Monsieur MISSIA Yavo Laurent - Tribunal de Commerce d`Abidjan

Transcription

Monsieur MISSIA Yavo Laurent - Tribunal de Commerce d`Abidjan
KF/KAD/OE
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
--------------RG N°3862/2015
12-
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 04 FEVRIER 2015
JUGEMENT CONTRADICTOIRE
Du 04/02/2016
-----------Affaire :
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience
publique ordinaire du jeudi quatre février de l’an deux mil
seize tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient :
Monsieur KEMAN Serge
Monsieur MISSIA Yavo Laurent
(SCPA AYIE et Associés)
Docteur François KOMOIN, Président du Tribunal ;
Contre
Monsieur Henri Marie Albert CHENAL
(SCPA DOGUE-ABBE Yao et Associés)
-------------------DECISION
Mesdames TIENDAGA Gisèle, KOUASSI Amenan Hélène
épouse DJINPHIE, Messieurs NIAMKEY Kodjo Paul,
ALLAH-KOUAME Jean Marie, FOLOU Ignace et SILUE
Daoda ;
Assesseurs ;
Contradictoire
Déclare Messieurs Missia YAVO Laurent, KEMAN
Serge et Henri Marie Albert CHENAL recevables en
leur demande principale et reconventionnelle ;
Avec l’assistance de Maître KOUTOU A. Gertrude épouse
GNOU, Greffier ;
Dit Messieurs Missia YAVO Laurent et KEMAN
Serge mal fondés en leur action ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre :
Les en déboute ;
Dit Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL
partiellement
fondé
en
sa
demande
reconventionnelle ;
Condamne les demandeurs à lui payer la somme de
5.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts
pour procédure abusive ;
Le déboute du surplus de ses prétentions ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
1- Monsieur KEMAN Serge, né le 03 juillet 1969 à
Abidjan-Treichville,
Inspecteur
Commercial,
de
nationalité Ivoirienne, Associé de la société Nouvelles
Perspectives SARL, domicilié à Abidjan-cocody Angré,
23 BP 115 Abidjan 23 ;
2- Monsieur MISSIA Yavo Laurent, né le 10 octobre
1959 à Agboville, de nationalité Ivoirienne, Associé de
la société Nouvelles Perspectives SARL, domicilié à
Abidjan-cocody, 388 Cidex Abidjan 01 ;
Demandeurs, représentés par la SCPA AYIE et Associés,
Avocats à la Cour, y demeurant Abidjan-plateau, angle
avenue Clozel-Boulevard Marchand, immeuble GYAM, 5ème
étage, porte A-5, 06 BP 6363 Abidjan 06, tél : 20 22 68 74 /
20 21 79 33, fax : 20 22 68 75 ;
D’une part ;
Et ;
Monsieur Henri Marie Albert CHENAL, né le 25 avril 1955 à
Strasbourg (France), gérant de la société Nouvelles
Perspectives, demeurant à Abidjan-cocody 5, rue des
flamboyants, es-qualité au siège social de ladite société sise
1
à Abidjan-cocody les II plateaux, non loin de la Polyclinique
des II plateaux, 06 BP 2552 Abidjan 06, tél : 22 41 18 24 ;
Défendeur, représenté par la SCPA DOGUE-ABBE Yao et
Associés, Avocats près la cour d’Appel d’Abidjan, y
demeurant 29, Boulevard Clozel, 01 BP 174 Abidjan 01 ;
D’autre part ;
Enrôlée pour l’audience du 29/10/2015, l’affaire a été appelée
et renvoyée aux 05/11/2015 et 12/11/2015 pour tentative de
conciliation qui s’est soldée par un échec. Une instruction a
alors été ordonnée, confiée au juge KOUASSI Amenan
Hélène épouse DJINPHIE et l’affaire renvoyée à l’audience
publique du 17/12/2015. Cette mise en état a fait l’objet d’une
ordonnance de clôture N°3862/2015 du 13/01/2016. A la date
de renvoi, la cause a été mise en délibéré pour le 04/02/2016.
