Télécharger le document
Transcription
Télécharger le document
Abex news Cover 208 FR:Cover 23/10/13 21:44 Page 1 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 1 Trimestriel - octobre 2013 80e année - N° 208 Association Belge des Experts Société Royale Union professionnelle reconnue Comité Directeur de l’ABEX Président : James HUGHES Editorial Vice-Présidents : Michel DE KEYSER Elisabeth BERGER Rapporteur : Alain COPPE Secrétaire Général : Fabien de GERADON Trésorier : Martine PIRET Secrétaire : Frédéric HEYNEMAN Membres Albert COLLET Bernard de RUBINAT Raphael HELLENBRANDT Claude LAHMANN Michel VASSILIADES Chers Confrères, Cette édition de la revue vous présente en avant-première ce qui est perçu comme un évènement dans le monde judiciaire: la certification ISO 9001 d’un cabinet de juge d’instruction. Cela me fait penser à ces alpinistes qui se lancent à l’assaut d’un sommet par la voie la plus difficile. Les plus célèbres voies portent parfois les noms de ceux qui les ont tracées, ainsi dans les Grandes Jorasses (Massif du Mont-Blanc) la voie nord, c’est la Gousseault - Demaison. Peut-être qu’un jour cette démarche de certification au Tribunal de Première Instance de Huy portera le nom de ses deux initiateurs: Frenay - Maes. La certification ISO 9001 est souvent présentée par ses détracteurs comme une procédure facile, accessible au premier venu que l’on obtient sans effort. Vous découvrirez dans cet article que le choix d’un management de la qualité dans un cabinet de juge d’instruction est le contraire d’une solution facile. Comité de rédaction Elisabeth BERGER Fabien de GERADON James HUGHES Editeur responsable James Hughes Président de l’ABEX Fabien de GERADON Av. Frans Van Kalken 1/104 B-1070 - Bruxelles - Belgique Tel : +32 (0)2 523 73 33 Fax : +32 (0)2 527 36 35 www.abex.be e-mail: [email protected] 1 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 F RÉDÉRIC F RENAY Juge d’instruction au Tribunal de Première Instance de Huy 19:13 Page 2 HUY: Le premier cabinet de A LAIN M AES Consultant et Auditeur en systèmes de management par la qualité ne démarche de certification d’un juge d’instruction selon le référentiel ISO 9001constitue une première au niveau du système judiciaire en Belgique. Elle implique, directement, le juge d’instruction. Elle concerne et implique également, de manière indirecte ou complémentaire, différents acteurs du tribunal (notamment le greffier et le personnel administratif ) et différents acteurs externes (en particulier les services de polices et les experts). U Nous porterons une attention particulière sur la relation entre le juge d’instruction et les parties prenantes. Parmi celles-ci, les experts tiennent une place particulière : - comment sélectionner un expert ? - comment s’assurer que la demande sera bien comprise par l’expert ? - comment évaluer la qualité des prestations effectuées par un expert et encourager l’amélioration des prestations d’expertise ? La certification ISO 9001 n’est pas une fin en soi : - elle a été accompagnée par un consultant qui a une expérience confirmée de l’environnement judiciaire et du droit ainsi qu’une expertise en matière de démarche qualité (en l’occurrence la société Emergence Consulting Network - ECN en la personne d’Alain Maes). - elle est validée par des professionnels de l’audit de systèmes de management (en l’occurrence Bureau Veritas Certification – BVC) et elle est soutenue par le SPF Justice. - elle renforce la démarche initiée au sein du cabinet du juge d’instruction au travers du processus de circulation du 2 dossier d’instruction et de l’appropriation des outils de gestion de dossiers et de documentation JIOR et de l’outil d’enregistrement et de consultation JUSTSCAN. - elle se complète par l’initiative de tribunaux de première instance du ressort de Liège concernant la liste des experts judiciaires. Les activités d’un cabinet d’instruction Un cabinet d’instruction couvre les missions et activités qui sont dévolues par la loi au juge d’instruction. Conformément à l’article 55 du Code d’instruction criminelle, l’instruction est l’ensemble des actes qui ont pour objet de rechercher les auteurs d’infractions, de rassembler les preuves et de prendre les mesures destinées à permettre aux juridictions de statuer en connaissance de cause. L’instruction est conduite sous la direction et l’autorité du juge d’instruction. Dans ses tâches légales, le juge d’instruction est assisté d’un greffier. De manière non exhaustive, le juge d’instruction est compétent pour requérir les services de polices et les diriger, pour requérir les experts judiciaires et veiller à la bonne marche de leurs missions, tout en respectant leur indépendance, pour ordonner des perquisitions, des écoutes téléphoniques, pour ordonner le placement en détention préventive des inculpés, etc… En synthèse et de manière non exhaustive, le greffier a pour mission d’assister le juge d’instruction dans son travail, par exemple : rédaction de certaines pièces de procédure, classement et inventaires des pièces du dossier d’instruction, gestion des appels téléphoniques, contacts avec les services de police et les experts judiciaires en vue de la gestion admi- nistrative du dossier, classement et conservation des minutes des actes d’instruction, établissement des copies certifiées conformes, direction et soutien du personnel administratif du greffe de l’instruction, assistance au juge d’instruction lors des descentes sur les lieux, lors des reconstitutions et des autopsies, notification de certaines décisions du juge d’instruction, gestion de l’échéancier du cabinet, etc… Quelques particularités d’un cabinet d’instruction Le cabinet d’un juge d’instruction est une structure relativement petite composée du juge d’instruction qui est assisté d’un greffier qui peut luimême compter, dans le meilleur des cas, sur l’appui d’un ou de plusieurs collaborateurs administratifs. En Belgique, il n’existe pas d’uniformité quant à la structure d’un cabinet d’instruction, sous la réserve qu’un juge d’instruction travaille toujours et obligatoirement avec l’assistance d’un greffier. Le juge d’instruction et le greffier sont indépendants l’un de l’autre et ne sont pas dans une relation hiérarchique qui caractérise d’habitude les relations de travail dans le secteur privé. Ainsi, le juge d’instruction ne choisit pas son greffier et n’a aucune compétence disciplinaire à son égard. Dans la pratique, le greffier veille toutefois à respecter les directives du juge d’instruction mais des conflits pourraient, en théorie, surgir dans ce cadre, sans que le greffier soit formellement tenu de se plier aux injonctions du juge d’instruction, le supérieur hiérarchique du greffier étant le greffier en chef. Les mêmes principes prévalent dans le cadre des relations entre le juge News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 3 octobre 2013 - No 208 net de juge d’instruction certifié ISO 9001 d’instruction et les collaborateurs administratifs. Enjeux de la démarche Le juge d’instruction ne dispose pas de moyen financiers propres. Tous les budgets sont alloués par le SPF Justice de sorte que, par exemple, les commandes de fournitures se font selon un processus édicté par ce service1. Le système de management par la qualité de type ISO 9001 mis en place au sein du cabinet est et doit demeurer un outil permettant au juge d’instruction d’atteindre des objectifs précis. Le juge d’instruction ne dispose pas non plus de compétences disciplinaires à l’égard des services de police chargés de l’assister dans le cadre de ses instructions. Il dispose d’un droit de réquisition et de direction de l’enquête mais n’est pas le supérieur hiérarchique de ces services de police qui disposent de leur propre système de contrôle interne en cas de manquements dénoncés par le juge d’instruction. A l’égard des experts judiciaires, la situation est comparable dans la mesure où l’expert judiciaire doit demeurer, et c’est une garantie essentielle de la qualité de son travail, parfaitement indépendant du juge d’instruction. Le juge d’instruction dispose toutefois d’un pouvoir de contrôle sur le travail de l’expert judiciaire en ce qui concerne le respect de la procédure et des délais dans lesquelles la mission est réalisée. Le juge d’instruction peut en cas de manquement procéder au remplacement de l’expert judiciaire et peut même réduire le montant de ses honoraires. Dans ce cadre, le juge d’instruction doit, par-dessus tout, accomplir sa mission légale de manière indépendante et impartiale à l’égard de tous. Cela signifie que dans le cadre de ses fonctions juridictionnelles, il doit statuer en toute indépendance et en toute impartialité à l’égard de ses clients et de ses prestataires de service, mais également à l’égard de ses collaborateurs directs. Il doit avoir pour objectifs : - de manière générale, d’exercer ses fonctions de manière totalement indépendante et impartiale ; - de respecter scrupuleusement les dispositions légales en vigueur ; - de mener ses instructions à charge et à décharge ; - dans les limites de sa saisine, de poser les actes qui ont pour objet de rechercher les auteurs d’infractions, de rassembler les preuves et de prendre les mesures destinées à permettre aux juridictions de statuer en connaissance de cause ; - d’assumer effectivement la direction de l’instruction ; Ces quelques éléments mettent en évidence qu’un cabinet de juge d’instruction ne dispose pas de la maîtrise de l’ensemble des processus mis en œuvre pour lui permettre d’atteindre les objectifs qui lui sont fixés par la Loi. - de statuer le plus rapidement possible sur chaque demande qui lui est soumise et, en tout cas, dans les délais fixés par la loi, lorsque ceux-ci existent; 1. La réforme prochaine de la Justice devrait modifier certains de ces principes mais en l’état actuel des projets de loi rien n’indique que le juge d’instruction disposera lui-même de compétence en matière de gestion. La politique qualité est mise en œuvre dans le cadre d’un plan d’actions triennal qui contient des objectifs et indicateurs. - de veiller à ce que l’instruction soit menée le plus rapidement possible. Un système de management par la qualité implique, par principe, que le service fourni, en l’espèce un service public fourni en faveur de la société et de ses membres, intègre une notion de satisfaction du client/utilisateur, qu’il s’agisse du ministère public ou des justiciables. Or, la mesure de la satisfaction du ministère public et du justiciable constitue une pierre d’achoppement dans la mesure où le juge d’instruction ne peut pas remplir sa mission avec le seul objectif de faire droit à toutes les demandes qui lui sont adressées. On ne peut pas non plus imaginer qu’un justiciable serait « satisfait » du travail du juge d’instruction qui, par exemple, le place en détention préventive… La mesure de la satisfaction doit donc nécessairement se réaliser par référence à des critères objectifs qui sont révélateurs d’un bon fonctionnement d’un service public. On peut citer parmi les objectifs fixés : - le maintien d’un niveau de qualité le meilleur possible, quelles que soient les modifications de l’infrastructure de l’appareil judiciaire, notamment celles liées à la future réforme du paysage judiciaire ; - la réduction du nombre d’incidents dans le processus ; - la réduction du délai de réponse aux demandes des justiciables, des avocats, etc… - la réduction de la durée des instructions tout en veillant à respecter toutes les exigences de qualité. Eléments-clés de la maîtrise Le système de management par la qualité mis en place au sein du cabinet d’instruction repose sur les éléments suivants : >>> 3 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 Un descriptif des processus de gestion du cabinet Tous les processus de gestion relevant du cabinet de l’instruction font l’objet d’une description détaillée avec renvoi aux modèles de documents préétablis pour être utilisés avec le programme JIOR (programme informatique pour les cabinets d’instruction). Des documents (sous forme de textes, de tableaux, …) ont été élaborés pour permettre que la prestation des services soit réalisée de manière systématique et reproductible. Chaque membre du cabinet sait ce qu’il doit faire lorsqu’il doit traiter telle ou telle pièce ou faire face à une situation donnée. Ce descriptif est mis à jour pour tenir compte des modifications législatives mais aussi des améliorations décidées suite à des non conformités constatées dans le processus. Ce descriptif est également utilisé dans le cadre de formations spécifiquement destinées à de futurs greffiers d’instruction. 