Déterminant

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Déterminant
2 Déterminant
« M. Fourier avait l’opinion que le but principal des mathématiques était l’utilité publique
et l’explication des phénomènes naturels ; mais un philosophe comme lui aurait dû savoir
que le but unique de la science, c’est l’honneur de l’esprit humain, et que sous ce titre, une
question de nombres vaut autant qu’une question du système du monde »
Charles Gustave Jacobi (1830)
Plan de cours
I
II
Définition géométrique du déterminant en dimension 2 et 3 . . . . . . . .
A
Déterminant de deux ou trois vecteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
B
Déterminant d’une matrice carrée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Généralisation de la notion de déterminant . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
A
Déterminant d’une matrice carrée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
B
Calcul pratique du déterminant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
C
Déterminant d’un endomorphisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
D
Déterminant d’une famille de vecteurs dans une base . . . . . . . . . .
E
Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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1
1
3
3
3
5
7
7
7
Le déterminant ayant été étudié en première année, nous nous contenterons ici de rappeler les définitions
et propriétés essentielles de celui-ci sans s’étendre sur la démonstration de certains résultats. Ce chapitre se
veut résolument pratique, le but étant d’apprendre à calculer – dans les cas simples – différents déterminants
à l’aide d’opérations élémentaires ou via des développements par rapport à une ligne ou une colonne.
I – Définition géométrique du déterminant en dimension 2 et 3
A – Déterminant de deux ou trois vecteurs
1 – Déterminant dans le plan
Le plan euclidien est supposé muni d’une base orthonormée directe notée (~ı, ~).
On rappelle que le déterminant de deux vecteurs u
~ et ~
v est défini par :
det(~
u, ~
v ) = ||~
u|| × ||~
v || × sin(~
u, ~
v ) si u
~ et ~
v sont non nuls, det(~
u, ~
v ) = 0 sinon.
det(~
u, ~
v ) n’est rien d’autre que l’aire algébrique du parallélogramme engendré par u
~ et ~
v . Ainsi, det(~
u, ~
v ) = 0 si et
seulement si u
~ et ~
v sont colinéaires. Le parallélogramme
engendré est alors « aplati », son aire est nulle.
~
v
u
~
On démontre alors le résultat suivant :
Parallélogramme engendré par deux vecteurs
Théorème 2.1
(~
u, ~
v ) est une base de R2 si et seulement si det(~
u, ~
v ) 6= 0.
1
CHAPITRE 2. DÉTERMINANT
Proposition 2.2
Le déterminant vérifie les propriétés suivantes :
— bilinéarité : quels que soient u
~, ~
v, w
~ ∈ R2 et λ ∈ R, on a det(λ~
u+~
v , w)
~ = λ det(~
u, w)
~ + det(~
v , w)
~
et det(~
u, λ~
v + w)
~ = λ det(~
u, ~
v ) + det(~
u, w)
~ ;
— antisymétrie : quels que soient u
~, ~
v ∈ R2 , det(~
u, ~
v ) = − det(~
v, u
~).
Théorème 2.3 : Expression du déterminant dans une base orthonormale directe
Si on note (x, y) (resp. (x 0 , y 0 )) les coordonnées du vecteur u
~ (resp. ~
v ) dans la base orthonormale
directe (~ı, ~),
x x 0
= x y0 − y x0
det(~
u, ~
v ) = y y 0
Démonstration
Si u
~ = x~ı + y~ et ~
v = x 0~ı + y 0 ~, alors :
det(~
u, ~
v ) = det(x~ı + y~, x 0~ı + y 0 ~)
= x det(~ı, x 0~ı + y 0 ~) + y det(~, x 0~ı + y 0 ~)
= x x 0 det(~ı,~ı) + x y 0 det(~ı, ~) + y x 0 det(~,~ı) + y y 0 det(~, ~)
= (x y 0 − y x 0 ) det(~ı, ~) = x y 0 − y x 0
„
2 – Déterminant dans l’espace
L’espace euclidien est supposé muni d’une base orthonormée directe notée ~ı, ~, ~k .
On rappelle que le déterminant de trois vecteurs u
~, ~
v et w,
~ également appelé produit mixte, est défini par :
det(~
u, ~
v , w)
~ = (~
u∧~
v) · w
~
det(~
u, ~
v , w)
~ n’est rien d’autre que le volume algébrique
du parallélépipède engendré par u
~, ~
v et w.
~ De plus,
det(~
u, ~
v , w)
~ = 0 si et seulement si u
~, ~
v et w
~ sont coplanaires. Le parallélépipède engendré est alors « aplati »,
son volume est nul.
w
~
~
v
u
~
On démontre alors le résultat suivant :
Parallélépipède engendré par trois vecteurs
Théorème 2.4
(~
u, ~
v , w)
~ est une base de R3 si et seulement si det(~
u, ~
v , w)
~ 6= 0.
Proposition 2.5
Le déterminant vérifie les propriétés suivantes :
— trilinéarité : l’application est linéaire par rapport à chacune de ses variables ;
— antisymétrie : permuter deux vecteurs revient à multiplier le déterminant par −1.
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Mickaël PROST
Lycée Chaptal – PT*
Théorème 2.6 : Expression du déterminant dans une base orthonormale directe
Si on note (x, y, z), (x 0 , y 0, z 0 ) et (x 00 , y 00 , z 00 ) les coordonnées des vecteurs u
~, ~
v et w
~ dans la base
orthonormale directe ~ı, ~, ~k ,
x
det(~
u, ~
v , w)
~ = y
z
x0
y0
z0
x 00 y 00 = x y 0 z 00 + x 0 y 00 z + x 00 yz 0 − x 00 y 0 z − y 00 z 0 x − z 00 x 0 y
z 00 B – Déterminant d’une matrice carrée
On appelle déterminant d’une matrice 2 × 2 ou 3 × 3 le déterminant de ses vecteurs colonnes considérés
comme des éléments de R2 ou R3 .
Théorème 2.7
a
Une matrice M =
c
b
est inversible si et seulement si det(M ) = ad − bc 6= 0.
d
Le résultat est encore vrai pour une matrice d’ordre 3 (et plus généralement pour un entier naturel n non
nul quelconque).
Démonstration
d
Posons N =
−c
−b
et considérons le produit matriciel M N :
a
a
MN =
c
b
d
d
−c
−b
ad − bc
=
a
0
? Si ad − bc 6= 0, alors M est inversible et M
−1
=
1
ad−bc
0
= (ad − bc)I2
ad − bc
d
−c
−b
.
a
? Si ad − bc = 0 alors M N = 02 et M ne peut pas être inversible. En effet, si c’était le cas, on aurait
N = M −1 M N = M −1 02 = 02 , ce qui conduirait à N = 02 , donc à M = 02 , absurde puisque la matrice
nulle n’est pas inversible !
„
II – Généralisation de la notion de déterminant
A – Déterminant d’une matrice carrée
K désignera dans tout le reste du chapitre R ou C.
Théorème / Définition 2.8
On admet qu’il existe une unique application de Mn (K) dans K, appelée déterminant, telle que :
— le déterminant est linéaire par rapport à chacune des colonnes ;
— l’échange de deux colonnes a pour effet de multiplier le déterminant par -1 ;
— le déterminant de la matrice identité I n vaut 1.
On la note det.
a
Pour n = 2, on vérifiera que l’application det :
c
de s’assurer de l’unicité à titre d’exercice.
b
7 ad − bc convient. On laisse le soin aux lecteurs
→
d
-3-
CHAPITRE 2. DÉTERMINANT
Proposition 2.9
Le déterminant d’une matrice qui possède deux colonnes identiques est nul.
Proposition 2.10
Si les colonnes d’une matrice sont liées, alors le déterminant de la matrice est nul.
Démonstration
Posons A = (C1 |C2 | · · · |Cn ) ∈ Mn (K) où C j représente la j e colonne de A.
n
X
Les colonnes étant liées, il existe un entier k tel que Ck =
λjCj.
j=1
j6=k
Par multilinéarité du déterminant,



