AstraZeneca : l`analyse
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AstraZeneca : l`analyse
Un labo au crible AstraZeneca Quelques années pour changer de look Longtemps focalisé sur les médicaments de masse, le groupe anglo-suédois a pris un virage stratégique en se tournant vers les produits de spécialités. Une orientation nouvelle qu’il espère pourvoyeuse de bon nombre de ses nouveaux produits. Dossier réalisé par Christine Colmont U ne pure pharma, envers et contre tout. Telle est la voie empruntée par AstraZeneca. Pour maintenir ce cap, le laboratoire anglo-suédois n’a pas d’autre choix que d’innover constamment ou d’acquérir des produits prometteurs. La diversification n’est donc pas de mise au siège londonien. Le groupe anglo-suédois préfère concentrer tous ses efforts au renforcement de son pipeline. Et les résultats sont là. Ces deux dernières années, son portefeuille en développement s’est étoffé de 50 %. AstraZeneca compte désormais 157 projets, dont 10 en phase III. Dans le pipeline, de nombreux produits de spécialité en oncologie et en inflammation vont arriver sur le marché à compter de 2009. Parmi les lancements prévus, trois projets sont actuellement menés dans l’oncologie, pour le traitement du cancer du sein, du poumon et de la prostate. Dans le domaine de l’inflammation, de nouveaux mécanismes d’action ont été mis au point pour les maladies rhumatismales et digestives. En neuroscience, deux composés sont entrés en phase II dans le traitement de la maladie d’Alzheimer. Enfin, dans les maladies cardiovasculaires et le métabolisme, deux projets importants sont menés dans la thrombose et – en association avec BMS – dans le diabète. La physionomie du portefeuille opère donc une transformation radicale. Un nouveau pôle biologique Un changement de profil qui s’est déjà amorcé avec le rachat de l’américain MedImmune, en avril, et la création d’un pôle biologique, futur pourvoyeur de vaccins. C’est une nouvelle aventure et une façon de travailler différente qui s’annoncent pour AstraZeneca. Traditionnellement orienté vers les pathologies destinées à de larges populations de patients, habituellement traités et surveillés par des médecins généralistes, le laboratoire s’est Une transformation radicale 46 PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007 résolument tourné vers les produits de spécialités, même s’il entend bien conserver ses médicaments de masse. Il lui reste désormais à redéfinir comment s’organiser dans les années qui viennent pour faire face à cette transformation. L’objectif du laboratoire consiste, en effet, à se doter de 25 % des nouvelles molécules issues de la biotechnologie à compter de 2010. Reste à savoir si l’intégration de MedImmune s’avèrera suffisante pour atteindre cet objectif. Le chiffre d’affaires du pôle biotechnologique constitué de MedImmune et de Cambridge Antibody Technology (CAT) représente 1,3 mil- les trois années à venir. Il est vrai que la protection de son anticancéreux Casodex® devrait s’achever à la mi-août 2008 en Europe. Quant au brevet d’Arimidex®, il expirera mi-2010. Et il faudra attendre 2014 pour que Nexium®/ Inexium® tombe dans le domaine public. Cela étant, le directeur général du groupe, David Brennan, aborde l’avenir avec confiance : « Les fondamentaux du secteur demeurent solides. Du fait du vieillissement de la population, nous devons mettre au point des nouveaux produits pour de nombreuses maladies, mal diagnostiquées ou mal soignées, alors que nous avons une connaissance toujours plus fine des maladies et des traitements existants et futurs, grâce aux progrès scientifiques et technologiques. » liard de dollars de chiffre d’affaires. Un montant considéré encore limité par certains analystes financiers, eu égard aux ventes de 26,5 milliards réalisées l’an dernier par AstraZeneca. Le troisième volet stratégique identifié par les dirigeants consiste à se lancer dans une recherche intensive d’externalisation, en recourrant à des contrats de partenariat ou en réalisant des acquisitions. A l’avenir, il paraît cependant peu probable qu’AstraZeneca réalise une acquisition de la même taille que celle de MedImmune. Autre orientation choisie : définir précisément les contours du cœur de métier et ne pas se disperser. Quitte à céder les activités périphériques. Un nombre réduit d’expirations de brevets La nouvelle orientation d’AstraZeneca s’inscrit dans un contexte plus difficile pour le secteur pharmaceutique, confronté aux pressions sur les prix, à la hausse des coûts, aux obstacles réglementaires, au renforcement de la