L`ANDROPAUSE EXISTE-ELLE CHEZ L`HOMME AGE ?
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L`ANDROPAUSE EXISTE-ELLE CHEZ L`HOMME AGE ?
J Maroc Urol 2009 ; 14 : 4-6 MISE AU POINT L’ANDROPAUSE EXISTE-ELLE CHEZ L’HOMME AGE ? N. EL ANSARI Service d’Endocrinologie, Hôpital Ibn Zohr, Marrakech, Maroc E-mail : [email protected] INTRODUCTION Au cours du vieillissement, on assiste à une altération progressive des fonctions endocriniennes par déclin de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Chez toutes les femmes, une insuffisance ovarienne avec épuisement du stock folliculaire et déficit fonctionnel brutal survient de manière inéluctable ; elle est connue sous le nom de ménopause. L’existence d’un phénomène similaire chez l’homme que l’on nommerait “Andropause” est sujet de controverse. En effet, chez l’homme âgé, le déficit en testostérone est généralement modéré, partiel et très variable d’un sujet à l’autre ; certains auteurs préconisent donc le terme de PADAM (partial androgen deficience of aged males). Fig. 1. Prévalence de la diminution des taux de testostérone chez les hommes de différents groupes d’âge [3] PHYSIOPATHOLOGIE DE L’HYPOGONADISME DES HOMMES AGES Les manifestations cliniques d’hypogonadisme chez le sujet âgé ne peuvent être formellement attribuées à la baisse de la testostérone, en raison de la morbidité associée et des différents déficits hormonaux qui s’installent avec l’âge [1]. L’âge apparaît responsable d’une altération testiculaire périphérique, endocrine avec une diminution du nombre de cellules de Leydig, mais aussi exocrine, comme en témoigne l’élévation de la concentration plasmatique de FSH, et la diminution de la concentration d’inhibine circulante [4]. L’intérêt d’une androgénothérapie substitutive reste également discuté car il n’y a que peu d’études contrôlées de l’effet de l’administration à long terme de la testostérone chez le sujet âgé. Cette hypoandrogénie est aussi d’origine centrale, hypothalamo-hypophysaire, quantitative se traduisant par une augmentation insuffisante des gonadotrophines par rapport à la baisse de la testostéronémie, mais aussi qualitative par diminution de libération hypophysaire de LH bioactive [1, 4]. DIMINUTION DE LA TESTOSTERONE AVEC L’AGE La diminution de la testostéronémie se fait progressivement avec l’âge, cette décroissance linéaire est toutefois sujette à des variations individuelles importantes, s’expliquant par de nombreux facteurs génétiques, sociaux et environnementaux [2]. La bonne réactivité de la FSH et de la LH, suite à la stimulation par GNRH, semble en préciser l’origine hypothalamique [5]. En fait, l’âge semble responsable d’une insuffisance testiculaire que le contrôle hypothalamo-hypophysaire ne parvient pas à compenser. Le taux moyen de testostérone totale à l’âge de 75 ans ne représente que 65% du taux moyen à 35 ans (fig. 1) ; la baisse de la testostérone libre et de la fraction bio-disponible est plus précoce et plus prononcée, en rapport probablement avec l’élévation de la SHBG (sex hormone binding globulin). TRADUCTION CLINIQUE DE L’HYPOANDROGENIE DU SUJET AGE Par ailleurs, la testostéronémie des personnes âgées en bonne santé est supérieure à celle des sujets malades, confirmant le rôle de l’état de santé comme facteur de diminution de ce paramètre. L’âge s’accompagne d’une série de symptômes qui rappellent la clinique de l’hypogonadisme : une diminution du bien-être, des fonctions cognitives, de la pilosité, de la force musculaire, de la libido et de l’activité sexuelle (tableau I) ; mais aussi l’apparition -4- L’andropose existe-elle chez l’homme âgé ? N. EL ANSARI et coll. CRITERES BIOLOGIQUES DU DEFICIT ANDROGENIQUE PARTIEL Tableau. I. Symptômes du déficit androgénique partiel Manifestations d’hypogonadisme Tout sujet âgé consultant pour dysfonction érectile ou symptômes évocateurs du déficit et surtout fragilisé par une pathologie chronique doit bénéficier d’une exploration hormonale pour confirmer l’état d’hypogonadisme. • Baisse de la libido. • Troubles de l’érection. • Diminution de la pilosité . • Diminution de la spermatogenèse. Vu que la testostérone circule essentiellement liée à sa protéine porteuse SHBG (76%) et que cette protéine est sujette à de grandes variations en rapport avec l’âge, l’obésité, la dénutrition, certains médicaments et pathologies chroniques hépatiques et rénales, il est préférable de doser la testostérone biodisponible (tableau III) qui comporte la forme libre et celle liée à l’albumine [2, 7]. • Diminution du volume testiculaire, gynécomastie. Manifestations générales • Dépression. • Asthénie physique et psychique. • Baisse de la masse musculaire et augmentation de la masse grasse. • Anémie. La LH et la FSH s’élèvent mais de façon inconstante suivant les patients et dans le temps et ne constituent pas un moyen diagnostique. • Ostéoporose. d’une ostéopénie, d’une athéromatose avec une augmentation de la masse grasse [6]. Tableau III. Conditions de dosage de la testostérone plasmatique La plupart de ces signes peuvent être attribués à la baisse de la testostéronémie, comme le démontrent de nombreuses études, qui notent en effet une corrélation entre les taux de testostérone (totale ou libre) et les différents paramètres cliniques d’hypogonadisme [1]. • Dosage de la testostérone