4 19:13 Page 4 Une cartographie des processus et un schéma de circulation du dossier d’instruction connus par les proches collaborateurs La cartographie des processus permet d’apprécier la maîtrise des processus orientés clients depuis la saisine jusqu’au dessaisissement du juge d’instruction. En voici la représentation visuelle (voir encadré ci-dessous) Cette représentation permet de communiquer avec les parties prenantes internes et externes. De même, le schéma de circulation des dossiers d’instruction permet de s’accorder avec le greffier et l’équipe administrative sur la bonne maîtrise des dossiers (maîtrise des enregistrements) ainsi que d’assurer une maîtrise du processus d’instruction en cas d’absence du juge d’instruction, du greffier et/ou d’un membre de l’équipe administrative (maîtrise des remplacements et pérennité des données de travail d’instruction). Une écoute = mesure de la satisfaction Le cabinet s’assure de la satisfaction des clients et des parties prenantes par la mise en œuvre des démarches suivantes : - tenue d’un registre des plaintes/récriminations émises par les clients ; - entretien d’évaluations associant le juge d’instruction et différents partenaires ; - tenue d’un registre des suggestions d’améliorations émises par les prestataires de services. Dans ce cadre, le juge d’instruction invite, au moins une fois par an, les chefs de corps des services de police concerné à faire part de leur feedback quant au déroulement des instructions ; - prise de connaissance de toutes les décisions de la chambre des mises en accusation de la Cour d’appel de Liège, de la Cour de cassation et des juridictions de fonds qui mettraient en News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 5 octobre 2013 - No 208 évidence une erreur dans la procédure par référence à la législation en vigueur ou le dépassement d’un délai raisonnable (article 21ter du titre préliminaire du Code d’instruction criminelle) dans le cadre d’un dossier d’instruction ; Ainsi, une vigilance continue est assurée envers les prestataires de service. Elle implique un contrôle du respect des délais de réalisation et l’adéquation entre la demande du juge d’instruction et le résultat fourni, et ce tout au long de l’instruction. - prise de connaissance des éventuelles recommandations émises par le Conseil supérieur de la Justice habilité à traiter les plaintes des justiciables. Dans ce cadre, à la fin du dossier d’instruction, le juge d’instruction adresse également à ses principaux prestataires de service (soit le chef de corps du service de police en charge de l’enquête et les experts judiciaires désignés) un courrier d’évaluation et, en cas de mention « Insatisfaisant », adresse une demande de correctif à apporter par ce prestataire de service pour les devoirs futurs. Une attention particulière est apportée par le juge d’instruction sur la clarté et la complétude des apostilles qui sont adressées aux services de police et aux experts. La qualité de l’apostille est un élément important de la relation entre le juge d’instruction et les partenaires de l’instruction ; de même, elle constitue une base de progrès dans le processus d’instruction et le processus judiciaire. Les zones de polices et les experts mais aussi les instances judiciaires sont donc régulièrement invités à faire part de leurs remarques et suggestions sous forme d’un formulaire d’évaluation et/ou d’entretiens d’amélioration initiés par le juge d’instruction en cours ou en fin d’instruction. Cette démarche permet de mettre en évidence les problèmes de gestion au sein du cabinet du juge d’instruction qui ont un impact négatif sur la réalisation des devoirs d’instruction devant être réalisés par les prestataires de service, toujours en vue d’implémenter les mesures correctives et d’amélioration le plus rapidement possible. Une évaluation des partenaires Le cabinet est à l’écoute permanente de ses prestataires de service (services de police, experts judiciaires, etc…) en assurant des contacts réguliers, afin de : - préciser les attentes du juge d’instruction par rapport aux délais de réalisation et à la qualité des devoirs qu’il a sollicités ; - mettre en évidence les lacunes des prestataires de service, en vue d’implémenter les mesures correctives le plus rapidement possible. Description de quelques points clés du système mis en place Identification et traçabilité Les actes d’instruction sont toujours établis par écrit et classés dans le dossier d’instruction qui est inventorié. Les actes du juge d’instruction sont rédigés par lui-même ou son greffier et sont générés à l’aide du programme JIOR qui est un programme spécifique de création, de gestion et de conservation des documents créés par le cabinet. Le dossier « papier » ainsi établi fait également l’objet d’un scannage à l’aide du système JUSTSCAN. Ce système permet de conserver une copie exacte et en couleur de toutes les pièces du dossier d’instruction. Tous les documents externes, c’est-à-dire établis par les prestataires (services de police, experts judiciaires, etc…) et tous les documents internes originaux font l’objet d’un scannage qui est conservé sur des serveurs. Propriété du client et des parties prenantes Le cabinet garantit la confidentialité et la préservation des données recueillies en cours d’instruction. La maîtrise des enregistrements vise aussi à garantir la conservation des déclarations et données fournies par les clients. Tous les documents font l’objet d’un classement au dossier d’instruction, dossier qui fait l’objet d’un scannage intégral. Tous les biens appartenant au suspect/inculpé et à des tiers qui font l’objet d’une saisie en cours d’instruction font l’objet d’un dépôt qui est enregistré au greffe du tribunal de première instance. Maîtrise des dispositifs de surveillance et de mesure L’organisation spatiale du cabinet permet un quadruple contrôle du traitement de la pièce nouvelle à traiter par le juge d’instruction, ainsi ce système permet d’éviter la perte des pièces provenant des prestataires de service et garantit que le processus de traitement de cette pièce pourra être mis en œuvre. Le risque qu’une pièce soit égarée ou mal classée est ainsi fortement réduit. Le processus de gestion de la pièce nouvelle décrit tout au long du Descriptif des processus permet au juge d’instruction de statuer sur toutes les pièces qu’il doit examiner et ensuite de mettre ses décisions à exécution. Maîtrise de la prestation nonconforme Le traitement d’une prestation non conforme fait partie de l’écoute client et du suivi des prestations. Une liste des non-conformités est enregistrée dans un fichier ad hoc et par ailleurs le traitement des nonconformités des fournisseurs est classé dans la farde fournisseur. Les plaintes et suggestions client et parties prenantes sont également enregistrées dans ledit fichier et le traitement des non-conformités est classé dans une farde client – parties prenantes. Chaque non-conformité doit être immédiatement signalée, ses causes doivent être mises en évidence et des solutions doivent être mises en œuvre en concertation avec les membres du cabinet. >>> 5 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 Quelques points d’attention et enseignements pour les experts judiciaires Depuis plusieurs années, la reconnaissance et la sélection des experts judiciaires fait l’objet de réflexions et d’initiatives tant au niveau politique qu’au niveau judiciaire. Ainsi, des juridictions parmi lesquelles le tribunal de première instance de Huy, ont pris des initiatives en la matière (nous nous référons à la note du 15 juin 2012 relative à la mise en place d’une structure d’admission et d’évaluation des experts judiciaires au sein du ressort de la Cour d’appel de Liège). Au niveau fédéral, différentes initiatives ont été prises et notamment récemment au travers d’une séance de la commission sénatoriale de la justice de juillet 2013. Le processus en œuvre est certes complexe et encore incertain quant à ses contours finaux. Il n’en reste pas moins que l’objectif final vise à une objectivation de la désignation et de l’évaluation des experts judiciaires, à une amélioration de l’expertise judiciaire et à une amélioration continue de l’expertise tant au niveau de l’expert qu’au niveau du juge d’instruction. En ce sens, la mise en place d’un système de management par la qualité au sein d’un cabinet d’instruction favorise une dynamique de progrès dans les domaines de l’instruction et de l’expertise judiciaires en matière pénale. Elle s’inscrit dans une démarche de progrès et d’amélioration du fonctionnement des relations des acteurs du processus d’instruction tant avec les acteurs judiciaires qu’avec les zones de police et les autres parties prenantes de la justice. 19:13 Page 6 En synthèse L’apport de la démarche et de la certification ISO 9001 • Une approche visuelle et partagée des étapes de l’instruction judiciaire • Des engagements clairs envers les parties prenantes (« clients et partenaires ») • Une écoute des parties prenantes avec la mesure de la satisfaction • Une évaluation des partenaires et un processus de sélection objectivé. Des enseignements pour l’expertise judiciaire • Une clarification des apostilles et donc des exigences et attentes du juge d’instruction • Une objectivation des critères d’évaluation des experts et autres partenaires de l’instruction • Des objectifs clairs et communiqués aux parties prenantes • Une évaluation claire et documentée • Un incitant à l’amélioration continue au niveau de l’instruction (détection des non-conformités et des potentiels d’amélioration) et … • … au niveau de l’expertise (évaluation continue et interactive) • Un plan d’actions de correction, de prévention et d’amélioration suivi, mis à jour et audité régulièrement. Les auteurs de l’article sont Frédéric Frenay, Juge d’instruction au Tribunal de Première Instance de Huy et Alain Maes, Consultant et Auditeur en systèmes de management par la qualité. © A LAIN M AES E MERGENCE C ONSULTING N ETWORK 59, rue Vandermeersch – 1030 Bruxelles 02 245 16 76 [email protected] 6 Expertise pénale : une procédure bien huilée Expert-comptable désigné par le cabinet du juge d’instruction Frédéric FRENAY, je mettrai ici en évidence l’accompagnement concret des missions qui me sont confiées. Le réquisitoire, véritable feuille de route pour l’expert, contient un nombre d’informations suffisamment précises pour éclairer l’orientation qu’il conviendra de donner à la mission. Par la suite, si l’analyse des pièces ou l’audition des témoins le rend nécessaire, un réquisitoire complémentaire sera rédigé sur base des constatations émise dans un pré-rapport. Celui-ci est soumis aux témoins et aux éventuels inculpés, ce qui induit la contradiction dans l’expertise. Les réponses fournies et appuyées d’éléments concrets seront utiles au juge du fond et pourront éviter des débats superflus. En cours d’expertise, la production de documents complémentaires est souvent nécessaire. Une simple demande adressée au cabinet d’instruction reçoit rapidement une réponse, ce qui induit un suivi concret des travaux par le juge. L’organisation de réunions conjointes avec le magistrat instructeur, les enquêteurs et l’expert permet aussi de recadrer l’enquête, lorsque des difficultés techniques surgissent. Il en ressort que de la réception du réquisitoire au rapport final, l’expert n’est pas isolé et peut compter sur l’interaction du juge d’instruction pour aplanir les difficultés techniques qui pourraient entraver la mission. Daniel Vause Expert-comptable News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 7 octobre 2013 - No 208 Service public fédéral - Justice INFO PRESSE La réforme de la justice prête à être définitivement votée au parlement Info 07/06/2013 - Rapport final de la Commission Dutroux - avril 1997 " Les drames vécus par les victimes doivent ouvrir la voie à une réforme en profondeur du système de justice pénale. Leur souffrance est à ce prix. La responsabilité du parlement est pleinement engagée dans cette entreprise qui doit être menée à bien." Cette citation extraite du rapport final de la Commission Dutroux exprime clairement l'importance de la réforme de la justice. Dix-sept ans après l'affaire Dutroux et trente ans après l'affaire des tueurs du Brabant, le gouvernement Di Rupo trace définitivement les contours du nouveau paysage judiciaire. Cette réforme fondamentale du troisième pouvoir de notre pays peut se résumer en trois grands piliers : • Élargissement d'échelle : les 27 arrondissements judiciaires sont ramenés à 12 nouveaux arrondissements judiciaires • Mobilité : les magistrats peuvent être affectés de manière plus flexible en fonction des besoins et des nécessités • Gestion : sur la base d'un engagement de résultat, le pouvoir judiciaire devient lui-même responsable de la gestion de son budget et de son personnel Ces trois piliers ont été coulés dans différents projets de loi par la ministre de la Justice, Annemie Turtelboom. Les deux premiers piliers de la réforme ont été coulés dans un projet qui a été approuvé en seconde lecture par le conseil des ministres le 31 mai 2013. Le projet a entre-temps été transmis au parlement afin d'y être examiné. Le second projet de loi, relatif à la gestion de l'ordre judiciaire, a aujourd'hui été soumis une première fois au conseil des ministres et a été approuvé. Ce projet de loi va à présent être transmis pour avis au Conseil d'Etat. Nous résumons une fois encore les lignes directrices du premier projet de loi intégré avant d'examiner plus en détail le second projet de loi final sur la "gestion de l'ordre judiciaire". Arrondissements Le paysage judiciaire a été réaménagé suite à la réforme des polices. Les 27 arrondissements seront rassemblés en 12 arrondissements plus importants. La réforme des polices a montré que l'élargissement d'échelle présente des avantages en termes de gestion, de personnel, de budget, de spécialisation en interne et de service au citoyen. Ces nouveaux arrondissements judiciaires se baseront sur le niveau administratif existant des provinces, aucune nouvelle structure n'étant créée. Il sera toutefois tenu compte des spécificités de Bruxelles et d'Eupen et il restera 12 arrondissements judiciaires : les 10 provinces + Bruxelles et Eupen. Ces arrondissements plus grands présentent un certain nombre d'avantages, tant pour l'ordre judiciaire que pour le citoyen : plus rapidement grâce à une mise en œuvre plus efficiente des moyens, ce qui réduira les délais de traitement ; - Il y aura une amélioration des possibilités de coopération entre les petites entités et les entités de taille moyenne. Quelques exemples concrets : Dans le nouvel arrondissement judiciaire du Limbourg, qui se compose actuellement des arrondissements d'Hasselt et de Tongres, les deux arrondissements plus petits pourront tirer profit de leur transformation en un grand arrondissement : - ils pourront commander eux-mêmes leur matériel de bureau, ce qui leur permettra de réagir rapidement, en fonction des besoins locaux ; - Hasselt et Tongres pourront convenir entre eux des matières dans lesquelles ils se spécialiseront. Par exemple les dossiers en matière d'environnement pour Tongres et les dossiers financiers pour Hasselt. Ainsi, les deux arrondissements ne seront plus obligés d'avoir chacun toutes sortes d'experts, ce qui est compliqué vu le nombre de magistrats dont ils disposent. Mobilité et spécialisation - les arrondissements correspondront aux frontières des provinces, ce qui rendra la politique de poursuites pénales uniforme dans toute la province, tout en respectant les spécificités des zones urbaines et rurales ; - la direction et la coordination seront assurées depuis un même lieu. Dans la majorité