ii-distribution des scorpions
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ii-distribution des scorpions
Dédicaces Tous les mots ne sauraient exprimer la gratitude, l'amour, le respect, la reconnaissance… Aussi, c'est tout simplement que... Je dédie cette thèse à …? A mes très chers parents Les deux personnes qui ont toujours été présentes pour me chérir, me protéger et me soutenir tant moralement que matériellement pour que je puisse atteindre mon but. Vos bénédictions ont été pour moi le meilleur soutien durant ce long parcours. Aucun mot ne saurait exprimer ma reconnaissance et ma gratitude à votre égard, Puisse cette thèse symboliser le fruit de vos longues années de sacrifices consentis pour mes études et mon éducation. Veuillez trouver dans ce modeste travail l’expression de mon amour et de mon attachement indéfectible. Puisse mon Dieu, le tout puissant, vous protège et vous accorde meilleure santé et longue vie. A mes très chères frères et sœurs Allal, Olia, Omar et Abdelatti Mille mercis pour votre affection, votre aide et votre soutien qui ont marqué tous les stades de ma vie. Je vous remercie énormément et j'espère que vous trouverez dans cette thèse l'expression de mon affection pour vous. Je vous souhaite un avenir florissant et une vie pleine de bonheur, de santé et de prospérité. Que Dieu vous protège et consolide les liens sacrés qui nous unissent. A ma chère grand mère Lala Rkia et mon très cher grand père El Haj Mohamed Trouvez ici les expressions de ma tendresse, mon respect et de mon affection inaltérable. Que Dieu vous protège. A la mémoire de mon grand père paternel et ma grande mère maternel. A mes oncles et tantes A mes cousins et cousines A tous les membres de ma famille petits et grands Pour votre soutien et vos encouragements. Veuillez trouver dans ce modeste travail l’expression de mon affection la plus sincère. Que Dieu le tout puissant, vous protège et vous garde. A mes amis(es) et collègues Dr Abourazzak Sanae Dr Mahdane Hicham Dr Ammoumri Oussama Dr Filali Baba Ahmed Dr Brek Amine Dr Chennana Adil Dr Dialmy Youssef Dr Mrani Alaoui Mohamed Amine Dr Ibn El Kadi Khalid Dr Lahraoui Youssef Dr Bennani Hassan Dr Ammor Hicham Dr Rahmoun Amine Dr Benlemlih Amine A mes amis(es) El Hamdi Siham, Wikch Youssef, El Azifi Alae, Nouali Reda Je ne peux trouver les mots justes et sincères pour vous exprimer mon affection et mes pensées, vous êtes pour moi des frères et sœurs et des amis sur qui je peux compter. En témoignage de l’amitié qui nous uni et des souvenirs de tous les moments que nous avons passé ensemble, je vous dédie ce travail et je vous souhaite une vie pleine de santé et de bonheur. A tous ceux qui me sont trop chers et que j'ai omis de citer. A tous ceux qui m’ont aidé de près ou de loin dans la réalisation de ce travail. A tous mes professeurs et maîtres, avec tous mes respects et mon éternelle reconnaissance. Remerciements A notre maître et président de thèse Monsieur le Professeur HIDA MOUSTAPHA Professeur de l’enseignement supérieur de pédiatrie C'est un grand honneur que vous nous faite en acceptant la présidence du jury de cette thèse. J'ai eu le grand privilège de compter parmi vos étudiants et je rends hommage à votre sérieux votre humanisme et votre haute compétence. Veuillez trouver ici, cher Maître, l'expression de notre profond respect et de notre estime. Puisse Dieu le tout puissant vous accorder prospérité et bonheur, et vous assister dans la réalisation de vos projets. A notre maître et rapporteur, Monsieur le professeur EL ARQAM LARBI Professeur agrégé de pédiatrie Vous nous avez accordé un grand honneur en nous confiant la réalisation de ce travail, et en acceptant de présider le jury de notre thèse. Qu'il me soit permis de vous témoigner toute ma gratitude et mon profond respect d'avoir bien voulu assurer la direction de ce travail qui grâce à votre esprit didactique et rigoureux et vos précieux conseils a pu être mené à bien. Je vous prie de trouver ici, le témoignage de ma reconnaissance éternelle, de mon profond respect et ma haute considération. Puisse Dieu le tout puissant vous accorder prospérité et bonheur, et vous assister dans la réalisation de vos projets. A notre maître et juge de thèse, Monsieur le professeur BOUHARROU ABDELHAK Professeur de l’enseignement supérieur de pédiatrie Je vous remercie du grand honneur que vous nous faites en acceptant de juger ce travail. Veuillez trouver ici, l'expression de ma gratitude, ma profonde reconnaissance, mon admiration et ma haute considération. Puisse Dieu le tout puissant vous accorder prospérité et bonheur, et vous assister dans la réalisation de vos projets. A notre maître et juge de thèse, Madame le professeur KHATOUF MOHAMMED Professeur agrégé d’anesthésie réanimation Nous avons été très sensibles à l’amabilité de votre accueil et l’intérêt que vous avez voulu accorder à ce travail en acceptant de le juger. Veuillez trouver ici, cher maître, le témoignage de notre reconnaissance et de notre respect. Puisse Dieu le tout puissant vous accorder prospérité et bonheur, et vous assister dans la réalisation de vos projets. A notre maître et juge de thèse, Madame le professeur ATMANI SAMIR Professeur agrégé de pédiatrie Vous nous avez honorés d’accepter avec grande sympathie de siéger parmi notre jury de thèse. Veuillez trouver ici l’expression de notre estime et notre considération. Puisse Dieu le tout puissant vous accorder prospérité et bonheur, et vous assister dans la réalisation de vos projets. ABREVIATIONS A : Androctonus. B : Buthus. BAV : Bloc auriculo-ventriculaire. CAPM : Centre Anti-Poison du Maroc. Da : Daltons. ECG : Electrocardiogramme. ES : Envenimation scorpionique. FE : Fraction d’éjection. FR : Fraction de raccourcissement. HTA : Hypertension artérielle. IM : Intra musculaire. IL-8 : Interleukin-8. IV : Intra veineuse. IVA : Intubation Ventilation Artificielle. OAP : Œdème aigu du poumon. PAM : Pression artérielle moyenne. PAPO : Pression artérielle pulmonaire d’occlusion. PS : Piqûre de scorpion. PTD : Pression télédiastolique. PVC : Pression veineuse centrale. RVS : Résistances vasculaires systémiques. SAS : Sérum anti scorpionique. TA : Tension artérielle. TPP : Temps post piqûre. VG : Ventricule gauche. VD : Ventricule droit. SOMMAIRE Chapitre I : Etude théorique INTRODUCTION…………………………………………………………………………. 1 I. EPIDEMIOLOGIE DU SCORPIONISME……………….…………………….. 3 II. DISTRIBUTION DES SCORPIONS……………….……………….…………. 4 A- ESPECES DE L’ANCIEN MONDE……………….………………………… 5 B- ESPECES DU NOUVEAU MONDE ……………….………………………. 10 III. LE VENIN ……………….……………….……………….………………………… 15 A- COMPOSITION ET MODE D’ACTION……………….………………….. 15 1- Les toxines actives sur les canaux sodium……………….…… 16 2- Les toxines actives sur les canaux potassium………………… 17 B- TOXICITE……………….……………….……………….…………………. 17 IV. PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ENVENIMATION……………….…………… 20 A- MECANISMES DE L’ACTION DU VENIN AU NIVEAU CELLULAIRE….. 20 B- L’ACTION SUR LE SYSTEME NERVEUX CENTRAL……………………... 20 C- L’ACTION CARDIOVASCULAIRE……………….……………….……….. 21 D- L’OEDEME PULMONAIRE……………….……………….………………… 24 E- LES TROUBLES RESPIRATOIRES……………….……………….………… 28 F- LES AUTRES TROUBLES……………….……………….………………….. 28 1- atteinte neuromusculaire……………….……………….………… 28 2- atteinte digestive……………….……………….………………….. 28 3- troubles de la coagulation……………….……………….……….. 29 4- troubles métaboliques……………….……………….…………….. 29 V. ETUDE CLINIQUE (classes cliniques) ……………….………………….. 30 A - CLASSE I……………….……………….……………….………………… 31 B - CLASSE II……………….……………….……………….………………… 31 C- CLASSE III……………….……………….……………….………………… 32 1- Signes respiratoires……………….……………….…………….. 32 2- Signes cardio-vasculaires ……………….……………….…… 33 3- Manifestations neuromusculaires……………….…………….. 35 4- Manifestations digestives……………….……………….………. 36 5- Manifestations biologiques……………….……………….……. 36 VI. FACTEURS DE GRAVITE ET EVOLUTION……………….………………. 37 VII. TRAITEMENT ……………….……………….……………….……………….…. 39 A- TRAITEMENT SYMTOMATIQUE……………….……………….……….. 40 B- TAITEMENT SPECIFIQUE……………….……………….………………… 46 1- Données expérimentales……………….……………….………. 46 2- controverses au sujet de l’utilité de l’immunothérapie antiscorpionique ……………….……………….………………… 52 CHAPITRE II : ETUDE PRATIQUE MATERIEL ET METHODES D’ETUDES……………….……………………….. 57 RESULTATS……………….……………….……………….……………….………… 65 I. PROFIL EPIDEMIOLOGIQUES……………….……………….………………. 66 A- Fréquence……………….……………….……………….………… 66 B- L’age……………….……………….……………….……………….. 66 C- Le sexe……………….……………….……………….…………… 66 D- L’origine……………….……………….……………….………… 67 E- La saison ……………….……………….……………….………… 67 F- L’heure de piqûre……………….……………….………………. 67 G- Le siège de la piqûre……………….……………….…………… 68 H- type de scorpion……………….……………….………………… 69 I- Le temps post piqûre……………….……………….…………… 69 II. PROFIL CLINIQUE……………….……………….……………….…………… 69 A- Signes locorégionaux……………….……………….…………… 69 B- Signes systémiques……………….……………….………………. 70 C- Répartition selon la gravité……………….……………………. 71 III. SIGNES BIOLOGIQUES……………….……………….……………….……… 71 IV. PROFIL THERAPEUTIQUE……………….……………….………………….. 72 V. EVOLUTION……………….……………….……………….…………………. 73 A- Durée d’hospitalisation……………….……………….……….. 73 B- Patients sortants contre avis médical ……………….……… 73 C- Mortalité ……………….……………….……………….………… 74 DISCUSSION……………….……………….……………….……………….…………… 75 I. PROFIL EPIDEMIOLOGIQUES DES E.S……………….……………….…… 78 II. PROFIL CLINIQUE ET BIOLOGIQUE DE L’E.S……………….……………. 83 A- Signes cliniques et classe de gravité……………….……….. 83 1- Classe I (envenimation bénigne) …………………….. 83 2- Classe II (envenimation modérée) …………………… 84 3- Classe III (envenimation grave) ………………………. 86 B- Chronologie des tableaux clinique……………….…………… 88 III. STRATEGIE DE PRISE EN CHARGE DE L’E.S………………………………….. 89 A- Place de la sérothérapie antiscorpionique………………….. 89 B- Place des autres thérapeutiques……………….………………. 90 C- Intérêt de la réanimation……………….……………………….. 92 IV. EVOLUTION ET ARBRE DECISIONNEL……………….……………………….. 94 A- Evolution……………….……………….……………….…………. 94 B- Arbre de décision et conduite à tenir………………………… 95 V. PREVENTION……………….……………….……………….……………….…… 97 CONCLUSION……………….……………….……………….……………….……… 100 RESUMES……………….……………….……………….……………….…………… 102 BIBLIOGRAPHIE……………….……………….……………….……………….…… 105 INTRODUCTION L’envenimation scorpionique est un sérieux problème médical et une vraie menace dans un certain nombre de pays du monde, en particulier, au centre et sud d’Amérique, en nord d’Afrique, au moyen orient et en Inde [1,2]. Au Maroc, les données épidémiologiques établies par le centre Anti-poison et de Pharmacologie du Maroc montrent que les piqûres scorpioniques se placent en tête de toutes les intoxications relevées par le centre (50% à 60%) [3], avec un taux de létalité globale de 0,8% pouvant atteindre 5,3% dans certaines régions [4]. Dans les autres pays du nord d’Afrique, le scorpionisme est responsable de 40.000 cas chaque année en Tunisie [5], 47.521 piqûres de scorpion en 2002 en Algérie dont 14.962 d’âge<15 ans [6] ; dans le sud de la Libye, on a enregistré 900 piqûres pour 100.000 habitants en 1987 [7]. Au Maroc, 24902 cas ont été collectés durant l’année 2004 [8], les enfants d’âge <15ans représentent, chaque année, 30% de la population piquée, et le sexe ratio est invariablement compris entre 0,9% et 1% témoignant du caractère aléatoire de la piqûre. L’incidence moyenne actuelle des piqûres scorpioniques au Maroc est de 1,2‰. Elle diffère d’un pays à l’autre. Elle est de 0,18 ‰ au Venezuela [9], de 0,9‰ en Arabie Saoudite [10], de 1,56‰ en Algérie [11]. Malgré une petite taille, les scorpions et grâce à des appareils performants d’inoculation de venin, peuvent être responsables d’envenimations graves chez l’homme. Chaque année environ 40.000 décès dus aux envenimations scopioniques sont enregistrés dans le monde [12]. Au Maroc, le taux de létalité (proportion des sujets décédés parmi les sujets piqués durant la période de surveillance) est passé de 6,3‰ en 2001 à 3,6‰ en 2004 [8]. De nombreuses études ont permis de décrypter la composition des venins de scorpions et d’élucider leurs mécanismes d’action. Dans les cas les plus graves d’envenimation, l’expérience a prouvé que la rapidité de la prise en charge est déterminante pour le pronostic vital. La sérothérapie a longtemps été le traitement 1 spécifique le plus communément employé, mais aujourd’hui, des études cliniques et expérimentales l’ont mis en question. Elle est vivement controversée voire abandonné selon lés écoles notamment au Maroc. 2 I- EPIDEMIOLOGIE DU SCORPIONISME Les scorpions constituent un ordre numériquement important, comptant environ de 1500 espèces, toutes venimeuses. Ils sont caractérisés par une morphologie bien particulière : leur post-abdomen ou queue se termine par un telson postérieur à l’anus, renfermant une glande à venin dont le contenu s’évacue par un aiguillon recourbé et acéré, dont les deux orifices de sortie sont subterminaux et symétriques. La glande à venin est entourée d’une couche musculaire striée que l’animal contracte volontairement, de telle sorte qu’une piqûre peut ne pas s’accompagner d’une inoculation de venin. L’ordre des scorpions est divisé en un petit nombre de familles, sept à neuf selon les auteurs, parfois réparties en deux ensembles considérés alors comme les sous-ordres [13]. La famille des Buthidés, la plus importante, constitue à elle seule l’ensemble des Buthoïdes. Elle réunit 40% des espèces, et la quasi-totalité des espèces dangereuses pour l’homme. Sans doute en raison de leur importance médicale, les scorpions de cette famille sont aussi les plus étudiés, tant leur venin que leur comportement ou leur biologie. Les autres familles sont regroupées dans l’ensemble des Chactoides, qui renferment le géant des arthropodes terrestres : Pandinus imperator, espèce forestière mais aussi de la savane de l’Afrique de l’Ouest, non dangereuse pour l’homme, et appartenant à la famille des scorpionidés, pourrait dépasser 20cm de long. Les relèves des piqûres de scorpion sont rarement systématiques, et les statistiques sont surtout hospitalières [14]. Plus récemment, diverses statistiques globales ont été publiées : elles montrent la sous estimation habituelle de la fréquence de I'envenimation scorpionique [15, 16, 17]. 3 II-DISTRIBUTION DES SCORPIONS Les scorpions vivent dans des territoires ne s'étendant pas au-delà du 50ème parallèle. Ils peuvent occuper les biotopes les plus divers, plaine mais aussi plateaux d'altitude (Mexique) ou même haute montagne jusqu'à 5 000 m et davantage, tel Scorpiops montanus, des chaînes de l'Himalaya, ou Orobothrius crassimanus de la Cordillère des Andes. Considérés comme des représentants typiques de la faune des déserts chauds (Sahara), ils vivent tout aussi bien en savane (Afrique tropicale) qu'en forêt. On les rencontre principalement en zone intertropicale ou en zone tempérée chaude (Afrique du Nord). L'une des caractéristiques de la faune scorpionique est son taux d'endémisme élevé. Peu d'espèces possèdent une large distribution, et une seule est considérée comme ubiquiste, le Buthidé inoffensif Isometrus maculatus. Une autre caractéristique est la coexistence, sur les territoires où vivent les scorpions, de représentants de la famille des Buthidés et de représentants des Chactoïdes, à la seule exception de l'Italie, qui héberge seulement des Chactoïdes du genre Euscorpius. Ce constat implique que tout territoire où l'on note la présence de scorpions peut compter une ou plusieurs espèces dangereuses. De ce fait, la carte de répartition des espèces dangereuses est vaste, même amputée de zones ne comportant aucune espèce dangereuse de scorpions : Océanie, Madagascar, Afrique équatoriale, Chili et quasi-totalité de l'Argentine. On peut par ailleurs noter les progressions de scorpions d'intérêt médical. Deux explications principales sont retenues : une expansion de proche en proche, par exemple pour Androctonus australis et peut-être Leiurus quinquestriatus sur le continent africain, et un transport accidentel par l'homme (voiture, caravane, camion) pour d'autres espèces, tel Centruroides exilicauda aux Etats-Unis. Au Brésil, l'espèce hautement dangereuse Tityus serrulatus s'adapte aisément à l'urbanisation. Son expansion est facilitée par sa reproduction parthénogénétique 4 et son opportunisme alimentaire, les blattes constituant l'une de ses proies favorites. Combinant les effets d'une propagation de proche en proche et d'un transport accidentel par l'homme (rail, route), T. Serrulatus est devenu, et de loin, la principale espèce responsable du scorpionisme grave dans l'état de Sao Paulo et le district Fédéral, car son expansion s'accompagne en outre de la régression d'autres espèces non opportunistes, les unes dangereuses ou potentiellement dangereuses et sexuées (Tityus bahiensis, Tityus fasciolatus), les autres inoffensives (Ananteris balzani). A- Espèces de l'Ancien Monde : ∙ Androctonus sp. : Le genre Androctonus comprend plusieurs espèces dangereuses qui couvrent un vaste territoire, du Maroc à l'ouest de la péninsule arabique. Leur distribution est cependant inégale. A. æneas, le plus petit des Androctonus cités, de couleur noire, connu au Maghreb, toujours en faible densité, possède peut-être une distribution plus étendue, difficile à préciser en raison de sa relative rareté. En particulier, sa présence en région subsaharienne demande à être précisée. Son venin est puissant, et des accidents mortels sont régulièrement signalés, en dépit du faible nombre de piqûres dont il est responsable. A. Australis, est largement plus répandu, de l'Algérie à l'ouest à l'Egypte et au nord de l'Arabie à l'est. Plusieurs sous-espèces ont été décrites, dont le venin est inégalement toxique. La sous-espèce dominante en Tunisie est A. a. garzonii, il est considéré comme un des scorpions les plus dangereux. Son aire de distribution tend à s'étendre. Sans être une espèce anthropophile, il peut s'accommoder d'une urbanisation qui n'est pas trop dense et il est capable de coloniser de proche en proche de nouveaux territoires (image 1). 5 Image 1 : Androctonus australis (de l’Algérie à l’Egypte). 10-12 cm de long. L'adulte de cette espèce est uniformément jaune paille (corps et appendices) ; le jeune a l'extrémité de la queue assombrie. 