sortie possibles lbo
Transcription
sortie possibles lbo
LA LETTRE DES FUSIONS-ACQUISITIONS ET DU PRIVATE EQUITY Lundi 23 juin 2014 AU SOMMAIRE Dossier Les clauses de sortie dans les opérations de private equity l S ortie de LBO par IPO : le grand retour ? p2 l R éussir sa sortie (fiscale) p3 l onsidérations fiscales et sociales C autour de la sortie du dirigeant partant en retraite p4 l C lauses de leaver : peut-on déterminer le prix librement ? p6 l D e l’importance de la maîtrise de la conduite du processus de sortie p8 Actualités Cette lettre est imprimée sur du papier recyclé l M anagement package : l’employeur pris en sandwich p9 Actualités - International l l «Treaty shopping» : lorsque invoquer une convention fiscale devient suspect p10 L’impact des nouvelles règles de lutte contre les instruments hybrides sur les LBO p11 Supplément du numéro 1275 du 23 juin 2014 EDITORIAL Que le meilleur gagne ? T outes les entreprises ne peuvent pas faire l’objet d’un LBO. Mais lorsqu’une entreprise réunit les caractéristiques propres à intéresser un fonds de private equity, on peut se demander si, à l’occasion de sa mise en vente, une autre entreprise peut s’imposer dans la compétition autrement qu’en surpayant l’actif. Dès le départ, le process se révèle «clivant». Notamment lors de la «management presentation», où l’on observe souvent deux attitudes : le fonds, qui achète pour revendre, s’intéresse de très près au business plan ; le management, étant vendeur mais aussi acheteur, traque toute source d’optimisation. De son côté, l’entreprise se concentre sur le «business», les synergies, les parts de marché, et a pour habitude de demander des garanties, alors que les fonds savent très bien s’en passer. Deux approches différentes, l’une tirant le business plan vers le bas, l’autre pariant sur sa face cachée. Le fonds a moins de contraintes de droit de la concurrence et pas de contraintes internes en matière de droit du travail. Il est le seul à pouvoir promettre au management des gains sans commune mesure avec le salaire offert à un cadre, même si la remise en cause régulière des management packages en matière fiscale, la taxe à 75 % et les velléités de taxation des Urssaf rendent les choses beaucoup moins attractives et soumises à contentieux. En revanche, à la différence de l’entreprise, il a besoin de financer une part non négligeable du prix d’acquisition par recours à l’emprunt, ce qui peut créer des tensions sur l’entreprise et le management, parfois irréversibles quand le «business» ne progresse pas comme attendu. L’entreprise, elle, doit traiter avec plus d’acuité les aspects de droit de la concurrence, s’assurer que les aspects sociaux ne sont pas un obstacle au rapprochement mais, bien souvent, n’a pas à gérer la contrainte du financement. La cible n’aura pas à consacrer une grande partie de ses cash-flows disponibles au remboursement de la dette. Reste que, si l’entreprise ne peut offrir de package management, le management peut, dans un LBO, perdre son investissement en cas de retournement de la conjoncture. Pour l’industriel, la valeur ne se crée pas en quelques années mais se bâtit sur le long terme. C’est bien sur ce volet industriel que l’entreprise doit mettre l’accent. Cela étant dit, une fois l’investissement réalisé, le fonds va légitimement chercher à céder sa participation à l’issue d’une certaine période en espérant réaliser le multiple le plus élevé possible. Cette sortie peut intervenir dans diverses circonstances et selon plusieurs modalités. Les questions posées sont plurales et les clauses des pactes qui traitent de cette sortie font toujours l’objet d’âpres négociations. Vous l’aurez compris, nous avons choisi de consacrer ce nouveau numéro à la sortie du fonds d’investissement. Nous vous en souhaitons une très bonne lecture. n Philippe Rosenpick, avocat associé Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity Sortie de LBO par IPO : le grand retour ? C Par Arnaud Hugot, avocat associé en corporate-M&A. Il assiste des industriels, des fonds d’investissement et des managers dans le cadre de tous types d’opérations de fusionacquisition et de private equity, tant nationales qu’internationales. [email protected] et Marc-Etienne Sébire, avocat associé, responsable Marchés de Capitaux. [email protected] 2 Lundi 23 juin 2014 inven et Carlyle avec Numericable, parallèles, qui nécessitent une grande KKR avec Tarkett, ou encore le fonds disponibilité et implication du management de anglais Hellman & Friedman aux côtés la société : de GDF Suez et Total avec GTT (Gaztransport & – chantier corporate : adaptation des statuts et Technigaz) : la fin de l’année 2013 et le début de la gouvernance de la société à un contexte de l’année 2014 ont été les témoins d’une forte de société cotée, négociation des termes des activité du marché de l’IPO sous l’impulsion des éventuels pactes d’actionnaires et engagements fonds d’investissement. de lock-up ; Ce mouvement ne semble pas faiblir et plusieurs – chantier due diligence : mise en place de la opérations importantes sont attendues en data room, etc. ; 2014, avec notamment l’introduction en Bourse – chantier documentation : rédaction du de Spie, détenue aujourd’hui entre autres par document de base, de la note d’opération et, le Ardian et Clayton Dubilier & Rice, ou celle cas échéant (en cas de placement international d’Elior, contrôlée à ce jour par Charterhouse et auprès d’investisseurs institutionnels), de Chequers Capital. l’international offering memorandum, rédaction L’introduction en Bourse redevient-elle une du contrat de placement et de garantie, liaison option crédible de sortie pour les fonds avec les autorités de marché, etc. ; d’investissement ? Plusieurs facteurs semblent – chantier comptable : travaux avec les être à l’origine de ce retour en grâce de l’IPO. commissaires aux comptes, rédaction du Tout d’abord, le rebond comparatif commenté du marché boursier, des comptes (MD&A et sa bonne tenue en - management «Le marché boursier semble 2013, permettent aux discussion & analysis) ; donc aujourd’hui représenter – chantier marketing : investisseurs d’espérer des valorisations définition de l’equity une option de sortie plus qui rendent story, présentation ouverte, même si elle ne aujourd’hui plus analystes, roadshows attrayant le recours investisseurs, supports peut être adaptée à toutes au marché. Ensuite, commerciaux ; les performances – chantier social : les entreprises.» opérationnelles consultation de nombreuses des institutions sociétés détenues par des fonds au cours de représentatives du personnel, définition ces derniers mois, l’intérêt des investisseurs d’éventuelles formules d’intéressement, etc. pour les entreprises en croissance et le retour Les sociétés contrôlées par des fonds des investisseurs américains sur les valeurs d’investissement sont généralement plutôt européennes contribuent également à ce nouvel mieux armées pour traiter les chantiers appétit pour les introductions en