre leurs études, des contraintes spécifiques aux différentes réalités notamment devant la massification des étudiants s’imposent. À ce niveau universitaire, l'institution demeure le lieu originel qui favorise ou dévalorise la « construction » du savoir et du savoir-faire dans la prise en charge de son enseignement. Raison pour laquelle, enseigner ou encore évaluer dans un esprit LMD, est d’une importance capitale dans tous les choix pédagogiques et doivent être parmi les préoccupations majeures de tout enseignement même hautement qualifiée. Quant à l’évaluation en général, et celle en français langue étrangère en particulier, qui constitue un moment important dépendant de beaucoup de détails, est un dispositif qui se situe au cœur du processus de la formation. Elle porte sur les formes et les fonctions des différentes certifications recommandées par les concepteurs de façon à ne pas nuire aux pratiques réelles de l’enseignant-évaluateur dans son entreprise, et là, afin d’atteindre des objectifs dictés aussi par ce dispositif LMD. En effet, Évaluer à l’aide de la pratique des objectifs pédagogiques ne suffit pas à faire progresser l’élève. Ce sont les résultats de cette évaluation qui vont aider chacun à l’intérieur du tandem enseignant/élève, à maîtriser son rôle. Le premier, en faisant son diagnostic, ne pourra ignorer les points forts et les lacunes du second, et ce dernier saura à tout moment où il en est, sur quelles connaissances s’appuyer pour continuer à progresser et quelle est l’étendue des efforts qui lui restent à accomplir pour atteindre l’objectif fixé. (TAGLIANTE, 2005 : 28). 183 Ghazala MERAZGA L’évaluation dans un esprit LMD basé sur l’accompagnement, et au sens de la mise en œuvre de la compétence de la langue tout au long de son enseignement/apprentissage, n’occupe souvent pas la place qui devrait occuper au sein des pratiques pédagogiques effectives des enseignants. Et même si certains jaugent qu’il s’agit d’une revendication illégitime à un niveau universitaire là où l’effort personnel est exigé plus que jamais en encourageant l’auto-évaluation, l'apprenant estime beaucoup avoir de son enseignant d'une manière aussi engageante que possible afin de réaliser son but de parfaire ses différentes compétences. Évaluer…c’est être en harmonie avec son institution ! Évaluer, c’est collaborer à instaurer « une institution propice à accomplir sa mission » car cette institution pour s'échapper de ce « statut défavorable » qui gêne à ce niveau, la progression et la réalisation de ses objectifs, ne doit pas s'éloigner de son champ d'investigation et de ses responsabilités : « Instituer signifie donc fonder, instaurer, et également instruire les enfants (le maître devient l'instituteur), ces deux sens se rejoignant dans le projet d'institution sous forme d'instruction publique. » (Morandi, 2000 : 31). De point de vue théorique, cela semble déterminer rationnellement les besoins institutionnels. Par ailleurs Les doutes, incertitudes d’une situation biographique qui forme des jeunes pour le futur, qui donne des ressources et des opportunités sans garantie de résultats (…) Ces énoncés de socialisation, de pédagogie, de projection sur les motivations de l’enfant doivent être recoupés avec les différents processus de socialisation scolaire, professionnelle et civique. (VERPRAET, 2001 : 28). Il s’agit aussi d’admettre de faire partie d’une institution qui part, pour combler sa mission, du principe qui prend en compte les exigences actuelles « … vitales sont dictées par les impératifs de la globalisation de la vie moderne et ses complexités ainsi que par les exigences de la modernité » (BENOUNE, 1999) 184 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… Sur ce point, l’angle de regard de notre intervention se dirige vers l’accentuation des valeurs de base d’une institution algérienne qui a envisagé une politique d’enseignement spécifique du FLE : l'enseignement du français langue étrangère en Algérie a une mission globale optant pour : L’ouverture sur le monde un futur citoyen qui sera capable de faire des communications et établir des liens mutuels entre les peuples. Favoriser l'accès à une documentation surtout à caractère scientifique et technique ce qui va permettre d'accéder à la mondialisation. En somme, Le premier objectif institutionnel participe de la visée éducative de l'effort de donner à l'apprenant une formation de base, de parfaire sa culture générale, sa connaissance des autres. La seconde mission assignée par l'instance politique à l'enseignement des L2 est d'ordre fonctionnel ou pragmatique. Il s'agit de doter l'apprenant d’une «langue-outil », d'une langue-instrument qui lui permettrait d'accéder à un savoir d'ordre scientifique et technique. » (BOUGUERRA, 1991 : 84). Bref, notre université a, en adoptant ce système mondial LMD, normalement formuler ces objectifs généraux selon un ordre éducatif et culturel (formation générale de l'apprenant), politique (compréhension mutuelle entre les peuples), (dialogue Nord-Sud) et économique (transfert de technologie), objectifs extrêmement importants pour tous les pays surtout du tiersmonde. Évaluer…c’est plus qu’un « programme » ! Toutefois si la démarche suivie au sein de cette l'institution n'est pas clairement définie et ne répond pas aux exigences en prenant pas en charge l'apprenant avec ses aspects multidimensionnels, cela va influencer négativement le rendement. Suivre le fil promoteur de la mondialisation sera donc un facteur défavorable voire un élément perturbateur favorisant l’échec dans un tel parcours. Ces objectifs, par principe font l’objet d’un programme, réalisé ou appliqué par l’enseignant car 185 Ghazala MERAZGA Un programme scolaire (par exemple en math, ou en économie ou en français) ne se structure pas autour d'une rationalité scientifique mais autour d'un projet de société (que veut-on enseigner aux jeunes ?). Établir un programme est donc un acte politique. Celui-ci doit intégrer les possibilités et les contraintes venant des savoirs scientifiques d'une part, des capacités d'apprentissage d'autre part, les commissions préparant les programmes ne doivent pas comprendre uniquement des outils d'analyse sociale et des simples citoyens. » (FOUREZ, 1998 :172). Bref, là, l’université est l'institution qui doit s’assigner comme objectifs généraux quant à la formation d’un licencier en FLE : — Enseigner la langue (FLE) dont l'apprenant a besoin dans des contextes communicationnels et rédactionnels précises (réalisation d’activités thérapeutiques) ; — Enseigner la langue (FLE) qui va rendre l'apprenant capable, à long terme, d'affronter d'autres contextes notamment rédactionnels. C'est un rôle indispensable qui vise à parfaire les pratiques pédagogiques afin d’inciter l'apprenant à parfaire, à son tour, son statut et surtout ses compétences et l'aider à évoluer dans un état des lieux motivant et harmonieux pour son épanouissement et construction réelles d’aptitudes. Dans ce cas, un programme trop ambitieux même basé sur l’évaluation, qui dans l'abstrait, serait génial mais sa réalisation sur le terrain est impossible. Il devient inutile et généralement n’atteindra jamais ses objectifs : l'institution qui accueille cette population scolarisée a plusieurs fonctions y compris la transmission et l'appropriation des compétences (La fonction de transmission de connaissances est assez universelle dans toutes les sociétés humaines). Et si cette institution ne joue pas son rôle comme il faut, tout un effort sera avorté. Cet état est décrit par G. Fourez, en faisant allusion à la susceptibilité d’un acte chirurgical ou l’angoisse qui accompagne le voyage par avion Personne n'a envie de se trouver sur une table d'opération aux mains d'un chirurgien que l’on n’a pas reconnu comme compétent. Ou si on monte dans un avion à réaction on espère qu'une institution sérieuse a apprécié la manière dont le pilote était capable de diriger son appareil. (FOUREZ, 1998 :104). 186 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… Généralement, la stratégie appliquée par l'institution avec les savoirs qu'elle dispense et les programmes même si leur application est conceptualisée participe d'une manière parfois défavorable à créer dans une classe de FLE certains comportements qui demandent à être corrigés afin de remédier à certaines insuffisances : — Les apprenants, par manque de motivation et de compétences, s'ennuient. — La maîtrise du lexique et de la syntaxe à ce niveau avancé semble être une tâche ardue. — Les exigences de la formation sont souvent accélérées et donc inadaptées aux possibilités des apprenants. — Le nombre d'apprenants est trop élevé dans la classe, ce qui nuit la commodité de l’application des conduites langagières en générale et celles de la classe de langue particulièrement. Cela empêche souvent la communication entre le couple pédagogique (enseignant/élève) et de ce fait l’accès au savoir spécialisé. L’étudiant par méconnaissance des objectifs et la programmation de son parcours reçoit une progression anarchique du moment où il ignore le « plaisir » et les liens entre les savoirs qu'il acquiert… Évaluer…c’est devenir efficace ! Une stratégie moins claire et hésitante appliquée lors de l'acquisition des compétences rédactionnelles en FLE à l’université semble être un facteur défavorable et vulnérable et aura un impact certain si on ne prend pas en charge une démarche sérieuse et efficace des pratiques pédagogiques. Cette prise en compte efficiente, en s’appuyant sur les différents modes d’évaluation serait à cet égard, une voie parallèle à celle de la réflexion de la réforme et le devenir dans le secteur. Comme le soutient à juste titre J. Stordeur : Devenir efficace, c'est-à-dire obtenir enfin, pour la grosse majorité des apprenants, les résultats que l'on s'était donnés comme objectifs, ne peut que renvoyer à la question de la valeur de ces objectifs par rapport aux conceptions de l'homme qui sont en jeu dans le débat démocratique parce que la question actuelle est trop souvent : 187 Ghazala MERAZGA « comment éviter les échecs dans telle ou telle branche, dans telle ou telle formation? », ou en d'autres termes « comment devenir plus efficace? », on en oublie de poser les question plus fondamentale de la valeur de ces informations et de la valeur des pratiques qui y sont proposées, tant que nous nous serons « englués » dans le comment, pourrons-nous vraiment réfléchir sereinement au pourquoi? (STORDEUR, 1996 : 6). Pour ne pas conduire et/ou contribuer à former un apprenant voire un futur enseignant de FLE incompétent notamment au niveau rédactionnel et d’être un facteur néfaste, on devrait non seulement préparer une atmosphère adéquate à ce genre d'enseignement/apprentissage mais aussi de construire un outil aussi commode qu’envisageable permettant de mieux se situer dans ce contexte et perfectionner, dans la mesure du possible, une situation rédactionnelle dite lacunaire. Évaluer…l’écrit en FLE : « grille EVA » mais encore « critères CECRL » ! Pour le FLE, l'apprenant éprouve encore assez de difficultés pour une meilleure maîtrise de sa part d'où la nécessité d'une bonne prise en charge surtout au niveau de rédaction. À ce stade-là, les critères d’évaluation une fois définis permettent à l’enseignant de jalonner et clarifier les objectifs du parcours et assurer un accompagnement assez efficace. Pour l’écrit, l’évaluation de la compétence rédactionnelle, en compréhension comme en production, ne peut que consister à concevoir des dispositifs évaluatifs rigoureux mais surtout pertinents dans leurs contextes et susceptibles d’accompagner les apprenants pour de les aider à affronter leurs difficultés afin d’améliorer leurs productions écrites. En effet, Évaluer la capacité d’un étudiant à parler (production orale) et à écrire (production écrite) exige en premier lieu que celui-ci soit placé dans une situation authentique_ ou quasi authentique_ de production. En ce qui concerne l’écrit, la situation scolaire va de soi, en quelque sorte, à condition qu’on demande à l’étudiant de produire un discours et non des phrases à compléter ou à transformer. (COURTILLON, 2003 : 47). 188 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… C’est pourquoi d’évaluation, dans notre cas, devrait être l’une de nos préoccupations majeures. Elle nous ouvrirait, dès le départ, un espace de réflexion méthodologique. Ce dernier, nous permettrait d’entreprendre des choix réfléchis dans l’élaboration d’outils d’enseignement. La compétence de l’écrit en langue française se qualifie d’une spécificité dans les procédés de son enseignement/apprentissage que dans son évaluation. Sur ce dernier point, les spécialistes insistent sur les particularités des critères d’évaluation pour l’apprentissage de l’écrit et les rôles qu’ils jouent : « - Faire prendre conscience de la diversité des écrits, dans leurs formes, leurs contenus, leurs intentions, pour élaborer des critères de différentiation de types d’écrits ; - Faire prendre conscience de la complexité du tissu textuel pour élaborer des critères d’évaluation concernant les mots et les phrases, certes, mais aussi – et d’abord – les relations entre les phrases et le texte dans son ensemble ; - Faire prendre conscience de la complexité du travail d’écriture, qui n’est pas coucher des mots sur le papier mais élaborer un texte à coups d’essais et reprises successives. (FINET et GADEAU, 1991 :51). Fondé sur les travaux du Conseil de l’Europe, les critères du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues sont conçus pour répondre à ces différentes interrogations et mettre en place un dispositif d’évaluation, de la compétence en question, reposant sur des critères de base : — Évaluation initiale correspondant à la découverte du niveau initial, de diagnostic et d’orientation ; — Évaluation continue accompagnant les processus d’apprentissage ; — Évaluation finale constituant un bilan, une appréciation et certification. Ainsi, nous proposons d’opter pour une analyse des rédactions en se référant à la fois sur un agencement de grille EVA et critères du CECRL afin de pouvoir mieux les classer selon l’Echelle globale des Niveaux conçue pour déterminer leurs profils et situer leurs compétences. Quant aux critères EVA, le principe est de récapituler un ensemble d’éléments de langue susceptibles de vérifier la 189 Ghazala MERAZGA compétence visée. Dès son élaboration (par Gadeau Josette et Finet Colette en 1991) détaillant les points essentiels à évaluer (les points de vue pragmatique, sémantique, morphosyntaxique et les aspects matériels), le tableau EVA est devenu une référence d’évaluation pour les enseignants et chercheurs s’intéressant à la production écrite. D’ailleurs, il donne en détaille les critères d’évaluation et cela facilite et permet à l’enseignant de mieux entreprendre sa démarche et aux l’apprenant d’assimiler leur appropriation. Les productions écrites, confirme souvent un souci de défaillance face à une pratique incontournable. Une évaluation, basée sur un tel agencement, serait en mesure d’indiquer comment pourrait se dérouler une expérience en vue de développer les compétences rédactionnelles en FLE à l’université tout au long de la formation. Une évaluation qui pourrait aussi confirmer à chaque instant de son déroulement la réalité pédagogique et les obstacles auxquels le processus acquisitionnel à ce stade de professionnalisation se heurte. Sur ce, les « erreurs de ces rédactions » devraient être acceptées car elles sont sources et/ou matière première de la pratique. De plus, elles permettent de mobiliser et de différencier les ressources nécessaires pour aider les apprenants, par le biais des différents moments d‘évaluation, à progresser vers l’atteinte des objectifs d’enseignement/apprentissage et donc favoriser l’entraide en valorisant l’apport des éléments de réponses pour les réussites. Il s’agit là, de se référer pour répondre aux exigences académiques de ce nouveau dispositif aux critères du tableau EVA qui prend en compte : texte dans son ensemble, relations entre phrases et les phrases. Et aux recommandations du CECRL pour l’établissement de systèmes de validation de compétences en langues (précisément en FLE). En fait, au moment où le Cadre Commun de Référence s’intéresse particulièrement à deux questions sur : ce qu’on évalue et comment on interprète la performance, les critères du tableau du groupe EVA stipulent, alors, d’appliquer des procédures d’évaluation qui porteront sur la classification des productions de point de vue : pragmatique (le texte dans son 190 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… ensemble, les relations entre phrases et les marques de l’énonciation) Il s’agit d’une évaluation visant à faire le point sur le niveau de la compétence rédactionnelle en FLE des apprenants à un stade de spécialisation. Une compétence à visée linguistique portant sur des critères de performance basés sur : la structuration de l’écrit dans son ensemble, la construction de phrases, la cohérence, la sémantique, la syntaxe,… Les résultats obtenus, ici, ne seraient vraiment valides qu’en fonction d’une base de référence d’évaluation qui détermine, elle-même, son propre profil par l’application des deux grilles des critères d’évaluations relatives à l’écrit (EVA et CECRL). Un choix parmi différents types d’évaluation ; celui qui est le plus approprié aux besoins des apprenants, du contexte et des objectifs fixés dès le départ. Évaluer…c’est pédagogiques ! mettre à jour ses pratiques Avec un tel choix nous proposons de rechercher également l’équilibre entre les différents modes et de manière à évaluer une démarche de formation sous différents angles et avec des outils variés relatifs à la compréhension mais surtout la production écrite dans le domaine du FLE au sein d’un paysage universitaire algérien lié à la mise en place du système LMD. Ainsi, pas à pas, les formes et les fonctions de tel type d’évaluation pourrait servir comme guide méthodologique de la recherche en répertoriant la démarche ayant comme référence des instruments reconnus par leurs rentabilités. Comme déjà signalé et pour qu’elle ait son statut actuel, l’université a subit, comme toute institution veillant à l’instauration des projets de société, des bouleversements reflétant le contraste entre la minceur des prétextes et l’ampleur des développements. Cela devrait maintes fois attester que ces crises à travers le temps n’étaient que l’aboutissement et le signe de malaises graves et profonds auxquels l’université, corps vivant et susceptible, réagissait souvent en révélant d’étonnantes capacités de rigidité intransigeante de violence latente ainsi que de rénovation féconde. 