22 à 29 dents de peignes chez la femelle, 30 à 38 chez le mâle. 6 A. crassicauda possède une distribution disjointe : Maghreb d'une part, où il est relativement rare et difficile à distinguer de l'espèce suivante, Arabie d'autre part. Il paraît un peu moins dangereux que les trois autres espèces citées. A. mauritanicus est endémique du Maroc où il représente, et de loin, la principale espèce responsable des accidents scorpioniques graves [18] (image 2). Image 2 : Androctonus Mauritanicus (endémique du Maroc) Jusqu'à 9 cm de long. L'adulte de cette espèce est brun foncé à noir, avec tout au plus la face ventrale de l'abdomen et l'extrémité des pattes plus claires. 20 à 24 dents de peignes chez la femelle, 25 à 30 chez le mâle. Le mâle adulte se distingue facilement de la femelle par une "entaille" importante à la base du doigt fixe (supérieur) des pinces (cf. photos plus bas). 7 D'autres espèces de ce genre sont probablement dangereuses, tel A. hoggarensis du Niger, ressemblant beaucoup à A. australis avec lequel la confusion est possible. Dans ce pays, les scorpions responsables de piqûres mortelles ne sont pas complètement identifiés, hormis Leiurus quinquestriatus. ∙ Buthotus sp. : Ce genre, insuffisamment défini, rassemble des espèces à statut provisoire. B. tamulus n'est plus considéré comme un Buthus, mais comme un Mesobuthus par de nombreux auteurs. Quoi qu'il en soit, cette espèce de taille modeste, le "red scorpion" de l'Inde, est responsable de nombreux décès. B. franzwerneri, espèce de grande taille endémique du Maroc, dont on a décrit deux sous-espèces, a été longtemps considéré comme inoffensif (image 3). Une récente enquête de Touloun [18], rapportant cinq décès en quatre ans dus à cette espèce, conduit à la classer parmi les espèces dangereuses. Image 3 : Buthus Franzwerneri (endémique du Maroc, Inde) 8 Buthus occitanus : cette espèce occupe un vaste territoire disjoint. On la trouve au nord du bassin méditerranéen, sur le pourtour de celui-ci. Elle est considérée comme inoffensive en France, où elle est devenue assez rare. Comme en Espagne, où quelques accidents sérieux ont été signalés, elle se rencontre en plaine mais aussi en moyenne altitude (500 à 1 000 m). Présente en Afrique du Nord, du Maroc à l'Egypte et à la Palestine, elle est régulièrement, dans ce large secteur, à l'origine de piqûres mortelles. On rencontre enfin B. occitanus dans les pays subsahariens du Sahel, avec une distribution en îlots, actuellement imprécise, de même que reste mal connue sa dangerosité dans ces régions (image 4). Image 4 : Buthus Occitanus (Pourtour méditerranéen, Pays de sahel). Le plus grand scorpion loquedocien, de couleur jaune et environ 60 à 80 mm de long à l’âge adulte. 3 autres espèces apparentées sont plus petites (Euscorpius flavicaudis, Euscorpius Italicus, Euscorpius Tegestinus). 9 L'hypothèse d'un complexe d'espèces a été suggérée. De nombreuses sous espèces ont été décrites. En Tunisie, et jusqu'en Egypte et Israël, vit la sous-espèce B.o. tunetanus. Leiurus quinquestriatus : le genre Leiurus est monospécifique, et l'espèce est l'une des plus dangereuses qui soient. Son aire de répartition est vaste, de la Mauritanie à l'ouest jusqu'à l'Irak, et peut-être au-delà. En Afrique, elle s'étend au sud jusqu'au pays du Sahel, tout en étant absente du coeur du Sahara. En Afrique de l'est, elle sévit de l'Egypte au nord jusqu'à la Somalie au sud. ∙ Parabuthus sp. est un genre présent en Afrique du sud, en Afrique de l'est et au Proche-Orient. Il comprend plusieurs espèces dont le danger n'est évalué que pour certaines d'entre elles. P. granulatus est considéré en Afrique du sud comme le plus dangereux : la létalité chez l'enfant peut s'élever à 20 %. La dangerosité de P. Liosoma, espèce de grande taille proche morphologiquement du genre Androctonus, présente en Afrique de l'est et en Arabie, est ignorée. Toutefois, elle n'est pas rangée au nombre des espèces dangereuses en Arabie. Hemiscorpio lepturus est un Scorpionidé d'Irak et d'Iran. C'est le seul Chactoïde d'importance médicale. Les effets de son venin sont retardés, et les réactions cutanées généralisées peuvent être intenses. B- Espèces du Nouveau Monde : Les espèces dangereuses du Nouveau Monde sont des Buthidés des genres Centruroides et Tityus. Le genre Rhopalurus est sensiblement moins à craindre. Le genre Centruroides est surtout présent en Amérique du Nord et en Amérique centrale, mais on le trouve aussi en Colombie, au Pérou, au Venezuela, en Guyane. Il compte de nombreuses espèces dangereuses. La principale est C. suffusus, espèce au dimorphisme sexuel marqué, abondante au Mexique. On citera encore C. noxius, C. infamatus, C. sculpturatus. 10 Le genre Tityus est sud-américain, essentiellement brésilien. Trois espèces sont particulièrement à craindre : T. bahiensis, T. trinitatis et surtout l'espèce parthénogénétique et anthropophile T. serrulatus, de loin la plus souvent en cause dans les accidents graves de scorpionisme au Brésil. Par ailleurs, si on considère à I'échelle planétaire I'ensemble des envenimations humaines, il apparaît que les envenimations scorpioniques ont la létalité la plus élevée. Les principaux pays touchés par le scorpionisme sont (cartes 1 et 2) : - En Afrique : tous les pays nord sahariens, I'Afrique de I'Est nordequatoriale, les pays riverains du Sud Sahara, I'Afrique du Sud. En zone équatoriale, à Madagascar, la faune scorpionique n'est pas dangereuse pour I'homme. -En Amérique : le Mexique et les régions limitrophes des Etats-Unis, la Colombie, le Venezuela, le Brésil, la Guyane, - en Asie : le Proche-Orient, le Moyen-Orient, I'lnde. 11 Carte 1 : carte géographique montrant la répartition de l’incidence des P.S au niveau national. 12 Carte 2 13 Espèces de scorpions dangereuses pour l’homme [19] ANCIEN MONDE Genre Androctonus Buthotus Espèce Distribution Remarques Aeneas Afrique nord saharienne. Faible densité Australis De l’Algérie à l’Egypte Plusieurs sous-sp. crassicauda De Mauritanius Endémique du Maroc Franzweri Endémique du Maroc tamulus l’Afrique du l’Arabie Saoudite. Inde nord à Plusieurs sous-sp. Deux sous-sp. parfois classées dans le genre Mesobutus/Butus Buthus occitanus Pourtour méditerranéen et Dangerosité variable pays du Sahel Leirus quinquestrianus Vaste répartition : Afrique, Genre monosp. Parabutus Granulatus. Afrique du sud. moyen orient Afrique de l’est. Dangerosité connue. mal Arabie. Hemiscorpius lepturus Irak, Iran Scorpionidé. Dangerosité ? NOUVEAU MONDE Genre Centrutoide Espèce Remarques Exilicauda Etats unis D’autres Noxius Mexique dangereuses Bahiensis Brésil, Argentine Parthénogénétique trinitatis Trinité. Infamatus Suffusius Tityus Distribution Serrulatus Etats unis, Mexique Mexique Brésil genre espèces du sont 14 III-LES VENINS A- Composition et mode d’action L’essentiel des connaissances acquises sur les venins de scorpions se rapporte à la famille des Buthidés, en raison de leur importance médicale. Ces venins sont avant tout neurotoxiques, comme l’a montré Paul Bert en 1865 [20]. Un siècle plus tard, les premières neurotoxines de venin de scorpion ont été isolées (1960), par une équipe marseillaise [19], des venins des scorpions nord-africains dangereux Androctonus australis (scorpion noir) et du scorpion jaune Buthus occitanus [21]. Dès lors, les venins de scorpion allaient prendre un véritable essor [22]. Le venin est composé de diverses substances comme les phospholipases, l’acétylcholinestérase, l’hyaluronidase, la sérotonine et les neurotoxines. Ces derniers, toutes de nature protéique, vont se retrouver dans les récepteurs cibles des canaux ioniques membranaires des cellules des tissus excitables (système neuromusculaire). On reconnaît actuellement quatre familles de toxines qui agissent sur : - Les canaux sodium. - Les canaux potassium. - Les canaux calcium. - Les canaux chlore. Les deux premières familles sont de loin les mieux connues. Il a été établi en effet que les neurotoxines actives sur les canaux sodium sont responsables de la symptomatologie de l’envenimation, les toxines actives sur les canaux potassium potentialisent l’effet des premières [23]. 15 1-Les toxines actives sur les canaux sodiques : Ces toxines furent les premières à être isolées et purifiées [19,21]. Leur similitude est rapidement constatée et confirmée [22]. Leur ensemble est alors considéré comme l’expression d’un polymorphisme moléculaire [24]. Elles ne constituent qu’une faible fraction du poids sec du venin, généralement inférieur à 5% [25], tout en étant la famille de toxines la plus abondante du venin. Parfois appelées «toxines longues», elles sont constituées d’une séquence comptant une soixantaine de résidus aminoacides, réticulés par quatre ponts disulfures [23] et possèdent une masse molaire de l’ordre de 7000 Da. Ces toxines se fixent avec une très grande affinité et induisent une prolongation du potentiel en bloquant l’inactivation du canal sodique, qui se manifeste par une hyperexcitabilité du système nerveux suite à une augmentation de la perméabilité du sodium et une libération accrue de neuromédiateurs [5]. Leur grande similitude n’empêche pas une spécificité d’espèces cibles, on distingue : . Les neurotoxines actives sur les mammifères [26] agissent sur les neurones selon deux mécanismes différents [27] : - les toxines α, potentiel dépendantes, ne modifient pas le potentiel d’ouverture du canal sodium, mais induisent un ralentissement du potentiel de fermeture. Elles se trouvent dans les venins de scorpions paléo tropicaux. - Les toxines β agissent sur le potentiel d’ouverture du canal sodium et n’ont été trouvées jusqu’à présent que dans les venins de scorpions néo tropicaux. 16 . Les neurotoxines actives sur les insectes [28] comprennent aussi deux catégories [29]. Les toxines dites contracturantes ou excitatrices entraînent une paralysie spastique via un mécanisme proche de celui des toxines β antimammifères. Et les toxines relaxantes ou encore flaccides induisent une paralysie flasque progressive en bloquant les potentiels d’action neuronaux par inhibition des courants sodiques membranaires. 2-Les toxines actives sur les canaux potassium Présentes en faible quantité dans le venin (<1% du poids sec), elles sont constituées d’une séquence comportant environ trente (toxines très courtes) à quarante (toxines courtes) résidus d’aminoacides, réticulés par trois ponts disulfures. Du point de vue fonctionnel, on distingue les bloqueurs potentiel dépendants et les bloqueurs calcium dépendants, mais cette distinction n’est pas toujours tranchée. D’autre part [30, 31,32], leur action peut s’exercer sur les cellules de tissus non excitables (foie, lymphocytes, hypophyse antérieure). La première toxine de cette famille à avoir été identifiée et synthétisée par voie chimique et par ingénierie génétique est la charybdotoxine, du venin du Buthidé paléo tropical Leiurus quinquestriatus (figure 2), elle reste encore la toxine de référence dans l’étude de cette famille de toxines [33, 34, 35]. De nombreuses autres toxines bloqueuses des canaux potassium furent ensuite isolées à partir du venin de diverses espèces de scorpions, tant chez les Buthidés que chez les scorpionidés. B- Toxicité : La toxicité du venin varie selon l’espèce et parfois pour une espèce donnée, selon les sous espèces ou une population particulière de l’espèce. 17 Cette toxicité est généralement évaluée par la DL50 chez la souris en conditions standardisées, elle est de l’ordre de 0,25 à 0,30 pour les plus toxiques (Leirus qinquestrius ; Androctonus australis ; Androctonus Aenas). La DL50 s’élève à 0,9 pour Buthus occitanus. L’envenimation expérimentale chez la souris provoque rapidement un syndrome de type cholinergique: Sialorrhée, larmoiement, hypersécrétion nasale, diarrhée, émission d’urines, dyspnée, contraction musculaire, paralysie spastique, et décès rapide. On sait maintenant que les toxines du venin de scorpion ne franchissent pas la barrière hemato-meningée même chez l’animal nouveau né. Les toxines du venin de scorpion sont essentiellement neurotoxiques, elles agissent sur les canaux sodiques des cellules excitables, prolongent l’ouverture du canal sodique et tendent à entraîner une dépolarisation durable [36]. C’est une stimulation neuronale de type présynaptique qui entraîne une libération massive de neuromédiateurs suivi d’un blocage de la transmission [37]. Ces toxines possèdent une action cardiotoxique, directe d’une part et indirecte par effet des catécholamines sur le myocarde d’autre part. Ces catécholamines sont secrétées par action nerveuse périphérique du venin [36]. Par ailleurs, l’envenimation scorpionique entraîne une augmentation de la perméabilité capillaire responsable d’un œdème pulmonaire d’origine hémodynamique [38]. D’un autre côté, l’accumulation préférentielle de ces toxines au niveau du poumon pose la question de leur effet direct sur cet organe, et donc de la nature lésionnelle de l’œdème pulmonaire fréquent dans le scorpionisme grave [23]. Selon Gueron et al. [38], le venin du scorpion entraîne une augmentation de la contractilité du VG et une augmentation de la TA au début rapidement remplacée par une hypotension. Les toxines identifiées, purifiées, séquencées et caractérisées à partir des deux espèces, A-Australis et B-Occitanus Tunetanus appartiennent à trois groupes 18 structuraux et d’homologie antigénique. Des anticorps préparés contre une toxine d’un groupe structural sont capables de neutraliser les toxines appartenant à ce groupe. De même, il a été démontré qu’un mélange d’anticorps dirigés contre une toxine représentative de chacun des trois groupes neutralise les venins d’A-Australis et B-Occitanus Tunetanus. La moyenne du venin circulant varie selon la classe d’admission (figure A). Pour les patients de la classe I, ils ont une moyenne de venin circulant de 17,82 ±1,9ng/ml. Et pour ceux de la classe II et III, la moyenne de venin circulant est de 37±10,8ng/ml [39]. Figure A : Toxinémie et sévérité clinique [40]. Ainsi, le rapport entre la dose injectée du venin et le poids corporel des patients piqués influence l’évolution de ces derniers [39]. Selon El AMIN, 70 % des enfants<15ans confirment la relation entre la dose du venin injecté et le poids de l’enfant piqué [41]. 19 IV- PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ENVENIMATION Les venins de scorpion contiennent un certain nombre de principes actifs de structure polypeptidique: enzymes [42], sérotonines [43], histamines [44] et quinines [45] notamment. Ils ont tous une action neurotoxique [46] et cardiotoxique [47], mais certaines espèces indiennes ont également une action hémolytique [48]. Malgré d'importantes différences entomologiques entre les nombreuses espèces de scorpion, il existe une grande homologie des effets toxiques de leurs venins et de leurs structures antigéniques, ce qui explique une grande similitude de réactions immunologiques [26]. Les espèces dangereuses pour l’homme ont un venin dépourvu d’enzymes ce qui explique que leur piqûre est peu douloureuse [49-50], les venins de Chactoïdes riches en enzymes (hyaluronidase, protéase, phospholipase, phosphodiestérase, coagulase, anticoagulase, hémolysine …) sont responsables d’algies importantes ; en général toutes les piqûres accompagnées d’inoculation sont très douloureuses, le mécanisme déclenchant de cette douleur n’est pas connu avec précision. A- Mécanisme de l'action du venin au niveau cellulaire : L'action du venin s'exerce sur le métabolisme cellulaire du sodium en perturbant ses systèmes de transport transmembranaire et en créant de nouveaux courants sodiques. Trois types de récepteurs liés à cette action sur le sodium ont été identifiés [51]. Cette action conduit à une dépolarisation prolongée des membranes cellulaires responsable d'importantes perturbations du système nerveux autonome. B- L'action sur le système nerveux central : L'injection expérimentale de venin purifié dans les ventricules cérébraux chez le chat, le lapin et le rat entraîne des manifestations très variées d'excitation du 20 système nerveux: état d'agitation, de lutte, tremblements, mouvements anormaux, opisthotonos, convulsions, incontinence sphinctérienne, hyperthermie et troubles respiratoires [52, 53]. Le système nerveux autonome semble particulièrement en jeu, ce que certains auteurs appellent l'orage autonome [53, 54]. Il existe une libération massive de catécholamines et d'acétylcholine [55-56]. C- L'action cardiovasculaire : L'injection intraveineuse d'une faible dose de venin chez I'animal produit une tachycardie ventriculaire due à l'activation des bêta-récepteurs cardiaques adrénergiques par les catécholamines libérées par I'action du venin [47, 56]. Ces catécholamines ont aussi un effet inotrope positif dose-dépendant [45, 57] et un effet chronotrope non dose-dépendant. A l'inverse, l'injection d'une dose importante de venin peut entraîner une bradycardie et un bloc atrioventriculaire, conséquence de la libération massive d'acétylcholine [45, 57]. Chez l’homme, on observe le plus souvent une tachycardie sinusale. Des anomalies électrocardiographiques à type d'ondes T ou R pathologiques et des troubles de conduction sont également possibles. L'envenimation de l'animal peut être suivie aussi bien d'hypotension que d'hypertension artérielle [47, 58, 56]. L'hypotension est généralement de faible amplitude et de courte durée; elle peut être en relation avec la bradycardie mais elle peut aussi s'observer en l'absence de bradycardie [45, 56, 57], en relation avec une altération myocardique. En revanche, I'hypertension peut être sévère et durer plusieurs heures. Elle est secondaire à l'action des catécholamines, sur les récepteurs alpha-adrénergiques d'une part [45, 59], sur les récepteurs bêtaadrénergiqués augmentant la contractilité myocardique d'autre part [60, 61, 62]; une hypersécrétion de rénine peut y contribuer également. 