Bourse. corporate et due diligence, pour avoir déjà dû Le marché boursier semble donc aujourd’hui assimiler des méthodes d’organisation et de représenter une option de sortie plus ouverte, reporting. Cet acquis facilitera la présentation même si elle ne peut être adaptée à toutes les de la société au marché lors de l’IPO, et sera entreprises. Le marché boursier est sélectif et également utile pour satisfaire aux obligations convient aux entreprises en croissance dont le accrues d’information périodique et permanente niveau d’endettement doit être compatible avec propres aux sociétés cotées. les attentes du marché. Il convient enfin de rappeler que l’introduction En outre, l’introduction en Bourse est un en Bourse n’offre pas toujours une liquidité processus complexe dont la lourdeur ne doit suffisante pour les fonds : la sortie ne pouvant pas être sous-estimée. Avec l’assistance de être réalisée en une fois, les fonds doivent ses banques partenaires et de ses conseils attendre au gré des fluctuations du marché des juridiques, la société candidate à l’IPO devra fenêtres de sortie par blocs qui peuvent prendre ainsi mener à leur terme plusieurs chantiers plusieurs années. n Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity Réussir sa sortie (fiscale) Les composantes fiscales des sorties de LBO ont été grandement impactées par les récentes lois de finances. Intégrer ces évolutions dès la négociation des accords de sortie est l’une des clés de la réussite fiscale ultérieure de la sortie de l’investissement. En voici un rapide tour d’horizon. I nvestisseurs personnes physiques : une sortie «par le haut» D’une manière générale, une plus-value demeure moins fiscalisée qu’un dividende. Une simple détention d’actions pendant deux ans permet de bénéficier d’un abattement à l’impôt sur le revenu de 50 %, contre 40 % pour un dividende. Cet avantage s’accroît encore sensiblement lorsque la sortie intervient après huit ans de détention (abattement de 65 %) ou lorsque le particulier est considéré comme un investisseur «privilégié» (dirigeant partant à la retraite, «pigeon») qui bénéficie d’abattements «renforcés» allant jusqu’à 85 % de la plus-value. Les investisseurs particuliers privilégieront donc une sortie par voie de cession plutôt que par voie de rachat (par la société émettrice), soumis en principe au régime fiscal des dividendes. De même, en cas de regroupement au sein d’une holding de co-investissement, ils veilleront à négocier la vente des titres de la holding (ou son absorption préalable par la cible). Managers-investisseurs : le choix des actions… de préférence Le temps des bons de souscription d’actions (BSA) paraît révolu : ces bons ne peuvent plus, depuis le 1er janvier 2014, être souscrits en PEA, et, surtout, ils sont pénalisés par rapport aux supports «actions» puisque leurs gains de cession n’accèdent pas au bénéfice des abattements pour durée de détention. Les managers-investisseurs préféreront donc généralement souscrire des actions ordinaires ou des actions de préférence qui, si elles ne peuvent plus être inscrites au PEA depuis le 1er janvier 2014, rentrent en principe dans le champ de ces abattements. Opérations d’apport ou de donation préalables à la cession : un intérêt préservé Les opérations «d’apport-cession» sont dorénavant encadrées par la loi fiscale. Désormais, un régime de report d’imposition s’applique en cas d’apport de titres par un particulier à une société qu’il contrôle. En cas de cession de ces titres dans les trois ans de l’apport, le report d’imposition n’est maintenu que si ladite société remploie, dans les deux ans qui suivent, au moins 50 % du produit de cession dans un investissement «économique» défini par la loi. La stratégie d’apport de titres à une holding avant une cession conserve donc tout son intérêt, pour autant que le réinvestissement envisagé soit éligible au régime du report et qu’il représente au moins la moitié du prix de cession. La quotité de titres apportés à la holding devra ainsi être finement calibrée en conséquence. L’intérêt des opérations de «donation-cession» demeure également, puisque le dispositif restrictif adopté fin 2012 a été censuré par le Conseil constitutionnel. La sortie de l’investissement peut donc être le moment propice pour une transmission patrimoniale, une donation de titres en amont de leur cession ultérieure par les donataires ayant pour effet mécanique de «purger» la plus-value latente. Le donateur prendra toutefois garde à ne pas se «réapproprier» le produit de cession afin de ne pas voir l’opération contestée par l’Administration sur le terrain de l’abus de droit. La sortie des investisseurs soumis à l’impôt sur les sociétés : intérêt d’une distribution préalable ? L’opportunité d’une distribution préalable à la cession des titres doit être revisitée. Les plusvalues demeurent imposables à hauteur de 12 % de leur montant en cas de détention des titres pendant plus de deux ans, contre 5 % pour les dividendes. Une distribution préalable permettait donc souvent aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) de diminuer le coût fiscal de leur sortie d’investissement. L’instauration d’une contribution additionnelle de 3 % sur les distributions a toutefois rendu ce choix fiscalement plus onéreux dans la majorité des cas. Quant aux fonds d’investissement constitués en FCPR, ils privilégieront aussi la sortie par cession pour sécuriser le régime d’exonération des plusvalues à long terme réservé à leurs investisseurs soumis à l’IS.n Par Laurent Hepp, avocat associé, spécialisé en fiscalité, intervenant tant en matière de fiscalité des entreprises et groupes de sociétés qu’en fiscalité des transactions et private equity. [email protected] et Philippe Gosset, avocat spécialisé en fiscalité, intervenant en matière de fiscalité des entreprises et de groupes de sociétés, notamment dans le cadre d’opérations d’acquisition et de restructuration. Il est chargé d’enseignement dans le master 2 finance d’entreprise de l’université Paris-Dauphine. [email protected] Lundi 23 juin 2014 3 Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity Considérations fiscales et sociales autour de la sortie du dirigeant partant en retraite Le départ en retraite du dirigeant-créateur est à l’origine de nombreuses opérations de LBO. Dans ce contexte, le repreneur exige souvent une implication du dirigeant durant la période de transition et il importe pour ce dernier de bien maîtriser les conséquences fiscales et sociales de son maintien au capital ou à l’effectif de la société cédée. C Par Thierry Romand, avocat associé spécialiste en droit du travail et de la Sécurité sociale, intervenant régulièrement sur les aspects sociaux d’opérations de private equity. [email protected] et Stéphane Bouvier, avocat, spécialiste en fiscalité, conseillant divers fonds pour la structuration de leurs acquisitions en France et à l’étranger. [email protected] 4 Lundi 23 juin 2014 onserver une participation ses droits à