Advenue cette audience, le tribunal a vidé son délibéré
comme suit :
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs demandes ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit d’huissier en date du 19 octobre 2015 Messieurs
KEMAN SERGE et MISSIA YAVO LAURENT ont assigné
Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL à comparaître le
29 octobre 2015 devant le Tribunal de céans à l’effet de le
condamner à leur payer la somme de 235.000.000 FCFA à
titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale avec
exécution provisoire de la décision à intervenir ;
Au soutien de leur action, les demandeurs expliquent qu’ils
ont créé avec Messieurs YAVO OBODJI GEOFFROY et
HENRI MARIE ALBERT CHENAL une société à
responsabilité
limitée
dénommée
NOUVELLES
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PERSPECTIVES ayant pour objet social le développement
marketing des marques, la vente de matériel biomédical,
l’achat de vente de consommable et réactif, la maintenance
biomédicale et l’achat et vente de produits divers ;
Ils ajoutent que Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL a
été désigné en qualité de gérant de ladite société
conformément aux dispositions statutaires depuis le mois de
juillet 2007 ;
Toutefois, ils relèvent que le défendeur gère la société à sa
guise en se livrant à des actes de concurrence déloyale qui
portent atteinte aux intérêts de ladite société ;
En effet, ils indiquent que Monsieur HENRI MARIE ALBERT
CHENAL est non seulement co-gérant de la société DIANOX
mais également représentant de la société EXPALAB en
Côte d’Ivoire ayant le même objet social que la société
NOUVELLES PERSPECTIVES qu’il dirige ;
En outre, ils affirment que le défendeur a effectué
d’importants paiements à la société EXPALAB au nom de la
société NOUVELLES PERSPECTIVES ;
Tous ces faits constituent selon les demandeurs des actes de
concurrence déloyale et sont à la base des difficultés que
connaît la société NOUVELLES PERSPECTIVES ;
Par ailleurs, ils indiquent que depuis 2010, le défendeur ne
leur rend plus compte de sa gestion et n’a convoqué aucune
assemblée générale à l’effet de permettre aux associés
d’examiner ensemble la vie de la société à travers les
comptes des exercices clos ;
Ils font savoir qu’en dépit de sa condamnation par la
juridiction présidentielle du tribunal de ce siège à convoquer
l’assemblée générale et à leur communiquer les états
financiers des exercices 2010, 2011 et 2012, le défendeur ne
s’est pas exécuté et qu’ils ont été surpris d’apprendre que
sans les aviser, il a procédé à la fermeture de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES ;
Selon les demandeurs, en se comportant comme il l’a fait, le
défendeur a commis une faute grave qui leur cause un
préjudice énorme ; c’est pourquoi, se fondant sur les chiffres
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d’affaires de la société à hauteur de 300.000.000 FCFA, ils
sollicitent la condamnation de Monsieur HENRI MARIE
ALBERT CHENAL à payer à chacun les sommes suivantes :
- 175.000.000 FCFA au titre de la liquidation de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES ;
- 60.000.000 FCFA au titre des gains (dividendes) non établis
et non payés depuis 2009 ;
Soit la somme totale de 230.000.000 FCFA ;
Poursuivant, les demandeurs affirment que l’exposé et la
publication des faits judiciairement établis à la suite de
procédures qui ont donné lieu à des audiences publiques ne
peuvent constituer une diffamation et que la présente action
n’est ni abusive ni vexatoire dans la mesure où toutes les
procédures les ayant opposés ont abouti à la condamnation
du défendeur ;
Ils sollicitent donc que le défendeur soit débouté de sa
demande en paiement de dommages et intérêts pour
diffamation et procédure abusive et vexatoire ;
Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL s’y oppose ; il