21 Sur modèle canin d’envenimation scorpionique, l’injection de la fraction toxique d’A- Australis Hector est suivie dans les 1 ères minutes par une élévation très précoce de la pression artérielle systémique, un dédoublement de la pression artérielle moyenne enregistré dès la 5ème minute. Une tendance au retour au niveau de base est ensuite observée, le niveau de base est atteint à la 60ème minute, la tension artérielle continue ensuite à décroître pour atteindre à la 120ème minute des niveaux très bas signant l’installation d’un état de choc. Le débit cardiaque chute de façon soutenue tout au long de l’expérimentation. L’augmentation de la pression artérielle moyenne malgré la baisse du débit cardiaque est en rapport avec une élévation des résistances vasculaires systémiques qui doublent dès la 5ème minute, les résistances vasculaires restent élevées (figure B). Figure B : Effets du venin sur la PAM et les RVS [63]. 22 La pression artérielle pulmonaire d’occlusion (PAPO) s’élève à la 5ème minute en rapport avec la dysfonction cardiaque, un retour progressif vers des pressions de remplissage normal est observé par la suite (figure C). Figure C : Effets du venin sur la PAPo [63]. Cette dysfonction cardiaque est la conséquence de l’élévation de la post charge ventriculaire gauche, une cardiopathie scorpionique s’installe par la suite [64, 5]. Quelques études antérieures ont mis en évidence une altération de la fonction systolique du VG à l'échocardiographie (diminution de la fraction de raccourcissement) [65-66] et à l'angioscintigraphique (diminution de la fraction d'éjection) [67, 68]. Néanmoins, en l'absence de données objectives sur les conditions de charge ventriculaire dans ces études, il restait hasardeux d'avancer toute conclusion définitive sur la signification de la diminution des FR et FE, paramètres fortement dépendants des conditions de charge [69]. Il en est de même 23 pour l'hypothèse d'un trouble de la compliance du VG suggérée par les travaux expérimentaux de Gueron et al. qui notaient une augmentation simultanée de la PTD du VG chez des chiens quelques minutes après 1'injection de venin de scorpion [38]. L'étude de la fonction VD au cours de I'ES est apparue comme une étape nécessaire, afin de faire la part au sein du trouble de la contractilité qui se révélait, entre un mécanisme ischémique et une myocardite par effet direct ou indirect du venin de scorpion. L'atteinte simultanée du VG et du VD orienterait plus vers la deuxième éventualité alors que l'atteinte prépondérante sinon exclusive du VG serait plus en faveur d'une ischémie myocardique [70]. D- L'oedème pulmonaire : Le mécanisme de l'œdème pulmonaire observé au cours de I'ES est resté controversé pendant de longues années [67]. Gueron et al. ont été les premiers à suggérer la possibilité d'une origine hémodynamique à cet OAP [71, 72]. Ils ont trouvé sur un modèle animal d'ES une élévation de la pression télédiastolique du VG avec une réduction du débit cardiaque quelques minutes après l'injection de venin chez des chiens [38]. Chez deux jeunes patients, ces mêmes auteurs ont par la suite retrouvé une élévation de la pression artérielle pulmonaire d'occlusion après une piqûre de scorpion [73]. L'interprétation de ce dernier résultat restait cependant difficile en raison d'un remplissage vasculaire préalable et de nombreuses interférences thérapeutiques. Bawaskar et al. ont fourni un indice supplémentaire en faveur de cette hypothèse en rapportant l'efficacité d'un traitement vasodilatateur chez des patients victimes d'OAP consécutif à une ES [74]. La mise en évidence d'une élévation significative de la PAPO avec une diminution du volume d'éjection systolique dans une étude récente effectuée dans ce même service était la première démonstration sur une série homogène de cinq patients, de la nature hémodynamique de cet OAP [75]. 24 La physiopathogénie de l'oedème du poumon secondaire à I'envenimation scorpionique est complexe du fait de I'interaction de nombreux facteurs. Les études microscopiques effectuées sur les poumons de rats morts d'envenimation montrent un oedème et des hémorragies pulmonaires avec épaississement et hypercellularité des parois alvéolaires [76]. Des faits identiques ont été constatés à l'autopsie de personnes mortes d'envenimation par scorpion L quinquestriatus [71]. Chez le rat, l'oedème pulmonaire est toujours précédé d'une hypertension artérielle systolique et diastolique dont l'importance dépend directement de la dose de venin injecté et de la durée de l’envenimation. La rapidité de la montée tensionnelle constitue un facteur important pour la survenue et la gravité de cet oedème pulmonaire [77]. Il peut être prévenu par l'administration d'un alphabloquant tel que la phénoxyhenzamine. En revanche, l'administration d'un bêtabloquant ou d'un ganglioplégique n'empêche pas sa survenue. Cela souligne le rô1e de I'hypertension systémique dans sa genèse via une insuffisance ventriculaire gauche, les catécholamines favorisant par ailleurs la survenue de l'insuffisance cardiaque en abaissant la compliance et en perturbant le remplissage du ventricule gauche [47, 61, 78]. Ceci a été vérifié récemment sur modèle animal mis au point par Zegal et al. Aussi bien l’adrénaline que la noradrénaline s’élèvent de façon substantielle après injection d’une dose subléthale du venin de Buthus (15 à 25 fois le niveau de base respectivement) [79]. Un autre peptide de vasoconstriction : Le neuropeptide Y (NPY) a été mis en évidence, celui ci subit une élévation précoce dès la 5ème minute avec un maximum de sécrétion atteint à la 30ème minute. Parallèlement à l’augmentation des catécholamines, celle du NPY participe à l’élévation des résistances vasculaires systémiques caractéristiques de l’envenimation scorpionique (figure D). Une sécrétion du facteur atrial natriuretique (FAN) a été mise en évidence, cette sécrétion est détectée dès la 5ème minute pour 25 culminer à la 30ème minute et baisser par la suite progressivement pour atteindre des niveaux normaux à la 180ème minute. Figure D : Effets hormonaux de la piqûre de scorpion. Piqûre de scorpion Phase vasculaire Caté Catécholamines NPY Endotheline ANF, Cytokines Cardiomyopathie Catécholaminergique Isché Ischémique spé spécifique HTA PostPost-charge é Rabat 30 Juin 05 Cette évolution est tout à fait parallèle à celle de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion. Et comme suggéré par les données physiopathologiques récentes, il existe une bonne corrélation entre l’élévation des pressions artérielles pulmonaires d’occlusion témoignant de l’activation de cette sécrétion par le biais d’une distension auriculaire [79]. Une étude menée chez des chiens, mis sous ventilation artificielle et injectés par de venin du scorpion Androctonus Australis à la dose de 0,05mg/kg, pour étudier les effets du venin sur l’hémodynamique, la sécrétion des catécholamines, du neuropeptide Y (NPY), de l’endothéline 1 (Et 1), et du peptide natriurétique auriculaire (ANP). Le venin a provoqué une augmentation rapide et passagère de la pression artérielle moyenne et la PAPo associée à une baisse marquée du débit 26 cardiaque (-55% à 60min). Ces variations hémodynamiques étaient associées à une augmentation rapide et significative de toutes les hormones mesurées. L’augmentation la plus haute était de la Norépinephrine et l’épinephrine (figure E). Cette étude soutient l’implication de la décharge importante des catécholamines dans les perturbations hémodynamiques des piqûres de scorpions et suggère que le NPY puisse être impliqués dans ce processus. Par sa corrélation avec la PAPo, l’ANP pourrait être un marqueur fiable et utile du dysfonctionnement cardiaque dans l’envenimation scorpionique. [80] Figure E : Variation des catécholamines circulantes. Mais l'œdème pulmonaire est sans doute également le résultat de l’augmentation de la perméabilité vasculaire pulmonaire secondaire à la libération de substances telles qu'histamine, sérotonine, quinine, acétylcholine ou prostaglandines [45, 43, 77, 81, 82]. 27 La complexité pathogénique de l'œdème pulmonaire rend compte des difficultés de conduite thérapeutique. Dans certaines études de la littérature [71, 83-84], l'oedème pulmonaire constitue la cause principale de décès. E- Les troubles respiratoires : Chez I'animal, l'envenimation entraîne des troubles respiratoires à type de tachypnée, irrégularité respiratoire et insuffisance respiratoire aigue [45, 85]. Ces troubles sont dus à l’action du venin à différents niveaux: système nerveux central, corpuscule carotidien, voie réflexe empruntant les voies afférentes vagales [86]. Chez l'homme, les manifestations respiratoires sont comparables: dyspnée laryngée, tachypnée, irrégularité et insuffisance respiratoire aigue [87, 46, 84, 73, 88] sans ou avec choc cardiogénique. F- Les autres troubles : 1- Atteinte neuromusculaire : Le venin a une action neuromusculaire à la fois pré- et post-synaptique pouvant provoquer des contractures et des spasmes musculaires [89, 43, 90]. Yarom et Meiri ont montré qu'il exerce une action directe sur la membrane des fibres musculaires, avec altération du flux calcique sans modification structurale décelable [46]. Ils ont rapporté I'effet bénéfique de I'apport de calcium sur les spasmes musculaires même en I'absence d'hypocalcémie [89]. 2- Atteinte digestive : Des symptômes digestifs à type de nausées, hypersalivation, vomissements et diarrhée, sont fréquents chez l'enfant envenimé. Chez l'animal, l'injection de venin produit une hypersalivation secondaire à la stimulation des récepteurs 28 adrénergiques et cholinergiques des glandes salivaires [91]. Au niveau gastrique, elle induit une libération importante d'histamine et d'acétylcholine, et on observe une augmentation de I'acidité titrable et de la sécrétion de pepsine [92]. Cela explique que, chez les malades ulcéreux, la piqûre de scorpion peut provoquer une exacerbation des symptômes ou le réveil d'un ulcère en rémission. Une pancréatite aigue est possible [78] à laquelle participent, au vu des données expérimentales chez l'animal, une hypersécrétion pancréatique exocrine sans doute due à l'action de l'acétylcholine sur les récepteurs muscariniques, et un certain degré d'obstruction canaliculaire à l'origine de laquelle une production exagérée de kallicréine a été incriminée [93, 94]. La motilité intestinale est également altérée par l'action de l'acétylcholine, des catécholamines et d'autres médiateurs libérés tels que la substance P [58]. 3- Troubles de la coagulation : Le venin des espèces du B et para-B de l’Inde et d’Afrique possèdent une phospholipase A qui entraîne des troubles hématologiques (hémorragie digestive, pulmonaire, CIVD) [95] ; Les CIVD restent cependant des manifestations exceptionnelles secondaires à une piqûre de B-Tamulus [38A], elles ne sont pas décrites avec les venins des autres Buthidés. Aucun trouble de coagulation, sur une étude portant sur 96 cas envenimés par L quinquestriatus et A crassicauda, n’a été rapporté [96]. 4- Troubles métaboliques : En 7 ans d'expérience, en Arabie Saoudite [41], et sur plus de 1500 malades, ils n’ont jamais observé de troubles électrolytiques graves, à l'exception de cas d'hypocalcémie. Des troubles électrolytiques à type d'hypokaliémie et d'hypocalcémie ont été décrits, aussi bien chez l'animal [97] que chez l'homme [98]. 29 Une hyperglycémie s'observe chez l'animal de laboratoire envenimé; elle est en partie le résultat d'une augmentation de la glycogénolyse hépatique avec inhibition de la sécrétion et de l’action de l'insuline et augmentation de la sécrétion de glucagon [99-100]. Toutefois, les enfants présentant une hyperglycémie n'ont jamais posé de problème thérapeutique. V-ETUDE CLINIQUE Les manifestations cliniques sont très variées. Certaines dominent par leur fréquence (douleur et état d’agitation) ou leur gravité (œdème pulmonaire ou collapsus vasculaire). Un grand fait remarquable dans les différentes études cliniques publiées est la grande ressemblance de cas géographiquement éloignés causés par des piqûres de scorpions d’espèces différentes [101, 71, 88]. L’action des enzymes du venin explique la présence de symptômes aussi bien cholinergiques (hypersécrétion, peristaltisme, râles hypersudation, bronchiques, priapisme, bradycardie, diarrhée, hypotension, hypermyosis) qu’adrénergiques (tachycardie, HTA, mydriase, rétention d’urines, froideur des extrémités) [95-102] ; pour une espèce donnée, les tableaux cliniques peuvent différer. Généralement, le tableau clinique se résume à des manifestations locorégionales dans 90 à 95 % des cas. Parfois, les symptômes apparaissant une à deux heures après l’injection du venin, se diversifient et s’aggravent plus ou moins rapidement, donnant un tableau polymorphe d’atteinte multiviscérales, pouvant dans 1 à 5 % des cas aboutir au décès [102-49-50].La symptomatologie est due aux neurotoxines dépourvues d’activité enzymatique. Les venins de Buthidés sont pauvres en enzymes. Si souvent, diverses enzymes sont décrites, il s’agit en réalité de produits de lyse cellulaire contenant des enzymes cytologiques obtenues lorsque les venins sont extraits en utilisant un produit électrique. La sévérité de 30 l’envenimation scorpionique est quantifiée selon 3 classes de gravité croissante selon Abroug [103-102-95] : A- Classe I : La plupart des piqûres siègent aux extrémités des membres inférieurs ou supérieurs. Les piqûres multiples étant plus rares. Le signe fonctionnel le plus important est la douleur, toujours intense, et qui va durer de plusieurs heures à vingt-quatre heures. Elle est ressentie par le malade comme une sensation de gène, de fourmillements, de paresthésie ou de brûlure. Elle reste localisée, peut s’accompagner d’un engourdissement locorégional et est déclenchée par la percussion ou au toucher. Cette douleur caractéristique signe l’inoculation du venin. Puisque le scorpion contrôle l’éjection du venin, il arrive que la piqûre soit sèche, sans inoculation du venin. La douleur est bien moindre en intensité et en durée, mais la différence est difficile à apprécier objectivement, d’autant plus que le sujet piqué est habituellement très inquiet. Après une piqûre de Buthidé, on n’observe aucune réaction inflammatoire locale, ni œdème, en raison de l’absence d’enzymes protéolytiques dans le venin. En revanche, après une piqûre de Chactoide, comme BSauloci d’Iran , tout aussi douloureuse, on peut observer une réaction locale inflammatoire parfois suivie d’une petite zone de nécrose du doigt ou de l’orteil piqué (102-95-104). B- Classe II : Les signes locaux, identiques à ceux de la classe I, sont plus marqués. Les paresthésies sont ascendantes dans l’extrémité atteinte [95]. L’apparition de signes généraux caractérise cette classe, essentiellement par dérèglement neurovégétatif donnant un tableau comportant sueurs, rhinorrhée, diarrhée, vomissements, 31 perturbation de la tension artérielle (surtout élévation de chiffres tensionelles), polypnée, parfois dysrégulation thermique modérée. L’ECG à ce stade est normal. L’évolution peut être favorable, et tous les troubles s’amendent en 24 ou 48 heures sans séquelles [104], comme elle peut être défavorable surtout s’il existe des signes prédictibles de gravité. Ce sont des signes apparaissant chez un patient de classe II, et qui doivent alerter quant à l’évolution imminente vers la classe III. Ces signes sont le priapisme, les vomissements, l’hypersudation, la fièvre>39°c et l’âge< 10ans. C- Classe III : Le malade présente des signes généraux sévères qui s’installent après un intervalle libre de deux heures [102-104], aux signes précédents s’ajoutent des troubles respiratoires majeurs, cardiovasculaires et une altération de la conscience. 1. Signes respiratoires : L’insuffisance respiratoire fait la gravité du tableau initial. Elle associe polypnée, cyanose, signes de lutte avec tirage, cornage, battement des ailes du nez, mousse aux lèvres, blocage respiratoire, gasp, stridor, wheezing, râles crépitants ou bronchiques. La radiographie pulmonaire peut montrer des signes d’œdème pulmonaire [102]. Ce dernier complique 18 à 50 % des scorpionismes graves, il résulte souvent d’une dysfonction cardiaque globale, mais la nature lésionnelle de l’œdème pulmonaire ne peut être écartée [105]. Une étude a été menée par l’équipe tunisienne au service de réanimation médicale à SFAX [106]. Son but était de rechercher une corrélation entre la variation de la protidémie et la survenue d’œdème pulmonaire par envenimation scorpionique. Il s’agissait d’une étude rétrospective sur une période de trois ans, où on a inclus tous les patients victimes d’une envenimation scorpionique de stade I ou II sans antécédent d’insuffisance cardiaque, rénale, ou hépatique, les patients ayant reçus un remplissage vasculaire étaient exclus. On a comparé la protidémie entre les 32 deux groupes avec, et sans OAP. On a recherché une valeur seuil pouvant être corrélée à la survenue d’OAP, pour laquelle on a calculé la sensibilité et la spécificité. 59 Patients ont répondu aux critères d’inclusion ; 33 (56 %) parmi eux ont développé un OAP. La protidémie à l’admission est en moyenne de 69,4 + 7,1 g/l dans la population globale. Elle est de 73,6 + 6,2g / l chez les patients ayant développé un OAP, et de 63,9 + 3,8 g/l chez les patients n’ayant pas développé un OAP (p< 0,001). Une protidémie > 70 g / l est corrélée à la survenue d’OAP avec une sensibilité à 75 %, une spécificité à 96 % et une efficacité globale du test à 85 %. En conclusion, une protidémie > 70g / l représente un signe prédictif de survenue d’OAP chez les patients envenimés par le scorpion [106]. 