L`utilisation de FreeStyle Libre® diminue le risque d`hypoglycémie

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L`utilisation de FreeStyle Libre® diminue le risque d`hypoglycémie
L’utilisation de FreeStyle Libre® diminue le risque
d’hypoglycémie chez les patients diabétiques
de type 1 bien contrôlés
par Kamel Mohammedi
Septembre 2016
Bolinder J et al. Novel glucose-sensing technology and hypoglycaemia in type 1 diabetes: a multicentre, nonmasked, randomised controlled trial. Lancet 2016 (ahead of print). doi: 10.1016/S0140-6736(16)31535-5
Le contrôle strict de la glycémie est indispensable pour prévenir les complications
micro- et macrovasculaires liées au diabète [1, 2], mais une majorité de patients diabétiques
n’arrive pas à atteindre l’objectif glycémique recommandé. De plus, un contrôle glycémique
satisfaisant est souvent associé à un risque élevé d’hypoglycémie [3]. Des études
observationnelles antérieures ont montré que 30 à 40 % des patients diabétiques de type 1
(DT1) étaient victimes de 1 à 3 malaises hypoglycémiques chaque année [4].
L’utilisation des dispositifs de contrôle continu du glucose (CGM) a émergé ces
dernières années, particulièrement chez les patients DT1. Le FreeStyle Libre® (Abbott
Diabetes Care, Witney, Oxon, UK) est le premier dispositif CGM avec un système flash, sans
besoin de calibrage. Le patient peut consulter son taux de glucose (sans ponction cutanée)
en scannant, à tout moment, le capteur à l’aide d’un moniteur. Le patient (ou le personnel
soignant) peut ainsi consulter en temps réel les données immédiates ainsi que les 8 dernières
heures de données de glucose interstitiel qui sont en mémoire dans le transmetteur.
L’objectif de la présente étude a été de comparer l’utilisation de FreeStyle Libre® à
l’auto-surveillance de la glycémie capillaire, dans la prévention des hypoglycémies chez des
adultes DT1 bien contrôlés. Cette étude randomisée, ouverte, multicentrique européenne
(Suède, Autriche, Allemagne, Pays-Bas, et Espagne) a inclus des patients DT1 âgés de plus
de 18 ans, diagnostiqués depuis au moins 5 ans, traités par insuline (protocole inchangé
depuis au moins les 3 mois précédents l’étude), avec une HbA1C ≤ 7,5 %, pratiquant une
auto-surveillance glycémique régulière (≥ 3 par jour pendant au moins les 2 mois précédents
l’étude), et capables de manier le FreeStyle Libre®. Les principaux critères d’exclusion ont été
le diagnostic lors des 6 derniers mois d’une hypoglycémie sévère avec perte de
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connaissance, d’une acidocétose diabétique, ou d’un infarctus du myocarde, l’allergie aux
pansements adhésifs, l’utilisation d’un dispositif CGM les 4 derniers mois ou d’une pompe à
insuline couplée à un capteur CGM, la grossesse, et la corticothérapie par voie orale.
Tous les participants pré-sélectionnés ont porté le FreeStyle Libre® pendant une
période de 14 jours sans accès aux données (ni pour les patients ni pour les investigateurs),
et seulement ceux avec au moins 50 % de données exploitables ont été randomisés dans
l’un des 2 groupes : FreeStyle Libre® versus auto-surveillance glycémique standard utilisant
un lecteur de glycémie capillaire de type FreeStyle Lite meter®. Après la randomisation, les
participants du groupe actif avaient l’accès libre et total aux données du capteur pendant les
6 mois de l’étude. Les patients randomisés dans le groupe contrôle ont été équipés d’un
FreeStyle Libre® pendant 2 périodes de 14 jours à la fin du 3ème et 6ème mois de l’étude sans
accès aux données du capteur, tout en continuant à gérer leur diabète sur la base de
glycémies capillaires.
Le critère de jugement principal a été le temps passé en hypoglycémie (< 3,9 mmol/L
[<0,70 g/L] sur la base des données du capteur dans les 2 groupes) pendant les 14 derniers
jours précédents la fin de l’étude. Parmi les nombreux critères de jugement
secondaires étudiés on peut citer la glycémie dérivée du CGM au 194ème-208ème jour, HbA1C
au 208ème jour, le changement de doses quotidiennes d’insuline (du premier au 208ème jour),
l’utilisation du dispositif (du 15ème au 208ème), et la fréquence quotidienne de scans du
FreeStyle Libre®, ou d’autocontrôles de la glycémie capillaire.
Entre septembre 2014 et février 2015, 241 patients ont été randomisés dans cette
étude. Le temps passé en hypoglycémie a diminué de 38 % dans le groupe actif comparé au
contrôle (-1,24 ± 0,24 h/jour, p<0.0001) : de 3,38 à 2,03 h/jour (groupe actif) et de 3,44 à
3,27 h/jour (groupe contrôle). Cette différence a été observée quel que soit le seuil
d’hypoglycémie retenue (<3,1 mmol/l, 2,5 mmol/L, ou 2,2 mmol/l). Les utilisateurs de
FreeStyle Libre® ont passé également moins de temps en hyperglycémie (>13,3 mmol/L), et
ils avaient moins de variabilité glycémique. En revanche, la variation du taux d’HbA1c
pendant l’étude a été comparable entre les 2 groupes.