191 Ghazala MERAZGA En prenant en charge notre spécificité, une nécessité de suivre ces changements, entre autres l’évaluation avec ses principes de fiabilité, faisabilité et validité pour en faire l’objet d’une véritable enquête pédagogique menée en vue de favoriser l’«accompagnement », l’ « engagement » et l’ « action », principe du LMD mais encore promouvoir l’université et ses pratiques. Sur-ce, comme un aboutissement légitime d’une institution en perpétuel devenir, l’enseignant universitaire est là pour que les tentatives ne soient pas préalablement avortées en formulant un assemblage de trois logiques d’action, celle de la logique d’intégration dans un établissement d’enseignement notamment supérieur, une autre stratégique de construction d’un projet scolaire actuel mais aussi projeter un autre professionnel et une logique relative et/ou subjective de construction et de consolidation d’une exhortation intellectuelle ainsi qu’une subjectivité purement personnelle. Il (enseignant) doit admettre que les réformes scolaires n’atteindront jamais le fond sans parvenir au changement de la forme. Des comportements à changer quoi que ce soit, en y parvenant en substituant aux contraintes disciplinaires, normatives, les résistances des matériaux à traiter, en n’acceptant ni les laxismes démagogiques, ni l’autoritarisme arbitraire, en aimant élèves et étudiants comme des individus ayant chacun leur parcours et non comme une masse différenciée. Nous n’hésitons pas à insister, à chaque fois, sur l’importance de l’évaluation à tout moment d’enseignement/apprentissage (notamment d’une langue étrangère et du FLE). Une intervention efficace en matière d’évaluation ne devrait, en aucun cas, s'organiser seulement autour d'une discipline scientifique qui est, avouons-le, indispensable mais aussi autour des exigences et objectifs à atteindre : que veut-on apprendre à ces apprenants ? Aujourd’hui ? Ici ? Pour arriver à ? Nous appuyons ainsi les travaux de recherche qui affirment que si stratégie sérieuse visant une certitude dans la vérification et la certification dans ses pratiques n’aurait pas lieu, un conflit entre intégration dans un établissement d’enseignement 192 Un esprit d’évaluation de l’écrit universitaire en FLE… supérieur et l’engagement dans l’assimilation des savoirs intellectuels s’instaurerait. Bibliographie — BENOUNE, M., (26/05/1999), De l'université à la multiversité, in El Watan. — BOUGUERRA, T., (1991), Didactique du français langue étrangère dans le secondaire algérien, office des publications universitaires, Alger, p. 84. — COURTILLON, J., (2003), élaborer un cours de FLE, hachette, Paris, p.47. — FINET, C et GADEAU, J., (1991), évaluer les écrits à l’école primaire, hachette, Paris, p.51. — FOUREZ, G., (1998), Éduquer : écoles, éthiques, sociétés, édition De Boeck, Bruxelles, pp. 104/172. — MORANDI, F., (2000), Philosophie de l’éducation, Nathan, p.31. — ROEGIERS, X., (1997), Analyser une action d’éducation ou de formation Analyser les programmes, les plans et les projets d’éducation ou de formation pour mieux les élaborer, les réaliser et les évaluer, éd. de Boeck & Larcier, pp.180/181. — STORDEUR, J., (1996), Enseigner et/ou apprendre, édition De Boeck, Bruxelles, p. 6. — TAGLIANTE, CH., L’évaluation et le Cadre européen commun, CLE international, Paris, p.28. — VERPRAET, G., (2001), Les enseignants et la précarité sociale, Presses Universitaires de France, p.28. 193 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI UMB, Boumerdès [email protected] L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? Résumé Partant du constat que les résultats universitaires sont de plus en plus insuffisants et que l’évaluation permet une rétroaction sur les pratiques enseignantes, nous avons tenté de répondre dans le présent travail aux interrogations suivantes : Comment peut- on expliquer les lacunes des étudiants des départements de Langues Étrangères ? Les enseignants- chercheurs, sont- ils des évaluateurs ou simplement des correcteurs ? autrement dit, les tâches proposées dans les activités d’évaluation et les épreuves, permettent- elles de mesurer des compétences ? Comment doit- on évaluer les différentes disciplines des langues étrangères ? À partir de l’analyse de notre corpus, nous avons mis en évidences les lacunes de l’évaluation universitaire : Les pratiques d’évaluation sont hétérogènes vu l’inexistence de coordination entre les enseignants. La simplification des consignes empêche l’étudiant de réfléchir. L’évaluation de l’oral ne porte que sur l’oral- objectif et non pas sur l’oral- moyen. En littérature, l’évaluation ne porte pas sur la langue littéraire mais sur le contenu littéraire. Les consignes de grammaire sont énoncées en termes de supports phrastiques et non pas textuels. Ce qui conduit à conclure que l’évaluation universitaire n’est pas pertinente car elle ne mesure pas les compétences mais corrige les contenus. 194 L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? الملخص ،انطلقنا من فكرة أن النتائج الجامعية رديئة وأن تقويم المتعلم يعكس الممارسات التعليمية :لهذا حاولنا أن نجيب من خالل بحثنا هذا على بعض التساؤالت كيف نفسر نقائص طلبة أقسام اللغات األجنبية؟ هل يعتبر األساتذة الباحثون مقومين أم مصححين فقط؟ كيف يمكننا تقويم مختلف المواد في اللغات األجنبية؟ : توصلنا إلى بعض النتائج التي نلخصها فيما يلي،بعد دراسة عينة البحث ، عدم تجانس ممارسات التقويم نظ ار النعدام التنسيق بين األساتذة ، الطلبة من التفكير، يمنع تبسيط األسئلة يعطي األساتذة األهمية لمحتوى الكالم على حساب، في حصة التعبير الشفهي ،طريقة الكالم ، يهتم التقويم في األدب الفرنسي بالمحتوى األدبي وال باللغة األدبية . تبنى اسئلة القواعد على جمل متفرقة وال على نصوص كاملة لهذا يمكن استخالص أن األستاذ الباحث ال يعطي األهمية الالزمة للتقويم بما أنه ال .يقيس الكفاءات بل يصحح المحتويات ******************** Définir l’évaluation dans la situation d’enseignementapprentissage en tant qu’aboutissement dans sa forme sommative de séquences d’apprentissage (devoirs, examens, tests…), et de cycles (examens finaux), ne suffit pas à identifier ce que recouvre ce terme. Elle est plutôt un processus d’apprentissage et de formation pour l’apprenant. Mais dans le contexte universitaire qui nous intéresse dans le présent travail, l’on connaît la perception qu’ont les étudiants des pratiques d’évaluation : Quand ils parlent des lacunes de l’enseignement universitaire, ils revendiquent une cohérence des pratiques d’évaluation et de notation. Pour cela, une évaluation critériée s’impose dès lors que l’enseignant n’évalue pas dans l’absolu mais il analyse les résultats obtenus par rapport à des objectifs et à des critères. En effet, montrer aux étudiants ce que 195 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI l’enseignant se propose d’atteindre à court, à moyen et à long terme, identifier les compétences à développer et les performances attendues des étudiants, est une exigence de l’enseignement- apprentissage. Ainsi, dès lors qu’il y a adéquation entre les critères posés et les objectifs fixés, l’enseignant peut évaluer. De ce fait, l’évaluation de l’apprenant permet une rétroaction sur les pratiques enseignantes ; en bref, elle constitue pour lui une auto- évaluation. C’est pourquoi Claudine GARCIADEBANC (1999 : 193) fait l’injonction : Dis- moi ce que tu évalues, je te dirai ce que tu enseignes. L’étude des outils d’évaluation constitue donc un bon analyseur des contenus d’enseignement et des compétences visées ». Ainsi, « une évaluation plus complète peut être intégrée dans le processus même de l’innovation. Elle enrichit alors les pratiques enseignantes par un processus de formation continue intégré. (GIORDAN A, 1998 : 222). En effet, lorsqu’un enseignant donne une consigne à ses étudiants et qu’il n’obtient pas les résultats espérés, ce ne sont pas toujours les étudiants qui en sont la cause ; parfois la consigne a sa part de responsabilité. En dépit de ces aspects de l’évaluation, les résultats universitaires demeurent de plus en plus insuffisants. C’est pourquoi nous tenterons d’expliquer dans le présent travail les raisons de ce phénomène dans le domaine des langues étrangères en répondant aux interrogations suivantes : Comment peut- on expliquer les lacunes des étudiants des départements de Langues Étrangères ? Les enseignants- chercheurs, sont- ils des évaluateurs ou simplement des correcteurs ? Autrement dit, les tâches proposées dans les activités d’évaluation et les épreuves, permettent- elles de mesurer des compétences ? Comment doit- on évaluer les différentes disciplines des langues étrangères ? Pour répondre à ces questions, nous faisons l’hypothèse générale suivante : le problème des résultats estudiantins est dû aux pratiques d’évaluation des acquis des étudiants. Pour pouvoir mesurer cette hypothèse, nous proposons trois hypothèses partielles : 196 L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? Il n’existe pas (ou il existe très peu) d’unification des dispositifs, des procédures, des critères d’évaluation au niveau des départements des Langues Étrangères. Les enseignants- chercheurs corrigent les contenus d’enseignement et n’évaluent pas les compétences. Il serait possible d’améliorer les pratiques d’évaluation des acquis en tenant compte de plusieurs paramètres selon les disciplines en Langues Étrangères. Cadre théorique Le système éducatif algérien a connu une réforme installée suite à l’ordonnance n° 3- 09 du 14 Djoumada Ethani 1424 correspondant au 13 Août 20031. Cette nouvelle orientation éducative est une nécessité pour le système éducatif tenu d’apporter des changements dans sa vision de ce que doit être la formation du Jeune algérien, de son rapport au savoir afin qu’il puisse communiquer, se documenter et être doté de repères solides, autonomes et constructifs dans la société dont la richesse se mesure aux compétences. Dans la continuité de cette réforme, l’université algérienne a connu un nouveau système appelé LMD2. Ainsi, de nouveaux concepts apparaissent : « enseignement- apprentissage », « évaluation », « compétences », « tâche », « activité », « savoirfaire », « savoir- être », « faire savoir », etc. En dépit de l’adoption de ces concepts, nous constatons un manque d’intérêt à l’évaluation dans le processus d’enseignement- apprentissage chez les acteurs du système universitaire. Mais pour « tenter d’objectiver l’évaluation (…), la constitution d’une grille est nécessaire et oblige à mettre à plat toutes les phases de développement lectural (ex : la lecture) et les possibles interventions didactiques dans le processus » (ROSIER J- M., 2002 : 96). La grille d’évaluation serait dans ce cas, un outil qui permet à l’évaluateur d’effectuer sa tâche et de considérer l’évaluation comme « critériée ». Les critères de réalisation sont posés en verbes d’action mis à la disposition des CD Rom : Bulletin Officiel de l’Éducation Nationale, M.E.N., Novembre 2004 2 LMD : Licence- Master- Doctorat 1 197 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI étudiants avec le barème de notation correspondant car elle incite à « construire des exercices pour apprendre à lire des consignes, élaborer des questionnaires pour les lecteurs en difficulté »(Ibidem). La consigne représente un texte dans lequel toutes les attentes de l’enseignant sont formulées explicitement. En effet, elle doit être précédée de l’objectif visé (ce à quoi s’attend l’évaluateur) et d’une mise en situation de l’étudiant (une problématique). Ainsi, des prescriptions trop générales, floues et souvent peu opérationnelles peuvent laisser le scripteur indifférent et dérouté. Pour ce faire, E. Berard (1995 : 22) souligne que « l’explicitation des consignes est un point- clé qui fait que l’apprenant peut exercer son activité en sachant ce qui lui est demandé et savoir à tout moment ce qu’il fait ». Et pourquoi pas un module d’entraînement sur la lecture des consignes que l’on intitulera « Lecture des consignes ». Le travail sur la consigne constitue selon M. Miled (1998 : 124) « une forme d’aide ; on peut aisément vérifier le fait qu’un échec à l’écrit est souvent imputable à une incompréhension totale ou partielle de ce qui est demandé». L’entrainement sur la lecture des consignes aide également à développer des savoir- faire cognitifs et métacognitifs permettant à l’étudiant de continuer à apprendre tout au long de sa vie puisque le métier d’étudiant implique des ajustements méthodologiques. La consigne de compréhension par exemple, doit intégrer les connaissances antérieures relatives au thème, au type de texte, au positionnement du scripteur, à l’organisation des idées, au destinataire… et qui doivent apparaître dans l’énoncé de la consigne. L’exécution de la tâche par l’étudiant comprendra les paramètres suivants : — Les compétences : facteurs cognitifs, affectifs, linguistiques… — Les conditions, — Les contraintes ; temps, nombre de lignes…. — Les stratégies… J- M. Zakhartchouk (1999 : 32) propose des types de consignes qu’il appelle : — Les consignes- buts concernent le commentaire de citation, la réalisation d’un projet ou l’écriture d’un récit 198 L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? et sont présentes en littérature, en techniques d’expression écrite, etc. — Les consignes- procédures indiquent les étapes obligatoires que poursuit l’apprenant pour arriver au résultat et sont utilisées en langue (Morpho- syntaxe et Phonétique) et en méthodologie de la recherche. — Les consignes de guidage attirent l’attention de l’apprenant pour qu’il ne se trompe pas en lui demandant par exemple d’être attentif ou de ne pas confondre ; elles pourraient être appliquées en méthodologie de la recherche, à l’oral, etc. — Les consignes- critères proposent des critères d’évaluation ou de réussite sous une forme injonctive ; elles peuvent être utilisées à l’écrit ou dans toute autre discipline. Méthode à suivre Pour vérifier nos hypothèses, nous avons suivi la méthode descriptive mettant en évidence les lacunes de l’évaluation universitaire dans le domaine de l’enseignement des langues étrangères. Pour atteindre cet objectif, nous avons réalisé quelques entretiens avec des enseignants- chercheurs et recueilli des sujets d’examens proposés aux étudiants en licences de français et d’anglais dans deux universités différentes : Université M’hamed Bougara, Boumerdès et l’Université Mouloud Mammeri, Tizi Ouzou. Chaque technique d’évaluation utilisée dans les différents sujets d’examen sera analysée et suivie de propositions méthodologiques n’ayant pas pour objectif de donner des directives aux enseignants- chercheurs mais de fournir quelques indications pour l’amélioration des consignes et de l’évaluation universitaire. Analyse et discussion des résultats de la première hypothèse Les résultats de la première hypothèse qui stipule qu’ « il n’existe pas (ou il existe très peu) d’unification des dispositifs, des critères d’évaluation au niveau des départements des langues 199 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI étrangères », montrent que les pratiques d’évaluation sont hétérogènes, ce qui influence négativement l’objectivité et la validité de l’évaluation. En effet, il n’existe pas dans les départements des langues étrangères (terrain de notre étude) de coordination entre les enseignants des mêmes modules quant à l’élaboration des activités et des critères d’évaluation, et à l’unification des procédures et des techniques d’évaluation étant donné que leurs objectifs et les contenus d’enseignement diffèrent. Ce qui permet aux étudiants d’être évalués différemment dans un même module pour un même diplôme : « Je ne fais pas le même sujet d’examen avec mon collègue du module. Je ne sais pas ce qu’il fait exactement en cours » (propos d’une enseignante- chercheure, module de Phonétique). « Nos sujets ne sont pas les mêmes parce qu’on ne travaille pas sur les mêmes auteurs » (propos d’une enseignantechercheure, module de Littérature Comparée). « Ce que mes collègues enseignent ? Je n’en sais rien ! » (Propos d’une enseignante de Méthodologie de la Recherche) L’analyse montre que la coordination et la concertation dans l’enseignement universitaire sont inexistantes, notamment dans les pratiques d’évaluation. En effet, le barème de notation utilisé pour deux questions à choix multiples (module de TEE) en examen de rattrapage d’anglais (Semestre 3/ 2014) est de 2.5 / 10 points chacune alors que dans d’autres sujets du même module, les Q.C.M ne sont pas utilisées et le barème n’est pas le même ; ce qui explique que les objectifs d’enseignement et les techniques d’évaluation diffèrent et ne mesurent pas objectivement les acquis et les compétences des étudiants. Mais qu’est- ce qu’on évalue donc ? Analyse et discussion des résultats de la seconde et de la troisième hypothèse « Les enseignants- chercheurs corrigent les contenus d’enseignement et n’évaluent pas les compétences » « Il serait possible d’améliorer les pratiques d’évaluation des acquis en tenant compte de plusieurs paramètres selon les disciplines en Langues Étrangères ». 