La responsabilité des infirmiers et des établissements de santé I

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La responsabilité des infirmiers et des établissements de santé I
La responsabilité des infirmiers et des établissements de santé
I.
Généralités
Notion de responsabilité :
• Seules les personnes sont juridiquement responsables :
o Personnes physiques (particuliers, professionnels)
o Personnes morales (entreprises, associations, établissements de
santé)
•
Trois grandes formes de responsabilité :
1. Responsabilité civile : obligation de réparer le dommage causé à un tiers –
intérêts privés = dommages – intérêts (logique de réparation)
2. Responsabilité pénale : sanction d’une infraction commise – intérêt général
= peine (logique de sanction)
3. Responsabilité disciplinaire : sanction de la violation d’une obligation
déontologique = blâme/interdiction d’exercer (logique de sanction)
•
L’ordre judiciaire :
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II.
La responsabilité civile des professions médicales
- Responsabilité du fait personnel
- Responsabilité du fait d’autrui=> Parent/enfant
=> Employeur/salarié
=> Maitre/apprenti
- Responsabilité des choses que l’on a sous sa garde (objets, instruments,
animaux…)
- La responsabilité civile des professions médicales et une responsabilité
apparue tardivement (1835 avec l’affaire du Dr HELIE (amputation fautive des
bras d’un nouveau né)).
- L’expansion des connaissances scientifiques a permis le développement de la
responsabilité médicale avec l’arrêt MERCIER (1936) : « obligation de donner
des soins consciencieux, dévoués, et fondés sur les données acquises de la
science ».»
- Aujourd’hui l’article qui concerne la responsabilité des médecins est l’article L.
1142-1 du code civil « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison
d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la
quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou
organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de
diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables
d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les
établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des
dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve
d'une cause étrangère. »
=> Cet article unifie par la loi du 4 mars 2002 le principe de responsabilité pour
faute pour :
o Dommages causés à la suite d’un ‘acte de prévention, diagnostic ou
de soins’
o Exceptions pour : -infections nosocomiales
-défaut d’un produit de santé
=> Les professions concernés par ce texte sont : -les professions médicales
-les auxiliaires médicaux
-les professions paramédicales
-les pharmaciens
-les établissements de santé
=> L’article prévoie une obligatoire de moyens pour les soins infirmiers
=> Les domaines de la responsabilité pour faute ne concernent que les dommages
liés à un acte médical
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Exemple : le préjudice lié à une chute sur un tapis, ne relève pas de la
responsabilité contractuelle de l'infirmière mais est fondé sur une
responsabilité délictuelle du fait des choses de l'article 1384 al. 1 du Code civil,
la cause du dommage étant l'usage du tapis
- Il faut trois conditions pour engager la responsabilité civile d’un professionnel
de santé : le patient victime doit prouver : -la faute
-le préjudice
-le lien de causalité
1. La faute
= Comportement anormal volontaire ou involontaire, jugé par le juge
- Le code civil (article 1382) prévoit que : « tout fait quelconque de l'homme, qui
cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer » ; art.1383 : « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non
seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence »
- La faute est également inscrite dans le code de la santé publique (Art. L11105) : « toute personne a compte tenu de son état de santé et de l'urgence des
interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus
appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue
et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances
médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de soins ne
doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques
disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Ces actes ne doivent pas
être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent
inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel
de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le
médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en
dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10 »
- Elle est appréciée par comparaison au comportement attendu d’un
professionnel normalement diligent/standard de comportement
- La faute est une violation des obligations imposées par la loi et le règlement
(déontologie incluse)
- Deux types de fautes :
- Faute technique / de science :
_ Maladresse ou manquement aux règles de l’art = « Données acquises de la
science » (référence aux recommandations de bonnes pratiques – HAS) :
prescription d’un ttt inapproprié ; non respect du rapport bénéfice/risque ;
erreur de diagnostic ; mauvaise exécution d’un acte ; défaut de surveillance …
- Faute éthique / de conscience :
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_ Violation du secret professionnel : c’est une faute civile + faute pénale +
faute déontologique
_ Manquement au devoir d’information (très courant chez les médecins)
_ Non respect du consentement
_ Obstination déraisonnable (acharnement thérapeutique ; possibilité d’arrêt de ttt et
de passage aux soins palliatifs dans un contexte de fin de vie)
En dehors d’une urgence et/ou impossibilité de recueillir le consentement, on
ne pratique pas un acte chirurgical sans recueillir le consentement du patient.