des cas, il s'agira du chef-lieu de la province ; - les corps pourront être gérés de manière plus efficiente car la diminution du nombre de mandats conférera aux chefs de corps une plus grande responsabilité et leur donnera une certaine latitude pour se spécialiser dans le management ; - l'arriéré judiciaire pourra être éliminé Les magistrats seront nommés au niveau du nouvel arrondissement judiciaire. Comme les arrondissements deviendront plus grands, les magistrats seront nommés à une plus grande échelle et pourront être affectés dans toute la province. Les chefs de corps auront donc plus de possibilités pour prendre en charge les changements de besoins occasionnels (maladie, congé de maternité, congé...) ou structurels en termes de personnel. En effet, de nombreux tribunaux, surtout les plus petits, disposent d'un nombre limité de magistrats ; les problèmes surgissent alors rapidement lorsque quelqu'un se désiste parce qu'il est malade ou décide de travailler à mi-temps. >>> 7 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 Par ailleurs, les chefs de corps disposeront d'une certaine marge de manœuvre pour désigner les magistrats spécialisés dans certaines matières. Le règlement de répartition des affaires permettra aux différentes divisions de décider entre elles qui se spécialisera dans telle ou telle matière. Cette mobilité plus importante et la possibilité de spécialisation présentent un certain nombre d'avantages, tant pour l'ordre judiciaire que pour le citoyen : - la résolution rapide des problèmes de personnel permettra d'éviter des retards et par conséquent un arriéré, ce qui est bénéfique pour le service au citoyen ; - une mobilité accrue créera des possibilités de spécialisation. Chaque division ne devra pas disposer de tous les types d'expertise. Le règlement de répartition des affaires permettra de se mettre d'accord sur qui se spécialise dans telle ou telle matière. Les magistrats spécialisés pourront suivre et traiter des dossiers dans toute la province. Quelques exemples concrets : Dans le nouvel arrondissement judiciaire d'Anvers les différentes divisions pourront se spécialiser. - Dans la province d'Anvers les arrondissements pourront se spécialiser dans les différents dossiers. Par exemple Anvers se spécialise dans les dossiers de douanes, Malines dans l'urbanisme et Turnhout dans les affaires en matière d'environnement. Dans la pratique, les parquets de Malines et de Turnhout avaient déjà conclu un arrangement de ce type mais, au moment où l'affaire était transmise au juge de fond, le juge territorialement compétent devait reprendre le dossier. L'introduction du règlement de répartition des affaires fera que, de l'enquête au jugement, toutes les affaires pourront être traitées au même endroit - Dans la province de Flandre- Orientale un accord semblable existe. Le parquet de Termonde suit toutes les affaires concernant le trafic d'hormones et de criminalité informatique, le parquet de Gand suit les dossiers de criminalité environnementale. - Dans le ressort de Gand, un magistrat se déplacera partout afin de se charger 8 19:13 Page 8 de toutes les affaires en matière d'environnement Gestion Rapport final de la Commission Dutroux - avril 1997 Les chefs de corps assument une responsabilité très importante en ce qui concerne l'organisation de leur service. Ils exercent une surveillance sur le corps et veillent notamment à la qualité du travail fourni. La commission Dutroux plaide pour l'octroi d'une enveloppe de moyens de fonctionnement au chef de corps sur base d'une évaluation des besoins et des priorités." Le pouvoir judiciaire est indépendant dans les décisions qu'il rend mais dépend du ministre de la Justice en ce qui concerne l'organisation de son personnel et ses moyens. Tout a été réglementé au fil des années dans des lois et des arrêtés royaux. De ce fait, l'ordre judiciaire fonctionne aujourd'hui selon une structure rigide, sans flexibilité, et peut donc difficilement réagir aux changements de circonstances. Cette structure rigide affecte le service au citoyen et le met en danger, en raison, par exemple, de l'accroissement incessant de l'arriéré judiciaire. Pour remédier à cela, il est important que l'ordre judiciaire puisse lui-même décider de l'affectation du personnel et des moyens et puisse réagir de la manière la plus flexible possible aux changements de circonstances et aux situations inattendues. Le troisième volet de la réforme de la justice concrétise cette possibilité. La nouvelle structure de gestion de la Justice L'ordre judiciaire reçoit davantage d'autonomie et de responsabilités. Dans les domaines de la gestion, un contrat de gestion avec obligation de résultat deviendra le baromètre objectif sur la base duquel le personnel et les moyens sont attribués. Pour rendre cela possible, la réforme de la justice créera trois nouveaux organes qui constitueront le pivot de la nouvelle structure. Ces organes seront responsables de la répartition des moyens entre les entités locales au sein de l'ordre judiciaire. Le ministre de la Justice établira en concertation avec ces trois organes le cadre dans lequel l'ordre judiciaire pourra opérer. Le cadre lui-même sera rempli par l'ordre judiciaire via des plans de gestion. Les nouveaux organes, leur composition et leur mission Le Collège du ministère public (5 procureurs généraux, 3 membres du Conseil des procureurs du Roi, 1 membre du Conseil des auditeurs du travail, 1 procureur fédéral) Le Collège du MP recherchera la qualité intégrale dans le domaine de la communication, de la gestion des connaissances, de la qualité, des processus de travail, de l'informatisation, de la gestion des ressources humaines, des statistiques, de la mesure et de la répartition de la charge de travail afin de contribuer à une application de la loi accessible, indépendante, prompte et de qualité. Le Collège du MP pourra donner des directives et des recommandations contraignantes aux comités de direction qui représenteront les entités locales. Le Collège prendra ses décisions à la majorité, avec au moins 1 voix dans chaque rôle linguistique. La composition du Collège sera paritaire. Le Collège du MP répartira les moyens disponibles entre les parquets en se basant sur les plans de gestion rédigés par les comités de direction de ces entités locales. Le Collège des cours et tribunaux (3 premiers présidents de cours d'appel, 1 premier président de cour du travail, 2 présidents de tribunal de première instance, 1 président de tribunal de commerce, 1 président de justice de paix et tribunal de police) Le Collège des cours et tribunaux prendra des mesures qui garantissent l'accessibilité, l'indépendance, la qualité et la promptitude des décisions judiciaires en organisant notamment la communication, la gestion des connaissances, la qualité, les processus de travail, l'informatisation, la gestion des ressources humaines, les statistiques et la mesure et la répartition de la charge de travail. News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 9 octobre 2013 - No 208 Le Collège des cours et tribunaux pourra donner des directives et des recommandations contraignantes aux comités de direction qui représentent les entités locales. Le président du Collège sera élu pour 2,5 ans parmi les membres du Collège Le Collège prendra ses décisions à la majorité, avec au moins 1 voix dans chaque rôle linguistique. La composition du Collège sera paritaire. Le Collège du Siège répartira les moyens disponibles entre les cours et les tribunaux en se basant sur les plans de gestion rédigés par les comités de direction de ces entités locales. Cour de cassation (premier président, président de la chambre, procureur général, premier avocat général, greffier en chef, secrétaire en chef) La Cour de cassation, qui est la juridiction la plus élevée de notre pays, contrôle si toutes les conditions de forme et règles de droit ont été appliquées ou interprétées correctement. La Cour de cassation ne fait donc pas partie du Collège du siège ou du Collège du ministère public. Par conséquent, elle doit directement s'adresser au ministre de la Justice pour les questions de personnel et de moyens. Contrairement au Collège du MP et au Collège du siège, la Cour de cassation ne doit pas continuer à négocier avec les entités locales sur la répartition des moyens disponibles. Contrats et plans de gestion Le ministre de la Justice conclura un contrat de gestion avec chacun de ces trois organes. Ce contrat de gestion sera lié à un engagement de résultat sur la base duquel seront attribués le personnel et les moyens. Les organes devront négocier avec le ministre au sujet des moyens qu'ils demandent et devront justifier la manière dont ces moyens seront utilisés. Ainsi, l'ordre judiciaire aura non seulement plus d'autonomie comme il le demande, mais il aura également davantage de responsabilités. Il appartiendra alors aux organes de gestion et aux entités locales de se concerter, dans les limites de l'enveloppe attribuée, afin de déterminer comment ces moyens seront répartis entre les différentes divisions au sein de l'ordre judiciaire. Cette répartition se fera sur la base d'un plan de gestion que les entités locales devront rédiger et présenter aux Collèges. Les entités locales seront gérées par un comité de direction composé de plusieurs personnes. Les comités de direction devront donc prendre leurs décisions par consensus. Si aucun consensus n'est atteint, la décision appartiendra au chef de corps. Contrôle Sur la base des plans de gestion établis par les entités locales, le Collège compétent évaluera si les objectifs sont atteints et si les moyens attribués doivent être adaptés. Les Collèges devront à leur tour se justifier auprès du ministre. Cette justification se fera via un contrat de gestion avec obligation de résultat évalué tous les ans. Les Collèges comprendront chacun une cellule d'audit interne qui sera responsable du suivi et du contrôle des méthodes de gestion et de la vérification du respect des instructions données par le Collège. La cellule d'audit interne ne sera pas composée de magistrats mais de personnes spécialement formées à cet effet. Chaque année, les Collèges et les entités locales devront rendre un rapport de fonctionnement. Les comptes seront contrôlés par la Cour des comptes et deux commissaires du gouvernement (SPF Justice et SPF Budget et Contrôle de la gestion) seront désignés pour tout évaluer et contrôler. Cette nouvelle manière de diriger présente un certain nombre d'avantages, tant pour l'ordre judiciaire que pour le citoyen : - l'ordre judiciaire pourra lui-même fixer son ordre des priorités et adapter sa politique aux besoins réels du terrain ; - les entités locales pourront ellesmêmes décider de leur politique de ressources humaines et décider du nombre de magistrats qu'elles affectent à chaque type de travail ; - les présidents de division pourront organiser leur entité de manière proactive, en organisant par exemple de grands processus d'une manière qui ne compromette le reste du travail. Quelques exemples concrets : - le nombre d'affaires en matière de jeunesse est en augmentation à Anvers. S'ils veulent désigner un magistrat supplémentaire pour traiter ces affaires de manière à ne pas faire augmenter l'arriéré judiciaire, ils doivent demander au ministre d'adapter le règlement particulier par arrêté royal. À l'avenir, les entités locales pourront prendre une telle décision en toute autonomie sans qu'il faille au préalable consulter le ministre ou adapter un arrêté royal ; - actuellement, lorsque de grands processus sont mis en place, comme pour le procès L&H à Gand, le ministre doit intervenir pour prendre des mesures adaptées afin que le procès puisse se dérouler sans que le tribunal ne s'en trouve complètement paralysé. À l'avenir, les entités locales pourront organiser cela elles-mêmes dans les limites de leur enveloppe. Conclusion L'approbation de ce projet de loi final fait de la réforme de la justice une réalité. Notre paysage judiciaire présentera non seulement un aspect différent, avec moins d'arrondissements et de responsables locaux, mais il deviendra aussi plus flexible. Ainsi, le service au citoyen recevra enfin la priorité qu'il mérite. De plus, l'arriéré judiciaire, l'efficience et la qualité du service seront inclus dans les évaluations auxquelles les entités seront soumises et, suivant leur résultat, en fonction desquelles le budget et le personnel seront attribués. En travaillant sur la base de plans de gestion, l'ordre judiciaire pourra pour la première fois être évalué de manière objective sur ses performances. La Justice entre ainsi définitivement dans le 21e siècle. Margaux Donckier Porte-parole - Ministre de la Justice Annemie Turtelboom Tél. : 02 542 80 55 [email protected] 9 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 V IVIAN MIESSEN Expert ABEX 1065 19:13 Page 10 L’expertise d’objets d’art en F Expert ARGVS aris, France - Entretien du 4 mars 2013 entre Vivian MIESSEN et Monsieur Patrice DUBOIS, expert en tableaux et dessins anciens P 1/ Quelles périodes et quelles écoles couvrez-vous en expertise de tableaux et dessins anciens ? La période sur laquelle s’étend mon activité d’expert généraliste en dessins et tableaux anciens part du début du quatorzième siècle, c'est-àdire autour des années 1300 environ, avec les artistes toscans, pour s’arrêter au milieu du dix neuvième siècle, vers 1840 – 1850. C’est une période extrêmement vaste, trop vaste même, mais qui est le propre des experts généralistes, j’insiste bien sur ce terme. 2/ Quelle est en moyenne votre nombre d’expertises annuelles ? Si je m’appuie sur ma documentation comptable qui recense l’ensemble de mes actes d’expertises rémunérés, je m’aperçois que pour ces trois dernières années, de 2010 à 2012, le nombre des ventes publiques auxquelles j’ai participé, et qui constituent l’essentiel de mon activité, avec quelques inventaires de succession ou en vue d’assurance, s’échelonne, au fil du temps, de 110 à 130 par an environ. Le nombre d’expertises singulières, c'est-à-dire d’œuvres individualisées, au sein de chacune de ces opérations, ventes publiques et inventaires, est évidemment variable. De trois, peut – être, pour les plus réduites, à une cinquantaine dans certains cas. 3/ Dans votre domaine, comment lisez-vous les œuvres, de manière différente selon chaque école ? Pourriez-vous nous décrire votre première approche ? 