2. Signes cardiovasculaires : Des poussées hypertensives sont observées dans un certain nombre de cas après la piqûre de Buthidés, elles sont liées aux effets des neurotoxines actives sur les canaux sodium. Après piqûre de Chactoide, les effets sur la pression artérielle sont moins marqués voire inexistants, la composition des venins étant différente. La fréquence de ce symptôme est différente selon les auteurs (de 4,3 % à 77 %). Après la phase hyper dynamique initiale, caractérisée par une augmentation du débit cardiaque et de la tension artérielle, s’installe une phase hypokinétique dominée par une hypotension et une insuffisance cardiaque [102-107]. Cette dysfonction cardiaque globale (cardiomyopathie spécifique scorpionique) est secondaire, selon les auteurs, soit à une charge importante de catécholamines, soit à une hypoxie tissulaire secondaire à la vasoconstriction coronaire et aux thrombi de petits vaisseaux [108-102-109-110]. L’intervention de certaines substances cardiopressives et vasodilatatrices pourrait aussi expliquer les effets cardio-vasculaires rencontrés dans le scorpionisme [74]. C’est à ce stade 33 qu’apparaissent des altérations polymorphes non spécifiques à l’ECG , associant des troubles du rythme ( à type de tachycardie , bradycardie sinusale , fibrillation auriculaire ou ventriculaire , tachycardie supra ventriculaire plus rarement ) ,des anomalies de l’onde P ( aspect d’hypertrophie auriculaire , extrasystoles auriculaires , wandering pace maker ) , des troubles de conduction ( BAV 1er degré , rythme jonctionel , alternance électrique , bloc de branche ) , des troubles de repolarisation ( onde T positive et symétrique , négative , en double bosse , sus et sous décalage ST ) et un allongement de l’espace QT [102-111] .De rare cas d’infarctus chez les sujets jeunes à coronaires saines ont été décrits [109] . Ces troubles apparaissent entre la deuxième et la troisième heure après l’envenimation avec un maximum entre les 10ème et 16ème heure [102-53-111]. Les mécanismes des troubles de conduction ou de l’infarctus n’ont pas d’explication claire [109]. Une élévation des enzymes cardiaques, CPK-MB et Troponine Ic, constituerait un marqueur précoce du retentissement cardio-vasculaire de l’intoxication [112]. Une étude faite en Egypte [113], pour évaluer la fréquence de l’atteinte myocardique dans l’envenimation scorpionique chez l’enfant, en utilisant les différents marqueurs biochimiques (Troponine Ic, IL-8, CPK, CPK-MB et LDH), pour identifier le marqueur le plus spécifique au pronostic et au diagnostic précoce de l’atteinte myocardique et éclaircir le rôle de l’IL-8 dans la pathogénie de l’atteinte myocardique dans l’E.S et pour montrer la relation entre ces marqueurs biochimiques et les classes cliniques. Cette étude a montré que la Troponine Ic est un marqueur spécifique et sensible à 100 % au diagnostic de l’atteinte myocardique dans les cas sévères de l’E.S. Récemment, Herrman et al. (2001) [114] a suggéré que la Troponine Ic était un marqueur excellent dans l’atteinte myocardique. En outre, Guest et al. (1995) [115] ont conclu que l’élévation du taux de la Troponine Ic est corrélée à la sévérité de l’atteinte myocardique et prédit la mortalité et la morbidité cardiovasculaire. Dans cette même étude réalisée en Egypte, la Troponine Ic n’est 34 pas détectée chez les témoins ni les patients de la classe I. Les niveaux plasmatiques de la Troponine Ic étaient augmentés plus dans les cas sévères que dans les cas de la classe II avant et après l’admission. Das et al. ont prouvé que les enfants envenimés avec myocardite avaient une dysfonction du VG montrée par l’échographie. L’IL-8, comme a prouvé Yasunori et al. (1993) [116], est libéré dans la circulation systémique lors d’une phase précoce de l’atteinte myocardique. Dans la même étude faite en Egypte, on a trouvé une corrélation significative entre l’IL-8 et la Troponine Ic seulement chez les patients victimes d’E.S avec myocardite [113]. Le paramètre CPK-MB existe dans le plasma sous deux formes, CPK-MB¹et CPK-MB² et seule la forme CPK-MB² existe dans le myocarde. De plus, il n’existe aucune corrélation entre les taux plasmatiques du LDH, CPK et CPK-MB et la mesure des variables échographiques dans les cas modérés à sévères dans l’E.S. Amaral et al. (1991) [66] rapportent que l’échographie est plus sensible que la CPK-MB dans l’évaluation de l’atteinte myocardique après une piqûre de scorpion. Sofer et al. (1991) [117] ont prouvé que la CPK-MB était augmentée chez les patients avec des signes cardiaques. Mais, il manque une relation directe avec la défaillance cardiaque. En conclusion, on peut suggérer que la Troponine Ic est le meilleur marqueur spécifique pour le diagnostic de l’atteinte myocardique dans l’E.S, qui est souvent associée à l’atteinte du muscle squelettique. Autres marqueurs biochimiques n’ont pas une telle spécificité. Aussi, l’IL-8 peut être impliqué dans la pathogénie de l’atteinte myocardique dans l’E.S. 3. Signes neuromusculaires : Ils sont variés et témoignent d’une certaine gravité, certains ont été rapportés à fasciculations, une de encéphalopathie crampes hypertensive, musculaires, de il s’agit secousses de des dystonies, de extrémités. les 35 convulsions sont possibles chez le nourrisson et le petit enfant elles sont secondaires à l’anoxie cérébrale consécutive au collapsus cardiovasculaire ; Les manifestations centrales sont faites de convulsions généralisées ou localisées , de myoclonies , d’agitation , d’obnubilation , de dysrégulation thermique , de coma , de priapisme , d’hyper salivation , plus rarement d’un nystagmus , d’un strabisme , de mouvement oculaires erratiques , de troubles de la déglutition , de fasciculations de la langue , de dysarthrie et de paralysie de la sphère pharyngée , l’examen pupillaire est variable : on peut trouver myosis mydriase ou anisocorie . Exceptionnellement, on peut observer une atteinte d’un nerf périphérique, des accidents vasculaires cérébraux ont aussi été décrits, leur pathogénie n’est pas bien élucidée, ils pourraient être secondaires aux perturbations de la coagulation, à l’hypotension, à la dépression myocardique et à l’état de choc. [102-118-119-95 105]. 4. Manifestations digestives : Des nausées et des vomissements annoncent généralement l'apparition des signes généraux et du syndrome muscarinique avec hypersialorrhée, diarrhée et douleur abdominale. Des hématémèses et des mélénas peuvent se voir. 5. Manifestations biologiques : Les principales perturbations biologiques sont une hyperglycémie, généralement modérée, et une hyperleucocytose qui sont considérées comme une réaction de stress non spécifique liée à la douleur. Ces signes s’observent à tous les stades et sont un bon témoin de la réalité de l’envenimation, car la mesure de la veninémie par test Elisa, expérimentalement et cliniquement réalisable [120], n’est pas encore entrée dans la pratique des laboratoires médicaux, probablement parce qu’elle se situe aux limites de sensibilité et de la reproductibilité de la méthode. 36 D’autre part, on estime que 20% des piqûres ne s’accompagnent pas d’inoculation de venin [121]. Les troubles électrolytiques sont généralement modérés : hyponatrémie, hyperkaliémie et hypocalcémie, on peut aussi avoir une acidose métabolique avec acidémie dans les tableaux graves. Un syndrome de coagulation intra vasculaire est rarement décrit, un seul cas a été décrit en Arabie Saoudite du à une envenimation par scorpion Nebo heiroconticus [122]. Sur le plan rénal on peut assister à une oligurie, une polyurie, une hématurie, l’insuffisance rénale est rare, souvent fonctionnelle par déshydratation, parfois organique par atteinte tubulaire ou provoquée par l’hémolyse (Butus suloci). VI- FACTEURS DE GRAVITE ET EVOLUTION Les facteurs de gravité de la piqûre de scorpion sont en fonction de l’espèce en cause, de la taille du scorpion (risque est élevé si la taille est supérieure à 5cm), de son âge, de sa nutrition, des conditions climatiques de son habitat, de la qualité du venin injecté (ce qui est toujours ignoré en pratique), de sa voie d’inoculation, en principe sous cutanée ou intra dermique, l’inoculation intra vasculaire est exceptionnelle et dangereuse. Une inoculation au niveau du tronc, de la tête ou du cou, zones richement vascularisées, est un facteur de gravité de même que l’âge de l’enfant. En effet, Hisham al Mahaba [123] a remarqué que le choc était fréquent chez les enfants d’âge inférieur à 5ans, et il l’était encore plus lorsque le poids était inférieur à 10kg. Quelles que soient les conditions, les sujets jeunes seraient majoritairement frappés ; En Tunisie, 71 % des victimes sont âgées de moins de 15 ans. Les scorpions ne sont vraiment actifs que pendant les mois les plus chauds de l'année, soit d'avril à septembre ou octobre dans l'hémisphère nord : plus de 80 % 37 des piqûres surviennent au cours des mois de juin à septembre. D'un naturel craintif [124], peu agressifs, lucifuges, les scorpions piquent lorsqu'ils sont dérangés ou malmenés par inadvertance. Les piqûres, qui siègent presque toujours aux extrémités des membres supérieurs (main) et inférieurs (pied, malléole), ont lieu de façon prédominante en fin de journée et durant la première partie de la nuit, mais on peut en observer à toute heure de la journée de même qu'à toute époque de l'année, même au plus fort de la saison hivernale, alors que les scorpions hibernent. Les piqûres hivernales, rares, jouissent d'une réputation de moindre gravité qui n'est pas vraiment justifiée. Les piqûres surviennent le plus souvent à l'extérieur des habitations. Dans certaines circonstances, on peut observer une proportion importante de morsures domestiques, dans le cas d'espèces s'adaptant aux milieux anthropisés qui, indirectement, fournissent des proies aisément accessibles (entretien insuffisant de la voirie ou des immeubles). Selon Lourenço, dans un milieu modifié, trois facteurs convergents font émerger un scorpionisme. : une expansion démographique humaine importante, l'expansion d'une espèce dangereuse dans le milieu modifié, parfois au détriment d'une espèce inoffensive, avec éventuellement une acquisition de moeurs domiciliaires, un recouvrement dans ces milieux modifiés de l'expansion simultanée de l'espèce humaine et du scorpion dangereux. Lourenço dresse ainsi une carte des régions du globe à taux élevé de scorpionisme : zone Pacifique du Mexique, Etat de Sao Paulo, Brésil, pays du Maghreb, Egypte. On pourrait sans doute ajouter d'autres secteurs, en Colombie, au Venezuela, en Afrique du Sud, en Inde, ou encore dans le sud de la péninsule Arabique. Malgré la banalité des signes initiaux, l’évolution peut être grave, ce qui est contraire au cas de l’adulte, d’où une hospitalisation obligatoire. L’évolution vers les formes graves est imprévisible, certains signes cliniques en sont annonciateurs, leur présence devrait inciter à une surveillance plus étroite 38 du fait du risque de survenue d’un arrêt cardiaque : hypersudation, vomissements, agitation, hypertension, priapisme, hyperthermie supérieure à 40°C, coma, convulsions, œdème aigu du poumon. Une hyperglycémie supérieure à 20m.mol/l est aussi de mauvais pronostic [102-104-125]. En cas d’évolution favorable, l’obnubilation ou le coma disparaissent puis les signes digestifs et respiratoires en quelques jours. Les troubles électrocardiographiques s’amendent en plusieurs jours à plusieurs semaines (pour les troubles de repolarisation). La biologie se normalise en 3 à 4 jours [102-104]. Le décès scorpionique survient d’une façon plus fréquente chez l’enfant que chez l’adulte. Il est essentiellement causé par l’œdème pulmonaire ainsi que l’état de choc [38A, 75, 73, 30A]. La mortalité varie de 0,15% à 7,1% ce qui est plausible, selon certains auteurs elle peut parfois atteindre 25% dans les formes graves. Dans les cas mortels, le décès survient dans les 24heures qui suivent la piqûre du fait des complications pulmonaires ou circulatoires, une fois passé ce délai, l’évolution est souvent favorable [104, 105]. Les séquelles comme la polynévrite, la cécité, le syndrome extra pyramidal, l’hémiplégie, le développement secondaire d’une cardiomyopathie dilatée sont rarissimes [64-105]. VII-TRAITEMENT : Il n’y a pas de consensus sur le traitement de l’envenimation par piqûre de scorpion. Actuellement La conduite thérapeutique comporte deux volets : le premier est le traitement spécifique visant à neutraliser le venin , c’est le sérum antivenimeux , le second est le traitement symptomatique ayant pour but de corriger les troubles engendrés par l’action du venin sur l’organisme [ 41 ] . 39 A- Le traitement symptomatique : Du fait de la complexité pathogénique et de la grande variabilité des tableaux cliniques, il n’est pas possible de décrire un seul schéma thérapeutique [41]. Selon les auteurs les principales situations cliniques ont été identifiées, et pour chacune d’entre elles une conduite thérapeutique a été définie. q Piqûres de scorpion sans manifestations systémiques : L’enfant étant piqué par un scorpion et présentant une douleur locale importante, un traitement symptomatique banal est généralement suffisant, à base d’antalgiques, ou par infiltration locale d’anesthésiques (Xylocaine). La douleur peut être soulagée efficacement en refroidissant la zone d’inoculation lorsque le siège de la piqûre et les conditions matériels s’y prêtent [126-127-104-95], la partie atteinte sera immobilisée. Les opiacés pouvant potentialiser la toxicité du venin sont contre indiqués [118]. L’enfant doit être gardé en observation pendant une durée minimale de 24 heures, même s’il ne présente aucune manifestation clinique d’envenimation [41]. En outre, il ne faut pas oublier de mettre l’enfant en confiance ainsi que sa famille. Il convient par ailleurs de traiter tout enfant ayant été piqué par une « bête »inconnue et présentant des symptômes qui peuvent faire penser à une piqûre de scorpion [41]. q Hypotension modérée Cette situation concerne des malades dont la pression artérielle n’excède pas le tiers de la pression artérielle normale, le pouls étant bien perceptible. Selon l’expérience Saoudienne (EO EL Amin) on recommande dans ce cas les deux mesures suivantes [41] : 40 Ø Perfusion de solutés salés à 4,5 ·/.. , mais il convient toujours de se méfier d’une surcharge, et il faut donc par la suite respecter la restriction hydrique, c’est à dire ne pas dépasser le tiers des besoins hydriques pour le poids et l’âge dans les 24 heures qui suivent. Ø L’Atropine est très efficace pour le prolongement de la survie et la protection des souris, des rats et des lapins contre l’effet pharmacologique sévère du venin de scorpion. Cet effet est augmenté lorsqu’elle est associée à un alphabloquant comme la Phentolamine (Ismail et al. 1992) [45]. Cela est expliqué par le fait que l’Atropine bloque l’action hypotensive et la Phentolamine bloque l’effet hypertensif du venin. Cependant, l’utilisation de l’Atropine n’est pas recommandée en dépit de la fréquence des signes de la série muscarinique (hyper sudation, hyper salivation, vomissements). Elle peut bloquer la sécrétion sudorale et perturber la thermorégulation des sujets déjà affaiblis par les vomissements et la diarrhée, en outre elle potentialise expérimentalement l’effet hypertenseur et la sévérité de l’œdème pulmonaire induit par le venin chez le rat comme l’ont recommandé Freire-Maia et Campos (1989) [128]. Elle ne sera préconisée que devant une bradycardie sévère (défaillance sinusale, bloc auriculo-ventriculaire du 3ème degré) avec ou sans hypotension [129], à la dose de 0,005 à 0,02mg/kg par voie intraveineuse. q L’hypertension artérielle v Pour EL Atrous, Ismail et Gueron les vasodilatateurs ont un effet bénéfique dans le traitement de l’hypertension artérielle. L’utilisation de l’Hydralazine doit être prudente du fait de son action hypotensive imprévisible et prolongée même pour des posologies inférieures à 10 mg. La Prazosine (125 à 250 µg peros) présente non seulement des effets bénéfiques sur la fonction cardiaque, comme la diminution des résistances vasculaires et du retour 41 veineux sans augmentation de la fréquence cardiaque, mais aussi des effets bénéfiques sur le système nerveux central, sur le métabolisme et la sécrétion d’insuline. Elle est parfois préconisée en association aux autres antihypertenseurs, la Nifedipine en particulier, cette dernière est administrée seule ou en association avec l’Hydralazine ou la Prazosine a été utilisée avec succès, elle améliore le débit sanguin coronaire mais peut être à l’origine d’une tachycardie inductrice de troubles de rythme. Le Captopril n’est pas utilisé de façon courante dans le traitement des manifestations cardiovasculaires au cours de l’envenimation scorpionique. Mais, selon Karnard [130], il peut corriger une hypotension induite par les diurétiques lors du traitement de l’œdème pulmonaire [131-109-129]. q Etat d’œdème pulmonaire Isolé, associé à une hypertension, ou associé à un état de choc, l’œdème pulmonaire constitue la cause la plus fréquente de mortalité [96-132-133-71]. Son traitement doit se faire en service de soins intensifs, et la conduite de la réanimation doit être adaptée individuellement aux données de chaque patient [132-133-88]. Il est prioritaire de mettre en place une voie veineuse centrale et surveiller la pression artérielle pulmonaire pour contrôler l’équilibre hydrique. Ces malades ont généralement besoin d’un support ventilatoire avant même qu’ils ne développent un collapsus vasculaire. Selon EL Amine EO et Breir R., l’évaluation répétée des gaz du sang n’aide pas à la décision d’installer ou non une ventilation artificielle, et attendre une modification des gaz du sang contribue au décès de certains patients. C’est pourquoi ils préfèrent mettre en place une ventilation artificielle dès le départ, Cette ventilation à pression intermittente est associée aux autres moyens de lutte contre l’œdème pulmonaire [41] (restriction hydrique, injection de Furosémide et oxygénothérapie). q Etat de choc 42 Ces malades présentent généralement des troubles de conscience : somnolence, obnubilation, état de confusion pouvant aller jusqu’au coma. Le pouls est généralement non palpable et la pression artérielle est très abaissée, au dessous du tiers de la tension artérielle normale, la prise en charge doit se faire dans un service de soins intensifs. L’état de choc doit être traité en restant vigilant sur le risque d’apport liquidien excessif, l’utilisation de plasma peut faciliter la survenue d’œdème pulmonaire. Lors des envenimations scorpioniques, la dysfonction cardiaque touche dans des proportions égales les ventricules droit et gauche. La Dobutamine est utilisée pour ses effets sur les perturbations cardiocirculatoires ainsi qu’au cours du choc cardiogénique et dans l’insuffisance cardiaque congestive, elle améliore le transport d’oxygène avec augmentation de sa consommation (figure F) . Par ailleurs, la Dobutamine améliore la fraction d’éjection du ventricule droit en augmentant la contractilité