la retraite et cesser toute fonction minoritaire : oui, mais en dans les deux années suivant ou précédant la respectant un calendrier précis. cession), mais également aux titres cédés. Le maintien du dirigeant historique au capital En effet, lorsque les titres ne font pas l’objet de la société cible est souvent imposé par les d’un démembrement, la cession n’est éligible au repreneurs car il permet de différer – voire régime de faveur que si elle porte sur l’intégralité d’éviter, si le repreneur vise un LBO secondaire des parts ou actions détenues par le dirigeant. – le paiement du prix relatif aux titres conservés Lorsque le repreneur impose au dirigeant une par le dirigeant. sortie échelonnée du capital de la cible, ce Si la sortie dernier ne se trouve échelonnée constitue pas exclu de facto du également un moyen bénéfice du régime «La sortie échelonnée […] d’associer le dirigeant de faveur au motif est susceptible d’exclure au développement qu’il ne respecterait de la société cédée pas cette condition de l’intéressé du régime fiscal à court terme, il cession totale. Ceci de faveur réservé aux convient de garder en étant, l’administration mémoire qu’elle est fiscale ne considère dirigeants prenant leur susceptible d’exclure la condition comme retraite si un calendrier l’intéressé du régime remplie que s’il cède fiscal de faveur l’intégralité de ses précis n’est pas respecté.» réservé aux dirigeants titres dans les 24 prenant leur retraite mois qui précèdent la si un calendrier précis cessation des fonctions n’est pas respecté. ou le départ en retraite (dernier des deux Rappelons que, depuis le 1er janvier 2014, les événements) ou dans les 24 mois qui suivent la plus-values de cession de titres constatées par cessation des fonctions ou le départ en retraite les dirigeants à l’occasion de leur départ en (premier des deux événements). retraite sont imposées au barème progressif Ainsi, et dès lors que ces périodes ne peuvent de l’impôt sur le revenu mais qu’elles peuvent être cumulées, un dirigeant qui céderait la être réduites – sous certaines conditions – d’un majorité de son capital en juin 2014, ferait valoir abattement fixe de 500 000 euros et d’un ses droits à retraite en novembre 2014, cesserait abattement pour durée de détention pouvant ses fonctions en juin 2015, puis céderait dans la atteindre 85 %. foulée sa participation minoritaire se trouverait Le cumul de l’abattement fixe et de l’abattement exclu du régime de faveur. proportionnel reste soumis au respect d’un Ce n’est que lorsque la cessation des fonctions certain nombre de conditions tenant notamment et le départ en retraite sont concomitants à la société dont les titres sont cédés (il faut par que l’administration fiscale accepte, à titre exemple qu’elle réponde à la définition de PME dérogatoire, de cumuler les cessions antérieures communautaire), au cédant (qui doit avoir été et postérieures à ce double événement, sans dirigeant pendant les cinq années précédant la pour autant qu’il puisse s’écouler un délai cession, avoir détenu au moins 25 % des droits supérieur à 24 mois entre la première et la de vote ou des droits financiers, faire valoir dernière cession. Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity Dans ce contexte, le dirigeant souhaitant bénéficier du régime de faveur doit privilégier une cession totale de ses titres en une fois, et ceci d’autant plus lorsque la date de son départ en retraite ne coïncide pas avec la cessation définitive de ses fonctions dans la société dont les titres sont cédés. mandat social de SA, SAS, SARL dans certains cas) doit donc être interrompue de sorte que la personne soit entrée en jouissance de ses pensions de retraite avant la reprise d’une activité professionnelle. Sous réserve de ces conditions, la reprise d’une activité professionnelle est très peu encadrée ; elle peut relever du régime général de la Sécurité Reprendre une activité rémunérée dans la sociale ou d’un régime de travailleur non salarié, société cédée : oui, mais après avoir cessé être rémunérée ou non, être menée en vertu toutes fonctions. d’un contrat de travail ou d’un mandat social. A la faveur de réformes successives, la La reprise d’activité doit faire l’objet d’une réglementation applicable aux situations de information formelle auprès de chaque cumul emploi-retraite a été considérablement caisse de retraite. S’agissant des retraites assouplie entre 2003 et 2009 dans le but affiché complémentaires, les caisses de retraite Arrco de favoriser le maintien dans l’emploi des et Agirc ont indiqué avoir adopté des règles seniors, dont il est aujourd’hui démontré qu’il identiques à celles applicables pour les régimes a un impact financier positif sur l’équilibre des de retraite de base. Les droits à retraite acquis régimes de retraite. auprès de ces caisses doivent avoir été liquidés Ainsi, depuis le 1er janvier 2009, un assuré ayant sans minoration sur les tranches A et B. En cas fait liquider sa pension de retraite du régime de cotisations versées à l’Agirc sur la tranche C général à taux plein des rémunérations, peut immédiatement cette tranche doit aussi «La seule contrainte qui cumuler cette retraite avoir été liquidée (peu de base du régime important l’abattement demeure est d’organiser général, sans restriction pratiqué). ou plafond, avec la En pratique, la seule la cessation complète reprise d’une activité contrainte qui demeure d’activité, le temps pour professionnelle relevant est d’organiser la ou non de ce régime. l’intéressé de liquider ses cessation complète Les mêmes règles d’activité, le temps pour pensions de retraite.» s’appliquent aux l’intéressé de liquider mandataires sociaux ses pensions de retraite. relevant du régime Il est essentiel pour général. un dirigeant de démissionner de ses mandats Trois conditions à la validité du cumul emploisociaux au moins une journée, l’intéressé ne retraite demeurent toutefois. pouvant être redésigné comme mandataire La personne concernée doit avoir préalablement qu’après être entré en jouissance de ses fait liquider ses droits à pension de vieillesse pensions de retraite. Concrètement, la reprise auprès de l’ensemble des régimes de retraite d’une activité s’effectue par une nouvelle obligatoires de base et complémentaires, nomination en qualité de mandataire social ou, français et étrangers, ainsi qu’auprès des le cas échéant, par la conclusion d’un contrat de régimes d’organisations internationales dont elle travail. a pu relever. A noter enfin que les règles de cumul emploiLa liquidation des droits ne peut pas intervenir retraite sont plus restrictives dans l’hypothèse avant l’âge auquel le taux plein est octroyé où les pensions de retraite de base et de plein droit, ou bien sur la base d’une complémentaires ont été liquidées alors que carrière complète (en principe, 161 trimestres la personne concernée ne pouvait prétendre à d’assurance). L’intéressé doit avoir atteint l’âge un taux plein, ou encore si la tranche C ou tout d’ouverture de droits à la retraite (entre 60 et autre régime obligatoire n’ont pas été liquidés. 