conteste être gérant de la société DIANOX qui selon lui a
pour gérant unique Madame YOBOUET DIANE tel qu’il
ressort du registre de commerce de cette société ;
Il ajoute que la société DIANOX loin d’être une société
concurrente travaillait en collaboration avec la société
NOUVELLES PERSPECTIVES dans le cadre d’une stratégie
de partenariat mise en place par les associés de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES ;
Il souligne que Monsieur KEMAN Serge était l’initiateur de ce
partenariat et a participé activement à la mise en place de ce
système tel qu’il ressort des différents courriels produits au
dossier ;
Poursuivant, il indique que la société EXPALAB a été
constituée pour faire face aux difficultés de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES et qu’ainsi elle bénéficiait du
règlement de ses commandes par la société EXPALAB
directement auprès de ses fournisseurs en Europe
notamment la société ROCHE DIAGNOSTICS ;
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Il déclare que Monsieur KEMAN Serge a également participé
à la mise en place de ce partenariat en sa qualité de directeur
commercial et se chargeait de la bonne marche dudit
partenariat en effectuant des virements réguliers ;
Il estime donc n’avoir commis aucun acte de concurrence
déloyale dans la mesure où tous les actes qu’il a posés ont
été menés en accord et même à l’initiative de ses associés
notamment de Monsieur KEMAN Serge ;
C’est donc, dit-il, à tort que les demandeurs lui reprochent les
faits de concurrence déloyale ;
Par ailleurs, le défendeur affirme que contrairement à ce que
prétendent les demandeurs, la société NOUVELLES
PERSPECTIVES n’a pas été liquidée ; cependant, ajoute-t-il,
elle ne fonctionne pas en raison de la mésintelligence entre
les associés ;
Il fait savoir que cette situation a entrainé la fermeture du
siège de la société du fait des impayés de loyers et du départ
de l’ensemble du personnel ; ce qui dit-il l’a motivé à
demander la dissolution de cette société ;
Estimant n’avoir commis aucune faute, il sollicite le rejet de la
demande en paiement de dommages-intérêts formulée par
les demandeurs ;
Reconventionnellement,
le
défendeur
sollicite
la
condamnation des demandeurs à lui payer la somme de
100.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour
diffamation et 50.000.000 FCFA pour procédure abusive et
vexatoire ;
En effet, il prétend que ses coassociés dans l’intention de
porter atteinte à son honorabilité et à sa réputation ont fait
des publications tant sur les réseaux sociaux que dans les
journaux selon lesquelles il aurait été condamné par les
juridictions à payer la somme de 250.000.000 FCFA et qu’il
aurait refusé de s’exécuter, alors qu’il n’en est rien ;
En outre, il affirme que les demandeurs n’ignoraient pas le
partenariat qui existait entre les différentes sociétés
suscitées ; qu’en les qualifiant de sociétés concurrentes et en
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l’accusant de mener la concurrence déloyale dans la seule
intention de leur nuire, les demandeurs ont fait preuve d’une
mauvaise foi caractérisée ;
C’est la raison pour laquelle il sollicite leur condamnation à lui
payer les sommes suspécifiées ;
SUR CE
EN LA FORME
Sur le caractère de la décision
Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL a comparu et a
conclu ; il convient de statuer par décision contradictoire.
Sur le taux du ressort
L’article 8 de la loi organique n°2014-424 du 14 juillet 2014
portant création, organisation et fonctionnement des
juridictions de commerce dispose que : « Les Tribunaux de
commerce statuent :
- en premier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du
litige est supérieur à un milliard de francs CFA ou est
indéterminé ;
- en premier et dernier ressort, sur toutes les demandes dont
l’intérêt du litige n’excède pas un milliard de francs CFA ».