200 L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? Les consignes d’écriture proposées à l’écrit dans les examens de fin de semestre et de rattrapage (semestre 2013/ 2014) demandent à l’étudiant d’imaginer « la suite de l’histoire » et de réfléchir « à ce que va faire le personnage » sans penser à la difficulté d’évaluer l’imagination et la réflexion car les deux verbes soulignés sont des verbes mentalistes ne pouvant pas constituer un objet évaluable ni être directement observables chez l’étudiant : ils ne sont pas classés parmi les verbes d’action susceptibles de déclencher une action concrète chez l’étudiant. De plus, les sujets de TEE sont simplifiés par les enseignants alors que la clarté et la brièveté empêchent l’étudiant de réfléchir et compliquent parfois la tâche. En effet, « Racontez une histoire triste » (examen du semestre 1/ 2014) est une consigne simple et claire mais qui paraît plus compliquée que « Vous avez vécu un jour un événement triste. Racontez- le à votre ami en précisant son début, son déroulement et sa fin ». Il semblerait que la seconde consigne spécifie à l’étudiant le rôle qu’il doit jouer, son statut, son destinataire, les moyens linguistiques ou textuels qui permettent de mobiliser ses compétences car les consignes ne sont en principe pas bâties en fonction des objectifs de l’enseignant mais en fonction des compétences à faire acquérir. Par ailleurs, le sujet d’anglais (TEE/ Semestre 3/ 2014) pose comme première question de compréhension du texte « Suggest a title to the text » (« proposez un titre au texte ») : Cette question appelée « de compréhension globale » est l’équivalent du résumé du texte et ne peut être posée qu’à la fin des questions de compréhension, c’est- à- dire après que l’étudiant fait le tour du texte. À l’oral l’évaluation pratiquée ne porte que sur l’oralobjectif, c’est- à- dire sur l’évaluation du fonctionnement de l’oral alors qu’elle doit porter sur les deux usages : objet et moyen. Puisque les objectifs sont de favoriser la verbalisation, les enseignants- chercheurs doivent encourager la prise de parole, développer les échanges et les interactions et gérer le travail de groupe qui est une stratégie de travail permettant à l’enseignant de faire réfléchir les étudiants sur des fautes d’oral. En littérature, les questions à choix multiples (examen de rattrapage : semestre 5/ littérature comparée) et les questions portant sur la biographie des auteurs (examen du semestre 2 : 201 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI Étude des genres littéraires, 2014) ne répondent à aucun objectif sauf à celui de permettre à l’étudiant de réciter le cours. Cependant, on doit stimuler la lecture critique des genres pour amener l’étudiant à organiser de manière réflexive la littérature et la culture, à établir des relations entre les grands mouvements et courants artistiques et culturels et à apprécier le style d’écriture des œuvres étudiées : il ne s’agit plus de la correction des connaissances sur la littérature mais de l’usage de la littérature pour l’évaluation de la langue littéraire. Ce laboratoire langagier permet d’aller vers l’interdisciplinarité étant donné que l’étudiant y trouve des types et des structures de textes, des fonctionnements et des innovations linguistiques. En grammaire, l’objectif terminal étant de corriger la langue afin de mener l’étudiant à s’approcher de la perfection dans la rédaction et la présentation du mémoire de fin de cycle, les exercices à supports phrastiques proposés en examen du troisième semestre/ 2014 (Donnez le pluriel des noms soulignés : « J’arrose le chou- fleur », « un gros bison ») développent très peu l’autonomie et l’effort personnel pour analyser le fait de langue en contexte. En effet, l’intérêt donné à la typologie textuelle prenant la forme d’une classification : narratif, descriptif, explicatif, argumentatif…. permet à l’étudiant d’analyser les caractéristiques linguistiques (grammaire du texte et non pas grammaire de la phrase). Les consignes de grammaire sont énoncées en termes d’activités qui suscitent des interactions langagières ne reposant plus sur le réemploi des structures linguistiques dans des contextes isolés et dépassant le cadre de la phrase et les formes linguistiques par répétition, systématisation et reproduction. Il s’agit en grammaire, d’un module de renforcement linguistique sur le plan grammatical ; ce qui donne à la langue le statut d’objet et de moyen d’apprentissage. L’exercice de dictée « n’est pas donné en évaluation »1bien qu’il soit un exercice double qui met l’étudiant en position d’écrire un texte supposant transposer l’oral à l’écrit et qui lui permet d’analyser ce qu’il écrit en répondant à des questions du genre : « Quelle est la nature des catégories grammaticales ? Quelle est la fonction de ce mot dans la phrase ?... ». 1 Propos d’un enseignant de Morpho- syntaxe. 202 L’enseignant- Chercheur : « correcteur » ou « évaluateur » ? Que conclure ? Le système universitaire algérien, suivant la tradition du système éducatif, accorde très peu d’intérêt à l’évaluation qui n’est pas un aboutissement mais un processus d’apprentissage. Par conséquent, l’enseignant- chercheur n’est pas considéré comme évaluateur mais comme simple correcteur vu qu’il ne s’intéresse pas au développement des compétences mais à la transmission des connaissances. Cela apparaît en phase d’évaluation où les tâches proposées dans les épreuves ne permettent pas de mesurer des compétences. L’évaluation est un regard sur les pratiques enseignantes, elle consiste en une auto- évaluation. Si l’évaluation de l’écrit, de l’oral, de la littérature repose sur l’évaluation de la langue et des constituants grammaticaux, lexicaux, phonétiques…. Et si l’évaluation de la grammaire repose à son tour sur des supports textuels tirés de la littérature, les enseignants doivent adopter une approche interdisciplinaire pour permettre aux étudiants d’apprendre en développant des stratégies d’apprentissage : Les modules ne transmettent pas des contenus mais servent à développer des compétences, des stratégies. Bibliographie — BENAOUDA ZEMOULI H. (2012) Analyse des consignes utilisées en compréhension de l’écrit en classe algérienne de français, Thèse de Doctorat en Didactique des Langues Étrangères, Alger — BERARD E. (1995) « Faut- il contextualiser les manuels ? » in Le français dans le monde, n° spécial, Janvier, pp. 21- 24. — COURTILLON J. (1995) « L’unité didactique » in Le français dans le monde, n° spécial, Janvier, pp. 109- 120. 203 Habiba BENAOUDA– ZEMOULI — FIGARI G. (2001) L’activité évaluative réinterrogée, regards scolaires et socioprofessionnels, Bruxelles, De Boeck Université, coll. Pédagogies en développement. — GARCIA- DEBANC C. (1999) « Évaluer l’oral » in Pratiques, n° 103- 104, novembre, pp193- 212. — GIORDAN A. (1998) Apprendre, Belin. — HALTÉ J- F. (1992) La didactique du français, Presse Universitaire de France. — MILED M. (1998) Didactique de la production écrite en français langue seconde, Paris, Didier- Érudition, Mons. — ROSIER J- M. (2002) La didactique du français, Presse Universitaire de France. — ZAKHARTCHOUK J- M. (1999) Comprendre les énoncés et les consignes, CRDP, Amiens. . 204 205 Naciba ZIANE Université LOUNICI Ali – Blida 2 [email protected] L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et l’approche par les compétences modifient les fonctions de l’évaluation L’école algérienne d’aujourd’hui se fixe pour objectifs premiers de construire des apprentissages (des connaissances) et de faciliter l’acquisition de compétences (savoir-faire…) et ce, grâce à une nouvelle pédagogie dite du projet. Le souci des compétences se développe dans la visée d’assurer le développement durable des savoirs intégrés par l’apprenant ainsi que son autonomie explorable en dehors du champ scolaire. Dans ce domaine, la notion de compétence a jailli depuis deux décennies seulement et son surgissement a été occasionné par la réhabilitation des programmes d’enseignement et par les nouvelles pratiques d’évaluation dans la visée de répondre aux besoins sociaux. La réadaptation des programmes scolaires s’est produite suite aux limites de la pédagogie par objectifs et à ses modes traditionnels d’évaluation. Toutefois, l’évaluation des compétences semble être largement minoritaires dans les pratiques d’enseignement, si l’on en croit l’image que lui donne les documents officiels car ils ne provoquent pas des changements par rapport aux anciens programmes scolaires et ne dégagent pas le sens général de ces changements qui s’inscrivent dans le virage de l’approche par les compétences sans se souscrire à de nouvelles modalités d’évaluation : L’évaluation permet d’apprécier et de mesurer périodiquement le rendement scolaire de l’élève. Le travail scolaire des élèves est évalué à travers des notes chiffrées et les appréciations données par 206 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … les enseignants à l’occasion des contrôles périodiques. (Articles 6970 Loi d’orientation p. 40) Il apparait donc qu’aucune transformation des fonctions de l’évaluation n’a accompagné les modifications pédagogiques et celles de leurs théories implicites. Pour le faire, les enseignants doivent accepter de changer leurs perceptions de l’évaluation et leurs pratiques. On peut au travers s’intéresser aux compétences transversales ou collectives ainsi qu’à leur statut au travers des propositions d’évaluation (logique de compétence) de l’apprentissage centré sur les savoirs à la pédagogie orientée sur les compétences qui définit l’action que l’élève doit être capable d’effectuer après l’apprentissage (GODERFROID J.O,2001 :10). La logique de la compétence a le mérite de rappeler aux didacticiens que les compétences peuvent être saisies par l’analyse des pratiques d’évaluation. L’objet de l’évaluation : les compétences Avant d’évoquer les démarches d’évaluation et les modèles théoriques qui leur servent d’appui, il convient de s’arrêter devant le terme de compétence et de son évolution. Le terme de compétence n’est pas récent, il remonte au 15esiècle, pourtant, il provoque beaucoup de débats à cause de la difficulté de le conceptualiser. Il ne se définit sur le plan individuel qu’au travers l’évolution des courants éducatifs et des recherches en sciences humaines et sociales qui en font application et auxquels, il faut faire référence pour éclaircir les divers sens attribués à cette notion. Il est sûr que les contraintes socioéconomiques et celles des systèmes de formation exercent une influence sur l’élaboration de ces savoirs. En effet, c’est à la fin du 15esiècle, que le terme de compétence fut introduit dans la langue française et indiquait « la légitimité et l’autorité conférés aux institutions pour traiter des problèmes déterminés. » (DOLZ J., OLLGANIER E., 2000 : 31) tels que le tribunal ou l’école… autrement dit, le terme de compétence signifiait le pouvoir attribué à ces institutions pour s’occuper des problèmes qui relèvent de leurs fonctions. Le sens qu’on a affecté à ce terme s’est élargi et se dote d’une autre acception, celle de la « capacité due au savoir et à 207 Naciba ZIANE l’expérience. » et désigne d’une manière générale «la capacité à produire une conduite dans un domaine donné. » (DOLZ J., OLLGANIER E., 2000 : 8).On ne pouvait pas alors opérationnaliser ce concept parce que ces acceptions restaient imprécises, embrouillées voire nébuleuses : d’une part, la compétence ne se limite pas à la notion de capacité, terme auquel elle s’oppose, et d’autre part, ce qui est entendu par « l’expérience » ou « le domaine donné » ont besoin d’être tirés au clair. Devenu concept « attracteur » depuis 1970, dans le domaine professionnel, celui de la formation et surtout de l’enseignement, le succès de cette notion revient au sens plus précis que les recherches en sciences humaines lui ont progressivement attribuées : en psychologie, la notion de compétence est déjà présente dans les travaux depuis un siècle. Toutefois, ce concept, largement controversé ne devient objet de débat scientifique que lorsque N. Chomsky, dans le cadre de la linguistique générative, utilise systématiquement l’opposition compétence/performance. Pour lui, la compétence suggère ce que le sujet est en mesure idéalement de réaliser grâce à un potentiel biologique (règles grammaticales) alors que la performance (les productions langagières infinies susceptibles d’être générées par les règles de grammaires appropriées par un individu) se réfère au comportement observable qui n’est qu’un reflet imparfait de la première. Et c’est à cet usage que ces deux notions ont pris leur élan. En éducation, l’émergence de cette notion est le signe de changements épistémologiques : elle signifie la construction interne au pouvoir et au vouloir dont dispose l’individu de développer ce qui lui appartient en propre comme acteur « différent » et « autonome ». De ce fait, elle s’inscrit bien dans un renforcement des conceptions cognitivistes réfutant le béhaviorisme linguistique qui postule que le langage s’apprend par essai/erreur → conditionnement → renforcement et par une disposition langagière innée. La notion de compétence peut être analysée comme le résultat d’une évolution des mentalités pédagogiques. Reste à comprendre la transformation des idées pédagogiques qu’elle implique (école active, pédocentrisme, principe d’activité, développement des démarches de pensée.). Actuellement c’est 208 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … son extension dans les programmes scolaires qui interpelle les chercheurs. Le terme de compétence, trop utilisé, est source de nombreuses confusions : on parle de possession de connaissances (scientifiques et techniques), de « mobilisation » des compétences, c'est-à-dire que la compétence ne réside pas uniquement dans la mobilisation de ces ressources. On la considère aussi comme un savoir intégrateur dans le cadre d’une action finalisée pour insister sur les conditions de mise en œuvre (les conditions d’utilisation de ces ressources) et sur sa nature combinatoire, autrement dit, sur leur mode d’interaction. Ces nouvelles significations renversent la conception chomskyenne de compétence mais il reste toujours difficile de l’opérationnaliser. Son principe directeur réside dans le choix de la spécificité, c’est-à-dire qu’on y pose que la langue est un ensemble différencié de compétences, solidaires mais relativement indépendantes les unes des autres et dont chaque élément est susceptible de relever d’un traitement méthodologique particulier. Cette conception par objectifs spécifiques (F.O.S.) et par démarches d’enseignement différenciées (pédagogie différenciée) s’oppose donc à la polyvalence de la méthodologie globaliste ordinaire. Perrenoud et par la suite Gillet, à l’instar de nombreux chercheurs, ont pris un recul par rapport à la conception chomskyenne et ont suggéré la définition suivante : Une compétence se définit comme un système de connaissances, conceptuelles et procédurales, organisé en schémas opératoires et qui permettent, à l’intention d’une famille de situations, l’identification d’une tâche problème et sa résolution par une action efficace. (DOLZ J., OLLGANIER E., 2000 :180). Cette définition stipule quatre déclarations : — la compétence combine des connaissances déclaratives et procédurales ; — la compétence s’opère dans une situation, dans un contexte ; — la compétence vise la résolution d’une tâche- problème ; — ce problème n’est résolu que par une action qui doit être efficace. La définition de Gillet s’inscrit dans le double cadre théorique de la cognition située (elle accorde une place cruciale 209 Naciba ZIANE au contexte qu’elle considère comme une partie intégrante des activités mentales et que celles-ci sont conditionnées par le partage des connaissances avec les autres (GODERFROID Jo, 2001 :67) et de la résolution de problème (qui considère un problème comme une tâche dans laquelle un but doit être atteint par l’élaboration de procédures particulières. Pour le faire, elle envisage quatre étapes : l’identification du problème, sa représentation, la recherche d’une solution et l’évaluation des résultats) (GODERFROID Jo, 2001 : 491–498). Il oppose cette notion à celle de capacité qu’il conçoit comme une organisation mentale transversale pouvant se développer à travers l’acquisition de compétences propres à plusieurs disciplines telles que les capacités d’analyse et de synthèse. Dans cette même optique, Allal propose la définition suivante de la compétence : « C’est un réseau intégré et fonctionnel de composantes cognitives, affectives, sociales, sensorimotrices, susceptibles