myocardique et en réduisant la post charge [134-135]. La posologie est en moyenne de 17 μg/kg par minute à atteindre par titration toutes les quinze minutes (sans dépasser 20 μg/kg par minute) jusqu’à stabilisation de l’état clinique (disparition des signes de l’état de choc) et reprise d’une diurèse supérieure à 0,5 ml/kg par heure. Le sevrage de la dobutamine doit se faire de façon progressive après stabilisation durable de l’état hémodynamique (24 à 48 heures). L’administration de la dobutamine est associée au remplissage vasculaire par du sérum salé à 0,9 % ; 5 ml/kg par 30 minutes chez l’enfant et 250 ml/30 minutes chez l’adulte, afin d’éviter toute surcharge volémique pouvant aggraver un oedème pulmonaire. [136] Peu d’études publiées rapportent l’utilisation de la dobutamine dans le traitement de la défaillance circulatoire et l’œdème pulmonaire. Néanmoins, une étude faite en Tunisie [137], montre que la perfusion de la dobutamine a corrigé avec succès les paramètres hémodynamiques appropriés à la fonction du VG et VD. Les variations 43 hémodynamiques produites par la dobutamine étaient tout à fait semblables à celles décrites dans l’insuffisance cardiaque congestive. Ces effets hémodynamiques étaient associés à une amélioration clinique simultanée de tous les patients. Figure F : Effets hémodynamiques de la Dobutamine. La ventilation artificielle, après intubation, est un acte décisif dans la prise en charge de la détresse respiratoire et neurologique. Elle permet d’assurer une bonne oxygénation cérébrale et de protéger les voies aériennes du syndrome d’inhalation secondaire aux vomissements. Elle nécessite une préparation du patient avant sa mise sous anesthésie et sa sédation. L’intubation trachéale ne doit être réalisée qu’après échec d’une oxygénothérapie à 100 % par masque facial et persistance d’une SaO2 < 95 % et/ou de signes cliniques de détresse respiratoires ou de détresse neurologique. Le pronostic vital du patient dépend de la rapidité du 44 traitement du choc cardiogénique et de la mise en place d’une ventilation artificielle. [136]. q Autres manifestations : v Les vomissements, fréquents lors des envenimations scorpioniques, peuvent être traités par le Métoclopramide à la dose de 0,15mg/kg à répéter toutes les 6heures, mais le Chlorpromazine du fait de son action tranquillisante, semble être la thérapeutique de choix devant un tableau clinique associant vomissements et agitation. v L’agitation et l’hyper irritabilité : Selon l’expérience de EL AMINE EO et BERAIR R., les malades dont la manifestation systémique est l’agitation et l’hyper irritabilité, il faut instaurer un traitement sédatif à base de prométhazine ou chlorpromazine à dose de 0,5 mg / kg, majorée si nécessaire jusqu’à 1 mg / kg et qui peut être répétée après 6 heures [128]. On doit éviter l’utilisation des barbituriques, de la morphine, et de pethidine qui potentialisent l’action du venin. Selon l’expérience de ces mêmes auteurs le chloral n’est pas efficace chez l’enfant [87]. Il convient par ailleurs d’instituer une restriction hydrique pendant 24 heures en ne donnant que le tiers des besoins pour l’âge et le poids corporel afin de prévenir l’œdème pulmonaire [122]. Le Midazolam (Hypnovel®) en intraveineuse (IV) lente a montré son efficacité dans les piqûres sévères (Centruroides Sculpuranus) [138], il est administré à la dose de 0,1 à 0,3mg/kg, à répéter si besoin. v Devant des convulsions, le Diazépam (Valium®), à raison de 0,5mg/kg en intrarectal (IR) sans dépasser 10mg par injection, ou le phénobarbital sont préconisés en se méfiant d’une aggravation de la dépression respiratoire causée par le venin [129]. 45 v L’hyperthermie, sera traitée par du paracétamol [129], à raison de 60 mg/kg/24h en 4 prises. D’autres drogues telles que la dandrolène, la quinine ou l’acétylsalicylate semblent avoir une action antithermique efficace [139]. Elle peut être traitée aussi par les moyens physiques comme la vessie de glace. v L’administration de gluconate de calcium 10 % traite les crampes musculaires sévères [95]. v L’intérêt des anti-inflammatoires reste à l’étude [121, 140]. On a aussi relevé l’effet bénéfique de l’hydrocortisone dans le traitement de l’état de choc [141]. Par contre, une étude menée dans un hôpital régional en Tunisie pour évaluer l’efficacité de l’administration intraveineuse de l’hemisuccinate de l’hydrocortisone dans les piqûres de scorpions, qui portait sur 600 patients dont l’âge est supérieur à 10ans, la moitié de ces patients a reçu de l’hydrocortisone et l’autre moitié n’a reçu qu’un placebo. Cette étude a montré qu’il n y a aucun apport de la corticothérapie dans les piqûres de scorpion [142]. B- Traitement spécifique : Immunothérapie antiscorpionique 1-Données expérimentales : L’immunothérapie est largement discutée dans la littérature entre adeptes acharnés et sceptiques quant à l’efficacité clinique de cette approche. Sur le plan expérimental, il est clairement établi que le sérum développé contre les venins de scorpions sévissant dans différentes contrées du globe a une capacité de neutralisation adéquate in vitro. Cependant, des données expérimentales et cliniques de plus en plus concordantes sont venues jeter un doute sur l’efficacité de l’immunothérapie et son indication dans le traitement de l’envenimation scorpionique. Sur un modèle canin d’envenimation, Tarasiuk et al. montrent que les 46 paramètres classiquement perturbés par l’envenimation scorpionique (débit cardiaque, tension artérielle et PAPo) demeurent non perturbés lorsque le sérum est administré simultanément avec le venin. Cependant, ces mêmes paramètres sont profondément altérés lorsque l’administration du sérum succède de 20 minutes seulement à l’injection du venin. Il s’agit là d’un délai difficile à obtenir dans l’exercice clinique, même dans les conditions les plus optimales [79]. Les effets de l’envenimation sont présents et même plus intenses lorsque l’antivenin est administré 60 minutes après le venin. Abroug a fait les mêmes constatations dans le laboratoire avec le modèle canin d’Androctonus australis. L’administration simultanée du venin et de l’antivenin permet de maintenir le débit cardiaque, la pression artérielle, la PAPo et les résistances vasculaires constants. Aucune perturbation hormonale n’est observée non plus. Lorsque le sérum est administré 10 minutes seulement après l’envenimation scorpionique, l’importance des perturbations obtenues après E.S et leur cinétique ne sont pas plus altérées par le SAS. L’évolution de ces paramètres est superposable à celle où le venin est injecté seul. L’effet de la dose de SAS a également été vérifié. L’administration à l’animal envenimé de 4 fois la dose de SAS préconisé en pratique clinique est sans effet sur les paramètres hémodynamiques et hormonaux perturbés dès lors que les délais d’injection de SAS sont de 10 minutes seulement. Ces données expérimentales comportent les résultats des études cliniques récentes. Les études contrôlées (contrôle rétrospectif dans l’étude de Sofer et al. et celle de Belghith et al., contrôle concurrent parallèle dans l’étude de Abroug et al.) ont toutes échoué dans la mise en évidence d’un quelconque bénéfice de l’administration de sérum antiscorpionique [79]. Dans la dernière étude prospective randomisée contrôlée, deux groupes de patients ont été inclus (respectivement 422 malades ont reçu l’immunothérapie et 47 413 un placebo). Les patients appartenaient à deux grades de gravité de l’envenimation scorpionique (classe I, manifestations localisées : 82% des patients dans chacun des deux groupes et classe II, manifestations généralisées : 18% dans les deux groupes). L’administration du sérum antiscorpionique dans les délais relativement courts, 2 heures en moyenne (moins de 30 minutes dans plus de 70% des cas dans chacun des 2 groupes) n’a pas eu d’efficacité du point de vue préventif ( capacité d’éviter l’apparition secondaire de manifestations généralisées d’envenimation scorpionique analysées chez le groupe I) et curatif ( capacité de contrôler les manifestations cliniques initialement présentes analysées dans la classe II de l’envenimation scorpionique). En effet, les effets curatifs étaient comparables dans les deux groupes (56% et 60% dans le groupe sérum antiscorpionique et placebo respectivement) et les effets préventifs l’étaient également (92% et 91% dans le groupe sérum antiscorpionique et placebo respectivement) (figure G). 48 Figure G: Effets préventifs et curatifs du SAS en comparaison au placebo [126]. Une des explications à l’inefficacité du sérum antiscorpionique tient aux différences pharmacocinétiques majeures entre le venin et les immunoglobulines totales du sérum antiscorpionique. Ismail et al. ont comparé les cinétiques respectives du venin de Leirus quinquestriatus et les immunoglobulines globales contenues dans le sérum antiscorpionique dirigé contre le venin de ce scorpion ainsi que celles de leurs fragments Fab’2 et Fab. Cette étude a montré que le venin a une demi-vie de distribution de 32 minutes alors que les immunoglobulines globales ont une demi-vie de distribution 10 fois supérieure (313 minutes). Des deux fragments d’immunoglobulines potentiellement actives sur le venin, les Fab’2 ont le profil le plus intéressant avec une demi-vie de 57 minutes. Ismail a montré également que la concentration maximale au niveau des deux compartiments (superficiel et profond) dans lesquels se distribue le venin, et qui doit être la cible des immunoglobulines, est également très différente entre venin et immunoglobulines totales ou fragmentées. Au niveau du tissu superficiel, le venin a une concentration de 78% (plus des ¾ du venin initialement présent dans le plasma se retrouvent au niveau de 49 ce tissu superficiel) ; la concentration maximale n’est que de 28% pour les immunoglobulines totales ; elle est de 14% pour les fragments Fab. Au niveau du tissu profond, la concentration finale du venin est égale à 2,5 fois celle initialement retrouvée dans le plasma ; par contre, pour les immunoglobulines retrouvées dans les tissus profonds, 37% des fragments Fab et 1,5 fois la concentration sérique des fragments Fab’2 y parviennent (figure H). Figure H: concentration du venin et des immunoglobulines au niveau des compartiments superficiel et profond [143]. Cette étude donne également des informations très intéressantes en matière de vitesse de transfert intercompartimental en comparant les propriétés du venin, des immunoglobulines totales et des fragments d’immunoglobulines. Le venin atteint la concentration maximale au niveau du compartiment superficiel en 10 minutes, les immunoglobulines totales l’atteignent en 360 minutes. Ce temps est de 60 minutes et 270 minutes pour les fragments Fab’2 et Fab respectivement. Au niveau du compartiment profond, la concentration maximale est atteinte en 1,8 heure par le venin, en 30 heures pour les immunoglobulines totales, 6 heures pour les fragments Fab’2 et 24 heures pour les fragments Fab (figure I). 50 Figure I : Délais d’obtention de concentrations tissulaires maximales [143]. Il ressort donc de cette étude que le venin a une distribution très rapide et atteint au niveau des récepteurs tissulaires des concentrations beaucoup plus importantes que celles des immunoglobulines actuellement utilisées. Des deux fragments d’immunoglobulines utilisables dans le contexte clinique, les Fab’2 ont les propriétés les plus intéressantes et auraient potentiellement un intérêt dans ce domaine, au moins sur le plan théorique. Une fois ces conditions de développement réalisées, les propriétés pharmacocinétiques largement améliorées, il restera alors l’épreuve incontournable de l’essai clinique contrôlé. L’expérience clinique fusionne en effet de molécules actives in vitro, mais dont l’évaluation clinique n’a permis de mettre en évidence aucun effet sur les paramètres cliniquement pertinents. Il ne faudra pas non plus oublier l’évaluation de la balance coût – bénéfice (figure J) .Tant que les conditions à l’indication du SAS ne sont pas toutes réunies, il faudra continuer de à faire usage judicieux traitements symptomatiques comme l’assistance ventilatoire et les drogues inotropes dont l’efficacité est bien démontrée [144]. 51 Figure J : Coûts de la sérothérapie en Dollars [145]. 2-Controverses au sujet de l’utilité de l’immunothérapie antiscorpionique : faits et perspectives : L’immunothérapie reste jusqu’à aujourd’hui le seul traitement spécifique des envenimations scorpioniques graves. Cependant son efficacité clinique dépend directement des conditions de son application. Pour tenter d’améliorer progressivement l’immunothérapie antiscorpionique, une approche combinée a été développée, elle repose sur les volets suivants [79]. 1. Etude de la toxicité des venins et détermination de leurs caractéristiques toxicocinetiques. 2. Amélioration de la qualité de l’immunsérum utilisé. 3. Modélisation de l’envenimation scorpionique et optimisation des conditions d’application de l’immunothérapie. 52 4. Evaluation de l’efficacité clinique de l’immunothérapie telle qu’elle est appliquée actuellement en Tunisie dans les traitements de l’envenimation graves. Connaître la toxicocinétique d’un venin permet d’appréhender son mode de distribution et ses voies d’élimination. De même, l’on peut établir des corrélations éventuelles entre les paramètres cinétiques, les symptômes et le degré de gravité de l’envenimation. Enfin, il est possible d’évaluer et de comparer l’efficacité des différents traitements et des différentes voies d’administration, et de suivre l’évolution de la thérapie. Suite à une injection intraveineuse chez le lapin, le venin de scorpion suit un modèle cinétique tricompartimental avec probablement un compartiment central, un compartiment tissulaire périphérique et un compartiment tissulaire profond. Il diffuse très rapidement et se distribue dans un grand volume. En effet, la demi-vie de distribution (t ½ a) est égale à 3 – 4 fois le volume sanguin. Après une injection sous cutanée, le venin apparaît très rapidement dans la circulation sanguine et sa concentration plasmatique atteint sa valeur maximale entre 45 et 60 minutes après l’injection, indiquant une résorption rapide du venin à partir de son site d’injection. Cette concentration diminue ensuite progressivement pour devenir indétectable par ELISA après 8 à 9 heures. La modélisation mathématique des résultats expérimentaux montre que la distribution et l’élimination du venin suivent un modèle cinétique bicompartimental. La détermination des paramètres toxicocinetiques indique que la bio disponibilité (F) est supérieure à 90 %, ce qui traduit une résorption quasi totale du venin depuis son site d’injection. La demi-vie de distribution est faible et le volume de distribution à l’équilibre est élevée, indiquant une diffusion rapide et généralisée du venin dans l’organisme. 53 La clairance totale, relativement élevée, et le temps de résidence moyen, quand à lui relativement faible, traduisent une élimination rapide du venin. En effet, celle-ci est quasi totale au bout de 6 x t ½ β, soit de 8 à 9 heures. Ceci corrobore l’apparition très rapide des symptômes de gravité chez l’homme suite à une envenimation scorpionique. L’efficacité de l’immunothérapie dépend en grande partie de l’immunsérum mais également des conditions de son application (dose injectée, voie d’injection, délai d’injection après envenimation etc …). Les expériences d’envenimation et l’immunothérapie réalisées chez le lapin ont permis d’aboutir aux conclusions suivantes : v Pour qu’une immunothérapie antiscorpionique soit efficace, il est nécessaire d’administrer précocement par voie IV une dose suffisante d’immunsérum pour obtenir à la fois une neutralisation immédiate, complète et définitive du venin dans le compartiment vasculaire rapide et maximale des toxines des compartiments périphériques vers le compartiment central. La plus faible dose d’immunsérum permettant d’obtenir des résultats est appelée dose minimale neutralisante (efficace). La dose minimale efficace reflète mieux le pouvoir protecteur d’un immunsérum que la DP50 ou le titre neutralisant. Elle varie en fonction de la qualité et de la nature de l’immunsérum, de la voie d’injection et de la gravité d’envenimation. v La voie IV est la plus efficace que la voie IM lors de l’immunothérapie antivenimeuse, tout au moins pour les deux paramètres étudiés ( neutralisation immédiate et complète des toxines circulantes et redistribution rapide et maximale des toxines tissulaires vers le compartiment vasculaire ) . 