et le soft power chinois - French Chamber of Commerce and

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et le soft power chinois - French Chamber of Commerce and
Connexions 联
magazine de la
Chambre
dossier
Le
www.connexions.ccifc.org
de
Commerce
et d’Industrie
Fr a n ç a i s e
en
Chine
no 53 mars
Shanghai 2010
et le soft power chinois
上海世博会与中国的软实力
2010
中
国
法
国
工
商
会
双
月
刊
结
•La Focus :
France
dans l’Expo
Y-a-t-il
une bulle
immobilière ?
Gros plan
sur Canton
•
•
Vu d’ici « Youth self-portrait » par la photographe Yuan Yanwu 《童年自画像》 摄影:袁燕舞
卷首语 EDITORIAL
Shanghai 2010 et le soft-power chinois
Annick
de Kermadec-Bentzmann
Présidente de la CCIFC
中国法国工商会会长:甘安懿
Ce numéro de Connexions met en lumière, grâce à une série d’articles de
fond, les particularismes du soft-power chinois sous toutes ses facettes. De
la langue au cinéma, des business models aux médias, il dresse le portrait
du rayonnemennt de la culture chinoise dans le monde. La prodigieuse
montée en puissance de ce pays, en passe de devenir la seconde puissance mondiale devant le Japon et juste après les Etats-Unis, exerce-t-elle
toujours autant de fascination ? Quel rayonnement la Chine a-t-elle dans
le monde ? Comment compte-t-elle augmenter son pouvoir d’attraction ?
Autant de questions auxquelles vous trouverez les éléments de réponses
上海世博会与中国软实力
本期《联结》借助一系列颇有深度的文章揭示
出中国软实力的特性。这个国家神奇崛起,正在成
为超越日本仅次于美国的第二大世界强国。她是否
会永远散发如许魅力?中国在世界上拥有何种影
响?她将如何增强自己的吸引力?通过阅读本期的
专栏,您将发现这许多问题的答案所在。
在上 海 世 博 会 开幕前夕,为您 推 荐的“聚
焦”栏目介绍了参加此届世博会的法国企业。
一家阿尔萨斯的企业是如何参与开、闭幕式
的!虚拟展会是如何通过达索公司的3D系统实现
的!一家罗纳-阿尔卑斯企业的加气混凝土是如何
被用来建造8个展馆的!
至于法国的参展,将通过雅克.费里耶设计的标
志性国家馆以及在城市最佳实践区内的巴黎大区、
罗纳-阿尔卑斯大区和阿尔萨斯大区的三座展馆体
现。
对我而言,作为上海20年来令人难以置信的变
化的见证者,我一直在赞叹这座城市所走过的神奇
历程,而最近,她被各方群情激昂地调动起来,穿
上最美丽的盛装迎接5月1日!
显然,此次规模空前、举市上下、以“城市让生
活更美好”为主题的上海世博会将非常积极地提升
中国的影响力和吸引力。
一方面,这次展会是展示中国可以在各个方面
做得更好的绝佳窗口,另一方面,它还是来自国内各
地几千万中国人与来自世界各地外国参观者之间交
•
流和会面的独一无二的机会!
en lisant cet important dossier.
A la veille de l’inauguration de l’Exposition universelle
de Shanghai, notre Focus met en valeur des entreprises
françaises qui participent à cet événement. Comment
une entreprise alsacienne participera aux cérémonies
d’ouverture et de clôture ! Comment l’Exposition virtuelle sera rendue possible par le biais du Système 3D
de Dassault ! Comment le béton cellulaire d’une entreprise de Rhône-Alpes sera utilisé par huit pavillons !
Quant à la présence française, elle sera marquée non
seulement par son pavillon emblématique, mais aussi,
par les trois pavillons régionaux de l’Ile-de-France, de
Rhône-Alpes et d’Alsace, dans le cadre des « Meilleures
pratiques urbaines ».
Pour ma part, témoin des incroyables métamorphoses
de Shanghai depuis 20 ans, je ne cesse d’admirer le fantastique chemin parcouru par cette ville, qui, encore tout
récemment, s’est fébrilement mobilisée de toutes parts
pour se parer de ses plus beaux atours pour le 1er mai !
A l’évidence, cette manifestation portée par le thème de
« Better city, Better life », devrait renforcer de manière fort
positive le rayonnement et l’attractivité de la Chine.
D’une part, cette exposition sera une formidable vitrine de tout ce que la Chine a de mieux à offrir dans
tous les domaines. D’autre part, elle sera aussi l’occasion unique d’échanges et de rencontres entre les dizaines de millions de Chinois venant des quatre coins
du pays et les visiteurs en provenance des quatre coins
du monde !
•
Connexions / mars 2010 协助委员会
联
结
COMITÉ DE PATRONAGE
Connexions
Le magazine de la Chambre de
Commerce et d’Industrie Française en Chine
中国法国工商会双月刊
Directeur de la publication
Jacques Leclerc du Sablon
Responsable de la publication
Sophie Lavergne
Rédactrice en chef
Anne Garrigue
Edition des textes chinois /
中文编辑
Ruan Zheng 阮征
Graphiste / 美术编辑
Xie Bin 谢滨
Ont collaboré à ce numéro :
Véronique d’Antras, Laurent Ballouhey, Hubert Bazin, Catherine
Debeaumarché, Julie Desné, Antonia Cimini, Hélène Duvigneau,
Yann Marin, Patrice Nordey,
Manuel Rambaud, , Renaud de
Spens, Nicolas Sridi, Emilie Torgemen.
Photographie de couverture
Yuan Yanwu « Youth self-portrait »
Publicité / 广告招商
Pékin : Ruan Zheng 阮征
Tél. : (010) 6512 1740 # 14
Shanghai : Séverine Clément
Tél. : (021) 6132 7100 # 114
Guangzhou : Hervé Lambelin
Tél. : (020) 8186 8585 # 801
Imprimé par
Versatra Graphics
富运达图文印刷
Toute reproduction même partielle des
textes et documents parus dans ce numéro est soumise à l’autorisation préalable de la rédaction. La CCIFC décline
toute responsabilité quant aux documents qui lui auraient été fournis, ou aux
erreurs qui auraient pu échapper à son
attention. Les propos tenus dans les articles n’engagent que la responsabilité de
leurs auteurs.
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Connexions / mars 2010
Connexions
53
mars
2010
©Imagine China
54
no
L’exposition universelle de Shanghai 2010 est le prochain rendez-vous de la Chine avec le monde.
2010年上海世博会是中国与世界的再度聚首。
focus :
La présence française à l’Expo
rendez-vous
A la une des médias
Le dessous des chiffres L’état des lois
l’actualité
La recette d’Alibaba
Actualité entreprises
Des ballons d’Airstar pour éclairer en Chine
l’entretien
Le double « je » de Zhang Yaling
8 - 29
30
34
36
38
40
48
50
Où en est le soft power de la Chine ? 54
François Godement « Une énorme ambiguïté… » 58
Un concept à géométrie variable
61
La grande séduction
62
Une image ambivalente
63
La Chinafrique des médias
65
Instituts Confucius : la culture officielle à tous vents 66
Quand le monde vient en Chine
68
Vus d’Asie Centrale, Les atouts de la Chine
70
Tourisme : un déficit d’image
72
Quand la tradition devient commerce
74
Rêve chinois, rêve américain ou rêve français ?
76
Dong Qiang « la Chine manque
de discours d’interprétation »
78
Rêves de Chinawood
82
A propos du film Kongzi (Confucius) 86
Les tribulations d’un cinéaste chinois 86
La Légende du roi Milu 88
Il n’y a pas de best-seller mondial chinois
90
Art contemporain : de la contre-culture
à l’intégration
92
Les collectionneurs ont une vision plus ouverte
96
Su Tong : Du “made in china” au “created in china” 98
Portrait d’une génération d’architectes designers 100
Les architectes étrangers en Chine 102
Artisanat d’art : Christofle collabore
avec des artistes chinois
103
Mode : petits designers deviendront grands
104
Un “glamour” de Chine
105
L’essor des marques chinoises
106
Benjamin Joffe : La Route de la soie numérique 108
联
结
L’institut Confucius de Novosibirsk (Russie).
新西伯利亚(俄罗斯)的孔子学院
66
De plus en plus de MBA 112
Etudier en Chine 114
R&D : l’élan positiviste 114
Vivian Wu, Filip Noubel : Internet et soft power 116
Fait en Chine, lu par le monde 118
Jeux de miroirs 120
régions jumelles
Canton fait peau neuve
La « Californie chinoise » CCIFC : De plus en plus d’entreprises françaises tourisme chine
Hegezhuang aux portes de Pékin,
un village vert et protégé
associations
A pleines mains : … et le coeur au chaud
culture
Yuan Yanwu : souvenirs d’enfance
Festival Croisements 2010 : entrez dans la danse
Un chantier théâtral franco-chinois
lire 122
125
126
136
138
140
142
145
146
© Imagine China
48
73
Tourisme : un déficit d’image. 旅游业:形象宣传得不够
© Imagine China
Airstar:气球灯的发明者
© Imagine China
Airstar : l’inventeur du ballon lumineux.
© Imagine China
2010年三月号 第53期
The Orchard en banlieue dePékin.
京郊餐馆The Orchard
136
聚焦:上海世博会上的法国
11 法国在上海世博会插上三色旗
13 法国大区也参展
15 法国大区代表团
15 从大溪地到上海的独木舟之旅
17 达索打造第一个全球3D 网上世博会
19 欧莱雅沉浸在欢乐之中
23 法国国际水秀公司的水上梦幻表演
23 法国Transe Express剧团:艺术交流
25 来自埃顿服务的800名基础服务人员
23 凯莱集团的绿色混凝土
29 上海世博会集锦
公司简讯
41 公司简讯
51 张亚玲的双重“我”
57
69
73
89
专栏:中国的软实力发展到什么程度?
专访阳狮咨询中国首席代表安韬略
旅游业:形象宣传得不够
《麋鹿王》:一家进军3D领域的民营企业
旅游
130 里昂
© Imagine China
FOCUS
聚焦
Les dernières palissades vont bientôt tomber… 世博园区即将竣工
Que la fête commence !
万众期待。上海世博会无疑是一个
节日,法国将在6月21日音乐节这一天高
调展示自己。作为第一批正式确认的参展
Tout le monde l’attend. L’Expo de
Shanghai est une fête incontournable
et la France y joue sa partition avec un
forte majeur le 21 juin, jour de la fête
de la musique. Premier pays à avoir
confirmé sa participation, présente
à travers quatre pavillons, dont le
pavillon France annoncé comme
un des pavillons-phares de l’Expo,
notre pays a décidé de s’investir au
maximum pour la réussite de Shanghai
2010. Le président Sarkozy assistera
avoir publié dès l’été 2008 un numéro
spécial présentant en avant-première
l’exposition universelle, Connexions a
choisi cette fois de découvrir avec vous
Shanghai expo côté français. De l’Alsace
à Tahiti, de Dassault Systèmes à Aden
services, tous les secteurs et toutes les
régions répondent présents. Spectacles
et organisations d’événement s,
construction et architecture, images
3D, services de propreté… dans ce
grand carnaval, cet échange mondial
aux cérémonies d’ouverture. Des
fleurons de l’industrie française ou de
son art de vivre présentent leur savoirfaire et de petites entreprises brillantes
tirent aussi leur épingle du jeu. Après
où chacun montre son expertise dans
un climat de réjouissances, la vitrine
française est bien garnie. Suivez le guide
et rendez-vous dans la perle de l’Orient
du 1er mai au 31 octobre.
Connexions / mars 2010
•
国之一,通过四个展馆参加世博会,其中
的法国国家馆被宣布为标志性的世博馆之
一,法国决定为2010年上海世博会的成功
举办投入最大的努力,倾注最大的热情。
法国总统萨科齐将出席开幕式。法国工业
及其生活艺术行业中的佼佼者将展示他们
的专长,优秀的小企业也将表现出色。《
联结》曾在2008年夏出版了一期世博会预
演的专刊,此次,它选择与您一起去揭开
法国参加上海世博会的面纱。从阿尔萨斯
到大溪地,从达索到埃顿服务,所有地区
和所有行业都会到场。在这场世博盛事
上,法国安排了表演和活动,进行建设和
设计,制作3D图像,承担保洁服务等。在
这场国际交流中,每个人都在喜悦的气氛
中展示其专业特长,法国的展示橱窗布置
得满满的。跟随向导,让我们相约东方明
珠——上海。
•
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
La France plante son
drapeau sur le site de
l’Expo
Calendrier
Avec l’Etat et les régions, les entreprises françaises seront
présentes en force à l’Expo. Elles sont intervenues dans
toutes sortes de domaines, de la construction du site à sa
gestion en passant par son animation pendant la période
de mai à octobre
La résille de béton du pavillon France quelque chose qui correspond bien aux
quadrille déjà l’horizon du site de l’expo- ambitions culturelles de la ville », précise
sition universelle de Shanghai, le long de le Consul général. Une étude menée par
la rivière Huangpu. Le chantier du bâti- l’agence de communication Ogilvy place
ment français est pratiquement terminé déjà le pavillon France comme le deuxièet les agendas de la communauté se rem- me pavillon national que les Chinois ont
plissent peu à peu en prévision des mois l’intention de visiter, juste derrière celui
agités que va connaître
des Etats-Unis. « C’est un
Shanghai la moitié de cette
formidable encourageannée. « Le pavillon français
ment mais un sacré défi
« Dix millions
sera un des pavillons prêts
en même temps », esau 1er mai, ce qui ne sera pas de visiteurs
time le Consul général.
le cas de tous les pavillons sont attendus
Au total, dix millions de
nationaux », confie Thierry
visiteurs sont attendus
Mathou, Consul général sur le
sur le pavillon pendant
de France à Shanghai. Des pavillon
les six mois de l’Expo,
journées tests sont d’ailleurs
qui commencera sur les
programmées dès la 20 avril France, dont
chapeaux de roue. « On
pour rôder l’organisation 60% sur trois
attend 60 % des visiteurs
et l’accueil. Premier pays à
sur trois semaines : celle
semaines.»
avoir confirmé sa participadu 1er mai pour l’ouvertion à l’événement, la Franture, celle du 1er octobre
ce ne compte pas passer
avec la fête nationale
inaperçue. Le président Nicolas Sarkozy chinoise et la dernière semaine d’octosera présent à la cérémonie d’ouver- bre, avant la fermeture », résume Franck
ture et d’autres personnalités politiques, Serrano, représentant à Shanghai de la
dont Gérard Larcher et Bernard Accoyer, COFRES (Compagnie Française pour
respectivement présidents du Sénat et l’Exposition Universelle de Shanghai). Ce
de l’Assemblée nationale, ou encore Fré- qui n’empêchera pas le pavillon France
déric Mitterrand, ministre de la Culture, d’avoir « des grands moments tous les
devraient suivre pendant les six mois de jours avec une exposition permanente
l’exposition.
de qualité », rappelle le responsable de
Le point d’orgue de cette présence fran- la COFRES, en faisant notamment alluçaise sera le 21 juin, date choisie pour sion aux six chefs-d’oeuvre prêtés par le
être la Journée de la France sur l’Expo, musée d’Orsay, qui constitueront un des
qui clôturera une semaine française. « On clous du parcours.
a retenu le jour de la fête de la musique En-dehors du pavillon France, trois réplutôt que celui de la Fête nationale pour gions (Alsace, Rhône-Alpes et Ile-defaire un événement ouvert sur les Shan- France) auront leur propre représentation
ghaiens, où la France crée et apporte sur le site et une agglomération,
•••
Avril
30 au soir – cérémonie d’ouverture, en
présence de Hu Jintao, Nicolas Sarkozy
et Alain Delon.
Mai
75e anniversaire de Lancôme au Pavillon
France
2 au 4 – Premier forum au pavillon des
Nations Unies, consacré à la santé. Il
ouvre une série de forums qui se tiendront tout au long des six mois.
6 – Ouverture, rue de Nankin du pavillon
« hors les murs » de Lille Europe pour
deux mois et demi, en présence de Martine Aubry.
9 – Journée de l’Europe, avec une grande
« Parade Européenne » multiculturelle à
laquelle participeront des troupes artistiques, musiciens, danseurs ou artistes de
rue. La veille au soir, un orchestre européen se produira.
Juin
18 – Forum francophone des affaires.
21 – La journée de la France, en écho à la
fête de la musique. Elle viendra clore une
semaine française sur le site de l’Expo.
Des concerts auront lieu les 20 et 21 dont
M, qui se produira sur une des scènes de
l’Expo.
Juillet
8/9 – L’Orchestre national de Lille viendra
jouer à Shanghai.
14 – Buffet républicain organisé pour la
communauté française sur le Pavillon
France.
15 – Clôture du pavillon Lille-Europe.
Août
30 – Journée de l’Espagne.
Septembre
20 – Journée de la Francophonie. Les
pavillons francophones réuniront leurs
efforts pour organiser une rencontre académique autour du thème « le français
langue de la réussite », un jeu de piste sur
le site de l’Expo et peut-être une soirée
francophone musicale et gastronomique.
Octobre
1er – Journée de la Chine, qui coïncide
avec la fête nationale de la République
populaire.
7 – Journée du pavillon de Monaco.
31 – Cérémonie de clôture et tenue d’un
sommet mondial sur le climat qui devrait
déboucher sur la « déclaration de Shanghai ».
Connexions / mars 2010 FOCUS
聚焦
Se rendre sur le site
Le site de l’Exposition se trouve sur les
deux rives du fleuve Huangpu, entre le
pont Lupu et le pont Nanpu. Il sera desservi par métro (lignes 4, 6, 7, 8, une partie
de la ligne 5 et une ligne spéciale, la ligne
13), bus (de la rue Xizang -Puxi- à différentes zones pavillonnaires du site) et
bateau (la ligne du pont Puming et deux
autres lignes auxiliaires gratuites). Deux
docks VIP et six embarcadères grand
public naviguant sur cinq itinéraires réguliers et un itinéraire VIP transporteront,
sur une même rive, les visiteurs d’un point
à un autre de l’Exposition. L’accès au site
se fera ainsi par huit entrées terrestres
et dix entrées nautiques. Les voitures
personnelles ne pourront pas accéder à
l’intérieur du site.
Les tarifs d’entrée
L’entrée sur le site de l’Exposition universelle est payante avec tarif variable
en fonction du jour, tickets de groupe,
passes 3 et 7 jours ou soirée (après 17h).
Chaque ticket n’est valable que pour
une seule entrée. Réductions pour personnes handicapées, âgées, étudiants
et enfants.
Les billets d’entrée sont en pré-vente jusqu’au 30 avril 2010 auprès de distributeurs
spécifiques : China Mobile Communications Corporation (CMCC) http://www.
chinamobile.com/en/; China Telecom
http://en.chinatelecom.com.cn/; Bank of
Communications http://www.bankcomm.
com/BankCommSite/en/index.jsp ; China
Post http://www.chinapost.cn/English/
.Pour plus d’informations aller sur http://
www.consulfrance-shanghai.org/Visiter-lExposition-universelle.html?lang=fr
Pendant l’Exposition, les tickets seront
disponibles aux kiosques sur le site.
Pour plus d’infos , quelques sites francophones
http://www.consulfrance-shanghai.org/Visiter-l-Exposition-universelle.html?lang=fr:
site du Consulat de Shanghai
http://www.shanghai2010.fr/ : site lyonnais
bilingue français –anglais
http://www.pavillon-france.fr/?lang=fr/ :
site dédié au pavillon français
http://www.paris-idf-shanghai2010.com/:
site dédié au pavillon Ile de France
http://fr.expo2010.cn : version francophone du portail officiel de l’expo
10 Connexions / mars 2010
© Imagine China
Pratique
La résille blanche minérale voulue par l’architecte Jacques Ferrier est déjà en place.
法国建筑师雅克.费里耶设计的法国馆白色网格围护已经建好
••• Lille-Europe, va même installer une
ambassade hors les murs, dans le centreville de Shanghai pendant quatre mois
à l’occasion de l’événement. Bordeaux
aura, par ailleurs, son mois en septembre sur le pavillon, consacré au vin. Une
occasion pour Alain Juppé, maire de la
ville, de faire le déplacement.
Forte présence des entreprises françaises
Mais ce sont surtout les entreprises françaises, qui seront en force à l’Expo. Elles
sont intervenues dans toutes sortes de
domaines, de la construction du site à
sa gestion en passant par son animation pendant la période de mai à octobre. Quatre grands groupes ont mis 1,5
million d’euros sur la table pour figurer
comme partenaires privilégiés du pavillon France. Pour LVMH, la présence
sur l’exposition universelle de Shanghai
s’inscrit dans une tradition historique du
groupe, qui s’est associé à de nombreuses éditions. Une exposition rétrospective reviendra d’ailleurs pendant six mois
sur les différentes participations du malletier, au centre commercial du Plaza 66,
haut-lieu du luxe en centre ville, où Louis
Vuitton a son magasin-phare. A quelques
jours de la cérémonie d’ouverture, le malletier ouvrira également deux boutiques
à Shanghai, de chaque côté de la rivière
Huangpu (à Pudong et à Puxi).
Pour chaque sponsor, l’exposition universelle est une occasion unique de s’offrir
une vitrine publicitaire de six mois, avec
une audience de 95 millions de Chinois
attendus. « Nous sommes en Chine
depuis 1994 et c’est un marché très important pour nous », souligne-t-on chez
Lafarge, un autre sponsor privilégié. Le
cimentier a décidé de s’investir dans
l’événement de façon inédite. « C’est la
première fois que nous sommes sponsors pour une exposition universelle »,
rappelle une représentante du groupe,
basée à Paris. Même intérêt pour les
consommateurs chinois du côté de
Sanofi-Aventis, qui emploie 3 700 personnes en Chine, second marché mondial annoncé en 2010 pour la vente de
médicaments sans ordonnance. « Nous
saisissons cette occasion pour accroître
la prise de conscience du public chinois
sur les questions de santé », explique le
service communication du groupe français à Shanghai.
Michelin ménage, pour sa part, le sus-
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
Le pavillon France en 3D. © DR
法国在上海世博会插上三色旗
法国馆三维效果图
法国馆的混凝土结构已经耸立在黄浦
世博会更是法国企业展示的舞台。5月
江畔的上海世博园区。法国馆的施工基本
至10月期间,他们参与到从世博园区的建
接近尾声。考虑到为期半年的上海世博会将
设到管理、活动组织等各个领域中。4家法
举办丰富多彩的活动,法国的日程也渐渐排
国集团各出资150万欧元,成为法国馆的首
满。“法国馆将是5月1日对外开放的世博会
席合作伙伴。对路易威登-酩悦轩尼诗集团
展馆之一,不是所有的国家馆都能做到这一
(LVMH)而言,参加上海世博会符合集团
点。”法国驻上海总领事马捷利介绍说。上
的历史传统,它曾参加过许多届世博会。另
海世博园区4月20日起将进行数日试运行,
外,为期6个月的关于路易威登参加往届世
以完善组织和接待工作。作为最早确认参加
博会的回顾展将在上海市中心的奢侈品殿
上海世博会的国家,法国不打算被忽视。法
堂——恒隆广场举行,那里有路易威登的旗
国总统萨科奇将出席开幕式,参议院议长热
舰店。距世博会开幕前的几天,路易威登将
拉尔·拉尔歇、国民议会议长阿夸耶和文化
有两家新店开张,分别位于黄浦江的两岸
部长弗雷德里科.密特朗等政要也将在世博
(浦东和浦西)。
Le jardin “à la française” vertical.
垂直的法式花园
pense. Yves Chapot, représentant de la
société en Chine, préfère ainsi taire le
contenu de son installation. « Le pavillon
étant sur le thème des cinq sens, nous
animerons une séquence sur l’ouïe, pour
faire prendre conscience des différents
niveaux de bruits dans un environnement urbain », confie le responsable sans
donner davantage de détails. Le spécialiste du pneumatique s’est bien retrouvé
dans le thème de l’exposition « Meilleure
ville, meilleure vie », qui résonne « avec le
positionnement du groupe depuis plusieurs années », selon Yves Chapot. Mais
Michelin ne parlera pas que pneumatique et pollution sonore sur le pavillon.
Le groupe édite un numéro spécial de
son emblématique guide sur Shanghai,
comme il l’avait fait pour Pékin lors des
Jeux Olympiques de 2008. Une édition
en chinois, consacrée à la France, sera
également en vente à la boutique du
pavillon et les couples qui se marieront
sur place y auront droit en cadeau. Enfin, le célèbre Bibendum, symbole de
l’entreprise clermontoise, accueillera les
visiteurs aux côtés de la mascotte du pavillon, Léon le chaton. Ju l i e De sn é
•
© DR
会期间到访。
对每个赞助商而言,世博会是一次为
6月21日,法国将迎来参加世博会的最
期6个月的绝无仅有的宣传窗口,预计将有
高潮,这一天是法国周结束的日子,它被选
9500万中国参观者。另一家首席合作伙伴拉
为世博会的法国日。“我们选择了音乐节这
法基集团强调说:“我们1994年就进入中
天而不是法国国庆日奉献给上海人一场大型
国,中国是我们非常重要的市场。”这家水
活动。在活动中,法国为上海创造并带来一
泥行业巨头决定以前所未有的方式参与世
些东西,它们与这座城市远大的文化抱负非
博。“这是我们第一次成为世博会的赞助
常吻合。”总领事明确地说。奥美公司所做
商。”拉法基驻巴黎的一位代表提示说。在
的一项调查显示,法国馆成为中国人希望参
中国拥有3700名员工的赛诺菲-安万特集团
观的第二大国家馆,紧随美国之后。“这非
也同样重视中国消费者。2010年中国成为其
常令人鼓舞,同时也是巨大的挑战。”总领
全球第二大非处方药市场。“我们希望借此
事认为。预计共有1000万人在为期6个月的
机会提高中国公众对医疗问题的认识。”这
世博会期间参观法国馆,目前世博会开始全
家法国集团驻上海的公关部解释说。
速推进。“我们预计60%的参观者将集中在
米其林则保留悬念。米其林(中国)
3个星期里:5月1日开幕的一周,十一国庆
投资有限公司董事长夏逸夫更倾向于对公司
黄金周和闭幕前10月的最后一周。”2010上
参与世博会的内容保持缄默。“法国馆以五
海世博会法国参展局驻上海首席代表方可
感为主题,我们将展示其中的听觉系列,提
(Franck Serrano)总结道。但这些不会妨碍
高公众对城区不同级别噪音的关注。”这位
法国馆“每天都有重要的时刻配合高质量的
负责人透露说,但未给出更多细节。米其林
持久展览”,上海世博会法国参展局的负责
确实理解了世博会的主题 “城市让生活更
人重申,并特别提到从法国奥赛博物馆借出
美好”,夏逸夫认为,这个主题与“集团几
的6幅经典名作,它们将是参观过程中的一
年来的定位不谋而合”。不过,米其林在世
大亮点。
博会上将不光谈到轮胎和噪音污染。集团还
在法国馆之外,三个法国大区(阿尔
将发行上海旅游指南,就像2008年奥运会期
萨斯、罗纳-阿尔卑斯和巴黎大区)将在城
间它曾出版过北京旅游指南。米其林中文版
市最佳实践区进行展示。里尔-欧洲还将借
的法国旅游指南将在法国馆的小商店里有
世博会之机在上海市中心进行为期4个月的
售,在法国馆参加浪漫婚典的新人们将获
世博会场外的展示。波尔多市也将于9月在
赠该书。米其林的象征——“轮胎人必比
法国馆内举办葡萄酒展,波尔多市市长阿
登”也将和法国馆吉祥物“乐乐”一起接待
兰.朱佩(Alain Juppé)届时将到访。
参观者。
•
Connexions / mars 2010 11
FOCUS
聚焦
La France des régions s’expose aussi
Sur les 15 hectares consacrés aux meilleures pratiques urbaines, villes et régions sont bien
représentées.
Un concept de “lumière sensible” sur le pavillon Rhône-Alpes.
罗纳-阿尔卑斯大区馆:体现“感性灯光”理念
© DR
Au dernier étage du pavillon Rhône-Alpes, côté salle, on pourra déguster les
spécialités du restaurant-école Institut
Paul Bocuse, ou, côté cuisine, observer le
travail de la centaine d’apprentis chinois.
La région a vu grand, 3311m², soit le plus
grand pavillon étranger de la zone (second derrière celui de Shanghai), il sera
plus vaste par exemple que le pavillon
national du Brésil.
Avant tout tourné vers le B to B, le bâtiment fait l’étalage des technologies des
entreprises rhônalpines et françaises
notamment en matière de performance
énergétique. Sur la mezzanine, quinze
totems permettront de visualiser des
informations sur les grandes entreprises
partenaires. Les PME ont aussi mis la main
à la pâte avec la société ILEX paysage qui
offre la conception de la roseraie installée
au pied du pavillon et un groupement
d’industriels de la région a conçu et installé l’éclairage des installations publiques
de la zone. « Nous apportons le concept
de “lumière sensible“ soit une luminosité différente selon les espaces et leurs
usages, avec laquelle les visiteurs sont en
interaction » explique Morgan Vansoen,
chargé de projet Expo 2010 pour la mission économique rhônalpine (ERAI).
Chaque soir, un Show Lumière de 20
minutes illuminera sols, bâtiments et habillera l’ancienne cheminée industrielle
au bord du fleuve Huangpu, emblème
de la zone.
© DR
R h ô n e - A l p e s : b i o habitat et ville lumière
Une façade green-tech pour l’Alsace.
阿尔萨斯大区馆:体现绿色科技的建筑表面
Tour de Pise de verre et de métal, le pavillon alsacien forme un parallélépipède
penché à quarante cinq degrés et coiffé
d’une terrasse arborée. Le bâtiment met
en avant les réalisations environnementales de la région. Et d’abord la réalisation
des huit agences d’architecture strasbourgeoises qui se sont réunies dans le
12 Connexions / mars 2010
© DR
Alsace : charme et
technologies
Un ruban bleu de 80m pour le pavillon Ile-de-France, comme la Seine traverse Paris.
巴黎大区馆:一条80米长的蓝色带子,仿佛塞纳河穿过巴黎
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
consortium l’AADI pour concevoir cette
ambassade verte. La façade sud est un
concentré de technologies : des capteurs solaires analysent la température
et l’ensoleillement, si besoin de l’eau se
met à ruisseler pour rafraîchir l’espace. Le
système a déjà été testé dans une école
de Bouxwiller, à Shanghai il sera complété par un système d’air conditionné
solaire.
« A l’intérieur, la scénographie met en
avant les images fortes de l’Alsace, l’Alsace
traditionnelle et romantique, d’un côté,
de l’autre l’Alsace moderne explique Maryse Dondrille, commissaire générale du
pavillon, sous le ciel des quatre saisons ».
La visite se finira sur le traditionnel marché de Noël alsacien. Le deuxième étage
pourra être loué par différentes entreprises, le restaurateur installé au dernier
étage y servira ses spécialités dans une
ambiance de Stammtisch alsacienne
Paris/Ile-de-France :
autour du fleuve
Un ruban bleu de 80m parcourt le pavillon comme la Seine traverse Paris et sa
région. Il sert de support à la projection
de cinq courtes vidéos sur l’environnement, la ville, les services urbains ou l’entreprise. La région valorise ses savoir-faire
et ses innovations dans les 600m² qui lui
sont réservés sous la halle industrielle
réhabilitée qu’elle partage avec d’autres
grandes métropoles (Prague, Ozaka,...).
Dans la catégorie « art de vie », Paris a
choisi de présenter « Paris plage ». Nao,
petit robot de 60 cm déjà en service dans
des laboratoires et certaines universités,
sera sa mascotte. La société francilienne
Alderaban qui l’a conçu veut profiter de
l’Expo pour tester son grand frère Romeo, 1m40, avant tout destiné à l’aide à
la personne. Bardé de capteurs, équipé
de caméras, il doit pouvoir relever son
maître après une chute ou prévenir les
secours.
« Le pavillon ouvre ses espaces partenaires, 70m² à ses sponsors ; entreprises,
collectivités et institutionnels. » précise
You Xing, responsable du bureau de la
région à Shanghai. Les Galeries Lafayette
par exemple y déploieront leur vision du
chic parisien.
