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Impact clinique en physiothérapie gériatrique
ICP gériatrie
TEN S et incon tin ence
u rin aire :
un e mo dalité simple et efficace
ICP
Mélanie Bilodeau
Et François Dubé
L’auteure principale est étudiante
de 3e année, programme de physiothérapie, École de réadaptation,
Université de Montréal. Projet
réalisé dans le cadre d’un stage
clinique à l’IUGM en janvier 2012
L’utilisation du TENS en clinique pour le traitement de l’incontinence urinaire et de la douleur périnéale chez la per-­‐
sonne âgée Introduction L’incontinence urinaire (IU) par urgenturie due à une vessie hyperactive et la douleur périnéale chronique sont des problèmes affectant gran-­‐
dement la qualité de vie [5, 6]. Ces deux pro-­‐
blématiques sont rencontrées fréquemment chez les femmes. La prévalence augmente avec l’âge pour l’incontinence urinaire et est plus grande chez les jeunes femmes pour la douleur périnéale chronique [5, 6, 10]. Les interventions privilégiées comprennent les exercices du plan-­‐
cher pelvien, des conseils sur les habitudes de vie et la pharmacothérapie [3, 5, 10]. Par contre, chez une clientèle gériatrique, certaines interventions, dont la médication, demeurent limitées compte-­‐tenu des effets secondaires et de la présence de nombreuses conditions asso-­‐
ciées, incluant les troubles cognitifs [5]. Des études sur l’utilisation de la stimulation ner-­‐
veuse électrique transcutanée (TENS) et percu-­‐
© Mélanie Bilodeau et
François Dubé, 2012
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tanée (PENS) appliquée en distal au niveau du nerf tibial postérieur ont été publiées récem-­‐
ment avec des résultats prometteurs [8]. Le TENS implique une application transcutanée d’un courant alternatif de basse fréquence à l’aide d’électrodes de surface tandis que le PENS est appliquée avec une électrode aiguille. Plusieurs théories ont été proposées afin d’expliquer l’effet de la stimulation du nerf ti-­‐
bial pour la douleur périnéale chronique et l’incontinence urinaire par urgenturie. Pour le traitement de la douleur périnéale, l’effet de la stimulation électrique est expliqué par la théo-­‐
rie du portillon décrit par Melzack et Wall (1965) [9]. Quant à l’incontinence urinaire se-­‐
condaire à une vessie hyperactive, il n’y a pas encore de consensus [8, 9]. L’effet hypertro-­‐
phique sur les muscles du plancher pelvien et l’effet inhibiteur de la vessie via le système sen-­‐
soriel est l’une des théories considérées [8, 9]. La stimulation électrique suscite beaucoup d’intérêt, particulièrement chez une clientèle âgée, puisqu’elle est non invasive, peu coû-­‐
teuse et entraîne très peu d’effets secondaires [5]. Démarche méthodologique Une recension des écrits a été effectuée en janvier 2012. Les bases de données PubMed, Cinahl, et EMBASE ont été consultées sans limi-­‐
ter l’année de publication à l’aide des mots-­‐clés suivants : TENS ou transcutaneous electrical stimulation, percutaneous electrical stimula-­‐
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tion, tibial nerve, urinary incontinence, pelvic pain et elderly. La bibliographie des articles pertinents a été consultée afin de compléter la recherche de la littérature sur le sujet. Résumé de la littérature Dans les études sélectionnées, la population était constituée d’adultes ayant un âge moyen entre 50 et 62 ans et était majoritairement composée de femmes. Le tableau 1 résume les articles inclus dans la recension des écrits. Incontinence urinaire par urgenturie Au sujet de la vessie hyperactive traitée avec le PENS [1, 2, 4, 6, 10] et le TENS [5], les résultats sont prometteurs. En effet, la plupart des études rapportent des changements statisti-­‐
quement significatifs au niveau des différents symptômes urinaires, tels les fuites d’urine, le nombre de protections utilisé, la fréquence mictionnelle diurne et nocturne, le sentiment d’urgence et la qualité de vie. L’utilisation du TENS en combinaison avec des exercices du plancher pelvien est plus efficace que les exer-­‐
cices seuls selon un essai clinique randomisée (ECR) [5]. Deux ECR ont démontré un effet si-­‐