54 v L’administration intra veineuse tardive de l’immunsérum reste efficace d’un point de vue pharmacocinétique du moins, car elle permet de neutraliser rapidement les toxines circulantes résiduelles et d’induire leur redistribution depuis les tissus où elles sont encore fixées. En revanche, sur le plan pharmacodynamique, on note que les toxines ont la possibilité d’agir pendant plusieurs heures avant d’être neutralisées, ce qui aggrave parfois de manière irréversible l’état du patient. En effet Krifi M et al. ont démonté que chez la souris, la dose efficace d’immunsérum augmente avec le délai de prise en charge. Cependant quand l’immunothérapie est appliquée dans un délai proche du temps limite fatal (TLF), il devient impossible d’atteindre cette dose et par conséquent de sauver le patient envenimé. v La dose minimale efficace d’immunsérum augmente d’une manière « non proportionnelle » avec la gravité de l’envenimation. Il a été démontré que, quand la gravité de l’envenimation augmente d’un facteur, la dose minimale efficace d’immunsérum augmente de trois facteurs .Il est donc nécessaire d’ajuster la dose d’immunsérum à injecter en fonction de la sévérité de l’envenimation pour que la méthode soit efficace. La concentration sérique (déterminée par ELISA) du venin de scorpions avant l’immunothérapie a permis d’établir une bonne corrélation entre ces concentrations et les grades cliniques de l’envenimation scorpionique basés sur les symptômes de gravité. L’analyse des dossiers cliniques des patients lors d’une étude faite en Tunisie [124] montre que les protocoles d’application de l’immunothérapie présente de grandes disparités selon les régions mais aussi selon les cas traités. On a observé que les patients hospitalisés ont reçu soit une dose unique d’immunsérum, soit une dose initiale suivie d’une ou plusieurs doses de rappel. Les doses d’immunsérum sont injectées par la même voie (IM ou IV) ou non. Aussi le délai d’injection de l’immunsérum par rapport au moment de 55 l’envenimation d’une part et au moment de la prise en charge d’autre part diffère d’un patient à l’autre. Pour évaluer l’efficacité de l’immunothérapie telle qu’elle est appliquée en Tunisie dans le traitement des cas graves d’envenimation scorpionique [124], ils ont ciblé des enfants moins de 15 ans qui présentent une envenimation de classe II ou classe III. Ces patients ont été répartis en six groupes en fonction du mode d’application de l’immunothérapie. La concentration plasmatique de venin dans les échantillons sériques prélevés au cours de l’hospitalisation, avec ou sans immunothérapie, a été déterminée par ELISA. Les résultats obtenus montrent que la cinétique de décroissance de la concentration des toxines plasmatiques est directement liée au protocole d’application de l’immunothérapie antiscorpionique. D’autre part une bonne corrélation a été observée entre la cinétique de disparition des toxines circulantes et la durée de l’hospitalisation. Ceci indique clairement que l’efficacité de ce traitement dépend directement du protocole mis en œuvre [79]. En effet, seule l’injection IV de doses suffisantes d’immunsérum permet la neutralisation immédiate et définitive des toxines circulantes et le raccourcissement significatif de la durée d’hospitalisation. Ces résultats cliniques corroborent ceux obtenus par l’étude expérimentale [79]. Figure K : Traitement inefficace voire dangereux. 56 ETUDE PRATIQUE MATERIEL ET METHODES : 57 Ce travail consiste en une étude rétrospective portant sur 56 cas d’enfants admis pour piqûres de scorpions au service de Pédiatrie du CHU Hassan II de Fès, nous avons inclus les enfants victimes de piqûres de scorpion admis et pris en charge au service et les enfants victimes de P.S admis et transférés en Réanimation, durant la période de Janvier 2006 à Décembre 2007. Les dossiers ont été analysés à travers des fiches d’exploitation préalablement établies par le CAPM et le ministère de santé, comportant les arguments anamnestiques, cliniques, thérapeutiques et évolutifs. • L’anamnèse a permis le recueil des informations suivantes : - L’identité : âge, sexe, origine géographique. - Les ATCD pathologiques. - Les circonstances de la piqûre : + Date, siège, nombre, lieu, agent agresseur. + Délai de prise en charge. + Traitements reçus. • L’examen clinique a précisé : - • L’importance des signes locaux. L’importance des signes systémiques. Les signes cliniques ont été classés en 3 grades de gravité croissante selon ABROUG [103] : - Classe I : symptomatologie locale isolée au point d’inoculation (douleur, rougeur, engourdissement locorégional). - Classe II : présence d’un ou plusieurs stigmates de réaction clinique généralisée, il s’agit surtout de signes neurovégétatifs : + Frissons. + Hypersudation. 58 + Rhinorrhée. + Perturbations thermiques : hyperthermie, hypothermie. + Perturbations tensionnelles : HTA. + Manifestations digestives : nausées, vomissements, diarrhées, ballonnement abdominal. + Priapisme. + Signes prédictibles de gravité : • Âge < 10ans. • Vomissements. • Hypersudation. • Fièvre > 39°c. • Priapisme. - Classe III : Signes d’une ou plusieurs défaillances des fonctions vitales : + Circulatoire : pouls filant, tension artérielle effondrée, état de choc. + Respiratoire : cyanose, polypnée, bronchorrhée, œdème pulmonaire. + Neurologique : coma avec ou sans signes déficitaires. ∙ Le traitement : 1- Malades classe I et classe II sans signes prédictifs de gravité : + Traitement symptomatique : - Désinfecter le lieu de la piqûre. - Soulager la douleur. + Surveillance de l’enfant jusqu’à disparition totale et durable des signes généraux. 2- Malades classe III et classe II avec au moins un signe prédictible de gravité : a) Mise en condition : 59 - position latérale de sécurité. - Liberté des voies aériennes supérieures. - Oxygénation par sonde nasale ou par masque. - Prise d’une voie veineuse avec perfusion à minima de sérum salé à 0,9% pour un éventuel traitement symptomatique. - Surveillance des constantes vitales : conscience, pression artérielle, pouls, température, fréquence respiratoire et diurèse. b) Traitement symptomatique : doit être précocement réalisé avant ou au cours du transport. c) Traitement en milieux de soins intensifs : - Détresse cardio-circulatoire. - Détresse respiratoire. - Détresse neurologique. ∙ L’évolution clinique et la durée d’hospitalisation ont été précisées pour tous les enfants. 60 Fiche de l'envenimation scorpionique • Nom : Prénom : • Numéro d'entrée : Age : Sexe : • Adresse exacte : • N° de téléphone : • Médecin traitant : • Heure et date de la piqûre : • Type de scorpion : • Lieu de piqûre : Temps post piqûre : Jaune : Noir : • Ponts de la piqûre : • Délai d'apparition des signes cliniques : • Signes cliniques : Ø Signes locaux : - Rougeur - Scarifications - Autres Ø Signes fonctionnels: - Douleurs - Engourdissement - Fourmillements - Myalgies - Frissons - Vomissements - Diarrhée - Autres ØSignes physiques : - Température - Pouls - Tension artérielle - Fréquence respiratoire - Sudation - Rhinorrhée - Larmoiement - Encombrement bronchique - Râles crépitants - Signes neurologique : - Agitation - Obnubilation - Coma - Priapisme : - Convulsions - Autres : 61 § Bilan fait Ø Rx des poumons Ø VS Ø NFS ØUrée/Créatinine ØGlycémie Ø C.R.P Ø TP/TCK § Prise en charge : Ø Surveillance H1 H2 H3 H4 H5 H6 H7 H8 H9 H10 H11 H12 H13 H14 H15 H16 H17 H18 H19 H20 H21 H22 H23 H24 Conscience F. card T.A F.resp T Diurèse Ø Traitement - Position latérale de sécurité - Désinfection locale - Antalgique - Sérothérapie antiscorpionique - Vaccination antitétanique - Calcium: - Corticothérapie : - Antibiothérapie : - Atropine : - Remplissage : Dose Nature Quantité Type Dose Durée Quantité Duré Nature Quantité - Message cardiaque externe : - Analeptique cardio vasculaires Nature Dopamine Quantité Dobutamine - Intubation /ventilation Adrénaline - Autre : Ø Evolution : Délai de disparition des signes cliniques : Ø Date et heure de sortie Ø Recul : 62 • Analyse statistique : Les données cliniques ont été saisies sur des fichiers Excel. L’analyse descriptive a utilisé le programme EPI INFO. L’analyse statistique a fait appel au test de chi 2 (ϰ2) ou le test de Fischer, le test de Student ou l’analyse de variance pour l’analyse univariée. La regression logistique a été utilisée pour l’analyse multivariée. Une valeur de p < 0,05 est considérée comme significative. Résultats : Analyse statistique : En analyse univariée : Le sexe masculin, la scarification de la zone piquée, la présentation de vomissements, d’une hypersudation, d’un priapisme avec la présence d’une tachycardie à l’examen clinique sont considérés dans notre étude comme des facteurs associés à une envenimation sévère (classe III). L’origine rurale des patients dans notre étude, le type de scorpion, le moment et le lieu de la piqûre ne semblent pas être des facteurs pronostiques de gravité. Paramètres Non classe III (%) Classe III (%) p Sexe M 34 66 0,01 Origine rurale 40 60 0,08 Nuit 52 48 0,48 Scorpion jaune 52 48 0,48 Scorpion noir 36 64 0,45 Thorax 50 50 0,71 Visage 100 0 0,46 Scarification 25 75 0,04 Sudation 27 73 <0,0001 Hypersialorrhée 67 33 0,44 Vomissements 40 60 0,01 Douleur abdominale 60 40 0,43 Priapisme 13 87 <0,0001 63 D’autre part, toujours en analyse univariée, la moyenne d’âge ne différait pas dans les deux groupes comme le mois de survenue de la piqûre, la durée du TPP, le degré de la température, et le chiffre de la fréquence respiratoire. Par contre la tachycardie est plus présente chez les malades avec envenimation sévère (p<0,005) Paramètres Non classe III Classe III (Moyenne ± DS) Age (Moyenne ± DS) p 62 ± 41 45 ± 38 0,12 Mois 7,7 ±1,6 7,0 ± 1,3 0,08 TPP 2,7 ± 1,7 3,1 ± 1,6 0,47 37,2 ± 0,7 37,4 ± 1,1 0,82 FC 94 ± 20 119 ± 33 0,005 FR 25 ± 5 28 ± 8 0,11 Température En analyse multivariée après ajustement pour les autres variables, seuls le priapisme, l’hypersudation et la tachycardie gardent un effet significatif. Paramètres OR IC 95% p Priapisme 43,1183 1,8634 997,7167 0,0189 Sudation 21,6515 1,6261 288,2851 0,0199 1,0032 0,0353 Tachycardie 1,0473 1,0934 64 RESULTATS 65 I- PROFIL EPIDEMIOLOGIQUE : A- FREQUENCE : Cinquante six cas de piqûre de scorpion ont été colligés au service de Pédiatrie au sein du CHU Hassan II de Fès, de Janvier 2006 à Décembre 2007. Durant la même période, 1992 enfants ont été hospitalisés au Service de Pédiatrie, soit une incidence hospitalière de 0,028%. B- AGE : Toutes les tranches d’âge sont concernées avec une moyenne de 4,5 ± 3,4ans. L’âge des patients varie de 1mois à 156mois. C- SEXE : Dans cette série, les enfants se répartissent de la manière suivante : ∙ 34 de sexe masculin ; soit 62,5 %. ∙ 20 de sexe féminin ; soit 37,5 %. ∙ Le sex-ratio (M/F) est de 1,8. 66 D- ORIGINE : Sur l’ensemble des cas colligés, 40 d’origine rurale (71,4 %), 10 d’origine urbaine (17,8 %). Parmi les enfants d’origine rurale, 90,9% proviennent de la région de Taounat. E- SAISON : 67,2 % des piqûres de scorpion sont survenues entre Juin et Août avec un maximum pendant le mois de Juillet (32,7 % des cas). Nbre 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 18 11 8 7 6 3 Mai Juin Juillet Août Sept Octb 2 Nov Mois Fig. 2: Répartition des cas selon les mois F- HEURE DE L’ACCIDENT : Dans notre étude, 62 % des piqûres de scorpion sont survenues pendant le jour. 38 % des cas sont survenues la nuit et 90,4 % d’entre elles ont eu lieu au cours de la première moitié (entre 18H et 24H). 67 1ère partie de la nuit 34% Jour 62% 2ème partie de la nuit 4% Fig. 3: Répartition des cas selon l'heure de la piqûre G- SIEGE DE LA PIQÛRE : Dans notre série, ce sont les membres qui sont exposés aux piqûres de scorpion. Le siège de la piqûre se situe au niveau des parties distales dans 94%. VISAGE 2% THORAX 4% MS 41% MI 53% Fig. 4: Répartition des cas selon le siège de la piqûre. 68 H- TYPE DE SCORPION : Dans cette étude, la couleur du scorpion n’a pu être identifiée que dans 57,1 % des cas, avec une prédominance du scorpion jaune qui est responsable dans 37,5 % des cas. Tableau 1 : Répartition selon le type de scorpions. Scorpion Nombre Noir 11 20 Jaune 21 37 24 43 Non précisé Pourcentage % I- DELAI DE PRISE EN CHARGE (OU TEMPS POST-PIQÛRE) : Dans notre série, 41 % des enfants ont été pris en charge au-delà de la quatrième heure qui suit la piqûre. Le TPP est compris entre 30 min et 8 heures avec une moyenne de 3 heures. Tableau 2 : Répartition selon le TPP (n=49). TPP (H) Nombre Pourcentage (%) 0-1 2 4,1 1-2 10 20,4 2-3 14 28,6 3-4 3 6,1 SUP à 4 20 40,8 Total 49 100 II- PROFIL CLINIQUE : A- SIGNES LOCO-REGIONAUX : Ils étaient présents chez 72 % des enfants de cette série. La douleur étant le signe le plus fréquent a été retrouvée chez 39 enfants. Alors que la scarification a été réalisée chez 16 enfants. 69 Tableau 3 : Signes locorégionaux. Signes locorégionaux Nombre Pourcentage (%) Douleur locale 39 69,6 Rougeur 37 66,1 Scarification 16 28,6 Fourmillement 10 17,9 1 1,8 Engourdissement B- SIGNES SYSTEMIQUES : Tableau 4 : Signes systémiques. Signes cliniques Digestifs Types Nombre Pourcentage (%) 48 85,7 Sialorrhée 3 5,4 Douleur abdominale 5 8,9 10 17,8 HTA 2 3,5 Collapsus 9 16,1 Agitation 22 39,3 Obnubilation 10 17,9 Convulsions 5 8,9 Coma 0 0 Obnubilation 3 5,4 Sueurs 37 66,1 Priapisme 23 41,1 Frissons 12 21,8 3 5,4 13 23,2 Vomissements Diarrhée Cardiovasculaires Neurologiques Végétatifs Respiratoires Tachycardie Fièvre Bronchorrhée Détresse respiratoire 1 11 1,8 20,8 70 C- REPARTITION SELON LA GRAVITE : - Classe I : 16 % - Classe II : 30 % - Classe III : 54 % Classe I 16% Classe III 54% Classe II 30% Fig. 5: Répartition des cas selon la gravité Plus de la moitié des enfants (54%) appartiennent à la classe III, ce qui témoigne de la gravité des P.S dans notre contexte. III- SIGNES BIOLOGIQUES: Dans cette étude, 27 enfants ont eu un bilan biologique fait de : NFS, Urée/Créatine et Glycémie. Parmi ces enfants, Une hyperleucocytose supérieure à 20000/mm³ a été révélée chez 20 cas (36,7 %), une hyperglycémie supérieure à 1,90g/l chez 2cas. Une Troponine Ic, réalisée chez 6 enfants, est revenue positive dans 2 cas. D’autres bilans comme la CRP, la VS et le TP/TCK ont montré : - L’absence de syndrome inflammatoire chez 3 enfants. - L’absence de troubles d’hémostase dans 5 enfants. 71 Les bilans radiologiques réalisés : - La radiographie pulmonaire faite chez 15 enfants. - L’échographie du cœur réalisée chez un seul enfant a objectivé un aspect de myocardite. IV- PROFIL THERAPEUTIQUE : Les dopaminergiques ainsi que les antalgiques ont été utilisés dans 76,8 % des cas. Le remplissage par du SS a été effectué dans presque la moitié des cas (46,4 %). Tableau 5 : Thérapeutiques reçus à l’hôpital. Traitement reçu Type Nombre Pourcentage (%) 26 46,4 3 5,4 Dopaminergiques 43 76,8 Antalgiques, Anti- 43 76,8 Antibiotiques 2 3,5 Anticonvulsivants 5 8,9 SAT 4 7,1 Corticoïdes 26 46,4 Atropine 10 17,9 Traitement symptomatique Remplissage par SS 0,9% Diurétiques pyrétiques Autres traitements 72 V- EVOLUTION : A- DUREE D’HOSPITALISATION : La durée d’hospitalisation varie entre 24H et 48H chez 14 enfants, soit 25 %. Tableau 6 : Durée d’hospitalisation (en heures). Durée d’hospitalisation Nombre Pourcentage (%) 5H-24H 18 32,1 24H-48H 14 25 SUP à 48H 11 19,6 Imprécise 13 23,2 B- PATIENTS SORTANTS CONTRE-AVIS MEDICAL : Trois enfants sont sortis contre-avis médical, soit 5,4 %. 73 C- MORTALITE : Dans cette série, l’évolution vers le décès a été rapportée chez trois enfants. Tableau 8 : Observation clinique des 3 décès scorpioniques. Cas n° 1 Cas n° 2 Cas n° 3 Age (mois) 84 48 12 Sexe M F F TPP (H) 4 2 2 Non précisé Noir Jaune Vomissements + + + Priapisme - D. circulatoire + - - D. neurologique - + + D. respiratoire - - + IVA + + + Dobutrex + + + Corticoïdes + - - Classe III + + + Scorpion 74 DISCUSSION 75 L’intérêt de cette étude descriptive, même si l’effectif reste faible, sur les piqûres scorpionique est d’attirer l’attention vers une tranche d’âge très vulnérable où la majorité de la létalité réside rapportée par la plupart des auteurs. Ceci en donnant un profil épidémiologique des enfants piqués dans notre région où très peu d’études ont été réalisées. L’étude analytique nous a permis encore de ressortir les facteurs pronostiques de l’envenimation sévère. Il n’est pas étrange de trouver le priapisme, les vomissements et l’hyper sudation comme facteurs associés à la classe III, car ces mêmes signes constituent à côté de la fièvre >39°C et l’âge<10 ans les signes généraux prédictifs de gravité dans la classe II dans la classification d’Abroug qui est adoptée dans notre service. Par contre ni l’hypothermie ni la fièvre ≥ 39°C ni l‘âge ne sont ressortis comme facteur de gravité. Selon notre étude, il ne faut pas banaliser une simple tachycardie qui peut accompagner une hyperthermie ou l’agitation d’un enfant piqué, elle peut être aussi prémonitoire d’une envenimation sévère. Par ailleurs, le pouls filant avec des signes de collapsus périphérique sont incontestablement la manifestation d’un état de choc classant le patient piqué d’emblé dans une classe III. Les garçons sont plus prédisposés à présenter des manifestations d’envenimation sévère selon notre analyse ceci est probablement lié au fait que le sexe ratio dans notre série est très élevé (1,8), ce qui peut être discuté en comparaison avec beaucoup de séries qui rapportent la non prédilection de piqûres scorpioniques chez les garçons par rapport aux filles. La scarification de la zone piquée est ressortie comme élément associé aux formes graves, ceci peut être aussi attribué aux fortes origines rurales de nos 76 patients (80%) où l’on continue encore à adopter des thérapeutiques traditionnelles qui doivent être bannies. En analyse multivariée, le priapisme, l’hypersudation et la tachycardie restent les seuls facteurs pronostiques cliniques indépendants de gravité liée à l’envenimation scorpionique. Il faut en tenir compte alors au cours de notre pratique clinique ces facteurs, faire une démarche thérapeutique appropriée avant l’installation des détresses vitales. 77 I- PROFIL EPIDEMIOLOGIQUE DES E.S : v Au Maroc, comme dans beaucoup de pays chauds, Les piqûres de scorpions constituent un accident à la fois fréquent et grave chez l’enfant. Elle représente une cause importante de morbidité et de mortalité. Dans cette étude, on a colligé 56 cas de piqûres de scorpion, soit une incidence hospitalière de 0,028%. Cette incidence est loin de représenter réellement le péril scorpionique car il y a des piqûres de scorpion qui n’arrivent pas aux urgences du CHU et s’arrêtent à domicile, au centre de santé ou aux urgences des autres hôpitaux périphériques. Il est difficile de comparer nos résultats à ceux de la littérature car notre sujet traite uniquement des enfants, alors que la plupart des études nationales et internationales ont été faites sur un échantillon plus large comprenant des malades d’âges différents. Mais d’une façon générale, tous les auteurs [146, 147, 148, 149, 150, 151, 152] pensent que si les adultes sont plus touchés que les enfants, la piqûre de ces derniers est plus grave avec plus de décès [147, 148, 149]. Ø A l’échelle nationale : Tableau 9 : Fréquence des P.S chez l’enfant dans les études nationales. Séries Sekkat (Casablanca) [153] Nombre de cas Période % d’enfants 56 Janvier 1991- 100 Décembre 1997 Labrach (El Kelaâ) [154] 1639 1995-1996 46 Abouihia (Tiznit) [155] 107 Mars -Septembre 51 1997 Abarda (Agadir) [156] 172 Avril –Octobre 1997 27 Soulaymani (Khouribga) [157] 4089 2001-2003 33,9 Soulaymani (Beni Mellal) [158] 1591 2002-2004 41,68 78 La comparaison entre ces résultats est difficile, car ces études sont fragmentaires dans l’espace et dans le temps [23]. Les déclarations des accidents d’envenimation sont très rarement faites. Les chiffres publiés sont le plus souvent des statistiques de consultations [23] hospitalières et d’hospitalisations, de sorte que l’évaluation épidémiologique ne représente que la partie visible de l’iceberg. Ø A l’échelle internationale : Tableau 10 : Fréquence des P.S chez l’enfant dans les études internationales. Séries Nombre de cas % d’enfants 354 52,8 Arabie Saoudite [160] 6465 37,2 Brésil [161] 3860 27 Jordanie [146] 335 48 Iran [159] Mexique [162] 163 100 Turquie [163] 170 100 Le pourcentage d’enfants concernés par ce péril n’est pas négligeable. Donc, il est nécessaire de sensibiliser les parents et les enfants contre ce fléau. v Toutes les tranches d’âges sont touchées par cette affection avec une moyenne d’âge de 4,5±3,4ans. Tableau 11 : Âge moyen dans la littérature. Séries Brésil (saopaolo) Âge moyen (ans) [149] 2 [16] 6–8 Mexique [162] 5,2 Marrakech [164] 13 Rabat [165] 6,5 Casa [153] 6,6 ± 3 Venezuela 79 Il apparaît que l’atteinte peut se faire à n’importe quel âge chez l’enfant. L’esprit d’aventure et de curiosité du grand enfant peut expliquer en partie le résultat obtenu. v Dans cette étude, nous rapportons une prédominance masculine qui a également été retrouvée par d’autres auteurs avec un sexe ratio de 1,8. la plupart des études [166, 164] relèvent une prédominance masculine. On pourrait l’expliquer par quelques facteurs favorisants tel que le profil psychologique du garçon souvent agité, plus curieux et surtout plus aventureux que ne l’est la fille. v Les ruraux sont plus exposés à cette endémie. Nos résultats concordent avec ceux des études nationales [167, 155, 168, 169, 170, 154, 171, 172, 173]. 