d’être mobilisées en actions finalisées face à une famille de situations ». (GODERFROID Jo, 2001 : 81). On peut retenir de la définition d’Allal ce qui suit : — une compétence est un ensemble de relations interactives et fonctionnelles ; — elle est composée de ressources cognitives et métacognitives ; — ses composantes socio- affectives et sensorimotrices peuvent être déterminantes dans l’activation des connaissances ; — les actions mobilisées sont orientées vers une finalité ; — cette compétence s’apparente à une situation, ou à une famille de situations. Certains auteurs exigent l’efficacité dans la résolution de la tâche. Ils évoquent un autre type de connaissances qui renseignent sur la modalité de l’apprentissage de l’élève parce que, d’après eux, les conditions d’apprentissage font partie de ce que le sujet apprend. Et par voie de conséquence, une compétence se construit toujours par un apprentissage en situation. Ce dernier nécessite l’acquisition de savoirs, savoirfaire, des modes d’interaction et de certains outils recommandés par la situation même. Cela dit, que l’installation ou le développement d’une compétence conduit à l’intégration dans le 210 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … fonctionnement du sujet d’instruments extérieurs qui amplifient son champ d’activité conceptuelle. Les composantes d’une compétence Une compétence est composée de trois catégories de connaissances dont l’organisation en réseau permet leur mobilisation dans des situations ultérieures : des connaissances déclaratives, des connaissances procédurales et des connaissances conditionnelles relatives aux conditions d’utilisation des deux autres types de connaissances. Allal ajoute à ces connaissances contextuelles comme les pratiques sociales valorisées dans un contexte d’apprentissage, des composantes métacognitives elles-mêmes constituées de méta-connaissances et des régulations métacognitives intervenant dans la mobilisation et la gestion active de la compétence en situation. Boeterf avance que la compétence ne réside pas dans les ressources à mobiliser mais dans leur mobilisation même. Perrenoud reprend cette idée et lui rajoute que la mobilisation de ces ressources s’effectue dans une situation, en un temps réel et grâce à une action efficace. Comment évaluer les compétences ? L’évaluation des compétences dans le cadre scolaire est un sujet très récent, actuellement largement discuté et qui représente un grand intérêt pour les enseignants et les praticiens. Dans une optique cognitiviste et particulièrement celle de la cognition située, les chercheurs invoquent deux modes d’évaluation des compétences des élèves à savoir l’appréciation dynamique et l’évaluation formative de type interactif. L’appréciation dynamique Cette approche est issue des travaux d’André Rey et de Lev Vygotsky visant à évaluer le potentiel cognitif de l’apprenant, ses capacités et les compétences en voie de construction. L’enseignant, dans une attitude interactive, introduit des éléments d’enseignement ou d’entraînement dans la situation d’évaluation. Les réactions des élèves ou leurs réponses sont 211 Naciba ZIANE considérées comme des indices de son « potentiel d’apprentissage » (Budoff) appelé autrement « modifiabilité cognitive » selon Feurstein ou encore de « son efficacité d’apprentissage et de transfert » selon la conception de Campiane et Brown. Ce mode d’évaluation, focalisé sur les compétences et les capacités émergentes de l’élève, tente d’apprécier l’efficacité de l’apprentissage sur le plan cognitif et métacognitif à l’aide de tâches et d’activités d’apprentissage scolaire aptes en principe à révéler les compétences en phase de construction. L’évaluation formative interactive Ce type d’évaluation s’inscrit dans la même perspective que l’appréciation dynamique évoquée plus haut. L’interaction avec les élèves dans le cadre d’une situation d’apprentissage occasionne l’apparition de nouvelles conduites plus adéquates pour répondre aux contraintes de la situation et aide à construire de nouvelles compétences. La régulation, les réajustements viennent des interactions de l’élève avec l’enseignant, avec ses camarades et/ou avec les outils de formation (matériel didactique mis à sa disposition : supports, grille d’évaluation, nouvelles technologies d’information et de communication utilisées en classe…). Cette activité de régulation n’est pas rétrospective (en adjonction) mais elle est intégrée dans la situation d’enseignement même qu’elle accompagne. La principale différence qui existe entre ces deux formes d’évaluation réside dans les éléments à intégrer et ce que chaque mode d’évaluation désire optimiser : l’appréciation dynamique vise à intégrer des éléments d’enseignement en vue d’optimiser l’évaluation tandis que l’évaluation formative tend à intégrer des éléments d’évaluation pour optimiser l’enseignement/ apprentissage et ce, en prévoyant les réajustements à chaud. C’est ainsi qu’elle envisage de saisir la dynamique des compétences en cours de construction et participe de ce fait à leur élaboration. Pour le faire, trois conditions sont requises selon Allal : — l’évaluation formative doit s’adapter aux particularités des pratiques sociales du domaine de la compétence à installer ou à développer ; 212 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … — l’enseignant doit être lui-même compétent (expert) dans le domaine de cette compétence ; — l’évaluation doit appréhender toutes les composantes (socio-affectives et sensori-motrices) de la compétence et non uniquement les connaissances. Comment impliquer l’élève dans le processus d’évaluation ? Selon Allal, pour impliquer l’élève dans l’évaluation, trois modalités sont envisageables : — l’autoévaluation : l’apprenant évalue lui-même sa production ou les procédures mises en œuvre pour sa réalisation en recourant à un référentiel externe tels que le dictionnaire, la consigne, une grille de contrôle… ; — l’évaluation mutuelle : tel que son nom l’indique, il s’agit du même principe seulement l’objet sera évalué par un camarade et vis-versa ; — la co-évaluation : elle consiste à la confrontation de l’autoévaluation de l’élève à l’évaluation de l’enseignant dont les appréciations de chacun des co-acteurs peuvent convoquer ou non un référentiel externe. Penser à impliquer activement l’élève dans le processus d’évaluation c’est d’une part vouloir susciter sa réflexion sur sa propre production et les procédures de sa réalisation, autrement dit, sur son activité mentale face à une tâche relative à une situation- problème. De l’autre, c’est stimuler la structuration de ces conduites autorégulatrices. Apprendre à l’élève à gérer et à évaluer ses apprentissages relève d’un domaine en pleine extension qui est celui de la métacognition. L’évaluation des compétences contribue à l’acquisition et à la consolidation de celles-ci. Les fonctions de l’évaluation Avant d’éclairer les problématiques liées à l’évaluation, il est très important de se tourner vers des repères historiques et méthodologiques. La notion d’évaluation existe depuis l’Antiquité. Elle désignait un ensemble d’épreuves formelles comme l’endurance, la bravoure ou encore la pêche et la chasse 213 Naciba ZIANE dont on faisait usage lors des cérémonies marquant le passage de l’enfance à l’âge adulte (Ait Boudaoud Laifa 1999 : 09). Socrate était à l’origine des examens oraux. Les examens écrits, ceux de la lecture et du chant ont débuté à Sparte et en Athènes. Les épreuves écrites ont été introduites pour la première fois dans l’histoire par l’université de Cambridge en Angleterre. Depuis la deuxième moitié du 19e siècle, on assistait aux apparitions des mouvements de critique à l’égard des examens. Ces montées de contestations contre certaines formes d’examen notamment ceux relatifs à l’oral ont favorisé l’émergence de nouveaux procédés d’évaluation (particulièrement l’évaluation des rendements scolaires) à Boston et à Chicago. Le début du 20esiècle était caractérisé par l’apparition de deux mouvements, celui de l’efficacité et du rendement (concepts empruntés au domaine du management et de l’industrie) ainsi que celui de la tendance behaviouriste (stimulus – réponse) et depuis, les travaux de Tyler, de Bloom, de Khrathwohl et de Masia ainsi que leur taxonomies qui ont coïncidé avec l’émergence du mouvement cognitif en 1956 ensuite du mouvement affectif en1968, ont stimulé l’intérêt des pédagogues autour de la notion d’ « objectifs pédagogiques ». C’est la tendance de l’enseignement par objectif qui a contesté les procédures classiques utilisées en vue d’évaluer les apprentissages. À partir de 1973, l’évaluation entra dans la professionnalisation, c’est l’ère de l’analyse des besoins, de l’évaluation formative et de la métacognition (savoir comment on fait pour savoir, c’est la cognition sur la cognition autrement dit, exercer un contrôle actif et procéder à la régulation sur les processus de l’appropriation des connaissances (GODERFROID Jo, 2001 : 504) ainsi que sur les procédés de résolution des problèmes, comme outils mis au point et mis à la disposition des praticiens. La notion de l’évaluation a évolué également en terme d’acception et du but qu’on lui a assigné. En effet : — l’évaluation comparative par exemple, consistait à classer et à sélectionner les élèves. — l’évaluation critériée, née de la pédagogie par objectif se donnait pour fonction de présenter un retour d’information permettant de situer les apprenants par rapport aux critères que constituent les objectifs. 214 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … — l’évaluation correctrice traitait les difficultés des élèves en leur donnant des explications supplémentaires et des corrections sur les difficultés rencontrées. — l’évaluation conscientisante visait à fournir à l’élève sa part d’autonomie dans la remédiation à ses propres difficultés une fois qu’il prend conscience de son dysfonctionnement et ce, en lui fournissant quelques repères. Le jaillissement de chaque type d’évaluation découlait des limites de la précédente. Toutefois, il ressort clairement de ces conceptions que l’évaluation est passée progressivement d’une attitude sommative à une approche plutôt formative, en ce sens que l’évaluation n’est plus perçue comme un instrument de mesure ou de comparaison mais elle est considérée enfin comme un outil de remédiation et de prise de décision en vue de l’amélioration. L’évaluation des apprentissages reste solidement dominée par le point de vue behaviouriste étant donné que l’attention des enseignants et des évaluateurs d’une manière générale se focalise uniquement sur la réalité observable objective, c'est-à-dire sur la performance des apprenants. L’observation doit intervenir à trois moments décisifs de la démarche pédagogique. Elle prendra alors successivement les formes de l'évaluation diagnostique, formative et sommative. C. Jean-Michel Zakhartchouck distingue en fait deux modes de différenciation très contrastées : la différenciation successive et la différenciation simultanée (alternative) (Notions empruntées à Ph. MEIRIEU, 1985.) où chacun agit selon des plans de travail individualisés sur lesquels sont cochées par les élèves les tâches accomplies ce qui impliquent que tous les élèves ne travaillent pas de la même façon, en même temps et aient même des tâches différentes à effectuer. Actuellement, on accorde de plus en plus de place à l’évaluation diagnostique et à l’évaluation formative d’où la modification de l’ordre des priorités des praticiens. En effet, le besoin le plus pressant n’est plus de l’ordre de l’échec et de la réussite, le classement ou encore la sélection mais de trouver des réponses aux questions suivantes : — Quelle est la démarche suivie par l’élève pour arriver à la réponse qu’il a fournie ? 215 Naciba ZIANE — Où a-t-il rencontré des difficultés ? — Comment réagit-il par rapport à ces difficultés ? Trouver des réponses à ses interrogations s’avère primordial pour pouvoir intervenir de manière efficace et active dans une perspective formative- remédiative, autrement dit, la fonction de l’évaluation consiste à recueillir de l’information sur les erreurs de l’apprenant pour lui proposer une thérapie. La performance observée doit être considérée comme un symptôme de l’apprentissage ou de difficultés d’apprentissage. L’erreur n’est plus estimée comme une faute mais comme signe de dysfonctionnement. Pour aider l’élève à surmonter ces difficultés, il faut passer nécessairement par une analyse des fautes en vue de comprendre ce qui se passe dans le processus mental de l’apprenant en ayant recours aux inférences concernant les performances des élèves. Le recours aux inférences (opérations mentales amenant à générer une information à partir de celle que le contexte fournit (GODERFROID Jo, 2001:524) nécessite la référence aux théories du fonctionnement mental et de l’apprentissage. La théorie piagétienne prise comme cadre conceptuel pour comprendre la construction progressive du raisonnement de l’enfant reste insuffisante pour comprendre précisément les apprentissages en situation scolaire étant donné qu’elle ne rend pas compte des facteurs contextuels fortement psychologiques intervenant dans tout apprentissage. La psychologie cognitive (les théories cognitives apparaissent comme la référence aujourd’hui) puisqu’elle procure de nouveaux concepts susceptibles de combler les lacunes de la théorie piagétienne. Pendant la conférence donnée par Allen Newell et Herbert Simon (in, GRÉGOIRE J, 1999:160), le démarrage du courant cognitiviste a été déclenché et les conférenciers ont proposé une analogie concernant le traitement de l’information par l’homme et par l’ordinateur. Ce qu’y était important, c’était les processus mentaux existant entre le stimulus et la réponse et que l’être humain traite de manière active l’information. Outre cela, il est possible d’évaluer le travail de l’élève sur la base du temps de la réponse (WOLFS J-L., 1999: 163) et sur sa précision et par conséquent il est possible d’estimer quels processus mentaux sont mis en œuvre comme l’usage de procédures alternatives 216 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … moins adéquates. Le passage de théorie à la pratique ne va pas de soi en terme d’applications : c’est ce qui justifie l’important décalage temporel entre le développement des modèles théoriques et la mise en pratique en évaluation et c’est pourquoi ce n’est que très récemment qu’on se penche sur le problème de l’évaluation qui pose un sérieux problème dans le système éducatif en Algérie parce qu’on ne sait plus quoi évaluer. Nombreuses questions d’ordre théorique et méthodologique restent jusqu’à présent sans réponse. Il n’est pas inutile de rappeler à présent les fonctions de l’évaluation qui sont désormais connue dans le milieu scolaire algérien mais loin d’être judicieusement mises en œuvre. L’évaluation diagnostique Elle vise essentiellement à permettre aux enseignants, à partir de l’observation des compétences individuelles des apprenants (leurs pré- requis), ainsi que leurs difficultés, à un moment précis de leur apprentissage, de prendre des décisions « d’adaptation et d’orientation » (WOLFS J-L., 1999 :42) en leur apportant ainsi des repères pédagogiques pour organiser (canaliser) la suite des apprentissages. Cet apport complète et enrichit les différentes informations dont disposent les enseignants pour identifier les acquisitions et les difficultés éventuelles des apprenants. L’analyse des résultats obtenus par ces derniers est une aide à la mise en œuvre des réponses pédagogiques et permettra ainsi de cerner puis mieux comprendre l’origine des difficultés rencontrées, dès lors adaptées à leurs besoins particuliers. Envisagée au début d'apprentissage ou de formation, l’évaluation diagnostique intervient lorsque l’enseignant se pose la question de savoir si un apprenant possède ou non les capacités nécessaires pour entamer une formation ou pour suivre un apprentissage. Cette évaluation pointe alors plus sur des acquis que sur des aptitudes. La mise en place de la séquence d’apprentissage est précédée donc par l’évaluation diagnostique qui doit lui fournir sa cohérence et son origine, en la situant à la croisée des attentes institutionnelles et des besoins réels des élèves. Les décisions prises par l’enseignant relèvent d’une manière générale de l’ordre de la consolidation des acquis mal maîtrisés avant 217 Naciba ZIANE d’amorcer les nouveaux apprentissages, de l’adaptation du nouvel enseignement au niveau réel des élèves, et de réorienter sa démarche pédagogique en fonction des données de ses investigations et du « profil de départ » de l’élève. L’évaluation diagnostique se distingue des autres formes d’évaluation par sa finalité, puisqu’elle ne recherche pas essentiellement à gérer des apprentissages en cours d’acquisition (fonction de l’évaluation formative), ni à valider des acquis à l’issue d’un travail (fonction de l’évaluation sommative). Elle est un outil préalable à l’élaboration du projet et trouve sa place au tout début de celuici, avant même que l’activité de formation ou d’enseignement ne débute. Elle servira de repère initial, de témoin à un moment donné vers lequel l’enseignant et l’élève pourront se tourner lorsqu’ils auront besoin de se référer à la situation de départ. Vouloir prendre en compte cette réalité, c’est considérer que l’élève n’est pas une « table rase » ni « une boite noire », mais