Emilie Torgemen
•
法国大区也参展
史无前例,上海世博会用15公顷的面积打造城市最佳实
践区。众多城市和地区报名,希望能在世博会的这片区域展
示自己。雄鸡啼鸣,法国成为继德国之后的第二大西方参展
国家。法国展馆的亮点有:
罗纳-阿尔卑斯大区馆:生态居住区与照明
馆”。南面的一侧是技术的浓缩:安装的太
之城
阳传感器分析气温和光照,如果需要的话,
在罗纳-阿尔卑斯大区馆的顶层的大
水会流下来为表面送去清凉。这套系统已经
厅 旁 , 人 们 可 以 品 尝 保 罗 . 博 古 斯 ( Paul
在法国布克斯维莱尔的一所学校里测试过,
Bocuse)厨艺学院餐厅的特色食品,或者在
在上海还加装了太阳能空调。
厨房旁观看百名中国学徒做菜。罗阿大区拥
“在展馆内部,布景强调的是阿尔萨
有3311平方米的巨大展区,是城市最佳实践
斯的强烈印象,一方面是传统浪漫的阿尔萨
区里最大的外国展馆(排在上海馆之后的第
斯,另一方面是现代的阿尔萨斯呈现在四
二大展馆),比巴西国家馆还要大。
季的天空下。”阿尔萨斯大区馆总特派员
展馆首先采用了B to B模式,展示罗纳-
Maryse Dondrille解释道。参观以阿尔萨斯传
阿尔卑斯大区及法国企业的技术,尤其是能
统的圣诞节集市结束。第二层将租给企业。
源方面的成就。在中二楼,15个公司标志可
设在最顶层的餐厅将在阿尔萨斯聚餐的氛围
以让人们很醒目地看到有关15家企业合作伙
中提供各种特色食物。
伴的信息。中小企业也亲自上阵,比如欧莅
景观设计咨询公司(ILEX Paysage)提供在
巴黎/巴黎大区馆:绕河而行
一条长达80米的蓝色带子穿过展馆,
展馆前的广场上建造玫瑰园的设计。
罗阿大区还将通过为城市最佳实践区
好像塞纳河穿过大巴黎地区。它用来投射关
提供道路照明亮相,这些照明设施由其企业
于环境、城市、城市公共服务及企业的5部
发展协会设计并安装。“我们带来的是“感
短片。巴黎大区在翻修过的600平米的老厂
性灯光”的理念,即根据空间及其用途而
房里展示其技术专长和创新,这块场地由
呈现不同的亮度,这样参观者就会与灯光
巴黎和其他大城市共同使用(布拉格、大
互动。”罗纳-阿尔卑斯大区企业国际发
阪等)。在生活艺术部分,巴黎选择展示
展协会2010年世博会的项目负责人Morgan
巴黎海滩。高60 厘米的小机器人Nao,已
Vansoen解释道。每天晚上,一段20分钟的
经在一些实验室和大学投入使用,将会成
灯光展示将照亮地面和建筑物,为城市最佳
为展馆的吉祥物。设计这款机器人的巴黎企
实践区的标志性建筑——位于黄埔江畔的老
业Alderaban希望通过世博会测试Nao的哥哥
厂烟囱披上盛装。
Romeo,一个高1.4米首先用于帮助人的机
阿尔萨斯大区馆:魅力和技术
阿尔萨斯大区馆是一座用玻璃和金属
器人。Romeo装有传感器,配备了摄像机,
在主人摔倒后能够将其扶起来,并报警求
救。
混搭而成比萨塔,构成一个呈45度角倾斜
“大巴黎地区展馆为企业、行政区
的六面体,顶部立起一座平台。这座建筑重
域和机构赞助商开设70平米的合作伙伴区
点展示的是阿尔萨斯大区的环保成就。首
域。”法国巴黎大区发展局中国代表处首席
先,这是斯特拉斯堡8家建筑设计所共同完
代表游行明确表示。比如,老佛爷商场将在
成的成果,他们聚集在阿尔萨斯建筑设计所
这里展示他们眼中的法式优雅。
•
( AADI) 的 旗 下 , 设 计 了 这 座 绿 色 “ 使
Connexions / mars 2010 13
FOCUS
聚焦
Les
délégations
régionales
Une importante délégation d’une centaine de personnes emmenée par Martine Aubry sera à Shanghai au début du
mois de juillet. Le déplacement est l’un
de ceux pilotés par la Chambre de commerce et d’industrie française en Chine.
« Accompagner des délégations d’entreprises et d’institutionnels fait partie
de notre travail classique, beaucoup de
CCI prennent prétexte de l’Exposition
universelle pour mener une mission de
prospection » explique Béatrice d’Estienne d’Orves, directrice appui commercial
CCIFC à Shanghai.
Le groupe de Lille et de la région NordPas de Calais enchaînera échanges d’expérience avec de grandes entreprises
nordistes installées à Shanghai (Décathlon, Auchan, Bonduelle, Roquette, etc) ;
visite intelligente de la ville et de l’Expo
pour explorer des solutions d’architecture et d’urbanisme ; visite du port en
eaux profondes de Yangshan pour parler
logistique, etc. La CCIFC participe également à l’organisation d’un séminaire de
rencontres avec les hauts responsables
de la municipalité de Shanghai autour de
l’orchestre national de Lille, en concert à
l’Oriental art center de Pudong le 8
juillet. L’ensemble du chef Jean-Claude
Casadesus qui avait séduit les mélomanes chinois lors de la tournée en Chine
en 2007 est sûrement l’un des meilleurs
ambassadeurs de la région. Le Nord-Pas
de Calais mise sur l’Expo et a prévu une
représentation hors du site dans un temple taoiste sur la rue de Nankin du 1er mai
au 15 juillet.
Cet espace de 650m² accueillera différentes expositions dont « Futurotextile ».
On pourra y voir une robe de mariée
futuriste en dentelles lumineuses, une
combinaison résistant à 300°C, un filet
« attrape nuages », un rideau énergisant,
un store photovoltaïque ou des chaussettes à base de betterave. L’industrie
textile de la région est très impliquée
dans le développement de ces textiles
du futur. Méert, pâtisserie-salon de thé
14 Connexions / mars 2010
et véritable institution lilloise, sera également de la partie.
La CCIFC accompagnera aussi un groupement d’entreprises mené par la CCI de
Strasbourg et celle de Lorraine à la fin
du mois de juin. Au programme : tour
de l’Expo, événements et rendez-vous
entre entreprises de la région et entreprises chinoises sur l’ensemble du pays.
Une mission d’entreprises de la région
Centre, de la Drôme et de la ville du Havre, une autre venue de l’île de la Réunion ont déjà fait appel à la CCIFC pour se
rendre à Shanghai cet été. Cette dernière
veut profiter de la visibilité offerte par la
semaine de la Réunion (fin août) dans le
pavillon France.
•
TahitiShanghai en
pirogue à
balancier
En six mois, une pirogue traditionnelle à
balancier remontera le cours du temps
de 6000 ans pour faire le voyage inverse
des migrations polynésiennes, de Tahiti
à la Chine.
Une pirogue de dix-huit mètres pour
relier Tahiti à Shanghai pendant l’Exposition universelle, c’est le pari un peu fou
de Clément Pito, navigateur, et Hiria Ottino, ancien représentant de la Polynésie
française à Pékin et auteur de différents
ouvrages sur la culture chinoise. « Il s’agit
d’un projet de plus de dix ans qui devient
réalité grâce au mécène, Joseph Laine »
précise ce Tahitien passionné de Chine.
Il y a six mille ans, les anciens Polynésiens
ont réalisé l’exploit de coloniser systématiquement le Pacifique, le plus vaste
océan du monde, de l’Asie vers les îles.
En six mois, la pirogue de Clément Pito et
Hiria Ottino prévoit de faire le voyage inverse des migrations, de Tahiti à la Chine.
Les grandes aires de peuplement seront
des escales du chemin du retour : Tahiti,
îles Cook, Niue, Tonga, Fidji, Vanuatu, Santa Cruz Islands, îles Salomon, Papouasie
Nouvelle-Guinée Le long de cette route
océanienne, la pirogue embarquera des
coéquipiers à chaque halte. Puis direction l’Asie : l’Indonésie, les Philippines,
Hongkong et Shanghai. Au final, l’ensemble du Pacifique retrouvera sa terre
d’origine. La route est celle imposée par
les vents et les courants. On dit que les
Polynésiens partaient toujours contre le
vent pour avoir l’assurance de rentrer facilement. Le voyage de 2010 réunira tous
les petits retours de l’histoire millénaire
de ces migrations.
Après de longues recherches sur les pirogues, Clément Pito a combiné savoir-faire
ancestraux et techniques modernes pour
construire son embarcation. Les deux coques ont été creusées dans deux falcatas
géants, de grands arbres à l’écorce grise,
des hauteurs de Punnauia, au Sud de Papeete. Une fois évidés, les fonds ont été
fendus, sans toucher aux extrémités, puis
légèrement écartés, pour y insérer une
planche et augmenter ainsi le volume de
carène. Les bras, eux, sont faits en bois
rouge. Le balancier servira de soute à
matériel pour les batteries électriques,
le carburant, l’approvisionnement. Une
dizaine de Polynésiens participeront à
cette aventure dont trois sur le bateausuiveur. Ce voilier suivra toute la traversée
pour assurer la sécurité maritime et météorologique de l’équipage. La pirogue
elle-même disposera de matériels de
navigation modernes et de moyens de
transmission par satellite (Iridium) permettant la mise à jour d’un journal de
bord diffusé sur Internet. Un moteur de
40 chevaux servira à la fois pour la propulsion dans les ports et la génération
électrique.
Construction, équipements, logistique,
ce voyage qui remontera en six mois la
lente migration des Polynésiens coûte
approximativement 80 millions Fcfp
(environ 670 000 euros). Hiria Ottino et
Clément Piton ont voulu que le voyage
arrive en Chine pendant l’Exposition
universelle de Shanghaï pour que le
« retour » des Océaniens en Asie, région-mère bénéficie d’une couverture
médiatique optimale. Le départ de Tahiti
est prévu en avril.
•
E mil i e Torge me n
http://blog.sina.com.cn/s/articlelist_
1661727801_0_1.html
© DR
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
Le temple taoïste de la rue de Nankin accueillera la délégation Nord-Pas de Calais.
上海南京路的道观将接待法国北加莱海峡大区的展览
法国大区代表团
一支由Martine Aubry率领的百人代表团
些未来纺织技术的发展紧密相关。Méert糕
独木舟准备逆着迁移路线从太平洋的大溪
点店-茶屋,名副其实的里尔名店,也是展
地岛到中国。一路经停当时迁移过程中的
览的一部分。
各大中转点,包括:大溪地、库克群岛、
6月底,中国法国工商会还将陪同斯特
纽埃、汤加、斐济、瓦努阿图、圣克鲁斯
拉斯堡和洛林工商会带领的企业代表团。
群岛、所罗门群岛、巴布亚新几内亚。在
日程包括:参观世博会,组织活动以及大
每个中转地,木帆船会搭上同行人员,然
区企业与中国各地企业之间的会谈。一支
后朝亚洲进发:印度尼西亚、菲律宾、香
来自法国中部大区、德龙省和勒阿弗尔市
港和上海。最终,整个太平洋岛屿将找到
的企业考察团以及另一支来自留尼汪岛的
自己的本源。寻根之旅受到风和水流的影
考察团已找到中国法国工商会来安排今年
响。听说,波利尼西亚人永远逆风出海,
夏天来上海的行程。后面这支考察团希望
以保证可以容易返回。2010年的航行将汇
利用法国馆留尼汪周(8月22-29日)提供
集数千年迁移史中的所有小变迁。
的展示机会。
祖传技能与现代技术
将于7月初到达上海。这是中国法国工商会
安排的行程之一 。“陪同企业和机构代表
团是我们的传统工作,许多工商会借世博
经过对木帆船的长期研究,Clément
会之机来中国考察。”中国法国工商会商
Pito把祖传技能与现代技术相结合,造出
务部经理Béatrice d’Estienne d’Orves解释道。
了自己的小船。船身用巨大的栎树凿成,
这支来自里尔和北加莱海峡大区的
这种灰色树皮,像Punnauia那么高的大树
代表团将与驻上海的法国北部大企业(迪
生长在帕比提(大溪地的首都)的南部。
验;有针对性地参观上海市和世博会,研
究城市规划和建筑方案;参观洋山深水
© DR
卡侬,欧尚,百蔬乐,罗盖特等)交流经
凿好船体后,锯开底部但不能锯到底,再
La pirogue tahitienne prendra la mer en
avril à destination de Shanghai.
稍稍分开,往里插进一块板,以便增加吃
开往上海的大溪地木船将于2010年4月起航
水量。桅杆是由红木制成的。浮架作为存
港,讨论物流领域的合作等。7月8日,里
尔国家管弦乐团在浦东西方艺术中心举办
音乐会之际,中国国法国工商会还将参与
放电池、燃料和补给的物资舱。十几名波
从大溪地到上海
的独木舟之旅
利尼西亚人将参与这次航行,其中有三人
组织与上海市政府高层领导的一次会晤。
一艘传统的浮架木帆船将用六个月的
法国指挥大师让.克罗德.凯萨德苏(Jean-
时间重走六千年前波利尼西亚人从大溪地
Claude Casadesus)带领的乐团2007年在中
到中国的迁移之路。
在世博会期间,驾驶一条18米长的传
次,他们无疑是北加莱海峡大区最好的宣
统浮架木帆船从大溪地到上海,这是航海
传大使之一。北加莱海峡大区对世博会寄
家Clément Pitohe和前法属波利尼西亚驻华
予厚望,预计5月1日至7月15日在南京路
代表Hiria Ottino有些疯狂的想法。后者曾写
上的一座道观里进行一次世博会场外的展
过数部关于中国文化的专著。“多亏Joseph
览。
Laine先生的赞助,这个计划了10多年的项
览,其中有“未来纺织业”展览。在此人
保障全体船员的航海中和恶劣天气下的安
全。木帆船自身将配备现代航海设备和卫
国巡回演出时,吸引了大批中国乐迷,此
这块650平方米的展区将接待各种展
在随船上。这艘船将全程跟随独木舟,以
目才能得以实现。”热爱中国的大溪地人
星传输方式,可以更新网上发布的航海日
志。一台40马力的发动机用于在港口的推
进和发电。
此次为期六个月的漫长的波利尼西
亚人迁移之旅,在造船、设备和后勤等
方面将花费近8000万波利尼西亚法郎(折
合约67万欧元)。Hiria Ottino 和Clément
Piton希望独木舟在世博会期间到达上海,
Ottino表示。
们将看到未来派的闪光花边的婚纱、可以
六千年前,古老的波利尼西亚人完成
抵御300度高温的连身防护服、集雾水网、
了征服世界上最大的海洋——太平洋的壮
产生能量的窗帘、光帘和用甜菜纤维制成
举,从亚洲来到了太平洋的岛屿上。六个
的短袜。北加莱海峡大区的纺织工业与这
月内,Clément
Pito和Hiria
为了呼应太平洋群岛移民回归亚洲本源,
这里将有最多媒体的报道。独木舟预计4月
•
从大溪地起航。
Ottino驾驶的
Connexions / mars 2010 15
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FOCUS
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聚焦
Visite en 3D du pavillon français depuis son PC, comme si on y était.
从电脑上参观三维效果的法国馆,如同身临其境
Expo 3D en ligne, la première
mondiale de Dassault Systèmes
Du Déjeuner à Tahiti de Gauguin à la création d’une ville du futur, Shanghai 2010 est l’occasion
pour Dassault Systèmes de faire entrer le grand public dans son univers en 3D
Entrer dans l’univers de Gauguin et flâner
dans la scène paradisiaque de son Déjeuner à Tahiti… grâce à 3DVIA de Dassault
Systèmes, le leader des solutions 3D, ce
sera possible sur le site en ligne du pavillon français pendant toute la durée de
l’Exposition universelle.
L’outil a permis d’élaborer une réplique
numérique du bâtiment de l’architecte
Jacques Ferrier : des millions de visiteurs
pourront ainsi entreprendre une promenade en 3D à 360 degrés, en immersion
totale, à l’intérieur comme à l’extérieur
du pavillon français, découvrir son jardin
vertical à la française… en passant leur
souris sur leur écran d’ordinateur. Bonus
virtuel, ils pourront s’introduire dans n’importe lequel des chefs-d’œuvre exposés
à Shanghai par le musée d’Orsay. Le pavillon prépare également des jeux avec la
16 Connexions / mars 2010
mascotte Léon le chaton.
Le bureau chargé de la coordination de
l’Expo 2010 a aussi choisi la plateforme
3DVIA pour créer la première édition virtuelle de l’histoire de cette manifestation.
Les quelques 5,28 km² du site de l’Expo
seront ainsi accessibles en ligne. Les visiteurs vont pouvoir parcourir le site sur les
rives du fleuve Huangpu, se déplacer d’un
pavillon à l’autre, participer à différentes
activités interactives en 3D et assister à la
diffusion en ligne de manifestations réelles. « L’outil 3DVIA permet de vivre une
véritable expérience de l’Expo, assure
Christian Nardin, directeur Asie de Dassault Sytèmes. D’autant qu’à la version
web 1.0, s’ajoute une version 2.0, participative, de l’Exposition en ligne. » En effet,
le site Expo Online proposera également
de bâtir la « Ville du Futur » en s’appuyant
sur le concept et le format des jeux en
ligne pour imaginer la ville de demain,
dans le cadre d’un projet impliquant les
internautes du monde entier. Cette version virtuelle de l’Expo sera prolongée
au-delà de la manifestation réelle.
Une vision 3D pour tous
Dassault Systèmes a déjà collaboré avec
l’Exposition universelle. L’entreprise participait ainsi à la dernière édition à Aichi
au Japon, via une installation, sorte d’anémone de 5m de haut rendue vivante par
des projections sur sa paroi avec trois
films en 3D — sur le thème de l’innovation durable. Cette fois, le géant français
va plus loin. Déjà incontournable dans
les milieux industriels, veut promouvoir
sa vision de la « 3D pour tous » grâce à
la dernière née des technologies maison
3DVIA virtools.
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
Précurseurs dans le domaine de la 3D
depuis la fin des années 70, les ingénieurs, alors sous l’aile de Avions Marcel
Dassault (aujourd’hui Dassault Aviation),
ont d’abord créé des solutions 3D pour
simuler des surfaces d’avions.
Depuis lors, via une croissance externe
rapide (29 acquisitions depuis 1999), ce
leader mondial propose des solutions 3D
pour accompagner l’ensemble du cycle
de vie d’un produit, qui permettent de
réduire les coûts comme les délais du
développement. Ces logiciels permettent de concevoir un
téléphone portable, par exemple, puis de
simuler sa chaîne de production ; de visualiser sa texture ; d’étudier les réactions
de ce mobile putatif quand on le jette
à terre ; de communiquer entre les designers américains, le bureau de sourcing
turc et le centre de production en Chine
ou de tester son emballage auprès des
consommateurs dans le monde virtuel,
avant de lancer sa production dans le
monde réel.
La Chine « formidable laboratoire »
La technologie mise en oeuvre lors de
l’Expo pour vivre ces expériences réalistes en 3D est déjà utilisée dans de
nombreux secteurs industriels tels que
l’aéronautique, l’automobile, le bâtiment,
les biens de consommation courante et
l’habillement.
Dassault Sytèmes est également en position dominante sur le marché chinois.
Le géant français est en effet présent depuis de nombreuses années auprès des
industriels chinois grâce à un important
réseau de plus de 80 revendeurs. Depuis
2005, Dassault systèmes a créé une filiale
chinoise qui compte aujourd’hui environ
150 employés répartis dans six sites pour
piloter ces revendeurs.
En 2008, sur 1,34 milliards d’euros de
revenu, la zone Asie pacifique représentait 23%. La Chine en particulier est
un marché à surveiller de près : « Pour
nos clients chinois, il y a deux aspects,
la base existante encore réduite et les
nouvelles affaires, très prometteuses»
explique Christian Nardin. Troisième
puissance économique bientôt numéro
deux mondial, la Chine produit à tour
de bras. « La Chine est un fantastique
laboratoire pour nos technologies,
•••
达索打造第一个全球3D 网上世博会
“走进”法国后印象派大师高更的世
在世博会上应用的3D逼真体验技术已
界,漫步于他在大溪地岛上的画作《餐点》
经运用在航空航天、汽车、建筑、快速消费
如天堂般的场景之中...... 通过全球3D解
品和服装等诸多领域。达索系统在中国市场
决方案的领导者达索系统的3DVIA技术,这
上也占据着主导地位。
将在整个世博会期间的网上世博法国馆成为
可能。
多年来,这家法国巨头在中国凭借
80多家零售商的庞大网络服务于中国的工业
这项技术能够数字模拟出雅克.费里
企业。2005年达索系统成立了中国分公司,
耶(Jacques Ferrier)所设计的法国馆:在
如今拥有近150名员工,分布在6个工作地
360度的视角中,数以百万计的参观者只需
点,负责零售商的管理。
轻点鼠标就可在网上法国馆内外自由参观,
2008年,亚太区占公司13.4亿欧元
欣赏垂直的法式花园。虚拟技术的附加优
总收入的23%。中国是要特别关注的市
势:参观者能够步入法国奥赛博物馆在上海
场:“我们的中国客户有两个特点,目前
世博会展出的任何一幅经典名作中,还可以
的客户群还比较窄,但新业务的发展前景
与法国馆的吉祥物“乐乐”进行实时互动。
良好。”
纳凯斯解释说。作为全球第三大
2010年上海世博会事务协调局也选择
的经济强国,不久将跃升至第二位,中国
3DVIA技术平台建立世博会史上第一个“网
正全力生产,而生产商就是达索系统的客
上世博会”,人们可以从网上参观占地约
户。“中国对我们的技术而言是一个绝佳的
5.28公里的世博会园区。参观者沿着黄浦江
实验室。我们的技术也用于解决中国的首要
两岸走遍世博园区,从一家展馆逛到另一
问题——可持续发展。因此,我们参与了此
家,参加各种3D互动,并在线参与实体活
届以“城市让生活更美好”为主题的世博
动。“由于参与性的web2.0网上世博会融
会。”
入到web1.0,3DVIA技术可以让人身临其境地
城市规划:一个新兴市场
参观世博会。”达索系统亚太区总裁纳凯斯
在深圳,13部计算机通过3D测试城市规
(Christian Nardin)表示。事实上,网上世
划方案。在中国,复杂建筑的建设通常借助
博会网站还号召全球网友参与到打造“未来
达索系统的3D设计和模拟技术,比如北京
之城”的计划中,借助在线游戏的概念和模
奥林匹克体育场及上海的国际金融中心。两
式,设想未来城市的面貌。此届网上世博会
年来,深圳使用更为先进的3DVIA技术,通
将在实体世博会结束后继续存在。
过13台计算机和12部投影仪将整个城市的模
3D for All开发平台
型投射在一个大屏幕上,虚拟出城市规划方
达索系统与世博会的合作不是头一
案。
回。公司曾参加过上届日本爱知世博会,通
世博会让达索系统展示其“大众”能
过5米高的银莲花状的装置,把三部以可持
力:像吕克.贝松和詹姆士.卡梅隆之类的大
续创新为主题的3D电影活灵活现地投射在
导演独具慧眼,将达索系统的软件用于电影
四周的墙壁上。这一次,达索系统希望通过
《亚瑟和他的迷你王国》和《阿凡达》的构
最新诞生的3DVIA virtools技术推广自己的3D
思。这些技术还可以作为公关和市场营销工
for All开发平台。
具。达索系统与吕克.贝松的欧罗巴电影公
自上世纪70年代末就是3D领域的先
司合作,把240万雀巢Chocapic麦片盒变成
驱,马尔塞勒.达索航空(今为达索航空)
电脑游戏操纵器。消费者只要登入指定的雀
旗下的工程师们首先开发了模拟飞机表面
巢网站,通过网络摄影头拍下麦片盒背面,
的3D解决方案。自此,这家全球领先的高
就可以驱动以《亚瑟和他的迷你王国2》作
科技企业借助快速的外部扩张(1999年以来
为背景的3D游戏机程序,游戏机里的光球
一共进行了29次收购),为产品全生命周期
随着消费者将麦片盒左右倾斜而左右移动,
提供3D解决方案,减少费用并缩减开发周
最后游戏机内的迷你王国角色还会跳出包装
期。比如,这些软件可以用来设计一款手
盒。纳凯斯相信:“上海世博会是一次有国
机,模拟其生产线,显示其构造,研究手机
际影响力的盛会,它将被载入史册:史上规
摔在地上的反应,使美国设计师、土耳其采
模最大的世博会,也是第一届网上3D世博
购办公室和中国的生产中心之间实现多方交
会。我们认为此届世博会将被争相效仿。”
流,或在现实世界里正式投产前,在虚拟空
通过这些在线演示,达索不仅希望说
间里测试消费者对包装的反应。
服中国企业相信这些新应用的重要性,而且
中国:绝佳的实验室
希望全球市场也确信这一点。
•
Connexions / mars 2010 17
FOCUS
聚焦
matique capitale qu’est en Chine le développement durable, d’où notre présence
à l’Exposition universelle dont le slogan
est Better city better life. » précise le directeur Asie.
Urbanisme : un nouveau marché
A Shenzhen 13 ordinateurs permettent
de tester en 3D les projets d’urbanisme.
Classiquement, la construction de bâtiments sophistiqués s’appuie en Chine sur
les solutions de conception et de simulation 3D de Dassault Systèmes, comme en
témoignent les cas du stade Olympique
de Pékin ou du centre financier mondial
de Shanghai. Plus sophistiqué, depuis
deux ans, la municipalité de Shenzhen
utilise 3DVIA pour modéliser ses projets
d’urbanisme sur une « maquette » de
l’ensemble de ville projetée sur un grand
écran grâce à treize ordinateurs et douze
projecteurs. L’Exposition universelle permettra à
l’éditeur de logiciels d’illustrer ses compétences « grand public » : les réalisateurs
comme Luc Besson et James Cameron
ne s’y sont pas trompés, ils ont utilisé
les logiciels de Dassault Systèmes pour
la conception de leurs films Arthur et les
minimoys et Avatar. Ces technologies
peuvent aussi servir d’outil de communication et de marketing. Dassault Systèmes en partenariat avec EuropaCorps, la
société de production de Luc Besson, a
ainsi transformé 2,4 millions de paquets
de céréales Chocapic en console de jeu.
En se connectant sur le site de la marque,
les consommateurs pouvaient filmer le
dos du paquet par leur webcam pour révéler le monde en 3D des Minimoys, récupérer des boules magiques et pour les
plus adroits faire sortir un personnage du
film Minimoys du paquet. « L’Expo 2010
à Shanghai est un événement de portée
mondiale, cette Expo va faire l’histoire :
la plus grande de tout les temps, elle est
aussi la première en 3D. Nous pensons
qu’elle va faire de nombreux émules »
veut croire Christian Nardin.
Avec ces démonstrations en ligne, le
leader de la 3D ne veut pas seulement
convaincre les entreprises chinoises de
l’importance de ces nouvelles applications, mais aussi le marché mondial.
•
E mil i e Torge me n
18 Connexions / mars 2010
© Imagine China
••• nos outils servent aussi la problé-
Des cadeaux de noce signés l’Oréal pour les « mariés romantiques » du Pavillon France.
欧莱雅为参加“法国馆浪漫婚典”的新人们准备了新婚礼物
L’Oréal en fête
Seule société française à être sponsor général de l’Expo,
L’Oréal célèbre ses 75 printemps à Shanghai 2010.
Les hôtesses et les touristes du pavillon
France « le vaudront bien », eux aussi, le
temps d’une « Expo ». De mai à octobre, le
géant français des cosmétiques qui fêtera
son 75e anniversaire au pavillon France en
mai, se lance dans une vaste opération de
promotion qui devrait séduire plus d’un
visiteur. « En tant qu’entreprise française,
nous soutenons la présence de la France
à l’exposition universelle de Shanghai »,
résume Clothilde Yang, directrice de la
communication corporate pour L’Oréal
en Chine. A partir du 1er mai, un tirage au
sort sera donc organisé chaque jour avec,
à la clé, un produit L’Oréal à gagner pour
les visiteurs et les hôtesses du Pavillon se
verront, elles, offrir une session de formation pour apprendre à se maquiller dans
la plus pure tradition du chic français.
« Elles participeront à donner une bonne
image de la France », souligne la responsable. Les plus gâtés seront sans doute les
jeunes mariés, qui participeront au « Mariage romantique » organisé par la Mairie
de Tours sur le pavillon français. Comme
cadeau pour la noce, ils auront droit à une
boîte contenant des produits de beauté
pour elle et pour lui. L’Oréal compte surtout mettre en avant ses marques L’OréalParis et Lancôme pendant ces six mois
d’événements. Le pavillon France sera
une bonne plate-forme pour le groupe
français qui prévoit d’y fêter son 75e anniversaire. Un clin d’œil à l’histoire de la marque, dont le fondateur avait présenté son
premier parfum sur une autre exposition
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
universelle. C’était en 1935 à Bruxelles.
Mais l’entreprise française ne se contente
pas d’intervenir sur le pavillon tricolore.
« Nous sommes la seule société française
à être également sponsor de l’Expo »,
précise Clothilde Yang. Tous les volontaires bénéficieront ainsi des produits
L’Oréal, « comme ils travailleront en plein
air entre mai et octobre, nous avons surtout pensé à des crèmes de protection
solaire », confie la responsable. Les trois
cents hôtesses de l’Expo, sélectionnées
par la Ligue de la jeunesse de Chine, recevront également une formation, sur
le maquillage mais aussi sur la façon de
s’habiller — comment marier les couleurs — ou encore sur l’art de recevoir
des VIP. Ces derniers auront également
droit à des cadeaux spéciaux. Côté tapis
rouge, L’Oréal fera appel à ses ambassadeurs chinois pendant les six mois de
l’Expo, mais le détail de la liste n’a pas
encore été dévoilé. On sait en tout cas
que l’actrice Li Bingbing, qui incarne la
marque, sera présente, puisqu’elle est
déjà ambassadrice de Shanghai Expo.
En écho au thème de l’exposition
« Meilleure ville, meilleure vie », L’Oréal
s’est également engagé sur le volet environnemental. « Nous travaillons déjà en
partenariat avec des organisations nongouvernementales pour encourager
nos employés à utiliser les transports en
commun et à économiser les ressources
comme l’énergie ou l’eau », détaille Clothilde Yang. Mi-mars, l’entreprise devrait
lancer un site internet www.loreal2010.
com visant à sensibiliser le grand public
sur ces questions de protection de l’environnement. En interne, un vaste programme a été lancé pour faire concourir
les employés du groupe dans le monde
entier sur les mécanismes possibles pour
rendre une ville plus verte. Les idées seront soumises sur l’intranet de l’entreprise
tout au long du mois d’avril. L’auteur du
meilleur projet sera invité une semaine à
Shanghai pour visiter le site de l’exposition. « C’est une façon que nous avons de
faire la promotion de l’Expo ailleurs dans
le monde », résume la responsable..
•
Ju l i e De sn é
A suivre : www.loreal2010.com
欧莱雅沉浸在欢乐之中
世博会召开期间,法国馆的礼仪小姐
都使用欧莱雅化妆品。“由于他们将于5月
和游客们也“值得拥有”。从2010年5月到
至10月期间在露天工作,我们特别想到了防
10月,法国化妆品巨头欧莱雅将投身到一场
晒产品。”
声势浩大的持续促销的行动中,吸引不止一
筛选的300名世博会礼仪小姐还将接受化妆
位参观者。“作为一家法国企业,我们支
及着装培训,学习如何搭配色彩及接待贵宾
持法国参加上海世博会。”欧莱雅(中国)
的礼仪。贵宾们也将获得特别的礼物。在嘉
对外交流及公共事务部总监杨晴红表示。自
宾方面,欧莱雅将在世博会举办的六个月里
5月1日起,每天都会举办抽奖活动,参观法
邀请其中国的代言人,不过名单细节尚未透
国馆的观众将赢得一款欧莱雅化妆品。法国
露。我们至少知道品牌代言人中国影视演员
馆的礼仪小姐们也将获得参加讲座的机会,
李冰冰届时将出席,因为她还担任了世博会
学习纯法式的优雅化妆。“她们有助于展示
代言人。
杨晴红透露说。由中国共青团
良好的法国形象。”杨晴红强调道。最大的
与世博会主题“城市让生活更美
宠儿是参加法国图尔市政府举办的“法国馆
好”相呼应,欧莱雅在环保方面也作出承
浪漫婚典”的中国新人们,他们将得到为新
诺。“我们已经与一些非政府机构合作,鼓
娘和新郎定制的美容产品作为新婚礼物。在
励员工使用公共交通工具,节约能源、水等
世博会举办的六个月里,欧莱雅打算主打巴
资源。”杨晴红具体地说,“3月中旬,公
黎欧莱雅和兰蔻两大品牌。法国馆对欧莱雅
司将推出www.loreal2010.com网站,引起
而言是一个很好的平台,5月,公司准备在
公众对于环保问题的关注。在公司内部,我
这里庆祝兰蔻品牌创立75周年。回顾一下兰
们已经启动了一项全球员工参加的大型竞赛
蔻的历史,该品牌的创始人是在另一届世博
项目,主题是让城市更加环保的可能机制。
会上发布了兰蔻的首款香水,那是1935年的
各种创意将在4月份通过公司局域网提交。
布鲁塞尔世博会。
最佳方案的作者将受邀赴沪一周,参观世博
然而,欧莱雅不只满足于赞助法国
馆。,杨晴红明确指出:“我们是唯一一家
会。“这是我们在全球其他地区推广世博会
•
的一种方式。”杨晴红总结道。
同时赞助世博会的法国企业。”所有志愿者
Connexions 46 L’Expo en avant-première
A l’été 2008, Connexions avait déjà
consacré un dossier spécial très
complet à l’Expo. Retrouvez les
interviews des concepteurs du pavillon français (Jacques Ferrier, Rudi
Bauer et l’agence Ter), du consul général de France à Shanghai Thierry
Mathou et du responsable des relations extérieures de l’Expo Xu Bo…
et toute l’information sur l’Expo et
la ville de Shanghai au http://www.
connexions.ccifc.org/index.php/
fre/content/view/full/139.