71,4 % des patients sont d’origine rurale dans cette série. Cette fréquence au milieu rural peut s’expliquer par le fait que les scorpions sont timides [150] et cherchent des endroits déserts et arides [155]. L’origine rurale ne fait que retarder la prise en charge en milieu hospitalier, par conséquent aggraver le pronostic. Ainsi, on doit inciter les autorités sanitaires à concentrer les efforts de lutte et de prévention contre cette affection en milieu rural. v Les P.S sont enregistrées avec un maximum de fréquence durant la saison estivale. Dans cette série, 67,2 % des cas de P.S ont été enregistrés entre Juin et Août dont 32,7 % des cas sont survenus pendant le mois de Juillet. Alors, nos données rejoignent celles des études nationales [156, 167, 155, 168, 169, 170, 154, 171,172] et internationales [146, 14, 174, 175], qui confirment le caractère thermophile de cette faune. Les scorpions sont actifs au printemps et en été, et entrent en hibernation dès le début de l’automne mais de nombreuses espèces peuvent conserver un certain potentiel d’activité durant la saison froide, d’où l’existence de piqûres 80 tout au long de l’année [148]. Les piqûres hivernales ont un potentiel de gravité identique aux piqûres d’été. Toutefois, une piqûre à un temps très chaud chez un jeune enfant insuffisamment hydraté, représente un risque de gravité supplémentaire [176]. Cette grande fréquence de P.S au cours de l’été doit inciter les autorités sanitaires à concentrer les efforts de prévention et de prise en charge durant cette période. v Dans cette série, 62 % des P.S sont produites pendant la journée. Cette prédominance diurne se contredit avec le caractère des scorpions qui restent des arthropodes de mœurs nocturnes s’éveillant au crépuscule et connaissant leur maximum d’activité entre 21H et 24H [15]. Les enfants se font piquer quand ils menacent le scorpion en perturbant sa cachette diurne, ou en le rencontrant la nuit [41]. v Toutes les parties du corps sont exposées, mais 94 % des piqûres sont situées au niveau des extrémités distales des membres, ce qui rejoint les résultats des autres auteurs [156, 167, 155, 169, 172]. Tableau 12 : Siège de la piqûre dans la littérature. Séries MS (%) MI (%) Autres (%) [156] 30,17 68,03 1,8 Beni Mellal [167] 30,4 66,3 2,9 Tiznit [155] 51,4 36,9 11 Essaouira [169] 39,7 56,6 3,7 Khouribga [107] 49,2 44,6 7,4 Agadir Casa [172] 51 49 0 Mexique [162] 44,7 34,3 20 Turquie [163] 47,1 40,6 12,3 41 53 6 Notre série 81 En effet, les scorpions ont un caractère craintif et inoffensif [150] et ne piquent que lorsqu’ils se sentent menacés lors de la marche et de manœuvres manuelles. Ceci aurait un impact sur l’intérêt des moyens généraux d’hygiène et de prévention : - Eviter la marche pieds nus. - Etre prudent lors du soulèvement des pierres. - Vérification des chaussures et des vêtements avant leur port. v C’est le scorpion jaune qui a été le plus impliqué dans les accidents de P.S dans cette série. Ceci ne conforme pas avec les séries nationales [156, 167, 155, 169, 170, 154, 171, 172, 173], qui rapporte une prédominance du scorpion noir qui pourrait être en rapport avec la présence de l’Androctonus mauritanicus sous nos climats [148] tout en sachant que tout scorpion noir n’est pas forcément un Androctonus mauritanicus. L’E.S dans notre contexte souffre de l’absence de données épidémiologiques locales concernant la nature des scorpions dans notre région. Par rapport à l’étude de Toulon [18] réalisée au Sud du Maroc, les espèces dangereuses qui s’y trouvent sont essentiellement le B. Franzwerneri et L’A. Mauritanicus. v Dans cette série, 40,8 % des enfants ont été pris en charge au-delà de la quatrième heure. Ceci témoigne que la population n’est pas assez sensibilisée à ce péril ainsi que les moyens de transport qui présentent à leur tour un problème pour la rapidité de la prise en charge. 82 II- PROFIL CLINIQUE ET BIOLOGIQUE DES P.S. A- SIGNES CLINIQUES ET CLASSES DE GRAVITE : La traduction clinique des P.S est très polymorphe. Son intensité est différente d’un sujet à l’autre selon l’âge, le terrain et le scorpion en cause. 1- Classe I : Elle regroupe les patients piqués par un scorpion non dangereux et ceux dont la piqûre est blanche ou sèche (sans injection du venin) [156]. Le tableau clinique se résume à une symptomatologie locale, isolée au point d’inoculation (douleur, rougeur, œdème). Dans toutes les séries [156, 167, 55, 168, 170, 154, 171, 172, 173], la douleur constitue le maître symptôme et elle est presque quasi-constante. Généralement, la douleur est lancinante, atroce, souvent décrite sous forme de brûlure ou d’écrasement à tendance irradiante autour du point de la piqûre [176, 164]. Les autres signes locaux (rougeur, œdème) ont été retrouvés avec une fréquence moindre dans cette série et celles des autres auteurs [167, 155, 154, 171, 164]. Tableau 13 : Fréquence de la classe I dans la littérature et dans notre série. Séries Classe I (%) Moulki (Khouribga) [172] 87,60 Abarda (Agadir) [156] 77,90 Abouihia (Tiznit) [155] 55 Oudidi (Beni Mellal) [173] 50,40 Chaib (Essaouira) [169] 40,90 Sekkat (Casablanca) [153] 69 (enfants) Soulaymani (Khouribga) [157] 93,3 Soulaymani (Beni Mella) [158] 75,06 Notre série 16 (enfants) 83 La fréquence de la classe I au niveau de la ville de Fès est de l’ordre de 16% et cela concerne purement les enfants, ce chiffre reste de loin inférieur à celui trouvé à Casablanca où on rapporte 69% des enfants appartenait à la classe I. Pour l’adulte, la fréquence de la classe I est de loin supérieure à celle des autres classes, ce qui confirme la gravité des P.S chez l’enfant. 2- Classe II (envenimation modérée) : Dans cette classe, la venimosité du scorpion incriminé peut être soit faible ou alors forte, mais le rapport entre la dose du venin injecté et le poids de la victime n’est pas suffisamment élevé pour provoquer une défaillance viscérale et l’est assez pour déclencher une symptomatologie générale bénigne [156]. Les signes systémiques, s’ils sont présents, peuvent débuter dans les minutes qui suivent la piqûre. Ils peuvent être causés par le venin lui-même ou par le biais des neurotransmetteurs (catécholamines) libérés sous l’action du venin. Les symptômes peuvent refléter la stimulation ou la dépression du système nerveux central (SNC) et/ou la stimulation du système nerveux autonome (SNA) (sympathique et/ou parasympathique) [177]. Les manifestations cliniques dues à l’atteinte du SNC peuvent inclure : irritabilité, tremblement, rigidité musculaire, nystagmus [177]. La tachycardie, l’HTA, la mydriase, l’hypersudation et la rétention urinaire sont des signes de stimulation du système sympathique. La bradycardie, l’hypotension, le myosis, le priapisme chez le garçon et l’hypersécrétion sont des signes de stimulation du système parasympathique [177]. Les symptômes digestifs à type de nausées, hypersalivation, vomissements et diarrhée sont fréquents chez l’enfant envenimé [41]. Ceci est dû à la stimulation des récepteurs adrénergiques et cholinergiques à différents niveaux : glandes salivaires, estomac et intestin. Outre l’étiologie cholinergique, certains auteurs ont rattaché les manifestations digestives chez certains patients à une pancréatite [178]. 84 Tableau 14 : Fréquence de la classe II dans la littérature et dans notre série (%). Chaib Manie Beni Melall Moulki Khouribga Sekkat Tiznit [169] [171] [173] [172] [153] vomissements 12 19 31,2 10,7 18 85,7 Fièvre 3,3 7 4,2 3 5,4 20,8 Sialorrhée 8 12 33 2,2 9 5,4 Sudation 25,6 33 22 10,1 11 66,1 Priapisme 8 4,2 10,7 2,2 1,8 41,1 Classe II 52,8 50,3 31,2 10,7 18 30 Séries Essaouira Oudidi Casa Notre série Les signes systémiques dans cette étude sont dominés par les signes digestifs (85,7 %), végétatifs (66,07 %), neurologiques (39,2 %) et cardiovasculaires (17,8 %). La comparaison de ces signes s’avère difficile voire illusoire. Ceci tient à plusieurs raisons en particulier à la subjectivité des enquêteurs quant à l’appréciation des signes cliniques. Les signes systémiques apparaissent après une latence clinique de durée variable. Dans cette étude, ces derniers sont survenus immédiatement après la piqûre chez 21enfants. Pour Ismail [179,180], le venin se distribue rapidement avec une demi-vie de distribution de 4 à 7 min avec un pic maximal à la 37ème minute. Les signes prédictibles de gravité : sont ceux qui apparaissent chez un patient classe II et qui doivent alerter quant à l’évolution imminente vers la classe III. Ces signes sont le priapisme, les vomissements, l’hypersudation, la fièvre (>39°c) et l’âge <10 ans [181]. Ceci a été prouvé aussi par Abidoune [168] qui a effectué une étude prospective sur les E.S dans la province de Beni-Mellal et a retrouvé une corrélation très significative entre ces signes de gravité et les décès par E.S il a aussi 85 retrouvé une corrélation significative entre la présence d’un état de choc et d’un OAP et les décès par E.S. 3- Classe III (envenimation grave) : Chez les patients de cette classe, le rapport du venin injecté sur le poids de la victime est élevé et induit une véritable défaillance viscérale touchant essentiellement le système cardio-respiratoire et neurologique [156]. Le syndrome neurologique (atteinte du SNC) et le syndrome cholinergique et adrénergique (atteinte du SNA) sont expliqués par l’altération de la transmission nerveuse au niveau de la jonction neuromusculaire [148]. Le venin entraîne une modification de la perméabilité aux ions sodium et potassium engendrant ainsi une dépolarisation durable du système nerveux [178]. Les manifestations neurologiques peuvent être aussi dues à un choc circulatoire périphérique ou à un déséquilibre électrolytique. La défaillance cardio-vasculaire est expliquée par l’action directe du venin ou indirecte par le biais des médiateurs de l’inflammation réalisant une myocardite scorpionique [75, 182, 152, 134, 177, 183] ou par libération massive de l’acétylcholine entraînant une bradycardie et un bloc auriculo-ventriculaire BAV [184]. Toutefois, une ischémie myocardique peut être aussi à l’origine de dysfonction cardiaque [178]. L’œdème aigu du poumon (OAP) a été pendant de longues années expliqué par une lésion alvéolo-capillaire [75, 179, 166, 185]. Mais Abroug et coll. [75, 134] a démontré l’origine hémodynamique de l’OAP en observant une élévation significative de la pression artérielle d’occlusion et une diminution du volume d’éjection systolique dans 8 cas successifs d’OAP. Par ailleurs, il a décrit aussi une série de 5 patients ayant présenté une détresse respiratoire avec œdème pulmonaire 86 secondaire à un dysfonctionnement ventriculaire gauche survenue à la suite d’une piqûre de scorpion (probablement l’Androctonus Australis Hector ou Garzonii [186]). Gueron et al. Avaient démontré expérimentalement que l’injection de venin du scorpion chez le chien entraîne une augmentation de la pression diastolique au niveau du ventricule gauche avec réduction du débit cardiaque et par la suite un œdème pulmonaire [186]. Tableau 15 : Fréquence de la classe III dans la littérature et dans notre série (%). Oudidi Chaîb Abouihia Moulki Sekkat Notre Beni-Mellal Essaouira Tiznit Khouribga [172] Casa [153] série 18,5 6,3 2,8 2 13 54 D. circulatoire 1,2 4,4 3,7 2 9 16,1 D. neurologique 22 3,14 0,9 2 1,8 42,8 7 2,5 2,8 2 1,8 23,2 Séries [173] Classe III D. pulmonaire [169] [155] La sévérité de l’E.S est surtout liée à une défaillance circulatoire, respiratoire ou neurologique. L’état de choc et l’œdème aigu du poumon constituent les deux principales causes de décès [75, 66, 179, 166, 134]. Dans notre étude, 54 % des enfants appartiennent à la classe III. Ceux de la classe I et II représentent 16 % et 30 % respectivement, confirmant ainsi la gravité de la piqûre de scorpion chez l’enfant par rapport à l’adulte (4 % classe III ; 17 % classe II ; 79 % classe I) [3]. Hisham MA Al Mahaba ajoute que si les enfants sont sévèrement affectés par la toxicité de l’envenimation, cela est attribué à leur petite masse corporelle, et à la faiblesse du réflexe de retrait lors de la piqûre, ce qui donne à la bête plus de chance d’infliger d’autres piqûres et d’injecter plus de venin [187]. Les signes de gravité peuvent apparaître d’emblée, ou secondairement après 8 à 48 H d’où l’importance de la surveillance en milieu hospitalier. 87 B- CHRONOLOGIE DES TABLEAUX CLINIQUES : L’analyse de nos observations ne nous a pas permis d’établir une chronologie clinique, car c’est une étude rétrospective. D’autres travaux faits à l’échelle nationale [178] ont permis de tracer la chronologie du tableau clinique de la piqûre et de l’E.S. Sémantisation de la chronologie des événements Cliniques d'une piqûre de scorpion au Maroc Temps moyen d'apparition en minutes 0 mm 24 mn 33 mn Evénements et % de survenue Classification clinique Piqûre de scorpion ( Incidence 0,53%) Douleur ( 98 %) Rougeur ( 42 %) Sensation de brûlure (26 %) Apparition du premier signe général neurovégétatif 1h ( 43 mn à 4h 51 mn) Arrivée à une structure sanitaire Non déterminé =2à3h Détresse vitale cardio-vasculaire, respiratoire , neurologie Classe I ( 79 %) Classe II ( 17%) Classe III (4%) 88 III- STRATEGIE DE PRISE EN CHARGE DES P.S : Il n’existe pas de consensus sur le traitement de la piqûre de scorpion. Deux volets thérapeutiques sont discutés : le premier est le traitement spécifique visant à neutraliser le venin, c’est le sérum anti-venimeux ; le second est le traitement symptomatique ayant pour but de corriger les troubles engendrés par l’action du venin sur l’organisme. C’est sur ce dernier que reposait la prise en charge des patients dans notre étude et qui se faisait selon un canevas dressé par le CAPM et qui était en fonction de la classe de gravité clinique [181]. Tableau 16 : Thérapeutiques reçues en fonction des séries (%). S’DaÏki Marrakech Chaïb Essaouira Abouihia Tiznit Moulki Khouribga Hadhoum Sekkat [164] [169] [155] [172] [170] [153] Corticoïdes 90 41,5 56 34,1 3,7 51,8 46,4 SAT 28 27 7,4 20,3 37,02 60,7 7,1 Calcium inj 45 2,5 0,9 12,2 4 43 0 Atropine - 1,2 3,7 1,5 0 3,6 17,9 Anti-histami. - 9,4 12 12,2 4 7 0 SAS 9 0 2,8 16,8 7 69,6 0 Agadir Casa Notre série A- PLACE DE LA SEROTHERAPIE ANTISCORPIONIQUE : L’utilisation de la sérothérapie antiscorpionique dans le traitement préventif et curatif des manifestations de la P.S, fait l’objet d’une grande controverse aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale. D’après Ismail [179], le venin atteint des concentrations maximales au niveau tissulaire au bout de la 37ème minute alors que les immunoglobulines du SAS mettent 40 fois plus de temps pour atteindre ce pic tissulaire. Se basant sur ces données, Ismail [188], Dehesa [189] et El Amin [190] proposent d’augmenter les doses du SAS à 5, voire à 20 fois les doses préconisées, de recourir systématiquement à la voie intraveineuse, et de l’administrer dans la demi-heure qui suit la piqûre. Toutefois, ils insistent sur l’intérêt des soins intensifs 89 car le SAS ne serait pas capable de traiter les défaillances vitales déjà installées. Ainsi dans notre contexte, les faibles doses utilisées autrefois, par voie IM et le retard de prise en charge rendent illusoire son efficacité. Cependant, Rezende [191] avait démontré lors d’une étude pharmacocinétique en 1998 que le SAS reste toujours actif même s’il est administré tardivement puisque le venin possède une longue demi-vie d’élimination avec une capacité du SAS à neutraliser le venin circulant. Il a noté la disparition des symptômes cardiorespiratoires, 6 à 24H au plus tard 48H après administration du SAS. Rezende [191] rapporte que le SAS est spécialement efficace dans les pays en voie de développement où il y a une grande fréquence de piqûres de scorpion sans aucune possibilité de traiter les patients dans une unité de soins intensifs. D’autres auteurs, comme Gueron et Sofer [180, 183], ont pu démontrer qu’ils étaient capables de traiter des cas graves d’envenimations scorpioniques sans aucun recours à la sérothérapie. De ce fait, ils ne recommandent pas son utilisation. Dans les études nationales de Moulki [172] et Arbaoui [168], le SAS s’est révélé comme un facteur de risque et non de prévention avec un risque relatif élevé et une association très significative avec le taux de décès. Au terme de leurs analyses statistiques, ils ont conclu que le SAS n’a pas prouvé son efficacité dans le traitement de l’E.S et son administration n’a fait que retarder la prise en charge correcte des cas d’E.S. Ainsi, le non respect de la dose et le retard de prise en charge et la méthode d’administration rendent illusoire l’efficacité du SAS. B- PLACE DES AUTRES THERAPEUTIQUES : 1- La corticothérapie : L’intérêt thérapeutique des corticoïdes est discutable. Certains auteurs les préconisent systématiquement ou les conseillent [14, 174, 176, 192] pour réduire le risque d’un choc anaphylactique ultérieur, compte tenu du volume de sérum SAS 90 injecté. Abroug [142], après son étude prospective randomisée et contrôlée en simple aveugle montre que l’administration des corticoïdes n’influence en aucun cas l’évolution de l’E.S : ils ne réduisent ni la sévérité clinique, ni la durée d’hospitalisation, ni le taux de mortalité, mais utilisés dans les chocs sévères. Dans notre étude, elle a été prescrite dans 46,4 % des cas. Ainsi, cette attitude doit être discutée. 