En l’espèce, l’intérêt du litige n’excède pas un milliard de
FCFA ; il convient de statuer en premier et dernier ressort ;
Sur la recevabilité
La présente action ayant été initiée dans le respect des
exigences légales de forme et de délai ; il y a lieu de la
déclarer recevable ;
Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle
Aux termes de l’article 101 du code de procédure civile,
commerciale
et
administrative
« la
demande
reconventionnelle n’est recevable que si elle est connexe à
l’action principale, si elle sert de défense à cette action ou si
elle tend à compensation ou à réparation du préjudice né du
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procès » ;
En l’espèce la demande reconventionnelle aux fins de
paiement de la somme de 150.000.000 FCFA formulée par le
défendeur est connexe à l’action principale ; il y a lieu de la
déclarer recevable ;
AU FOND
Sur la concurrence déloyale
Il est reproché au défendeur d’avoir désorganisé le
fonctionnement de la société NOUVELLES PERSPECTIVES
en détournant sa clientèle au profit des sociétés DIANOX et
EXPALAB ayant le même objet social et dont il est
respectivement co-gérant et représentant d’une part, et
d’autre part, d’avoir effectué d’importants paiements pour le
compte de la société EXPALAB au détriment de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES ;
Aux termes de l’article 7 de l’annexe VIII de l’accord portant
révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 instituant une
Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI),
« constitue un acte de concurrence déloyale tout acte ou
pratique qui dans l’exercice d’activités industrielles ou
commerciales crée ou est de nature à désorganiser
l’entreprise concurrente, son marché ou le marché de la
profession concernée ;
La désorganisation est considérée comme un dommage
consistant en une atteinte certaine et significative subie par
une organisation économique, de nature à faire obstacle à
son fonctionnement ;
Il est constant comme résultant des pièces du dossier que le
défendeur a dans le cadre de sa mission au sein de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES entretenu des relations
commerciales avec les sociétés DIANOX et EXPALAB ;
Toutefois, à aucun moment il n’a accompli des actes de
nature à violer l’obligation de loyauté et de fidélité mise à sa
charge en raison de sa qualité de gérant et qui lui interdit de
faire obstacle au bon fonctionnement de la société qu’il
dirige ;
En effet, il résulte du registre de commerce de la société
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DIANOX versé au dossier que Monsieur HENRI MARIE
ALBERT CHENAL n’est pas co-gérant de cette société, qui
est dirigée par Madame YOBOU Diane Aurore ;
En outre, il est établi comme résultant de l’ensemble des
productions que la société DIANOX n’est pas une société
concurrente de la société NOUVELLES PERSPECTIVES et
qu’au contraire, les deux sociétés travaillaient en
collaboration, et, ce, avec l’accord des associés notamment
de Monsieur KEMAN Serge qui écrit dans le dernier
paragraphe de son courriel daté du 13 juillet 2007 adressé au
défendeur ceci : « voici un peu ce que je voulais te
communiquer comme élément. Cependant, je suis en train de
rédiger le contrat de sous-distribution des produits Roche qui
va lier NOUVELLES PERSPECTIVES à DIANOX de sorte à
rendre officiel notre collaboration mais surtout que DIANOX
apporte son appui financier à NOUVELLES PERSPECTIVES
dans le cadre de l’approvisionnement du marché de
développement de la gamme en contrepartie DIANOX
bénéficiera en tant que sous-distributeur des avantages que
nous allons consigner dans ledit contrat » ;
Il apparait ainsi clairement que la collaboration de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES avec la société DIANOX ne
portait pas atteinte au fonctionnement de la société
NOUVELLES PERSPECTIVES, mais au contraire lui
permettait d’avoir un appui financier pour atteindre ses
objectifs commerciaux ;
Par ailleurs, les demandeurs ne rapportent pas la preuve que
le fait pour le défendeur de représenter la société EXPALAB
en Côte d’Ivoire fait de cette société une société
concurrence ou que le défendeur détourne la clientèle de la
société NOUVELLES PERSPECTIVES au profit de cette
société ;
En effet, il s’évince des pièces du dossier notamment du
courrier daté du 07 juin 2011 adressé à la société
NOUVELLES PERSPECTIVES sous le couvert de monsieur
KEMAN Serge par le directeur de la société EXPALAB que la