Connexions / mars 2010 19
© DR
FOCUS
聚焦
Parmi les effets spéciaux d’Aquatique Show : un rideau d’eau sur lequel des images sont projetées. 在法国国际水秀公司制作的特效中,包括水幕投影
Les fééries liquides d’Aquatique
Show
Une PME strasbourgeoise, numéro un mondial, orchestre les jeux d’eaux des cérémonies
d’ouverture et de clôture.
Top secret, les cérémonies d’ouverture
et de clôture de l’Expo comporteront
des jeux d’eau grandioses, un spectacle aquatique prendra aussi place sur
le site quotidiennement. Mais chut, on
n’en saura pas plus sur les installations
avant le jour J. Si ce n’est que l’auteur de
ces exploits liquides est une entreprise
française Aquatique show.
Dans le marché de niche que représentent
les spectacles d’eau et les effets spéciaux
aquatiques, cette PME strasbourgeoise
est le numéro un mondial. Les équipes
d’Aquatique show ont entre autres participé aux animations aquatiques du
château de Versailles, Disneyworld, Sea
World Floride, Dubai Shopping Festival... Création, montage, maintenance, ils
20 Connexions / mars 2010
s’occupent de tout. Ainsi sur l’Exposition
de Shanghai, une vingtaine d’experts en
électronique, en hydraulique, en robotique feront le voyage pour s’assurer que le
spectacle sera prêt à temps. « Nous devrons répondre à des défis techniques :
une partie des fontaines se trouvent en
rivières salées, les équipements bougent
sur quelques mètres chaque jour en raison des marées… Le tout dans un délai
serré. Si c’était simple, le bureau de l’Expo
n’aurait pas fait appel à nous » se régale
Dominique Formhals, PDG d’Aquatique
show.
Derrière la féérie, il faut imaginer les équipes locales, les fenwicks, les grues, les bateaux nécessaires au transport de tonnes
d’équipement.
Une vente de plus de dix millions
d’euros
Des événements de cette ampleur il
y en a peu dans son industrie : Coupe
du monde de football une fois tous les
quatre ans et Jeux olympiques d’été à
la même fréquence, mais pas de Jeux
olympiques d’hiver, la température limite les jeux d’eau. « L’Expo universelle
est un marché important pour nous, les
fontaines sont achetées par la municipalité pour un montant qui dépasse dix
millions d’euros, nous sommes très, très,
très heureux d’avoir été sélectionnés »
précise Dominique Formhals.
Le PDG et fondateur est tombé dans le
bain à 24 ans. Un vrai conte de fées, jeune
étudiant en droit, il concoctait une ani-
mation « très primitive » à base de tuyaux
d’arrosage pour le 25e anniversaire de la
chorale de son père. Les bonnes fées
ce jour-là avaient le titre d’agents artistiques égarés dans la salle de spectacle
strasbourgeoise. Elles lui proposent une
tournée d’un an avec le cirque Bouglione.
Dominique Formhals a tout appris sur
le tas, depuis il s’est entouré d’experts.
« Nous sommes numéro un mondial
parce que nous étions précurseurs. En
location, aucun de nos concurrents ne
possède ne serait ce que 20% de notre
matériel. » précise le patron alsacien. L’entreprise restée 100% familiale compte
trente-cinq salariés à Strasbourg entre le
siège et l’atelier et enregistre un chiffre
d’affaires de 20 millions d’euros.
La Chine déjà premier marché
L’Asie représente déjà la moitié du chiffre d’affaires contre 30% pour l’Europe, le
reste se répartit entre le Proche-Orient,
essentiellement Dubai et le Qatar, et la
Russie qui a connu un net ralentissement
l’an passé. La Chine est déjà le premier
marché, Dominique Formhals compte
bien qu’il continue de se développer.
Des partenaires à Ningbo ont permis à
Aquatique show de prendre position
dans cette ville de la côte Est, ils ont installé le spectacle aquatique permanent
de la municipalité depuis plusieurs années. A Canton, Aquatique show vient
d’installer ses jets d’eau dans le cirque
permanent Chimelong, la location pour
un an s’élève approximativement à
200 000 euros. A Macao, la société crée
en collaboration avec Franco Dragone, le
metteur en scène du Cirque du soleil, un
grand spectacle avec danseurs et acrobates dans une piscine pour le Casino
City dream. « Avec l’Expo, nous espérons accroître encore notre visibilité dans
le pays, explique Dominique Formhals,
particulièrement grâce aux six mois de
spectacles, vitrine de nos savoir-faire. » La
société est détentrice d’une vingtaine de
brevets. Et les risques de contrefaçon ?
Il suffit d’innover toujours, répond l’ancien bidouilleur de tuyaux d’arrosage. Les
clients qui contactent Aquatique show
exigent du sur-mesure.
•
E mil i e Torgme n
www.aquatic-show.com
© DR
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
Les parades délirantes de Transe Express.
Transe Express剧团令人兴奋的表演
Transe Express
Echange artistique
« Viens voir les comédiens, voir les musiciens, voir les magiciens qui arrivent... »
Vingt-six artistes vont arriver de la Drôme
pour rejoindre un projet un peu fou mis
en place par la région Rhône-Alpes avec
le bureau de la culture de Shanghai pour
l’Exposition universelle : trois troupes
de spectacles de rue françaises s’allient
chacune à un « correspondant » chinois
pour offrir une grande parade délirante
et interculturelle : l’Orient orchestre.
Transe Express prépare ses roulements
de tambours en harmonie avec l’Oriental
Jiangzhou Drum Theatre. « Accorder nos
tambours « à la française » à des percussions chinoises crée un vrai lien entre artistes mais aussi avec le public chinois qui
y retrouvera plus facilement ses repères »
prêche avec conviction Claudia Caterin
chargée de diffusion de Transe Express.
Sa troupe qui a participé à des manifestations majeures telles que les derniers
Jeux olympiques d’hiver à Vancouver,
ceux d’Albertville en 1992 ou les Portes
de l’An 2000 et les 2000 Coups de Minuit
à Paris coordonnera le spectacle.
La Grosse couture, fanfare au carrefour
des musiques du monde, du rock et du
jazz, travaille avec l’institut de musique
de l’Université normale de Shanghai. Les
fabricants et animateurs de marionettes
géantes le Caramantran font eux équipe
avec une compagnie de dragons et de
lions, Shanghai acrobatic troupe star. Au
total, cinquante acteurs, musiciens, acrobates, marionnettistes et percussionnistes sont en train d’élaborer ce spectacle
éphémère. Après un premier voyage de
repérage en décembre pour identifier les
partenaires, les échanges de partitions et
de chorégraphies continuent à distance.
Le final devait comporter l’arrivée de
musiciens du ciel, transportés par une
grue, mais le bilan carbonne de ce deus
ex machina moderne est trop élevé pour
l’Expo, il sera remplacé par un numéro de
trapèze.
Deux représentations sont prévues : le
14 mai dans le parc de Zhongshan, le
16 pour l’ouverture officielle du pavillon
Rhône-Alpes sur l’ère des bonnes pratiques. On discute d’éventuelles reprises et
tournées de cette collaboration exceptionnelle.
•
E mil i e Torge me n
www.transe-express.com
www.lagrossecouture.com
/www.caramantran.com
(http:// www.worldtopdrum.com)
Connexions / mars 2010 21
Isolation et économie d’énergie, la Suède a choisi le béton cellulaire pour ses performances énergétiques.
© DR
FOCUS
聚焦
保温隔热和节约能源,瑞典馆选择加气混凝土来提高能效
Le béton vert de Xella
La société lyonnaise équipe huit pavillons. Une superbe vitrine pour ce champion qui
excelle en Chine.
Le béton cellulaire Ytong de l’entreprise défend une approche verte de la
construction. D’abord, le matériau en luimême permet des économies d’énergie
substantielles. Les innombrables trous
d’air que comprend la matière assurent
une isolation bien supérieure aux matériaux standards, l’air étant un des meilleurs
isolants. Dans les constructions ordinaires chinoises, le niveau de conductivité
thermique est de 0,11, mais, grâce à une
technologie européenne, il est de 0,09
pour le béton Ytong, une première en
Chine. Concrètement, cela permet de
moins chauffer les bâtiments l’hiver et de
moins recourir à la climatisation l’été… un
avantage de choix pour les bâtiments de
l’Expo, qui devront subir la canicule estivale avec des pics à 40°C.
Ils sont d’ailleurs nombreux à recourir à
l’utilisation de ce matériau. L’entreprise
équipe le Pavillon France et le pavillon
Rhône-Alpes, dans la zone des meilleures pratiques urbaines, mais aussi les
pavillons du Maroc et de la Suède ; des
22 Connexions / mars 2010
bâtiments de première importance
sur le site de l’Expo, tels que la salle de
spectacle ou le pavillon thématique ; et
enfin des pavillons d’entreprise, comme
celui de General Motors / SAIC (Shanghai
Automotive Industry Corporation) ou de
la compagnie nationale d’électricité, la
State Grid. « L’Expo donne une vision de la
vie urbaine future, dont un des éléments
clé est l’architecture de pointe pour des
bâtiments durables », résumait Jan BuckEmden, Pdg de la filiale Ytong au sein du
groupe Xella, dans un communiqué de
l’entreprise en novembre dernier. Présente depuis 1997 dans le delta du Yangze,
Ytong est la première marque de béton
cellulaire en Chine avec une production
de 1,2 million de mètres cubes par an,
sur des sites à Shanghai, Tianjin et dans
la province du Zhejiang. Une chose est
sûre, l’exposition universelle de Shanghai sera une formidable vitrine pour
la marque qui produit beaucoup dans
la région Rhône-Alpes. Les défis à relever pour l’événement ont été multiples.
Situé presqu’au centre de la ville, le site
de l’Expo était difficile à approvisionner
en matériel et les délais de chantier ont
été établis au plus court. Par ailleurs, si la
structure du béton cellulaire s’adapte très
bien aux exigences environnementales
des bâtiments modernes, elle doit aussi
en respecter le design contemporain.
Mais la contribution du béton Ytong au
développement durable s’étend au-delà
de son utilisation. Le groupe Xella s’efforce d’inscrire son procédé de fabrication
dans une démarche plus respectueuse
de l’environnement. Le poids — plus
faible que celui d’un béton normal étant
donné la présence d’air dans le matériau — permet un transport et une gestion de la chaîne logistique plus faciles
et moins gourmands en énergie. Sur les
chantiers, il n’est pas nécessaire de faire
appel à du matériel sophistiqué, des outils
normaux suffisent à la découpe des blocs
de béton.
•
Ju l i e De sn é
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
50%,而欧洲只占30%,其余分布在近东,
园里,另一场5月16日在世博会城市最佳实
主要是迪拜和卡塔尔,还有俄罗斯,但去年
践区罗纳-阿尔卑斯大区馆的正式揭幕仪式
高度机密:世博会开闭幕式将有雄伟
俄罗斯增长明显放缓。中国已成为最大的市
上。相关人员正在讨论此次中法艺术团体的
壮观的水上表演节目,在世博会场每天也将
场,Dominique Formhals预计中国市场会继
合作将来可能重新进行并举办巡演。
续发展。宁波的合作伙伴已经让公司在这座
www.transe-express.com
东部沿海城市占有一席之地,多年来,他们
www.lagrossecouture.com
长期在这座城市布置水景。在广州,公司刚
www.caramantran.com
刚在长隆国际马戏大剧院安装了喷泉,一年
(http:// www.worldtopdrum.com)
法国国际水秀公司
的水上梦幻表演
上演一场水秀,但在世博会开幕前人们不会
知道更多细节。我们只知道这些水景项目的
制作者是一家法国企业——法国国际水秀公
司。
在水上表演及水中特效的小众市场
中,这家来自法国斯特拉斯堡的中小企业在
世界上首屈一指,它曾参加过法国凡尔赛
宫、美国迪斯尼乐园、弗罗里达海洋世界、
迪拜购物节等水上表演项目。创意、安装、
维修,一切都由他们负责。因此,在上海世
博会的项目上,将有20多名电子、流体及自
动化专家奔赴上海保证表演如期举行。
“我们要接受住技术的挑战:部分喷
泉将设在咸水河上,设备因为潮水每天会移
动几米……所有准备工作必须在很短的期
限内完成。如果简单的话,世博局也不会
找到我们。”法国国际水秀公司的总经理
Dominique Formhals兴奋地说。在美仑美奂
的水上表演背后,要考虑当地的工作团队,
比如叉车、吊车、运送数吨设备的必要船只
等。
超过1000万欧元的买卖
在法国国际水秀公司从事的行业中,
规模如此巨大的活动很少:四年一次的世
界杯足球赛,夏季奥运会也是四年一次,
的租金就达到近20万欧元。在澳门,公司与
太阳马戏团的导演Franco Dragone合作,在
凯莱集团的绿色混凝土
新濠天地赌场度假村的游泳池里与舞蹈和杂
经多方认证,凯莱集团生产的伊通加
技演员们共同创办了一台大型演出。“我
气混凝土可保证建筑的环保。这种建筑材料
们希望通过世博会进一步提高我们在中国
本身就能节约大量能源。材料中包含的无数
的知名度,特别是利用6个月的表演来展
气孔比普通材料的保温隔热效果好很多,因
示我们的特长。”Dominique Formhals解释
为空气是最好的保温隔热体之一。在中国的
说。公司拥有20多项专利证书,至于被仿
冒的风险,只要一直创新就行,Dominique
Formhals这样回应。联系法国国际水秀公司
的客户要求的是量身订制。
www.aquatic-show.com
法国Transe Express剧团:艺
术交流
“快来看即将到来的喜剧演员,乐
普通建筑中,导热率为0.11,而借助欧洲技
术,伊通加气混凝土的导热率为0.09,这在
中国是最好的。具体地说,这种混凝土在冬
天可以为建筑少供热,夏天可以让建筑少用
空调。对于世博会的建筑,这是选择这种
混凝土的一个好处,因为它们要耐受每年
6月至9月袭击上海的三伏天(最高气温可达
40°C)。
手,魔术师的表演吧……”,来自法国多姆
很多展馆使用这种建材。凯莱集团为
省的26位艺术家将参与由罗纳-阿尔卑斯大
法国馆、城市最佳实践区的罗纳-阿尔卑斯
区和上海文化局联手为世博会打造的有些疯
大区馆、摩洛哥馆和瑞典馆提供建材,也为
狂的节目:3个法国街头艺术家团体分别与
世博会园区的重要建筑,例如演出大厅和主
一个相应的中国演出团体联合奉献一场令人
题馆提供建材,还为企业馆,例如上海通用
兴奋的跨文化大型演出:东方音乐会。
汽车、国家电网提供建材。“世博会展示的
但冬奥会不行,温度限制了水上表演。世
Transe Express准备与上海东绛州鼓乐
是未来的城市生活,其关键要素是符合可持
博会对我们来说是个重要的市场,上海市
团联合演奏鼓乐,“把我们的法式鼓乐融合
续发展要求的尖端建筑技术。”凯莱旗下的
政府以超过1000多万欧元的价格买下了喷
到中国的打击乐中,在艺术家之间,同时也
伊通公司总裁Jan Buck-Emden在去年11月的
泉。我们非常、非常、非常幸运地被选
与中国观众产生一种真正的联系,他们会更
中。”Dominique Formhals说。
一份企业新闻稿中这样总结。
容易产生共鸣。”Transe Express的宣传负责
伊通公司自1997年进驻长三角,是中
Caterin满怀信心地説。她的团体
国第一大加气混凝土品牌,产量达120万立
公 司 总 经 理 兼 创 办 人 Dominique
人Claudia
Formhals早在24岁时就入行。一个真实的传
曾参加过多次重大活动,例如最近的温哥
奇故事,作为一名法律专业的大学生,为
华冬奥会、1992的阿尔贝维尔冬奥会、巴黎
了庆祝他父亲的合唱队成立25周年,他用
2000年跨年以及2000下子夜钟声庆典,这次
浇水的管子进行了一场别开生面的表演。
Transe Express将参与世博会的演出。
方米,在上海、天津和浙江均有工厂。可以
肯定的是,上海世博会对于伊通是个极好的
展示窗口,它在罗纳-阿尔卑斯大区产量很
大。此届世博会曾面临的挑战众多:会址几
那一天,在斯特拉斯堡演出大厅里奇迹般
介于世界音乐、摇滚乐及爵士乐之间
地有演艺经纪公司在场,他们向Dominique
的铜管乐队La Grosse Couture将与上海师范
Formhals提议跟随Bouglione马戏团进行巡回
大学音乐学院一起合作。巨型木偶的制作
演出。他在实践中学到了所有的东西,此后
演出团体Le Caramantran则与一家舞龙舞狮
他身边一直聚集着专家。“我们是世界第
团和上海明星杂技团组成演出团队。共有
一,因为我们是最早涉足该行业的企业。在
50名演员、乐手、杂技演员、木偶操纵师以
然而,伊通混凝土对可持续发展的贡
租用设备方面,没有一家竞争对手能够拥
及打击乐手正在策划这场短暂的演出。自去
献超越其用途。凯莱集团力求将其生产工艺
有我们20%的设备。”这位阿尔萨斯的老板
年12月第一次来中国考察寻找合作伙伴之
纳入最环保的方式。由于在这种建材里有空
说。公司为100%的家族经营,在法国斯特
后,谱曲和编舞的远距离交流一直在继续。
气,重量比普通混凝土轻,从而使运输和物
拉斯堡的总部和工作室有35名员工,营业额
最终的演出本来包括由吊车运送乐手从天而
流管理更容易,耗能更少。在工地上,不需
达2000万欧元。
降,但是这种现代手法的排碳量对于世博会
要用复杂的材料,只要用普通工具就能切割
中国已经是最大的市场
来说过于高昂,它将被空中杂技节目代替。
大块混凝土。
亚洲占法国国际水秀公司营业额的
两场演出已经确定:一场5月14日在中山公
乎位于市中心,建材供应困难,建设工期
短。另外,即便加气混凝土的结构很适合现
代筑的环保要求,但也要尊重现代建筑设计
的风格。
•
Connexions / mars 2010 23
FOCUS
聚焦
Arte-Charpentier dessine la
place des Célébrations
Tout au bout du monumental
« Boulevard de l’Expo » qui accueille les visiteurs dès l’entrée, se
trouve la place des Célébrations.
Au bord de la rivière Huangpu,
l’espace est signé par un architecte
français présent depuis longtemps
en Chine : Jean-Marie Charpentier.
Son agence, qui compte 26 personnes à Shanghai, a imaginé un grand
espace de 15 600 mètres carrés, à la
fois destiné à accueillir des grands
concerts mais aussi les visiteurs,
dans une atmosphère de détente
et de repos. Quand l’endroit ne sera
pas en « mode concert », des fontaines et des plans d’eau occuperont
le terrain. « Nous avons fait remonter le fleuve Huangpu sur la place »,
aime donner comme image Zhou
Wenyi, architecte de l’agence. Le
design se veut sobre pour mettre
en valeur les formes audacieuses
des bâtiments alentour que sont
la salle de spectacle et le centre de
congrès. Un autre projet du français
est très attendu pendant l’Expo : un
pâté de maison entier de la concession française rénové, avec des
anciens lotissements et des villas
d’époque qui côtoieront des nouvelles constructions discrètes.
AOS Realys construit le pavillon
Belgo-européen
Le cabinet franco-belge AOSRealys conçoit et construit le pavillon belge et l’espace européen
hébergé dans ce même pavillon
pour une enveloppe globale de
près de 15 millions d’euros. Depuis
2005 en Chine, la PME qui compte
25 personnes dans ses bureaux de
Shanghai a déjà fait ses preuves
dans la ville : la flagship store Porsche à Pudong, le centre de R&D
de Rhodia, celui de Saint Gobain...
« Décrocher ce contrat nous permet de démontrer que nous
•••
24 Connexions / mars 2010
Les équipes d’Aden services prendront bientôt le relais des ouvriers…
© Imagine China
Brèves Expo
埃顿服务的工作团队即接替施工人员(进驻世博会)
Les 800 petites mains
d’ADEN Services
Maintenance, sécurité, propreté… En dix ans, Aden services
s’est imposée en Chine et se met au service des autres – des
multinationales aux stars – pour que la fête soit parfaite.
A côté des architectures plus originales
les unes que les autres, des inventions
« vertes » et de la foule, vous ne les verrez sûrement pas, mais 800 des petites
mains de L’Exposition universelle seront
les employés d’ADEN Services. Monaco,
le Luxembourg, la Grande-Bretagne ainsi
que deux autres pavillons ont déjà fait appel à la société française spécialiste des
métiers de la restauration collective et
de ceux du facilities management (sécurité, propreté, maintenance industrielle...).
Recrutement à tour de bras, formation au
pas de charge, l’Expo est un formidable
outil de développement pour l’entreprise qui a ouvert il y a quelques mois un
bureau à proximité du site pour diriger
de plus près cette armée de gardiens,
de « ayis », etc. « Les pays participants
étaient intéressés par nos dix années
d’expérience en Chine. Parallèlement,
être certifiés norme ISO 9001 : 2000 est
un plus dans un pays où la qualité est une
préoccupation constante » explique Nicolas Clément, directeur commercial et
marketing Chine.
Une société française qui rayonne
depuis la Chine
La société a décroché son premier
contrat en Chine en 1999. Joachim Poylo,
son fondateur et PDG, est alors appelé à
Pékin par Promodès, qui veut construire
le réseau de sécurité interne de son premier magasin Continent. Ils avaient entendu parler de l’activité d’ADEN Services,
alors uniquement active au Vietnam.
Aujourd’hui l’entreprise a établi son siège
à Shanghai et enregistre un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros, dont
80% en Chine. C’est la spécificité de cette
entreprise française, qui rayonne depuis
le marché chinois en Asie du Sud-Est, au
Moyen-Orient et en Afrique, et est représentée en Europe et en Australie.
Au cinquième étage du siège shanghaien,
les experts de l’Operations Command
Center surveillent les usines, parcs industriels, magasins, etc. des différents clients
sur une dizaine d’écrans. Une installation
qui permet d’intervenir en moins de cinq
minutes grâce à un système d’alertes sophistiqué reliant les sites au “Central”.
La sécurité des visites de David Beckham
ou de Sophie Marceau en Chine : signée
ADEN Services. La surveillance du site du
centre de production de Huawei, l’un des
leaders mondiaux des télécoms, à Hangzhou : signée ADEN Services. Après avoir
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
décroché des contrats auprès de clients
français, Promodès, Sofitel, Saint-Gobain,
puis de grandes multinationales telles
que Siemens, Nestlé, GE ou L’Oréal, l’entreprise séduit aujourd’hui des groupes
chinois tels qu’Alibaba. « Pour l’instant, les
entreprises chinoises représentent 10%
de nos clients, cette part augmente rapidement » estime Catherine Ung, chargée
du développement commercial.
Ils ont protégé David Beckham et
Sophie Marceau
Le credo de la société française : proposer des standards internationaux à des
prix locaux. Sur les 12 000 salariés (dont
8 000 en Chine), on compte très peu de
cols blancs. Du coup, il a fallu insister
sur la formation des employés maison
organisée dans des centres dédiés par
les quinze bureaux chinois disséminés à
travers le pays.
Première activité historique, la restauration collective fait peu à peu place à
un portefeuille de services à forte valeur
ajoutée. Les projets de gestion de bases-vie, formule « tout compris » particulièrement appréciée par les groupes
industriels et miniers, sont en plein
essor dans plusieurs régions isolées de
Chine et d’Asie. Dans le désert glacé du
Qinghai, ADEN Services a, par exemple,
organisé en 2007 la vie quotidienne des
employés de General Electric travaillant
sur la construction de la ligne ferroviaire
la plus haute du monde entre Pékin et
Lhassa. « C’est la vision d’ADEN Services et
de son président Joachim Poylo, répondre aux besoins de nos clients pour qu’ils
puissent se concentrer sur leur coeur de
métier » explique Nicolas Clément.
La société multiservices applique la
stratégie du petit pas : s’ils sont satisfaits de leurs services de restauration,
par exemple, les clients leur confient le
nettoyage, puis la gestion de leurs sites
dans d’autres régions ou dans d’autres
pays. Les contrats passés en Chine avec
des multinationales comme des compagnies locales ouvrent des portes : les
experts d’Aden services accompagnent
par exemple aujourd’hui des sociétés
minières comme l’australien Anvil Mining
ou l’américain Caterpillar en République
démocratique du Congo...
•
E mil i e Torge me n
来自埃顿服务的800名
基础服务人员
在一个比一个更独特的建筑、环保
的电信解决方案供应商华为在杭州生产中
设计及人群之中,你肯定看不见他们,
心的安保由谁负责?埃顿服务。与普美德
但800名供上海世博会使用的基础服务人
斯、索菲特、圣戈班等法国客户,以及与
员将由埃顿服务的员工担当。摩纳哥、
跨国公司巨头西门子、雀巢、通用电气、
卢森堡、英国和另外两个展馆已经向这
欧莱雅签订了合同之后,如今公司吸引了
家专业从事团体餐饮及设施管理服务(保
一批中国的企业如阿里巴巴,负责商务开
安、保洁、工业维修等)的法国公司提出
发的Catherine Ung指出:“目前,中国企业
请求。全力招聘人员并加紧培训,上海世
占我们客户总数的10%,这一部分增加得
博会对埃顿服务而言是一个绝佳的发展途
很快。”
径。公司几个月前就在世博会址旁设立了
一个办公室,以便就近指导这支保安和阿
他们保护了大卫.贝克汉姆和苏菲.玛索的
姨的队伍。参展国家对我们在中国十年的
安全
从业经验很感兴趣。同时,公司取得了
埃顿服务的座右铭是:以本地的价格
ISO9001:2000认证,这在质量一直为人们
提供符合国际标准的服务。在12000名员工
所关注的中国又加了一分。”埃顿服务中
中(其中8000人在中国),只有很少的人
国的商务和市场部经理Nicolas Clément解释
是白领。因此,应该坚持入户服务人员的
说。
培训,这是由分布在全国15个办事处所指
定的培训中心来负责。
一个从中国市场绽放光芒的法国公司
埃顿服务的第一项历史业务,团体餐饮逐
1999年,埃顿服务签下了在中
渐让位于具有高附加值的一站式服务。备
国的第一份合同。公司创始人兼总裁
受工业和矿业企业青睐的基本生活管理项
Joachim Poylo当时被法国零售商普美德斯
目,即“一切全包”方案在中国和亚洲的
(Promodès)召到北京,后者想在其第一
许多偏远地区正飞速发展。比如在青海省
家门店康地祥(Continent)建立内部安保
寒冷、荒无人烟的地方,2007年,埃顿服
系统。普美德斯听说过埃顿服务的业务,
务曾负责安排通用电气员工的日常生活,
而当时的埃顿服务只活跃在越南。如今公
当时他们正在修建世界上海拔最高的北京
司已在上海建立总部,营业额超过5000万
至拉萨的青藏铁路。“满足我们客户的需
欧元,其中80%在中国实现。这家法国公
求以便让他们集中精力做好自己的主要
司的特殊之处正在于此,从中国市场发展
工作,这就是埃顿服务及其总裁Joachim
到东南亚、中东和非洲,并在欧洲和澳大
Poylo的设想。”Nicolas Clément解释说。
利亚设有销售办公室。
埃顿服务采取一步一个脚印的策略:
在上海总部的5层,行动指挥中心的
如果客户对其餐饮服务感到满意,就会委
专家在十几个屏幕上监视着不同客户的工
托他们负责保洁,然后委托他们管理在其
厂、工业园及商店。借助连接中心和现场
他地区或国家的项目。公司在中国与跨国
的高级警报系统,设施可以在5分钟内处理
企业签订的合同与本地企业一样打开了大
出现的问题。
门:埃顿服务的专家正为澳大利亚的安维
大卫.贝克汉姆或苏菲.玛索到访中
国的安全由谁负责?埃顿服务。全球领先
尔矿业公司以及美国的卡特比勒公司在刚
•
果的项目提供服务。
Connexions / mars 2010 25
•••
26 Connexions / mars 2010
Du Mexique à la Roumanie, de l’Afrique à la Suisse, comment
nos voisins de toute la planète rivalisent aussi d’ingéniosité
pour célébrer 150 ans d’expositions universelles.
Conte de fées
Derrière ses douze tours blanches, rouges et or, inspirées de costumes
traditionnels féminins et d’anciennes villes de l’Oural trimillénaires,
le pavillon russe a choisi de regarder la ville comme un conte de fées
éclairé avec des yeux d’enfants.
Trois dunes
Les trois dunes du pavillon des Emirats Arabes Unis conçu par Foster
avec des matériaux recyclables et écologiques, offre à l’intérieur l’abri
de leur fraicheur et l’attrait de toutes nouvelles technologies audio-visuelles.
Dentelle de bois
Enveloppé dans sa dentelle de bois découpée
au laser et directement
inspirée de motifs folkloriques complexes, le
pavillon polonais fascine par son allure de
feuille de papier pliée
géante. Ah…aller y
écouter du Chopin…
ou du rock !
Ocre rouge
L’extérieur du bâtiment
est en acier ocre rouge,
couleur de terre australienne. Conçu comme
une sculpture moderne
et organique, le pavillon
australien invite au voyage
dans son théâtre 3D de
mille places, promesse de
fortes sensations.
© Imagine China
des projets complexes » explique
Benoit Greindl. La société doit en effet concevoir, construire cette structure en forme de neurone avant de
la démonter et la recycler après la
clôture de l’exposition. En interne,
le pavillon multiplie les défis et les
espaces attribués aux différentes
Régions et Communautés belges. Il
y aura par exemple un espace diamantaire, où les visiteurs pourront
observer la taille des pierres précieuses, soit pour AOS-Realys des installations de sécurité draconiennes.
SIP un expert de la construction
au service des pavillons étrangers
Les pavillons norvégien, vénézuélien,
irlandais et celui des Emirats arabes
unis ont déjà fait appel à l’expertise
de la société de gestion de projets
SIP. Très présents en Chine, SIP y réalise trente-cinq projets chaque année,
beaucoup d’usines mais aussi des
laboratoires, des supermarchés, des
hôtels. Sur l’Expo, l’entreprise représente les organisateurs des pavillons
nationaux ou les architectes auprès
des intervenants à toutes les étapes :
appel d’offre, construction, gestion
des chantiers, etc. La différence entre
les contrats chinois, base de négociation, et les contrats à la mode occidentale où la définition des risques
est très détaillée par exemple, peut
être déroutante pour les entreprises
internationales qui doivent travailler
en Chine parfois pour la première
fois et dans des délais relativement
courts.
GL events gère les services
Sécurité, nettoyage, maintenance,
hôtesses d’accueil, GL events fournira le personnel nécessaire à tous
ces services sur le pavillon taiwanais. Sur le pavillon chilien, l’entreprise assurera les mêmes services
ainsi que la gestion du restaurant,
des boutiques. « Nos clients nous
font confiance parce que nous gérons 35 sites dans le monde »
Délires et technologies
© Imagine China
••• sommes capables de gérer
© Imagine China
FOCUS
聚焦
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
Cirque du soleil
Conçu en collaboration avec le Cirque du Soleil, le pavillon canadien offre un espace de spectacle à ciel ouvert entouré de trois structures. Un système de drainage permettra de recueillir l’eau de pluie.
© Imagine China
© Imagine China
© Imagine China
Tournesols et pissenlits
La façade évoque un tronc
d’arbre qui associe éléments
naturels et technologie solaire (les cellules produisant
l’électricité du pavillon) et
s’élève vers la douceur d’un
toit paysagé, planté de tournesols et de pissenlits.
© Imagine China
••• explique Amaury Rostagnat,
Le « grand huit »
Sur le thème de « la rue joyeuse », le pavillon des Pays-Bas en forme de tulipe entraîne le visiteur sur
un « Grand huit » piétonnier qui mettra en valeur le développement durable, l’environnement et la
responsabilité sociale des entreprises.