62 ans, selon l’année de naissance). Dans ce cas de figure, la reprise d’activité reste L’intéressé doit avoir rompu tout lien possible mais avec un plafonnement de revenus professionnel avec l’entreprise. Toute activité et l’obligation de respecter un délai de carence propre à générer une affiliation au régime de six mois avant de pouvoir reprendre une général de la Sécurité sociale (contrat de travail, activité chez le même employeur. n Lundi 23 juin 2014 5 Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity Clauses de leaver : peut-on déterminer le prix librement ? L Par Christophe Blondeau, avocat associé, spécialisé en droit des sociétés, couvrant l’ensemble des questions relatives aux opérations transactionnelles. [email protected] et Florian Burnat, avocat, spécialisé en fiscalité, intervenant tant en matière de fiscalité des transactions et private equity que dans le domaine de la fiscalité des particuliers, actionnaires et dirigeants. [email protected] 6 Lundi 23 juin 2014 es instruments d’intéressement ou stipulée la promesse est généralement plus d’association au capital des salariés ou faible (cette décote étant souvent motivée par dirigeants, tels que les stock-options, les la perte de valeur affectant immédiatement actions gratuites ou les management packages ou à terme la société et résultant du comprennent habituellement des clauses comportement de l’intéressé) : il pourra s’agir visant à organiser leur départ, communément par exemple du plus faible entre la valeur appelées «clauses de leaver». nominale des titres et leur valeur de marché. De telles clauses permettent à ces managers La conception de ces instruments obéit à dans une société non cotée de bénéficier d’une des problématiques juridiques et fiscales qui certaine liquidité en cas de départ de la société. ont connu une importante actualité focalisée Elles sont insérées le plus souvent dans des autour de la question du prix auquel le manager promesses conclues entre le manager concerné accepte de sortir. d’une part et l’actionnaire majoritaire de la société émettrice des titres d’autre part. Les problématiques juridiques relatives à Aux termes d’une telle promesse, le manager la détermination du prix accepte ab initio de Le prix de vente des vendre les titres qu’il titres, objet de la détient en cas de promesse, sera le plus «Le prix de vente des titres, départ de la société. souvent déterminé objet de la promesse, sera Cet engagement en application d’une formel est consenti formule lorsqu’il le plus souvent déterminé à un prix déterminé s’agira de déterminer en application d’une selon une formule la valeur de marché intégrée dans la des titres concernés. formule lorsqu’il s’agira promesse, dont A cet égard, un l’application peut arrêt de la Cour de déterminer la valeur parfois dépendre de cassation de de marché des titres des raisons pour la fin de l’année lesquelles le 2012 (Cass. com. concernés.» manager a cessé ses 4 décembre 2012) a fonctions. jeté un trouble sur En cas de départ non fautif (on parle alors l’efficacité de telles clauses. Cet arrêt laissait de «good leaver»), c’est-à-dire les cas où penser qu’il était possible au manager devant le départ du manager est indépendant de céder ses titres d’éviter l’application de la sa volonté (décès, licenciement sans cause formule contractuellement prévue en sollicitant réelle et sérieuse, mise à la retraite), le prix la désignation d’un expert en application de auquel est stipulée la promesse correspond l’article 1843-4 du Code civil, un tel expert généralement à la valeur de marché des titres n’étant pas tenu par cette formule pour fixer le au jour du départ du manager. Alternativement, prix. Fort opportunément, un arrêt récent (Cass. les promesses peuvent également prévoir com. 11 mars 2014) vient clarifier la situation. la possibilité pour le dirigeant «good leaver» La Cour de cassation pose clairement le de conserver ses titres pour les céder principe selon lequel les dispositions de l’article ultérieurement. 1843-4 du Code civil sont sans application à En cas de départ fautif (on parle alors de «bad la cession de droits sociaux résultant de la leaver»), c’est-à-dire les cas où le départ du mise en œuvre d’une promesse unilatérale manager dépend de sa volonté ou de son de vente librement consentie par un associé. comportement (démission, licenciement pour Ainsi, l’article 1843-4 du Code civil ne constitue faute), considéré comme rupture à ses torts de pas une arme permettant à un promettant l’affectio societatis originel, le prix auquel est d’échapper à l’application d’une formule de Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity prix contractuelle. Encore faut-il que la clause de prix soit bien rédigée et que, en cas de contestation sur l’application de la formule, les parties n’aient pas prévu la possibilité pour l’une d’elles de solliciter la nomination d’un expert en application de l’article 1843-4 du Code civil. Une autre crainte tient aux risques de contestation de la décote pratiquée en matière de «bad leaver». Certains auteurs y voient une clause pénale qui serait susceptible de révision judiciaire. D’autres s’interrogent également sur la validité de cette décote au regard de la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation sur les sanctions financières prohibées au sens de l’article L. 133-2 du Code du travail. La Cour de cassation (Cass. com. 6 mai 2014) refuse toutefois de voir dans de telles promesses des clauses d’exclusion, lesquelles obligent notamment à respecter les droits de la défense de l’associé exclu sous peine de nullité. Les problématiques fiscales relatives à la détermination du prix Tant le Comité de l’abus de droit fiscal (CADF) que les tribunaux administratifs et cours administratives d’appel ont eu récemment à statuer sur la pratique des management packages, et plus généralement des modalités d’association des managers à la plus-value éventuelle de sortie. Si les affaires présentées devant ces instances n’ont pas eu pour objet spécifique de traiter le cas des clauses de leaver, il est intéressant de les analyser pour déterminer quels enseignements peuvent en être tirés. On rappellera que le juge de l’impôt n’exclut pas que les gains retirés de la cession de titres de sociétés puissent, à titre exceptionnel, être rangés dans la catégorie des traitements et salaires, des bénéfices non commerciaux ou des revenus de capitaux mobiliers lorsqu’il considère que ces gains ne résultent pas de la seule qualité d’investisseur mais rémunèrent en réalité une activité particulière du contribuable ayant permis d’augmenter la valeur des titres cédés. Schématiquement, deux approches s’opposent aujourd’hui : – celle qui consiste à considérer que, lorsque les titres ont été acquis par les managers au moyen de leurs propres deniers et sans garantie de rendement, le manager a pris un véritable risque