société EXPALAB a été créée pour faire face aux difficultés
de la société NOUVELLES PERSPECTIVES ; notamment le
paiement des commandes de cette société ;
Le tribunal constate également que Monsieur KEMAN Serge
était informé de la collaboration entre les sociétés EXPALAB
et NOUVELLES PERSPECTIVES dans la mesure où dans un
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courriel daté du 17 janvier 2010 adressé par lui à Monsieur
HENRI MARIE ALBERT CHENAL il écrit ce qui suit :
« jusqu’à ce jour, vous n’avez apporté aucune réponse au
message de Monsieur Philippe Chenal directeur général
d’EXPALAB. Pour l’amour de Dieu, s’il vous plait, veuillez
donner une suite pour la poursuite d’une collaboration
fructueuse entre EXPALAB et NP et bien sûr profitable aussi
à Roche » ;
Et dans un autre courriel daté du 27 mai 2010, qu’il a adressé
au défendeur, il écrit ceci : « tu trouveras ci-joint l’inventaire
des paiements et des encaissements réalisés par EXPALAB
pour le compte de NOUVELLES PERSPECTIVES arrêtés en
fin avril 2010 » ;
Il résulte de tout ce qui précède que Monsieur KEMAN Serge,
associé de la société NOUVELLES PERSPECTIVES, a
participé activement à la collaboration entre les deux
sociétés, de sorte qu’il ne peut être reproché au défendeur
d’avoir commis des actes ayant porté atteinte au bon
fonctionnement de la société qu’il dirige ; encore et surtout
qu’aucun élément du dossier produit par les demandeurs ne
prouve qu’il a détourné la clientèle de la société NOUVELLES
PERSPECTIVES au profit de la société EXPALAB ;
Il y a lieu en conséquence de dire les demandeurs mal
fondés en leur demande et la rejeter ;
Sur la demande reconventionnelle
Le défendeur sollicite la condamnation des demandeurs à lui
payer la somme de 100.000.000 FCFA et celle de 50.000.000
FCFA respectivement à titre des dommages et intérêts pour
diffamation et procédure abusive et vexatoire ;
Sur les dommages-intérêts fondés sur la diffamation
L’article 1382 du code civil dispose que « tout fait quelconque
de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par
la faute duquel il est arrivé à le réparer » ;
Cet article qui pose le principe de la responsabilité civile
délictuelle subordonne la mise en œuvre de cette
responsabilité à la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un
lien de causalité ;
En l’espèce, Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL
trouve la faute des demandeurs dans les publications tant sur
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les réseaux sociaux que dans les journaux faisant état de ce
qu’il a été condamné à payer la somme de 250.000.000
FCFA et qu’il refuserait de s’exécuter ;
Cependant, il n’est pas produit dans la présente procédure
les publications faites sur les réseaux sociaux que le
défendeur considère comme attentatoires à son honorabilité
et à sa réputation ;
Par ailleurs, il ne ressort nullement de la lecture de l’article
paru dans le journal « la tribune » que le défendeur a été
condamné à payer à ses coassociés la somme de
250.000.000 FCFA et qu’il refuserait de s’exécuter, comme il
le prétend ;
Cet article en effet fait état des différentes décisions civiles
intervenues à la suite du litige opposant les associés de la
société NOUVELLES PERSPECTIVES et des différentes
procédures pénales initiées les uns contre les autres ;
La diffamation étant défini comme l’imputation d’un fait non
avéré qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération
d’une personne à laquelle le fait est imputé, les faits
susindiqués ne peuvent constituer des faits de diffamation
que s’ils sont des contrevérités ;
Or, il résulte de l’ensemble des productions que les faits
relatés dans l’article querellé sont avérés dans la mesure où
ils ont abouti à des décisions rendues en audience publique
par des juridictions civiles à la suite de plusieurs procédures ;
En outre, il n’est pas contesté que les parties ont engagé des
procédures pénales l’une contre l’autre ;
Dans ces conditions, aucune faute ne peut être imputée aux
demandeurs ; encore et surtout qu’il n’est pas prouvé qu’ils
sont les auteurs du titre de cet article ainsi intitulé « Poursuivi
pour détournement de 250.000.000 FCFA, un Français défie
la justice » ; ou qu’ils ont inspiré ce titre à son auteur ;
Les conditions de l’article 1382 n’étant pas réunies en
l’espèce, il y a lieu de déclarer la demande mal fondée et de
la rejeter ;
Sur les dommages-intérêts fondés sur la procédure
abusive et vexatoire.