det(A) = det (C1 |C2 | · · · |Ck | · · · |Cn ) = det C1 |C2 | · · · |
=
n
X
λ j det (C1 |C2 | · · · |Ck | · · · |Cn ) =
j=1
j6=k
n
X
n
X
j=1
j6=k

λ j C j | · · · |Cn 
λj × 0 = 0
j=1
Proposition 2.11
Si A ∈ Mn (K) et λ ∈ K alors det(λA) = λn det(A).
Exemple


2 0 0
On a det 0 2 0 = det(2I3 ) = 23 det(I3 ) = 8.
0 0 2
On admet les propriétés suivantes :
Théorème 2.12
∀A, B ∈ Mn (K)
det( t A) = det(A)
et
det(AB) = det(A) × det(B).
Théorème 2.13
Soit A ∈ Mn (K). A ∈ GL n (K) si et seulement si det(A) 6= 0.
1
Dans ce cas, det(A−1 ) =
.
det A
Démonstration
Montrons seulement l’implication. Si A ∈ GL n (K) alors AA−1 = I n donc det(A) det(A−1 ) = 1. Ainsi,
det A 6= 0. On prouve même au passage que :
det(A−1 ) =
1
det A
„
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Mickaël PROST
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Corollaire 2.14
Deux matrices semblables ont même déterminant.
Démonstration
Si A et B sont semblables, il existe P ∈ GL n (K) telle que B = P −1 AP, donc :
det(B) = det(P −1 AP) = det P −1 det Adet P = det A
„
B – Calcul pratique du déterminant
Soit A = (ai, j ) ∈ Mn (K).
On note Ai, j la matrice obtenue en ôtant la i ème ligne et la j ème colonne de A.
Définition 2.15 : Mineurs et cofacteurs
On appelle :
• mineur relatif à ai, j le scalaire det Ai, j .
• cofacteur de ai, j le scalaire (−1)i+ j det Ai, j .
Exemple