10 Monsieur Patrice DUBOIS, expert en tableaux et dessins anciens - Récompensé par l’Académie des Beaux – Arts (Institut de France), dans le cadre du prix BERNIER 1974. Auditeur au Collège de France du cours d’Histoire de l’Art, « La Création artistique en France au XVIIe siècle ». A la différence d’un historien d’art universitaire ou d’un conservateur de musées, conduit généralement à examiner les œuvres dans des conditions optima d’espace et de lumière, de temps et de calme, le travail de l’expert généraliste, travaillant dans le marché de l’art, est déterminé par les circonstances de son examen. Le contexte influe sur la méthode, pour autant qu’elle existe. sée. Dans le cas de successions conflictuelles la présence des différents héritiers crée, parfois, un climat oppressant, qui peut peser sur la sérénité dont nous avons besoin. Avec les années nous avons appris, mes confrères et moi, à garder notre calme et à passer par dessus ces contingences, mais il reste vrai que cela n’est jamais de nature à faciliter notre tâche. Dans le cadre d’un inventaire successoral la lumière a pu déjà être coupée, les volets clos, noués par du fil de fer, se révèlent difficiles à ouvrir, les tableaux sont sales et les points d’eau ne fonctionnent plus. Les tableaux accrochés en hauteur doivent être examinés juchés sur un escabeau, ou une échelle, alors que le commissaire – priseur et le notaire attendent votre verdict, qu’ils doivent consigner sur le champ dans leur pri- Les examens des dessins et tableaux effectués dans les locaux des études de commissaire – priseurs n’offrent pas pour autant de meilleures conditions. Tous les commissaires – priseurs veulent procéder à des ventes de tableaux, anciens ou modernes, mais très peu, notamment à Paris, se sont dotés des moyens capables de nous permettre d’effectuer correctement ces expertises. En province la salle de vente jouxte les bureaux et News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 11 octobre 2013 - No 208 rt en France - Tableaux & dessins anciens présente le volume et la lumière indispensables, à défaut, en hiver, d’une agréable chaleur. A Paris, à de rares exceptions, les études des commissaires priseurs n’offrent aucun espace, c'est-à-dire aucun recul par rapport aux œuvres ; la lumière électrique est médiocre ; elles ne possèdent ni chevalet, ni lampe de Wood. On devine que la plupart des commissaires – priseurs ne se sont jamais posés la question. Comme si l’expertise était une divination des images – ce que renforce d’ailleurs leur envoi par internet, et non un examen objectif, empirique et technique, appuyé sur la mémoire et la sensibilité. Il est important de prendre en considération l’état des œuvres qui sont soumises à une expertise : le rentoilage, qui a pu écraser la matière, mais dissimule d’abord la toile primitive, source de renseignement, en cas de doute, sur l’ancienneté possible de l’œuvre. Ou la composition des panneaux, et la nature des bois. Un double examen visuel est nécessaire, à la lumière froide du jour, qui est le double pratiquement en degré kelvin de la lumière électrique jaune, et un examen aux rayons ultra – violets, à la lampe de Wood, pour déceler les restaurations récentes. Ce dernier examen permet aussi, selon moi, de mieux mesurer l’oxydation éventuelle des vernis, leur opacité et leur encrassement, qui limitent en profondeur notre investigation visuelle, et d’en tirer immédiatement des conclusions de prudence. Les tableaux anciens, en effet, ont au cours des siècles, subis plusieurs nettoyages, avec parfois des dévernissages abrasifs au niveau des glacis, notamment ceux appliqués ton sur ton, et des restaurations successives, pour ne pas dire des repeints, plus ou moins étendus, adroits et judicieux. L’examen des ombres, la partie la plus fragile d’une œuvre peinte, en raison de la minceur de la couche picturale, et le plus souvent martyrisée par les restaurateurs, ou ceux qui se sont fait passer pour tels, est, de ce point de vue, souvent révélateur. Il peut être parfois délicat de distinguer une copie d’une œuvre originale – et réciproquement. L’existence d’un prototype incite à penser, ne serait ce que par prudence, que nous sommes en présence d’une copie. Mais tel n’est pas toujours le cas. Des peintres ont pu reproduire, ou comme on dit « répéter » leur tableau, et parfois à l’identique. C’est toujours un cas épineux, pris que nous sommes entre notre conviction et notre prudence. On peut avoir tendance à accompagner notre désignation d’un « attribué à » ou d’un « atelier de », alors qu’au fond de nous-mêmes nous estimons que l’œuvre est autographe. Ces cas sont rares, mais ils existent. Pour les œuvres nouvellement découvertes il faut indiscutablement associer un examen visuel serré, en portant attention aux craquelures, à une recherche documentaire la plus complète possible. Voir, dans certains cas, à la consultation du spécialiste du maître. Personnellement je suis intéressé par l’analyse iconographique de l’œuvre, qui peut parfois, fut ce à un niveau élémentaire, nous permettre de déceler ses maquillages. Je me souviens d’une femme en buste, avec sa palme bien visible, attribut du martyre, qui nous présentait un plat sur lequel reposaient deux pommes ! A l’évidence il s’agissait d’une sainte Agathe dont les seins coupés avaient été pour des raisons commerciales, ou pudibondes, changés en fruit. Bien des tableaux ont été maquillés pour des raisons opposées. Des tableaux franchement érotiques, et parfois d’une haute qualité, ont vu les attributs virils du héros recouvert d’un de ces fameux repeints de pudeur, j’en possède un dans ma collection ; des tableaux religieux ont subis l’opération inverses. Il y a bien longtemps dans une salle des ventes de province, à Valence, j’examinais deux couronnes de fleurs de l’Ecole Italienne du XVIIe siècle, tout à fait opaques dans leur intérieur. En fait elles enserraient une figure de saint François pour l’une, de Marie Madeleine en prière pour l’autre, que l’on avait complètement dissimulé. De telles modifications éclairent sur l’évolution des mentalités modernes, et les destinées de la culture, le passage du religieux au profane, et la conception étroitement décorative, aujourd’hui, de l’art pictural, jusqu’ ‘au déni ou au reniement. 4/ Il y a quelques années un tableau incontesté de Breughel l’Ancien, la Chute d’Icare, s’est avéré ne pas être un Brueghel suite à l’analyse de l’IRPA (Institut Royal du patrimoine artistique, Bruxelles), datation de la toile au carbone 14 et réfléctographie infrarouge. Pour les œuvres «nouvelles » qui sont soumises à votre analyse et qui paraissent importantes, et j’insiste sur le terme importantes, afin d’avoir toutes les assurances, avez-vous recours aux laboratoires ? Et en avez-vous le temps ? Les études de commissaires – priseurs avec lesquelles je collabore régulièrement sont de petites ou de moyennes tailles ; je ne suis donc pratiquement jamais confronté aux peintres dont vous évoquez les noms. Mon travail d’expertise porte sur des œuvres modestes, ou d’artistes moindres. Je me débats avec des copies, ou des œuvres d’artistes anonymes, destinés, je le crains, à le rester longtemps. Les maîtres dont j’ai professionnellement croisé la route ont la plupart du temps été des artistes français : Philippe de Champaigne, Hubert – >>> 11 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 Robert, Géricault, Delacroix ou Courbet par exemple pour les tableaux ; La Hyre, Fragonard, David, Ingres, mais aussi Le Pontormo, Heemskerck ou Murillo, pour les dessins. Ma plus belle découverte reste le seul tableau « érotique » retrouvé de Géricault – sur les deux qu’il aurait peint, une « Scène d’alcôve » à trois figures, aujourd’hui au Paul Getty. Ainsi qu’un portrait de Michael Sweet, inconnu, peu après exposé à Maastricht. Je crois d’ailleurs que le jour où l’on retrouvera le second tableau érotique de Géricault dit « un buste de femme », il se présentera, c’est mon pari, comme une anticipation de l’Origine du Monde de Courbet. C'est-à-dire un buste vu sous un certain angle. A trois reprises seulement j’ai eu recours aux examens de laboratoire, avec prélèvement, en vue de leur datation des pigments. Mais si demain je devais être confronté à une œuvre d’un maître de premier plan, situé entre le quatorzième et seizième siècle, je la demanderais impérativement. GARANTIES 5/ Quid de la responsabilité des experts Français, qui ne sont en définitive que responsables d’une erreur fautive, quand toutes les recherches ont été réalisées et que l’attribution a été faite « de bonne foi » , on ne peut rien leur reprocher…sauf de n’avoir pas pris avis du dernier spécialiste reconnu du peintre ? Obligation de moyens mais de récents procès nous font penser à une obligation de résultats... Dans la rédaction de votre fiche, vous devez respecter le lexique du décret 1 MARCUS , c’est sûrement pour cela que l’on reproche souvent aux experts français d’être frileux dans leurs attributions…La responsabilité juridique des experts en Droit français, unique au monde, est une réalité. C’est une véritable épée de Damoclès, perpétuellement suspendue au dessus de nos têtes, en tout cas de nos expertises. Sommes-nous aujourd’hui dans 12 19:13 Page 12 une obligation de moyen ou une obligation de résultat ? Cela dépend des tribunaux, et même pour un juriste – j’ai fait mes quatre ans de Licence en droit, il est difficile de le savoir. Nous tendons, semble-t-il, aujourd’hui, vers une obligation de résultat, avec cependant des nuances. En ce qui me concerne je m’efforce de suivre les termes du décret Marcus. J’utilise par exemple, bien que rarement, le terme de « suite de », mais jamais celui de « suiveur », traduit de l’anglais « follower » et qui conduit, en droit français, à une confusion avec celui d’ ’’Ecole ». Je crois n’appliquer jamais le terme d’atelier pour des artistes qui manifestement n’en ont jamais eu…Par exemple Watteau. Je limite le plus possible celui d’Entourage de, qui ne figure pas dans le décret. 6/ Bibliothèque et photothèque, importance, constitution, mise à jour et coût, comment procédezvous, avez-vous racheté la clientèle et le fonds documentaire d’un expert ayant arrêté ses activités, est-ce une continuité familiale ou avez-vous débuté seul ? La documentation est indispensable. Outre celle que je constitue depuis près de trente cinq ans, revues, monographies et catalogues raisonnés, j’ai régulièrement recours aux bibliothèque, ou fonds documentaires publics. La confection de sa propre photothèque, nécessairement limitée, est un exercice comparable aux gammes du pianiste. Même si notre clavier demeure étroit. Il faut s’astreindre aux recherches documentaires, excitantes puis fastidieuses, qui nous permettent bien souvent en retrouvant l’origine des œuvres, ou le modèle dont elles procèdent, de rétablir des vérités, d’éviter des erreurs et des contestations juridiques. 7/ J’ai l’impression, que ce soit dans les modernes ou les anciens, qu’inlassablement, des ouvrages sont publiés sur le même sujet, combien de « Léonard de Vinci », 200 ? De Memling, 100 ? Plus d’ouvrages informatifs que critiques. Peu d’ouvrages sur les petits foyers par contre qui subissaient et interprétaient l’influence des grands centres. Votre regard sur les publications actuelles ? L’Histoire de l’Art en France à longtemps était dans le domaine de la peinture la Belle endormie. Les revues d’art étaient à destination du public bourgeois, et la seule revue savante, celle du Louvre et des musées de France, jusque dans les années soixante, d’une rare indigence. Rien à voir avec les publications italiennes, anglaises et allemandes. C’est à partir des années soixante dix, et l’apparition de nouveaux conservateurs et historiens d’art, que les choses ont brusquement évolués, dans le bon sens. La peinture française dont les spécialistes étaient anglais, allemands ou suisse, est redevenue un objet d’études approfondies et méthodiques pour des historiens français. Je trouve les publications, de manière générale, intéressantes et documentées, malgré certaines dérives nettement littéraires, le pêché mignon de la culture française, notamment dans le cadre des colloques. 8/ Pourriez-vous nous décrire votre parcours professionnel, comment êtes vous arrivés à l’expertise, avezvous eu un maître ? Ma famille ne manifestait pas d’intérêt pour l’art mais mon père, ancien « évadé », en 1942, de la France Libre, à l’âge de dix sept ans, avait le goût prononcé de l’histoire. Cela a influé profondément sur mes préoccupations. Lycéen j’ai eu la chance, à la faveur des événements de Mai 1968, qui menèrent la France, et notamment Paris, au bord du chaos et de la guerre civile, ce que l’on masque aujourd’hui, de me lier avec l’écrivain d’art français André Barrère, disparu en 1975, spécialiste de la sculpture française figurative, mais indépendante, de Rodin à nos jours. C’est à lui que je dois d’avoir orienté mon activité vers le domaine de l’art. Plus tard j’ai suivi les cours du professeur Jacques THUILLIER 2 pendant deux ans au collège de France où il présentait les résultats de ses recherches. Dans ma jeunesse j’ai fréquenté des sculpteurs et des peintres professionnels, souvent plus âgés que moi, sur News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 13 octobre 2013 - No 208 lesquels j’ai alors écrits, des préfaces et des études, et dont j’ai énormément appris, je dirais presque tout. Pour le reste je suis un solitaire. Je me suis efforcé de lire, et relire, les grands historiens d’art, notamment Berenson, Federico Zeri, avec lequel j’ai eu un échange de correspondance, pendant une quinzaine d’années, et Panofsky. Mais aussi les lettres et écrits de peintre, et de sculpteurs, de Raphaël Mengs à Auguste Rodin, de Poussin à Delacroix, mais aussi Renoir ou Monet, qui me semblent absolument fondamentaux, même pour la peinture dite « ancienne ». La véritable formation d’un expert ne peut se faire que par l’examen attentif et progressif des chefs d’œuvres des musées, en s’exerçant à fixer durablement son attention, ce qui reste extrêmement difficile. Seul, ou parfois en compagnie de peintres sûrs. Je ne crois guère aux visites guidées, aux conférenciers, ou aux parcours de musées à marche forcée. Pas plus qu’au bachotage intensif, tableau par tableau. Il faut voir, et revoir, toujours les mêmes œuvres. C’est ainsi que j’ai découvert, puisque vous me demandez une anecdote, que le tableau de Frans Francken le jeune du musée du Louvre, Les Trésors du roi Salomon, comportait dans sa principale pièce d’orfèvrerie, un monogrammé AG, que personne n’avait décelé, mais dont le sens reste à élucider. J’ai informé le conservateur de l’époque qui a eut l’amabilité de m’en féliciter ! Professionnellement j’ai accomplis une carrière d’expert salarié au sein du groupe d’assurance AXA, tout en développant, en profession libérale, une activité autonome auprès des commissaires–priseurs français. Aujourd’hui, en retraite d’AXA, je travaille avec douze études sur Paris et l’Ile de France, et dix huit en province. C’est trop! Et l’heure est venue de la réflexion, et de la réduction, si j’en ai le courage, de mes collaborations. C’est à travers mes premiers contacts dans le monde de l’assurance avec des commissaires–priseurs amis, que j’ai débuté dans l’expertise, Etait ce un bon choix ? Je me pose encore la question. 