Exemples: -intervention du professionnel hors du champ de ses compétences
-erreur médical avec retard de prise en charge
-révélation à la presse par une IDE ayant soigné un patient décédé
-violation du devoir d’information doit être prouvé par le médecin
-refus de transmission par l’établissement du dossier médical au
patient : sanction pour avoir refuser les éléments du dossier
médical au proche du défunt alors que les proches avaient le droit
d’avoir les connaissances sur les circonstances de la mort
-poursuite de la réanimation d’un nouveau né jugée fautive
2. Le préjudice
- Types de préjudice :
=> Corporel (invalidité, incapacité temporaire)
=> Économique (Incapacité temporaire de travail)
=> Agrément (impossibilité de pratiquer des loisirs, activités)
=> Esthétique
=> Moral
- L’expert va évaluer le préjudice en se fondant sur ces principes
- La répartition partielle lorsque le lien de causalité entre la faute et le
préjudice est indirecte : système de la perte de chance
- Violation du devoir d’information (perte de chance de se soustraire à
l’opération et d’éviter le dommage en découlant)
- Retard de prise en charge (perte de chance d’éviter le décès, de retarder la
mort et d’avoir une fin de vie moins douloureuse) : la perte de chance n’est pas
forcément une perte de survie
•
3. Le lien de causalité
Qui engagent leur responsabilité civile ?
- Les professionnels exerçant à titre libéral en établissement ou non pour
les fautes commises à l’occasion des soins
- Les établissements publics ou privées pour les fautes survenues dans leur
organisation du service ou pour les fautes commises par leurs agents ou
salariés
- Le critère économique commande la responsabilité
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=> Les directeurs d’établissement sont donc responsables des fautes/erreurs de
leurs salariés
=> Pour les médecins, la jurisprudence a été plus longue à étendre cette règle,
car un médecin à une grande liberté t n’est pas soumis au directeur de
l’établissement, malgré qu’il soit salarié.
Deux exceptions à l’immunité du professionnel de santé salarié :
- Le salarié commet une infraction pénale volontaire
- Le salarié sort du cadre de sa mission
- L’immunité est exclue pour l’assureur du salarié : la victime ne peut pas agir sur
l’assureur du salarié
- Il y a obligation pour l’établissement d’assurer l’activité de ses salariés /
obligation d’assurance personnelles pour les professionnels libéraux (pour les
doubles emplois : travail en salarié et en libéral) à Article L1142-2 du code de la
santé publique
Précision concernant l’infirmier libéral :
- Responsabilité personnelle de l’infirmier libéral pour les actes relevant de
sa compétence propre effectués de manière indépendante
- Pour les actes exécutés sous la subordination d’un médecin :
responsabilité du médecin (sauf si faute pénale)
La vérification technique des prescriptions : juridiquement la responsabilité
n’est pas attribuée à l’infirmier, mais il va de soi que l’infirmier doit
alerter/vérifier s’il y a une suspicion d’erreur dans la prescription.
L’exonération de responsabilité :
- Force majeure / Faute de la victime :
Exemple : femme enceinte ne déclarant pas être séropositive à son gynécologue.
Lors de l’accouchement l’enfant est séropositif
Exclusion de la responsabilité :
- Responsabilité du fait des fautes commises par les infirmiers. Les infirmiers
salariés engagent la responsabilité des établissements qui les emploient (sur
resp. des cliniques, Droit médical et hospitalier, fasc. 18). Il s'agit comme pour
les sages-femmes d'une responsabilité contractuelle du fait d'autrui
Exemple : responsabilité d'un chirurgien qui est retenue à propos d'un mauvais
suivi médical de la pose d'un drain : décret du 15 mars 1993 place l'acte de
surveillance et d'ablation des systèmes de drainage et de tamponnement au
nombre des actes relevant de la compétence des infirmières, mais le chirurgien
a une obligation de suivi des actes => Cumul de responsabilité
Faute directement imputables à l’établissement :
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- La responsabilité de l'établissement peut être retenue à titre personnel pour
organisation insuffisante des services de garde (Cass. crim., 26 févr. 1997) en
l'espèce, à propos d'un accouchement il a été constaté que le personnel de garde
était placé sous la direction d'une seule infirmière d'un autre service).