qu’il apporte avec lui un bagage de connaissances et de savoirfaire, lesquels sont déjà en prise dans l’activité d’apprentissage. L’évaluation diagnostique révèle comment l’élève se représente l’objet d’apprentissage. Aussi, l’analyse des résultats de celle-ci peut mieux faire dévoiler des représentations de l’image à acquérir que des connaissances réelles et il convient dès lors de se demander si elles peuvent servir de base à la construction des savoirs. Ainsi, le principal souci qui peut préoccuper l’enseignant est le décalage entre ce qui est évalué par la diagnostique et ce qui sera jugée à la fin de la séquence ou du projet. Va-t-on vraiment analyser des productions comparables ? Car il faut bien reconnaître que l’apprenant ne peut pas réagir de manière identique lorsqu’il répond à une grille de questions et lorsqu’il est dans le faire et dans l’action, confronté aux informations extérieures à lui-même et aux savoirs qu’il intègre ou qu’il bouscule. Par ailleurs, il est important de comprendre que le but de toute évaluation diagnostique n’est pas la mesure d’un écart par rapport aux résultats du groupe ou au seul programme mais bien par rapport à l’élève lui-même. Cette fonction de l’évaluation trouvera donc sa plus grande pertinence dans la révélation, pour 218 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … l’enseignant, des représentations qu’a l’apprenant des attendus de l’enseignement (attentes institutionnelles.). L’évaluation diagnostique sollicite de l’enseignant une anticipation la plus nette possible de la cible que son action cherche à atteindre. La cible doit être clairement définie par les programmes ou les référentiels de la matière à enseigner. C’est précisément l’analyse des contenus de celle-ci qui va guider l’élaboration du questionnaire diagnostique. Fournir à l’élève les moyens de comprendre sa relation au savoir et les outils de mesure de ses acquis, c’est l’impliquer dans sa propre formation, c’est lui donner des repères pour mettre en place son auto-évaluation, c’est en faire le partenaire privilégié d’une régulation efficace parce que personnelle et acceptée. La lecture des résultats obtenus est un des moments clés. L’évaluation qui accompagne cette lecture doit être proposée aussitôt après, afin que l’élève reste mobilisé par la question qui vient de lui être posée. Il s’agira donc d’une hétéroévaluation. Le questionnaire renseigné par l’élève n’a pas à être « corrigé ». Il représente, un état des lieux des représentations documentaires de l’élève et son examen consistera avant tout à prélever les indices des manques et des difficultés à venir. Les indices individuels rassemblés en axes majeurs vont déterminer les grandes lignes du travail à mettre en place. La séquence va pouvoir se construire selon des objectifs déterminés par le « profil » du groupe-classe et lui refléter les difficultés qu’elle semble ne pas encore avoir su maîtriser. C’est l’occasion de placer, sur le chemin de l’apprenant, des situations d’apprentissage, ou situations problèmes, propres à construire les connaissances et les capacités requises. L’enseignant, concepteur du terrain où se déploie l’action de la classe, responsable du cadre pédagogique offre à l’élève qui s’interroge pour surmonter l’obstacle une médiation entre celui-ci et sa demande. C’est dans l’offre de réponse qu’il propose à cette demande verbalisée que se situe l’acte pédagogique en tant que tel, à savoir la mise à disposition de l’apprenant le lien qui lui manquait pour convoquer ce qui était jusque-là dispersé et non mobilisé et l’agréger en un nouveau savoir ou savoir-faire. 219 Naciba ZIANE Pour élaborer le questionnaire diagnostique, il faut reprendre les compétences listées par le référentiel ou le programme. Le contenu et les consignes du questionnaire seront remaniés par la suite en fonction des observations sur le terrain et de l'analyse des résultats des élèves. Enfin, vient le dépouillement des réponses au questionnaire avec l'adoption éventuelle d'un barème. L'important pour l'élève, c'est de faire le point sur ses acquisitions tandis que pour l’enseignant, c'est de relever les tendances de la classe pour chaque savoir et savoir-faire évalués afin d'orienter le projet pédagogique. Cependant, l’évaluation diagnostique présente plusieurs limites : l’objectif de ce test est de faire émerger une image immédiate des représentations des élèves sur l’objet d’étude. Il n’est certainement pas possible d’évaluer les compétences proprement dites puisque celles-ci ne se vérifient que de façon pratique, lorsque les élèves sont en situation. Ainsi, pourront être constatées quelques différences entre les réponses données par les élèves lors du test et les pratiques réellement observables. Ces dernières seront par ailleurs évaluées à l’issue du projet par une évaluation sommative portant sur la production. Par ailleurs, comme pour tout exercice écrit, on ne peut exclure les difficultés d’interprétation des consignes ou de compréhension du vocabulaire, ce qui n’est pas sans incidence sur leurs réponses. De ce fait, le test peut être révélateur de difficultés méthodologiques, aspect qu’il faut prendre en compte dans le processus d’enseignement. L’évaluation formative ou formatrice ? Le rôle de l’évaluation formative dépasse la limite des notes, des niveaux de maîtrise et s'intéresse aux procédures et aux modes de résolution des problèmes par les apprenants, c'est-àdire, elle se préoccupe d'observer ce qui se passe lorsqu'un élève apprend. Elle se veut édifiante puisqu'elle cherche à comprendre le « fonctionnement » mental de l'apprenant, sa manière d'appréhender et d’intégrer les savoirs scolaires. Elle s'appuie pour cela sur la psychologie des apprentissages. Elle se focalise sur ce qui se passe entre la question et la réponse. Elle vise, en fait, à aider l'élève à accéder à plus d'autonomie en le rendant acteur dans la construction de son savoir et dans la recherche 220 L’évaluation des compétences : quand la pédagogie du projet et … d'une méthode d'apprentissage particulièrement adéquate à la résolution de son problème et convenant le mieux à sa personnalité. Dans cette tendance, certains auteurs parlent « d'évaluation formatrice ». La nuance est importante : La différence entre évaluation formative et formatrice n'est pas très sensible dans l'intention : la seconde souhaite, comme prolongement, voir l'élève s'approprier les critères d'évaluation et mettre en place des stratégies d'apprentissage. Les objectifs sont identiques mais les rôles de l'adulte et de l'enfant, les positions respectives de l'un et de l'autre se modifient. L'évaluation formatrice se distingue, de la précédente par le fait que les objectifs identiques sont poursuivis par l'élève luimême qui doit aussi assurer la régulation du circuit d'apprentissage, la gestion de ses erreurs et ce, en permettant à l'élève d'avoir une représentation concrète de la tâche et de s'approprier les critères d'évaluation. L’évaluation sommative Elle a pour fonction de contrôler l’acquisition par les élèves des savoirs et compétences visés par les programmes enseignés. Elle intervient en fin de processus (fin d’apprentissage ou d’une formation, d’un projet, d’une expérimentation…), elle est programmée et fait objet d’une note ou d’une appréciation (évaluation implicite).elle est appelée sommative car « elle fait la somme des acquisitions ou des réalisations. » (AIT BOUDAOUD L, 1999 : 163) La note est habituellement associée à une décision, une sanction ou à une certification. L’évaluation sommative peut être prédictive dans le cas où elle s’inscrit au début d’une action pédagogique ou de formation future. Conclusion Nous avons évoqué les différentes fonctions de l’évaluation et il convient de rappeler que c’est dans une dynamique de changement que les sciences cognitives ont pu influencer les pratiques de l’évaluation, dont les apports ont permis aux concepteurs du discours sur l’évaluation de mettre à la 221 Naciba ZIANE disposition des praticiens et des enseignants des savoir-faire variés renvoyant aux différentes conceptions de la pédagogie et aux diverses représentations de ce qui doit être objet de réajustement et de régulation. La montée de pédagogies plus complexes (la pédagogie en situation, par projet…) a déstabilisé une méthodologie qui n’a pas réussi à s’installer comme tradition. L’auto-évaluation prise en charge de ses apprentissages par l’élève- et l’autorégulation (métacognition) s’avère actuellement les meilleurs moyens de l’appropriation des compétences la plus marquée. Bibliographie — AIT BOUDAOUD L., L’évaluation dans le système scolaire (en Algérie), guides, approches, éditions Casbah, Alger, 1999. — DOLZ J., OLLGANIER E., l’énigme de la compétence en éducation, tome 2, raisons éducatives, collection de Boeck université, Paris- Bruxelles, 2000. — GODERFROID J., psychologie, sciences humaines et sciences cognitives, De Boeck université, ParisBruxelles, 2001. — GRÉGOIRE J., Évaluer les apprentissages, les apports de la psychologie cognitive, De Boeck université, perspectives en éducation, Paris- Bruxelles, 1999. — MEIRIEU Ph., l’école, modes d’emploi des méthodes actives, à la pédagogie différenciée, Paris, 1985 — ROEGIERS X., L’approche par les compétences dans l'école algérienne, programme d'appui de l'UNESCO à la réforme du système éducatif (PARE) Japanese, funf-intrust, 2005. — TALBOT L., L’évaluation formative, comment évaluer pour remédier aux difficultés d’apprentissage, Armondcolin, Paris, 2009. — WOLFS J.-L., Analyse des pratiques éducatives visant à faire participer l’apprenant à l’évaluation diagnostique, au pilotage et à la régulation de ses apprentissages, évaluer les apprentissages, De Boeck université, perspectives en éducation, Paris- Bruxelles, 1999. — Loi d’orientation, juin 2008 222 223 VARIA 224 225 Dalila MORSLY, Professeure émérite en sciences du langage et sociolinguistique Algérie : 50 ans de pratiques plurilingues Compte-rendu Le Laboratoire de recherches en sciences du langage, analyse de discours et didactique (SLADD) de l’Université de Constantine 1 dirigé par Yasmina Cherrad, Professeure en Sciences du langage et didactique, a organisé les 27/28/29 avril 2014, avec le soutien de Farida Hobar, Vice-rectrice chargée des relations extérieures et Rebaï Benslama, Doyen de la Faculté des lettres et des langues, un colloque international sur le thème : Algérie : 50 ans de pratiques plurilingues. Ce colloque qui part du constat irréfutable que les Algériens parlent et écrivent plusieurs langues et différentes variétés de ces langues s’inscrit dans un domaine précis des études consacrées aux langues et aux langages : la sociolinguistique. L’objectif premier que se fixaient les organisateurs était d’inviter les communicants à examiner si et comment les évolutions politiques, sociales et culturelles qui ont marqué le pays durant ce premier demi-siècle de son indépendance avaient influé sur la distribution des variétés d’arabe et de tamazight, sur les normes d’arabe institutionnel (arabe dit standard, scolaire etc.) et de français, sur le poids des langues et des variétés, les formes de contacts entre langues et variétés. Les travaux réalisés dans les centres de recherches et les universités d’Algérie ou d’autres pays ont bien souvent entrepris d’observer et de décrire les pratiques caractéristiques de tel ou tel contexte sociolinguistique, de telle ou telle situation de communication. Ils contribuent, ainsi, à cerner un aspect de la réalité sociolinguistique algérienne ; ils tentent de repérer les tendances et dynamiques linguistiques en cours dans les différents champs de la communication sociale et d’ouvrir un débat sur les dispositifs 226 Algérie : 50 ans de pratiques plurilingues théoriques et méthodologiques mis en œuvre dans les recherches pour décrire et analyser la distribution des langues/variétés ainsi que les phénomènes d’alternance. Le colloque a poursuivi et approfondi ces questionnements. Compte tenu du nombre important d’intervenants (38) le colloque qui s’est tenu dans le nouvel et confortable amphithéâtre de l’Université de Constantine 1 (Campus 500 places Tédjini Heddam), était organisé sous la forme de séances plénières et d’ateliers. Une bonne partie des universités algériennes étaient représentée (Constantine, Alger, Tizi-Ouzou, Béjaïa, Blida, Oran, Mostaganem, Mascara, Chlef, Constantine, Annaba, Batna) ce qui montre que la recherche en sociolinguistique est bien vivante. Des chercheurs venus de Tunisie, de France (Rouen, Le Havre, Grenoble, Angers, Montpellier) ont aussi participé aux travaux. Sur le plan théorique, les chercheurs ont soulevé les questions suivantes : comment décrire, analyser et présenter la complexité inhérente au plurilinguisme algérien, comment repérer le changement, les corrélations entre contextes de communications et pratiques linguistiques, quelles méthodologies de recueil de données sont plus aptes à rendre compte de la diversité des configurations plurilingues ? Ainsi, Henri Boyer a repris les thèmes qui lui sont chers d’interlangues, interlangue, interlecte et hybridation ethno-sociolinguistique. Abderrazak Dourari est revenu sur la politique linguistique de l’Algérie qui se caractérise par une contradiction entre monolinguisme d’État et plurilinguisme de la société. Foued Laroussi a présenté un bilan des recherches menées sur le code-switching arabe-français depuis quarante ans. Ibtissem Chachou et Malika Bensekat ont rendu compte de la position de certains chercheurs sur la prise en compte de la variation en contexte sociolinguistique algérien. Yasmina Cherrad s’est intéressée à la question du centre et de la périphérie dans les pratiques plurilingues algériennes tandis que Dalila Morsly a proposé une réflexion sur le problème des corrélations entre mutations sociales /dispositifs théoriques et pratiques de recherches ainsi que sur celui des outils théoriques permettant l’analyse des contacts de langues et variétés. Pour ce qui est de la description des pratiques et représentations, les communications ont été regroupées en fonction des contextes dans lesquels les recherches ont été menées. – Deux ateliers ont été consacrés à l’analyse de pratiques en contextes ordinaires ou non formels. On s’est intéressé ici au changement linguistique lié au code switching en Tunisie (Heikel Benmustapha) ; aux nouvelles pratiques plurilingues au sein de la famille kabyle (Mahmoud Bennacer, Chérif Sini), ou dans certaines 227 Dalila MORSLY villes comme Béjaïa (Bachir Bessaï) ou Batna (Soraya Hadjarab) ; à l’arabisation de l’environnement comme manifestation d’une politique linguistique inopérante (Yacine Derradji) ; aux pratiques plurilingues des jeunes (Hadjira Medane) ; aux pratiques genrées (Abdenour Iguerali). Hakim Menguellet soulève le problème des modalités d’accès au plurilinguisme algérien et choisit d’adopter la technique de la biographie langagière. – Deux autres ateliers s’intéressaient aux pratiques linguistiques en contextes institutionnels universitaires et scolaires, terrains privilégiés pour l’observation des pratiques et représentations qui se construisent à l’occasion des apprentissages et de la circulation des savoirs. Nadia Grine a tenté de définir la relation entre langue(s) et professions dans l’imaginaire et les pratiques d’universitaires ; Nedjma Cherrad a présenté une étude des rapports entre pratiques plurilingues et transmission des savoirs dans des disciplines non linguistiques ; Amar Nabti travaille plus précisément sur les rapports entre kinésique et pratiques plurilingues en essayant de voir si la dimension plurilingue induit une ou des gestuelle(s) spécifique(s) ; Lynda Mounsi analyse les pratiques des étudiants de l’Université de Béjaïaface aux agents de l’administration ; Dalida Temim aborde la question de la prise en compte des langues maternelles pour une gestion plus efficace du plurilinguisme ; Nadjouat Kahlat décrit l’alternance codique en classe de FLE. Meriem Stambouli tente de voir comment le répertoire langagier des enfants est révélateur d’une compétence plurilingue et pluriculturelle qui s’élabore entre l’école et la société ; Wafa Bedjaoui s’intéresse aux représentations linguistiques d’élèves plurilingues. – Deux ateliers rendaient compte de recherches sur les médias, orientation qui ne cesse de se développer actuellement. Plusieurs communications ont porté sur les médias écrits. C’est le cas de l’intervention d’Ikram Bentoussi consacrée au métissage linguistique dans la presse francophone ; Fatah Chemerik, lui, s’est proposé de repérer les stratégies discursives que permet l’utilisation de la daridja dans la presse francophone tandis que Sabrina Merzouk étudie le fonctionnement de l’emprunt à l’arabe dans la presse ; Kawther Dembri a travaillé, plus particulièrement, sur les chroniques du Quotidien d’Oran pour définir les dynamiques plurilingues qui les caractérisent et qu’elle considère comme une des caractéristiques du discours journalistique algérien. Mohamed Miliani se penche sur une autre rubrique du Quotidien d’Oran : le billet d’humeur dont il essaie de décrire l’intentionnalité communicationnelle. Se sont intéressés aux médias oraux : Hanane Bendib avec un travail portant sur les pratiques plurilingues dans la publicité télévisuelle, Kheïra Yahiaoui avec une analyse d’interactions enregistrées sur la chaine de radio, Alger chaine 228 Algérie : 50 ans de pratiques plurilingues 3 (de langue