© Imagine China
© Imagine China
Cerfs-volants et papillons
Sur le parvis du pavillon du Mexique, des dizaines de cerfs-volants sont
plantés dans du gazon. Appelés náhuatl, ce qui veut dire « papillon », ils
seront, selon leurs créateurs, un symbole de réflexion pour une meilleure ville.
DGA de GL events Chine. Pour compléter son offre de service, la société
a récemment intégré French touch,
une agence d’hôtesses.
Urban Bar et ses cocktails sur
mesure
C’est une jeune pousse chez les entrepreneurs français de Shanghai,
mais le spécialiste du conseil en
montage de bar est déjà devenu
incontournable. La société Urban
Bar, qui propose notamment des
créations de cocktails ou de la formation pour barmen, s’est associée
avec les frères Pourcel pour concevoir le bar du restaurant 6e sens. Sébastien Bonnefoi, fondateur et directeur de la petite entreprise, connaît
bien les chefs montpelliérains pour
avoir signé avec eux un ouvrage sur
les cocktails et la finger food intitulé
« In’sensé », paru en 2007 aux éditions Solar. Mais le Stéphanois d’origine ne s’arrêtera pas là pendant les
six mois de l’Expo, il met également
en place le bar Moët & Chandon, qui
se trouvera au rez-de-chaussée du
pavillon et le bar Absolut (propriété
de Pernod-Ricard) au pavillon suédois.
Art for the World s’expose
Vingt sculptures monumentales
prendront place sur le boulevard de
l’Expo. Une équipe française, composée du commissaire d’exposition
Ami Barak et de la galerie parisienne
JGM Galerie, est à l’origine d’un des
plus gros projets artistiques de l’exposition universelle de Shanghai.
Chaque oeuvre est signée d’un artiste différent — onze sont chinois
et neuf viennent de l’étranger, dont
deux artistes français — et présente
une vision de l’urbanisation. Commandes du Bureau de l’Expo, certaines de ces sculptures resteront
sur le bitume shanghaien après la
fin de l’exposition universelle, comme le Mirror Boat de Leung Mee
Ping, l’aiguille en acier de 12 mètres de haut de Liu Jianhua et
•••
Connexions / mars 2010 27
Pomme verte
Répondant au doux nom de
Greenopolis, le pavillon roumain a pris la forme d’une
pomme verte, pour dégager
des idées de santé, de connaissance, d’originalité, de
tentation et d’éternité.
••• le couple de pandas « He He »
•
28 Connexions / mars 2010
© Imagine China
Un marshmallow géant
Imaginé à partir du projet de banque de graines du Jardin botanique royal de Londres, le pavillon britannique a la forme d’un
gigantesque marshmallow aux murs recouverts de 60 000 tiges
d’acrylique de 7,5 m, qui brilleront de jour et de nuit et oscilleront
au rythme de la brise venue du fleuve.
Trois terrains de football
Grand comme trois terrains
de football et demi, le pavillon de l’Afrique est le plus
vaste des pavillons collectifs.
42 pays s’abriteront derrière
ses façades aux teintes vives,
protégées par une technique
de pulvérisation écologique
et anti-rayon-ultraviolet.
© Imagine China
© Imagine China
Amazing France signe un magazine haut-de-gamme pour le pavillon.
Créée en 2005 à Shanghai, le semestriel Amazing France porte haut les
couleurs de la France en Chine. A
tel point que la COFRES s’est laissée séduire par ce petit groupe de
presse pour élaborer le magazine du
Pavillon France. Tiré à 600 000 exemplaires, ce numéro spécial sera distribué en exclusivité sur le pavillon.
Au départ, les deux fondateurs de la
publication Fabien Roiron et Morgan
Bonnard souhaitaient un magazine
capable de promouvoir avec élégance l’art de vivre à la française.
Aujourd’hui, le groupe de presse
s’étoffe et des numéros spéciaux
consacrés aux vins, aux montres ou
encore aux chaussures de luxe viendront s’ajouter au portefeuille des titres de Amazing Publications.www.
amazingfrance.com
BFM et Publicis Consultants
inaugurent une rubrique sur
l’Expo 2010
Chine Hebdo, l’émission hebdomadaire consacrée à la Chine de
BFM Radio, réalisée avec radio 86,
a lancé à 100 jours de Shanghai
Expo une rubrique hebdomadaire
présentée par Antoine Bourdeix
(Publicis Consultants). Chine Hebdo
est présentée par Philippe Marty et
diffusée sur BFM Radio le samedi
de 18h à 19h et le dimanche de 7h
à 8h. Toutes les Fréquences de BFM
Radio, le streaming et le Podcast
de l’émission sont disponibles sur
http://www.bfmradio.fr et sur le site
d’informations www.radio86.fr.
France Inter à Shanghai
Le 30 avrill, France Inter présentera
une matinale d’informations en
direct de la rue de Nankin. Au programme, entre 6h30 et 9h, des invités et des reportages pour parler de
l’Expo et faire découvrir Shanghai.
Une newsletter CCIFC
Toutes les deux semaines, la CCIFC
informe ses membres. Tous les événements et l’actualité de l’Expo.
© Imagine China
et « Xie Xie » de Zhang Huan.
Brindilles d’osier
Osier, tapas et flamenco. Le pavillon espagnol virevolte autour d’une structure d’acier recouverte
de brindilles d’osier colorées et tressées par des
artisans venus de tout le pays. Il se transforme, le
soir venu, en cabaret gastronomique.
© Imagine China
FOCUS
聚焦
la présence française à l’Expo 上海世博会上的法国
夏邦杰设计世博庆典广场
国家馆的组织者或建筑师。中国合同与西方
中国,9件来自外国,其中法国2件,用来展
世博庆典广场位于世博会主入口——壮观的
合同的差异让那些第一次在中国开展项目且
示城市化的视角。应世博局的要求,其中几
世博轴的顶端。庆典广场位于黄浦江边,其
项目周期较短的国际公司难以应付。比如,
件雕塑将在世博会结束后永久留存,如梁
设计出自一位进入中国已久的法国建筑师夏
西方合同对风险的定义非常细致,而中国合
美萍的作品《镜舟》(Mirror Boat)、刘建
邦杰之手。他的事务所在上海拥有26名员
同则不同。
华的12米高的钢针作品(l’aiguille en acier de
12 mètres de haut)、张洹制作的两只大熊
工,设计了面积为15600平方米的场地,既
用于举办大型音乐会,也为参观者提供了休
GL Events提供场馆管理服务
闲场所。当不举办音乐会时,喷泉和水景将
GL Events为台湾馆提供安保、保洁、维护、
覆盖这片区域。“我们把黄浦江水引到广场
礼仪小姐等所有设施服务所必需的人员。在
《魅力法国》成为法国馆的高端杂志
上。”事务所的设计师周雯怡希望达到这样
智利馆,公司除了提供相同的服务外,还要
2005年创刊于上海,《魅力法国》季刊让
的效果。庆典广场的设计比较朴实,以便突
管理餐厅和小商店。其他国家馆也会陆续使
法国在中国大放异彩。上海世博会法国参
出周围建筑——演艺中心和世博中心的大胆
用该公司的服务。“初到中国,管理一个展
展局受到这家小出版集团的吸引,决定由
设计。世博会期间,夏邦杰的另一个项目也
馆是非常困难的。我们的客户对我们十分信
其担纲制作2010年上海世博会法国馆的官方
备受期待:法租界的房屋改造,一些老街区
任因为我们在全球管理着35个场馆,而且我
杂志。发行量达到60万册的专刊将于2010年
与当时的别墅毗邻的不太张扬的新式建筑。
们有组织活动的经验。” GL Events中国副
5月至10月在法国馆独家发行。起初,创刊
总经理诺艺(Amaury Rostagnat)解释说。
人华安(Fabien Roiron)和伯纳德(Morgan
AOS Realys打造比利时—欧盟馆
为了提供更全面的服务,公司最近吸纳了一
Bonnard) 希 望 制 作 一 本 能 够 优 雅 地 推 广
法国、比利时建筑师事务所AOS-Realys设计
家管理礼仪小姐的公司——French Touch。
法式生活艺术和法国奢侈精品的杂志。如
猫“和和谐谐”。
今,这家出版集团的业务不断扩充:今年年
并建造比利时馆和在同一馆内的欧盟展厅,
整个工程耗资近1500万欧元。这家中小企业
Urban Bar与它的定制鸡尾酒
底,《魅力意大利》将重新出版,以葡萄
2005年进入中国,在上海办事处拥有25名员
Urban
酒、钟表及奢侈鞋品为主题的专刊也将落入
工,并已在上海表明其实力:浦东保时捷旗
不过这位酒吧咨询专家的发展已经势不可
Amazing Publications的囊中。
舰店、罗地亚上海研发中心和圣戈班的研
挡。Urban Bar主要提供鸡尾酒的创制及调酒
www.amazingfrance.com
发中心等。“签下这份合同使我们能够证
师的培训服务,并与普塞尔(Pourcel)兄
明,我们有能力管理复杂的项目。”甘德理
弟合作打造法国馆“第六感”餐吧。这家小
BFM与阳狮咨询开办关于2010年上海世博
(Benoit Greindl)解释说。公司要设计并建
企业的创始人兼董事长Sébastien Bonnefoi与
会的每周专栏
造“脑细胞”结构的比利时馆,并在世博会
来自蒙彼利埃的主厨普塞尔兄弟熟识,并
中国周报(Chine
结束后将其拆除并回收处理。在内部,展馆
与他们合著了一本介绍鸡尾酒和小食的书
Radio
增加了挑战和分配给比利时不同地区和团体
《In’sensé》,该书于2007年由Solar出版社
节目,在距上海世博会召开还有100天之
的展区。比如,钻石展将亮相比利时馆,参
出版。不过,这位来自圣太田的企业家在为
际,它推出了一个每周专栏报道此次空前
观者可以在这里观察宝石的尺寸,这就要求
期6个月的世博会期间将不止做这些,他还
绝后的世博会。与上海世博会指定的公关
AOS-Realys安装严格的安保设施。
在法国馆的一层和瑞典馆分别开设酩悦香槟
服务供应商阳狮咨询合作,这个栏目每周
吧和绝对伏特加吧(隶属保乐力加集团)。
介绍第73届上海世博会的进展。中国周报
Bar是上海法国企业家中的新生儿,
SIP: 为外国馆服务的建筑专家
Hebdo)是BMF
Radio与
86共同打造的专门报道中国的周播
由Philippe
Marty主持,每周六晚18:00至
挪威馆、委内瑞拉馆、爱尔兰馆和阿联酋
“世界艺术展”进行露天展览
19:00和每周日早7:00至8:00播出。所有
馆已经寻求SIP项目管理公司的专业服务。
迎接游客的世博园区主干道——世博轴上将
BFM Radio的频道、流视频和播客可在http://
SIP已 在 中 国 深 深 扎 根 , 每 年 完 成 3 5 个 项
展出20件宏伟的雕塑作品。由展览专员Ami
www.bfmradio.fr
目,包括很多工厂,还有实验室、超市及酒
Barak和巴黎法国密特朗艺术中心组成的法国
信息网站www.radio86.fr上获取。上海世博
店。在此届世博会上,面对招标、建设和施
团队策划了上海世博会的大型艺术展之一。
会专栏由阳狮咨询中国首席代表安韬略
工管理等各个阶段的参与方,SIP代表着各
每件作品出自不同的艺术家之手,11件来自
(Antoine Bourdeix)主持。
网站以及专门关于中国的
•
Connexions / mars 2010 29
头条新闻
A la une des médias
Par Renaud de Spens
Ces cyber-justiciers qui construisent l’Etat de droit
Ils ne sont pas inscrits au barreau, mais défendent les
s’autoproclame par exemple « combattant anti-corruption,
citoyens. Ils n’ont pas de carte de journaliste, mais plujournaliste d’investigation indépendant ». S’ils choisissent
sieurs centaines de milliers de lecteurs. Ils ne portent pas de
souvent un nom de plume comme un nom de guerre, ils
masques, parfois seulement un pseudonyme. Leur rapière
se montrent en général à visage découvert, n’hésitant pas à
est un clavier, leur destrier une connexion Internet, et s’ils
publier leur numéro de téléphone. Cela témoigne de leur
courage, et leur permet de recueillir des témoignages de
signaient d’un Z, cela serait aussi pour « Zhongguo. » Ce
sont les Zorro chinois du XXIe siècle. Nombreux, motivés et
victimes.
courageux, ils sont, comme le héros de Johnston McCulley,
Souvent plus accessibles que les avocats ou la plupart des
au service des petites gens, des sans-grades, des victimes
« vrais » journalistes, ces Zorro chinois tirent presque tous
de tous les abus de droit. Mais ce ne sont
leur détermination d’une histoire personpas seulement des justiciers : ils participent
nelle ou familiale. « Le boiteux qui court
consciemment à l’édification d’un Etat de
nu », explique par exemple qu’il est mem« La
droit.
bre du Parti, mais que la différence entre
protection
De simples citoyens
les idéaux de la propagande et la pratique
Certes, l’opinion chinoise a encore une des droits
du pouvoir l’a profondément blessé. En
certaine réticence à s’exprimer publiquement
conséquence, il affirme n’avoir de cesse
individuels
sur les questions politiques et sociales. Une
que de dénoncer sans relâche les manqueexpression humoristique décrit cette attitude face à la
ments à l’Etat de droit, quelles que soient
les conséquences. Cependant, la plupart de
réservée : « je vais juste acheter de la sauce de
bureaucratie
ces activistes ont en général la prudence de
soja » (wo jiu qu da jiangyou 我就去打酱
油). C’est ce qu’un passant avait répondu à attirent de
traiter d’affaires qui ne dépendent pas de
un micro-trottoir de la télévision cantonaise
leurs propres autorités locales, ce qui les
plus en plus
en 2008, voulant indiquer qu’il était réfracrend presque totalement insensibles aux
de
vocations
.»
taire à l’interview.
pressions.
Toutefois, le relatif anonymat et la stimuCertains accèdent très vite à une notolation intellectuelle des échanges Internet
riété nationale, puis internationale, comme
contribuent aujourd’hui à éroder cette méfiance. En paralZuola (佐拉), un bloggeur pékinois de 26 ans, qui s’était
lèle à la libération de l’expression publique, de plus en plus
spécialement rendu en mars 2007 à Chongqing pour inde citoyens s’engagent dans un activisme altruiste. Outre la
terviewer les fameux irréductibles qui refusaient de quitter
défense de l’environnement, la protection des droits indivileur maison promise à la démolition. Ils sont parfois plus
duels (weiquan 维权) face à la bureaucratie et aux potentats
rapides que les journalistes. Juste au lendemain des faits,
locaux attire de plus en plus de vocations.
« Le brigand courant après le vent » avait été à l’hôpital au
Un cyber-justicier peut être à peu près n’importe qui.
chevet de la jeune Deng Yujiao, accusée d’homicide voEtudiants, ouvriers, autodidactes, hommes d’affaires,
lontaire alors qu’elle se défendait d’une tentative de viol
voire chômeurs, ils ont en commun de s’investir eux-mêde la part d’un officiel ; l’affaire s’est révélée celle qui a le
mes de missions de salut public. Zhu Kongjian (朱孔剑)
plus bouleversé l’opinion chinoise en 2009. Enfin,
•••
30 Connexions / mars 2010
头条新闻
A la une des médias
quelques-uns comme Han Han (韩寒) sont des in•••
tellectuels qui militent ouvertement pour une transition
plupart des internautes prennent le postulat que celui-ci
existe déjà : « Comme la Chine est un Etat de droit, nous
démocratique.
ne pouvons pas tolérer que les droits des individus soient
La plupart sont cependant quasiment inconnus en de- bafoués. »
hors de leur sphère d’activité, et s’occupent d’affaires moins
Les bloggeurs-justiciers sont aussi en guerre contre les dissensibles.
cours et les attitudes méprisantes des fonctionnaires. Un
Des affaires du quotidien
responsable, lors d’une réunion avec des pétitionnaires, les
Aujourd’hui, aucune cause ne paraît insignifiante pour les menace t-il d’un « Le Parti Communiste peut tous vous
internautes chinois. Récemment, Zhu Kongjian a enquêté exterminer » ? Sa photographie et l’enregistrement audio
sur une histoire de passage à tabac de citoyens par des poli- de l’incident sont immédiatement portés sur Internet. Un
ciers qui a eu lieu le 8 novembre 2009 à Guanyun dans le
haut cadre de Shenzhen, pris en flagrant délit de tentative
Jiangsu. Suite à une mésentente minime de voisinage, l’une de viol d’une jeune adolescente, veut-il intimider les parents
des parties, estimant être méprisée, a appelé ses
de la victime en leur disant qu’ils ne sont
proches, parmi lesquels deux femmes policier,
que des « trous-du-cul » (pimin 屁民)
pour aller battre l’autre partie. Zhu Kongjian a
sans influence ni relations et ne seront
« Des
publié les images d’une caméra de surveillance,
écoutés par personne ? Une chanson
obtenues grâce à une complicité locale, qui bloggeurs« Nous sommes le peuple des trous-dumontrent clairement la participation d’agents
cul » est composée quelques jours plus
justiciers
de l’ordre à cette agression, alors que les victard, fait le tour de la toile, et finit par
times sont en infériorité numérique et n’ont utilisent ces
contraindre les autorités à limoger l’araucun geste belliqueux.
rogant suspect.
incidents
L’une des victimes serait aujourd’hui déteFauteurs de troubles démagogues ou
nue pour l’empêcher de porter plainte. L’infor- pour faire
auxiliaires de justice aidant la Chine à
mation a été diffusée très activement par tout
se construire ? Le sergent Garcia chinois
progresser le
un réseau d’internautes, qui ont contacté par
ne sait pas toujours comment juger ces
respect des
exemple les auteurs de blogs populaires par le
cyber-Zorro, et hésite entre endiguebiais de messages privés ou de commentaires. droits. »
ment et tolérance. Alors que les grands
En additionnant les différents articles qui évoportails Internet ont été fin 2009 discrèquent cette affaire, on peut estimer que plus de
tement enjoints de ne plus autant mettre
200 000 internautes chinois en ont été alertés pendant la les blogs en valeur sur leur page d’accueil, un porte-parole
semaine des vacances du nouvel an. Cela peut paraître hors du Bureau des Publications (GAPP, organisme qui gère la
de proportion avec la banalité de ce genre de « bavure », presse et les autorisation de publication) a rendu hommage
qui arrive tous les jours en Chine et ailleurs. Mais les blog- en février 2010 aux communautés d’internautes et a notamgeurs-justiciers utilisent ces incidents mineurs pour faire ment cité leur action lors de l’affaire Deng Yujiao. « Internet
progresser le respect des droits des personnes et restreindre est aujourd’hui devenu, a t-il reconnu, un moyen pour les
l’arbitraire de l’autorité.
citoyens de faire appel des injustices qu’ils subissent de la
L’appropriation du vocabulaire légal est significatif. Alors part des autorités locales (shangfang 上访) »
que les autorités affirment « construire l’Etat de droit », la
•
32 Connexions / mars 2010
La référence en Chine pour apprendre le français
在 中 国传播法语的榜样
15 Alliances Françaises,
25 000 étudiants
par an, 2 800 000 heures
de cours par an
15所法语联盟,每年向2万5千
名学生教授280万小时的课程
Les meilleurs résultats aux tests
de langue française
抢占法语水平考试榜首 La porte d’entrée pour les
universités francophones
法语留学语言水平通行证 Une programmation culturelle
haute en couleurs
全年不间断多彩的文化活动 275 professeurs, 17 500 m2 de surface
d’enseignement, 45 000 documents
disponibles sur 1800 m2 de médiathèques,
325 manifestations culturelles par an
et 40 000 spectateurs
275名教师,17500 平方米的教学场所,
1800平方米的多媒体图书馆收藏了近45000册
资料,每年325场文化活动和40 000多名观众
www.afchine.org
数字背后
Le dessous des chiffres
Par Yann Marin *
Jusqu’où iront les bulles boursière et immobilière ?
+ 106 %.
Selon les calculs effectués par Standard Chartered, le prix de la terre constructible au mètre
carré a connu une hausse de 106 % en 2009, et même
de 147 % dans les dix villes les plus chères, traduisant les
tensions qui menacent le marché immobilier. Les ventes de biens immobiliers ont pour leur part progressé de
83 % en valeur, tandis que les prix au mètre carré (+7,8
% sur 2009) ont nettement rattrapé les baisses observées
en début d’année. Bien que moins spectaculaire sur les
marchés boursiers, la hausse observée est néanmoins très
importante : l’indice composite de la bourse de Shanghai
a augmenté de plus de 50 % au cours de l’année du buffle.
La Chine souffre-t-elle pour autant d’un phénomène de
bulles boursière et immobilière menaçant son développement à court terme ? Rien n’est moins sûr. Les arguments qui plaident en faveur de la thèse des
bulles sont connus : la politique monétaire devenue expansive avec la crise a libéré les banques qui ont accordé
un montant record de crédits en 2009 (9 590 mds Rmb,
soit 1 404 mds USD, contre 3 495 mds Rmb soit 512
mds USD, en 2008). Une part importante de ces crédits
(évaluée à 20 %) aurait été infusée dans les marchés, générant des comportements spéculatifs, soutenus par des
politiques fiscales incitatives. Le raisonnement est correct
mais oublie quelques-uns des termes de l’équation qui
poussent à nuancer le propos.
Premier élément à décharge : les hausses observées sur
l’année 2009 sont à la mesure des baisses subies en 2008.
Ainsi, si les actions cotées ont progressé de plus de 50 %
en 2009, elles avaient perdu 65 % en 2008. Monté le 16
octobre 2007 à 6 092 points, l’indice de Shanghai était
tombé à 1707 points le 4 novembre 2008 sous l’effet successif de la politique monétaire restrictive menée par la
banque centrale (début 2008) et de la crise financière (fin
2008). Sur les marchés immobiliers, la situation a été
de même nature, bien que plus complexe en raison de la
segmentation par types de biens (bureaux, résidentiel), par
catégorie et par ville. Les marchés, rassurés par la réactivité des autorités et les résultats des politiques de soutien,
connaissent aujourd’hui un phénomène de rattrapage et
effacent la sur-réaction à la baisse observée l’année précédente.
34 Connexions / mars 2010
Deuxième élément : la Chine a connu une forte croissance en 2009 (+8,7 %), elle a donc généré des richesses.
Or, les détenteurs de ces richesses ont cherché à les placer.
Les opportunités d’investissement restent relativement limitées en Chine en raison du manque de développement
des marchés financiers (obligataires en particulier) et des
restrictions imposées dans la conception et la distribution
de produits de placement par les banques. Le régime de
change limitant les opérations à l’étranger (de toute façon
rendues peu rentables depuis la crise), les investisseurs
chinois ont pour l’essentiel accès aux dépôts bancaires
(faiblement rémunérés), au marché boursier et au marché
immobilier pour rentabiliser leur épargne. La hausse des
marchés reflète donc la concentration des placements sur
les deux segments les plus développés : l’action et l’immobilier.
Troisième élément : les autorités monétaires sont attentives à la situation des marchés et ont la capacité de
reprendre le contrôle. Probablement auraient-elles souhaité intervenir plus tôt et plus vite, mais le gouvernement
a donné la priorité à la croissance car il craignait l’effet
dépressif d’une inflexion politique donnée trop tôt. Les inquiétudes exprimées publiquement ont suffi à contrôler la
bourse (qui évolue autour des 3 000 points depuis le mois
d’août 2009). L’immobilier est devenu le principal sujet
de préoccupation. Des mesures ont finalement été prises
début 2010 : certaines générales pour limiter l’expansion
du crédit (deux hausses successives du ratio de réserves
obligatoires), d’autres plus ciblées, comme la limitation
des avantages fiscaux accordés pour l’acquisition d’un logement aux seuls primo-accédants.
Les débuts de bulles observés sur les marchés boursier et
immobilier ne devraient donc pas focaliser l’attention, le
risque est encore lointain et les chiffres exagèrent son importance. Il ne faudrait pas que la situation perdure, mais
un resserrage trop rapide pourrait également conduire
à enrayer une reprise encore fragile. Tout est affaire de
tempo, et le gouvernement chinois garde pour l’heure le
sens du rythme
•
* Conseiller financier, Service économique régional de Pékin
法制天地
L’état des lois
Par Hubert Bazin*
La pratique du contrôle des concentrations
Le 1er août 2008, la loi chinoise anti-monopole entrait
en vigueur, posant les bases d’un droit de la concurrence
chinois, et d’un contrôle des opérations de concentrations
qui ne s’appliquerait plus seulement aux entreprises étrangères, mais également aux entreprises domestiques. Ce
contrôle préalable, par le MOFCOM, est obligatoire dès
lors que la concentration (une fusion entre entreprises,
l’acquisition d’une entreprise par une autre, ou encore
l’obtention de la capacité d’exercer une « influence décisive » sur une entreprise) atteint certains seuils de chiffres
d’affaires : chiffre d’affaires mondial cumulé des parties à
la concentration d’au moins 10 milliards de Rmb, avec au
moins deux parties ayant chacune 400 millions de Rmb
de chiffre d’affaires en Chine, ou chiffre d’affaires cumulé
en Chine d’au moins 2 milliards de Rmb, avec au moins
deux parties ayant chacune 400 millions de Rmb de chiffre
d’affaires en Chine. Après dix-huit mois, il est encore trop
tôt pour tirer un bilan du contrôle des concentrations en
Chine, mais on peut toutefois discerner quelques traits
d’une pratique encore en cours de rodage.
Même s’il a été adopté par les Etats-Unis, l’Union Européenne et quelques autres grands pays, un contrôle préalable des opérations de concentrations ne se justifie pas
nécessairement. Il constitue une étape administrative relativement lourde qui conditionne la mise en œuvre d’une
opération d’acquisition, les autorités administratives devant se prononcer sur l’impact concurrentiel du projet sur
le « marché pertinent » dans lequel la concurrence s’exerce.
Selon que la taille du marché pertinent est plus ou moins
largement définie, tant pour les produits en cause que
dans son étendue géographique, l’impact concurrentiel
de l’opération envisagée sera bien évidemment différent.
L’exercice est donc délicat, nullement scientifique, et
même si les entreprises internationales trouvent une sécurité dans l’aval préalable qui est donné à leurs projets,
on pourrait tout aussi bien imaginer d’éviter un contrôle a
priori, et de permettre aux gouvernements de démanteler
a posteriori des situations de monopoles ou d’oligopoles
nées d’une trop forte concentration sur un marché donné,
au détriment des prix et des consommateurs.
Le choix d’un contrôle préalable des concentrations
par les autorités chinoises n’est pas neutre. Il traduit la
36 Connexions / mars 2010
volonté de contrôler la structure des marchés, comme les
autres « grands », et n’échappe pas au soupçon de servir
également à interdire des opérations qui, sans être en tant
que telles dangereuses en terme de concurrence, seraient
contraires à un intérêt national bien compris.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi anti-monopole, le
cadre réglementaire du contrôle des concentrations s’est
étoffé de plusieurs textes d’application, qui apportent des
précisions sur les conditions de notification d’une opération, la méthode de calcul des seuils de chiffre d’affaires entraînant l’obligation de notifier, la définition des
marchés pertinents ou la procédure d’examen suivie par
le MOFCOM. On constate cependant que ce ministère
reste encore volontairement flou sur un certain nombre
de questions importantes, et qu’il n’a par exemple pas
officiellement pris position sur la situation des joint ventures, même si tout indique que ces dernières sont notifiables, ni sur la définition de ce qu’est un « contrôle ».
Plus largement, la pratique d’examen des autorités aurait
besoin d’être améliorée et plus transparente. Les dossiers
s’empilant, les délais d’examen ont tendance à s’allonger
au-delà de ce que prévoient les textes (en principe 30 jours,
éventuellement prolongeables de 90 jours si le dossier, particulièrement délicat, doit faire l’objet d’un examen complémentaire), dans un contexte où les autorités sont mal
à l’aise avec la notion de décision implicite d’acceptation.
L’absence de transparence ou tout simplement d’informations chiffrées empêche dans nombre de cas une analyse
précise du marché, et la non-publication des décisions
du MOFCOM (contrairement à l’Union Européenne
par exemple) ne facilite pas la constitution d’un socle de
précédents utilisables.
La décision largement commentée d’interdiction de
l’acquisition de Huiyuan par Coca Cola en mars 2009 a
montré que le contrôle chinois des concentrations est devenu un nouvel obstacle dans la procédure d’approbation
déjà complexe des projets d’acquisition. Il reste à voir quel
usage en feront les autorités chinoises dans un contexte
où les projets de leurs propres entreprises à l’étranger se
heurtent aussi à des réticences gouvernementales, comme
on l’a vu en Australie l’année dernière.
* Associé Gide Loyrette Nouel Pékin
•
© Harold Thibault / Aujourd’hui la Chine
商务简讯 l’actualité / business chine
David Wei, le Pdg d’Alibaba, le leader du commerce B2B.
阿里巴巴首席执行官卫哲,B2B电子商务领军人
La recette d’Alibaba
En dix ans, le groupe Alibaba est devenu un géant mondial du e-commerce en faisant
l’inverse de ce que font ses concurrents.
L’aventure d’Alibaba a commencé sans argent mais avec des idées et une approche
novatrices.
A l’instar d’Apple, dont les débuts dans un
obscur garage de la côte ouest américaine
sont aujourd’hui légendaires, Alibaba est
créé en 1999 dans le petit deux pièces de
son fondateur, Jack Ma, situé dans la ville de
Hangzhou à 180km de Shanghai.
Dix-huit personnes sont présentes, elles
disposent d’un maigre capital de 50 000
euros mais sont animées de la ferme intention de révolutionner le commerce en ligne
entre entrepreneurs ou ce que l’on nomme
désormais les échanges « B2B » (business to
business).
Dix ans plus tard, la PME a muté en géant
économique international avec 18 000 employés, deux plates-formes Internet dédiées
aux échanges en ligne et représente une valeur estimée à 50 milliards d’euros.
Le service fondateur, alibaba.com, possède à
38 Connexions / mars 2010
ce jour 11 millions d’inscrits dans le monde
en dehors de la Chine et 36 millions dans
l’Empire du milieu. Chaque jour, ce sont pas
moins de 300 millions de dollars américains
qui circulent sur le réseau d’échange avec
des commandes venues du monde entier, y
compris du pôle Sud !
« Le seul pays où nous sommes absents est
la Corée du Nord car Internet reste inaccessible à la population », ironisait il y a peu
David Wei, le PDG de la plate-forme B2B
lors d’une conférence à la Chambre de commerce et d’industrie française de Pékin.
Créé en 2003, taobao.com est un site de
vente au détail jouant sur le même créneau
que le géant américain ebay.com. En Chine,
le site accapare plus de 80% du marché local et représentait 3% du total des ventes au
détail dans le pays en 2009 avec un objectif
de 6% pour 2010.
« Nous estimons que le e-commerce représentera entre 35% et 40% du total des
ventes de ce type d’ici 10 ans » avance
avec confiance David Wei. Il faut dire que
Taobao est déjà le plus grand supermarché
d’Asie avec des volumes de transactions dix
fois supérieurs à ceux obtenus en Chine
par un géant de la distribution « offline »
comme Carrefour.
Stratégie du « up side down »
La réussite fulgurante du groupe Alibaba
est basée finalement sur une recette simple : « faire exactement l’inverse des concurrents » ! A l’époque de la création d’Alibaba.
com, le modèle classique pour les échanges
B2B en ligne reposait sur l’idée de faire
payer une commission par transaction, le
plus souvent à l’acheteur. Les fondateurs
vont prendre le contrepied total du modèle
en faisant payer les vendeurs non pas par
transaction mais sur un principe de « buffet
à volonté ». Ces derniers souscrivent donc
un forfait annuel à la plate-forme et peuvent effectuer autant de transactions qu’ils
网络简讯
le veulent. A ce service basique s’ajoutent
des prestations supplémentaires et payantes comme la possibilité d’apparaître en tête
de liste lors des recherches de fournisseurs.
Pour les acheteurs, les services sont totalement gratuits.
« C’est exactement comme une soirée “entrée libre pour les filles” dans une discothèque, les garçons sont prêts à payer cher
pour obtenir un maximum de conquêtes et
ils ne sont jamais rassasiés ! » explique avec
humour le Pdg d’Alibaba.
Même logique lors du lancement de Taobao.com puisqu’à l’époque la version
chinoise de eBay captait plus de 80% du
marché local et que l’Américain possédait
une force de frappe financière nettement
plus importante. « Pour réussir, nous avons
décidé de faire totalement l’opposé de notre concurrent. S’il faisait payer un service
nous le faisions gratuitement, s’il interdisait
les contacts directs entre les usagers, nous
les facilitions… En quelques années, nous
avons capté l’essentiel du marché en répondant aux attentes de nos clients chinois »
précise David Wei.