concurrence sur le marché et aux expirations de brevets. L’enjeu est de taille pour le groupe anglo-suédois même s’il sera confronté à un petit nombre d’expirations de brevets dans Renforcement des capacités de recherche La stratégie déployée paraît judicieuse à certains spécialistes du secteur de la pharmacie ; lesquels louent le recentrage, l’externalisation et le renouvellement complet du portefeuille. D’aucuns redoutent néanmoins que sa mise en œuvre ait été trop tardive. Une opinion réfutée par David Brennan (voir page 48) : « Nous sommes persuadés que nous suivons la bonne voie pour atteindre nos objectifs à long terme. Certains changements récents, comme la mise en place de notre programme d’accès aux innovations scientifiques, à l’extérieur d’AstraZeneca, représentent un changement majeur de notre état d’esprit. En outre, d’autres évolutions, comme notre volonté de transformer le groupe en un acteur majeur de la biopharmaceutique, nous ouvrent une approche nouvelle pour les traitements et notre R&D. Et ceci, en renforçant nos capacités de recherche pour les grandes molécules et les vaccins. Cette approche nous permet d’être actifs dans un segment de la pharmacie qui enregistre la croissance la plus forte depuis quelques années. » n La filiale française au cœur de la stratégie Première filiale européenne, la France occupe la troisième place mondiale après les EtatsUnis et le Japon. Ces trois dernières années, elle est parvenue à conserver ce rang. Et ceci, malgré la stagnation de son chiffre d’affaires depuis 2004, conséquence de la perte de plusieurs brevets dont l’antiulcéreux Losec®/ Mopral®. « C’est une filiale importante. Et pas seulement sur le plan commercial. Nous essayons d’apporter nos talents pour tous les métiers d’AstraZeneca dans le monde », fait remarquer son président France, Robert Dahan. La filiale compte effectivement un centre de recherche spécialisé en oncologie à Reims et deux unités de production (l’une à Reims, l’autre à Dunkerque) spécialisées dans la synthèse chimique, la formulation, le packaging et la distribution. D’ailleurs, Dunkerque est devenu le site mondial pour la synthèse chimique de Nexium®/Inexium® et le producteur d’aérosols doseurs pour tous les traitements de l’asthme du groupe. Le siège de la France, à Rueil Malmaison, comporte aussi une équipe dédiée conduisant des programmes de développement clinique pour le compte d’AstraZeneca monde. La filiale française rayonne même au delà des frontières de l’Hexagone. « Elle est parvenue à attirer bon nombre de personnes de valeur qui font aujourd’hui des carrières internationales et qui, j’espère, re- viendront apporter leur expertise en France. C’est un élément dont ROBERT DAHAN. je suis extrêmement fier », se félicite Robert Dahan. S’agissant des prochains lancements, AstraZeneca France n’aura probablement pas de nouveaux produits à proposer au corps médical en 2008 et 2009. Ce qui ne veut pas dire qu’aucune d’extension d’indication de produits existants ne sera commercialisée. A l’horizon 2010, de nouveaux lancements dans les domaines stratégiques traditionnels d’AstraZeneca et dans la biotechnologie sont prévus, grâce notamment à l’apport de MedImmune (voir ci-dessus). 47 11 DÉCEMBRE 2007 - PHARMACEUTIQUES David Brennan, CEO d’AstraZeneca Le labo accélère sur la biotech Spécialisé dans la seule pharmacie, le numéro cinq mondial a franchi un grand pas en avant avec l’acquisition de la firme américaine de biotechnologie MedImmune, au printemps 2007. Quelle est la stratégie du groupe ? Comment comptezvous enrichir votre portefeuille d’activités ? ● Notre objectif consiste à changer réellement la vie des patients en leur fournissant des médicaments performants. Notre stratégie repose sur trois axes. Tout d’abord, nous renforçons notre portefeuille de nouveaux produits, issus de nos propres laboratoires de recherche et accédons aux innovations scientifiques à l’extérieur d’AstraZeneca. Ensuite, nous optimisons tous les médicaments que nous commercialisons, via une gestion rigoureuse de leur cycle de vie et l’excellence du service client. Et enfin, nous remettons à plat notre structure de coûts pour favoriser les investissements en R&D, tout en recourrant à l’externalisation. Et ceci, tout en améliorant l’accès à nos médicaments. testinales. Nous sommes également l’un des leaders mondiaux dans les produits cardiovasculaires où nous possédons plus de 40 ans d’expérience. Enfin, nous occupons une position forte dans l’oncologie. Comment gérez-vous l’intégration de MedImmune, la société de biotechnologie que