- Défaut de surveillance lié à l'insuffisance d'effectifs = responsabilité de
l'établissement
III.
La responsabilité pénale des professions médicales
- Elle suppose que la violation d’un comportement expressément incriminé par la
loi = principe de légalité
- En matière médicale :
- Exercice illégal de la médecine
- Violation du secret :
o Devoir de dévoiler le secret : danger imminent
o Possibilité de dévoiler le secret : personne subissant des violences
(consentement si majeur) ; témoignages devant le tribunal ;
défenses pénales
- Blessures involontaires
- Homicide involontaire
- Mise en danger
=> On ne transmet pas des informations (écrit/oral) à la police, avocat ou autre
(sauf si commission rogatoire).
=> En établissement ce principe s’applique à toutes les personnes ayant
connaissance d’informations liées aux patients. En effet le bon déroulement de
ces activités permet une confiance entre les professionnels et les patients si le
secret est bien garanti.
=> Même si le patient nous dit que l’on peut révéler les informations à sa famille,
le soignant qui révèlera ces informations sera condamné. Pas de transmission
d’information, même avec accord du patient
Les conditions de la responsabilité pénale :
- Élément légal (loi)
- Élément matériel (omission ou commission)
- Élément moral : détermine si l’infraction est volontaire ou involontaire
- Imputabilité (absence d’immunité (ex d’immunité : chef d’État)/absence
de trouble mental)
- En principe la responsabilité pénale est toujours personnelle (ce qui diffère de
la responsabilité civile) : il y a absence de responsabilité pénale du fait d’autrui.
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- Toutefois, les juges peuvent condamner pénalement des professionnels pour
des faits dommageables commis par d’autres si une faute leur est directement
reprochée : défaut de surveillance d'un membre de l'équipe : interne ; élèves
infirmier ; responsabilité pour n'avoir pas surveillé les actes d'un confrère
- La loi du 10 juillet 2000 prévoit :
- Quand il y a un lien direct entre faute et dommage : exigence d’une faute
simple
- Quand il y a un lien indirect entre faute et dommage : exigence d’une
faute caractérisée (= manquement à une obligation particulaire de
prudence imposée par la loi ou le règlement ou exposition du patient à un
risque d’une particulière gravité)
Exemples : -relaxe d’une infirmière n’ayant fait que suivre les instructions du
chirurgien et condamnation de ce dernier
=> Homicide involontaire
-responsabilité de l’infirmière ayant laissé une élève infirmière
administrer à un patient une substance dangereuse sans surveillance
et sans s’assurer qu’elle connaissait le mode opératoire
=> Homicide involontaire
-un interne pratique une incision au niveau de l’abdomen
préalablement à une cœlioscopie : section de l’aorte et décès de la
patiente. Relaxe de l’interne et condamnation du gynécologue pou
faute présumé dans la surveillance de l’interne. Pas de faute
imputable au médecin identifié car faute indirecte et non
caractérisée.
=> Homicide involontaire
- La condamnation du supérieur hiérarchique n’exclut pas la responsabilité pénale
= cumul des responsabilités
- Le champ des obligations et compétences professionnelles détermine le
domaine de responsabilité
Exemples : -infirmière reconnue coupable d’homicide involontaire de même que
le chirurgien au motif qu’elle n’a pas surveillé l’enfant de manière
appropriée pendant la période postopératoire (lors d’une
appendicectomie)
-infirmière chargée d'assurer la ventilation d'un malade, a branché
un obus d'azote au lieu d'un obus d'oxygène provoquant le décès du
patient
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Détournement de mineur = c’est le fait de soustraire un enfant à l’autorité
parentale de ses parents
Âge de la majorité sexuelle = 15 ans
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