vers les cieux qui n`existent pas
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vers les cieux qui n`existent pas
VERS LES CIEUX QUI N’EXISTENT PAS Marianne Costa Art Poétique Je suis l’enfant rageur qui tête à mon propre sein. Où puiser l’acide délicieux qui fasse exploser les limites ? Napalm, feu liquide ne pas être poète du pavot du houblon de la vigne du chanvre mais poète de l’espace entre les choses de l’espace qui contient toutes les choses poète pleine de vide une âme couche-toi-là qui ramasse la poussière dans les rails des tramways qui pleure les branches coupées qui se cogne à la vitre du ciel jusqu’à ce que quelque chose se fracasse et que de la plaie coule un poème Qui offre le poème à la soupe ordurière du temps où tout de suite il se dissout et meurt Qui recueille le dernier souffle de cet enfant perdu et le gobe pour en faire un chant, un pleur, un silence Un geste qui un jour ne sera pas en vain des mouches décollent de mon front et partent vrombir dans l’incertain “Qu’est-ce que la poésie ? - Convaincre un insecte de rebrousser chemin” [2] Un bloc de pierre Le miel amer des maquis d’automne Lorsque à chaque poutre pend le fantôme d’une corde ta présente absence imbibe le moindre souffle chaque soupir est le dernier Feu dans le ciel immobile incandescent par-dessus nos yeux pétrifiés Mars rouge brûle Red hot dans la nuit sans couleurs luciole de flammes là-haut J’accroche un vœu toujours le même à la queue des étoiles filantes aussitôt dissoutes avec lui dans l’horizon noir permanent Seul horizon qui vaille - le triomphe de la peau [3] Vers le dedans (lendemain de Halloween ) Funambule un cul de jatte dévale les rues sur une planche à roulettes les mains noires d’asphalte le visage à la hauteur des pots d’échappement en cet hiver ensoleillé de glace quelque chose se fendille tranquillité de verre soudain réduite en miettes San Francisco Mission colline nue par-dessus les maisons en couleurs un colibri cherche en vain le nectar des fleurs en plastique Accepter comment accepter le poème de la souffrance ces leurres poignants comme un amour de petite fille Dans la rue sonne un carillon parfois ses notes chuchotées au vent survit-on à la douleur et comment ? un matin de décalage horaire de froid transparent quand on ne sait plus par où tolérer l’imminence de la mort les cornes en peluche les déguisements jaune citrouille les squelettes de sucre cuit les masques aux fluorescences blafardes les emballages industriels jonchent cette matinée crissante comme la neige fraîche [4] Étrangement parmi les frimas pacifiques survivent palmiers colibris perroquets et tous les citoyens à la peau sombre Étrangement San Francisco referme sur chacun ses filets d’enchantement ici en plein centre et loin de tout face au mutisme hurlant d’un océan sans rêves [5] Déni Cette étoile morte qui par un effet de distance d’enchantement brillait encore et d’un éclat proche à éclipser le jour ce soleil déjà résorbé dans les limbes dont l’agonie n’était que différée par un effet d’optique souvenir d’elle-même se survivant et aussi bien se précédant comme un ongle blessé sous le vernis rouge comme un cancer qui danse à l’intérieur Tu es à moi disais-je ne sachant pas que je parlais à un mort [6] Marianne Costa est née à la fin des années Soixante. Hypokhâgne et khâgne, puis l’Ecole Normale Supérieure de Fontenay aux Roses et une maîtrise de Littérature Comparée. Parallèlement elle tourne comme chanteuse de rock en France et au Québec et gagne sa vie comme traductrice de romans sentimentaux. A vingt-quatre ans, après une brève expérience professionnelle dans l’édition, elle renonce à s’insérer socialement, entame une psychanalyse, se forme au théâtre auprès de Jacques Lecoq, apprend le Serbo-Croate et s’envole à l’hiver 1995 pour Sarajevo où, dans le contexte de l’immédiat après-guerre, elle travaillera bénévolement comme assistante de littérature française à la Faculté des Lettres et comme collaboratrice de Francis Bueb au Centre Culturel André Malraux. Aujourd’hui elle mène de front une triple carrière d’auteur (scénarios, chansons, fiction), de comédienne et de psychomagicienne. Elle a publié un premier roman, No Woman’s Land (Grasset) et Pin-Up Chrysalide, poésie (Maelström). Elle a également coécrit avec Alejandro Jodorowsky La Voie du Tarot (Albin Michel). Bookleg réalisé à l’occasion de la lecture du mercredi 2 mars 2005 en la Librairie PHAROS à Marseille Collection dirigée par - Collana diretta da Dante Bertoni Déja parus en Bookleg - Già pubblicati in Bookleg... Cuore distillato / Coeur distillé Antonio Bertoli & Marco Parente Solo de Amor Alejandro Jodorowsky Démocratie Totalitaire Lawrence Ferlinghetti 100 bonnes raisons de “faire” de la poésie ! Jean-Sébastien Gallaire & Philippe Krebs (Collectif Hermaphrodite) Prochainement en Bookleg - Prossimamente in Bookleg... Que tu sois Evrahim Baran Philtre Martin Bakero Poudre d’ange Adanowsky Quatrins I Dante Bertoni que les livres circulent... la photocophie ne tue que ce qui est déjà mort... che circolino i libri... la fotocopia uccide solo ciò che è già morto... © Maelström éditions, Bruxelles, 2005 www.maelstromeditions.com © Marianne Costa, 2005 ISBN 2-930355-31-X Dépôt légal - 2005 D/2005/9407/26 Imprimé en Belgique