d’investisseur et n’agit pas en tant que salarié : on retrouve notamment ces critères dans plusieurs avis récents du CADF rendus en faveur des managers ; – celle souvent soutenue par l’administration fiscale consistant à considérer qu’un schéma d’association réservé aux managers en raison de la seule qualité de dirigeant ou salarié relèverait par principe de la catégorie des traitements et salaires : cette approche semble avoir trouvé un écho dans un récent arrêt controversé de la cour administrative d’appel de Paris où le lien salarial du manager a prévalu sur le montant jugé «modique» de son risque en capital. La problématique fiscale que pose la rédaction de la clause de leaver est ainsi de déterminer dans quelles circonstances le manager serait susceptible de bénéficier d’un avantage pouvant induire une requalification partielle ou totale de la plus-value de sortie. Au regard de la jurisprudence disponible, il ne semble pas «La problématique fiscale que que la présence de la clause pose la rédaction de la clause de leaver soit à elle seule de nature à justifier une telle de leaver est de déterminer requalification. Dans un avis rendu en octobre dans quelles circonstances le 2012 relatif à des BSA souscrits manager serait susceptible en PEA dans le cadre d’une opération de LBO, la présence de bénéficier d’un avantage d’une clause de leaver n’avait pouvant induire une pas empêché le CADF d’écarter la requalification en salaire requalification partielle ou d’une plus-value qui était le fruit d’un véritable risque en totale de la plus-value de capital. De son côté, dans un sortie.» arrêt Fontana du 7 novembre 2008, le Conseil d’Etat avait rejeté la requalification en revenu d’activité d’un earn-out étalé sur six ans qui était subordonné à la présence du dirigeant cédant dans l’entreprise sur cette période : l’on devrait pouvoir en déduire, par analogie, qu’une simple obligation de céder ses titres en cas de départ de l’entreprise ne suffirait dès lors pas à dénaturer un gain de cession de titres en revenus salariaux. Ainsi donc, dans l’analyse fiscale, si la clause de leaver paraît plus relever de la rupture normale de l’«affectio societatis» entre actionnaires que de celle d’un contrat de travail, il reste néanmoins que les modalités de détermination de son prix d’exercice ne doivent pas s’exonérer de la nécessaire caractérisation d’un véritable risque en capital pris ab initio par le dirigeant cédant. n Lundi 23 juin 2014 7 Dossier - Les clauses de sortie dans les opérations de private equity De l’importance de la maîtrise de la conduite du processus de sortie L Par Alexandre Delhaye, avocat en corporate-M&A, intervenant en matière de fusions-acquisitions pour le compte d’industriels, de fonds d’investissement et de managers, ainsi que dans le cadre de réorganisations de groupes. [email protected] 8 Lundi 23 juin 2014 a sortie – également appelée liquidité – est celui qui mène la danse et celui qui l’accompagne. de l’essence même de l’investissement d’un Ce type de situation peut survenir notamment dans fonds dans une opération de private equity, le choix des conseils, dans celui des modalités de que celle-ci soit minoritaire ou majoritaire. Il est en la sortie (par exemple, nouvel LBO versus cession effet nécessaire que le fonds puisse réaliser son industrielle), dans le choix du cessionnaire ou investissement au moment qu’il jugera opportun, encore dans la négociation des garanties qui celui-ci devant idéalement concilier les contraintes seraient accordées à ce dernier. réglementaires propres au fonds (par exemple, Par ailleurs, ce type de clause pouvant avoir des sa durée de vie) avec des conditions de marché conséquences importantes pour les autres parties favorables à une sortie. (par exemple, en cas d’obligation de cession Dès lors, il est essentiel pour un fonds d’avoir la forcée), ces dernières souhaiteront pouvoir maîtrise du processus de sortie et d’être le moins s’assurer que le processus est mené équitablement possible tributaire des autres parties. Ces dernières et que les conditions de cession qui leur sont chercheront quant à elles à bénéficier de droits imposées sont identiques à celles du fonds. plus ou moins étendus pouvant, dans certains cas, Par nature déséquilibrés, les rapports entre les venir perturber la liberté escomptée par le fonds. parties peuvent toutefois se rééquilibrer, l’objectif Les clauses relatives à la sortie sont essentielles étant de situer le degré d’intervention des parties puisqu’elles organisent qui n’ont pas la conduite le dispositif juridique de la procédure le plus en «Les clauses de sortie qui permettra in fine amont possible du processus la sortie du fonds. jusqu’à atteindre, dans constituent en pratique de Les variantes sont certains cas, la conduite réels enjeux de négociation conjointe de tout ou partie du très nombreuses. Elles peuvent ne processus. entre les parties.» concerner que la seule Le premier axe de participation du fonds rééquilibrage consiste dans (promesse d’achat, droit de préemption, droit de l’organisation du droit à l’information des autres premier refus, etc.), mais également celles des parties afin qu’elles soient informées le plus autres parties (obligation de cession forcée à la tôt possible du lancement du processus, mais suite d’une offre sur 100 %, etc.). également de son déroulement. Ces clauses organisent également la procédure Le second axe sera le degré d’intervention des aux termes de laquelle la sortie doit intervenir. autres parties dans le processus, en particulier Les décisions à prendre dans ce cadre sont dans leur participation à certaines décisions (par stratégiques et traitent, par exemple, des sujets exemple, négociation des garanties) jusqu’à obtenir suivants : une concertation préalable, voire bénéficier d’un – organisation dans le temps de la sortie (calendrier, droit de veto (par exemple, choix des conseils et/ou périodes de liquidité, durée du processus, etc.) ; du cessionnaire). – choix des conseils et négociation de leurs coûts ; Les clauses de sortie constituent en pratique de – choix du type de sortie (cession à un industriel, réels enjeux de négociation entre les parties. Afin IPO, dual track, LBO secondaire, OBO, etc.) ; de trouver un équilibre acceptable entre elles, – choix du cessionnaire ; le pacte d’associés devra aménager de manière – détermination de la valorisation et négociation du détaillée leurs droits et obligations respectifs et prix de cession ; encadrer au mieux le «mandat» qui est donné à – négociation de la structure de la cession (par celui qui sera maître du processus. Mais comme un exemple, réinvestissement proposé à certains fonds ne peut difficilement sortir sans, en quelque actionnaires) ; sorte, l’adhésion du management, l’équilibre doit se – négociation des garanties qui pourraient être trouver d’une manière ou d’une autre. n octroyées au cessionnaire. Or, les intérêts peuvent fortement diverger entre Actualités Management package : l’employeur pris en sandwich Un récent arrêt Quick confirme que, en cas de requalification d’un management package, l’employeur est susceptible d’être recherché en paiement tant par l’Urssaf que par l’administration fiscale. L ’employeur doit-il s’inquiéter de l’éventuelle s’élevaient seulement à 2,73 % du salaire au cas requalification de la plus-value réalisée par d’espèce, elles peuvent atteindre 22,73 % en y un de ses dirigeants dans le cadre d’un ajoutant la taxe sur les salaires appliquée aux plus management package ? La réponse était positive hauts revenus lorsque l’employeur n’en est pas vis-à-vis de l’Urssaf, elle l’est également à l’égard exonéré (ce qui peut, par exemple, être le cas de de l’administration fiscale. C’est en effet l’un des certaines sociétés holdings). principaux enseignements d’un arrêt récemment Cependant, dans l’affaire examinée, la cause rendu par la cour administrative d’appel (CAA) de paraissait entendue dès lors que les BSA avaient Versailles1. apparemment été attribués gratuitement, et L’affaire en cause concernait un groupe dont la étaient directement liés à l’exercice d’une société-mère belge avait procédé en 2001 à un fonction salariée au sein du groupe. Tout juste emprunt obligataire à destination de certains pourra-t-on s’étonner de la discordance introduite des salariés français du groupe sélectionnés par l’Administration entre le traitement fiscal par le comité de retenu au niveau des rémunération. bénéficiaires (imposés «La requalification d’un Chaque obligation en revenus de capitaux management package entraîne mobiliers) d’une était assortie de vingt «warrants» part, et de la société un triple “passage en caisse”.» ou bons de versante d’autre part. souscription Par ailleurs, on notera d’actions (BSA). Bien que cet aspect ne soit pas que le contribuable n’a pas invoqué l’argument totalement limpide, il semble que les BSA aient été selon lequel l’action en reprise de l’administration accordés à titre gratuit, simultanément à l’émission fiscale était prescrite, l’avantage ayant a priori été obligataire, mais sans pour autant qu’il s’agisse consenti lors de l’attribution gratuite des BSA, et d’instruments composés, type obligation à bons de non au moment de leur exercice. Si cet argument souscription d’actions (OBSA). Les BSA donnaient a certes été rejeté par la CAA de Paris, selon droit à une action Quick, et étaient exerçables nous de façon discutable2, il avait été accueilli er favorablement par la CAA de Nancy dans une entre le 1 mars 2005 et le 5 juin 2007, pour un prix fixe de 18,50 euros. Les administrations situation similaire relative à des actions souscrites sociale puis fiscale ont considéré que le gain pour une valeur décotée3. D’ailleurs, par analogie, dans le cas des plans de stock-options non réalisé par les porteurs lors de l’exercice des qualifiants, l’Administration a explicitement indiqué BSA ne constituait pas une plus-value, et que que le différé d’imposition posé par l’article 80 bis l’employeur était ainsi redevable des cotisations du Code général des impôts relatif à l’avantage sociales sur la rémunération ainsi consentie (en ce correspondant à la plus-value d’acquisition sur compris la taxe d’apprentissage, la participationstock-options n’est pas applicable, ce qui devrait formation continue, ainsi que l’investissement conduire à considérer que l’imposition se fait au obligatoire dans la construction (les «taxes assises moment de l’octroi de l’option. sur les salaires»)). Il faut cependant retenir de cette décision l’angle Considérant que les BSA concernés étaient original retenu par l’Administration pour tirer assimilables à des stock-options non éligibles au l’ensemble des conséquences d’une requalification régime fiscal et social de faveur (car ne respectant d’un management package, avec désormais un les conditions posées par le Code de commerce), triple «passage en caisse» (administration fiscale la Cour a confirmé le redressement relatif aux pour le salarié, et administration fiscale et sociale taxes assises sur les salaires. L’enjeu n’était pas négligeable, puisque si ces taxes pour l’employeur). n Par Jean-Charles Benois, avocat, spécialisé en fiscalité, intervenant tant en matière de fiscalité des entreprises et groupes de sociétés qu’en fiscalité des transactions et private equity. [email protected] 1. CAA Versailles, 3e ch., 28 janvier 2014, n°12VE02246, Sté France Quick. 2. Voir Qualification fiscale des management packages : fausse note dans la jurisprudence, dans la Lettre du Private Equity du 2 avril 2013. 3. CAA Nancy 16 mai 2007, n°05NC01153, 2e ch. Lundi 23 juin 2014 9 Actualités - International «Treaty shopping» : lorsque invoquer une convention fiscale devient suspect L a planète fiscale est en ébullition. Les pays du G20 sont décidés à contrer l’«érosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices» de façon multilatérale ou tout du moins coordonnée. S’en est suivi le lancement d’un plan de 15 actions, qui devront être approuvées par le Comité des affaires fiscales de l’OCDE en juin avant d’être soumises au prochain G20 les 20 et 21 septembre à Cairns, en Australie. L’action 6 vise à lutter contre le Par Michel Collet, avocat «treaty shopping». Cette question est susceptible associé, spécialisé en fiscalité d’intéresser tout investisseur, fonds ou non, internationale, intervenant utilisant des sociétés holding ou sous-holdings tant en matière de fiscalité souvent par région d’investissement dans le souci des entreprises et groupes de privilégier la plus grande neutralité fiscale des de sociétés, notamment dans investissements (faible imposition des plus-values le cadre de structurations de revente et absence de retenues à la source fiscales, qu’en private equity sur les remontées successives de dividendes s’agissant de la fiscalité des ou de redevances). Les propositions faites ne fonds, fonds de fonds, et des manquent pas d’inquiéter et risquent d’entraîner différents intervenants à un une réelle incertitude fiscale pour les investisseurs investissement. Il conseille internationaux. également les managers sur La première proposition principale consisterait à leur fiscalité personnelle et généraliser dans toutes les conventions fiscales patrimoniale. l’adoption de règles d’inspiration américaine [email protected] dites de «limitation de bénéfice» ou «LOB». Être résident fiscal au regard de la convention ne suffirait plus, encore faudrait-il être une «personne qualifiée». En très simple, pour une société, il faudrait soit être détenue «Il faut s’interroger sur par d’autres personnes qualifiées sur son territoire la solidité des structures (personnes physiques, société cotée, fonds de internationales et intermédiaires pension), soit être l’une de au regard de ces nouvelles ces entités. On relèvera que, pour qu’une société approches.» cotée puisse se prévaloir de la convention, encore faut-il qu’elle le soit dans son pays de résidence. Cela apparaît exagérément restrictif