1 2 3
1
2
Soit A = 4 5 6. Alors A2,3 =
.
7 8
7 8 9
1 2
2+3 1 2
= 6.
= −6, le cofacteur associé (−1)
Le mineur relatif à a2,3 vaut 7 8
7 8
Théorème 2.16 : Développement par rapport à une ligne / à une colonne
En conservant les mêmes notations,
n
X
• ∀i ∈ ¹1, nº det A =
(−1)i+ j det(Ai, j )ai, j (développement / ligne i)
j=1
• ∀ j ∈ ¹1, nº
det A =
n
X
(−1)i+ j det(Ai, j ) ai, j (développement / colonne j)
|
{z
}
i=1
cofacteur
Exemple
1
0
On pose A = 
5
0


2 5 −3
8 0
0
. Calculer det(A).
1 3
4
0 −2 2
En développant par rapport à la deuxième ligne, on trouve det(A) = −48.
-5-
CHAPITRE 2. DÉTERMINANT
Déterminant d’une matrice triangulaire :
a
1,1 a1,2 . . . a1,n a
.
.
.
a
.
2,2
2,n
.
..
.. 0
a
.. 2,2
..
= a ×
.
1,1
. = a1,1 × a2,2 × · · · × an,n
..
..
..
0
.
.
. an−1,n 0
0 an,n 0
... 0
an,n
Pour calculer certains déterminants, on pourra opérer sur les lignes et les colonnes pour obtenir des
déterminants de matrices diagonales ou triangulaires. Attention, les opérations du pivot de Gauss modifient
le déterminant ! (valable pour les lignes et les colonnes)
• Ci ↔ C j : on multiplie le déterminant par −1.
• Ci ← λCi :X
on multiplie le déterminant par λ.
• Ci ← Ci +
λ j C j : le déterminant reste identique.
j6=i
Exemple

2 −8 6 8
 3 −9 5 10 
On pose B = 
. Calculer det(B).
−3 0 1 −2
1 −4 0 6
Par opérations successives sur les lignes et les colonnes, on trouve det(B) = −36.


a11 . . . a1n
.
.. 
Soit A =  ..
. . On remarquera que det(A) est un « polynôme en les coefficients de la matrice ».
an1 . . . ann


x
4 2x + 1
x
3  alors det(A) est un polynôme en x (de degré au plus 3).
En particulier, si A =  2
−3x 0
5

Théorème 2.17 : Déterminant par blocs
Soit M une matrice triangulaire par blocs, c’est-à-dire de la forme
A B
M=
0 C
avec A ∈ M p (K), B ∈ M p,q (K), D ∈ Mq (K) et M ∈ M p+q (K).
Alors, det(M ) = det(A) det(C).
B
6 det(A) det(D) − det(B) det(C).
=
D
A
Dans la plupart des cas, det
C
Démonstration
A B
Ip
M=
=
Oqp
0qp D
Opq
D
A
Oqp
B
.
Iq
Exercice 1
1
3
Calculer le déterminant 0
0
0
2
4
0
0
0
5 6
9 7 8 10
2 6
5 .
3 −1 7 0 0
8
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C – Déterminant d’un endomorphisme
E désigne par la suite un K-espace vectoriel de dimension n ∈ N∗ .
Définition 2.18 : Déterminant d’un endomorphisme
Le déterminant d’un endomorphisme f de E est celui de sa matrice dans une base quelconque. On le
note det f .
Théorème 2.19
• det(id E ) = 1.
• Si f , g ∈ L (E), alors det( f ◦ g) = det( f ) det(g).
• f ∈ GL (E) si et seulement si det( f ) 6= 0.
Pour calculer le déterminant d’un endomorphisme, on se ramènera toujours à un calcul de déterminant de
matrice.
D – Déterminant d’une famille de vecteurs dans une base
Définition 2.20
Soient une famille (u1 , . . . , un ) de vecteurs de E et une base B de E. On appelle déterminant de la
famille (u1 , . . . , un ) dans la base B le déterminant de la matrice représentative de la famille (u1 , . . . , un )
dans la base B. On le note detB (u1 , . . . , un ).
On admet alors le théorème suivant.
Théorème 2.21
Soit B une base quelconque de E.
• (u1 , . . . , un ) liée ⇐⇒ detB (u1 , . . . , un ) = 0 ;
• (u1 , . . . , un ) libre ⇐⇒ (u1 , . . . , un ) base de E ⇐⇒ detB (u1 , . . . , un ) 6= 0.
E – Synthèse
Théorème 2.22
Soient B(e1 , . . . , en ), une base de E, f un endomorphisme de E et M sa matrice représentative dans la
base B.
f bijective ⇐⇒ M inversible ⇐⇒ rg(M ) = n
⇐⇒ det(M ) = det( f ) 6= 0
⇐⇒ ( f (e1 ), . . . , f (en )) est une base de E
⇐⇒ det( f (e1 ), . . . , f (en )) 6= 0
B
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