9/ Le nombre d’experts spécialisés en tableaux anciens me semble diminuer et ne pas se reconstituer par rapport aux années 80 ou leur nombre était plus important (Antonini, Ryaux Touzet, Marcus, Latreille, Lebel…), le réservoir semble se tarir, à quoi est-ce dû à votre avis ? Nous remercions vivement Monsieur Gustaaf DE LANDTSHEER, expert en tableaux anciens, Président de l’association d’experts d’art ARGVS (www.argvs.be), pour la traduction gracieuse de ce texte. Il est vrai, comme vous l’avez bien remarqué, que le nombre d’experts en charge dans le domaine des tableaux anciens, en France, pour les ventes publiques, semble moindre aujourd’hui qu’il y a vingt ou trente ans. Mais le principal cabinet en activité sur Paris, celui de mon confrère Eric Turquin, a des collaborateurs et associés salariés, et, in fine, le nombre a peut être peu changé. Expert ABEX 1065 10/ Par rapport aux grosses machines anglo-saxonnes qui travaillent de manière collective pour l’expertise, vous sentez-vous affaibli, une étude vous prend plus de temps, avantage et/ou inconvénient ? Dans le même temps il est indéniable, selon moi, que les ventes françaises, soumises à l’atomisation des études de commissaires - priseurs, et à l’exportation continue des œuvres d’art, se sont appauvries de manière dramatique. Les grandes firmes anglo-saxonnes ont développé leur activité en France et accru leur hégémonie. Elles le doivent à leur travail et à leur mérite, et, plus que tout, à la somme de nos défauts. Il est indéniable que la rationalisation des tâches dans les sociétés anglosaxonnes conduit, me semble-t-il, à un meilleur travail d’expertise. Le défaut de leur système est le revers de leur sérieux : en matière d’histoire de l’art, et donc d’expertise, c’est le dernier spécialiste en activité qui fait souvent autorité, et que l’on suit plus ou moins fidèlement. J’ai en mémoire des dés- attributions sur des œuvres de Durer, puis du Gréco, qui ne m’ont pas toujours paru bien évidentes. Mais leur système s’avère, sur le plan des connaissances, à mon sens, infiniment plus performant. Ce que peu d’experts français accepteront de reconnaître, et moins encore de commissaire – priseurs. V IVIAN MIESSEN Expert ARGVS Cabinet d’expertise en meubles et objets d’art [email protected] www.artcult.be Tél./Fax : + 32 2 384.95.65 Portable : + 32 476/61.66.88 Notes : 1. En France, les mentions figurant au sein des certificats et des documents d'authenticité sont encadrées par la réglementation. Le décret Marcus du 3 mars 1981 impose en effet des normes en matière d'authentification d'une œuvre d'art ou d'un meuble ancien. Ces règles visent principalement à éviter les fraudes. Le décret prévoit ainsi que le vendeur d'œuvres d'art ou d'objets de collection doit, lorsque l'acheteur en fait la demande, lui « délivrer une facture, quittance, bordereau de vente ou extrait du procès-verbal de la vente publique contenant les spécifications qu'ils auront avancées quant à la nature, la composition, l'origine et l'ancienneté de la chose vendue ». En cas de litige ultérieur portant sur l'authenticité du bien, les mentions associées à sa description seront déterminantes. Décret n°81-255 du 3 mars 1981 dit décret MARCUS : ( h t t p : / / w w w. c o n s e i l d e s v e n t e s . f r / l e conseil/lexique/d/d/description-desobjets.html) M. Marcus (Claude-Gérard), ancien député, qui a été Maire du Xème arrondissement de Paris, était expert en tableaux anciens, il est à l’origine de ce décret. 2/ Jacques THUILLIER (1928-2011) était un historien de l’art Français, Agrégé des lettres classiques et Professeur au Collège de France, ce fût un spécialiste de la peinture française du XVIIème siècle, auteur de nombreux ouvrages de référence. 13 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 Ü NSAL Ö ZDILEK Professeur et directeur du programme en immobilier 19:13 Page 14 La conscience immobilièr Université du Québec à Montréal a conscience immobilière cumulée interroge ses fondements face aux nouvelles réalités du marché. Les changements structurels récents, engendrés par la conjoncture internationale en volume grandissant des transactions et en forte concurrence des marchés mettent à l’épreuve la formation, la pratique et la recherche en immobilier et participent, de ce fait, à son éventuelle propulsion au statut mérité de science à part entière. L’article tente d’amener quelques réflexions sur cette matière Cet article revendique le concept de « conscience immobilière » avec la perspective de regrouper ses champs de connaissances et prend l’initiative de l’intituler la « science immobilière ». Les données de la matière de cet article sont issues de diverses sources (ouvrages, sites Internet, articles, communications, présentations en conférences et congrès internationaux), diffusés en langues française et anglaise. Par conséquent, les renseignements relayés ici peuvent s’avérer incomplets ou sous-estimer la réalité dans les pays où la langue de communication diffère. Jusqu’en 1990, le marché immobilier était captif au sein d’un seul pays ou d’une même région. Aujourd’hui, les capitaux et les acteurs traversent plus souvent les frontières cherchant à minimiser les risques et à optimiser les profits. Dans ce contexte, les connaissances en immobilier se trouvent avantagées, mais font du même coup face à certains défis reliés à la diversité des systèmes politiques, à l’hétérogénéité des concepts et des pratiques, au manque de données et à l’inefficacité des marchés; elle-même due aux problèmes qu’éprouvent encore certains pays émergeants ainsi qu’aux retards enregistrés par d’autres qui n’en sont qu’à l’étape préliminaire d’implantation d’un système fonctionnel de droit foncier et de cadastre. Enseignement en immobilier Malgré toutes ces lacunes, les pays industrialisés espèrent une convergence vers une normalisation internationale en aidant ceux qui tardent à mettre en place les étapes de développement. Dans le but de partager et d’unifier progressivement les connaissances théoriques et pratiques; il incombe aux acteurs importants de l’immobilier de faire d’abord une réflexion sur les fondements de l’immobilier et de trouver ensuite les voies à un consensus pour le propulser à son statut mérité en tant que discipline scientifique à part entière. L’enseignement de l’immobilier est historiquement marqué par l’existence de deux visions, l’une orientée sur la pratique et l’autre sur l’analytique. La pratique favorise l’apprentissage basé sur une expérience en milieu de travail. Inversement, la formation universitaire met la priorité sur la philosophie de la réflexion analytique et critique (Musil, 2005). Les académiciens et les chercheurs soutiennent que la pratique sans les fondements théoriques et analytiques serait confinée à une mentalité de « recettes de cuisine ». C’est, en effet, L 14 Les premiers cours en immobilier furent dispensés par des universités états-uniennes, il y a plus d’un siècle (Nourse, 1995). Ces cours faisaient alors partie des programmes en administration des affaires, au sein des écoles de gestion (Black et al., 1996). On y préconisait une approche multidisciplinaire faisant appel à la complémentarité des connaissances issues de diverses disciplines telles que l’économie, la finance, la comptabilité, la gestion, le marketing, le droit des affaires, la communication et la psychologie. ce que font la plupart des universités; elles dispensent des bases théoriques aux étudiants qui s’orientent ensuite sur le terrain pour les mettre en pratique. Entre le débat d’éminence pratique et analytique se trouve un enjeu de fonds résumé par la question suivante: l’analyse et l’évaluation immobilière sontelles de véritables disciplines académiques? La réponse est incontestablement positive car l’analyse et l’évaluation cherchent à estimer et expliquer la notion de « valeur » qui, pour l’immobilier est aussi fondamentale que la notion de « temps » pour la physique. Cette discipline n’a cependant pas su s’approprier de façon claire la notion de valeur et de son approche, tout comme pour les notions de prix, de coût et de revenu. La raison principale provient sans doute de l’enseignement qui a toujours répondu de façon classique aux besoins pratiques et contextuels de l’industrie. C’est comme si le physicien cherchait à réduire le temps de production dans une industrie de matériaux sans se préoccuper réellement de la richesse des fondements mêmes de la notion temps. Par ailleurs, il est très probable que le fait d’avoir un historique relativement court par rapport à d’autres disciplines comme l’économie, d’emprunter à des connaissances multidisciplinaires et d’avoir des normes d’enseignement assez hétéroclites ait participé à l’érosion des fondements véritables du domaine de l’immobilier (Diaz, 1993). Vers une uniformisation des normes de l’enseignement Il existe actuellement une gamme très variée de cours, de programmes et de niveaux de formation visant à répondre aux besoins de l’industrie (Black et Carn, 1998). En conséquence du caractère à la fois local et régional du domaine de l’analyse immobilière, les philosophies et les approches éducati- News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:13 Page 15 octobre 2013 - No 208 obilière en perspective T A BL E A U 1 UNI V E R SI T É S OF F R A NT DE S PR OG R A M M E S E N I M M OBI L I E R ves sont assez composites (Schulte, 2002). Par ailleurs, la mondialisation de l’immobilier impose l’ajout au cursus des étudiants de nouveaux cours traitant spécifiquement de l’immobilier international. Chaque pays met l’accent dans son enseignement sur des spécialités différentes de l’immobilier dont le partage devrait être productif. Dans cette perspective, des associations accréditées font la promotion internationale de cette discipline : Society of Accredited Real Estate Programs – SAREP, la Royal Institution of Chartered Surveyors – RICS et l’American Society of Appraisers - ASA. Puisque la RICS et ASA ont créé des associations nationales et régionales dans plusieurs pays, elles se trouvent en bonne position pour occuper ce rôle important (Edge, 2002). International Real Estate Society (IRES) qui a tenu sa première conférence l’année de sa fondation en 1992, contribue à l’échange d’idées en éducation et recherche dans ce domaine. Plusieurs organisations nationales partagent sa mission (Guntermann et Johnson, 1996): c’est le cas notamment des sociétés en immobilier qui s’identifient à chacun des continents (ARES, ERES, ASRES, AfRES, LARES, MENARES et PRRES). Amérique du Nord et Angleterre Les programmes d’enseignement en immobilier se sont développés spécialement autour de deux écoles de pensée: le modèle britannique et le modèle américain, lequel est animé par une vision interdisciplinaire des affaires mettant la priorité sur l’usage des méthodes de prix et de revenu. En opposition, le modèle britannique offre un cadre d’enseignement orienté sur la comptabilité, la construction, la réglementation et l’ingénierie avec une préférence pour la méthode du coût (North, 1997). Dans les deux cas, le programme traditionnel de formation combine les cours en évaluation avec le droit, l’économie, la gestion, la construction et l’aménagement auxquels s’ajoutent d’autres spécialités comme le marketing et les technologies de l’information. Le tableau 1 permet de >>> 15 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 constater que les États-Unis, sur le plan de l’enseignement, dominent nettement avec plus de 200 collèges et universités dont 61 institutions se distinguent en offrant des programmes dans les trois cycles d’études, suivis de loin par l’Angleterre avec 68 institutions (Lizieri et Baum, 2002). Pour les programmes canadiens, leur profil et le contenu de leurs cours ressemblent à plusieurs égards à ceux dispensés aux États-Unis. Dans les trois pays, comme c’est en majorité le cas ailleurs, les programmes sont intégrés aux départements de gestion, des finances et parfois de l’urbanisme ou de l’aménagement (Web et Smith, 2002). Europe continentale L’éducation immobilière européenne consiste en un entraînement à la pratique, organisé souvent à l’extérieur de l’enceinte universitaire. L’implication effective des universités dans la formation professionnelle est plus marquée dans les pays de l’ouest et du nord de l’Europe où les cours sont plus souvent offerts dans des programmes d’études avancées (Lizieri et Baum, 2002) . En Europe, la structure de l’enseignement en immobilier semblable à celle de l’Angleterre est récemment influencée par celle des États-Unis avec la création de nouveaux programmes en gestion des affaires. En Allemagne, on dénombre 23 universités dont l’immobilier constitue l’intérêt de recherche et d’enseignement surtout au deuxième