tant des sociétés françaises n’hésitent plus à être cotées aux Etats-Unis ou à Hong Kong. Elles peuvent néanmoins se prévaloir de la convention si leur siège de direction («management») et de contrôle est situé dans leur lieu d’établissement. Même si cette dernière notion est définie, elle devrait s’avérer source de difficultés et d’incertitudes 10 Lundi 23 juin 2014 pour les groupes internationaux. La convention peut être néanmoins invoquée sur un revenu reçu par une personne non qualifiée depuis l’autre Etat si cette dernière exerce une activité économique dans son Etat ou dans l’autre Etat. Enfin, les autorités compétentes pourraient reconnaître le bénéfice de la convention si aucune condition n’était remplie. Cette clause LOB s’avère trop restrictive, complexe et ignore les modes de gestion des groupes internationaux. Certains objecteront que les opérateurs deviennent otages des autorités pour résoudre les probables difficultés d’interprétation. Jusqu’à présent, l’administration française prêtait peu d’égards aux LOB de la convention avec les Etats-Unis ou le Japon, tant cette approche objective de la lutte contre les abus ne correspond pas à notre méthode plus subjective fondée sur la motivation de l’investisseur. Elle s’oppose d’ailleurs à cette approche jugée trop anglosaxonne. L’Administration ne sera pas en reste : il est également prévu que, même si toutes les conditions conventionnelles étaient remplies, et y compris la LOB, les administrations pourraient denier le bénéfice de la convention s’il s’avérait que l’un des motifs principaux de l’arrangement ou de la transaction était de bénéficier de la convention. Les conventions fiscales récentes signées par la France retiennent des réserves comparables. C’est au tour des Américains de protester contre cette approche subjective jugée hasardeuse. Comme l’a noté le Conseil constitutionnel à propos de la tentative de réforme de notre abus de droit, un but principalement fiscal laisse une trop grande marge d’appréciation à l’Administration qui pourrait conduire à l’arbitraire. Par ailleurs, chaque administration pourra avoir sa propre interprétation. Inutile de rappeler que cette nouvelle condition sera source d’une très grande instabilité sans procédure rapide d’agrément le cas échéant auprès des autorités compétentes. Il peut être utile dès aujourd’hui de s’interroger sur la solidité des structures internationales et intermédiaires au regard de ces nouvelles approches et de se préparer à de nouveaux développements. n Actualités - International L’impact des nouvelles règles de lutte contre les instruments hybrides sur les LBO L indifférent que l’entreprise prêteuse ait un a déduction des intérêts d’emprunt est un résultat nul ou déficitaire4. Ainsi, les financements élément essentiel de l’équilibre financier octroyés par des sociétés belges bénéficiant du d’un LBO. Cet équilibre a été plusieurs régime des «intérêts notionnels» devraient être fois remis en cause par le législateur français hors champ du dispositif. Si le Projet contient ces dernières années, soit pour lutter contre en effet un exemple où il est fait mention d’une des pratiques jugées abusives (Carrez), soit plus législation étrangère autorisant une réfaction sur généralement pour renflouer les caisses de l’Etat le montant de l’intérêt5, tel n’est pas le cas des (rabot). La loi de finances pour 2014 a modifié la intérêts notionnels dans la mesure où l’imposition rédaction du I de l’article 212 du Code général des intérêts et la déduction de l’intérêt notionnel des impôts (CGI) pour ne permettre la déduction sont deux écritures indépendantes. des intérêts payés à une entreprise liée que si l’entreprise débitrice démontre que l’entreprise Restent les vrais hybrides. Ainsi, par exemple, liée créancière est assujettie à raison de ces d’un emprunt octroyé par une société liée sous mêmes intérêts à un impôt au moins égal au forme d’une obligation remboursable en actions quart de l’impôt sur les bénéfices déterminé dans (ORA). Ce type les conditions de d’obligations, droit commun. «Eu égard au large champ plus ou moins Ces dispositions, sophistiquées, qui s’intègrent d’application des nouvelles est parfois utilisé dans un contexte pour structurer plus général règles, il convient de procéder à un financement de lutte contre une revue des prêts existants.» mezzanine. Ici aussi, les instruments ce financement hybrides sous devrait rester hors l’impulsion champ en raison de l’absence, en principe, de lien de l’OCDE et de la Commission européenne, de dépendance entre le mezzaneur et la société ont récemment fait l’objet d’un projet de débitrice. commentaires de la part de l’Administration (le «Projet»)1. Il convient d’esquisser l’impact que ces nouvelles règles peuvent avoir pour S’agissant des entités transparentes, leur les financements LBO, avant d’envisager s’il est traitement spécifique a été simplement ébauché possible de restructurer certains financements. au cours des discussions parlementaires, en laissant un certain nombre de questions en La place des instruments hybrides dans suspens. Les positions prises par l’administration les LBO fiscale dans le Projet, refusant par exemple la Le Projet permet d’écarter du champ d’application possibilité de déduire les intérêts en cas de du dispositif un certain nombre de structures de superposition d’entités transparentes, doivent financement assez classiques, dans la mesure où inciter les fonds étrangers utilisant des entités l’entreprise française doit rapporter la preuve que transparentes6 à revoir leur structure avec le plus grand soin. l’entreprise prêteuse liée est soumise à un impôt dont le montant est au moins égal à 25 % de La restructuration des financements l’impôt français déterminé dans les conditions de existants droit commun et que les intérêts sont bien inclus Eu égard au large champ d’application des dans la base, sans pour autant qu’un impôt soit nouvelles règles, il convient de procéder à nécessairement effectivement versé2. Le Projet précise expressément qu’il n’est pas tenu compte une revue des prêts existants en vue d’une des charges de toutes natures venant diminuer éventuelle restructuration. Toutefois, rendre le résultat imposable du créancier3 et qu’il est un financement qualifiant est-il en soi abusif ? Par Thierry Granier, avocat associé, spécialisé en fiscalité internationale, intervenant en matière de private equity dans les opérations de financement et d’acquisition dans un contexte international. Il assiste plusieurs fonds d’investissement et établissements financiers dans leurs opérations à dimension internationale. [email protected] et Benoît Foucher, avocat spécialisé en fiscalité internationale et dans les aspects fiscaux des financements structurés. En matière de private equity, il intervient dans les opérations de financement et d’acquisitions dans un contexte international. Il assiste plusieurs fonds d’investissements et établissements financiers dans leurs opérations à dimension internationale. [email protected] 1. BOI-IS-BASE-35-50-20140415. 