Les patients randomisés dans le groupe actif ont réduit le nombre de contrôles de
glycémie capillaire de 5,5 à 0,7 par jour. Le nombre moyen de scans par 24 heures a été
estimé à 15,1 ± 6,9. La fréquence d’utilisation du dispositif dans le groupe actif (92,8 %), et
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celle de l’autocontrôle glycémique dans le groupe contrôle (5,8 ± 1,7 par jour à l’inclusion et
5,6 ± 2,2 à la fin de l’étude) ont été optimales tout au long de l’étude. L’adaptation des doses
d’insuline était comparable entre les 2 groupes. Les patients du groupe actif semblaient plus
satisfaits de leur traitement en comparaison aux contrôles, mais la qualité de vie, les craintes
liées à l’hypoglycémie, et la pression engendrée par le diabète étaient comparables entre les
2 groupes.
Sept hypoglycémies sévères (nécessitant une hospitalisation ou l’intervention d’une
tierce personne) ont été rapportées chez 6 participants : 2 dans le groupe actif, et 4 dans le
groupe contrôle (différence non significative). Aucun cas d’acidocétose diabétique n’a été
signalé pendant cette étude. Parmi les effets secondaires, 248 ont été liés à l’insertion
(douleur, saignement, œdème, ecchymoses, ou induration), ou au port du capteur
(érythèmes, démangeaison, ou rash), responsables de 7 sorties de l’étude dans le groupe
actif.
L’utilisation de FreeStyle Libre® a permis de diminuer le temps passé en hypoglycémie
de façon similaire pendant le jour ou la nuit, ce qui est particulièrement intéressant, car les
hypoglycémies nocturnes sont redoutables et sévères dans 50 % des cas [5]. La diminution
du temps passé en hypoglycémie, et de sa fréquence, a été observée immédiatement après
le début de l’étude témoignant de la bonne acceptabilité et du délai rapide d’adaptation des
patients à ce nouveau dispositif, même si la qualité de vie et d’autres paramètres psychocomportementaux concernant le diabète et les hypoglycémies n’ont pas été différents entre
les 2 groupes. On peut imaginer qu’une période de 6 mois est trop courte pour changer le
vécu d’un patient. L’utilisation de FreeStyle Libre® a été également associée à une diminution
du temps passé en hyperglycémie, et à une moindre variabilité glycémique. En revanche, il
faut encore déterminer pourquoi ces résultats ne se sont pas traduits pas une amélioration
du taux d’HbA1c. Il est probable que la baisse des hypoglycémies dans le bras actif ait
masqué une éventuelle différence entre les 2 groupes en terme d’HbA1c. Il est important de
noter que ces résultats encourageants sont en partie liés à l’excellente adhérence au
dispositif (>90 % d’utilisation).
La principale limite de cette étude est l’inclusion réduite aux patients DT1 bien
contrôlés, qui avaient certainement une prise en charge satisfaisante de leur diabète, et une
meilleure motivation. De ce fait, ces résultats ne peuvent pas être généralisés à d’autres
populations de patients DT1 mal contrôlés avec un risque élevé d’hypoglycémie sévère
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(critère d’exclusion dans cette étude), et ceux qui n’ont pas suffisamment de motivation ou
d’habileté technique pour utiliser ce dispositif.
Au total, l’utilisation du FreeStyle Libre® a permis la réduction de l’incidence et du
temps passé en hypoglycémie chez les patients DT1 bien contrôlés. Ce nouveau dispositif
innovant en matière d’auto-surveillance du diabète est bien toléré et correctement accepté
par les patients DT1.
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Références
[1] The Diabetes Control and Complications Trial Research Group. The effect of intensive treatment of diabetes
on the development and progression of long-term complications in insulin-dependent diabetes mellitus.N Engl J
Med. 1993 Sep 30;329(14):977-86.
doi: 10.1056/NEJM199309303291401
[2] Nathan DM et al. Intensive diabetes treatment and cardiovascular disease in patients with type 1 diabetes. N
Engl J Med. 353 (2005), pp. 2643–2653.
doi: 10.1056/NEJMoa052187
[3] The Diabetes Control and Complications Research Group. Hypoglycaemia in the diabetes, control and
complications trial. Diabetes. 46 (1997), pp. 272–286.
PMID: 9000705
[4] UK Hypoglycaemia Study Group. Risk of hypoglycaemia in types 1 and 2 diabetes: effects of treatment
modalities and their duration. Diabetalogia. 50 (2007), pp. 1140–1147.
doi: 10.1007/s00125-007-0599-y
[5] Choudhary P et al. Hypoglycaemia: current management and controversies. Postgrad Med J, 87 (2011), pp.
298–306.
doi: 10.1136/pgmj.2008.068197
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Mots-clés
Diabète de type 1, hypoglycémie, contrôle continu du glucose, FreeStyle Libre.
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