cycle (Rottke, 2005). Suivent la France et l’Italie (4.4 % chacun), la Russie (4.0 %), la Pologne (2.9 %), le Portugal (2.6 %), puis les Pays-Bas (2.4 %). En Russie, des cours sont dispensés dans 18 universités, mais aucune information n’est disponible sur les programmes et les cours offerts. Bien que le système d’évaluation connaisse un progrès remarquable sur le plan pratique, peu d’intérêt est manifesté à l’égard de l’enseignement et la recherche sur la scène internationale (Artemenkov et Artemenkov, 2010). À l’image de la Russie, les pays de 16 19:14 Page 16 l’ancien bloc soviétique ont senti le besoin d’établir un système d’évaluation dans les années 1990 suite à la transition de leur économie planifiée vers celle de marché (Andrusz, 1990; Azarova, 2001). En Pologne, le nombre de cours, de chaires de recherche et d’universités (13) montre que ce pays manifeste un intérêt particulier pour l’immobilier (Zak, 2006). Dans les pays émergents de l’Europe de l’est et aux Balkans, on dénombre quelques programmes avec peu d’académiciens manifestant un intérêt pour l’enseignement et la recherche. Commonwealth et Asie En Australie et en Nouvelle-Zélande, les programmes en immobilier intégrés dans les facultés de gestion existent depuis les années 1970 (Shi-Ming, 2001) . Cependant, certaines difficultés dans la pratique et la réduction du nombre de professeurs indiquent que l’enseignement de cette discipline est moins enthousiaste qu’avant, en conséquence d’un sous-financement et de la quasi-automatisation de la pratique d’évaluation (Newell, 2003) . Par contre, en Malaisie et au Singapour, malgré que la formation en immobilier soit assez récente, les fortes tendances d’inscription des élèves prouvent que l’intérêt pour l’immobilier continue de progresser (ARC, 2000) . En Chine, au Japon et à Taiwan, malgré le potentiel socioéconomique de ces pays, si l’on se fie au nombre de programmes offerts, l’intérêt pour l’immobilier paraît faible d’après le peu d’informations disponibles en anglais et en français (Bardhan, et Kroll, 2007) . En Inde, au Pakistan et dans le pays avoisinants; il n’existe pas de formation telle qu’on la connaît en Amérique du Nord et en Europe. Amérique du Sud et Afrique Le Brésil semble être le seul pays d’Amérique latine à avoir développé un intérêt particulier pour l’enseignement de cette discipline (Monetti, 2002). Dans les pays du continent africain, avec la vague de démocrati- sation, il y a une certaine volonté d’aller vers un enseignement structuré avec plus de cours depuis 1990 (Chikafalimani et Cloete, 2006). Cinq universités connues du continent africain offrent des cours de niveaux collège, baccalauréat et maîtrise en développement, gestion des propriétés, évaluation et autres sujets connexes (Cloete, 2009). Pratique en immobilier Malgré leur rôle dominant en enseignement de l’immobilier, les deux pays anglo-saxons rencontrent des obstacles pratiques reliés aux divergences entre les concepts, la terminologie, la méthodologie, les systèmes économiques et les conventions de comptabilité (Gelbtuch, 1997). Afin de faire face aux dynamismes de la mondialisation et de favoriser le professionnalisme, un besoin de taille se fait sentir pour la standardisation des normes régionales et internationales d’enseignement et de pratique en immobilier(Fernandez,2006). Cependant, ce n’est pas chose facile car les normes à de telles échelles doivent intégrer un nombre considérable de définitions portant sur les droits de propriétés, les concepts et les approches (Milgrim, 2001). Vers une uniformisation des normes pratiques La standardisation internationale des pratiques d’évaluation va de pair avec l’uniformisation des standards financiers et de comptabilité (Epstein et al. 2001). Fondé en 1981, l’International Valuation Standards Committee (IVSC) cherche à faciliter les pratiques d’évaluation ainsi qu’à standardiser les normes International Financial Reporting Standards (IFRS) et International Accounting Standards Board (IASB) à travers 41 pays différents. L’IVSC travaille aussi de pair avec l’Appraisal Institute des ÉtatsUnis et la RICS d’Angleterre (IASB, 2003). De nos jours, la pratique d’évaluation s’oriente sur des standards régionaux et nationaux connus inté- News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:14 Page 17 octobre 2013 - No 208 grant les normes IVS. Les standards nationaux les plus éminents sont : - Red Book : L’influence du standard national anglais de l’Appraisal and Valuation Manual de la RICS (autrement appelé le Red Book) déborde largement de ses frontières. Ces standards sont utilisés en particulier dans les pays du Commonwealth. - USPAP : Les Uniform Standards of Professional Appraisal Practice (USPAP) du Appraisal Standards Board s’appliquent à l’intérieur des États-Unis, mais aussi au Canada (AIC, 2007). Ces standards ont une certaine influence dans les pays asiatiques. - Blue Book : Les standards du Blue Book de European Group of Valuers’ Association (TEGoVA), aussi appelés les Approved European Property Standards, sont plus ou moins similaires à ceux de l’IVS. La version la plus récente du Blue Book date de 2012. - Professional Practice est utilisé en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ce sont des standards effectifs depuis 2006. Ils incorporent intégralement les standards de l’IVS en plus d’extensions adaptées aux contextes particuliers des deux pays. - Union of Pan-American Valuers (UPAV) applique, en bonne partie, les standards IVS. En plus de ces standards pratiques, certains pays émergents d’Asie comme la Malaisie, le Singapour, les Philippines et la Thaïlande, possèdent des standards nationaux, intégrant relativement bien les principes généraux de l’IVS. globalisation des standards, les méthodologies et les pratiques développés dans l’économie immobilière. Selon les données officielles de son site Internet, cet Institut existe depuis 1932 et compte plus de 25 000 membres professionnels dispersés partout dans le monde. Ses membres bénéficient d’une éducation professionnelle continue et accèdent à divers titres prestigieux. Il contribue au domaine par la publication de son manuel Appraisal of Real Estate qui est à sa 13e édition (Appra isa l Institute, 2008). Aux États-Unis, chaque État décide des qualifications et des certifications à accorder. La pratique d’évaluation est encadrée par un ensemble de règlements et de codes auxquels doivent se conformer les praticiens. En 1989, le Financial Institutions Reform and Recovery and Enforcement Act (FIRREA) a exigé que tous les États développent des systèmes d’accréditation et de certification (Sridharan et al. 1995); sont alors nés les USPAP qui ont également inspiré le Canada dans l’encadrement de la pratique immobilière. L’Angleterre étant le leader mondial en pratique d’analyse immobilière, c’est la RICS qui la règlemente par des standards d’évaluation, regroupés dès 1974 et améliorés après, notamment en 1995 (RICS, 2012). Selon les données officielles de son site Internet, la RICS compte plus de 100 000 membres œuvrant dans plus de 140 pays. Elle est active en Amérique du Nord et dans plusieurs autres pays, avec influence particulièrement marquante dans l’ensemble de l’Europe. Amérique du Nord et Angleterre Europe C’est surtout aux États-Unis que les standards d’accès aux données sont les plus rigoureux et les plus transparents. Quant aux organismes professionnels en immobilier qui encadrent la pratique, après la RICS en Angleterre, l’Institut Américain est le plus connu et le deuxième plus influent au monde. Il continue de jouer un rôle déterminant dans l’avancement de la profession, l’établissement des codes d’éthique, la Hormis la situation de l’Angleterre, l’hétérogénéité de l’Europe engendre une fragmentation générale du secteur, tant au niveau des concepts et des définitions que de la culture, de l’histoire, de la politique, de la monnaie et des cadres légaux; ce qui rend difficile le partage des données du marché Européen. Dans divers endroits, les registres fonciers devront être repensés et précisés afin d’assu- rer le droit de propriété et d’éviter la survenue de problèmes (Adair et al., 2001a). European Group of Valuers’ Association (TEGoVA) a vu le jour en 1981, il publie le Blue Book qui réunit les normes communes d’enseignement et de pratique de l’ensemble du territoire de l’Union Européenne. En France, l’évaluation immobilière fut établie en 1990, elle est pratiquée par des « experts » soumis aux normes d’une Charte d’Expertise en Évaluation Immobilière qui spécifie les principes généraux (IFEI, 2008) . En Allemagne, l’évaluation est effectuée par des experts qualifiés par l’Organisation Fédérale des Évaluateurs. Avec une certaine influence de la RICS, les principes d’évaluation sont, dans l’ensemble, conformes à ceux de la pratique internationale (Reddehase, 2012). L’activité immobilière et la pratique d’évaluation ont profondément été marquées par la libéralisation économique de l’Europe de l’est, après la chute du mur de Berlin. La transition d’économies comme en Pologne et en République Tchèque ont favorisé l’implantation de systèmes d’évaluation intégrant les normes du RICS et d’IVS (Zak, 2006). En Russie, la pratique d’évaluation est influencée par le modèle américain avec intégration des normes IVS; elle connaît un certain succès depuis 1993 avec l’établissement de la Société Russe des Évaluateurs à laquelle sont affiliés plus de 6 000 membres (Artemenkov et Artemenkov, 2010). Commonwealth et Asie En Australie, en Nouvelle-Zélande et dans quelques pays de l’Asie du Sud, la pratique et les procédures d’évaluation sont sensiblement les mêmes qu’aux États-Unis. L’Australian Property Institute (API) représente les intérêts de quelques 7 500 membres professionnels australiens. Le mandat de représentation des membres néozélandais est assigné au New Zealand Institute of Valuers (NZIV) qui compte environ 2 800 professionnels. Dans ces deux pays, la profession éprouve des difficultés par rapport aux coûts >>> 17 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 élevés que doivent débourser les membres pour obtenir une couverture d’assurance (Hefferan et Boyd, 2010). Dans certains États, la profession est de plus en plus déréglementée, ce qui diminue la qualité des rapports et réduit les exigences d’entrée dans la profession (Newell, 2003). Dans certains pays d’Asie, des progrès notables sont observés en pratique d’évaluation. Parmi les associations connues dans ce domaine, l’Asean Valuers Association (AVA) et certains de ses membres qualifiés de l’IVSC ont contribué à la discussion et au développement des standards. Sont particulièrement actifs dans la région, la Japanese Association of Real Estate Appraisal (JAREA) et l’Institute of Surveyors of Malaisia (ISM). En Chine et au Viêt-Nam les systèmes d’évaluation sont nouveaux et semblent connaître un progrès assez lent. Amérique du Sud et Afrique. Au Brésil, l’évaluation immobilière est souvent pratiquée par des ingénieurs civils ou des architectes, généralement membres de la CONFEA (une association fédérale des ingénieurs, architectes et agronomes) ou de ses CREA (associa- 19:14 Page 18 tions régionales). Par ailleurs, très peu de pays d’Amérique latine possèdent un système d’évaluation. En Afrique du Sud, quelques cours de formation universitaire sont offerts avec la possibilité d’acquérir une expérience pratique auprès de la RICS ou de l’Institut Américain. Dans le reste du monde, en raison du manque de participation et de communication, il semble que la pratique d’évaluation immobilière soit peu organisée, voire inexistante. Le manque d’intérêt pour la pratique d’évaluation est marqué par l’absence d’une littérature spécialisée et de participants aux conférences internationales tenues dans le domaine. Recherche en immobilier Depuis au moins trois décennies, on observe un foisonnement de publications, d’articles scientifiques, de conférences annuelles et de divers documents sur l’immobilier. La recherche connait un réel succès dans ce domaine même si l’enseignement et la pratique enregistrent encore quelques difficultés. Les États-Unis dominent largement la scène de la recherche avec un nombre important de publications et de revues sur le sujet, suivis de l’Angleterre. Toutefois, durant la dernière décennie, il y a eu une augmentation significative des recherches sur l’immobilier en provenance de sources variées et de différents coins du monde (Adair et al. 2000). Le TABLEAU 2 liste les revues les plus connues et leur rang de popularité, classées de A à D. Les revues classées A concernent les finances, l’économie et la recherche immobilière. Des revues similaires sont imprimées en langue française comme : Études foncières et Revue de droit immobilier (France), ABEX (de l’Association Belge des Experts) et Évaluation Immobilière (Canada). En plus de cette prolifération d’articles, il y a également eu la formation de sociétés nationales et internationales chargées de l’organisation de conférences annuelles sur différents continents (Manning et Roulac, 2001). Ayant gagné par la suite une visibilité appréciable, la première conférence de l’International Real Estate Society (IRES) s’est tenue en Alaska, en juillet 2001. À cette organisation pionnière se sont ajoutés d’autres sociétés par continent. T A BL E A U 2 - L I ST E E T R A NG DE S R E V UE S R E C ONNUE S E N I M M OBI L I E R 18 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:14 Page 19 octobre 2013 - No 208 Les conférences organisées par ces sociétés fournissent une vue d’ensemble sur les principaux sujets abordés dans les activités de recherche en immobilier. Les études réalisées par Guntermann et Johnson (1996) et Adair et al. (2000) sur les dix premières années d’existence de l’ARES, montrent que le contenu des communications présentées lors de ces conférences porte essentiellement sur quatre thèmes: les méthodes d’évaluation, le financement alternatif, l’évaluation automatisée et le comportement des consommateurs. Une autre étude menée par Schulte (2002) fait une comparaison des communications auprès d’ARES et d’ERES. Les thématiques présentées lors des congrès de ces sociétés varient