gnificatif suite à l’utilisation du PENS en compa-­‐
raison à un groupe contrôle recevant un trai-­‐
tement placebo [1, 4]. Finazzi-­‐Agrò et al. (2010) rapportent également des gains à 12 mois post-­‐
traitement [1]. Douleur périnéale En ce qui a trait à la douleur périnéale traitée avec le PENS, les résultats de trois études de cohorte pré-­‐post interventions sont contradic-­‐
toires. L’étude de Govier et al. (2001) rapporte une diminution significative de la douleur péri-­‐
néale [2]. Par ailleurs, l’étude de Van Balken et al. (2003) note des améliorations subjectives et objectives chez certains patients, par contre la diminution de la douleur n’est pas statistique-­‐
ment significative [7]. Enfin, l’étude de Zhao et © Mélanie Bilodeau et
François Dubé, 2012
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al. (2008) ne démontre aucun changement sta-­‐
tistiquement significatif [10]. Effets indésirables Dans l’étude de Schreiner et al. (2010), aucun effet secondaire n’a été rapporté avec l’utilisation du TENS [5]. Pour ce qui est du PENS, les effets indésirables étaient rares et mineurs et étaient majoritairement en lien avec l’insertion de l’aiguille (ecchymose, inconfort, saignement léger) [1, 2, 4, 6, 10]. Paramètres utilisés Pour le traitement de la douleur périnéale et l’incontinence urinaire par urgenturie due à l’hyperactivité vésicale, les paramètres étaient similaires d’une étude à l’autre. En général, le traitement durait de 20 à 30 minutes à raison d’une à trois fois par semaine sur 10 à 12 séances. Les patients se plaçaient en position assise ou couchée avec la face plantaire des pieds ensemble. Le positionnement des élec-­‐
trodes était confirmé par la réponse musculaire obtenue (flexion de l’hallux ou des quatre autres orteils). La fréquence du courant variait de 10 et 30 Hz, avec une durée d’impulsion de 200µs en mode continu. L’intensité de stimula-­‐
tion était de 10 à 50 mA pour le TENS [5] et moins de 10 mA pour le PENS [1, 2, 4, 6, 7, 10]. Pour l’étude utilisant le TENS, l’électrode néga-­‐
tive était au niveau de la malléole interne et la positive, 10 cm en proximal sur le chemin du nerf tibial postérieur [8]. Six études recensées ont utilisés le PENS. L’aiguille était insérée de trois à six centimètres proximal de la malléole interne entre le bord postérieur du tibia et le soléaire et l’électrode de surface était appli-­‐
quée sur l’aspect médial du calcanéum [1, 2, 4, 6, 7, 10]. La polarité des électrodes n’est spéci-­‐
fiée dans aucune des études portant sur le PENS. Le tableau 2 résume les paramètres cli-­‐
niques pour l’utilisation du TENS et du PENS. Page 2 de 5
Tableau 1 : Articles inclus dans la recension des écrits Auteurs année Devis N (% de femmes) Âge moyen (É-­‐type) [Étendue] 47,7 (6,9) IU par urgenturie Vessie hyperactive Diagnostic Intervention Schreiner et al. 2010 ECR PEDRO 5/10 52 (100%) Peters et al. 2010 Zhao et al. 2008 ECR PEDRO 8/10 208 (79%) 61,4 (NR) Étude de co-­‐
horte pré-­‐post intervention 18 (100%) 60 (NR) [47-­‐69] Van Balken et al. 2003 Govier et al. 2001 Étude de co-­‐
horte pré-­‐post intervention Étude de co-­‐
horte pré-­‐post intervention 33 (33%) 51,6 (14,5) [25-­‐79] 53 (90%) 57,4 (NR) [24-­‐80] Vessie hyperactive Application du PENS Van Balken et al. 2001 Étude de co-­‐
horte pré-­‐post intervention 37 (73%) 52,5 (NR) [23-­‐74] Vessie hyperactive Application du PENS Finazzi-­‐Agró et al. 2010 ECR PEDRO 6/10 Gr 1 : 44,9 Vessie hyperactive (NR) Gr 2 : 45,5 (NR) Légende : ECR : Essai clinique randomisé; NR : non rapporté; Gr : groupe Gr 1 : PENS Gr 2 : Placebo 35 (100%) Gr 1 : Exercices Kegel et TENS Gr 2 : Exercices Kegel Groupe 1 : PENS Groupe 2 : Place-­‐
bo Application du PENS Douleur périnéale ou sus-­‐pubienne avec symptômes de fréquence ou ur-­‐
gence urinaire Douleur périnéale Application du chronique PENS Résultats Changements significatifs pour la qualité de vie et l’IU chez groupe recevant TENS L’effet thérapeutique du PTNS est dû à la stimulation du nerf tibial post et non à un effet placebo Pas de changements significatifs au ni-­‐