A cette technique de contrepied systématique s’ajoute un management agressif en
interne puisque chaque année, c’est 10%
des employés jugés les plus faibles par rapport aux objectifs définis qui sont renvoyés.
Une manière d’assurer le dynamisme des
équipes et de recruter des nouveaux talents
en permanence, selon le dirigeant du géant
mondial du B2B.
Si le modèle stratégique du groupe Alibaba
s’est avéré particulièrement fructueux,
il n’est pas destiné à être reproduit tel
quel : « Si quelqu’un décide de nous copier
en tous points, il n’a, selon moi, aucune
chance de réussir. Par contre si, comme
nous l’avons fait, une entreprise arrive avec
des concepts innovants pour ses clients sur
un marché peu développé comme l’Internet
mobile par exemple, elle a de forte chance
de s’imposer assez rapidement » conclut
l’entrepreneur chinois.
Alors pour réussir sans argent dans l’Empire
du milieu comme dans le reste du monde,
Alibaba démontre qu’il faut bien sûr savoir
se creuser la tête mais aussi parfois se la mettre à l’envers ! Nicol a s Sr idi
•
Retrouver la conférence de David Wei à la CCIFC Pékin le 27
janvier 2010 : http://pro.01net.com/editorial/511891/alibabagroup-les-maitres-de-le-commerce-a-lechelle-planetaire/
Après Google, eBay pourrait bien quitter la
Chine
Décidémment les temps sont durs pour
les entreprises américaines du Web en
Chine. Après Google, il se pourrait
bien qu’un autre grand du web doive
reconsidérer sa présence sur le sol
chinois : eBay. Les déboires du premier
site au monde en matière de e-commerce (276 millions de membres en
2009) font moins la une des journaux
que Google, et pourtant, l’année 2010
pourrait bien lui être fatale.
Que s’est-il passé en Chine ? En stratégie militaire on qualifierait cet événement de « retournement d’alliance ».
Autrement dit, les cartes ont changé de
main et eBay va devoir jouer son avenir
avec un très mauvais jeu.
En Chine, eBay est en effet allié depuis 2006 avec la société hongkongaise
TOM Group. Ensemble, ils ont créé
une société commune pour développer
le site de e-commerce EachNet. eBay
a misé toute sa stratégie et tous ses espoirs de développement en Chine sur
cette alliance.
La mission de EachNet : essayer de rattraper la société Taobao, le géant local
qui détient à lui seul près de 80% de
parts de marché.
L’entente entre TOM Group et eBay
a commencé à se dégrader à la vue des
performances décevantes de EachNet
ces dernières années. Les millions de
dollars engloutis par l’alliance TOM/
eBay n’ont pas suffit à combler le retard
de leur « poulain » EachNet.
Pire, de seconde plate-forme de e-commerce avec 8 à 9% de parts de marché,
EachNet a même été rétrogradé à la
troisième place du classement. La société s’est fait doubler par un challenger
arrivé plus tardivement sur le marché,
la société PaiPai appartenant au groupe
Internet Tencent.
En Chine, où on ne fait jamais les cho-
ses à moitié, c’est un géant des entreprises d’Etat, la Poste chinoise (China
Post) qui est venu bousculer cette alliance. En octobre 2009, TOM Group
et China Post ont lancé officiellement
leur entreprise commune, dénommée
« Ule China », en mettant en commun
leurs forces respectives. Pour China
Post, la puissance de sa logistique avec
son demi-million de postiers et ses
dizaines de milliers de relais de poste.
Pour TOM Group, son expérience du
e-commerce acquise avec EachNet,
ainsi que ses monumentales bases de
données (utilisateurs enregistrés) : 300
millions venant de ses services mobiles,
100 millions de son portail d’information (tom.com), 90 millions de services Tom-Skype, et enfin 48 millions de
contacts venant de EachNet.
Pire encore, Ule China va centrer sa
stratégie sur le segment le plus dynamique et le plus rentable du e-commerce
en Chine, à savoir le B2C (Businessto-Consumer).
EachNet de son côté a pour nouvelle
mission de se concentrer uniquement
sur le segment C2C (vente de particulier à particulier), modèle qui arrive
en fin de course et n’a jamais trouvé de
rentabilité réelle.
Au total, eBay se retrouve donc seul au
bord de la route, son partenaire stratégique ayant pris le large. A moins
d’un changement radical de stratégie,
à l’heure de faire les comptes, eBay
pourrait bien décider de plier bagages
dès 2010.
Peut-être de quoi consoler Google de
ses propres mésaventures…
•
Pat r ice Nor de y
M a nagi ng Dir ec tor (A si a)
L’At el i er BN P Pa r iba s
L’Atelier BNP Paribas est le centre de veille technologique de BNP Paribas.
Dans le cadre du programme DIGITAL CHINA, L’Atelier BNP Paribas conseille les entreprises depuis son bureau de Shanghai dans leur stratégie e-commerce en Chine.
www.asie.atelier.fr
Connexions / mars 2010 39
公司简讯 l’actualité / entreprises
Air Liquide a signé deux contrats à long
terme avec deux aciéristes en Chine et investira 75 millions d’euros au total pour
répondre aux besoins de ces nouveaux
clients. Cet investissement conforte la
position de premier plan du groupe sur
le marché chinois de l’acier. La Chine,
plus gros producteur mondial d’acier
(sa production a augmenté de 14 % en
2009 pour atteindre un chiffre record
de 568 millions de tonnes — près de la
moitié de la production mondiale) cherche maintenant à mieux utiliser sa capacité de production d’acier. L’usage accru
d’oxygène y contribue. Dans le cadre du
premier contrat, une unité de séparation
des gaz de l’air d’une capacité de 2 200
tonnes par jour fournira de l’oxygène et
de l’azote au groupe Bohai Steel à Tangshan, dans la province du Hebei (près de
Tianjin). Pour le second contrat, signé
avec le groupe Jianbang à Linfen, dans la
EDF : 100 000 euros
pour le futur lycée
français de Pékin
En signant un chèque de 100 000 euros,
le grand électricien français est la première entreprise à verser une contribution pour soutenir le financement du futur lycée français international de Pékin,
qui devrait voir le jour d’ici deux ans. Ce
don s’inscrit dans le cadre d’une opération de mécénat organisée par l’ADPE
(Association pour le Développement des
Partenariats d’Entreprises) pour lever des
fonds en nature ou en argent — déductible de l’impôt sur les sociétés en France
à hauteur de 60% — destinés à financer à Pékin, mais aussi en Chine, voire
hors de Chine, des lycées internationaux
français. Cette association à but non lucratif, créé en juin 2008, et dont le siège
social se trouve à Paris au comité national des Conseillers du commerce extérieur, a également reçu des promesses de
dons en numéraire et en nature d’autres
grands groupes comme Air France,
40 Connexions / mars 2010
province du Shanxi, Air Liquide investira
dans une unité d’oxygène de 800 tonnes
par jour. Ces deux unités bénéficieront
des toutes dernières technologies d’Air
Liquide Hangzhou, le centre d’ingénierie d’Air Liquide. Leur mise en service est
prévue au deuxième trimestre 2011. JeanMarc de Royère, directeur de la société,
membre du comité exécutif du groupe
supervisant la zone Asie-Pacifique, a
déclaré : « Nous remercions Tangshan
Bohai Steel et Shanxi Jiangbang pour
leur confiance. Ces contrats témoignent
de la capacité d’Air Liquide à répondre
aux besoins de ses clients en Chine en
matière de sécurité, de fiabilité, de faible
consommation d’énergie et de rapidité
des délais de construction. Les économies
émergentes sont un relais de croissance
pour Air Liquide. »
www.cn.airliquide.com
Areva, PSA, Safran, Schneider, Total et
Voelia Environnement pour un montant
à ce jour supérieur à 2 millions d’euros.
Selon son président Gérard Deleens, le
but de cette levée de fond est de faciliter
la construction d’un lycée international
aux standards des grands établissements
internationaux, tout en évitant une augmentation trop importante des écolages.
Ces aides pourraient aussi contribuer à
améliorer la qualité environnementale ou
les équipements du futur lycée.
Selon l’AEFE, l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Etranger, en charge
du projet du lycée, le montant total prévisionnel de l’opération de construction
est de 16 M€, avec un financement qui
repose sur l’apport en fonds propres de
l’agence de 2 M€, de fonds propres de
l’établissement de 3,84 M€ et sur un emprunt de l’agence à hauteur de 10,16 M€.
La charge financière de ce projet (montant des remboursements de l’emprunt +
loyer annuel du terrain) sera assurée par
l’établissement moyennant une hausse
des droits de scolarité, acceptée par les
© DR
Air Liquide : 75 millions d’euros investis
pour deux aciéristes
Le leader mondial de gaz industriels
renforce sa position en Chine.
工业气体的全球领先企业——液化空气集团巩固了在中
国市场的地位
parents d’élèves, inférieure à 25 % et répartie sur plusieurs années consécutives.
L’AEFE souligne que ces prévisions se basent sur un financement assuré intégralement par l’AEFE et le lycée français de
Pékin. Si des entreprises françaises installées en Chine participent financièrement
à ce projet, le montant de leur participation viendra en déduction de l’emprunt et
diminuera d’autant la charge de l’établissement et l’augmentation des écolages.
Prochain Forum
« travailler ensemble »
le 16 avril à Pékin
Après Shanghai le 29 janvier 2010, la
prochaine édition du Forum « Travailler
ensemble » aura lieu le 16 avril au Novotel Peace de Pékin. L’initiative lancée
conjointement par la Jeune Chambre
Economique, la CCIFC, Ubifrance et les
Conseillers du Commerce Extérieur en
2009, est devenue un rendez-vous attendu entre TPME et grands groupes français implantés en Chine. Les rencontres
或教学设备的改善。
负责学校项目的国外法语教学推广署
液化空气集团向两家钢铁企业投资
7500万欧元
( AEFE) 认 为 , 预 计 建 校 费 用 总 额 为
1600万欧元,资金来源有:国外法语教学
推广署自己出资200万欧元,学校自筹资金
液化空气集团与中国两大钢铁生
团将投资建设一套日产氧量为800吨
384万欧元,推广署贷款1016万欧元。该项
产企业签订长期合同,将投资总
的空分装置。这两套装置将蕴含集
目的财务支出(还贷款加上场地年租金)
计7500欧元以满足这两家新客户
团最先进的技术,由液空杭州——
将由学校承担,通过提高学生家长认可的
的需求。这项投资巩固了集团在
集团在华的工程中心设计制造,并
学费,涨幅低于25%,分摊在多年内连续
中国钢铁市场的领先地位。中国是
将于2011年第二季度投入运营。液
收取。国外法语教学推广署强调,这些预
世界上最大的钢铁生产国(2009年
空集团高级副总裁兼亚太地区总
算建立在该机构与北京法国国际学校完全
其产量增长14%,创下5.68亿吨的
裁、液空集团执行委员会委员戴华
承担的筹资基础上。如果在中国的法国企
新纪录——几乎达到全球产量的一
业(Jean-Marc de Royere)说:“我
业能够参与该项目的集资,它们投入的资
半),目前正力求优化其钢铁的生
们感谢唐山渤海钢铁集团和山西建
产能力。增加氧气的使用对此大有
邦集团的信任。这些合同彰显了液
帮助。第一份合同将向河北省的渤
空满足中国客户在安全、可靠、低
海钢铁集团(毗邻天津)提供一套
能耗和缩短建设周期方面需求的能
日产氧气、氮气量达2200吨的空分
力。新兴经济是液化空气集团增长
装置。第二份合同是与山西省临汾
的动力。”
市的建邦集团签订的,液化空气集
www.cn.airliquide.com
金将会减少贷款,同时减少学校的负担和
学费的增加。
第二届“协同工作论坛”将于4月16日在
北京诺富特和平宾馆举办
继2010年1月29日在上海和3月16日在香港
之后,“协同工作论坛”将于4月16日早
8:00至下午16:45在北京诺富特和平宾
馆举行,随后还将在法国大使馆举办招待
会。这一活动是2009年由北京法国青年商
会、中国法国工商会、法国企业国际开发
face à face entre entreprises permettent
d’identifier des possibilités de collaborations concrètes. Les éditions organisées
en 2009 à Pékin et à Shanghai qui ont
rassemblé 110 entreprises, dont 15 groupes cotés au CAC40 ont débouché sur la
signature de plusiuers contrats apportant
de nouveaux débouchés aux entreprises françaises. Le forum couronné par
l’attribution du trophée de la meilleure
contribution 2009 de l’UCCIFE, devrait
être dupliqué dans d’autres communautés d’affaires dans le monde, selon une
décision concrétisée le 28 octobre 2009
par la signature d’une Charte sous le patronnage de Madame Christine Lagarde.
Pour tout savoir : www.forum-travaillerensemble.fr
Record de ventes pour
DPCA en janvier
Dongfeng Peugeot Citroën Automobile,
la Joint-Venture entre Dong Feng Motors
et PSA Peugeot Citroën a vendu en janvier 37 128 voitures, soit un bond
•••
法国电力公司
署和法国外贸顾问委员会联合创办的,现
为北京法国中学捐助10万欧元
已成为驻华法国大集团与特小企业之间极
法国电力巨头签出一张10万欧元的支票,
为期待的一次聚会,企业之间的对口会谈
成为资助两年后建成的北京法国国际学校
可以发现具体合作的可能性。2009年,在
的第一家法国企业。此笔捐款列入由企业
北京和上海轮流举办的论坛聚集了110家
合作关系发展协会(ADPE)组织的捐助
企业,其中15家集团是巴黎CAC40指数的
行动中,目的是募集实物或资金为北京、
上市企业,最终签订了为法国企业打开销
中国乃至中国之外的法国国际学校提供
路的合同。论坛被法国海外工商会联盟授
资金,能为法国企业减税高达60%。该协
予“2009年最佳贡献奖”,并将为世界上
会是非营利机构,成立于2008年6月,总
其他商业团体所效仿,这一决定在法国经
部设在巴黎的法国外贸顾问委员会。协
济工业和就业部长拉嘉德的大力支持下,
会还得到了其他大集团捐助实物和资金
通过2009年10月28日签署的一项文件来具
的承诺,他们是:法国航空公司,阿海
体落实。欲了解详情,请登陆
珐,标致雪铁龙,赛峰,施耐德电气,
www.forum-travailler-ensemble.fr
道达尔和威立雅环境服务集团,捐款总
神龙公司1月刷新销售记录
额至今已超过200万欧元。协会会长戴林
神龙汽车有限公司,东风汽车与法国
(Gérard Deleens)认为,本次集资的目的
标致雪铁龙集团的合资企业,1月销售
是帮助建立一所符合国际大型教育机构标
了37128辆汽车,比2009年1月同期增长
准的国际学校,同时防止学费大幅上涨。
130.71%,比2009年12月增长13%。公
这些资助可以促进未来法国学校教学环境
司由此创造了新的月销售记录。
•••
Connexions / mars 2010 41
公司简讯 l’actualité / entreprises
Au cours du dîner annuel du comité de
patronage de la CCIFC Pékin, le 4 mars
dernier, a été annoncée la nomination de
quatre conseillers CCIFC. Ont ainsi été
nommés : Ma Songde, vice-ministre du
ministère de la Science et de la Technologie, représentant à la 8e et 9e session de
la Conférence consultative politique du
peuple chinois, maintenant en retraite ;
Mingjun Sun, actuellement consultant indépendant et secrétaire général
de l’association des anciens de l’ENA
après avoir été en poste au ministère
de l’Emploi pendant neuf ans ; Elaine
Yang d’abord diplomate au ministère
des Affaires Etrangères de Chine avant
d’occuper des fonctions de responsables
dans des grands groupes internationaux
en Chine (notamment Total et AXA),
membre actif de la Chambre Européenne et membre du bureau de la CCIFC
en 2007 et 2008 ; Hervé Machenaud,
directeur exécutif du groupe, chargé de
la production et de l’ingéniérie, est notamment à l’origine de l’expansion du
groupe EDF.
L’objectif de ces nominations est d’épauler la CCIFC dans son projet de renforcement de ses liens avec la société et le
monde économique chinois. La CCIFC
••• de plus de 130% sur janvier 2009
et une hausse de 13% sur décembre
2009. La JV établit ainsi un nouveau
record mensuel de ventes. Les ventes de
Dongfeng Citroën s’élèvent à 25 127
unités, soit une augmentation de près de
190% sur janvier 2009, tandis que celles de Dongfeng Peugeot atteignent 12
001 unités, ce qui constitue une hausse
de 61% sur janvier 2009. DPCA a également produit en janvier 36 488 véhicules,
soit un bond de près de 211% par rapport
à janvier 2009. Grâce notamment aux
nombreuses livraisons de C5, le chiffre
d’affaire du mois de janvier s’établit à
3,752 milliards de Rmb (+ 200%).
Le succès de DPCA en ce début d’année
est porté par les belles ventes de la C5
42 Connexions / mars 2010
© CCIFC
Quatre conseillers CCIFC nommés à Pékin
De g. à dr. : F. Guillemet, Mingjun Sun, N. Aniel, Ma Songde,A. de Kermadec-Bentzmann
F. Bernard, s.e.m. H. Ladsous, Elaine Yang, Y. Boutin et J. Chol.
a sollicité des personnalités représentantes du monde des affaires en Chine, de
la culture, des arts ou de l’administration
chinoise. Leur mission fondée sur le bénévolat consistera entre autre à répondre
aux demandes des membres de la Chambre sur ses sujets d’expertise, à intervenir
dans les réunions et les débats, à tenir
informée la Chambre des évolutions possibles de l’environnement économique et
réglementaire qui pourraient influencer
(5 682 unités), de la C-Quatre (12 649
unités), de la 307 (+74%) et de la 207
(+172%).
Gide Loyrette Nouel au
coeur de l’acquisition
de Numonyx par Micron
Technology Inc.
Gide Loyrette Nouel (GLN) conseille
STMicroelectronics (STM), un des tout
premiers producteurs mondiaux de composants électroniques et de dispositifs
semi-conducteurs, dans le volet chinois
de l’acquisition de Numonyx Holding
B.V. (Numonyx) par Micron Technology
Inc. (Micron). Créée en 2008, Numonyx
est une joint venture spécialisée dans la
Le 4 mars dernier étaient nommés conseillers CCIFC : Elaine
Yang, Ma Songde, Mingjun Sun
et Hervé Machenaud.
2010年3月4日,杨柳、马颂德、孙明君和马
识路被任命为中国法国工商会顾问。
les courants d’affaires en Chine et faciliter
les contacts utiles.
www.ccifc.org
production de mémoire flash fondée par
STM avec Intel Corporation (Intel) et
Francisco Partners, et qui regroupe les activités NOR de Intel, et les activités NOR
et NAND de STM.
STM, Intel, Francisco Partners et Numonyx sont parvenus à un accord définitif avec Micron aux termes duquel ce
dernier acquerra Numonyx par le biais
d’un échange d’actions. La transaction
d’un montant de 1,27 milliard USD vise
à mettre en commun les points forts de
Numonyx et ceux de Micron, dont son
important catalogue de produits mémoires pour ordinateurs et téléphones
portables. La transaction doit encore être
validée par les autorités réglementaires et sa réalisation reste soumise aux
•••东风雪铁龙的销量达到25127辆,比
目的在于使Numonyx和Micron这两家公司实
2009年1月同期增长190.82%,而东风标致
现强强联合,其中包括为电脑和手机提供
的销量达到12001辆,比2009年同期增长
大量的内存产品。此项交易还要经过监管
61%。神龙公司1月生产了36488辆汽车,
部门的审批,并受到惯常成交条件的影响
比2009年1月激增了210.93%。尤其凭借
才能完成。为交易提供咨询的基德顾问团
餐,法国驻华大使苏和阁下出席了这次
C5的大量交付,1月营业额增加了两倍,
队设在北京,由合伙人华晓军和资深协调
晚餐会。会上,中国法国工商会会长甘
达到37520亿元。神龙公司一开年的成功是
员Marianne Ramel组成。
安懿和总经理杨磊宣布任命四位中国法
由东风雪铁龙C5(销售了5682辆)、东风
www.gide.com
国工商会顾问。被任命的顾问有:马颂
雪铁龙世嘉(销售了12649辆)、东风标致
系列讲座- 中国今日法治
307(增长74%)和207(增长172%)的热
中国法国工商会, 大陆法系基金会与法国文
卖所带来的。
化中心一起设计的系列月度讲座。讲座目
基德参与Micron收购Numonyx的业务
的:
基德律师事务所为意法半导体就Micron收
律的角度探讨社会问题;在全球化及中国
国际集团驻华机构的负责人(主要在道
购Numonyx中国部分的业务提供咨询。意
法律正处于法律传统演变的十字路口之背
达尔和安盛集团),欧盟商会的活跃会
法半导体是世界最大的电子元件和半导体
景下,讨论大陆法,并赋予它新的意义。
员以及中国法国工商会2007和2008年理
器件生产商之一。Numonyx是意法半导体
系列讲座集合了中外专家来探讨时下的热
事会理事;马识路,法国电力集团亚太
2008年与英特尔和Francisco Partners合资成
点话题。讲座将对广大参与者开放
立的闪存企业,整合了英特尔的NOR业务和
司,法律从业人员,学生,或者希望更深
意法半导体的NOR、NAND业务。
入地了解中国法律演变的朋友。
意法半导体、英特尔、Francisco Partners和
第一期
国商界、文艺界及政界的重要人士。以
Numonyx与Micron达成了一项最终协议
中国环境法:现状、挑战与未来
义务工作为基础,这些顾问的使命包括
根据协议,Micron将以股票交易的方式收购
3月31日,18 : 30-20 : 30,北京法国文化中心
回答商会会员在各自熟知领域的问题;
Numonyx。此项金额为1.27亿美金的交易
演讲者:王灿发,中国政法大学
在北京任命四位中国法
国工商会顾问
3月4日,中国法国工商会在北京万达索
菲特大饭店举行了协助委员会的年度晚
德先生,科技部副部长,第八、第九届
全国政协委员,现退休;孙明君先生,
曾在人保部任职9年,现为法国国家行政
学院中国学友会独立顾问和秘书长;杨
柳女士,曾是中国的外交官,后任大型
区总裁,获法国荣誉勋位骑士勋章。
任命这些顾问的目的在于帮助中国法国
工商会加强与中国社会和经济界的联
系。中国法国工商会联系了一些代表中
参加会议和辩论会;告知商会在经济和
。
介绍中国法律及此领域的专家;以法
:
公
•••
法规环境方面可能的变化,这些变化可
能影响中国的商业走向以及便于有用的
联系。www.ccifc.org
conditions habituelles de clôture.
Cycle de conférences
« la Chine et son droit »
La CCIFC, la Fondation pour le droit
continental et le centre culturel français
de Pékin ont conçu un cycle de conférences mensuelles avec pour objectif de
faire connaître le droit chinois et ses experts, d’aborder les questions de société
par le droit, de débattre et de valoriser
le droit continental dans la globalisation
— le droit chinois étant de « tradition »
civiliste. Réunissant des experts chinois
et étrangers autour de thématiques d’actualité, les conférences sont ouvertes
à un large public : entreprises, juristes,
étudiants ou simples curieux de
•••
Connexions / mars 2010 43
公司简讯 l’actualité / entreprises
Vector Design Group signe le siège
social de Handan Hansteel
深圳维度艺术设计公司
签下邯钢总部大楼的合
同
Le cabinet international d’architecture
et d’urbanisme co-fondé par l’architecte
Gabriel Delage en 2002 se voit confier
le projet du siège social de Handan
Hansteel, un des leaders mondiaux de
la métallurgie, également un des principaux fournisseurs des matériaux du
Nid d’Oiseau. Handan Hansteel qui
a acquis un terrain de 130 000m 2 à
proximité de son centre de production
et du centre-ville a souhaité qu’un hôtel
5 étoiles d’une capacité de 300 chambres soit associé à ses nouveaux bureaux.
Pour répondre à la demande du géant de
l’acier, Gabriel Delage et son associé le
designer Matthieu Augereau ont conçu
une tour de verre de 150m de haut qui
sera un point de repère incontournable
dans une ville où la hauteur maximale
des bâtiments est de 99 m. « Nous avons
imaginé un bâtiment unique intégrant
les bureaux et leurs services (cafétéria,
salles de réunion et d’exposition, club
de sport…), la station de télévision de
Hansteel Group et l’hôtel. Ce complexe
à l’echelle de son environement est associé à un très vaste jardin « à la française »
intégrant un lac et une forêt d’arbres
permettant de revitaliser ce quartier en
développement. La façade sud est une
由法国建筑师Gabriel Delage合伙创办
于2002年的国际性建筑与规划设计公司
承接了设计邯郸钢铁集团总部大楼的
项目;邯钢是世界冶金业的领先企业之
一,也是鸟巢钢材的主要供货商之一。
邯钢在距其生产基地不远、市中心的位
置得到了一块13万平方米的土地,希望
建起一座有300间客房接待能力的5星级
酒店与其新办公室配套。为了满足这
家钢铁巨头的要求,Gabriel Delage与设
计师合伙人Matthieu Augereau设计出一
© DR
座高150米的玻璃大楼,这将成为建筑
Image en 3D du futur siège de Hansteel
未来邯钢总部的三维效果图
Group. Un quatrième point de
vente à Shanghai pour
Christofle
Présent à Shanghai depuis plus de dix
ans avec trois points de vente, Christofle
44 Connexions / mars 2010
标。“我们设想出一座独一无二的建
筑,兼纳办公室和服务设施(咖啡吧、
会议室、展厅、健身房等),以及邯钢
sorte de grand rideau de verre en continuité avec le paysage, la façade Nord est
plus close, tournée vers la ville. Dans la
logique de notre politique d’intégration
dans l’environnement, nous avons cherché à optimiser les économies d’énergie
en proposant un bâtiment compact (dont
la géometrie répond aux contraintes climatiques) ainsi que divers systèmes liés au
confort intérieur en réponse à la pollution
environnante. » précise Gabriel Delage. Le
début des travaux devrait avoir lieu avant
la fin de l’année.
集团的电视台和酒店。这座建筑综合体
的周边环境将配有一座巨大的法式花
园,包括湖和树林,能够重新为这片发
展中的社区注入活力。建筑的南表装上
一种大玻璃窗帘作为风景的延续,北面
朝着市里,相对闭塞。在我们“融入环
境”理念的指导下,我们力图最大程度
地节约能源,推出一座结构紧凑的大楼
(其几何学原理符合气候要求)以及符
合环保标准的涉及室内舒适度的各种系
统。”Gabriel Delage介绍说。工程将于
年底之前开工。
fondateurs il y a 180 ans. Avec ce nouveau point de vente à Shanghai, la marque étend son implantation et se prépare
à conquérir Pékin en 2010.
www.christofle.com
© DR
•••l’évolution du droit en Chine. Pre-
mier rendez-vous : « Le droit de l’environnement chinois,
caractéristiques,
défis et perspectives » le 31 mars 2010 à
18h30 au CCF de Pékin. La conférence
sera présentée par Wang Canfa, professeur à l’université de droit et de sciences
politiques de Chine, directeur du centre
d’assistance juridique des victimes de
la pollution, elu. Inscriptions sur le site
www.ccifc.org.
物最高为99米的城市里无可争议的地
vient d’inaugurer une quatrième boutique dans le temple du luxe, le Plaza 66.
Ce magasin situé au quatrième étage
présente une large collection d’objets de
décoration, de table ainsi que des pièces
exclusives de haute orfèvrerie. Symbole
de luxe et d’élégance, Christofle insuffle
à chaque époque un nouvel art de vivre,
tout en perpétuant l’esprit pionnier de ses
Shanghai Trio
l'art de vivre francochinois dans la capitale
Les collections et les sélections d’objets
Shanghai Trio seront disponibles dans la
capitale chinoise à partir du mois de mai
2010.
L’enseigne shanghaienne ouvre sa première boutique pékinoise au cœur du récent quartier commerçant du “Village” à
Sanlitun.
Des accessoires de mode (sacs,
•••
公司简讯 l’actualité / entreprises
•••
écharpes, pochettes) et pour la
maison (plaids, housses de couette,
nappes), une collection de vêtements
enfants, Shanghai Trio, crée des beaux
objets pour tous les jours au croisement
de savoir-faire traditionnels chinois et de
design moderne, en alliant des matières
naturelles à des tissus plus innovants.
Fondé en 1998, Shanghai Trio engagé
dans la recherche d’un commerce durable, emploie 45 personnes en Chine.
www.shanghaitrio.com
Bureau Veritas impliqué dans la
construction du pavillon Monaco
de l’EXPO 2010
Le 18 Janvier dernier, Bureau Veritas a
signé un contrat de supervision de la construction du pavillon de Monaco. Après
celui de la France, de l’Italie, de Madrid,
de la région Rhones-Alpes, de la Suède et
de la région Ile de France, le pavillon de
Monaco est la septième implication de
Bureau Veritas sur l’exposition universelle
de Shanghai. Le pavillon de Monaco, situé sur la rive Est de l’EXPO, exposera entre autres, les éléments typiques de son
environnement naturel et urbain qui ont
contribué à la renommée mondiale de la
principauté.
•
46 Connexions / mars 2010
•••教授,污染受害者法律援助中心主
世界上的第10家销售点——位于三里屯
任。
Village商业区的中心。
注册请访问 www.ccifc.org.
时尚服饰(手提包、围巾、小袋),家居
用品(毛毯),儿童成衣,上海组合设计
昆庭的第四家专卖店落户上海
了兼具中国传统工艺和现代设计的日常用
拥有三家专卖店的昆庭在上海落户已有
品,结合了天然的材质与创新的布料。
10年,目前在上海奢侈品的殿堂——恒隆
上海组合创建于1998年,投身于寻求可持
广场为第四家专卖店揭幕。专卖店位于恒
续的商业发展,在中国拥有45名员工。
隆广场四楼,展示了昆庭收藏的众多家居
www.shanghaitrio.com
装饰品、餐具和高级定制银器。凭借银器
制品成为奢华和优雅的标志,昆庭从未停
必维集团参与2010年上海世博会摩纳哥
止过创新,并引领着各个时代的生活艺术
馆的建设
风尚。通过传承品牌创立人的前沿理念,
2010年1月18日,必维集团签订了监督摩纳
拥有180年的专业技能和顶级制作,昆庭已
哥馆施工的合同。继法国馆、意大利馆、
在全球范围内发展成功。随着新专卖店在
马德里馆、罗纳-阿尔卑斯大区馆、瑞典馆
上海开业,昆庭扩大了其经营场所,并准
和巴黎大区馆之后,摩纳哥馆是必维集团
备2010年打进北京市场。
参与上海世博会的第七个项目。摩纳哥馆
www.christofle.com
位于上海世博会园区黄浦江的东岸,其中
将展出摩纳哥自然环境和城市环境最具代
上海组合终于在北京开店
表性的元素,这些元素使摩纳哥公国闻名
上海组合体现不同文化的饰品和家居用品
于世。
将从2010年5月1日起在北京有售。这一上
海品牌在北京开了第一家店,也是它在
•
软文广告
© PSA
publi-reportage
Lancement de la nouvelle Peugeot 408 en première mondiale le 25 janvier à Pékin.
2010年1月25日,东风标致408在北京全球首发上市
Peugeot dévoile en première mondiale
à Pékin sa nouvelle 408
全球首发
东风标致408震撼上市
Une étape déterminante de l’offensive de la marque au
1 月 25 日 , 东 风 标 致 408 在 北 京
全球首发上市。这是标致汽车品牌
创 立 120年 以 来 , 首 次 在 海 外 市 场
全球首发其最新一代车型。这不仅
显示出中国市场日渐提升的重要地
位,更凸显标致汽车乃至PSA标致雪
铁龙集团的中国战略重心的进一步
确立。
作为标致品牌的全球车型,408在
研发设计之初就充分考虑并立足于包
括中国在内的全球主要市场的消费者
需求,是一款为消费者悉心打造的、
具有欧洲技术血统的魅力之车。长度
超过4.68米、宽度超过1.81米,尤其
是2.71米的超长轴距,足以让它在同
级竞争对手中跃然而出。大气均衡的
车身造型,宽敞舒适的大器空间,精
致细腻的内饰质感以及全面高档的人
性化智能装备,令其拥有者在进入座
舱的瞬间即可领略超然气度,尽享从
容自在的驾乘感受。在中国进行全球
首发之后,408还将陆续投放到世界
其它市场增长强劲的国家和地区。
此次上市的东风标致408系列共有
7款车型,分为舒适版、豪华版、尊贵
版三种配置版本,以配备CVTS-II技术的
2.0L发动机为主打产品。
Lion sur le premier marché automobile du monde.
Présentée en première mondiale
le 25 janvier à Pékin, la nouvelle
Peugeot 408 est une nouvelle étape
de l’offensive de la marque sur le
premier marché automobile au
monde.