vous avez rachetée fin avril ? ● Nous avons cherché à donner à MedImmune une indépendance opérationnelle, tout en alignant sa stratégie sur la nôtre et en nouant une collaboration étroite avec le reste du groupe. Nous conserverons la flexibilité et l’esprit d’entreprise de cette société. Dans certains domaines, cette entité restera autonome. Le « nouveau » MedImmune sera associé à Cambridge Antibody Technology et à nos autres activités en biotechnologie, telles AstraZeneca est la 5ème entreprise pharmaqu’Arrow et Abgenix. Cette nouvelle organiceutique mondiale. Quel rang souhaitesation donnera naissance à une société intériez-vous atteindre ? grée verticalement, ce qui est moins risqué ● Notre place dans le classement monque de créer notre propre activité de biodial n’est pas notre première préoccupatechnologie étape par étape. Synonyme Trois axes tion. Il nous paraît plus important de de transformation pour AstraZeneca, jouer un rôle de premier plan dans les l’acquisition de MedImmune nous perstratégiques aires thérapeutiques pour lesquelles nous met de concrétiser – en une seule opéradisposons de ressources suffisantes en tion – nos ambitions dans la biotechnoloR&D et en marketing. En nous appuyant gie. Elle nous place parmi les dix premiers sur une gamme solide de médicaments, nous mondiaux et consolide notre position de leadisposons d’un bon positionnement dans la pluder vis-à-vis de nos pairs de la pharmacie. Notre part de nos spécialités. Par exemple, AstraZeneca est un objectif consiste à avoir 25 % de nouveaux composés isacteur majeur dans le traitement des affections gastro-in- sus de la biotechnologie d’ici à 2010. En outre, le secteur 48 PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007 AstraZeneca Un labo au crible ou avec d’autres laboratoires pharmaceutiques constituent un axe majeur de notre stratégie. Nous pouvons nous appuyer sur des atouts remarquables pour mettre au point des médicaments essentiels répondant à des besoins non satisfaits. Mais nous savons qu’AstraZeneca ne possède pas le monopole de l’innovation, ni celui des nouveaux composés prometteurs. C’est pourquoi nous avons mis en place une fonction de planification stratégique et de développement de l’activité (Strategic Planning & Business Development – SPBD). Travaillant en étroite collaboration avec leurs confrères de la R&D, nos équipes SPBD identifient les opportunités externes dans nos principaux domaines : les neurosciences, l’oncologie/ infectiologie, les maladies cardiovasculaires/ gastro-intestinales. Et enfin, la pneumologie/ inflammation. Nous disposons par ailleurs d’une équipe spécialisée dans les nouvelles opportunités au delà de ces domaines. Nous sommes également très actifs en matière de partenariats. Depuis janvier 2006, nous avons conclu un peu de moins vingt accords majeurs qui vont des acquisitions classiques sous licence aux accords d’intéressement, en passant par les rachats de MedImmune, de CAT, de Kudos et d’Arrow. DAVID BRENNAN, CEO D’ASTRAZENECA. de la biotechnologie se caractérise par des marchés à croissance rapide, des produits aux cycles de vie plus longs, une meilleure chance de réussite de la recherche et une pression moindre sur les prix. En fait, l’acquisition de MedImmune nous a permis de renforcer notre pipeline de R&D de manière significative, de diversifier et de développer nos capacités de recherche. Nous menons désormais trois approches technologiques : les petites molécules, les produits biologiques ou les grandes molécules et, enfin, les vaccins. Votre prochaine acquisition sera-t-elle plutôt une opération d’envergure ou aura-t-elle une taille plus modeste ? ● Le développement de notre portefeuille de R&D restera notre première priorité. L’externalisation y jouera d’ailleurs un rôle essentiel. Nous sommes toujours à l’affût d’opportunités externes, même s’il est peu probable qu’elles seront de la même taille que MedImmune. Les alliances avec des entreprises de biotechnologie représentent-elles un pilier de votre développement ? ● Absolument. Les partenariats dans la biotechnologie L’année dernière, AstraZeneca a focalisé son activité sur un nombre réduit de domaines thérapeutiques. A l’avenir, quelle sera votre politique ? ● A travers ce recentrage, nous voulons nous assurer que nos domaines de recherche bénéficient en priorité de nos ressources scientifiques. En effet, pour les activités présentant les meilleures opportunités, nous sommes persuadés que nos compétences pourront vraiment faire la différence. Nous avons développé certains domaines comme le