française) qui veut montrer quelles pratiques sont à l’œuvre sur cette chaîne, Djamila Drouiche qui, toujours à partir d’un corpus recueilli sur Alger chaine 3, étudie les interventions de l’arabe et pose aussi la question du rôle des médias oraux sur les pratiques ordinaires des locuteurs. – Le septième et dernier atelier regroupait des interventions qui portaient sur la communication plurilingue des réseaux sociaux. Fabien Liénard montre comment s ‘effectue la transmission de la langue écrite dans ce contexte et le passage de la norme linguistique à la variation orthographique numérique ;Karima Nabti essaie de voir comment le conflit est géré dans le cadre des forums de discussion et le rôle qu’y jouent les langues ; Kamila Oulebsir présente une analyse de quelques forums de discussion qui représentent à ses yeux des micro-situations de pratiques plurilingues tandis que Meriem Seffahrelève les caractéristiques stylistiques de courriers électroniques plurilingues. L’ensemble des communications montre que la situation sociolinguistique algérienne est en pleine mutation, que les configurations plurilingues se réaménagent. Les aspects marquants de ce changement sont : l’émergence des langues premières dans d’autres contextes que ceux de la communication familiale, orale ou villageoise ; l’extension des répertoires linguistiques des locuteurs amazighones qui pratiquent différentes variétés d’arabe, mais aussi des arabophones qui se « mettent » au kabyle. On voit, par ailleurs, que les frontières entre les différentes variétés d’arabe (institutionnel et parlé) et entre les variétés de tamazight bougent ; que la présentation diglossique traditionnelle ne permet plus de rendre compte de la complexité et de la dynamique de la situation. Le français quant à lui reste présent dans différents contextes et fait l’objet lui aussi de réajustements qui se situent au niveau de ses contextes d’utilisation, de la norme –scolaire traditionnellement enseignée – et de la variation. Le colloque s’est déroulé dans une atmosphère à la fois studieuse et conviviale que n’ont pas manqué de souligner tous les intervenants en remerciant les organisateurs de la rencontre c’est-à-dire aussi bien les responsables et les chercheurs du laboratoire que les étudiants et doctorants qui ont pris en charge les tâches d’organisation et d’accompagnement avec une efficacité sans faille. Ce fut un beau colloque. Dalila MORSLY 229 Moussa HADJ-MOUSSA Université de Tizi-Ouzou, Algérie [email protected] Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles à l’école algérienne ? Résumé Le français est bien une langue étrangère en Algérie ; devrait-on pour autant utiliser les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) pour son enseignement /apprentissage ? D’autre part, l’intérêt de l’apprentissage d’une langue étrangère réside dans l’acquisition d’une compétence de communication dans cette langue, mais aussi dans l’accès à un certain contenu culturel ; ne pourrait-on pas faire correspondre celui-ci aux besoins réels de l’apprenant algérien ? C’est sur ces deux aspects que portera notre intervention. الملخص ولكن هل ينبغي علينا استخدام أساليب.الفرنسية هي حقا لغة أجنبية في الجزائر ( الفرنسية لغة أجنبيةFLE) الفائدة من تعلم لغة أجنبية، تعلمها؟ من ناحية أخرى/للتعليم ولكن أيضا في اكتساب،بعض المحتوى تكمن في اكتساب الكفاءة التواصلية في هذه اللغة الثقافي؛ هل يمكننا أن نجعل هذآ ألخير مناسبا لالحتياجات الحقيقية للمتعلم الجزائري؟ ٠مداخلتنا ستطرق إلى هذين الجانبين 230 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … L’objectif de cette communication est de donner un point de vue sur deux questions : la question de la méthodologie et celle du contenu culturel, concernant l’enseignement / apprentissage du français en Algérie. À propos de la méthodologie, nous examinerons s’il y a adéquation, d’une part, entre le statut officiel de la langue française, ses méthodes d’enseignement/apprentissage et, d’autre part, les besoins réels des utilisateurs au sein des établissements scolaires et universitaires, voire dans la vie sociale (sur les lieux de travail notamment). Concernant l’aspect culturel, vu que, selon L. Porcher (1995 : 53), « toute langue véhicule une culture dont elle est à la fois la productrice et le produit », nous nous pencherons sur la problématique suivante : qu’est-ce qui correspondrait le mieux aux besoins de l’apprenant algérien, en ce qui concerne les contenus véhiculés par la langue française ? Ce qui m’a amené à réfléchir sur ces deux questions, c’est, pour la première, la confusion qui règne généralement entre la qualification de langue étrangère appliquée au français (au sens commun de l’expression) et le FLE, qui constitue un « champ » particulier dans le domaine de la didactique des langues (Cuq et Gruca, 2009 : 13). Pour le deuxième volet de ce travail (le volet culturel), la raison de mon intérêt pour le sujet est à chercher dans mon parcours personnel : autant moi-même, quand j’étais élève, surtout à partir du collège, j’étais passionné par le français parce que c’est dans cette langue que je découvrais tout ce qui était moderne et scientifique autant, quand j’étais devenu enseignant, j’avais du mal à intéresser à mon tour mes élèves parce que le contenu culturel offert par les manuels (qu’on avait renouvelés) était sans attrait. C’est qu’entre temps, le statut de la langue française avait changé, et surtout la méthodologie de son enseignement. Nous commencerons donc par parler du statut de la langue, afin de discuter de l’adéquation au contexte algérien de l’enseignement / apprentissage du français selon les méthodes du FLE ; puis, nous tenterons de réfléchir sur le contenu culturel qui conviendrait le mieux au public algérien. 231 Moussa HADJ-MOUSSA Les méthodes de FLE conviennent-elles à l’école algérienne ? « Français Langue Étrangère » est une de ces expressions qui nous semblent bien claires a priori, sur lesquelles on ne s’attarde donc pas suffisamment au début, mais qui nous posent des pièges par la suite. La question du statut : statut officiel et statut didactique du français en Algérie À toute langue, dans un pays donné, est généralement affecté un statut officiel, défini par la politique linguistique du pays en question, et duquel découle un statut didactique, lequel définit à son tour le rôle de cette langue, les objectifs, le contenu pédagogique et la méthodologie de son enseignement/apprentissage. Ainsi, le français peut faire l’objet d’un enseignement/apprentissage sous trois statuts du point de vue didactique : sous le statut de langue première (en général la langue maternelle), de langue seconde (FLS), ou de langue étrangère (FLE). Le statut de langue première signifie que la langue est enseignée en tant qu’idiome, pour reprendre la terminologie de Jean-Pierre CUQ et d’Isabelle GRUCA (2009 : 21), c’est-à-dire en tant qu’instrument linguistique de communication, et sert en même temps de médium pour l’enseignement des autres disciplines scolaires. Elle est l’objet de la didactique des langues premières : on aura donc la Didactique du Français Langue première (DFLP). Le public intéressé est constitué évidemment des natifs de la langue. Selon Jean-Pierre CUQ et Isabelle GRUCA toujours, le concept de Français Langue Seconde est appliqué aux apprenants non natifs, mais qui reçoivent une formation académique dans cette langue tout en l’apprenant en tant qu’idiome ; nous avons : — les populations qui sont officiellement françaises mais qui ne sont pas francophones natives : les enfants de l’immigration, dans les territoires d’outre-mer, et même 232 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … dans diverses régions de France où les patois étaient utilisés jusqu’à une période récente … ; — les populations des pays anciennement colonisés par la France et aujourd’hui indépendants, où le français joue le rôle de langue seconde pour beaucoup de citoyens, que son statut soit reconnu ou non. Dans ce cas, le français est désigné aussi sous l’appellation de « Français Langue de Scolarisation » (le même sigle, FLS, peut se lire donc de deux façons différentes). Enfin, suite à l’indépendance des anciennes colonies françaises, à la demande sociale émanant de populations d’autres pays (même européens, américains…), suite également au développement des communications internationales, le concept de Français Langue Étrangère (FLE) est apparu dans le champ de la didactique. (Toutefois, cette classification n’est pas exclusive sur le plan méthodologique. Il existe des passerelles entre les différentes spécialités de la didactique du français, les recherches menées dans le cadre de l’une d’elles influençant les autres.) Qu’est-ce qui caractérise le FLE ? Le FLE se caractérise d’abord par une méthodologie d’enseignement qui s’inscrit dans le sillage de celle de l’anglais. Cette méthodologie véhicule une thématique particulière, donc un contenu culturel particulier. Quant au public concerné, il s’agit d’apprenants qui étudient, en principe, les autres disciplines scolaires dans leur langue première et le français en tant que « langue » (ou idiome), pour des besoins supplémentaires de communication. La méthodologie du FLE L’enseignement du FLE, suivant le même processus que celui de l’anglais, a donné lieu à toute une production méthodologique qui s’inscrit dans le champ de la didactique des langues étrangères. Ainsi, le FLE est enseigné à l’origine selon les méthodologies structuralistes, apparues d’abord dans l’aire anglo-saxonne : nous avons principalement les méthodes AudioOrales, puis les méthodes Audio-visuelles, qui ont inspiré les 233 Moussa HADJ-MOUSSA SGAV françaises (SGAV : Structuro-Globales et Audiovisuelles), qui, à leur tour, ont inspiré la méthode Malik et Zina et ses dérivées en Algérie, à partir de la fin des années 60. Ces méthodologies (Puren, 1991) se caractérisent particulièrement par la priorité donnée à l’oral, par les fameux « exercices structuraux », qui sont des exercices de mémorisation de formes linguistiques, sans que le sens de celles-ci soit suffisamment pris en considération, et par une thématique puisée dans la vie quotidienne, avec généralement des dialogues préfabriqués, dont la banalité est pour le moins démotivante ; le texte littéraire y est presque totalement ignoré. Après les méthodologies structuralistes, vint l’approche communicative qui, tout en mettant l’accent sur le développement de la compétence effective de communication (Moirand, 1982), n’en utilise pas moins le même contenu que les précédentes, c’est-à-dire, d’après les manuels où elle est appliquée, une langue standard, de tous les jours, et une thématique qui ne s’éloigne pas de la « culture de masse ». Le FLE forme ainsi un système, avec une méthodologie, un contenu linguistique et un contenu culturel propres. Rappelons qu’en Didactique du Français Langue Première (Simard, 2010), l’enseignement / apprentissage est traditionnellement centré sur l’écrit, avec comme support le texte littéraire, comme activités linguistiques, des exercices qui mettent l’accent sur l’analyse (description de la langue) ; précisons que pour l’écrit, il s’agit d’activités de compréhension de textes (réception), généralement extraits d’œuvres littéraires, et surtout d’activités de production écrites. Bien entendu, des techniques relevant de la didactique des langues étrangères ont été adaptées à l’enseignement / apprentissage du Français Langue Première, avec des résultats variables. Le contenu culturel du FLE Voyons maintenant ce qu’offrent les méthodes de FLE sur le plan culturel. Nous n’avons pas pu jusqu’à maintenant trouver d’étude critique du FLE sur cet aspect. Nous n’allons donc pas approfondir ce point ; nous en donnerons juste un aperçu en nous référant à une brève analyse de quelques sites de FLE pris 234 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … au hasard sur Internet, et à notre propre expérience d’exenseignant de français à l’Éducation Nationale. De manière générale, nous pouvons dire que le matériel didactique du FLE disponible sur Internet est pauvre sur le plan culturel ; on sent plutôt que la visée publicitaire des auteurs (défendre une certaine image de la France) est primordiale. En témoigne le site suivant : Titre : « Insuf-FLE » Sous-titre : « insuffler des idées, offrir des documents aux professeurs de français d’ici et d’ailleurs » Contenu de la page du 16/05/2013 : « Clichés sur les Français… Notre réputation décortiquée. » (Titre) « Géo-Ado d’Avril 2013, numéro 122, nous offre un dossier complet sur les Français, la manière dont nous sommes perçus, les clichés véhiculés, notre réputation hors de nos frontières… Il est impératif de l’avoir dans sa boite à outils pédagogiques quand on est professeur de FLE. » En consultant les premières pages de ce numéro de Géo-Ado (le journal est recommandé pour des débutants en français), on trouve de petits articles portant chacun en titre un cliché colporté sur les Français, suivi d’un commentaire confirmant ou infirmant celui-ci : « La France est le pays de la gastronomie », « La France est le pays du fromage », « Les Français puent » ; mais ce dernier cliché est vite démenti : « 80% des Français, liton, prennent leur douche quotidiennement. » Nous pouvons signaler aussi, comme matériel didactique pauvre en contenu culturel, les documents authentiques qui sont souvent proposés dans les manuels de FLE, tels que les recettes de cuisine, les affiches publicitaires, vulgarisés par l’approche communicative, ainsi que les exercices structuraux, qui fonctionnent généralement à l’aide de phrases décontextualisées, lesquelles sont prises dans les échanges quotidiens. Les apprenants du FLE Les apprenants du FLE sont généralement de deux types (Cuq et Gruca, 2009 : 79): — des jeunes scolarisés dans les pays qui offrent le français comme discipline d’enseignement (dans les pays européens autres que la France, en Amérique…) ; des 235 Moussa HADJ-MOUSSA volontaires, à titre individuel, qui, dans tous les pays, éprouvent un désir ou des besoins linguistiques ou culturels particuliers. C’est de ce premier type de public que rend compte l’histoire méthodologique de l’enseignement des langues étrangères dont relève celle du français ; — ceux qui vivent dans des pays où le français est aujourd’hui présent pour des raisons historiques ou politiques (Cuq et Gruca, op. cit.) : dans les pays anciennement colonisés par la France, évidemment, mais aussi, par exemple, au Moyen-Orient, où, bien que la langue de travail soit l’anglais, il y a, dans certains cas, une ancienne tradition francophone, comme en Egypte (depuis Napoléon), en Syrie, au Liban… Qu’en est-il en Algérie ? En Algérie, nous avons un statut inadéquat pour la langue française et, partant, des résultats peu reluisants. L’inadéquation du statut officiel de la langue française à la réalité algérienne Avec l’émergence du FLE en didactique, les autorités algériennes en « profitent » pour décréter que le français serait enseigné comme toute langue étrangère, c’est-à-dire affecté d’un horaire et d’une méthodologie de langue étrangère, tout en imposant que les autres disciplines (mathématiques, philosophie, sciences…) soient enseignées en langue arabe. Or, si, au sens commun du terme, le français est effectivement une langue étrangère en Algérie, il n’est pas vrai si l’on considère ce que recouvre cette expression en didactique des langues, comme on vient de le voir plus haut. D’ailleurs, au niveau même des programmes officiels, on assigne à son enseignement des objectifs fort ambitieux, qui dépassent ceux fixés habituellement aux langues étrangères. Ainsi : — Selon les programmes de 1995, par exemple, entre autres objectifs, à la fin de la 3ème AS, « L’élève sera un utilisateur autonome du français, instrument qu’il pourra 236 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … mettre au service des compétences requises par la formation supérieure, professionnelle, les entreprises utilisatrices et les contraintes de la communication sociale » (C’est nous qui soulignons). On reconnaît donc ainsi l’utilité du français à l’université, dans l’enseignement professionnel, dans les entreprises, et même, plus généralement, au sein de la société. — Avec la Réforme du Système Éducatif du début des années 2000, le français ne change pas de statut officiel. Il y occupe la place de langue étrangère, de l’école primaire jusqu’au Baccalauréat, notamment au niveau des horaires qui lui sont impartis. Cependant, les finalités de son enseignement dépassent toujours celles des langues étrangères : Selon les programmes mis en œuvre à partir de 2003, « sur un plan plus spécifique, l’enseignement du français doit permettre : — L’acquisition d’un outil de communication permettant aux apprenants d’accéder aux savoirs ; — La sensibilisation aux technologies modernes de la communication ; — La familiarisation avec d’autres cultures francophones pour comprendre les dimensions universelles que chaque culture porte en elle ; — L’ouverture sur le monde pour prendre du recul par rapport à son propre environnement, pour réduire les cloisonnements et installer des attitudes de tolérance et de paix. » Si les deux derniers objectifs (découverte d’autres cultures, ouverture sur le monde) sont communs à l’enseignement de toute langue étrangère, les deux premiers (« accès aux savoirs » et « aux technologies modernes de la communication ») sousentendent qu’il existe des savoirs non accessibles, ou difficilement