Ce nouveau tri-corps, statutaire et adapté
au marché chinois, vient ainsi renforcer
l’offre produit de DongFeng Peugeot sur
un segment qui couvre plus de 45 % du
marché total.
La nouvelle DF Peugeot 408 devrait ainsi permettre à la marque au Lion d’accroître ses volumes de plus de 30 % en 2010
par rapport à 2009, en doublant ainsi la
croissance prévue du marché.
Cette berline tri-corps, à architecture
semi-haute, dessinée et conçue en commun avec les équipes du style Peugeot en
Europe et en Chine, répond à trois objectifs :
• incarner la modernité de la marque,
• garantir une sécurité maximale,
• offrir une habitabilité incomparable.
La 408 suit la logique d’appellation
de la marque au Lion
Le chiffre 4 est en rapport avec la dimension de la voiture (4,68 m) et le positionnement dans le segment des berlines familiales de moyen-haut de gamme. Le 0
central signe l’appartenance à la marque
Peugeot tandis que le 8 exprime la toute
dernière génération du véhicule.
Avec cette dénomination, la 408 trouve
naturellement sa place à l’intérieur de la
gamme Peugeot actuelle et initie la série
des 8, véhicules de dernière génération,
au sein du marché Chinois.
La DongFeng Peugeot 408, fruit des travaux de la joint-venture entre PSA Peugeot Citroën et le groupe Chinois DFM,
est produite dans l’usine de Wuhan dans la
province du Hubei en Chine, et se positionne comme une des principales références du marché avec un objectif de ventes
de 100 000 unités en année pleine.
•
•
Connexions / mars 2010 47
© Imagine China
中小企业简讯 l’actualité / PME
Le show organisé pour le lancement du dernier film de Jackie Chan à Pékin.
成龙新片首映礼在北京举行
Des ballons d’Airstar pour éclairer en Chine
Créé en 1994, l’inventeur et leader mondial du ballon éclairant Airstar, déjà présent dans
quarante pays, s’attaque au marché chinois.
« Airstar est devenu la lumière référence
au cinéma ». Difficile de contredire Stéphane Bihorel, le directeur Chine de l’entreprise, lorsqu’il énumère quelques-unes
des multiples grosses productions dans
lesquelles les ballons éclairants d’Airstar
ont été utilisés : Avatar, Titanic, Mission Impossible, Harry Potter, etc. Et ce
succès commence à s’épanouir en Chine.
D’autant mieux que, pour pénétrer le
marché, Stéphane bénéficie d’un soutien
de poids, en la personne de Jackie Chan.
Plus qu’un sponsor, « il est notre parte48 Connexions / mars 2010
naire. C’est sur le tournage de Rush Hour
que Jackie a découvert Airstar. Il a immédiatement eu envie de distribuer nos
produits... » La star du film d’action s’est
donc engagée financièrement dans le bureau installé il y a deux ans à Hong Kong,
et a contribué à faire découvrir les ballons
éclairants sur les plateaux asiatiques.
Un éclairage homogène
Ce système d’éclairage homogène à 360°,
inventé en 1994 par Pierre Chabert, semble a priori relativement simple : une
source lumineuse habillée d’un tissu qui
permet de multiplier sa puissance éclairante « par deux ou par trois ». Mais la
force du produit se situe surtout dans sa
souplesse d’utilisation. D’abord, ces ballons fabriqués en France sont faciles et rapides à installer. L’idéal pour une équipe
de secours qui doit établir rapidement un
dispositif de sécurité. Ce n’est pas un hasard si les pompiers de Paris, de New York
et de Tokyo notamment, et dernièrement
en mission sur la catastrophe d’Haïti, se
sont équipés chez Airstar. Son étanchéité,
l’absence d’éblouissement et d’ombres
portées, ainsi que son rendu très proche
de la lumière naturelle en font par ailleurs
un système très utile pour le travail de
nuit sur les chantiers de construction.
C’est dans ces deux domaines d’application que les ventes en Chine ont le mieux
commencé, depuis l’ouverture des bureaux de Shanghai et de Pékin en 2009.
Une implantation qui est intervenue
concomitamment à l’obtention du prix
PME « CCI International Chine », qui
récompense le projet de développement
en Chine continentale le plus prometteur.
Avec la naissance de la Wofe fin avril et
l’implantation prochaine dans des villes
comme Shenzhen et Tianjin, le potentiel
de développement semble important.
Pour autant, le « démarrage est un peu
lent », reconnaît Stéphane Bihorel. « Ce
n’est pas facile de faire évoluer les mentalités. En Chine, nous sommes dans
la culture du ‘’on achète, on utilise, et
on jette’’. Or nos produits sont conçus
pour durer plusieurs années... » En plus,
le haut niveau de technicité génère un
coût élevé que peu de Chinois sont prêts
à mettre aujourd’hui. Pourtant, « dès
que l’on peut faire des démonstrations,
c’est magique, le produit leur plaît beaucoup. » Le directeur en veut pour preuve
que des contrefaçons ont déjà été trouvées à Shenzhen...
Dans sa démarche commerciale, Stéphane Bihorel veut « garder autant que
possible la main mise sur la distribution,
en conservant en particulier la partie cinéma. Pour le reste, il faudra rester proche des distributeurs, et développer une
« approche éducative » de la présentation
du produit.
Autre objectif affiché : développer la partie événementielle. Des shows comme la
soirée Jackie Chan, pour le lancement du
film Little Big Soldier, au stade de Wukesong (voir photo). « J’aimerais également
faire davantage de sur mesure pour les
clients. Par exemple proposer de reproduire en ballon les mascottes bleues de
l’Exposition Universelle de Shanghai ».
Une occasion rêvée pour séduire une fois
pour toutes les acheteurs chinois.
•
M a n u el R a mbau d
Pou r e n s avoir plus : w w w. A is ta rl igh t.com
Airstar的灯光开始在中国大放异彩
“ Airstar已 成 为 电 影 拍 摄 中 参 照
里,产品在中国的销售一开始就非
使用的照明设备”。当公司中国区经
常好。这两个办事处的设立伴随着
理Stéphane Bihorel举出用Airstar气球灯
Airstar荣获“中国国际工商会”最佳
拍摄的电影巨作中的其中几部时,如
中小企业奖应运而生。这一奖项用
《阿凡达》,《泰坦尼克号》,《谍
于奖励在中国大陆最有前途的发展项
中谍》,《哈里波特》等,我们很难
目。随着4月底全资公司的建立以及
去反驳他所说的话。而且,这一成功
今后在深圳和天津等城市的落户,发
开始影响中国,更加可喜的是,为了
展的潜力似乎很大。然而,Stéphane
进入中国市场,Stéphane得到了电影
Bihorel承认:“启动有些慢”。“让
界重量级人物成龙的支持。他不仅仅
人们改变观念不容易。在中国,我们
是赞助者,“也是我们的合作伙伴,
处在“购买,使用,扔掉”的文化之
成龙是在拍摄《尖峰时刻》时发现
中。而我们产品是为了使用多年而设
了Airstar。他马上想要代理我们的产
计的……”而且,高技术技能产生高
品……”因此,成龙为2年前公司香港
费用,只有少数中国人准备现在投
办事处的成立投资,并在亚洲舞台上
入使用。然而,“一旦我们做些展
推广气球状照明设备。
示,很神奇,他们非常喜欢我们的产
这一360度亮度均匀的照明系统是
由Pierre Chabert在1994年发明的,理论
上说比较简单:用布罩住光源从而使
品。”深圳已经发现了仿冒品,这位
经理以此证明产品非常受欢迎。
在
商
业
推
广
中
,
亮度增加2-3倍。但产品的长处主要在
Stéphane Bihorel希 望 “ 尽 可 能 掌 握
于其使用的灵活性。首先,这些在法
产品的销售,尤其要保留电影部分的
国生产的气球灯安装起来简单快捷,
销售。至于其它行业,应该与代理商
对于一个要迅速搭起安全设施的救援
紧密联系,同时开展介绍产品的培
队而言是理想之选。巴黎、纽约和东
训”。
京及最近在海地地震中执行任务的消
另一个确定的目标:开发大型活
防队员们都使用Airstar的照明系统并非
动。比如成龙在北京五棵松体育馆为
偶然。此外,气球灯的防水性、无眩
电影《大兵小将》举行的首映礼。
光、无阴影以及接近自然光的特点对
(见图片)“我也希望为客户提供更
建筑工地夜间施工来说也是非常有用
多量身制作的方案,比如建议把上海
的照明系统。
世博会的蓝色吉祥物做成气球灯”。
自从2009年上海和北京办事处
•
一次最后吸引中国买家的绝好机会。
建立以来,正是在这两个应用领域
Connexions / mars 2010 49
专访 l’entretien
Le double « je » de Zhang Yaling
Zhang Yaling, à 47 ans, a réussi. Directrice générale et représentante d’Archos
Asia Ltd, elle est revenue au pays en 2003 pour vendre le MP4 après un séjour de
14 ans en France. Auteur d’un blog très suivi, vice-présidente de l’Association des
implantations étrangères de Shenzhen, cette hyperactive fut aussi représentante
(sans droit de vote) des Chinois d’outremer lors de la 11e session de l’Assemblée
consultative du peuple chinois (CPPCC).
Zhang Yaling, directrice générale d’Archos Chine,
Connexions : Comment vous êtes-vous retrouvée en
France au début 1990 ?
Zhang Yaling : J’ai suivi mon mari physicien
chercheur invité au CNRS. A l’époque, j’ai
dû démissionner de mon poste de professeur de droit pénal à l’université Zhenfadaxue, (中国政法大学) une des meilleures
de Pékin, où j’avais enseigné 5 ans. A la fin
des années 80, même avec un bon poste,
tout le monde voulait s’exiler. On était prêt
à devenir plongeur pour partir à l’étranger.
Les jeunes Chinois d’aujourd’hui ont du
mal à saisir le décalage de l’époque entre
notre niveau de vie et celui de l’Occident.
J’ignorais ce qu’était un supermarché,
une salle d’eau chez soi. Pour eux, c’est de
l’histoire ancienne. Pour moi, c’est l’histoire de ma vie.
C. : Avez-vous éprouvé un choc culturel en arrivant
en France ?
Z. Y. : A la fin des années 80, il était si difficile de quitter la Chine qu’une fois partie, on se sentait libre, presque au paradis.
Mais l’arrivée en France fut rude. J’avais en
tête des romans, des films, je rêvais d’une
vie royale et je me suis retrouvée à Gif-surYvette dans un deux pièces de 40 mètres
50 Connexions / mars 2010
carrés à la décoration banale. Je me suis
inscrite à l’Alliance française, j’ai cherché
des petits boulots. J’ai repris des études de
mode, puis d’économie. J’ai travaillé chez
René Château Vidéo, pour des agences
de voyage chinoises qui me permettaient
de garder le contact avec la Chine tout en
voyageant gratuitement. J’ai même passé
un BEP de couture.
Mon obsession : mieux connaitre la culture française. En Chine, un proverbe dit que « s’habiller, manger, habiter et voyager (衣吃住行) sont les quatre clés d’une
culture ». Je me suis attelée à cette tâche de
tout mon cœur.
C. : Pourquoi entrer chez Archos ?
Z. Y. :Je suis entrée par la petite porte en
1999 à 37 ans comme stagiaire. J’avais
un DESS d’économie français en poche.
Cette PME de haute technologie me plaisait parce qu’elle représentait le futur. Et,
contrairement aux grandes compagnies,
elle avait vraiment besoin de quelqu’un
comme moi. Ils avaient commencé à fabriquer en Chine, et cherchaient des composants. J’ai négocié tout de suite un poste
de cadre.
C. : Pourquoi emmener Archos en Chine ?
Z. Y. : A mon entrée dans la société début
2000, Archos venait de lancer sur le marché le premier baladeur MP3 du monde.
J’ai insisté trois ans auprès du fondateur,
Henri Crohas, pour l’exporter en Chine.
J’étais persuadée qu’il fallait le faire le
plus tôt possible pour occuper le terrain
et cela coïncidait avec mon désir de revenir au pays, la tête haute, avant 40 ans, en
rapportant quelque chose d’utile pour la
Chine. Aujourd’hui, je suis prête à faire la
même chose pour la France. Les Chinois
se sont développés tellement vite qu’ils
ont maintenant plein de bonnes idées : les
nouvelles PSP chinoises à 300 Rmb, avec
les mêmes fonctions et une bonne qualité,
les nouveaux mini-portables PC à 1 500
Rmb.
C. : Que représente pour vous la France ?
Z. Y. : C’est mon pays d’adoption. Il fait
partie de ma vie. J’y vais une semaine tous
les trois mois. Je cherche à favoriser les
liens entre mes deux pays.
C. : Quels messages faites-vous passer ?
Difficile de résumer en trois phrases.
Concrètement, quand je rencontre un
张亚玲的双重“我”
47岁的张亚玲成功了。作为法国爱可视亚洲股份有限公司董事总经理,2003年,她在
法国旅居13年后回国,把MP3、MP4卖到中国。积极活跃在各个领域的张亚玲,是一
位点击率很高的博主,并担任深圳外商投资企业协会副会长,还是全国政协第十一届
© DR
第一次会议海外列席委员。
se veut aussi une ambassadrice de la culture française.
法国爱可视亚洲股份有限公司董事总经理张亚玲,法国文化转播的使者。
problème, j’essaie toujours d’expliquer les
réactions de l’autre, son raisonnement. Je
dirige en Chine pour Archos une équipe
de 50 personnes en direct, plus deux
usines indirectement. Il y a toujours des
malentendus avec les sous-traitants. Ma
tactique, c’est de mélanger les deux façons
de faire, d’observer les deux points de vue,
avec en ligne de mire, le meilleur résultat
possible, en maintenant le lien. C. : Pensez-vous qu’être une femme facilite ce rôle
d’intermédiaire ?
Z. Y. : Oui, c’est un atout. Nous avons un
sixième sens et nous devons être flexibles
tout au long de notre vie. Je m’intéresse
à la psychologie. J’observe la réaction des
gens pour éventuellement changer d’attitude. On me reproche parfois de jouer
double jeu mais au contraire, cette souplesse, cette faculté d’adaptation, c’est précisément ma force. Pour comprendre deux
groupes, il faut savoir s’adapter. J’essaie de
comprendre la nuance, le ton. Il y a beaucoup de Chinois qui parlent bien français
mais manquent de nuance. Il faut savoir
se positionner. A mon âge, je suis passée
par pas mal de choses…
•••
《联结》:1990年,您为什么远赴法国?
我随我先生去的法国。他是一位研究物理
的科学家,受邀到法国国家科学研究中
心。那时,我不得不辞去政法大学刑法老
师的职务,我在那里已经任教5年。上世
纪八十年代末,即便有一份很好的职业,
所有人也都想出去看看。大家已经准备好
出国闯荡。如今的年轻人很难想象我们当
时的生活水平与西方有多大差距。我不知
道什么是超市、什么是家中的浴室。对于
他们来说,这是很久远的历史了。对于我
来说,这是我经历过的历史。
《联结》:刚到法国时,您有没有感到文
化的冲突?
八十年代末,人们很难离开中国,一旦出
国,就觉得自由了,到了天堂。但是初到
法国很艰辛。我满脑子的小说、电影,梦
想着金碧辉煌的生活,却发现自己在Gifsur-Yvette一间装修普通的40平米的两居
室里。我报名参加法语联盟的培训,找些
零工。我学习服装设计,然后学经济。我
在René Château Vidéo 电影公司工作过,
还在中国旅行社里做过导游,这让我与中
国保持着联系,并且可以免费旅游。我还
拿到了服装从业证书。我总是抱着好好了
解法国文化的念头。中国人常说,衣食住
行,其实对于一个国家文化的了解就是了
解它的衣食住行。我全心全意对待这项任
务。
《联结》:您为什么加入法国爱可视?
1999年,37岁的我通过别人的介绍以实习
生的身份进入法国爱可视。我当时拿到了
法国经济专业的硕士学位。我喜欢这家法
国高科技企业因为它代表着未来。与大
公司不同的是,爱可视的确需要象我这样
的人。他们当时已经在中国生产,采购一
些组件了。不久,我就谋得了一个管理职
位。
《联结》:为什么把爱可视带到中国?
2000年,我进入爱可视时,公司刚把世
界上第一个MP3播放器投放市场。我用了
3年时间说服公司的创始人Henri Crohas把
MP3卖到中国。我坚信必须尽早这么做以
便占得先机,而且这与我40岁前骄傲地回
国的愿望不谋而合,并为我的国家带来有
用的东西。如今,我准备为法国也这么
做。中国发展得如此之快以至现在有许多
好的想法:在中国,新的PSP才卖300元,
具有同样的功能和很好的质量,新的微型
笔记本电脑才卖1500元。
《联结》:现在,法国对您来说意味着什
么?
是我旅居的国家。我不能割舍法国,它是
我生命的一部分。我每个季度去法国待上
一星期。我力图拉近两个国家的距离。
《联结》:您扮演什么角色,传递了什么
信息?
很难用三言两语来总结。具体来说,当我
碰到问题的时候,我总是试着解释对方
的反应,其行为背后的理由。如果我不
在,谈判往往进展不顺。我直接领导着爱
可视在中国的50名员工,间接管理着两家
工厂。与分包商总有一些误会。我的策略
是:混合两种做法,研究两种看法,以得
到尽可能好的结果为准线,并保持联系。 《联结》:您是否认为身为女性更容易扮
演中间协调人的角色?
是的,这是一个优势。我们女性有第六
感,一生中要不断变通。就我个人而言,
自从我做老师起,就对心理学感兴趣。我
观察人们的反应从而改变态度。有时人们
指责我耍两面派,但恰恰相反,这种灵
活性和适应能力正是我的长处。为了理解
双方,必须学会适应。我试着理解细微差
异和谈吐举止。很多中国人说法语说得很
好,但缺乏细腻。必须学会自我定位。在
我的年纪,我经历了很多事情......
《联结》:您为什么开博客?
为了发展业务。2006年,我在这行已经小
有名气,因此一家公关公司找到我,想做
一个关于高科技的博客。我想给他们更
感性的一面来吸引网友。通过讲述我在中
国和法国之间的生活为一家高科技企业效
力,我不会刻意去说实情,而是为爱可视
吸引潜在的年轻客户。这是我做市场营销
的手段。
《联结》:为什么对爱可视如此忠
诚......
我对爱可视的感激永远不够。上世纪九十
年代,中国人在法国过得非常艰辛。我
的老板给了我一个“舞台”,让我能够回
国,并在中国无拘无束地做我想做的事。
我工作很努力,很少休假。爱可视,是我
的职业生涯。在中国,是我的孩子。我招
聘的所有员工都很忠诚。
《联结》:透过深圳,您怎么看待中国的
变化?
我要说明的是我的观点是一个北京人的观
点。南方大城市深圳与北京差别很大。
深圳是一座国际化的城市、外来
•••
Connexions / mars 2010 51
© DR
专访 l’entretien
Zhang Yaling a créé un blog très fréquenté.
••• C. : Vous avez créé un blog . Pourquoi ?
1
Z. Y. : Pour développer les affaires. Comme
j’étais assez connue dans mon domaine en
2006, une agence de relations publiques
est venue me chercher pour faire un blog
sur les hautes technologies. J’ai préféré lui
donner un côté plus sentimental pour attirer les Internautes. En expliquant ma vie
entre la France et la Chine au service d’une
entreprise de haute technologie, je cherche
à accrocher des jeunes clients potentiels
pour Archos. C’est ma façon de faire du
marketing.
C. : Pourquoi cette fidélité à la société Archos… ?
Z. Y. : Je ne remercierai jamais assez Archos.
Dans les années 90, la vie en France était
très dure pour les Chinois. Mon patron
m’a donné une « scène », m’a permis de
rentrer en Chine, d’y faire librement ce
que je souhaitais. Je travaille beaucoup, je
prends très peu de vacances. Archos, c’est
ma vie professionnelle. En Chine, c’est
mon enfant. J’ai recruté toute l’équipe
qui est très fidèle.
C. : De Shenzhen, comment voyez-vous changer la
Chine ?
Z. Y. : Je tiens à préciser que mon point
de vue est celui d’une personne d’origine pékinoise. Shenzhen, métropole du
sud, est très différente de Pékin. C’est
une grande ville internationale, une ville
52 Connexions / mars 2010
张亚玲的博客点击率很高。
d’émigrés, peuplée de gens simples, modestes et réalistes, pour qui l’argent est
le signe essentiel de la réussite. Mais les
choses changent….Avec des amies qui ont
réussi dans les affaires, nous avons créé
un groupe de poésie. Nous organisons des
soirées « chic ». Nous parlons décoration.
Au début de mon séjour, en 2003, j’avais
plus de mal à rencontrer des gens qui partagent mes goûts. Aujourd’hui, mes amies
se rendent compte que, pour être heureuses, elles ont besoin d’autre chose que d’argent. Ces femmes libres, certaines divorcées, commencent à s’intéresser vraiment
au monde hors de Chine. Elles veulent
m’accompagner quand je vais en France,
pour aller au-delà d’une première visite où
elles ont fait des sauts trop brefs sans rien
voir, ni sentir. Elles veulent séjourner une
semaine, vivre à la parisienne…. Pour
elles, la vraie culture vient d’Europe plutôt
que des Etats-Unis.
C. : Comment voyez-vous la Chine d’ici 20 ans ?
Z. Y. : Il y a 20 ans, les Chinois se sentaient
« paysans ». Maintenant ils ont la tête
haute. Les femmes se sentent aussi élégantes que les Européennes. Si ma génération
ne parle pas anglais, les jeunes s’expriment
dans la langue des étrangers, ce qui leur
donne confiance en eux. Je suis persuadée que la Chine va s’exprimer de plus en
plus sur la scène internationale sur tous les
plans : politique, économique et culturel.
Mais il lui faut garder un équilibre.
J’ai vécu des moments très durs. Mon père
était un aristocrate mandchou, considéré
comme droitier. J’ai connu une enfance
terrible. Mais aujourd’hui ma vie en
Chine ressemble beaucoup à ce qu’elle
était en France. Finalement, les Français et
les Chinois se ressemblent. Ils sont un peu
compliqués, marqués par leur culture.
C. : Comment faites-vous pour vous positionner
entre la France et la Chine ?
Z. Y. :Je me sens très proche des femmes
françaises mais avec les Chinois, surtout
s’ils ne parlent pas de langues étrangères,
je ne dis pas que je me sens française. Cela
voudrait dire que je me désolidarise de ma
famille, de mon groupe. Les vicissitudes
de la vie m’ont obligée à réfléchir et, en
travaillant dans une grande société française, j’ai pu vivre des expériences uniques. Aujourd’hui j’ai rencontré tellement
de sortes de Français dans des situations
différentes que je me sens partout à l’aise.
Je n’éprouve plus de choc culturel.
La plus forte image que je retiens de Paris
c’est celle-ci, triste mais très subtile : au
bord de la Seine, près de l’Eglise américaine, en novembre, je vois avancer de
vieilles personnes seules promenant leur
chien. Il n’y a plus de feuilles aux arbres,
la terre est sèche. Cette marche solitaire
évoque les derniers jours d’une vie, la fin
d’un film. Pour moi, le charme de Paris,
c’est cette mélancolie automnale qui me
fait réfléchir. Paris m’a beaucoup donné
et je veux le lui rendre en l’aidant à vendre le « rêve français ». Je suis convaincue
que pour vendre des produits français, il
faut savoir allier l’image de la France et de
ses produits. J’ai vendu mes MP3 Archos,
sous le slogan 品味法国时尚 « l’élégance
et la mode française ». Si Ipod, notre
concurrent était le Coca-cola américain,
Archos serait le bon vin, le raffinement
et la grâce, l’exception. Derrière un produit français, il ne faut jamais oublier
qu’il y a la France.
•
Propos r ecu eil l is
pa r A n n e G a r r igu e
et Sophi e L av ergn e
1
son blog jusqu’à 3 million de clics
2
全国政协第十一届第一次会议海外列席委员
人口的城市、居住着简单、朴实、
•••
注重实际的人,对他们来说,有钱是成
功的主要标志。但是,事情在改变......
我与生意上成功的朋友创办了诗社。我
们组织一些高雅的晚会,聊聊装饰。
2003年,我刚到深圳的时候,很难找到
与我兴趣相投的人。如今,我的朋友们
明白除了钱,她们还需要其它东西才能
觉得幸福。这些自由的女性,一些离婚
了,开始对中国之外的世界产生浓厚的
兴趣。当我去法国的时候,她们想陪我
做一次深入的而不是像她们第一次走马
观花地游览。她们想住上一个星期,过
巴黎人的生活......对她们来说,真正的文
化来自欧洲,而不是美国。
《联结》:您怎么看二十年后的中国?
20年前,中国人觉得自己是“乡下
人”。现在他们昂起头来。中国女性感
觉自己与欧洲女性一样优雅。如果说我
这一代人不说英语,那么现在的年轻人
则会用外语表达,这让他们更有自信。
我坚信,中国将在国际舞台上的政治、
经济和文化领域越来越多地说出自己的
想法。然而,她必须保持一种平衡。
我曾经历过非常艰难的时期。我父亲是
满族贵族,被打成右派,我的童年生活
很苦。但现在,我在中国的生活与我在
法国的生活非常接近。归根结底,法国
人与中国人十分相似:他们有些复杂,
带着各自文化的烙印。
《联结》:您是怎么把自己定位于中国
和法国之间的?
我觉得自己很像法国人,但是和中国人
在一起的时候,尤其如果他们不说外语
的话,我不会说我觉得自己很法国。就
是说,我不想脱离我的家庭和圈子。生
活的起起落落迫使我思考,通过在一家
法国大企业里工作,我能够获得独有的
经历。时至今日,我碰到过在不同情形
下各种各样的法国人,因此我可以到处
应付自如。我不再感到有文化的冲突。
我对巴黎最强烈的印象,是她的忧郁但
却非常微妙:11月,塞纳河畔的美国教
堂附近,我看见老人带着他的狗独自前
行。树上已经没有树叶,地上干干的。
孤独的行走令人想起生命的最后时日,
电影的结局。对我来说,这正是巴黎之
美,正是这种秋日的感伤让我思考。巴
黎给予了我很多,我希望通过帮助她推
销“法国梦”作为回报。我深信,为了
推销法国的产品,必须把法国的形象与
她的产品结合起来。我是在“品味法国
时尚”的广告语下销售我的爱可视MP3。
如果我们的竞争对手苹果iPod是美国的
可口可乐,爱可视则是美酒、精致和优
雅、特例。在法国产品的背后,永远不
要忘记有法国。
•
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[email protected]
Canton
Yang Fan Fanny
Tél : +86 (020) 8186 8585
[email protected]
Connexions / mars 2010 53
54 Connexions / mars 2010
© Imagine China
dossier
专
栏
Où en est le soft
Sommaire
Echanges p.58
« Une énorme ambiguité », François
Godement
Ruanshili ou Qiaoshili ?
La grande séduction
Une image ambivalente
La Chinafrique des médias
Les instituts Confucius
Shanghai Expo : le monde en Chine
La Chine vue d’Asie centrale
Tourisme : un déficit d’image
Chine éternelle
Planète Jeunes
Culture p.78
« La Chine manque de discours
d’interprétation » Dong Qiang
Rêves de Chinawood
A propos du film Confucius
Wang Xiaoshuai, les tribulations d’un
cinéaste chinois
Du côté de la 3D : la légende du roi
Milu
Edition : à la recherche d’un best-seller
mondial
L’Art contemporain s’intègre
La galerie Shang’Art
power de la Chine ?
Design p.98
Du “made in China” au “created in
China”, Su Tong
Portrait d’une génération d’architectes
designers
Les architectes étrangers en Chine
Artisanat d’Art : Christofle collabore
avec des artistes chinois
Mode : petits designers deviendront
grands
Un “glamour” de Chine
L’ essor des marques chinoises
Innovation p.108
La Route de la soie numérique,
Benjamin Joffe
De plus en plus de MBA
Les universités attirent les étudiants
étrangers
R&D, l’élan positiviste
Médias p.116
Internet et soft power, Viven Wu et
Filip Noubel
Fait en Chine, lu par le monde
Jeux de miroirs, Caroline Puel
S
hanghai 2010. Une fois de plus la
Chine attire sur elle les projecteurs
de toute la planète. Deux ans après
les JO, c’est l’occasion pour l’empire du
Milieu de montrer à nouveau sa capacité
de séduire et d’attirer mais aussi sa force de
proposition, son leadership. C’est aussi pour
le gouvernement un moyen de faire voir le
monde à son peuple et de lui donner une
chance d’être fier d’être chinois.
Shan ghai 2010 f ai t d o n c p ar t i e
intégrante d’une véritable stratégie
•••
Connexions / mars 2010 55
DOSSIER
专栏
Le Premier ministre Wen Jiabao à la tribune de Boao Forum en 2009.
••• du soft power de la part du pouvoir
succès ? Quels sont les défis qu’elle doit
chinois. Par soft power, nous entendons relever ? Où en est sa créativité ? Autant de
la force d’attraction d’une culture, d’un questions auxquelles nous avons essayé
pays, sa capacité à séduire par ses de répondre en faisant appel à des experts
chinois ou internationaux.
œuvres, ses découvertes,
dossier comporte cinq
ses modèles, ses valeurs.
« Wen Jiabao a Le
parties.
Bien évidemment, la
Dans la première, nous
création contemporaine souligné le 5
mars
dernier
essaierons de faire le point
et l’innovation font partie
sur le soft power chinois
i n té g r a n te d e ce t te l’importance
— définition, défis…— en
capacité, mais aussi la
du dévelopfaisant appel à des experts
capacité de diffuser ses
pement
de politique internationale.
modèles et ses valeurs.
culturel
et
Nous nous intéresserons
Le Premier ministre Wen
à l’histoire de l’image de
Jiabao a d’ailleurs souligné des échanges
la Chine, à la définition
le 5 mars dernier lors de avec
par les Chinois du soft
son discours d’ouverture
l’étranger… »
power, à la façon dont
devant l’Assemblée natioShanghai 2010 s’intègre
nale populaire, « l’impordans cet te stratégie.
tance du développement
Nous
observerons
le fer de lance de ce
culturel et des échanges culturels avec
l’étranger pour renforcer l’influence inter- soft power : les instituts Confucius. Nous
irons voir également comment s’exerce
nationale de la culture chinoise. »
Quelles solutions aux grands problèmes, de fait ce soft power dans des pays non
quel regard esthétique, quelles valeurs développés et non-occidentaux, en Asie
— dans le cinéma, l’art, les industries centrale ou en Afrique. Nous verrons
culturelles, l’éducation— la Chine peut-elle comment le tourisme soutient ce soft
proposer au monde ? Comment diffuse- power, comment des jeunes voient le rêve
t-elle son image et sa culture ? Avec quel chinois et comment l’image de la Chine
56 Connexions / mars 2010
dans les pays développés occidentaux est
encore liée à ses traditions.
Dans la seconde partie nous nous
intéresserons plus particulièrement à
la création culturelle contemporaine.
A travers les domaines les plus en vue
(cinéma, art contemporain, édition), nous
nous efforcerons de comprendre les défis
que posent la création et son exportation
à la Chine et à ses créateurs. Nous nous
interrogerons aussi sur les valeurs que la
Chine veut présenter au monde et sur le
discours d’interprétation qu’elle porte ellemême sur sa culture. Dans une troisième par tie, nous
observerons comment la Chine souhaite
passer, dans ses industries, du « made in
china » au « created in China ». Qu’il s’agisse
d’architecture, d’artisanat d’art, de mode
ou de beauté, comment la Chine peaufine
ses productions pour monter dans l’échelle
de valeur. Comment elle se sert aussi des
marques pour améliorer son image à
l’étranger.
Nous verrons ensuite jusqu’où la Chine
innove sur Internet, dans ses modèles
d’entreprises et d’affaires, comment elle
attire les talents dans ses universités, ses
laboratoires ou ses écoles de commerce.
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
© Imagine China
中国的软实力发展到什么程度?
温家宝总理在博鳌亚洲论坛2009年年会上发表演讲
Quels défis lui pose cette course vers la
créativité ?
Nous nous interrogerons enfin plus
particulièrement sur la diffusion de ses
modèles et de sa culture à travers les
médias et Internet. Quelles images de
la Chine le pouvoir veut-il propager ?
Quels moyens se donne-t-il pour y
parvenir ? Quels quiproquos le contrôle
de l’information peut-il provoquer ? Qu’est
ce qui est perdu dans la traduction (lost in
translation) ? Internet est-il — ou n’est-il
pas — une fenêtre sur l’évolution de la
Chine ?