diabète/l’obésité, l’analgésie, l’infection et les dispositifs inhalatoires, tout en maintenant notre présence dans d’autres, comme la maladie d’Alzheimer, l’asthme, l’oncologie, la schizophrénie, les troubles bipolaires et la dépression/l’anxiété. En fait, le recentrage vient parfaire nos efforts d’amélioration de l’efficacité de nos processus internes de R&D et décisionnels. Ainsi, nous pouvons rapidement éliminer les candidats médicaments au potentiel moins élevé et nous concentrer sur les produits susceptibles de déboucher sur des avancées majeures dans le domaine de la santé. Du coup, je sais que désormais nos ressources sont affectées à l’éventail de secteurs thérapeutiques les mieux adaptés à nos compétences traditionnelles et nouvelles en R&D. Et nous pouvons ainsi proposer de nouveaux médicaments aux patients dans les domaines où les besoins sont loin d’être satisfaits. Quels sont les prochains lancements prévus ? Leur potentiel vous paraît-il suffisant pour assurer vos relais de croissance future ? ● À l’heure actuelle, dix molécules se trouvent en phase III, ce qui signifie que nous commençons à récolter les fruits des efforts fournis pour étoffer notre pipeline. Parmi ces produits, je citerai : Zactima® et Recentin®, deux anticancéreux oncologiques ciblant les tumeurs solides ; le 49 DÉCEMBRE 2007 - PHARMACEUTIQUES Un labo au crible AstraZeneca LE SITE DE SÖDERTALJE EN SUÈDE. Motavizumab®, qui traite les infections virales des nourrissons ; l’anticoagulant AZD6140 ; le Saxagliptin® et le Dapagliflozin® pour le traitement du diabète ; et enfin, l’AZD4054, qui s’attaque au cancer de la prostate hormono-résistant. Le potentiel de ces composés nous paraît significatif. Ces deux dernières années, l’ensemble du pipeline a progressé de 50 %. Le nombre de projets en phase III a également augmenté dans les mêmes proportions pour la seule année 2006. Au total, 157 projets se trouvent dans notre portefeuille, y compris les projets de MedImmune, et plus d’une douzaine sont des produits candidats aux essais cliniques. Comment est organisé votre département recherche ? Prévoyez-vous d’en réduire le coût ? Comment ? ● Pour évoluer, notre R&D avait besoin de retrouver ses principes de base. Ce qui nous a conduit à remettre en question certaines pratiques installées depuis de nombreuses années dans la recherche et la mise au point des médicaments. Nous avons soigneusement passé en revue le travail effectué, décomposé chaque étape en éléments individuels et commencé par le pré-clinique. Nous avons, par ailleurs, déterminé le temps nécessaire 50 PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007 entre l’identification et l’optimisation des composés. Ainsi, nous avons réduit la période d’optimisation de 30 à 18 mois pour les maladies cardiovasculaires et gastrointestinales. Les premiers signes sont encourageants : en tout juste six mois, au premier semestre 2007, 14 nouvelles molécules sont entrées en phase I, soit deux de plus que pour toute l’année 2006, qui elle-même avait atteint un niveau record. S’agissant de la phase I, nous avons rapidement accéléré les études toxicologiques d’un mois et abaissé la durée de 9,3 à 6,2 mois. Cela étant, ces modifications ne débouchent pas toutes sur une baisse des coûts. Cependant, pour un projet oncologique en phase I, la durée entre la rédaction du protocole et les essais sur les premiers sujets a été réduite de trois mois, ce qui représente un gain de temps et des économies considérables. Nous espérons que nous serons en mesure de faire de même pour l’ensemble de notre portefeuille. S’agissant de la phase II, les progrès technologiques ont permis d’en réduire la durée de développement. Nous pouvons alors mener des études de moindre envergure et diminuer le coût et la durée du recrutement des patients. Voici donc quelques exemples de la manière dont nous réorganisons la R&D. D’un point de vue général, notre intervention porte sur tous les principaux aspects du processus : clinique, réglementaire, pharmaceutique et analytique. Ainsi, nous sommes sûrs d’optimiser nos coûts et de remettre nos ressources en phase avec nos aires thérapeutiques. La croissance de votre chiffre d’affaires est supérieure à celle du marché. Quel est le secret de votre succès ? ● D’après nos prévisions, cinq produits clés – Arimidex®, Crestor®, Nexium®, Seroquel® et Symbicort® – devraient continuer à stimuler notre croissance à court et moyen terme. En 2006, ces médicaments ont généré un chiffre d’affaires de plus de 13 milliards de dollars, soit une hausse de 13 % par rapport à l’année