accessibles en langue 1 (dans notre cas, en langue arabe), et ce, particulièrement pour ce qui concerne « les technologies modernes de la communication ». Par ailleurs, force est de constater qu’à l’université algérienne, dans les filières scientifiques et technologiques, les enseignements sont toujours donnés en langue française. De même, au sein des entreprises (industrielles, commerciales, et 237 Moussa HADJ-MOUSSA surtout financières…), les documents de travail sont rédigés en français ; et même à l’oral, dès qu’il s’agit d’une communication à caractère scientifique ou technique, la langue française s’impose (au moins en code switching). Ainsi, on voit qu’il n’y a pas adéquation entre le statut officiel de la langue française et le rôle qu’elle joue en réalité dans la société algérienne. Elle n’est pas seulement enseignée comme langue, mais elle sert aussi de véhicule à l’enseignement scientifique et technologique. Dans les pays où le français est enseigné véritablement comme langue étrangère, à l’instar, par exemple, des autres pays européens, les apprenants reçoivent dans leur langue maternelle leur culture générale de base, c’està-dire la culture qui leur permet de s’insérer dans le monde moderne. S’ils cherchent à apprendre le français, c’est pour des besoins de communication en plus, des besoins généralement de communication orale (lors de voyages, de déplacements divers). C’est, en premier lieu, pour cette catégorie d’apprenants que le FLE est destiné. Pour ce qui est de l’Algérie, l’apprentissage d’une culture moderne qui permette une ouverture sur le monde, une insertion dans le monde actuel, devrait être assuré, si l’on suit la logique du discours officiel, par la langue 1, en l’occurrence la langue arabe. Or, ce n’est pas le cas, car force est de constater que celleci est plutôt tournée vers le passé, valorisant les traditions et se valorisant à travers elles ; ce qui pousse les apprenants (ainsi d’ailleurs que les citoyens d’une façon générale) à rechercher l’information en quelque sorte mise à jour en langue française. Malgré son statut officiel, le français est donc en réalité une langue de scolarisation et de travail en Algérie, et devrait être enseigné comme telle. Le concept didactique de FLE ne convient pas aux besoins de la société algérienne. Il n’y a d’ailleurs qu’à considérer, pour s’en convaincre, les conséquences désastreuses sur le niveau scolaire obtenu à partir de l’époque (les années 70) où les méthodes appliquées à l’école algérienne sont inspirées de celles du FLE. Les conséquences En effet, c’est un lieu commun que de dire que l’enseignement du français a régressé de manière vertigineuse 238 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … depuis les années 70 (régression qui ne concerne pas d’ailleurs uniquement l’enseignement du français, mais l’enseignement dans sa globalité). Bien entendu, cette régression n’est pas due seulement à la méthodologie ; d’autres facteurs, dont la plupart sont extra-scolaires, interviennent pour expliquer cette situation : politique d’arabisation, recrutement massif d’enseignants sans qualification, dégradation des conditions matérielles de l’enseignement sous la poussée démographique, etc. Cependant, nous sommes persuadés que la méthodologie est responsable, en grande partie, de l’échec scolaire. En outre, cette régression ne se situe pas seulement sur le plan qualitatif, mais également sur le plan quantitatif, contrairement à ce que certains clichés laissent entendre. En effet, on entend souvent dire que l’Algérie est le deuxième pays francophone du monde après la France. Cette idée peut se retrouver dans la bouche de ceux qu’on peut effectivement considérer comme francophones, dans la mesure où ils ont une maîtrise suffisante de la langue, parce qu’ils l’utilisent en concurrence avec les langues algériennes dans leur milieu social ou professionnel, à l’instar de ce qui se passe dans les pays ayant été colonisés par la France. Cela traduit plutôt une vision sécurisante pour cette catégorie de citoyens. L’idée est répétée également, souvent avec une intention accusatrice, comme pour dénoncer une aberration, par les tenants de l’arabisation totale. Et paradoxalement, elle revient également dans certains discours français, sans doute pour des raisons politiques ; en tout cas, en France, on ne donne pas l’impression de s’alarmer sur le recul du français en Algérie, au vu des maigres efforts fournis pour rééquilibrer la situation. En réalité, l’affirmation selon laquelle l’Algérie serait un grand pays francophone semble être une supercherie. En effet, en l’absence de statistiques, il s’agit plutôt d’estimations subjectives, à des fins propagandistes. Il est facile de constater que les chiffres souvent alignés dans les médias sont falsifiés. On comptabilise comme francophone toute personne censée suivre ou censée avoir suivi un enseignement quelconque de la langue française ou en langue française, sans en préciser ni le niveau, ni la qualité, ni même si l’enseignement en question a été réellement effectué ; on comptabilise ainsi comme 239 Moussa HADJ-MOUSSA francophones tous les enfants à partir de leur première année de français, avec un horaire théorique aussi réduit soit-il, et même dans le cas où celui-ci n’est pas du tout assuré : on sait que le déficit en enseignants de français est alarmant, sans parler de la sous-qualification de plus en plus patente de ceux qui en assument la fonction. En outre, à l’école primaire, la place du français est réduite à une portion congrue : l’horaire en subit périodiquement des coupes, justifiées par des considérations politiques ; parfois, il n’a pas de place du tout, à tel point que, dans certaines régions de l’intérieur du pays, les candidats à l’examen de fin du cycle primaire et du BEM (Brevet d’Enseignement Moyen) en sont dispensés. Dans l’enseignement moyen et dans l’enseignement secondaire, l’horaire et le contenu sont également ceux d’une langue étrangère, et encore, là aussi, il n’est pas évident que les cours soient assurés. Au baccalauréat, l’épreuve de français est quasiment conçue sur le modèle des épreuves de langues étrangères, à l’instar de l’anglais, qui est réellement langue étrangère en Algérie. Seule l’université offre des formations en langue française, dans les filières scientifiques et techniques (ce qui pose d’ailleurs d’énormes problèmes aux étudiants qui n’y sont pas préparés), tandis que dans les filières des sciences humaines, les enseignements sont donnés en arabe, à quelques rares exceptions près, dans certains établissements. Le moins que l’on puisse dire est qu’il n’y a pas de cohérence entre les besoins des apprenants et la politique linguistique appliquée, d’une part, et, d’autre part, entre les différents cycles, pour ce qui est de l’enseignement du français. Il n’y a donc pas adéquation entre le statut officiel et le statut didactique du français en Algérie. Mais cette inadéquation est particulièrement importante entre le contenu culturel véhiculé par les méthodes de FLE et les besoins des apprenants algériens. Qu’appendre en français en termes de contenu culturel ? Selon Jean-Pierre CUQ et Isabelle GRUCA (2009 : 79), l’enseignement est défini comme « le résultat de la procédure 240 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … d’objectivation didactique d’un idiome et d’une culture », ce qui suppose que la langue et la culture sont liées pour l’enseignement d’une langue, même étrangère. En effet, les tentatives d’enseigner la langue sans la culture (le français fonctionnel, par exemple) se sont avérées non concluantes : l’école algérienne a toujours tenté de réduire au minimum le contenu culturel véhiculé par la langue française dans l’intention d’échapper à ce qui était considéré comme une acculturation, une aliénation. Non seulement le chant, par exemple, en langue française, était un tabou pendant très longtemps, mais également, à partir du milieu des années soixante-dix, avec la mise en application de l’École fondamentale, l’accent mis sur une thématique qui se voulait non marquée culturellement rendit l’apprentissage du français sans attrait. Mais si le souci d’éviter une culture trop franco-française peut être légitimé quelque part, il est dangereux de se laisser enfermer dans une seule culture, même s’il s’agit de la sienne, surtout si celle-ci entre constamment en contradiction avec le monde moderne. Adopter sans esprit critique tout ce qui est étranger peut avoir de graves conséquences, mais refuser de nouvelles connaissances au seul motif qu’elles nous viennent de l’étranger ne permet pas d’enrichissement, ni de progrès. Dans cette partie, nous ferons d’abord le point sur la notion de culture, puis nous discuterons des besoins des apprenants algériens dans ce domaine. La culture en question Selon le Grand Larousse de la Langue Française, le terme recouvre essentiellement trois acceptions. Premièrement, opposé en philosophie à « nature » (Spinoza), il désigne les diverses connaissances qu’on acquiert tout au long de la vie. Ces connaissances sont le fruit d’une acquisition ; elles ne sont pas innées. Elles sont plus ou moins approfondies, plus ou moins diversifiées chez un même individu : ainsi, avoir une « culture générale », c’est avoir des connaissances de base touchant tous les domaines essentiels et permettant d’être socialisé, d’être « en phase » avec la société de son époque. Selon la seconde acception, dans l’expression « culture nationale », le terme est plutôt synonyme de « civilisation ». Il 241 Moussa HADJ-MOUSSA désigne l’héritage des ancêtres pour une communauté donnée. Cette culture peut être en réalité plus ou moins « nationale » (« culture française »), mais aussi recouvrir des aires géographiques plus étendues, sans frontières nettes (« culture musulmane », « gréco-latine », « anglo-saxonne »…), chacune étant associée à une période historique donnée. Enfin, certains parlent de « culture universelle », qui serait essentiellement scientifique, constituée de connaissances relatives notamment aux sciences dites exactes et de leurs applications (Pecker, 1987). Il est vrai que, du point de vue épistémologique, la notion d’universalité est discutable, même en ce qui concerne les sciences : tout, en effet, est culturel, y compris le discours scientifique, dont l’objectivité n’est que relative, vu qu’il est en évolution constante, avec des ruptures, des remises en cause perpétuelles (Bachelard, 1934). Cependant, on constate une convergence qui tend à s’imposer dans le monde actuel, avec la globalisation, et dont l’effet est l’ébauche d’une culture qu’on pourrait qualifié d’universelle. En suivant Pecker (Op. Cit.), La culture universelle serait celle qui est généralement admise par tous, dans toutes les contrées du monde, dans la mesure où elle ne contredit pas des éléments de la culture nationale comme les croyances philosophiques, religieuses... C’est d’ailleurs ce qui a permis sa propagation d’une région à une autre, son transfert d’une aire de civilisation à une autre. Ainsi, les mathématiques, la physique, la chimie ont été développées à des périodes différentes dans le cadre de plusieurs civilisations (gréco-latine, musulmane, occidentale…). Contrairement aux croyances philosophiques ou religieuses, les connaissances en sciences exactes reposent sur des opérations mentales abstraites qui trouvent des applications concrètes dans l’action de l’homme sur la nature, avec des résultats observables, invariables dans des conditions identiques de réalisation (selon le principe même des sciences expérimentales). Cela ne se fait pas encore sans heurts, surtout dans certaines régions du globe ; cependant, quand il y a contradiction entre la science et la foi, c’est cette dernière qui tend à s’adapter, à se modifier ou à disparaître. 242 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … En plus des sciences pures, tendent vers l’universalité toutes les disciplines qui en utilisent les mêmes principes méthodologiques, y compris dans le domaine des sciences humaines : l’histoire, aujourd’hui, se fait sur la base de documents, la psychologie sur la base de l’observation et de l’expérimentation, etc. C’est l’universalité des connaissances qui a permis les progrès scientifiques et leur propagation dans le monde actuel : recours, dans tous les pays, aux techniques agro-alimentaires rentables, à la médecine moderne, aux moyens de télécommunications actuels… Cela contribue, par ailleurs, à plus de dialogue et de compréhension entre les peuples, même si des injustices sont engendrées du fait de l’inégalité dans la maîtrise de ces progrès par les différentes communautés humaines. Propositions pour le contenu culturel à enseigner à l’école algérienne Pour l’apprenant algérien, la langue française devrait être en priorité un moyen d’accès à cette culture dite universelle, un moyen pour une vraie ouverture sur le monde, pour un accès au développement, à la modernité. L’élargissement de la culture générale, et en particulier scientifique, doit être une préoccupation constante dans l’enseignement en Algérie. Au lieu des « banalités » véhiculées par les méthodes du FLE, on devrait travailler sur des thématiques plus enrichissantes, à même de développer la curiosité et l’esprit critique : au lieu de parler des clichés concernant les Français, on pourrait proposer, par exemple, les données élémentaires concernant la géographie et l’histoire de la France et inviter les apprenants à réfléchir sur les facteurs du développement d’un pays, ou les raisons de son sousdéveloppement, par comparaison avec leur propre pays. Cela permettrait de contrer les effets négatifs de la propagande médiatique, d’où qu’elle vienne. Autre thème à explorer : l’histoire, mais à l’aide d’une méthodologie scientifique. L’étude des tenants et aboutissants de certains évènements historiques permet en effet d’éviter – ou du moins, réduire – les mystifications et les mythifications. 243 Moussa HADJ-MOUSSA L’histoire des sciences, particulièrement, doit être enseignée de manière que les jeunes algériens ne se laissent pas obnubiler par tous les gadgets technologiques, qui envahissent de plus en plus leur quotidien, qui les découragent en suscitant chez eux un sentiment d’impuissance. Leur donner des explications rationnelles sur l’évolution des inventions, des découvertes scientifiques ainsi que sur l’évolution des sociétés en général leur permettra de faire la part des choses, de comprendre que le progrès n’est pas hors de leur portée, d’éviter le sentiment d’infériorité qui guette la jeunesse des pays en développement. Cependant, L’apprenant algérien peut-il greffer des connaissances scientifiques, modernes sur des représentations du monde parfois archaïques ? Les différents discours auxquels il est exposé dans son environnement jouent-ils un rôle positif dans la construction de ses représentations ? C’est dire la complexité du développement culturel dans un pays comme l’Algérie. Le problème est double par rapport à celui des couches sociales défavorisées dans les pays développés, où les carences du milieu familial représentent un sérieux handicap pour la réussite scolaire des enfants (Murat, 2009). Nous n’avons pas seulement à lutter pour l’acquisition d’une culture moderne, mais également à lutter contre l’enfermement dans les archaïsmes. Tout un travail d’éducation est à mener au niveau des mentalités, en développant l’esprit rationnel, l’esprit critique chez les jeunes, sans quoi l’apprentissage de la langue française ne serait pas d’une grande utilité. Conclusion Les méthodes d’enseignement / apprentissage, aussi novatrices qu’elles soient, doivent toujours faire l’objet de tests et d’adaptations avant d’être généralisées, d’autant plus que dans les pays mêmes où elles sont inventées, elles ne recueillent jamais l’unanimité. Ainsi, les méthodes de FLE auraient dû être soumises à débat quant à leur adéquation avant d’être appliquées à l’école algérienne. On devrait notamment préciser les objectifs de l’enseignement / apprentissage du français sur des bases rationnelles, scientifiques, en tenant compte des besoins du 244 Les méthodes du Français Langue Étrangère (FLE) conviennent-elles … public visé, sans donner la priorité aux considérations idéologiques. Une langue étrangère est intéressante avant tout par le contenu culturel qu’elle véhicule et auquel elle permet d’accéder. Il est évident que tous les aspects de ce contenu ne correspondent pas aux besoins du public visé ; un choix s’impose, qui devrait déterminer les autres aspects et les conditions de l’enseignement / apprentissage de la langue en question. En tenant compte de tout cela, il serait intéressant de réfléchir à des méthodes d’enseignement/apprentissage du français spécifiques au public algérien, méthodes qui devraient à la fois tenir compte de l’évolution de la recherche en didactique et des besoins réels des apprenants. Le placage sans esprit critique de techniques et de procédés importés dans un domaine tel que l’enseignement s’avère souvent dangereux. Bibliographie — ASSELAH-RAHALS.et al. (2006), Le rôle du français dans l’enseignement des langues étrangères en Algérie, Edition Modulaires Européennes (Belgique). — BACHELARD, G., (1934) (réédité par la SNED, Alger, 1966), Le nouvel esprit scientifique. — MOIRAND, S(1982), Enseigner à communiquer en langue étrangère, Hachette. — PORCHER, L., (1995), Le Français langue étrangère, émergence et enseignement d’une discipline, CNDP, Hachette éducation, p.53. — CUQ, J.