par continent et soulignent particulièrement la popularité de la gestion des affaires qui regroupe le plus de sujets, suivie par les sujets relatifs à l’investissement et au marketing immobilier. Ailleurs, Souza (2000) a examiné les dynamiques entre académiciens et professionnels en immobilier en s’interrogeant : « les deux groupes se concertent-ils ? Se rejoignent-ils ? ». Des deux côtés, des critiques ont été formulées à l’encontre de l’autre groupe. Les académiciens en immobilier prétendent que les praticiens n’alimentent pas suffisamment la production d’un nouveau savoir, quant à ces derniers, ils croient que les académiciens ne produisent pas d’applications directement utiles. Dans l’échantillon étudié par Souza, il ressort qu’entre 1993 et 2001, le nombre de communications présentées dans les deux associations à l’étude s’est accru pour l’ERES alors qu’il semble connaître une stagnation pour l’ARES. Plusieurs constats ressortent de la contribution des chercheurs internationaux et institutionnels à la littérature immobilière, pour la période 1995-2005. À cet effet, les pays de l’Asie et de l’Europe ont gagné en influence, tandis que l’Amérique du Nord, bien qu’encore dominante a vu son poids relatif diminuer légèrement (Adair et al., 2001b). Le classement en immobilier des universités en Angleterre, Irlande, Belgique, PaysBas, Singapour, Hong Kong et Japon est comparable à celui des institutions en Amérique du Nord. L’influence des chercheurs particuliers domiciliés hors des États-Unis est, elle aussi, croissante. On peut anticiper que ces tendances se maintiendront à l’avenir (Chan et al., 2008). Conclusion Les changements et les besoins exprimés par les académiciens et les praticiens au sujet de l’amélioration de l’enseignement, de la pratique et de la recherche en immobilier ont été survolés dans cet article où il a aussi été question de l’analyse, des différences dans les approches et les méthodes d’enseignement et de pratique, à travers le monde. Il s’en dégage une hétérogénéité justifiant l’importance d’une réflexion profonde sur un système d’analyse et d’évaluation immobilière plus cohérent. Beaucoup d’efforts se font depuis plus de deux décennies dans le but d’harmoniser les normes, mais les objectifs demeurent incertains car plusieurs pays sont encore très en retard. En ce sens, les activités des leaders en la matière comme l’Appraisal Institute et la RICS seront déterminantes. Pour sa part, la mondialisation a induit des changements considérables dans ce domaine et pour répondre aux défis qui en découlent, les institutions d’enseignement ont commencé à intégrer à leur formation l’harmonisation des normes et des concepts. Combinée aux nouvelles technologies, sa globalisation tire un grand avantage de l’accroissement remarquable concernant la disponibilité des travaux scientifiques que les praticiens, les étudiants et les académiciens ont à leur disposition. La dissémination des connaissances par la littérature participe inévitablement à ces efforts tout comme la coopération internationale entre les universités, les institutions et les organismes qui s’y associent. Dans cette perspective, il serait réaliste de mettre en place des fondations théoriques communes qu’il faudrait ensuite explorer et consolider même si les pratiques, les normes, les exigences et les contextes changent d’un pays à l’autre. Grâce à la convergence attendue vers les mêmes fondements conceptuels, il deviendra possible d’homogénéiser son enseignement en enrayant progressivement les problèmes structurels qui persistent encore car présentement, à l’exception de l’Amérique du Nord, de l’Angleterre et de l’Australie, l’immobilier ne s’est pas encore taillé une place suffisamment importante pour être considéré comme une discipline à part entière. Il pourrait être plus avantagé si les savoirs de ses différentes disciplines étaient harmonisés et combinés au sein d’une branche unique. Ü NSAL Ö ZDILEK Professeur et directeur du programme en immobilier [email protected] Université du Québec à Montréal Références Adair, A. S., Crosby, N., Lim, L. C. et Watkins, C. (2001a) Is There a Property Valuation Research Agenda: Evidence from the RICS Cutting Edge? Papier présenté au World Valuation Congress IX, Singapore. Adair, A. S., Crosby, N., Lim, L. C. et Watkins, C. (2001b) An Emerging European Valuation Research Agenda: evidence from the European Real Estate Society and the RICS Cutting Edge conferences. The European Group of Valuers Associations (TEGoVA), London. Adair, A. S., Crosby, N., Watkins, C. et Lim, L. C. (2000) The contribution of the RICS Cutting Edge Conference to real estate research: the participants, their impact and the research >>> 19 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 agenda. Paper presented at the RICS Cutting Edge Conference, London. ARC – Applied Research Corporation (2000) 1999 NUS and NTU Graduate Employment Survey. AIC - Appraisal Institute of Canada (2007) Canadian Uniform Standards of Professional Appraisal Practice 2007. The Appraisal Institute of Canada. Appraisal Institute (2008) Appraisal of Real Estate, 13e édition. Andrusz, G. (1990) Housing policy in the Soviet Union, in Sillince, J.A.A. (ed.), Housing Policies in Eastern Europe and the Soviet Union, Routledge, London and New York. Artemenkov, A. I. et Artemenkov, I. L. (2010) Professional valuation in Russia: its past, present, and future, Appraisal Journal, 78 (2). Azarova, K. (2001) La « Question du Logement », l’Appartement Communautaire et la Privatisation de l’Habitat à Moscou, Revue d’Etudes Comparatives Est-Ouest, vol. 32(4), pp. 185-218. Bardhan, A. et Kroll, C. A. (2007) Globalization and the Real Estate Industry: Issues, Implications, Opportunities, Papier présenté au Congrès annuel de Sloan Industry Studies, Cambridge. Black, R. et Carn, N. (1998) International Real Estate And The University Curriculum. ARES Conference: Monterey, United States. Black, R., Carn, N., Diaz, J. et Rabianski, J. (1996) The role of the American Real Estate Society in Defining and Promulgating the Study of Real Property, The Journal of Real Estate Research, 12 (2). Chan, K., Hardin, C., William G., Kartono, L. et Zheng, Y. (2008) The Internationalization of Real Estate Research. Journal of Rel Estate Research, 30 (1). Chikafalimani, S. H. P. et Cloete, C. E. (2006) Influential elements of curriculum development for masters real estate education in South Africa: a literature research, Working paper. Cloete, C. E. (2009) What should the educational requirements be for property valuers in South Africa? RICS COBRA Research Conference, University of Cape Town, 10-11e, Septembre, 2009. Diaz, J. (1993) Science, Engineering and the Discipline of Real Estate, Journal of Real Estate Literature, 1 (2). Edge, J. A. (2002) The Globalization of Real Estate Valuation, XXII Congrès annuel FIG, Washington, avril 19-26. 20 19:14 Page 20 Epley, D. (1996) The Current Body of Knowledge Paradigms Used in Real Estate Education and Issues in Need of Further Research, Journal of Real Estate Research, 12 (2), pp. 229-36. Epstein, B. J., Mirza, A. et Abbas, A. (2001) Wiley IAS 2001: Interpretation and Application of International Accounting Standards, e-book version, New York. Fernandez, E. (2006) International Valuation Standards, Fair Value and Base II, As it Affects Valuation Standards and Best Practices, 14th ASEAN Valuers Congress, 3-6 juillet, Singapore. Gelbtuch, H. (1997) The United States, in: Appraisal Institute (Ed.): Real Estate Valuation in Global Markets, Illinois, pp. 1-20. Guntermann, K. et Johnson, L. (1996) The Members Speak: A Summary of the ARES Membership Survey Report, Journal of Real Estate Research, 12 (2), pp. 209-228. Hefferan, M. J. et Boyd, T. (2010) Property taxation and mass appraisal valuations in Australia – adapting to a new environment, Property Management, 28(3), pp.149 – 162 Lizieri, C et Baum A. (2002) Real Estate Education in Europe. Report for the Urban Land Institute. Manning, C. A. et Roulac, S.E. (2001) Where Can Real Estate Faculty Add the Most Value at Universities in the Future? Journal of Real Estate Practice and Education, 4 (1), pp. 17-39. Milgrim, M. R. (2001) International Valuation Standards for global property markets, Japan Real Estate Institute Conference, Tokyo. Monetti, E. (2002) Real Estate Education in Brazil, Working Paper, University of Sao Paolo. Musil, T. (2005) Integrating Business School Curricular Resources into Real Estate Practitioner Professional Development, Journal of Real Estate Practice and Education, 8 (1). Newell, G. (2003) The quality of property education in Australia, Pacific Rim Property Research Journal, 9 (4). North, L. W. (1997) Appraisal practice in Central & Eastern Europe, Real Estate Issues. Nourse, H. O. (1995) A Note on the Origin of Real Estate in Collegiate Schools of Business Administration, Journal of Real Estate Research, 10 (2), pp. 227–34. Reddehase, R. (2012) Real Estate Valuation and Appraisal Systematization of housing privatization in Germany, of portfolios with more than 50,000 units - Development of a Privatization-Analysis-Model (PAM), papier présenté au 19e Congrès annuel de ERES, 13-16 juin, Edinburgh. RICS (2012) Page http://www.rics.org/aboutus. Internet: Rottke, N. (2005) Real estate education in Germany, Real estate management institute, document de travail 06-005. Schulte, K.-W. (2002) Real Estate Education Throughout the World: Past, Present and Future. Research Issues in Real Estate (7), Kluwer Academic Publishers: Boston. Shi-Ming, Y. (2001) New Paradigms in Real Estate Education, 7e conférence de la Pacific Rim Real Estate Conference, Adelaide, Australia, 21-24 janvier. Souza, L. A. (2000) Academic and applied real estate research: "As two worlds collide" or "As two worlds divide"? Journal of Real Estate and Portfolio Management, 6 (1), pp. 97-100. Sridharan, K. P., William, B. R. et Tosh, D. S. (1995) FIRREA, appraisal reports, and bank compliance, Appraisal Journal; 63 (2), p. 220-229. Zak, M. (2006) Evaluation of Properties in Poland, XXIII Congrès FIG, Octobre 8-13, Munich, Allemagne, 6 pages. Webb, J. et Smith, H. (2002) Real Estate Education Throughout the World: Past, Present and Future, Boston: Kluwer. Worzala, E. (1996) ARES and the Formation of the International Real Estate Society, The Journal of Real Estate Research 12 (2), pp. 167-181. News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:14 Page 21 octobre 2013 - No 208 Communiqué de presse Cabinet de la Ministre Sabine LARUELLE Ministre des PME, des Indépendants et de l'Agriculture Les agents immobilier et leurs clients mieux protégés depuis le 1e septembre 2013 Grâce aux efforts de la Ministre Laruelle, le secteur de l’immobilier bénéficie depuis ce mois de septembre de sa propre législation, appelée loi des agents immobiliers. Celle-ci vise à offrir davantage de protection à la fois au consommateur et à l’agent immobilier de bonne foi. Cette loi renforce les sanctions à envers les agents peu scrupuleux, met en place un test de compétence obligatoire pour toute personne qui souhaite se lancer dans le domaine et une réglementation plus sévère pour les professions liées qui souhaitent exercer la profession protégée d’agent immobilier, de syndic ou de régisseur. Le secteur se montre d’ores et déjà satisfait de cette réforme importante. Les agents immobiliers ne bénéficiaient pas encore d’une loi propre à leur métier. C’est désormais chose faite avec l’entrée en application ce 1er septembre de la nouvelle loi organisant la profession d’agent immobilier. Voulue par Sabine Laruelle, ministre des Classes moyennes, des PME et des Indépendants et négociée en étroite collaboration entre l’Institut professionnel des agents immobiliers (IPI) et le Syndicat National des Propriétaires (SNP), cette nouvelle loi vise à assurer une concurrence loyale entre les agents immobiliers et renforce la protection des consommateurs en matière d’information ou à l’égard des professionnels indélicats ou en défaut d’assurance. Cette loi élargit, entre autres, les sanctions à l’encontre d’un agent immobilier qui aurait commis un détournement et l´obligation, dans le chef des syndics, de transmettre annuellement à l´IPI la liste des copropriétés dont ils ont la charge afin d´assurer des contrôles spécifiques. En outre, la loi introduit la possibilité d´exercer la profession d´agent immobilier sous forme de société, disposition qui permet une meilleure couverture tant du client que de l’agent immobilier. Pour la ministre : « Cette réforme introduit un meilleur service au citoyen qui fait appel à un agent immobilier et instaure les conditions d’une concurrence loyale entre les acteurs». Professionnalisation Jusqu’à présent, le métier était réglementé par la loi-cadre régissant les professions intellectuelles prestataires de services qui s’adressait à la fois aux professionnels de l’immobilier et aux comptables(-fiscalistes). Ces professions ayant des aspirations et des particularités bien différentes, il était nécessaire que chacune puisse être structurée selon une législation propre. « L’entrée en vigueur du texte organisant notre profession est une étape importante qui va permettre de pousser plus avant la professionnalisation du secteur », explique Michel Dussart, président de l’Institut professionnel des agents immobiliers (IPI), organe de contrôle de la profession. « La loi apporte de nombreux éléments positifs qui vont contribuer tant à l’assise et au sérieux du métier qu’au renforcement de la protection du consommateur», se félicite-t-il. Courtier ou syndic ? Ainsi, les agents immobiliers doivent désormais spécifier à leur organe de contrôle le type d’activités qu’ils exercent. Sont-ils actifs comme courtiers ou comme syndics ? Ou les deux ? Cette nouvelle disposition facilite l’organisation de la profession et assure davan- tage de transparence. Exemple : tous les syndics sont désormais tenus de rendre annuellement la liste des copropriétés qu’ils gèrent. En cas de mauvaise gestion ou de pratiques illégales constatées dans une copropriété, l’IPI pourra avertir les autres copropriétés dont le syndic incriminé à la charge et les inciter à tenir leurs comptes à l’œil. Professionnalisation encore. La distinction des métiers permettra également, par exemple, de mieux cibler les besoins respectifs des courtiers et des syndics en matière de formation permanente imposée par leur déontologie, et ce de manière à encore améliorer l’expertise et les services offerts au consommateur. Test de compétences L’accès à la profession est lui aussi revu. La liste actuelle des diplômes permettant d’accéder au métier d’agent immobilier va disparaître début 2014. Toute personne disposant d’un diplôme de bachelier pourra exercer le métier après avoir réussi un test de compétences. Les résultats de celui-ci détermineront les matières que l’agent immobilier stagiaire devra suivre durant le stage qui lui donnera accès à l’agréation IPI. « L’accès à la profession s’élargira, mais le test permettra de tirer vers le haut les compétences des professionnels du secteur », conclut le président de l’IPI. Des indépendants mieux protégés ! Sabine Laruelle, Ministre des PME et des Indépendants, a obtenu ce jour l’accord du Conseil des Ministres sur son avant-projet de loi portant deux dispositions pour mieux protéger les travailleurs indépendants. Ces améliorations s’inscrivent dans l’exécution du >>> 21 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette plan PME, approuvé par Gouvernement le 20 juillet 2012. 