Bien entendu, ce dossier est loin d’être
exhaustif sur un si vaste et si passionnant
sujet. Notre propos est plutôt de lancer des
pistes de réflexions à partir de témoignages
d’experts, de toute nationalité, qui sont sur
le terrain. A l’heure où la Chine ouvre grand
ses portes au monde et rassemble autour
d’elle, sous sa houlette, le meilleur de la
créativité mondiale sur le thème de la ville
(qui sera notre prochain sujet de dossier),
quels sont ses succès, les questions qu’elle
se pose et comment envisage-t-elle de
prendre ses responsabilités pour répondre
aux défis planétaires.
•
A n ne Ga rrig ue
2010年上海世博会。中国再次将全世
国在西方发达国家的形象如何与她的
界的目光聚集在她的身上。在北京奥
传统相联。
运会举办的两年之后,这是中国再次
在第二部分里,我们主要研究中国当
展示其吸引力、建议能力和领导力的
代的文化创作。通过最为关注的领域
机会。对于中国政府而言,这也是让
(电影、当代艺术和出版业),我们
民众了解世界的一种方式,并且给予
力图去理解文化创作及其作品输出对
他们因为自己是中国人而骄傲的机会。
中国及其创作者们所提出的挑战。我
因此,2010年上海世博会是中国政府
们还将探讨中国希望向世界展示的价
软实力战略的组成部分。软实力是指
值观以及中国自己对其文化作出的阐
一种文化、一个国家通过其作品、发
释。 明、制度模式和价值观所产生的吸引
在第三部分里,我们将研究中国如何
力。显而易见,创作和创意,还有传
希望自己的产业从“中国制造”过渡
播制度模式和价值观的能力也是这种
到“中国创造”,无论是建筑业、手
吸引力的组成部分。
工艺术品业、时尚还是美容业,中国
中国总理温家宝今年3月5日在十一届
如何对自己的产品精雕细刻以提升价
全国人大三次会议上作政府工作报告
值链层次。中国如何用品牌更好地向
时强调,“积极开展对外文化交流,
国外展示自己。
增强中华文化国际影响力”。中国能
我们还要研究中国互联网领域的革新
够向世界建议什么?重大问题的解决
进行到哪一步了,包括它的企业和经
方法、对世界的审美眼光、价值观、
营模式,中国在大学教育、科研及
电影、艺术、文化产业、教育......中国
MBA培训方面如何吸引人才,追逐创
如何传播自己的形象和文化?有哪些
意对中国提出了哪些挑战。
成就?有哪些要接受的挑战?中国的
最后,我们特别探讨了中国通过媒体
创意产业发展到什么程度?通过求教
和互联网传播其制度模式和文化的方
国内外专家,我们试图对这么多的问
式。中国政府希望宣传什么样的国家
题做出解答。
形象以及运用哪些方法来实现。信息
本期专栏包括四个部分。
监督会引起哪些误解?在翻译中丢失
在第一部分里,通过求教国际政治方
了什么?互联网如何(不)作为展示
面的专家,我们将试着对中国的软实
中国变化的窗口?
力作出概述——定义,挑战等。我们
当然,本期专栏不能对一个如此宽泛
研究中国形象的历史变迁、中国对软
的热点话题面面俱到。确切地说,我
实力的定义以及将2010年上海世博会
们是想从各国在华专家的见证中启发
纳入软实力战略的方式。我们将介绍
一些思路。在中国对外敞开大门、把
中国软实力的中坚力量:孔子学院。
世界上最好的以城市(这将是我们下
我们将去看看软实力在中亚和非洲不
期专栏的题目)为主题的创意聚集在
发达的非西方国家里如何实施。我们
其周围之时,中国获得了哪些成就,
还将了解旅游业如何支撑软实力,一
面临着哪些问题,打算如何担起责任
些年轻人如何看待“中国梦”以及中
应对全球挑战。
•
Connexions / mars 2010 57
DOSSIER
专栏
François Godement,
directeur stratégie de Asia-centre.
« Une énorme ambiguïté… »
Historien, spécialiste renommé de la Chine et des relations internationales en Asie orientale, François Godement, a fondé en 2005,
le Asia-centre de Sciences-Po.
Connexions : Quelle est votre définition du soft power et en quoi cette
définition s’applique-t-elle à la diplomatie chinoise ?
François Godement : Il y a une énorme ambigüité dans cette notion
de soft power. A l’origine, selon le stratège américain Joseph Nye,
il s’agissait de la capacité par ses valeurs, l’attractivité de sa culture
et de ses institutions, de devenir un modèle et d’amener les autres
à vouloir ce que vous voulez, quelque chose à mi-chemin entre un
système de valeurs et un système d’intérêts, où entrait une part de
relations. Aujourd’hui, la notion recouvre aussi bien le marché des
échanges économiques, la force commerciale, la compétitivité.
On n’évoque pas la même chose quand on parle du soft power
chinois actuel ou du soft power américain de l’après-Deuxième
Guerre mondiale. Ce dernier parlait de la liberté et du chewinggum — mais, d’abord, de la liberté — et d’un modèle de distraction
culturelle mondiale. Le soft power chinois parle de l‘attractivité des
marchandises, de la capacité à réaliser des projets de construction
rapidement, et, beaucoup moins, d’un Hollywood chinois et, moins
encore — même si certains le font — d’un système de valeurs
chinois.
C. : On ne parle donc pas de la même chose quand on évoque la rivalité
sino-américaine croissante en matière de soft power ?
F. G. : Absolument. A noter qu’au sein de l’équipe Obama, une
personnalité très influente au département d’Etat, Anne-Marie
Slaughter, qui a travaillé un an à Shanghai avant d’entrer dans
l’administration, défend l’attractivité du modèle américain à
travers la liberté d’accès à Internet, aux réseaux de communication modernes qui peuvent redonner du lustre
58 Connexions / mars 2010
aux valeurs politiques et sociétales incarnées par les Etats-Unis.
C. : La notion de soft power en Chine a évolué dans le temps. Les autorités
semblent aujourd’hui préférer le terme de « diplomatie publique », quelle
place accordent-elles au soft power dans l’élaboration de leur diplomatie ?
F. G. : Il y a plusieurs niveaux de soft power envisagés par les stratèges chinois. D’abord, un niveau très large de valeurs minimales
internationales, définies en creux. Par rapport au « consensus de
Washington », la notion d’un « consensus de Pékin » — ce n’est
pas un Chinois qui a inventé l’expression qui n’est pas reconnue
officiellement en Chine —, se réfère en fait au modèle élaboré
au milieu des années 50 dans les relations entre la Chine et l’Inde.
C’est un modèle de non-interférence, de non-intervention, de souveraineté, de résolution pacifique des conflits. En creux, se dessine
un système de relations internationales sans les caractéristiques
acquises après la Guerre froide : intervention extérieure, normes
contraignantes pour des pays souverains. Il s’agit presque du négatif du système international né après la Guerre froide ; non pas
un contre-modèle, mais une forme de refus, de prudence par rapport à l’extension du système international. Voyez la conférence
de Copenhague : la Chine s’est trouvée non à l’avant-garde d’une
coalition mais au centre d’un groupe de pays qui ne voulaient pas
de normes légales qui s’imposeraient — en particulier aux pays
en voie de développement — mais seulement d’un consensus
ou d’initiative volontaire. L’attractivité de la Chine à l’égard d’un
certain nombre de pays, c’est d’abord qu’elle propose un système
international a minima.
Un autre aspect du soft power pour les stratèges ou économistes
chinois, c’est la capacité à proposer un modèle de management
des affaires publiques et des entreprises. Il y a là un paradoxe. La
Chine est à la fois le pays où on peut observer, quand on soulève
le couvercle d’une très grande agglomération comme Chongqing,
Shanghai Lujiazui financial district.
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
上海陆家嘴金融中心区
qu’elle est rongée par la corruption, la mafia, la mauvaise adminis- déborde guère de la Chine. Il y a aussi des barrières linguistiques.
tration. Et, en même temps, c’est le pays qui avance le plus rapide- Les instituts Confucius ne semblent pas avoir beaucoup d’écho
ment dans la construction de ses infrastructures ou de celles des au-delà de la formation à la langue comme outil. En même temps,
pays en voie de développement, même s’il n’est pas toujours le on observe un effort énorme en Chine pour développer une soplus efficace en termes de dépenses. Si la Chine a
ciété de médias et de consommation à l’occidentale,
reçu la maîtrise des deux tiers des autoroutes Est- « La Chine
mais contrôlée par les autorités politiques. Il y a là
Ouest algériennes, si elle est un des plus grands fait son
vraiment un modèle distractif, éducatif, informatif
constructeurs potentiels de chemins de fer à travers
chinois qui influence les classes moyennes chinoises.
entrée dans
le monde — ce n’était pas le cas il y a seulement
La capacité de produire quantité de téléfilms historicinq ans —, c’est qu’il y a là un modèle de gestion la psyché
ques ou éducatifs, avec des budgets certainement
et de coordination des projets, une capacité de mondiale
supérieurs à ceux des chaînes occidentales, l’exisl’Etat de fonctionner avec des entreprises privées
tence de multiples émissions de débat — y compris
par le biais
ou des entreprises d’Etat autonomes. L‘efficacité
sur les affaires internationales, avec des participants
chinoise devient en elle-même un argument de de son
internationaux —, le versant commercial de l’affaire
efficacité
soft power. On en voit la trace jusque dans le film
Google — on connaît bien l’aspect de la censure et
de Hollywood 2012, dont le scénario raconte une économique. »
de l’intrusion, mais moins l’aspect de la concurrence
espèce de fin du monde. Quand il s’agit de sauver
chinoise avec ses modèles de moteurs de recherche
une partie de l’humanité avec des arches de Noé
plus adaptés aux sensibilités locales —, montrent
modernes, Hollywood confie à la Chine la tâche de les construire le qu’on a affaire à un système de distraction et de propagande nouplus rapidement possible. On observe alors ce mélange fascinant veau, qui n’a jamais existé dans les régimes autoritaires, sauf peutde cadres et d’officiers chinois supervisant un exode mondial et être dans l’Allemagne du début des années trente. Ce modèle est
construisant une base pour leurs vaisseaux sur le toit du monde au fascinant. Seulement, il parle d’abord et surtout aux Chinois.
Tibet, non loin d’un moine qui ressemble au Dalaï-lama. On y voit Deuxième remarque : on parle beaucoup de l’attractivité de la
que la Chine fait son entrée dans la psyché mondiale par le biais Chine, du point de vue de l’apprentissage de la langue vis-à-vis
de son efficacité économique.
des étrangers, notamment asiatiques. Mais il faut se souvenir que
C. : En quoi et comment le soft power permet-il à la Chine d’influencer le l’ouverture est toute aussi grande dans l’autre sens. Aujourd’hui,
reste du monde ?
le nombre de Chinois anglophones est peut-être supérieur au
F. G. : Deux remarques. Une grande partie du soft power chinois nombre d’Indiens anglophones. En 2009, 1,3 million d’étudiants
s’adresse d’abord aux Chinois et non au reste du monde. La ma- chinois sont partis étudier à l’étranger. Il est clair qu’on est enjeure partie de la rhétorique chinoise — discussions sur le confucia- tré dans un processus de globalisation, d’influence réciproque.
nisme, l’école chinoise de diplomatie, l’exemplarité chinoise — ne Il est par contre extrêmement difficile de prédire ce qui
•••
Connexions / mars 2010 59
DOSSIER
专栏
va prédominer au sein des classes moyen•••
nes chinoises : un modèle de communication et de va-
Japon, Corée, Taiwan, Asie du Sud-Est, alors qu’on observe avec
le phénomène Obama un renouveau d’intérêt pour les Etats-Unis
leurs chinoises ressuscitées par les autorités, ou le mar- considérés comme un partenaire plus stable et moins intrusif. De
ché global et l’individualisme des valeurs à l’occidentale ? ce point de vue, l’ascension chinoise se paie de poussées d’inquiéC.: Le modèle de soft power à la chinoise que vous décrivez semble d’abord tude ou même d’hostilté.
être à usage interne, plutôt centripète que centrifuge…
Par contre, si vous allez vers le monde en développement, dans
F. G. : Effectivement, et sans vouloir faire de l’histoire de pacotille, des zones d’influence nouvelles pour la Chine, il est clair que celleon y entend comme un écho des grandes dynasties chinoises et ci exerce une très grande attraction. En Afrique, cette attraction
en particulier de la dynastie Qing avec sa capacité à être flexible repose d’abord sur des bases traditionnelles. Le modèle d’aide
vis-à-vis de ses voisins en terme de titres, d’association symbolique chinois, qui date des années 60-70, est issu du neutralisme sur le
(vestimentaire, par exemple) des autres cultures, tout en étant ex- plan diplomatique, de la « troisième voie » sur le plan social (à l’extrêmement rigide en termes de maîtrise politique. Bien des gran- portation, le modèle chinois ne prônait pas la collectivisation). Il
des manifestations esthétiques du régime — à commencer par la reste extrêmement populaire en Afrique orientale notamment,
scénographie des JO de 2008 — témoignent d’une nostalgie pour chez des élites tiers-mondistes et antioccidentales. Ensuite, vous
le classicisme tardif de la cour des Qing. On le devine, les Chinois retrouvez l’extraordinaire efficacité de la machine de distribution
individuels sont le plus souvent à mille lieues de cette nostalgie.
commerciale chinoise à tous les niveaux. Les Africains accèdent
C. : La Chine a aujourd’hui des ressources qui lui permettent de faire jouer aujourd’hui à la société de consommation par le biais des marla diplomatie du chéquier. D’autre part, le hard power gagne du terrain avec chandises chinoises et même des commerçants chinois. On enun budget de la défense en constante progression, comme en a témoigné tend beaucoup dire que l’arrivée de probablement un million de
le 60e anniversaire de la « Libération ». Quel rôle joue aujourd’hui le soft travailleurs et de commerçants chinois en Afrique va susciter des
power à côté du hard power ?
aigreurs et des hostilités intercommunautaires. Mais on oublie
F. G. : Il existe une approche chinoise traditionnelle — renouvelée que les petits commerçants chinois accrochés au grand système
aujourd’hui — de panacher le hard power, la coerde distribution national, remplacent des gens qui
cition, avec du soft power qui est un appel à une
vivaient de positions de monopole. L’arrivée de
« On glisse
logique d’intérêts mutuels. Typiquement, la Chine
la Chine est bénéfique sur le plan de la concura complètement adopté la rhétorique win win du trop vite du
rence. Même les Indiens, les Japonais, les Coréens,
libre échange, dont elle bénéficie aujourd’hui. soft power
les Taïwanais, inquiets de la montée de la Chine
D’un autre côté, elle utilise évidemment ses atouts
en Afrique, s’y mettent et donnent de l’assistance.
vers une
financiers dans des objectifs réalistes et très préS’installe une offre compétitive, qui bénéficie grancis. La diplomatie des voyages officiels chinois, des analyse
dement aux Africains. Il ne faut pas se focaliser sur
placements financiers, c’est celle des matières pre- économique
les troubles intercommunautaires qui se produimières, de l’énergie. Il y a même une tentative de des avantages
sent ici et là, notamment autour de chantiers et de
monopole, par exemple sur les terres rares. On a
mines, à cause de la façon dont des entrepreneurs
comparés
affaire à une puissance éminemment réaliste.
chinois peuvent parfois traiter leurs employés
Deuxièmement, l’entreprise militaire est gigan- chinois. »
africains. Globalement, je crois que, pour l’instant,
tesque. La Chine a le deuxième budget militaire
l‘Afrique regarde de façon positive l’arrivée de l’ofmondial. Son armée est celle qui croît le plus vite
fre économique et humaine chinoise.
en termes de forces de projection. Malgré tout l’édifice de visites C’est indiscutablement la même chose au Proche-Orient. En Irak, la
bilatérales, elle reste fermée, coopère peu, y compris dans l’Océan quasi-totalité des biens de consommation du nouvel Irak issu de la
indien où elle côtoie ses homologues. Cela pose évidemment des tutelle américaine sont des marchandises chinoises. Quant à l’Iran,
questions. On célèbre souvent l’importance du contingent chinois on parle beaucoup de ses liens diplomatiques et stratégiques avec
dans les opérations de maintien de la paix. Mais c’est un fait pres- la Chine, mais il faut se souvenir que l’un des candidats aux préque technique, dont on a énormément de mal à tirer des consé- sidentielles en 2004, Rafsandjani avait pris comme modèle de sa
quences stratégiques. Tout cela est d’une très grande opacité.
campagne un développement à la chinoise, même si aujourd’hui,
C. : Concrètement, pouvez-vous revenir sur l’influence chinoise en Afrique, la Chine ne soutient pas du tout le « parti vert ».
au Proche-Orient ou en Amérique du Sud ? Les opérations chinoises de sé- En Amérique du sud, c’est plus compliqué. Au Brésil, même si le
duction à l’égard du monde s’adressent-elles plus au Sud qu’à l’Occident?
président Lula est extrêmement prudent vis-à-vis de la Chine, la
F. G. : On est entré dans une période où, dans l’opinion démo- Chine est une puissance industrielle et technologique concurrente.
cratique des grands pays développés, la Chine n’a jamais eu aussi D’autres, comme Chavez au Venezuela, se tournent vers la Chine
mauvaise presse, du moins depuis trente ans. Une série d’initiati- par hostilité vis-à-vis des Etats-Unis. La Chine devient indubitableves a écorné son image. A la périphérie chinoise aussi, l’opinion ment le partenaire privilégié de beaucoup d’Etats, devant les Etats
publique est devenue méfiante, principalement à l’égard des Unis. Mais, à nouveau, j’ai peur qu’on glisse trop vite du soft power
développements militaires ou d’un excès d’influence politique. Je vers une analyse économique des avantages comparés chinois,
fais référence aux sondages d’opinion 2008-2009, où apparaît le ce qui génère une confusion complète.
thème de l’inquiétude dans la périphérie maritime de la Chine :
Propos recuei l l is pa r A n ne Ga rrig ue
•
60 Connexions / mars 2010
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
软实力
巧实力
Un concept à géométrie variable
Un des apports de la philosophie confucéenne est d’avoir compris que les
mots ne sont pas neutres et qu’il faut leur
donner une définition claire avant de les
utiliser. La locution « soft power » est un
bon exemple de concept piégé, parce
que sa simplicité apparente cache une
réflexion stratégique très particulière. La
plupart des lecteurs l’ont déjà entendue
un jour ou l’autre, beaucoup l’ont déjà
réemployée dans un sens qui leur semblait naturel mais qui s’écarte en réalité
du sens originel. Il n’y a donc pas un « soft
power », mais une idée originale élaborée
par Joseph Nye et certains cercles de réflexions américains dans les années 90,
ainsi qu’une variété de compréhensions
différentes.
Originellement, le « soft power » est une
doctrine de réaction non seulement
à la politique de « hard power » de la
présidence de George W. Bush, mais aussi aux théories du déclin de l’influence
américaine. Elle préconise l’utilisation
de moyens ni économiques ni militaires
pour amener des pays étrangers à des positions servant les intérêts des Etats-Unis.
C’est d’une certaine manière un renversement de la citation classique de
Clausewitz, selon laquelle la guerre est la
continuation de la politique par d’autres
moyens.
Pour le profane et la plus grande partie
de l’intelligentsia chinoise en revanche,
l’aspect puissant, volontariste, est en
général moins mis en valeur que l’aspect
doux, passif.
La locution « soft power » est souvent employée comme un synonyme
d’image ou de rayonnement culturel,
et correspond mieux aux temps longs
de l’histoire qu’aux éphémérides de la
politique.
La ruan shili, une « puissance douce »
aux caractéristiques chinoises.
Quand en octobre 2007, lors du 17e congrès du Parti, le président Hu Jintao introduit le terme de « puissance douce »
(en mandarin ruan shili 软实力) dans le
jargon officiel chinois, il ne pense qu’au
sens dérivé et non pas à une politique interventionniste. Il s’agit surtout de rassurer
les étrangers. A l’époque en effet, la résurgence du thème du « péril jaune » dans les
médias occidentaux préoccupe le régime.
La ruan shili chinoise avait cependant une
connotation moins isolationniste que
l’ancienne doctrine de « l’harmonie », et
pouvait servir de cadre théorique pour
des actions concrètes comme l’ouverture
d’instituts Confucius dans le monde.
Cependant, le caractère éminemment
passif de cette « puissance douce » à la
chinoise révèle son insuffisance en 2008,
quand le parcours mondial de la flamme
olympique s’est transformé en calvaire
pour l’image du pays. De nombreux spécialistes des médias demandent alors
une communication plus active et plus
moderne de la Chine. Très rapidement,
le pouvoir réagit en mettant en place un
programme de 45 milliard de Rmb (4,5
milliard d’euros) pour renforcer la voix de
la Chine à l’étranger.
La qiao shili chinoise, véritable équivalent du « soft power » de Nye.
C’est dans ce contexte que les éditorialistes et les théoriciens chinois se sont
passionnés pour la nouvelle doctrine de
« puissance intelligente » (Smart Power, en
chinois qiao shili 巧实力) mise en avant
par Hillary Clinton début 2009. Sa trans-
position en chinois a subi le même processus d’affadissement que pour le « soft
power ». Alors que le « smart power » de
la diplomatie américaine permet une utilisation éclairée de la force, la qiao shili chinoise n’implique qu’une communication
« pro-active ». En réalité, elle correspond
donc plus au « soft power » originelle ! Fu
Ying, ambassadeur de la Chine au Royaume-Uni, la définit comme suit : « communiquer tôt, communiquer beaucoup,
communiquer de façon intelligible ».
Pour la plupart des intellectuels chinois,
les concepts de « puissance douce » et de
« puissance intelligente » ne s’opposent
pas, mais coexistent et se complètent.
Un article publié par l’agence Chine
Nouvelle le 19 novembre 2009, et largement repris partout, fournit la clé de la
nouvelle doctrine composite préconisée
par les penseurs proches du pouvoir.
Intitulé « Stratégies pour la diffusion
d’informations à l’étranger : renforcer la
puissance douce et améliorer la puissance
intelligente », il est signé par le professeur
Zheng Baowei, président de la Conférence
nationale d’Etude de l’Information. Pour
lui, la « puissance douce » est en quelque
sorte le rayonnement naturel et pacifique
d’un pays, et la « puissance intelligente »
marque l’acuité de sa compréhension du
monde qui l’entoure.
En réalité, et c’est leur ambiguïté, les
débats sur l’image de la Chine dans le
monde ne sont pas seulement destinés
à servir la diplomatie du pays ; ils servent
aussi de terrains de luttes internes entre réformateurs internationalistes (les
fameux jingying 精英) et conservateurs
isolationnistes. Renaud de Spens
•
Connexions / mars 2010 61
DOSSIER
Chongqing, une campagne de « manifestation de joie populaire » à la veille du 60e anniversaire de la République populaire de Chine.
重庆万人大笑迎国庆60周年
La grande séduction
Depuis 2007, Pékin considère officiellement le soft power comme la meilleure stratégie pour
faire accepter au monde la montée en puissance accélérée de la Chine.
Barthélémy Courmont,
docteur en science politique, chercheur à l’IRIS1 et
au CET2, professeur invité
à l’UQAM3 (Montréal), est
l’auteur d’un récent ouvrage intitulé Chine, la grande séduction, essai
sur le soft power chinois, paru chez Choiseul
2009.
Connexions : Vous avez choisi le mot « séduction » pour votre titre. Or actuellement
on sent plutôt monter un sentiment antichinois en Occident, notamment aux EtatsUnis ? Pensez-vous qu’aujourd’hui la Chine
continue à séduire hors de ses frontières ?
Barthélémy Courmont : On constate effectivement une forme de sentiment antichinois
en Occident, qui s’explique notamment par
les inquiétudes que soulève la montée en
puissance de la Chine, tant dans ses aspects
62 Connexions / mars 2010
économiques que politico-stratégiques.
C’est d’ailleurs sur ce point que les EtatsUnis, qui restent la première puissance sous
tous les aspects, sortent particulièrement
du lot. Mais ce sentiment se double d’une
fascination pour la Chine, qui s’impose dans
le monde entier. Par ailleurs, les Etats-Unis
ne sont pas le monde, et l’Occident non
plus. Dans ce que les pays occidentaux
nomment, avec un certain mépris, le Sud,
la Chine s’impose de plus en plus. La stratégie de soft power de Pékin, si elle se veut
globale, vise en priorité ses régions.
Enfin, le soft power est, en Chine, une
stratégie du gouvernement depuis 2007.
Comme toute stratégie, son succès sera
mesuré à l’aune de la manière dont il est accepté. Et sur ce point, même si Joseph Nye
se montre admiratif du soft power chinois,
il est encore trop tôt pour savoir s’il s’agira
d’un succès sur le long terme.
C. : Qu’est-ce qui séduit le plus à l’extérieur
venant de Chine : sa culture contemporaine ou
traditionnelle, son modèle de développement,
son aide financière ou technologique ?
B. C. : Tout à la fois. Et de manière irrémédiable. Avant de devenir un soft power, la
Chine s’est imposée comme un sticky power
selon les termes du politologue américain Walter Russel Mead4, c’est-à-dire une
puissance incontournable, parce que son
dynamisme économique en fait une destination de plus en plus importante. Ainsi,
même les voisins de la Chine, peu enclins
à s’émerveiller de ce qu’elle représente, se
résignent désormais à accepter la montée
en puissance chinoise, et cherchent à s’en
rapprocher. Le Japon, la Corée du Sud, et
même Taiwan sont ainsi irrésistiblement
aspirés par la Chine. C’est donc plus par
défaut que la Chine séduit, son modèle
restant parallèlement souvent
•••
© Imagine China
专栏
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
•
Renaud de Spens
Jardin chinois, François Boucher vers 1740. Luxe et luxuriance, beauté et
raffinement : jouant sur les mythes de la corne d’abondance et du paradis
perdu, la Chine est un rêve et sera bientôt une invitation au voyage.
弗朗索瓦·布歇的油画《中国花园》,创作于1740年。奢华与富饶,优美与高雅:通过表现丰饶角和失乐
园的神话,中国是一个梦,不久将是一份旅行的邀请。
© DR
Raffinement, intelligence, culture,
richesse
L’image positive de la Chine se forme
au XIIIe siècle, avec le récit de Marco
Polo, qui constitue l’un des livres
profanes les plus lus au MoyenAge. Il témoigne d’un esprit ouvert
– le jeune Marco a quitté Venise à
12 ans ; il est de surcroît enjolivé par
quelques éléments fabuleux. Les
Jésuites comme Matteo Ricci qui vont
découvrir la Chine à partir de la fin du
XVIIe siècle marchent sur ses pas. Leurs
lettres sont lues dans tous les grands
salons, alors que l’aristocratie s’extasie
sur le raffinement des porcelaines de
Chine. C’est ce qu’Etiemble a appelé
« L’Europe chinoise ». Cette passion
provoque paradoxalement la ruine
des Qing, puisqu’elle pousse les
marchands occidentaux à ouvrir le
marché chinois, recourrant pour cela
aux interventions militaires et aux
« traités inégaux ».
Cruauté, hypocrisie, animalité,
cupidité
L’image négative est très tôt associée
à la légende para-biblique de Gog
et Magog, peuplades réprouvées à
peine humaines, chassées par dieu sur
les marches de la terre, et s’apprêtant
à déferler sur le monde le jour du
jugement dernier. Réactivée lors des
invasions mongoles et tartares (que
l’on qualifie de « hordes », terme
emprunté à la zoologie), elle constitue
le fondement que ce qui est appelé
« le péril jaune » à la fin du XIXe siècle.
Pour justifier le sac du Palais d’Eté
et l’intervention militaire des huit
puissances en 1860, un discours antichinois est élaboré, et l’empereur
d’Allemagne Guillaume II n’hésite pas
à évoquer une revanche sur les Huns
d’Attila pour demander à ses troupes
de ne pas faire de quartier.
© DR
Une image ambivalente
Comme toute figure de l’altérité (voir les travaux d’Edward Saïd), la Chine a aussi une
forte attraction érotique – couverture d’un roman de Bob Morane en 1967. Le contexte
suinte de rouge sang, de démons menaçants et reptiliens. Le héros est attaché à la
bouche d’un dragon, comme happé par la Chine. La méchante arbore le sourire énigmatique et cruel qui est la signature de la “race jaune”.
鲍勃·莫若尼的小说封面节选
Connexions / mars 2010 63
DOSSIER
专栏
critiqué par ces différents pays, et
•••
beaucoup d’autres d’ailleurs. Mais, comme
ses succès sur la scène internationale. C’est
pourquoi, grâce à d’importants investissedirait Deng Xiaoping, « peu importe la ments, la Chine profite de grands événecouleur du chat tant qu’il attrape les sou- ments internationaux pour présenter au
ris »…
monde son meilleur visage. La Chine ne se
Au niveau de la stratégie de Pékin, c’est es- contente pas ainsi de développer son soft
sentiellement le caractère
power, elle le met en scèplurimillénaire de la cultu- « Deux
ne et le dote de moyens
re chinoise qui est mis en
à la mesure de ses ambiapproches
avant. Le soft power n’est
tions internationales.
pas ainsi totalement arti- s’opposent
La dictature est un hanficiel, mais s’appuie sur le dans la
dicap de poids pour la
constat que la Chine dis- définition du
Chine, notamment dans
pose d’une capacité d’atles incertitudes qu’elle
traction qui ne demandait soft power. »
soulève sur l’évolution
qu’à se développer avec le
possible des tensions à
soutien des pouvoirs publics. Un constat l’intérieur même de la Chine. Ainsi, en se
que les dirigeants chinois tardèrent à dres- développant de plus en plus, et en faisant
ser, quand on remarque, par exemple, que rayonner son modèle sur la scène internala thèse de Nye était moquée à Pékin au tionale, la Chine s’expose dans le même
début des années 1990. Il s’agit donc d’un temps à des critiques de plus en plus vives,
phénomène récent, et qui se développe à à la fois de la part des sinophobes, on l’a vu,
très grande vitesse.
mais aussi et surtout de ceux qui souhaitent
C. : Quels sont les outils essentiels sur lesquels voir le régime se démocratiser.
s’appuie la stratégie de soft power culturel du
gouvernement chinois : médias, cinéma, instituts
Confucius, édition, produits de consommation,
autres ? B. C. : Tous ces outils sont pris en compte,
et utilisés par les autorités avec pour objectif de mettre en avant les atouts de la
Chine. Les instituts Confucius sont la face
la plus visible d’une offensive culturelle
souhaitée et fortement assistée par les
pouvoirs publics chinois. Mais la défense
du patrimoine culturel est aussi devenue,
en quelques années, une obsession chinoise, qui continuera à se développer avec
l’explosion touristique, un sentiment de
fierté nationale confirmé, et la volonté de
se positionner comme un modèle culturel. Là aussi, il s’agit d’une stratégie d’Etat.
C. : Quels sont les principaux succès et échecs
que rencontre cette stratégie de soft power du
gouvernement chinois ?
B. C. : La position officielle de la Chine est
que le soft power est la meilleure stratégie
permettant une montée en puissance accélérée acceptable dans le reste du monde.
Pour ce faire, l’objectif est d’utiliser toutes
les forces de la culture chinoise. Ainsi, et les
dirigeants chinois l’ont compris, si les acquis
culturels et historiques constituent des piliers du soft power, c’est surtout la manière
dont ils sont mis en avant qui détermine
64 Connexions / mars 2010
C. : Y-a-t-il aujourd’hui consensus sur la stratégie de soft power au sein des pouvoirs politiques
chinois ?
B. C. : Pour les pouvoirs publics chinois,
deux approches s’opposent dans la définition à apporter au soft power. La première,
actuellement dominante, estime que le
soft power est étroitement lié à la culture
de la Chine. Cette volonté de miser sur la
culture chinoise est désormais la ligne officielle des dirigeants. A l’occasion du 16e
Congrès du Parti communiste chinois en
décembre 2002, le système de réformes
dans le domaine culturel fut inauguré, avec
pour objectif avoué, la mise en avant de la
culture chinoise dans l’objectif stratégique
de servir les intérêts de la nation. Il s’agissait
du point de départ officiel d’une stratégie
encore en marche.
C’est parmi les experts en relations internationales qu’on trouve le deuxième grand
courant de réflexion sur le soft power
chinois. Pour eux, il convient de dépasser
le simple constat que la culture chinoise
est un atout dans la quête de puissance de
Pékin, pour formuler une véritable stratégie
misant sur cet atout pour accélérer le processus de montée en puissance de la Chine.
Ce courant de réflexion est sensiblement
plus agressif que le précédent, notamment
en ce qu’il défend le principe d’autres mo-
des de développement de la Chine, qui ne
doit pas se contenter de miser sur son soft
power, mais également accélérer la montée
en puissance de son armée, et des stratégies
agressives dans le domaine économique et
commercial. Ce courant pourrait s’amplifier
dans les prochaines années, et confirmer la
thèse d’une Chine de plus en plus décomplexée et sûre de sa puissance.
C. : Le soft power semble aussi un outil stratégique à usage interne, flattant un certain nationalisme. Etes-vous d’accord ?