précédente. Naturellement, la gestion du cycle de vie – à l’image de Seroquel® XR et de Symbicort® SMART – garantit une meilleure valeur de nos produits, tout en proposant de meilleurs traitements aux patients. n Sur l’attractivité de la France « Le débat engagé sur les prix de référence et les équivalences thérapeutiques n’est peut-être pas la meilleure voie pour récompenser l’innovation et la stimuler. Mais, à l’instar de nombreux pays, la France a aussi des côtés positifs. Le pays bénéficie d’un réseau de scientifiques reconnus, notamment pour l’oncologie et dans les maladies neurodégénératives. Outre son ouverture à l’innovation, son marché pharmaceutique se caractérise par son importance stratégique pour l’économie du pays. » Un labo au crible AstraZeneca Bourse Big n’est pas toujours beautiful Dans des marchés financiers agités, les pharmaceutiques pourraient revenir en force. Et l’action AstraZeneca reprendre des couleurs en Bourse. L a vie est loin d’être un long fleuve tranquille pour une « pure pharma ». Travailler dans le secteur n’est pas dénué de risques. Loin de là ! Pour maintenir sa croissance, voire l’accélérer, un groupe est ainsi contraint de renouveler son portefeuille au moins à la vitesse à laquelle il disparaît. Et dès qu’il est en panne d’innovation, il verra la croissance de ses résultats s’essouffler, voire disparaître. Aux périodes d’euphorie succèdent des phases de vaches maigres. C’est ainsi qu’AstraZeneca devrait connaître deux ou trois prochaines années difficiles. Il s’est certes doté de molécules prometteuses mais qui prendront le relais de sa croissance … en 2010. Ce n’est donc pas un hasard si son bénéfice avant impôt avant impôt a reculé de 14 % au troiDes molécules sième trimestre 2007, à 1,88 milliards prometteuses de dollars. Pour l’ensemble de l’année, le bénéfice par action (actualisé et hors frais de restructuration), devrait s’établir entre 3,98 et 4,13 dollars (contre 3,86 dollars en 2006). Le directeur général exécutif David Brennan précise que « si le montant de la perte de MedImmune, consolidé sur sept mois, s’établissait finalement entre 30 et 35 cents, nous pourrons rester dans notre fourchette indicative (entre 3,60 et 3,75 dollars initialement annoncé). Désormais, nous estimons que la contribution outre-Atlantique de Toprol-XL® aux résultats de toute l’année s’élèvera approximativement à 0,38 dollar par action ». Parallèlement, les programmes d’amélioration de la productivité et de l’efficacité progressent. Le groupe a renforcé son pipeline avec deux molécules supplémentaires entrées en phase III au troisième trimestre, portant à dix le nombre total de projets dans cette phase. Enfin, son aspiration à devenir un acteur majeur des produits biologiques s’est concrétisée avec la création d’un « nouveau » MedImmune. Mais le marché a, en effet, jugé un peu excessif le montant déboursé pour l’acquisition de la biotech américaine (15,6 milliards de dollars). 52 PHARMACEUTIQUES - DÉCEMBRE 2007 Un retour à l’actionnaire important Pour compenser le recul de ses résultats, AstraZeneca soigne particulièrement ses actionnaires, en leur distribuant un beau dividende et en procédant à des rachats d’actions (pour quatre milliards de dollars en 2007). Une politique qui a permis de limiter la baisse du titre cette année (- 20 %). « Nous apportons à nos actionnaires toute l’attention dont nous sommes capables, explique David Brennan. Notre stratégie a été élaborée pour qu’ils bénéficient d’un bon retour et d’une croissance de long terme ». Ainsi en 2005, le groupe a lancé une politique de distribution large du résultat et, depuis lors, le dividende a augmenté de 83 % et 7,1 milliards de dollars ont été consacrés aux rachats d’actions. Cette distribution généreuse devrait perdurer en 2007 tout en continuant d’investir dans le pipeline. Le modèle de développement d’AstraZeneca a changé. Toute la question est d’évaluer ses chances de réussite. « Big » n’est pas toujours synonyme de « beautiful » dans la pharmacie. Un groupe de la taille qu’AstraZeneca pourra-il continuer à enregistrer une croissance supérieure au marché ? Les avis des analystes sont pour le moins partagés. Si à court terme, des turbulences ne sont pas exclues, le potentiel de la valeur n’est sans doute pas épuisé à plus long terme. D’autant qu’avec un avis de gros temps sur les marchés financiers, toujours secoués par la crise des « subprimes », les valeurs pharmaceutiques, plutôt défensives et sous-évaluées, reviennent en force. De quoi encore engranger quelques gains appréciables sur l’action AstraZeneca. n