veau de la douleur périnéale ni de la fréquence urinaire Améliorations significatives dans la quali-­‐
té de vie et la douleur Changements statistiquement significa-­‐
tifs pour qualité de vie, douleur, fré-­‐
quence diurne et nocturne, et inconti-­‐
nence urinaire Changements statistiquement significa-­‐
tifs dans les fuites d’urine, nombre de protection utilisées, fréquence et nyctu-­‐
rie et meilleure qualité de vie chez tous a/n fonctionnement physique et social Changements statistiquement significa-­‐
tifs chez le groupe PTNS et aucun répon-­‐
dant dans le groupe placebo © Mélanie Bilodeau et
François Dubé, 2012
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Conclusion Pour citer cette publication :
La stimulation électrique du nerf tibial posté-­‐
rieur (TENS ou PENS) semble être une modalité sécuritaire et peu coûteuse dans le traitement de la douleur périnéale et de l’incontinence urinaire associée à l’hyperactivité vésicale. Mal-­‐
gré certains résultats positifs, il y a un peu d’évidences de l’efficacité de la stimulation électrique pour le soulagement de la douleur périnéale (niveau d’évidence 4). Cependant, plusieurs articles de bonne qualité, dont deux ECR de grande qualité (niveau d’évidence 1a), démontrent l’efficacité de la stimulation élec trique dans le traitement de l’incontinence uri-­‐
naire par urgenturie. Bilodeau, M. et Dubé, F. 2012. « TENS et Incontinence urinaire : une modalité simple
et efficace ». In Impact clinique en physiothérapie gériatrique. En ligne.
www.physioimpact.wordpress.com. Consulté le [...].
RÉFÉRENCES 1. Finazzi-­‐Agrò E, Petta F, Sciobica F, Pasqualetti P, Musco S, Bove P. Percutaneous tibial nerve stimula-­‐
tion effects on detrusor overactivity incontinence are not due to a placebo effect : a randomized, double-­‐Blind, placebo controlled trial. The Journal of Urology, 184 : 2001-­‐2006, novembre 2010. 2. Govier FE, Litwiller S, Nitti V, Kreder KJ JR., Ros-­‐
enblatt P. Percutaneous afferent neuromodulation for the refractory overactive bladder: results of a Tableau 2 : Paramètres cliniques pour l’utilisation du TENS et du PENS TENS [5] PENS [1, 2, 4, 6, 7, 10] Durée d’impulsion 200 µs Intensité de la stimulation 200 µs 10 à 50 mA Fréquence de stimulation 10 Hz ≤ 10 mA 20 Hz Durée des séances 30 minutes 30 minutes Fréquence des séances 1 fois/sem 1 fois/sem Nombre de séances 12 12 Remerciements : Les auteurs souhaitent re-­‐
mercier Chantal Dumoulin, Cara Tannenbaum et Valérie Elliott du CRIUGM pour la révision du texte ainsi que Han Vuong, physiothérapeute à l’IUGM, pour la supervision du stage clinique en rééducation périnéale. Note: Ce texte a été soumis en octobre 2012 dans une version abrégée pour publication dans le Physio-­‐Québec Web. © Mélanie Bilodeau et
François Dubé, 2012
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multicenter study. The Journal of Urology, 165 :1193-­‐1198, avril 2001. 3. Moore K.N., Saltmarche A, Query B. Urinary in-­‐
continence: Non-­‐surgical management by family physicians. Canadian family physician, 49: 602-­‐610, 2003. 4. Peters KM, Carrico DJ, Perez-­‐Marrero RA, Khan AU, Wooldridge LS, Davis GL, MacDiarmid SA. Ran-­‐
domized trial of percutaneous tibial nerve stimula-­‐
tion versus sham efficacy in the treatment of over-­‐
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active bladder syndrome: results from sumit trial. The Journal of Urology, 183 : 1438-­‐1443, avril 2010. 5. Schreiner L, Guimarães dos Santos T, Knorst MR, Gomes da Silva Filho I. Randomized trial of transcu-­‐
taneous tibial nerve stimulation to treat urge urina-­‐
ry incontinence in older women. International Uro-­‐
gynecology Journal, 21: 1065-­‐1070, mai 2010. 6. Van Balken MR, Vandoninck V, Gisolf KWH, Ver-­‐
gunst H, Kiemeney LALM, Debruyne FMJ, Bemel-­‐
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function. Journal of Urology, 166 : 914-­‐918, mars 2001. 7. Van Balken MR, Vandoninck V, Messelink BJ, Vergunst H, Heesakkers JPFA, Debruyne MJ, Be-­‐
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François Dubé, 2012
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