-P. et GRUCA, I., (2005), Cours de Didactique du français langue étrangère et seconde, Presses Universitaires de Grenoble, p. 13 et suivantes de l’édition 2009. — CUQ, J.-P., (1991), Le Français langue seconde : Origines d’une notion et implications didactiques, Hachette. — MURAT, F., (2009). « Le retard scolaire en fonction du milieu parental : L’influence des compétences des parents ». Économie et statistique, n° 424-425, février, p. 245 Moussa HADJ-MOUSSA — — — — — 103–124. En ligne : http://www.insee.fr/fr/ffc/ES424425F.pdf PECKER, J.-C., (astronome), article « La culture » in Le Monde du 16-12-1987. PUREN, Ch., (1991), Histoire des méthodologies de l’enseignement des langues, Paris, Nathan, « Clé International ». SIMARD, C. (2010), Didactique du français langue première, Col. Pratiques Pédagogiques, Editions De Boeck. VERDLHAN-BOURGADE, M., (2002), Le Français de scolarisation, pour une didactique réaliste, PUF. VIGNER, G., (2001), Enseigner le français comme langue seconde, CLE International. 246 247 Amina AZZA–BEKKAT Université LOUNICI Ali – Blida 2 [email protected] Désirée SCHYNS La mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne francophone (Paris, L’Harmattan, 2012) Partant du constat que la guerre est le sujet principal de la littérature algérienne de ces trente dernières années, l’auteure, professeure en traduction en Belgique, explore un corpus de 25 textes écrits en français par des auteurs algériens pour donner la parole aux écrivains décolonisés. Son choix se porte sur des auteurs nés en Algérie car, écrit-elle, ils ont été témoins du système colonial et leur vie a été influencée par la colonisation. Les neuf auteurs choisis ( Malek Haddad, Mohammed Dib, Mouloud Mammeri, Rachid Mimouni, Rachid Boudjedra, Malika Mokaddem, Myriam Ben, Maissa Bey, Yamina Mechakra et surtout Assia Djebar présente avec neuf titres) vont servir de base à une exploration de la guerre et des mémoires qui va s’organiser en neuf chapitres. Les romans choisis ont été publiés entre 1958 et 2003. On peut déjà distinguer les textes écrits pendant la guerre (qu’elle appelle guerre d’Algérie, dénomination sur laquelle elle s’explique) qui racontent une autre histoire que ceux qui ont été produits entre 70 et 80, époque de désillusion et de remise en question. Après 1992, pendant la décennie noire que l’auteure nomme de façon assez surprenante deuxième guerre d’Algérie, les témoignages seront complètement différents. Sur quels critères ces ouvrages ont-ils été sélectionnés ? Ce sont des textes représentatifs, appréciés du 248 La mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne … public et de l’auteure elle-même et ils correspondent aux périodes et aux thématiques choisies. Dans un long prologue, l’auteur fixe les limites de son analyse : elle reprend la notion de mémoire culturelle (cultural memory) tant il est vrai comme le démontrent les actes des récents colloques consacrés au sujet, que les œuvres littéraires sont non seulement un réceptacle, un dépôt de traces mémorielles mais qu’elles sont aussi constitutives de mémoire. En ce sens qu’elles réorganisent, structurent et informent la ou les mémoires. Derrida évoquait dans un documentaire qui lui était consacré, le carreau disjoint de sa maison d’Alger. Cette image qui rompt l’harmonie peut être comparée au fonctionnement de la mémoire qui se bâtit sur la blessure et l’hétérogène. Les historiens Benjamin Stora et Mohammed Harbi perçoivent la différence entre histoire et mémoire sur une échelle temporelle. La mémoire mène à L’Histoire. Les fictions sont réceptrices et créatrices de mémoire culturelle. Elles reprennent et créent parfois ces lieux de mémoire dont Pierre Nora parlait et qui « accrochent », à des dates repères ou à des faits précis, l’histoire pour la postérité. Ce sont des relais qui donnent aussi forme au futur. La première partie regroupe des fictions allant de 1958 à 1985. Dans le premier chapitre, dans un panorama général sur les écrivains, Désirée Schyns évoque les cas où l’engagement pour une lutte légitime s’achève parfois avec le départ pour la France (Djebar, Dib) ou le silence : Malek Haddad se tait après l’indépendance. Mention spéciale pour Qui se souvient de la mer ? De Mohammed Dib qui choisit de ne pas dire de façon crue les horreurs de la guerre, tout comme le Guernica de Picasso mais qui change radicalement de style pour évoluer dans le fantastique et l’onirique. Les différentes étapes nous mènent du combat pour une guerre juste au désenchantement. Le rapprochement est fait avec les romans traitant de la guerre d’Espagne. Le chapitre deux aborde la « mémoire officielle » en Algérie. Dès 1966, le pouvoir algérien encourage les récits entretenant l’image mythique de la révolution. L’Opium et le bâton écrit par Mouloud Mammeri semble assez significatif de cette période du réalisme socialiste et donne une tournure idéologique à son roman, bien qu’il sache échapper au manichéisme grâce à deux personnages, leharki 249 Amina AZZA–BEKKAT Tayeb qui se repent et le soldat français qui choisit le côté des Algériens. Ainsi tous les protagonistes sont dessinés avec subtilité ce qui les rend plus crédibles. Le chapitre 3 traite du désenchantement. Les Alouettes naïves d’Assia Djebar est rédigé à Paris et Alger entre 1967 et 1985. Désirée Schyns décrit le texte comme un roman fragmenté qui raconte l’histoire de plusieurs personnages des deux sexes. Dans la troisième partie du roman transparait déjà ce désenchantement qui va être un thème commun aux romans qui vont suivre. L’auteure s’intéresse ensuite aux autres œuvres de Djebar. Les femmes qui peuplent ses œuvres, militantes, maquisardes, épouses ou mères, malmenées par la vie et déçues par l’indépendance, sont souvent impuissantes à dire leurs souffrances ; Le chapitre 4 va montrer que les hommes eux aussi souffrent d’insatisfaction. La danse du roi de Mohammed Dib (1968) traduit la même attitude. L’auteure conclut que ce roman dans lequel l’auteur dénonce très tôt l’échec de la révolution et la condition misérable dans laquelle vit le petit peuple algérien (137) est extrêmement pessimiste. Mimouni prendra le relais de Dib dans Le Fleuve détourné (138). Comme la métaphore fluviale du titre l’exprime, il s’agit de la confiscation de la Révolution algérienne. Dans La malédiction, Mimouni ira plus loin en disant que la guerre civile de 1990 n’est qu’une réactualisation d’une guerre qui ravageait déjà les maquis de la guerre de libération. (142). Ce qui a été refoulé par la mémoire et l’histoire algérienne. Rachid Boudjedra, quant à lui, s’est toujours intéressé à la représentation de la guerre par le biais de l’imaginaire. Grand admirateur de Céline, il reprend certaines de ses tournures. Dans Le démantèlement, Tahar el Ghomri, héros hypothétique et désabusé est resté marqué par le traumatisme du 8 mai 1945 qui lui a ravi sa femme et ses filles. Cette date fonctionne comme lieu de mémoire dans toute la littérature algérienne. Le roman dit aussi de façon très abrupte les dessous de la Révolution et tous ses aspects cachés ou dissimulés pour construire une image lisse et fédératrice de la guerre de libération. La deuxième partie de l’étude va se concentrer sur la torture avec tout d’abord des témoignages non littéraires. Le premier 250 La mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne … chapitre interroge les témoignages de ceux qui ont dénoncé les tortures soit parce qu’ils les ont eux-mêmes subies comme Henri Alleg auteur de La question soit parce qu’ils en ont défendu les victimes comme Gisèle Halimi avocate de Djamila Boupacha ou Simone de Beauvoir signataire du manifeste des 121. Germaine Tillion s’engage elle aussi dans ce combat après avoir promis aux jeunes combattantes de le faire (comme le raconte Zohra Drif dans ses mémoires récemment publiées (mémoires de Zohra Drif).Le film tiré du livre de Alleg a été projeté à Alger il y a quelques années en présence de l’auteur (décédé depuis) et le spectacle des sévices infligés bien qu’évoqués de manière atténuée reste insoutenable. L’ouvrage de Désirée Schyns va tenter de montrer comment cela a été rendu dans les œuvres de fictions. Deux constats : il y a dans la littérature algérienne de langue française assez peu d’évocations de la torture ce que soulignent beaucoup de critiques dont Christiane Achour et d’autre part elle évoque la question qui revient de manière lancinante quand des massacres à grande échelle se produisent et que nous sommes confrontés à l’innommable : comment traduire en mots ces souffrances extrêmes ? N’y-a-t-il pas une certaine indécence à créer un objet esthétique à partir de tant de douleur ? Comment le langage littéraire explore-t-il les limites du représentable ? En choisissant un corpus de trois œuvres de Djebar de 1962 à 2003, Désirée Schyns explore ce qu’elle appelle le retour de mémoire.(190) La femme sans sépulture décrit une scène de torture à partir du torturé (204).Assia Djebar imagine ce que la torturée sent et subit de façon charnelle et érotique. Et l’auteure de commenter : En utilisant ce style inattendu pour une scène de torture elle attire notre attention sur le côté fictif et littéraire de son texte. (205) Un langage érotique pour dire les souffrances du corps. Rien de tel dans les témoignages réels. Pourquoi Djebar utilise-t-elle ce langage qui pourrait être choquant pour les lecteurs ? Cerner les limites du dicible, restituer au bourreau sa qualité d’homme ? Le projet d’Assia Djebar est lié au rôle et à la place de la femme et plus particulièrement du corps féminin et de sa sexualité dans l’espace public, dans la société (214). La question de la morale se pose aussi pour le roman de Ben 251 Amina AZZA–BEKKAT Jelloun Cette aveuglante absence de lumière (2001) et la nouvelle de Dib Le Talisman. L’expérience de la torture est à la limite du langage. Les auteurs tentent chacun à sa manière de la représenter : érotisme pour Djebar, mysticisme pour Dib. Par l’imagination et la transgression, par l’intégration dans un projet qui dépasse la scène de violence, la littérature peut contribuer à « penser »la torture. (225). La troisième partie aborde les événements de la décennie noire que l’auteur appelle aussi de façon un peu surprenante, guerre d’Algérie. Elle constate qu’il y a une relation entre la recrudescence de la violence en Algérie et la remémoration de la guerre d’Algérie dans les romans écrits (ou remaniés) à partir de 1992/1993. (227). En revenant à la guerre de libération, les auteurs tentent de comprendre la nouvelle spirale de violence. Djebar, Mimouni, Boudjedra, Mokeddem sont cités et étudiés. L’analyse s’étend plus particulièrement sur cette dernière que Désirée Schyns va interviewer à la fin du volume. Répondant à ses questions, l’écrivaine retrace l’atmosphère de la guerre alors qu’elle n’était qu’une petite fille : Les combats des pères, les chants de résistance des femmes ; tout un environnement qui l’a marquée sans lui faire perdre sa lucidité. Les séquelles de la guerre de libération sont encore présentes(238) dans le dernier texte de Mimouni au titre emblématique déjà évoqué. La malédiction. Mimouni démontre que le passéde l’Algérie mine le présent. (242) même analyse dans le Blanc de l’Algérie publié par Djebar en 1995. Avant les historiens ce sont les romanciers qui ont levé en premier le tabou des « règlements de compte » et déterré les cadavres du passé (245). Le rôle de la littérature est comme l’explique Pierre Barbéris de corriger la version officielle distillée dans les écoles. Boudjedra a tenté dans toute sa production de faire le ménage et « de tirer les meubles pour voir derrière. » comme il l’écrit dans le démantèlement. C’est pour l’auteur un questionnement essentiel. Rac, héros de La vie à l’endroit, sort déguisé comme le romancier lui-même le faisait alors qu’il était menacé de mort par les intégristes qui lui avaient fait parvenir un linceul et un morceau de savon pour la toilette funéraire symboles explicites 252 La mémoire littéraire de la guerre d’Algérie dans la fiction algérienne … de menaces de mort. La paramnésie ce terme revient dans nombre de ses œuvres et explique son attachement à la mémoire du pays. Un autre symbole est repris souvent dans l’œuvre de Boudjedra, c’est la mort de Yamaha, mascotte du CRB. Ce personnage est le héros d’une nouvelle récente de Yasmina Khadradans les chants cannibales. Dans le dernier chapitre 8 intervient la notion de multidirectional memory (265) Et l’auteure de souligner qu’au moment où la mémoire du génocide des nazis surgit dans l’espace public, la conscience contemporaine de la guerre d’Algérie en est exclue. (266). Ainsi Didier Daeninckx (français), Nancy Huston (canadienne) et Leïla Sebbar (franco-algérienne) font fusionner plusieurs guerres dans leurs fictions. Le 17 octobre 1961 est évoqué dans plusieurs fictions, mis en parallèle avec d’autres guerres, d’autres exactions. Maurice Papon jugé et condamné pour avoir envoyé des juifs en déportation est celui-là même qui ordonna les massacres du 17 octobre qui coûtèrent la vie à de nombreux algériens et comme le souligne Leila Sebbar la seine était rouge. Dans Les nuits de Strasbourg (1997), Djebar à travers la relation qui unit Theldja à son amant François croise les deux mémoires, celle de la seconde guerre mondiale et celle de la guerre de libération nationale. Et les échos de la décennie noire. Le dernier chapitre est centré sur l’image du bourreau. À partir d’un dialogue entre le texte de Maissa Bey Entendez-vous dans les montagnes ?et l’œuvre bien connue de Bernard Schlink traduite en français sous le titre Le liseur (Der Vorseler) dont trois fragments sont mentionnés çà et là sans aucun contexte. Jeu intertextuel ou mise en abyme qui souligne le rapport au bourreau ? Par ces citations, Maissa Bey établit un lien entre le massacre des juifs et la guerre d’Algérie et élargit le problème et l’universalise. Mais en même temps, elle humanise les tortionnaires. Elle donne ainsi dans un texte souterrain (selon l’expression de Nathalie Sarraute) comme une parcelle d’une matière inconnue qui se dissimule derrière le monologue intérieur (293). Par là même, elle réinvente ainsi le rapport du bourreau à la victime et réussit à l’humaniser. Il était intéressant que la dernière partie de l’analyse évoque ces confrontations 253 Amina AZZA–BEKKAT inévitables de l’après-conflit, lorsque la vie quotidienne reprend le dessus et que, par hasard dans un train ou dans une rue, deux êtres séparés autrefois par leurs convictions, placés de part et d’autre des mémoires, se font face. Ce livre fouillé et agréable à lire, basé sur une thèse soutenue à l’Université d’Amsterdam en 2007, est une mine d’informations pour tous ceux qui s’intéressent à la guerre d’Algérie (guerre de libération nationale ?) et aux rapports entre les deux communautés. Il révèle le poids de la mémoire, mémoire officielle, reconstituée, lieux de mémoire…S’appuyant sur les œuvres d’historiens en un va -et -vient constant avec la littérature, Désirée Schyns en rend l’accès facile. Amina AZZA–BEKKAT Département de français – Université de Blida 2 Achevé d’imprimer en Décembre 2014 Didacstyle ISSN : 1112-2080 ISBN : 2013-8009 254 جامعة لونيسي علي -البليدة 2 ك لية اآلداب واللغات قسم اللغة الفرنسية ديداكستيل 6 L’ÉVALUATION : ? QUELS ENJEUX ET QUELLES PERSPECTIVES ر.د.م.د 1112-2080 : ر.إ.ق2013-8009 : . ديسمبر 2014: منشورات جامعة لونيسي علي -البليدة 2 ديداكستيل الرئيس الشرفي للمجلة: أ.د /السعيد بومعيزة (رئيس جامعة البليدة )2 رئيسة المجلة ومسؤولة النشر: دليلة براكني (عميدة كلية اآلداب واللغات) مدير المجلة: وردية آسي (مسٶولة عن المجلة) رئاسة التحرير: جازية حابت (مسؤولة الشعبة) هدى أكمون (نائبة رئيس القسم للبحث العلمي) هيئة التحرير: سيد علي صحراوي وردية آسي حكيم منقالت نسيمة موساوي طرابلسي عبد الرزاق أمانة التحرير: جازية حابت طرابلسي عبد الرزاق قام بتنسيق هذا العدد:األستاذةنسيمة موساوي الهيئة العلمية: أمينة بقاط (أستاذة التعليم العالي ،جامعة البليدة )2؛ مليكة كباس (أستاذة التعليم العالي، جامعة البليدة )2؛ عمار ساسي (أستاذ التعليم العالي ،جامعة البليدة )2؛ نصر الدين بوحساين (أستاذ التعليم العالي ،جامعة البليدة ) 2؛ دليلة براكني (أستاذة محاضرة ،جامعة البليدة )2؛ عتيقة ياسمين قارة (أستاذة التعليم العالي ،المدرسة العليا لألساتذة ،الجزائر العاصمة)؛ صليحة أمكران (أستاذة التعليم العالي ،جامعة الجزائر)2؛ صفية أصالح-رحال (أستاذة التعليم العالي ،جامعة الجزائر) 2؛ الحاج ملياني (أستاذ التعليم العالي ،جامعة مستغانيم)؛ ملاير ريسباي (أستاذة التعليم العالي ،جامعة سانت إتيان -فرنسا)؛ كلود كورتييه (أستاذة محاضرة ،جامعة ليون - 2فرنسا)؛ كلود فينتز(أستاذ التعليم العالي ،جامعة ستيندال غرونوب .)2 إتصاالت: جامعة البليدة – 2العفرون – البليدة – الجزائر [email protected] منشورات جامعة لونيسي علي -البليدة 2 ديداكستيل إرشادات التحرير: احترام الهوامش: "ارتفاع 22 :سم /العرض 1151 :سم؛papierمقياس " هوامش :أعلى ،أسفل ،يمين ،يسار 02 :سم؛ تفاصيل المؤلف (االسم الكامل واالنتماء والبريد اإللكتروني) يجب أن تكون رقم مكتوبة في أعلى ويسار الصفحة في الخط »11«Californian FB المقاالت: الخط »" «Times New Romanستيل" عادي ،رقم 12 عنوان المقال :الخط » «Californian FBرقم 11 العناوين الثانوية :الخط » «Californian FBرقم 11 تباعد السطور» 01( «interligneنقطة)؛ يجب أن ال تتجاوز 10،000عالمة؛ يجب أن يكون شكل الصور 200بكسل»(«pixelالحد األدنى) وشكل""JPEG " Wordيجب أن تبقى الجداول واألرقام في شكل " المراجع: في النص( :اللقب ،السنة :الصفحة) صفحة المراجع( :اللقب ،أول حرف االسم( ،السنة) ،العنوان ،الطبعة ،المدينة، رقم الصفحة. منشورات جامعة لونيسي علي -البليدة 2