2. Projet, n°60. 3. Projet, n°70. 4. Projet, n°60. 5. Projet, n°100. 6. BOI-IS-BASE-35-30-10-20140325, n°200. Lundi 23 juin 2014 11 Actualités- International Actualités Sociétés par actions : une nouvelle voie pratique de S’agissant du dispositif prévu à l’article 209 IX du auprès du prêteur initial. Le caractère artificiel désignation du commissaire aux apports CGI (dispositif «Carrez»), le contribuable dispose n’étant pas, de prime abord, évident et, en clairement d’une faculté de mise en conformité7. De la même il nous semble pour a loimanière, Warsmann II n°2012-387 du notre part que 22 rendre prêtcomporte qualifiant au des marsun 2012 desregard dispositions dispositions de l’article duequity, CGI nedont devrait pas en matière de 212-I private être comme étant ipso facto abusif.du les regardé principales concernent l’intervention Il commissaire convient cependant de prendre garde à la ou aux apports à la constitution restructuration mise en de œuvre, afindes quesociétés celle-ci ne lors d’augmentations capital par soit pas critiquée par l’administration fiscale sous actions. l’angle de l’abus deladroit. En effet, du on commissaire pourrait Antérieurement, désignation imaginer qu’unétait prêtjudiciaire. non qualifiant octroyé désorpar aux apports Le principe, une société étrangère soit refinancé parL.un mais énoncé aux articles L. 225-8 et 225-147 prêt mais que laest société prêteuse se du qualifiant, code de commerce, la désignation du refinance elle-même par un àprêt non qualifiant. commissaire aux apports l’unanimité des assoDans telle hypothèse, l’appréciation ne pourra ciésune et ce n’est qu’à défaut qu’il est désigné par bien entendu se qu’au par cas. Il nous le président dufaire tribunal decas commerce. semble qu’une structure consistant à interposer La loi précitée, transposant la directive entre la société française et le prêteur n°2006/68/CE du 6 septembre 2006,initial vientune égasociété refinancement sans substance, qui se lementdedispenser certains apports d’un rapport refinance elle-même un prêten hybride auprès du commissaire auxvia apports, introduisant dules prêteur initial, risqueetd’être regardéedu comme articles L.225-8-1 L. 225-147-1 code de artificielle. commerce. LaLastructure être moins caricaturale ; ainsi, dispensepeut concerne, d’une part, les valeurs par exemple,au d’une dotéeL.de la substance mobilières senssociété de l’article 228-1 du code nécessaire, avecou desles sources de financement de commerce instruments du marché multiples et ne se refinançant pas directement L Par Christophe Lefaillet, avocat associé, spécialisé en droit des sociétés et en fiscalité (droits d’enregistrement et ISF). Il couvre l’ensemble des questions relatives aux opérations transactionnelles. [email protected] 7. BOI-IS-BASE-35-30-10-20140325, n°130. 8. Rapport Assemblée nationale, 2013 n°1428, p. 346 1-3 1-3 villa villa Emile Emile Bergerat Bergerat 92522 Neuilly sur Seine Cedex Tél. 01 47 38 55 - FaxCedex 01 47 38 55 55 92522 Neuilly sur00Seine www.cms-bfl .com Tél. 01 47 38 55 00 Retrouvez toutes toutes les les informations informations relatives relatives àà notre notre Retrouvez activité en en Private Private Equity Equity :: activité supposant que l’Administration démontre la motivation exclusive, se pose monétairefiscale au sens de l’article 4 delalaquestion directive den°2004/30/CE l’intention du du législateur. 21 avril 2004, «évalués au prix L’intention affichéeauquel par celui-ci «lutter sur moyen pondéré ils ontétait étéde négociés contre fiscaleréglementés permise par les un oul’optimisation plusieurs marchés au cours 8 , produits hybrides et l’endettement artificiel» des trois mois précédant la date de la réalisation étant précisé les exemples présentés parautre effective deque l’apport» et, d’autre part, tout leactif législateur traitent de relations bilatérales. que ceux précités qui, dans les six mois S’agissant d’un textede anti-abus, celui-ci devrait de précédant la date la réalisation effective être interprété strictement. C’est d’ailleurs cetteà l’apport ont déjà fait l’objet d’une évaluation interprétation stricte quiinformation a prévalu s’agissant de leur juste valeur. Une particulière ladevra condition d’assujettissement Dans néanmoins être portée àà l’impôt. la connaissance une on pourrait invoquer desinterprétation souscripteursstricte, dont les modalités devront que si filexées législateur avaiten voulu sanctionner être par décret Conseil d’Etat. les instruments un contexte Les apportshybrides précitésdans doivent en outretripartite faire (voire plus), il aurait pu le faire et queleson silence l’objet d’une réévaluation lorsque prix a été indiquerait qu’il est rien. Cela étant, la affecté par desn’en circonstances exceptionnelles ou recherche l’intention dué législateur est toujours nouvellesde qui ont modifi sensiblement la valeur undeexercice délicat et à la la prudence de mise.effecl’élément d’actif date de est réalisation Plus lesEn questions suscitées par tivelargement, de l’apport. l’absence de réévaluation, un laou nouvelle rédaction de représentant l’article 212-I du plusieurs associés au CGI moins 5 % soulignent relative faiblesse dispositions du capitallapeuvent demanderdes une évaluation, prises unilatéralement par les en Etats lutter faculté prévue uniquement caspour d’augmentacontre lescapital. méfaits■supposés des instruments tion de hybrides. n Si vous souhaitez contacter les auteurs de cette lettre, Si vous souhaitez contacter les auteurs de cette lettre, vous pouvez vous adresser à : vous pouvez vous adresser à la rédaction qui transmettra aux Me Pierre Bonneau, [email protected] personnes concernées. Vous pouvez également vous adresser à : Me Michel Collet, [email protected] Christophe [email protected] Mee Alain Couret,Blondeau, alain.couret@cms-bfl .com M e e Michel Collet, [email protected] M M Martine Ebrard-Grellety, [email protected] Thierry Hepp, Granier, [email protected] Mee Laurent laurent.hepp@cms-bfl .com M e e Laurent Hepp, [email protected] M M Víctor Hernán, [email protected] Arnaud Hugot, [email protected] Mee Christophe Lefaillet, [email protected] M e e Thierry Romand, [email protected] M M Jérôme Sutour, [email protected] Me Marc-Etienne Sébire, [email protected] Supplément du numéro 1178 juin23 2012 1275 du 18 Lundi juin 2014 Option Finance - 91 bis, rue du Cherche-Midi 75006 0155 53 63 55 55 10, rue Pergolèse 75016 Paris - Tél.Paris 01 53- Tél. 63 55 SAS au capital de 2 043 312 € RCB Paris 343256327 e Directeur de la publication : Jean-Guillaume d’Ornano Service abonnements : 18, de la Marne Cedex 01 44 10, 24 ruequai Pergolèse 7501675164 Paris, Paris Tél. 01 44 841980- Tél 45 Fax : 01845380634555 60 Impression : Megatop Naintre N° commission paritaire : 0416 T 83896 Email : [email protected] Impression : Megatop - Naintre - N° commission paritaire : 0416 T 83896 12 12 Lundi 18 juin 2012 Lundi 23 juin 2014