biodisponible le matin. Faire deux dosages. • En dehors de toute pathologie aiguë transitoire. • Avant tout traitement androgénique. • Répéter les dosages si résultats limites. Cependant, les coefficients de corrélation sont faibles et suggèrent que d’autres facteurs endocriniens et non endocriniens participent à la modification de la sexualité observée avec l’avancée en âge [4]. ANDROGENOTHERAPIE CHEZ LE SUJET AGE Contrairement aux diverses études portant sur le traitement hormonal substitutif chez la femme ménopausée, il n’y a que peu d’études scientifiques rigoureuses et contrôlées de l’effet de l’administration à long terme de la testostérone chez le sujet âgé. Le tableau II dresse une comparaison entre la ménopause observée chez la femme et le climatère masculin. La plupart d’entre elles démontrent les effets favorables d’un traitement aux androgènes sur le bien-être général, les capacités cognitives, l’accroissement de la masse musculaire, et l’effet bénéfique plus spécifique sur la libido [8]. Tableau II. Comparaison ménopause - climatère masculin Ménopause Climatère masculin Age 45-55 ans, durée 1-3 ans Pas d’andropause Diminution rapide de la fonction gonadique - endocrine : oestrogènes, gestagènes - exocrine : anovulation Diminution lente de la fonction gonadique - endocrine : carence en androgènes - exocrine : modifications quantitatives et qualitatives des spermatozoïdes Symptômes les plus fréquents : aménorrhée, bouffées de chaleur, dépression, dyspareunie, risque d’ostéoporose Symptômes typiques plutôt rares : adynamie, faiblesse musculaire, diminution du bien-être, risque d’ostéoporose, perte de la libido Etudes à long terme disponibles, avantages et inconvénients d’un traitement hormonal substitutif` connus Traitement hormonal substitutif non établi, pas d’études à long terme disponibles Sur le plan métabolique, l’androgénothérapie tend à améliorer la densité minérale osseuse, à diminuer l’insulinémie basale ainsi que le cholestérol total et le LDL cholestérol [9]. Quant aux risques potentiels de l’administration prolongée de la testostérone, certains considérés comme mineurs, sont bien démontrés, tels la gynécomastie, la polyglobulie, l’apnée du sommeil, la rétention hydrique avec élévation de la tension artérielle et les anomalies lipidiques. La principale réticence tient du risque des androgènes sur l’éventuelle promotion d’un cancer prostatique, en sachant que le microcarcinome prostatique se voit chez 50% des sujets de 70 ans et que celui-ci est classiquement androgénodépendant [10]. -5- J Maroc Urol 2009 ; 14 : 4-6 Le traitement substitutif ne sera mis en place qu’après un dépistage soigneux de l’absence de carcinome prostatique. Il ne sera maintenu que sous réserve d’une efficacité sur la symptomatologie alléguée, et surveillé périodiquement, en particulier en ce qui concerne la prostate et l’hématocrite [7]. 2. Maiter D. La déficience androgénique chez le sujet âgé. Louvain Med 2002 ; 121 : S199-S207. 3. Vermeulen A, Kaufman JM. Ageing of the hypothalamopituitary-testicular axis in men. Horm Res 1995 ; 43 : 25-8. 4. Mitchell S, Harman SM, Metter EJ, Tobin JD, Pearson J, Blackman MR ; Baltimore Longitudinal Study of Aging. Longitudinal effects of aging on serum total and free testosterone levels in healthy men. J Clin Endocrinol Metab 2001 ; 86 : 724-31. 5. Christ-Crain M, Meier C, Huber PR, Zimmerli L, Mueller B. Value of gonadotropin-releasing hormone testing in the differential diagnosis of androgen deficiency in elderly men. J Clin Endoc Metab 2005 ; 90 : 1280-6. 6. Christ-Crain M, Gasser TC, Staub JJ, Meier C. Climatère masculin-mythe ou réalité ? Aspects pathophysiologiques et conséquences cliniques d’une carence en testostérone. Forum Med Suisse 2001 ; 49 : 1210-4. 7. Rossi D, Tostain J ; International Society for the Study of the Aging Male. Recommandations pour la prise en charge du déficit androgénique lié à l’âge. Prog Urol 2004 ; 14 : 859-65. 8. Tenover JS. Effects of testosterone supplementation in the aging male. J Clin Endocrinol Metab 1992 ; 75 : 1092-8. 9. Hajjar RR, Kaiser FE, Morley JE. Outcomes of long-term testosterone replacement in older hypogonadal males: a retrospective analysis. J Clin Endocrinol Metab 1997; 82 : 3793-6. CONCLUSION Le vieillissement s’accompagne d’une altération de l’axe hypothalamo-hypophyso-testiculaire ; l’altération de l’état de santé, l’effet de certains médicaments, l’isolement et la dépression sont autant de facteurs qui concourent également à l’altération des fonctions sexuelles. Le diagnostic de cet état d’hypogonadisme nécessite la confirmation sur plusieurs prélèvements et le dosage de la testostérone biodisponible permet d’éviter les variations liées à la SHBG. Le traitement androgénique substitutif ne sera instauré que s’il existe réellement une concordance entre la symptomatologie clinique et les dosages hormonaux, après avoir éliminé une cause d’hypogonadisme relevant d’un traitement spécifique et enfin après s’être assuré de l’absence de carcinome prostatique. REFERENCES 1. 10. Bardin CW, Swerdloff RS, Santen RJ. Androgens : risks and benefits. J Clin Endocrinol Metab 1991 ; 73 : 4-7. Young J. Déficit androgénique partiel des hommes âgés. Médecine Clinique, Endocrinologie et Diabète, Confrontations Endocrino-Diabétologie, Mars 2004 : 11-5. -6-