23/10/13 le Première amélioration Une protection de la résidence principale à moindre frais et étendue aux indépendants à titre complémentaire et aux pensionnés actifs Depuis juin 2007 , l’indépendant en personne physique peut mettre son domicile principal à l’abri de ses revers professionnels et ainsi le protéger. L’avant-projet de Loi de la Ministre Laruelle étend le champ d’application de la loi relative à l’insaisissabilité du domicile principal aux indépendants complémentaires et aux pensionnés actifs après la pension. De même, l’indépendant souhaitant bénéficier de la protection ne devra plus avancer une somme forfaitaire de 500€ pour les frais de procédure mais paiera uniquement les frais réels, soit minimum 120€, une fois ceux-ci exécutés. Ceci constitue une diminution importante des sommes engagées par l’indépendant lors de sa demande. Deuxième amélioration Des assouplissements au profit de la SPRL Starter (SPRL-S) L’Accord de Gouvernement prévoit qu’Il « évaluera et améliorera le statut de la SPRL-Starter pour permettre aux jeunes entrepreneurs qui le souhaitent de se lancer dans une activité avec des obligations administratives simplifiées ». Dans ce cadre et sur la base d’une étude commanditée par le SPF Economie, l’avant-projet de loi de la Ministre propose d’une part, de ne plus limiter plus l’existence d’une SPRL-S dans le temps (actuellement, une SPRL-S est limitée à 5 ans) et, d’autre part, de maintenir le statut de SPRL-S sans égard au nombre de travailleurs occupés au sein de l’entreprise (actuellement, limité à 5 travailleurs temps plein). 22 19:14 Page 22 La Commission Economie de la Chambre vote à l'unanimité le projet de loi visant à réformer le mode de calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants Le mardi 16 juillet 2013, la Commission Economie de la Chambre a voté à l’unanimité des membres présents le projet de loi de Sabine Laruelle, Ministre des PME, des Indépendants et de l'agriculture, visant à réformer le mode de calcul des cotisations sociales des indépendants. Pour la Ministre : « Obtenir l'unanimité sur un projet qui a demandé tant de préparation et qui est attendu par une très large majorité d'indépendants témoigne du bien-fondé du projet. Le nouveau système de calcul sera d'application dès le 1e janvier 2015 ». Pour rappel, avec cette réforme, les cotisations sociales de chaque année seront désormais fixées en fonction des revenus de l’année-même et non plus sur base des revenus d’il y a 3 ans. Dans l’attente de connaître le niveau effectif de ses revenus, chaque indépendant sera informé par sa caisse d’assurances sociales, d’une proposition de montant à payer trimestriellement et calculé sur les revenus indexés de l’antépénultième année (N-3 indexé). De plus, les indépendants pourront, suivant leur réalité économique individuelle, affiner directement ce montant en fonction de leurs revenus. Lorsque l´indépendant envisage une augmentation de ses revenus, il pourra augmenter le montant de ses cotisations. Les indépendants confrontés à une baisse de revenus par rapport à leurs revenus d’il y a trois ans pourront, après accord de leur caisse d’assurances sociales, payer moins de cotisations. La réforme présente les suivants: avantages - Le nouveau système est socialement plus logique et plus juste parce que les cotisations reflètent la réalité économique des indépendants, notamment lorsqu’ils doivent faire face à des difficultés économiques passagères ou plus profondes, lorsqu’ils doivent subir une hospitalisation ou partir en congé de maternité, lorsqu’ils doivent lever le pied à l’approche de la retraite, etc. Le principe est simple: dès le moment où vous gagnez moins, vous payez aussi moins de cotisations. - De même, l’indépendant qui connaît une période plus faste, paiera directement pour cette période des cotisations plus élevées. La réforme leur permet d’adapter directement et librement leurs paiements. - Le nouveau système offre la garantie aux indépendants de payer tout au long de leur carrière des cotisations qui seront proportionnelles à leurs revenus. - Le nouveau système n’aura aucun impact financier sur le budget de la sécurité sociale des travailleurs indépendants. Sabine Laruelle, Ministre des PME et des Indépendants, se réjouit que le Conseil des Ministres de ce 19 juillet 2013 accorde la limitation de la responsabilité civile aux notaires lorsqu’ils exercent en société et qu’il reconnaisse les professions libérales comme spécifiques face aux pratiques du marché. L’exercice en société avec responsabilité civile limitée sera bientôt octroyé aux notaires A l’heure actuelle, un notaire peut exercer sa profession au sein d'une société, mais sa responsabilité personnelle n’est pas limitée en cas de litige. L’avant-projet de loi de la Ministre Laruelle stipule que, pour pouvoir profiter de la responsabilité limitée, la société de notaires sera soumise aux conditions suivantes : News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:14 Page 23 octobre 2013 - No 208 - l'entreprise doit avoir la forme d’une coopérative ou d’une SPRL du consommateur pour les titulaires d’une profession libérale. - toutes les parts doivent être détenues par un notaire Pour la Ministre : « L’adoption d’un texte spécifique respecte les spécificités inhérentes aux professions libérales». Pour la première fois, cet avant-projet définit de manière positive ce qu'est une profession libérale comme : - tous les gérants doivent être notaires - le seul objet de la société est d’exercer la profession de notaire Une assurance en responsabilité civile obligatoire pour les personnes morales est également prévue dans l’avant-projet de loi avec une couverture minimum de 5 millions d’euros. Pour les personnes physiques, ce montant de couverture minimum actuellement de 2,5 millions d’euros passera à 5 millions d’euros. Cette assurance vise à assurer une meilleure protection aux clients. Pour Sabine Laruelle : « A l’instar des architectes, des professionnels du chiffre, des agents immobiliers, des géomètres-experts et très prochainement des vétérinaires, nous aboutissons aujourd’hui, en première lecture, sur la responsabilité personnelle limitée pour les notaires exerçant en société. Cette mesure, attendue depuis plusieurs années par le secteur, concerne potentiellement les 1.498 notaires dont 70% d’entre eux exercent sous forme de société ». Cette mesure s’inscrit dans le cadre de l'accord de gouvernement et plus spécifiquement dans plan PME de la Ministre. Pour rappel, le plan PME prévoit l'adoption de mesures visant à mieux protéger les indépendants et à encourager l'entrepreneuriat. "Toute personne qui, de manière intellectuellement indépendante et sous sa propre responsabilité, exerce une activité professionnelle, effectue à titre principal des prestations intellectuelles, a suivi auparavant la formation exigée, est tenue de suivre une formation continue, est soumise à un organe disciplinaire créé par ou en vertu de la loi et n’est pas un commerçant au sens de l'article 1er du Code de commerce". Par ce biais, un certain nombre de dispositions contenues dans la loi sur les pratiques du marché ne s'appliqueront définitivement pas aux titulaires d'une profession libérale vu leur manque de pertinence (liquidations, soldes, ventes publiques, dénominations enregistrées,...). Grâce à ce texte, pour un pharmacien par exemple, la loi "professions libérales" s’appliquera pour la vente de des médicaments mais, lors de la vente d’une crème solaire, ce sont les dispositions légales sur les pratiques du marché qui s'appliqueront. Le saviez-vous ? L'ABEX a pensé à vous et, effectivement depuis de nombreuses années, a souscrit à une police d'assurance individuelle auprès d'Axa Belgium. Vous êtes membres effectifs ou stagiaires, victimes d'accident survenus au cours de votre activité professionnelle ou privée qui engendrerai une incapacité permanente de plus de 66% ou un décès, vous ou vos ayant droit, pourriez bénéficier d'une indemnité unique de 4.000,00 €. Il est également important de noter que la prime d'assurance est comprise dans votre cotisation annuelle auprès de l'ABEX. Seul obligation à laquelle vous devez être attentif est le respect du délai de paiement de celle-ci. Elle doit être payée à la première demande de cotisation, soit idéalement avant le 31 mars de chaque année. Le non respect de cette condition, nous empêchera de reprendre vos coordonnées sur la liste nominative qui doit être remise auprès de la compagnie d'assurance." Plus d’info & ©: www.sabinelaruelle.be Les professions libérales désormais considérées comme spécifiques face aux pratiques du marché La Ministre Laruelle se réjouit de l’accord obtenu sur l’avant-projet introduisant le livre XIV dans le Code de droit économie. Celui-ci établit des dispositions spécifiques relatives aux pratiques du marché et à la protection >>> 23 News 208 Fr BAT:ABEXnews-176_FR maquette 23/10/13 19:14 Page 24 Bibliothèque Modèle d'estimation de la valeur des terrains et bâtiments Une approche conceptuelle et empirique de la séparation du prix total d'une propriété entre le terrain et le bâtiment - Özdilek Ünsal La sous-traitance Dans un style clair et concis, trois praticiens du droit immobilier proposent une synthèse de cette matière qui soulève des questions délicates et nourrit un contentieux important. L'auteur s'intéresse à la valeur des terrains et bâtiments dans le contexte nord-américain, plus spécifiquement à Montréal (Canada). Il précise les difficultés relatives à l'explication et estimation de la valeur séparée des deux composantes d'une propriété immobilière. Ces difficultés interconnectées sont engendrées par une pénurie du marché foncier où la majorité des prix observés sur le marché intègre le prix du terrain et du bâtiment. Dans cette situation, la question est de savoir combien chacun représente dans le prix total. Des réponses tangibles à cette question s'avèrent appréciables particulièrement dans un contexte d'incertitude en investissement immobilier et de crises financiers. Enfin, la valeur des deux composantes évolue différemment et les gens ignorent souvent où chacun se situe. Par ailleurs, on construit sur un terrain sans connaître la meilleure combinaison possible selon la rente potentielle qu'il offre. Des réponses satisfaisantes à ces questionnements requièrent une attention particulière au problème de la séparation de la valeur et sa mise à l'épreuve par une analyse empirique. C'est l'objet du présent ouvrage. Françoise Balon, Bernard Louveaux, Patrick Henry Auteur : Özdilek Ünsal Rubrique : Savoirs Style : Etudes Universitaires Référence : 43554 N° ISBN : 9786131515255 Editions Universitaires Européennes http://editionslarcier.larciergroup.com/ 24 La sous-traitance n’est que très peu envisagée par le code civil. À proprement parler, il n’y a d’ailleurs pas de contrat de sous-traitance, puisque celle-ci ne consiste qu’en l’articulation de deux ou plusieurs contrats d’entreprise. En pratique, cette articulation pose cependant des questions particulièrement délicates : opposabilité des clauses du marché principal au soustraitant, dissociation des réceptions, mesures de la responsabilité des différents intervenants, coordination de l’intervention des divers sous-traitants, désignation des sous-traitants par le maître de l’ouvrage, action directe du sous-traitant contre le maître de l’ouvrage ou du second contre le premier…C’est à l’examen de ces questions que les auteurs de cet ouvrage se sont attachés. Collection : JLMB OPUS Editeur : Larcier ISBN-10 2804420868 116 p. 80.00 € L'expertise judiciaire en matière immobilière Michel Stricklesse Avec la contribution de Jean-Luc Fagnart Editions Anthemis Pour comprendre les aspects techniques d’un litige, que ne maîtrisent ni les avocats ni les magistrats, les tribunaux doivent s’entourer d’auxiliaires spécialisés (architectes, ingénieurs, médecins, etc.) qui, en raison de leur expérience, seront en mesure d’éclairer les parties en présence. Les litiges dans le domaine de la construction n’échappent pas à la règle. Le présent ouvrage a pour objectif de présenter le contexte particulier de l’expertise judiciaire en matière immobilière. Après avoir rappelé le contenu de la mission traditionnelle de l’architecte, l’auteur décrit la mission d’expertise proprement dite. Il rend compte des dispositions légales en vigueur et illustre son propos de nombreux exemples et de cas de jurisprudence. Il fournit de plus au lecteur des documents types, utiles à chaque étape de la procédure. Enfin, l’éthique de l’expert est analysée en détail par l’avocat Jean-Luc Fagnart. Nul doute que les propos clairs et pratiques des auteurs feront de cet ouvrage un guide précieux pour toute personne impliquée dans un litige immobilier. ISBN : 978-2-87455-576-3 232 p. 49.00 € www.anthemis.be