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Il est constant en droit processuel que l’exercice d’une action
en justice n’est regardée comme abusif que si son auteur l’a
fait dans une intention de nuire ou avec une négligence
coupable ou en détournant l’action de sa finalité sociale ;
En l’espèce, en saisissant la juridiction de céans pour voir
dire et juger que Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL
a commis des actes de concurrence déloyale, les
demandeurs exercent une voie de droit ;
Le défendeur trouve le caractère abusif de cette action dans
le fait que les demandeurs prétendent qu’il a collaboré avec
les sociétés concurrentes que sont les sociétés DIANOX et
EXPALAB et que cette collaboration a désorganisé le
fonctionnement de la société NOUVELLES PERSPECTIVES
dont il est le gérant ;
Le tribunal relève au vu des pièces du dossier que les
demandeurs n’ignoraient pas le partenariat entre les
différentes sociétés ;
Il est constant que Monsieur KEMAN Serge, l’un des
associés de la société NOUVELLES ERSPECTIVES, a
autorisé et participé activement à ce partenariat entre la
société NOUVELLES PERSPECTIVES et les sociétés
DIANOX et EXPALAB, partenariat qui avait pour seul but
d’aider la société NOUVELLES PERSPECTIVES à faire face
aux difficultés financières auxquelles elle est confrontée ;
Ils ne peuvent dans ces conditions légitimement qualifier
d’actes déloyaux les actes accomplis par le défendeur dans
le cadre de ce partenariat au point de lui en demander
judiciairement compte dans le cadre de la présente instance ;
En initiant donc la présente procédure, les demandeurs font
preuve de légèreté coupable ;
Dans ces conditions, Monsieur HENRI MARIE ALBERT
CHENAL est en droit de solliciter la condamnation de
Messieurs KEMAM Serge et Missia YAVO à lui payer des
dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Toutefois, en tenant compte des circonstances de la cause, il
convient de condamner les demandeurs à lui payer la somme
de 5.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour
procédure abusive ;
Sur l’exécution provisoire
Les demandeurs sollicitent l’exécution provisoire de la
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présente décision ;
Cette demande est sans objet car le tribunal statuant en
premier et dernier ressort, dans une matière où le pourvoi en
cassation n’est pas suspensif, la présente décision est
exécutoire nonobstant toutes voies de recours ; encore que
rien n’est à exécuter en l’espèce à leur profit, les demandeurs
ayant été déboutés de leur action ;
Sur les dépens
Les demandeurs succombant, il y a lieu de les condamner
aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et
dernier ressort ;
Déclare Messieurs Missia YAVO Laurent, KEMAN Serge et
Henri Marie Albert CHENAL recevables en leur demande
principale et reconventionnelle ;
Dit Messieurs Missia YAVO Laurent et KEMAN Serge mal
fondés en leur action ;
Les en déboute ;
Dit Monsieur HENRI MARIE ALBERT CHENAL partiellement
fondé en sa demande reconventionnelle ;
Condamne les demandeurs à lui payer la somme de
5.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour
procédure abusive ;
Le déboute du surplus de ses prétentions ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an
que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. /.
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