2- les anti-histaminiques : Ils n’ont été utilisés dans aucun cas sans notre étude. Certains auteurs les préconisent systématiquement [146, 193] soit pour leur action centrale sédative, soit pour leur action anti-allergique. A l’opposition, Moulki [172] et Oudidi [173] rapportent dans leurs études prospectives que ces produits n’influencent pas l’évolution des envenimés. En effet, le mode d’action de ces anti-histaminiques par antagonisme spécifique et compétitif au niveau des récepteurs de type H1, explique que leur action soit essentiellement préventive et donc leur administration doit précéder le contact avec l’antigène [171]. De ce fait, il serait plus logique de les éviter. 3-La calcithérapie : Elle n’a été prescrite chez aucun enfant. Pour Moulki [172], le calcium n’influence pas l’évolution de l’envenimé. Cependant, certains auteurs préconisent son utilisation dans le but de réduire les fibrillations musculaires [14]. Elle a été adoptée en Arabie Saoudite au sein du protocole classique pour son effet bénéfique chez l’animal (prolonge la survie) et son éventuelle interaction dans la bradycardie. Actuellement, il apparaît que la prescription du calcium ne répond pas à des bases scientifiques et, de ce fait, il ne doit plus faire partie du traitement des manifestations de l’E.S [114]. 91 4- La sérothérapie anti-tétanique : Elle a été prescrite chez 7,1 % des enfants. Certains auteurs l’ont préconisé [194] dans la crainte de voir se transmettre le tétanos suite à l’E.S. mais aucun cas de tétanos n’a été décrit dans le monde [172]. Cependant, elle peut être prescrite en cas d’instauration d’un traitement traditionnel type scarification [178]. Cette dernière a été pratiquée chez 16 enfants (soit 28%) dans notre série. 5- L’antibiothérapie : Elle a été utilisée dans 3,5 % des cas. Elle reste très controversée et était à visée prophylactique contre les surinfections et le tétanos. Elle ne semble avoir aucun intérêt [178]. 6- L’atropine : Elle a été utilisée chez 10 de nos patients pour son action antispasmodique et pour son opposition de façon compétitive aux effets muscariniques ; cette drogue pourrait aussi accentuer l’effet sympathique du venin aggravant l’HTA et l’OAP. Bawaskar et al. (1992) [195], basés sur une étude rétrospective portant sur 35 victimes de piqûre de Mesobuthus tamulus, ont observé une aggravation des signes cliniques dans le groupe des patients traités par l’atropine. 7- Antalgiques, Antipyrétiques : La majorité de nos patients (76,8%) ont reçu des antalgiques et/ou des antipyrétiques, ceci montre la fréquence élevée de la douleur et/ou la fièvre dans notre série. C- INTERET DE LA REANIMATION ET DES TRAITEMENTS SYMPTOMATIQUES : Si l’unanimité sur la sérothérapie n’est pas encore faite, tous les auteurs s’accordent actuellement pour promouvoir le traitement symptomatique d’une éventuelle défaillance vitale [190, 180, 177]. Ce traitement doit être entrepris dans 92 un service de soins intensifs et assurer la liberté des voies aériennes supérieures avec position latérale de sécurité et ventilation assistée en cas de défaillance respiratoire [178]. En cas de défaillance cardio-circulatoire, il est recommandé d’instaurer des analeptiques cardio-vasculaires type Dobutamine [178]. Elle permet la correction de l’effondrement de l’index systolique et de l’index cardiaque sans effet sur la fréquence cardiaque, entraînant ainsi une réduction des pressions de remplissage des deux ventricules et un effet vasodilatateur périphérique [167]. Dans notre série la dobutamine a été utilisée dans 76,8 % des cas. Il est à noter que le traitement symptomatique de certaines manifestations cliniques telles que la douleur, la fièvre, l’hypovolémie (dues aux vomissements et l’hypersudation) et l’agitation est tout à fait recommandé par les auteurs [177, 178]. D’autres auteurs comme Sofer, Gueron et Bawaskar [196, 193] ont proposé des vasodilatateurs type nifédipine, hydralazine ou prazosine ; mais leurs indications dans la prise en charge du dysfonctionnement cardio-vasculaire ne sont pas encore bien codifiées. Quant à Murthy [184, 185, 197], ils ont utilisé l’insuline en se basant sur des études expérimentales et cliniques dans lesquelles l’administration de l’insuline a pu entraîner une amélioration de l’OAP et des troubles hémodynamiques induits par l’E.S chez des enfants [185]. Une étude approfondie est recommandée. Au total, le rôle de la réanimation est capital dans la prise en charge correcte des cas d’E.S graves. Ainsi, on doit équiper les hôpitaux des régions les plus impliquées par cette affection d’un matériel de réanimation et les approvisionner en médicaments nécessaires, en particulier la dobutamine. 93 IV- EVOLUTION ET ARBRE DE DECISION : A- EVOLUTION : L’évolution de l’envenimé scorpionique se fait sur le mode de tout ou rien [198] : dans l’immense majorité des cas, la guérison est obtenue sans séquelles puisque, passé les 24 premières heures, le pronostic vital n’est plus mis en jeu. Dans un petit nombre de cas, le décès survient dans les 6 à 15 heures qui suivent la piqûre, par complications pulmonaires ou cardio-vasculaires. Quel que soit le traitement adopté, un premier bilan évaluera la gravité du tableau et les facteurs de risque que sont le jeune âge du patient (moins de 15 ans), l’espèce responsable de la piqûre (un scorpion noir de taille supérieure à 5cm), la saison (été) et le délai écoulé entre la piqûre et la possibilité d’une intervention médicale. Dans cette série, la durée d’hospitalisation se situait entre 5h et 24h dans 32,1 % des cas. Les patients qui ont nécessité une IVA étaient du nombre de 5 enfants, Berg et al. [186] ont rapporté 2 cas de détresse respiratoire ayant nécessité une intubation endotrachéale sur une série de 4 envenimations sévères. L’évolution vers le décès est rapportée dans 5,4 % des cas. Tableau 14 : fréquence des décès dans la littérature Et dans notre série. Séries Nbre de cas Décès (%) 170 0 Khouribga [157] 1388 17,4 Beni Mellal [158] 663 7,18 56 0 56 5,4 Turquie Casa [163] [153] Notre série 94 B- ARBRE DE DECISION ET CONDUITE A TENIR : Le Ministère de la Santé Publique a élaboré, le 17 Mars 1999, une stratégie nationale de lutte contre les piqûres de scorpion [178] adaptée au contexte marocain (en conformité avec les données scientifiques concernant le type de scorpion, le venin, la physiopathologie de l’E.S et la valeur des différentes thérapeutiques utilisées). Cette stratégie intègre plusieurs objectifs dont l’élaboration d’un arbre de décision mis à la disposition des différentes structures sanitaires qui pourra guider le professionnel de santé médicale ou paramédicale. La prise en charge ne devra plus se faire de façon fantaisiste, comme c’est le cas depuis des dizaines d’années, mais selon un arbre de décision précis et une conduite à tenir bien codifiée. 95 ARBRE DE DECISION DEVANT UN PATION PIQUE PAR UN SCORPION Patient piqué par un scorpion Examen clinique Etat de conscience, rythme respiratoire, prise de la TA, pouls, température Classification Classe I Signes locaux Classe II Signes généraux Avec au moins 2 signes prédictibles de gravité Sans signes prédictibles de gravité Traitement symptomatique Observation jusqu’à T.P.P*=4h ou jusqu'à disparition des signes généraux • Classe III Défaillance vitale • Neurologique • Respiratoire • Cardio-vasculaire Hospitalisation dans un service de soins Intensifs. signes prédictibles de gravité : âge 10 ans, priapisme, vomissement, Hypersudation, fièvre • TPP : Temps Post-Piqûre 96 V- PREVENTION : La stratégie nationale de lutte contre les piqûres de scorpion intègre la participation des différents secteurs, autres que sanitaires (collectivités locales, travaux publiques, agriculture, éducation, …etc.). Cette stratégie vise plusieurs objectifs [178] : 1- La diminution de l’incidence des piqûres de scorpion : Ø Diminution de l’accès du scorpion dans les habitats : - Désherbage et entretien des alentours des habitats. - Colmatage des brèches, des fentes et des orifices au niveau des mûrs et des plafonds. - Lissage des mûrs entourant la maison jusqu’à une hauteur d’au moins 1m pour empêcher le scorpion d’y grimper. - Dégager les décombres. Ø Diminution du nombre de piqûres : - Port de chaussures fermées et montantes. - Prendre précaution avant de toucher les pierres, le bois, …etc. - Secouer literie, habits et chaussures avant utilisation. Ø Elimination des scorpions : - Utilisation de lampe ultraviolette à la recherche de scorpion avant de dormir (donne une fluorescence jaune). - Utilisation de pesticides à type de pyrèthre. - Elevage de volailles (poule, dindon, canard …). La volaille est prédatrice pour le scorpion. 97 2- La diminution de la morbidité et la mortalité : Ø Education de la population : - Les informer sur la piqûre de scorpion, sur les événements de l’E.S et sur les moyens thérapeutiques. - Les inciter à bannir l’utilisation des thérapeutiques traditionnelles. - Les inciter à coopérer avec les autorités pour le tri, la surveillance et le transfert des malades. - Les sensibiliser à ne pas réclamer des thérapeutiques si elles ne sont pas jugées nécessaires par le professionnel de santé. Ø Standardisation de la conduite à tenir des professionnels de santé (voire arbre de décision). Ø Organisation du tri des malades. Ø Identification présentant le des plus rapidement possible prédictibles de signes des gravité ou patients risque d’évolution vers la gravité. Cette identification nécessite un personnel compétent, un matériel de mesures des constantes vitales, un matériel de réanimation opérationnel et les médicaments nécessaires. Ø Formation du personnel médical et para médical. 3- Rationalisation des dépenses publiques : • Concentrer les dépenses dans les régions endémiques. • Renforcer l’approvisionnement en médicaments pendant la période estivale. • Cibler les malades à traiter. 98 • Ventiler le budget utilisé pour l’achat de médicaments nécessaires, du matériel de surveillance et de l’équipement de réanimation. 99 CONCLUSION Au terme de ce travail, nous concluons que les piqûres de scorpion constituent un problème de santé publique au Maroc, particulièrement dans les régions les plus chaudes. • L’androctonus mauritanicus est le scorpion le plus redoutable et le plus incriminé. • Les manifestations cliniques sont nombreuses et différentes d’un enfant à l’autre. Elles varient des signes locorégionaux aux signes de défaillance des fonctions vitales. • L’E.S ne pose pas de problème diagnostique, c’est beaucoup plus un problème de prise en charge thérapeutique. • Le SAS n’a pas fait de preuve de son efficacité et ne fait que retarder la prise en charge correcte et augmenter le coût du traitement. • La prise en charge correcte et précoce doit se baser sur l’arbre de décision et la conduite à tenir élaborés par le Ministère de la santé publique. • Les cas graves d’E.S doivent être acheminés à un service de réanimation où un traitement symptomatique adapté et bien codifié doit être instauré, en particulier les analeptiques cardiaques type dobutamine. • La nécessité de mettre en pratique la stratégie nationale de lutte contre les piqûres de scorpion élaborée par le Ministère de la santé publique le 17 Mars 1999. Elle repose essentiellement sur la diminution de l’incidence, de la morbidité et la mortalité liées aux piqûres de scorpion ainsi que la rationalisation des dépenses du Ministère de santé publique. Une validation de la prise en charge de l’E.S a été établie au CAP en Juin 2005. • La prévention et l’éducation de la population constituent une étape essentielle. 100 • L’éducation passe par l’information de la population d’une façon simple, sur la piqûre de scorpion, sur les évènements de l’E.S et sur les moyens thérapeutiques traditionnels et à coopérer avec les professionnels de santé. • La prévention contre les P.S a pour objectifs : - Diminution de l’incidence de la P.S. - Diminution de la morbidité et la morbidité. - Rationalisation des dépenses publiques. 101 RESUME : Nous rapportons les résultats d’une étude rétrospective à propos de 56 cas de piqûres de scorpions chez l’enfant colligés au service de Pédiatrie du CHU HASSAN II de Fès durant la période étalée du 1er Janvier 2006 au 31 Décembre 2007. Il s’agit de 34 garçons et 20 filles dont l’âge moyen est de 4,5 ans. 71,4% d’entre eux proviennent du milieu rural. L’accident est survenu pendant la saison estivale dans 67,2 % des cas. Seulement 38 % des piqûres de scorpion sont survenues la nuit avec 90,4 % d’entre elles au cours de la première moitié de la nuit (18h à 24h). Les piqûres ont intéressé essentiellement les parties distales des membres (94 %). Le scorpion jaune a été impliqué dans la majorité des cas (37%). Le délai de prise en charge est ≥ 4 heures dans 40,8 % des cas. Sur le plan clinique, la douleur locale a été objectivée chez 69,6 % des enfants. Les signes systémiques étaient dominés par les vomissements (85,7 %), les sueurs (66,1 %), le priapisme (41,1 %), la tachycardie (17,8 %). Parmi les signes de gravité, un collapsus cardiovasculaire a été noté chez 9 enfants (16,1 %), une détresse respiratoire dans 13 cas (23,2%), les convulsions dans 5 cas (9%) et l’agitation a été rapporté chez 22 enfants (39,3 %). 76,8 % des enfants ont reçu la dobutamine alors que le SAS n’a été utilisé dans aucun cas. La durée d’hospitalisation dans cette série était entre 24h et 48h dans 14 cas soit 25%, les enfants qui ont nécessité une durée d’hospitalisation supérieure à 48h étaient du nombre de 11 enfants (19,6 %). L’évolution vers le décès a été notée chez 3 enfants. La prise en charge actuelle des P.S au Maroc repose sur la conduite élaborée par le ministère de la Santé Publique : traitement symptomatique adapté et surtout la dobutamine en cas de défaillance cardiaque. Le sérum antiscorpionique n’a pas fait preuve de son efficacité. La prévention et l’éducation constituent une étape essentielle de la stratégie nationale de lutte contre les scorpions. 102 SUMMARY We report the results of retrospective study about 56 cases of children scorpion stings, hold in the Paediatric department of CHU Hassan II of Fez, during the period of 1st January 2006 to 31st December 2007. It’s a 34 boys and 20 girls of witch median age is 4,5 years. 71,4% of them are of farming origin. The accident occurred at summer season in 67,2% of cases. Only 38% of stings occurred at night and 90,4% of them at first half of night (18h to 24h). The stings interested essentially distal extremities of limbs (94%). The yellow scorpion was implied in majority of cases (37%). The delay of taking in loads was ≥ 4h in 40,8% of cases. About clinical signs, the local pain is objectified in 69,6% of children. The general signs are dominated by vomits (85,7%), sweating (66,1%), tachycardia (17,8%). Of gravity signs, cardiovascular collapse is noted in 9 cases (16,1%), distress respiratory is reported in 13 cases (23,2%), the convulsions in 5 cases (9%) and the agitation in 22 cases (39,3%). 76,8% of children’s received the dobutamine, also the antiscorpion serum wasn’t used in any case. The time of hospitalisation in this series vary from 24h to 48h in 14 cases (25%), and 11 children (19,6%) had needed more than 48h of hospitalisation. The evolution to death was reported in 3 cases. Actually in Morocco, the management on antiscorpion serum lies on conduct done by public health ministry: symptomatic treatment and especially dobutamine in case of cardiac injury. Antiscorpion serum doesn’t prove its efficiency. The prevention and the education constitute an essential stage in the strategy on antiscorpion envenomation. 103 ﻣﻠﺨﺺ ﻧ ﺴﺘﻌﺮض ﻓ ﻲ ھ ﺬا اﻟﺒﺤ ﺚ دراﺳ ﺔ اﺳ ﺘﺮﺟﺎﻋﯿﺔ ﺑ ﺼﺪد 56ﺣﺎﻟ ﺔ ﻣ ﻦ اﻟﺘ ﺴﻤﻢ ﺑﺎﻟﻌﻘ ﺎرب ﻋﻨ ﺪ اﻷﻃﻔ ﺎل أﺟﺮﯾ ﺖ ﺑﻘ ﺴﻢ اﻷﻃﻔ ﺎل ﺑﺎﻟﻤﺴﺘ ﺸﻔﻰ اﻟﺠ ﺎﻣﻌﻲ اﻟﺤ ﺴﻦ اﻟ ﺎﻧﻲ ﺑﻔ ﺎس ﺧ ﻼل اﻟﻤﺮﺣﻠ ﺔ اﻟﻤ ﺴﺘﻤﺪة ﺑ ﯿﻦ ﻓ ﺎﺗﺢ ﯾﻨ ﺎﯾﺮ 2006إﻟﻰ ﻏﺎﯾﺔ 31دﺟﻨﺒﺮ .2007 ﯾﺘﻌﻠﻖ اﻷﻣﺮ ب 34ذﻛﺮ و 20أﻧﺜﻰ ﺑﻤﺘﻮﺳ ﻂ ﻋﻤ ﺮ 4,5ﺳ ﻨﻮات 71 % ،ﻣ ﻨﮭﻢ ﻣ ﻦ اﻟﺒﺎدﯾ ﺔ .اﻟﺤ ﺎدث وﻗﻊ ﻓﻲ ﻓﺼﻞ اﻟﺼﯿﻒ ﺑﻤﻌﺪل 67,2 %ﻣﻦ اﻟﺤ ﺎﻻت 38% .ﻓﻘ ﻂ ﻣ ﻦ وﺧ ﺰ اﻟﻌﻘ ﺎرب ﻗ ﺪ وﻗ ﻊ ﻓ ﻲ اﻟﻠﯿ ﻞ ﻣ ﻊ 90,4%ﻣﻨﮭ ﺎ ﺧ ﻼل اﻟﻨ ﺼﻒ اﻷول ﻣ ﻦ اﻟﻠﯿ ﻞ ) ﻣ ﻦ س 18إﻟ ﻰ س ،( 24اﻟ ﻮﺧﺰات ﺗﮭ ﻢ أﺳﺎﺳ ﺎ اﻷﻃ ﺮاف اﻟﻘﺎﺻﯿﺔ ﻣﻦ اﻷﻋﻀﺎء ) . (94%اﻟﻌﻘﺮب اﻷﺻﻔﺮ ﺗﺴﺒﺐ ﻓﻲ ﻣﻌﻈﻢ اﻟﺤﺎﻻت ) .(37%ﻣﺪة اﻷﺧﺬ ﻋﻠﻰ اﻟﻌﺎﺗﻖ أﻛﺜﺮ ﻣﻦ 4ﺳﺎﻋﺎت ﻓﻲ 40,8%ﻣﻦ اﻟﺤﺎﻻت .ﺑﺎﻟﻨﺴﺒﺔ ﻟﻠﻌﻼﻣﺎت اﻟﺤﺴﯿﺔ ،اﻷﻟﻢ اﻟﻤﻮﺿ ﻌﻲ وﺟ ﺪ ﻋﻨ ﺪ 69,6% ﻣ ﻦ اﻷﻃﻔ ﺎل .اﻟﻌﻼﻣ ﺎت اﻟﻌﺎﻣ ﺔ اﻟﻤ ﺴﯿﻄﺮة ﺗﺘ ﺸﻜﻞ ﻣ ﻦ اﻟﺘﻘﯿ ﺆ ) ، (85,7%اﻟﻌ ﺮق ) ،(66%ﺧﻔﻘ ﺎن اﻟﻘﻠ ﺐ ) . (17,8%وﻣﻦ اﻟﻌﻼﻣﺎت اﻟﺨﻄﯿﺮة ،اﻟﻮھﻦ اﻟﻘﻠﺒﻲ اﻟﻌﺮﻗﻲ اﻟﺬي ﻟﻮﺣﻆ ﻓﻲ ﺗﺴﻊ ﺣﺎﻻت ) ،(16%اﻟ ﻀﺎﺋﻘﺔ اﻟﺘﻨﻔ ﺴﯿﺔ ﺳ ﺠﻠﺔ ﻓ ﻲ 13اﻟﺤﺎﻟ ﺔ ) (23.2%اﻟﺘ ﺸﻨﺞ وﺟ ﺪ ﻓ ﻲ ﺧﻤ ﺲ ﺣ ﺎﻻت ) ،(9%واﻟﺘﮭ ﯿﺞ ﻓ ﻲ 22ﺣﺎﻟ ﺔ ) . (39,3%اﻷﻃﻔ ﺎل اﻟ ﺬﯾﻦ ﺣ ﺼﻠﻮا ﻋﻠ ﻰ اﻟ ﺪوﺑﯿﺘﺎﻣﯿﻦ ﯾ ﺸﻜﻠﻮن 76,8%ﻣ ﻦ ﻣﺠﻤ ﻮع اﻟﺤ ﺎﻻت ،أﻣ ﺎ اﻟﻤ ﺼﻞ اﻟﻤﻀﺎد ﻟﻠﻌﻘﺎرب ﻓﻠﻢ ﯾﺴﺘﻌﻤﻞ ﻓﻲ أي ﺣﺎﻟﺔ .ﻣﺪة اﻹﺳﺘﺸﻔﺎء ﻓﻲ ھ ﺬه اﻟﺴﻠ ﺴﻠﺔ ﺗﺘ ﺮواح ﺑ ﯿﻦ 12و 48ﺳ ﺎﻋﺔ ﻓ ﻲ 14ﺣﺎﻟﺔ ) ،(25%اﻷﻃﻔﺎل اﻟ ﺬﯾﻦ ﻛ ﺎﻧﻮا ﺑﺤﺎﺟ ﺔ ﻟﻤ ﺪة اﺳﺘ ﺸﻔﺎء أﻛﺜ ﺮ ﻣ ﻦ 48ﺳ ﺎﻋﺔ ھ ﻢ 11ﻃﻔ ﻞ )(19,6% اﻟﺘﻄﻮر ﻛﺎن ﺳﻠﺒﯿﺎ ﻓﻲ ﺛﻼث ﺣﺎﻻت ) اﻟﻮﻓﺎة (. ﺣﺎﻟﯿﺎ ﺑﺎﻟﻤﻐﺮب ،اﻷﺧﺬ ﻋﻠﻰ اﻟﻌ ﺎﺗﻖ ﻟﻠﺘ ﺴﻤﻤﺎت ﺑ ﻮﺧﺰ اﻟﻌﻘ ﺮب ﺗ ﺘﻢ ﺣ ﺴﺐ اﻟﺨﻄ ﺔ اﻟﻤﻌﻄ ﺎة ﻣ ﻦ ﻃ ﺮف وزارة اﻟ ﺼﺤﺔ :ﻋ ﻼج اﻟﻌﻼﻣ ﺎت اﻟﺤ ﺴﯿﺔ وﺧﺎﺻ ﺔ اﻟ ﺪوﺑﯿﺘﺎﻣﯿﻦ ﻓ ﻲ ﺣﺎﻟ ﺔ اﻟ ﻮھﻦ اﻟﻘﻠﺒ ﻲ .اﻟﻤ ﺼﻞ اﻟﻤ ﻀﺎد ﻟﻠﻌﻘﺎرب ﻟﻢ ﯾﻈﮭﺮ ﻓﻌﺎﻟﯿﺘﮫ .اﻟﻮﻗﺎﯾﺔ واﻟﺘﺮﺑﯿﺔ ﯾﻜﻮﻧﺎن ﻣﺮﺣﻠﺔ ھﺎﻣﺔ ﻣﻦ اﻟﺨﻄﺔ اﻟﻮﻃﻨﯿﺔ ﻟﻤﺤﺎرﺑﺔ اﻟﺘﺴﻤﻢ ﺑﺎﻟﻌﻘﺎرب. 104 BIBLIOGRAPHIE 105 1- Clot-Faybesse et al. Quantitative variability in the biodistribution and in toxinokinetic studies of the three main alpha toxins from Androctonus Australis Hector scorpion venom. Toxicon 2004; 43: 661-9. 2- Krifi MN.N., Kharrat H., El Ayeb M. 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