B. C. : Tout à fait. Nous pouvons même
considérer que le nationalisme est au cœur
de cette stratégie de soft power. Les succès
indiscutables de la Chine depuis quelques
années, qui ne sont que les prémices de
la montée en puissance de l’économie de
la future première puissance mondiale, exposent le pays le plus peuplé de la planète
au contact avec l’extérieur, ce qui a pour
effet d’exacerber un sentiment nationaliste
canalisé et parfois instrumentalisé par les
autorités. Le sentiment de fierté nationale
en Chine se nourrit des multiples options
offertes à Pékin. Comme il est de plus en
plus difficile d’ignorer la Chine, et que ceux
qui seraient tentés de le faire s’exposent à
une implacable mise à l’écart, d’autres prenant immédiatement le relais, les dirigeants
chinois, et les Chinois dans leur ensemble,
estiment de plus en plus que leur pays est
incontournable, et qu’il accède pour cette
raison à un statut de superpuissance. Cette
fierté nationale sa traduit de plus en plus
par une forme d’arrogance.
Sur un plan politique, la Chine se permet
aujourd’hui de dire « non », de refuser de
plier sur certains sujets sensibles, comme
les droits de l’Homme et la démocratisation
du régime, et affirme ainsi sa puissance sur
la scène internationale. Elle s’appuie pour
ce faire sur l’assurance que lui confère son
statut de grande puissance économique,
et de géant devenu incontournable. On
retrouve ainsi, là aussi, cette tentation de
l’arrogance qui pourrait à terme poser problème dans la grande stratégie de séduction de Pékin, à moins qu’il ne s’agisse que
d’une attitude délibérée, sorte de posture
post-soft power. Propos recueillis par
•
Anne Garrigue
Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux
http://iris.ehess.fr/
2
centre d’études transatlantique http://www.centretransatlantique.fr/content/view/22/39/lang,fr/
3
Université du Québec à Montréal
4
http://en.wikipedia.org/wiki/Walter_Russell_Mead
1
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
En janvier 2006, RCI lançait sa première fréquence FM à l’étranger, à Nairobi, capitale du
Kenya 2006年1月,中国国际广播电台第一个境外调频台在肯尼亚首都内罗毕开播
La Chinafrique des médias
Depuis 10 ans, le gouvernement s’applique à conquérir
l’opinion publique africaine.
La Chine veut donner à l’Afrique une
image positive de sa puissance à travers
les médias. Pour cela, elle est décidée
à déployer des moyens importants
selon une stratégie à deux volets. D’une
part, une action des médias chinois
sur le terrain, avec une implantation
dans les principaux pays où Pékin a des
intérêts économiques ou des relations
privilégiées avec les gouvernements
locaux. D’autre part, des programmes
de coopération multilatérale. A cela
s’ajoutent des projets bilatéraux
plus techniques, comme la mise en
orbite en mai 2007 d’un satellite de
communications pour le compte du
Nigeria. Ce satellite géostationnaire
qui couvre toute l’Afrique, une partie
du Proche-Orient et le sud de l’Europe
marque une étape importante de la
pénétration chinoise dans ce continent,
en particulier dans le domaine des
télécommunications.
Priorité à la radio
Sur le terrain, les autorités chinoises ont
choisi de développer prioritairement
leur présence à travers la radio, le moyen
d’information le plus populaire en
Afrique. Radio Chine Internationale
— qui émet en 64 langues, y
compris en Espéranto — a renforcé
sa programmation en anglais et en
français destinée au continent africain.
Actuellement, la diffusion des quelque
200 heures de programmes de RCI en
ces deux langues se fait soit par ondes
courtes, soit par la création de fréquences
locales. En janvier 2006, RCI lançait sa
première fréquence FM à l’étranger, à
Nairobi, capitale du Kenya. Au total, 19
heures d’émissions quotidiennes y sont
diffusées en anglais, en swahili et en
chinois. En français, on peut capter des
informations et des magazines produits
par RCI et diffusés sur la fréquence
FM dans trois pays Niger (4 stations),
Sénégal (4) et Congo Brazaville (1).
Chacune d’elles diffuse environ 12
heures d’émissions quotidiennes. Il est
prévu une implantation beaucoup plus
dense, avec la possibilité de tripler, voire
quintupler, le nombre de radios FM
diffusant la voix de la Chine en Afrique.
Mais les autorités chinoises ne se
contentent pas de lancer des stations
locales. Elles voient beaucoup plus
grand et mettent l’accent sur la
coopération en créant des partenariats
avec les radios africaines. Parmi les 150
radios partenaires de RCI, un tiers sont
africaines. Ces partenariats comprennent
l’envoi d’émissions clé en main, des coproductions, de l’aide technique, ainsi
que des échanges de personnel.
Des démonstrations en Chine
Le deuxième volet de la stratégie
chinoise dans le domaine de
l’information internationale comprend
différents exercices de démonstration
de son soft power dans sa capitale.
Elle a multiplié les initiatives depuis
2002 pour attirer les décideurs et les
patrons des médias du monde entier,
en particulier d’Afrique. Des séminaires
sur l’Information sont organisés
régulièrement soit à Pékin, soit dans les
provinces. La responsabilité des rendezvous sino-africains revient à l’Office de
l’Information du Conseil des Affaires
de l’Etat, comme lors du 4e Séminaire
sur l’Information de septembre
2007, réunissant 42 responsables de
l’information et des médias d’une
trentaine de pays d’Afrique. A Chengdu,
où ce séminaire s’est poursuivi, les
participants ont lancé les premiers
mécanismes de coopération dans la
diffusion de l’information et dans la
production d’émissions. Les médias
chinois sont appelés à « produire » de
l’information spécialement pour les
pays africains. « Nous voulons faire
cesser les reportages négatifs réalisés
par les médias occidentaux sur l’Afrique
et sur la Chine » a souligné le tchadien
Houmadji Moussa Doumgor en
caressant l’idée « d’instaurer un système
de liaison entre les médias chinois
et les médias africains pour éviter la
marginalisation des pays en voie de
développement ». Les participants
ont appelé à la création de réseaux
médiatiques pour contrebalancer les
informations « peu objectives » des
médias occidentaux sur les pays en
développement dont la Chine veut être
le chef de file.
Le point d’orgue de ce deuxième
volet de la stratégie chinoise a été le
Sommet des Médias, qui s’est tenu à
Pékin en novembre 2009, réunissant
300 représentants de 170 médias
internationaux. Ce sommet a permis
au président Hu Jintao de lancer « un
appel au respect mutuel entre les
médias du monde », pour « contribuer à
l’édification d’un monde harmonieux ».
Les médias sont bien au cœur de la
stratégie d’influence chinoise.
•
Lucile Monjauze
Connexions / mars 2010 65
DOSSIER
专栏
Depuis 2004,
la Chine sème ses instituts
Confucius à la demande
des universités et des
collectivités étrangères.
Le ministère chinois de
l’Education (Hanban) qui
les pilote réfléchit encore
au contenu culturel qu’ils
doivent diffuser.
L’institut Confucius de Novosibirsk (Russie). Instituts Confucius : la culture officielle à tous vents
« Sans langage commun, les affaires ne
peuvent être conclues », lit-on dans Les
Analectes de Confucius. Pékin l’a compris en
lançant il y a six ans une entreprise sans précédent de diffusion de la langue chinoise
à l’étranger, à l’initiative de l’aile libérale du
Parti. Ironie de l’histoire, c’est Confucius qui
a été « reconvoqué » en remplacement de
l’idéologie marxiste alors que son enseignement, d’abord abandonné par Sun Yat-sen,
avait été par la suite dénoncé le 4 mai 1919
comme obstacle au progrès, avant d’être
définitivement rayé des tablettes par Mao.
En 2004, un institut-pilote est testé en
Ouzbékistan, puis un premier ouvre à
Séoul. Six ans plus tard, on compte 282 instituts Confucius dans 88 pays et 241 classes1.
Le succès quantitatif est au rendez-vous,
et 230 000 élèves (adultes, étudiants non
spécialisés en chinois) sont déjà passés sur
leurs bancs, tandis que Pékin vise le chiffre
66 Connexions / mars 2010
de 1 000 structures pour 2020. Très présents
aux Etats-Unis, au Canada ou en Corée du
Sud, ils sont 14 en France, où l’enseignement
du chinois connaît un véritable boom1.
Inspirés du modèle des Alliances françaises
en Chine, les instituts Confucius sont placés sous l’autorité du Hanban, l’agence du
ministère chinois de l’Education chargée
de promouvoir la langue chinoise. « Si le
pilotage est centralisé, l’initiative et la mise
en œuvre sont déconcentrées », explique
Alexandre Ziegler, conseiller culturel de
l’ambassade de France en Chine. Ainsi, la
création d’un institut est souvent le fruit
de la coopération entre une université
française et une université chinoise. Pour
diffuser le chinois, le Hanban dispose par
ailleurs de très gros moyens. « Les instituts
sont à n’en pas douter le bras armé de la
politique chinoise de la sinophonie, ce qui
est légitime dans la mesure où le chinois
acquiert une dimension internationale »,
observe Joël Bellassen, sinologue et premier inspecteur général de chinois. A cet
aspect linguistique, s’ajoute également
une dimension politique d’affirmation de
la puissance et d’image, à travers la promotion de valeurs culturelles. Pour ne pas
laisser aux instituts Confucius le monopole
du rayonnement culturel, Ma Ying-jeou
a d’ailleurs annoncé récemment, dans la
lignée de Tchang Kaï-chek, le lancement
d’ « Académies de Taïwan ».
Outil de propagande ?
Malgré l’engouement pour le mandarin, conséquence du poids économique
croissant de la Chine, les instituts Confucius ont pourtant tendance à inquiéter,
et alimentent les spéculations. Les hauts
fonctionnaires chinois, réunis dans le bureau de contrôle du Hanban de Pékin, ne
seraient-ils pas en train de planter des dra-
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
图为孔子学院书法教师王健霖在教俄罗斯学生写书法。
peaux rouges sur la carte du monde ? Les
manuels d’enseignement ne laveraient-ils
pas les cerveaux ? « Colonies idéologiques
agissant sur les diasporas », telle est l’image
fantasmée des instituts, qui ne va pas sans
rappeler celle du péril jaune.
Etiquetant les instituts Confucius comme
des « outils de propagande », l’Inde, sœur
ennemie de la Chine, a déjà refusé le cadeau de Pékin. A Paris VII, Gilles Guiheux,
socio-historien, espère de son côté que le
contenu culturel de l’institut se cantonnera
aux ateliers de papiers découpés. Quant à
Jean-Philippe Béja, sinologue détaché
au Centre d’études français sur la Chine
contemporaine, l’arrivée des instituts est
tout simplement le résultat de la faiblesse
des crédits publics accordés à l’enseignement du chinois. « Ce sont des ressources pour des systèmes d’enseignement
affamés. Personne n’est trop regardant
sur la nature du don et plutôt que d’être
en dehors des universités, les instituts
Confucius fonc tionnent dans les
Autre élément à prendre en compte : la
facs comme des cellules cancéreuses ».
En Australie, Jocelyn Chey, professeur à l’uni- double direction, chinoise et étrangère, des
versité de Sydney et ancienne diplomate, a instituts. En France, les directeurs locaux (et
également alerté l’opinion en 2007, faisant non les chinois) ont carte blanche. Blaise
campagne pour que l’institut Confucius ne Thiérée, directeur de l’institut Confucius de
s’installe pas dans les mêmes locaux que le Rennes, se retrouve même tout à fait aux
département d’études chinoises. « S’il était commandes, faute d’avoir pu recruter un
sur le campus, ce serait plus
directeur chinois. « Nous
difficile pour les enseignants
ne sommes ni une tribu« Pékin vise
de préserver leur liberté et
ne de propagande, ni un
organisme anti-chinois,
leur indépendance », expli- le chiffre
quait-elle.
affirme-t-il. Les livres du
de 1000
Enfin, dans un article intitulé
dissident Cai Chongguo1
sont en rayon et ça ne
« A quoi servent vraiment les structures
pose aucun problème. »
instituts Confucius ? » paru en pour 2020.»
septembre dernier, le journaAu lieu d’être un label
liste canadien Fabrice de Pierhomogène, les instituts
2
rebourg , place la critique sur le terrain mili- dépendent donc beaucoup de la qualité
taro-industriel. Rappelant que les services de la direction. A Arras, la directrice Jin Si
de renseignements canadiens ont rédigé Yan, également professeur d’université et
un rapport sur les instituts Confucius, il écrivain, propose par exemple un cycle de
interroge : « Se pourrait-il que cette vaste conférences avec les experts les plus reconentreprise de charme destinée à propager nus. « Sur le terrain culturel, c’est le Hanban
une image positive de la Chine, à créer une qui nous suit », souligne-t-elle.
vraie “sinomanie“, cache d’autres intentions Une autre faiblesse vient des décisions
inavouées et malicieuses ? » Et d’avancer d’implantation, davantage, comme on l’a
l’idée d’un « espionnage doux » dont le but vu, le fruit d’opportunités que le résultat
serait de « drainer des informations scien- d’une stratégie calculée. Ainsi, le premier
tifiques et technologiques ». Après tout, institut Confucius français est-il venu s’im« plusieurs officiers de renseignement ont planter à Poitiers, fief de Jean-Pierre Raffarin,
été placés à la tête ou parmi les dirigeants et non à Paris. A cela s’ajoutent les querelles
de clocher franco-françaises et sino-chinoidu réseau Confucius. »
Faible harmonisation
ses, le Hanban, sous tutelle du ministère de
Reste que sur le terrain, rien ne permet l’Education, faisant par exemple tout son
vraiment d’alimenter la thèse du cheval de possible pour maintenir la distance avec
Troie. A 30 ans, Wang Huifeng, qui s’était l’ambassade et le ministère des Affaires
portée volontaire pour enseigner dans étrangères.
un institut Confucius aux Etats-Unis, va se Alors, beaucoup de bruit pour rien ? Dans
retrouver à Monterrey, la troisième ville du des pays où l’offre culturelle sur la Chine foiMexique. Il ne lui reste que quelques mois sonne, les instituts auront du mal à impopour apprendre des rudiments d’espagnol. ser un discours officiel. Dans d’autres pays
Plutôt que de « colonies idéologiques », moins armés, le risque existe. Pour l’heure,
mieux vaut parler d’improvisation. Les Pékin réfléchit encore au contenu à donner
Chinois sont d’ailleurs les premiers à re- à son message culturel, ce qui n’exclut pas,
connaître leurs faiblesses : Xu Lin, directrice avertit le sinologue Jean-Pierre Cabestan,
générale des instituts Confucius, déclarait « de voir à terme les instituts se transforen décembre que les instituts manquaient mer en structures aseptisées, diffusant une
de matériel pédagogique, faute de tra- culture folklorique. » Mais alors, qui écouducteurs appropriés. De fait, les instituts tera le disque ?
ne disposaient pas jusqu’à récemment de
Helène Duv ig neau
méthode d’enseignement de référence. 1. A la dernière rentrée, 25.675 élèves se sont engagés dans
du chinois, contre seulement 9.328 en 2004.
« Après l’étape quantitative, analyse Alexan- l’apprentissage
2. rédacteur en chef du China Labour Bulletin
dre Ziegler, les instituts vont devoir consoli- 3.http://fabricedepierrebourg.org/fr/2009/09/a-quoi-serventvraiment-les-instituts-confucius/
der leur projet pédagogique, faute de quoi
leur image pourrait en pâtir ».
•
Connexions / mars 2010 67
DOSSIER
« Le but de l’Expo, c’est de montrer aux Chinois ce qui se fait dans le monde avec une notion d’intégration à ce monde.»
办世博会的目的就是以融入世界的理念向国人展示世界上所做的事情。
Quand le monde vient en Chine
Pour l’Expo, la Chine a choisi de communiquer sur son sens des responsabilités et sa capacité
à répondre aux problématiques mondiales.
Antoine Bourdeix, est le
représentant de Publicis
Consultants en Chine,
l’agence de communication française qui a remporté, l’an dernier, l’appel
d’offre pour gérer les relations publiques
de l’Exposition universelle de Shanghai en
2010.
Connexions : A la lumière des Années croisées
(2003-2005), des Jeux olympiques et maintenant
de l’« Expo 2010 » à Shanghai, quelle est la stratégie de communication du gouvernement chinois ?
Antoine Bourdeix : Pour les Années croisées,
il y avait trois axes clairs de communication définis par le gouvernement chinois :
la Chine éternelle, la Chine moderne et la
68 Connexions / mars 2010
Chine des diversités. Pour l’Expo de Shanghai, on n’est plus du tout dans cet objectif.
Là, c’est le monde qui vient en Chine. Et cela
fait plutôt partie de la stratégie de la Chine
de montrer qu’elle est capable d’organiser
des grands événements internationaux.
D’autres pays l’ont fait avant dans le même
esprit. Le Japon a commencé dans les années 1970 et la Corée du Sud un peu après,
avec des rendez-vous comme les JO, la
Coupe du monde de football ou encore
les expositions universelles. Le Brésil ou
l’Afrique du Sud sont en train de suivre le
même schéma. Cela participe à donner une
image internationale et une image de pays
développé.
Dans le cas de l’« Expo » de Shanghai, 95%
des visiteurs viendront de Chine. Le pre-
mier public est chinois. Les organisateurs
attendent 3,5 millions d’étrangers [ndlr. 70
millions de personnes sont attendues au
total pendant les six mois de l’« Expo »],
avec en premier lieu des Japonais et des
Coréens. Mais l’impact médiatique, lui, va
être global.
C. : Quel est le message que la Chine veut faire
passer à travers ces grands événements ?
A. B. : Il s’agit pour la Chine de montrer sa
capacité à organiser un grand événement
et son ouverture. Le pays s’inscrit dans un
monde global, dans lequel son développement a sa place. Un développement sensé
et plus responsable vis-à-vis de questions
comme l’urbanisation. C’est un des grands
enjeux des pays asiatiques et des pays en
développement : voir comment repenser
© Imagine China
专栏
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
l’urbanisation et résoudre les questions de
demain en la matière. Aujourd’hui pour
l’Expo, on n’a plus cette communication
sur la Chine traditionnelle et la Chine des
diversités (d’ailleurs limitée à Shanghai),
comme on a eu pour les Années croisées.
On parle désormais de la Chine face à des
problématiques mondiales.
Par rapport aux JO, c’est encore différent.
En 2008, il y avait un esprit compétitif, l’idée
de gagner, l’idée de puissance et surtout
du renouveau de la puissance chinoise.
Pour l’Expo de Shanghai, ce n’est plus ça.
Il y a davantage une idée de responsabilité.
Le but du jeu, c’est de montrer aux Chinois
ce qui se fait dans le monde avec une notion d’intégration à ce monde. La communication s’est vraiment faite sur cet aspect
international. On retrouve le gigantisme,
mais c’est plus propre à la Chine qu’une
démarche vraiment recherchée.
C. : Comment s’est fait le choix d’un expert international pour gérer les relations publiques de
l’« Expo » ?
A. B. : Publicis Consultants avait déjà travaillé
sur l’Expo 2010 de Shanghai en 2001-2002
pour la candidature de la ville. Le Bureau
International des Expositions étant à Paris
[ndlr. où le groupe Publicis a son siège],
on travaille souvent sur les candidatures
de villes pour les expositions universelles.
Dans ce genre d’événements, il est toujours
nécessaire d’avoir un groupe international
pour rayonner dans le plus de pays possibles. Aujourd’hui, les groupes pouvant
proposer ce service sont soit anglo-saxons,
soit c’est Publicis ! Il n’y a pas d’entreprises
de communication chinoise présente
dans autant de pays que nous. Et d’ailleurs
tous nos rivaux lors de l’appel d’offre par
le Comité d’organisation de l’Expo étaient
internationaux.
Et puis, on avait déjà travaillé avec Shanghai Expo pour sa présence à l’exposition de
Sarragosse en 2008 et depuis sur d’autres
projets en France, aux Etats-Unis, au Canada. Sur l’exposition universelle de Shanghai, Publicis Consultants fournit du conseil,
gère les relations publiques en-dehors de
Chine et dispense de la formation..
•
Propos recueillis par Julie Desné
Retrouvez l’actualité de l’Expo 2010 avec
Publicis Consultants sur le blog www.
shanghai-expo-insights.com.
当世界来到中国
对于世博会,中国选择就责
任感和应对世界问题的能力
进行宣传。
展中国家面临的巨大挑战之一,即如
何考虑城市化并解决未来在这方面产
生的问题。如今,世博会不再宣传中
法文化年提出的“古老的中国,多彩
的中国”。人们从此谈论的是中国应
安韬略,法国传播公司阳狮咨询的中
对世界的问题。
国首席代表,该公司去年投标成功,
与奥运会相比,世博会还有不同之
成为2010年上海世博会指定的公关服
处。2008年奥运会,有一种竞争精
务供应商。
神,获胜的想法,强国的想法,尤其
是中国大国的重新崛起。上海世博会
经过中法文化年(2003-2005年),
就不是这样了。越来越有一种负责任
北京奥运会以及现在的2010年上海世
的想法。办世博会的目的就是用融入
博会的启发,中国政府的公关策略是
世界的观念向国人展示世界上所做的
什么?
事情。公关确实是在国际的层面进行
对于中法文化年,中国政府确定了3大
的。人们觉得世博会规模庞大,但这
明确的宣传重点,即“古老的中国,
与中国自身有关而不是刻意寻求的。
现代的中国,多彩的中国”。对于上
为何选择国际专家来负责世博会的公
海世博会,目标已不在于此。现在的
关?
目标是全世界来到中国,这是中国显
2001至2002年,阳狮咨询已经为上海
示其有能力举办大型国际盛会的战略
争办2010年世博会提供过服务。世博
的组成部分。其它国家这么做也是基
会的管理机构国际展览局设在巴黎(
于一样的想法。日本,随后是韩国在
阳狮集团总部也设在那里),我们的
上世纪七十年代开始举办国际盛会,
工作经常涉及到争办世博会的候选城
如奥运会、世界杯甚至世博会。巴西
市。在这类活动中,有一个国际集团
和南非也在走同样的路。这有助于给
在尽可能多的国家里进行公关总是必
人国际的和发达国家的形象。
要的。如今,能够提供此类服务的集
具体到上海世博会,95%的参观者将
团要么是英美集团,要么就是阳狮集
来自中国。最大的观众群是中国人。
团,还没有一家中国的公关企业像我
组织者期待有350万名外国参观者(
们一样在如此多的国家里开展业务。
在世博会举办的6个月内,预计总共
再说,在世博会组委会的招标中,我
有7000万名参观者),首先是日本人
们所有的竞争对手都是国际集团。
和韩国人。而媒体的影响则是全球性
另外,我们还为上海世博会出席
的。
2008年西班牙萨拉戈萨世博会和后来
中国希望通过这些重大活动传递什么
在法国、美国、加拿大的项目提供过
信息?
服务。关于上海世博会,阳狮咨询提
中国要显示其举办重大活动的能力及
供咨询服务,处理中国之外的公关事
其开放的程度。中国处在全球的环境
务以及开展培训。
中,它的发展有自己的位置。针对诸
请登陆www.shanghai-expo-insights.
如城市化等问题,需要更加合理、更
com博客网站了解阳狮咨询发布的
加负责任的发展。这是亚洲国家和发
2010年上海世博会信息。
•
Connexions / mars 2010 69
DOSSIER
© Imagine China
专栏
L’île de Hainan, son soleil et ses plages de sable fin sont devenus la Floride de l’Asie Centrale et de la Sibérie.
海南岛的阳光和沙滩闻名遐迩,已成为中亚和西伯利亚的度假胜地。
Vu d’Asie Centrale
Les atouts de la Chine
Après lui avoir tourné le dos, l’Asie centrale redécouvre la Chine dans quatre domaines :
affaires, éducation, santé et tourisme.
Filip Noubel, polyglotte,
a grandi en Asie centrale à
l’époque de la domination
soviétique. Il est revenu
y vivre de 1999 à 2006,
après avoir fait des études
à Pékin. Il a observé sur place la montée en
puissance de la Chine
Connexions : La Chine est de plus en plus populaire en Asie centrale. Racontez-nous pourquoi
et comment ?
Filip Noubel : Pour comprendre, il faut faire un
peu d’histoire. Après des siècles de relations
70 Connexions / mars 2010
entre la Chine et l’Asie centrale (via la Route
de la soie.), la rupture des relations entre la
République Populaire de Chine et l’Union
soviétique en 1961-1962 a dressé un mur
infranchissable qui n’est tombé qu’après
1991. Pendant 30 ans, une génération, l’Asie
centrale a tourné le dos à la Chine et ceux
qui ont grandi dans les années 60 — et
qui sont au pouvoir — l’ont « oubliée ».
Après 1991, l’Asie centrale, devenue indépendante, a dû trouver de nouveaux partenaires. Au début, elle s’est tournée vers
l’Occident. A cette époque, la Chine n’était
pas en haut de l’agenda. Mais rapidement
des désillusions ont obligé les autorités à
faire preuve de réalisme et à se tourner vers
leurs voisins immédiats, Indiens et Pakistanais au Sud, Russes au Nord et, à l’Est, ce
mystérieux pays dont on ne connaissait pas
grand-chose. Le changement a d’abord été
très politique. Sous la houlette de l’Organisation de coopération de Shanghai1 dont
les prémisses remontent à 1996, des premières relations de partenariat stratégique
ont été établies. Elles sont d’abord restées
très loin de l’homme de la rue, puis, progressivement, l’impact des relations avec
la Chine est descendu jusqu’aux simples
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
citoyens dans quatre domaines essentiels
et interconnectés : les affaires (petites entreprises), l’éducation, la santé et le tourisme.
C. : Comment s’est passé concrètement ce mouvement dont vous avez été témoin ?
F. N. : Tout a commencé quand j’étais étudiant à Pékin, dans les années 1995-1996. Je
travaillais dans le district russe de Yabaolu
près du parc Ritan, dit « la petite Moscou ».
A cette époque tout était lié au shuttle business : des Russes, des Européens de l’Est
remplissaient des containers de marchandises chinoises pour les expédier dans leurs
pays. Les habitants d’Asie centrale étaient
attirés par les opportunités d’affaires alors
que tous les réseaux économiques avec
l’Union soviétique étaient détruits. Mais
ceux qui venaient pour affaires ont vite
compris qu’il y avait autre chose. Ils ont
commencé à apprendre la langue, à avoir
des partenaires et des amis chinois. Ils ont
découvert de nouvelles villes. Ils ont réalisé
que la Chine était un endroit sûr, pour les
affaires mais aussi dans les rues. On pouvait
y marcher la nuit, le système bancaire était
crédible, des facteurs très importants dans
des pays où tout s’écroulait, où les réseaux
sociaux ne fonctionnaient plus. Les habitants d’Asie centrale ont commencé à penser à envoyer leurs enfants étudier en Chine
pour bénéficier d’un environnement sûr et
d’études moins chères qu’en Occident.
Pour cette génération de parents, le fait
qu’il s’agissait d’un système similaire à celui
qu’ils avaient connu en Union soviétique,
avec des dortoirs par exemple, était rassurant, plus proche, plus familier que ceux des
Etats-Unis ou d’Europe.
C. : Dans quel domaine avez-vous observé le plus
grand changement dans les relations entre l’Asie
centrale et la Chine ?
F. N. : L’éducation. Presque toutes les familles que je connais, qui sont dotées d’un
certain bagage intellectuel et qui ont, toutes, de nombreux enfants, ont au moins un
enfant étudiant en Chine. Les autres sont
éventuellement en Russie, aux Etats-Unis
ou en Europe. Les frères et sœurs, quand ils
se retrouvent, échangent leurs différentes
perceptions. La Chine semble la plus proche aujourd’hui. Les Etats-Unis géographiquement sont de l’autre côté de la planète.
Et la Chine est devenue aussi « sexy » que
l’Occident. Quand on vient d’Asie centrale
où la plus grande ville ne dépasse pas deux
millions d’habitants, Pékin ou Shanghai suscitent le même choc que New York, Paris
ou Londres. Ce sont des mégalopoles qui F. N. : En une décade, on est passé d’une
ne dorment jamais, cosmopolites, avec une grande ignorance à un grand intérêt. Cela
culture jeune très cool. La Chine, dernière ne veut pas dire que les habitants d’Asie
venue, est aussi attirante que les autres, centrale ne regardent pas ailleurs. Mais la
mais sa proximité et son coût jouent en sa Chine a été réintégrée comme une option
faveur. Les parents peuvent facilement ren- dans le menu qui s’est diversifié. Cela dit,
dre visite à leurs enfants et en profiter pour la Chine est encore mal comprise en prorapporter au pays un bien d’équipement fondeur, même si les jeunes sont de bons
dont ils manquent — chaudière, plombe- ambassadeurs. Quelques instituts Confurie… L’Asie centrale et la Sibérie sont en- cius, des centres culturels — celui d’Almaty
core dans la culture des années 90, où tout occupe tout un immeuble de dix étages —,
s’achète à l’extérieur. On combine donc des restaurants chinois très populaires souaffaires, éducation et santé.
vent tenus par la minorité
Les habitants d’Asie centrale « les familles
Hui (qu’on appelle « Dunsouffrent d’alcoolisme, de
gan » en Asie centrale)2,
mal au dos… et se soignent dotées d’un
tout cela ne suffit pas.
en alliant les deux médecines, bagage
On veut aller vers la
chinoise et occidentale. Dans
Chine, tout en craignant
leur shopping list, ils font un intellectuel
de voir s’installer chez
arrêt chez le docteur. Et des ont un enfant
soi les Chinois. C’est une
médecins chinois ouvrent déquestion d’échelle. L’ensormais des cabinets en Asie étudiant en
semble de la population
centrale. Quant au tourisme, Chine.»
d’Asie centrale — cinq
la Chine est devenue le bord
p ay s 3 — rep rés ente
de mer de l’Asie centrale. C’est
moins de cinquante milun tourisme de masse : Sanya,
lions de personnes. la
dans l’île de Hainan au sud de la Chine, est simple arithmétique incite à en rester aux
devenue la Floride de l’Asie centrale et de liens économiques. Il n’y a pas de feuillle de
la Sibérie, remplaçant la Turquie trop chère. route claire. Et la Chine devra réfléchir à la
Pas besoin de parler chinois ou anglais, tout meilleure façon de se présenter.
est en russe. Et dans les journaux de Vladi- Certes, l’économie et le modèle social
vostok, la section météo indique le temps chinois — la sécurité, la résolution des
qu’il fait à Hainan.
problèmes de pauvreté, de chômage, les
C. : Plusieurs des 282 Instituts Confucius se trou- opportunités — fascinent, mais la Chine
vent en Asie centrale où fut ouvert en 2004, le est aussi vécue comme une puissance
premier Institut Confucius — pilote — à Tachkent extérieure. Beaucoup d’habitants d’Asie
(Ouzbékistan). Quel rôle joue la stratégie gou- centrale ressemblent physiquement à des
vernementale chinoise dans cette expansion de Chinois, mais se perçoivent comme des
Européens au sens russe du XIXe siècle du
l’influence chinoise, notamment de la langue ?
F. N. : Je ne crois pas que les instituts Confu- terme. Les classes moyennes cultivées, dans
cius jouent un rôle fondamental. Les gens ce contexte culturel (éducation, cinéma, litpréfèrent aller sur place apprendre la lan- térature), s’identifient plutôt à cette Europe
gue. Mais il est clair que l’apprentissage du — pas l’Union Européenne — en ce qui
chinois progresse vite. Les parents envoient concerne les valeurs, la langue, la culture et
leurs enfants étudier à Xi’an ou Harbin, en — la religion ayant été bannie pendant des
particulier, dans des écoles spécialement décades — les habitudes traditionnelles, la
conçues pour des étudiants d’Asie centrale, nourriture, les styles de vie.
du Caucase, de Mongolie ou de Sibérie, qui
enseignent le chinois directement à partir
du russe. Au bout d’un an ou deux, les
meilleurs poursuivent leurs études pour obtenir des diplômes, certains reviennent au
pays travailler comme interprète, d’autres
encore se lancent dans les affaires.
C. : Quels sentiments inspirent la Chine : peur,
animosité, espoir ? Y-a-t-il un rêve chinois en
Asie Centrale ?
C. : Et les jeunes ?
F. N. : Il y a un fossé entre les générations.
Les parents sont plus européens. Les jeunes regardent davantage vers la Chine. Ils
écoutent de la musique chinoise. Ils ont
tous un iPod. Quant à déterminer si un iPod
représente une part de rêve américain ou
chinois, il faut savoir qu’en Asie centrale,
le téléphone mobile, un rêve inaccessible, est soudain à portée de la main
•••
Connexions / mars 2010 71
DOSSIER
专栏
grâce à la proximité de la Chine.
•••
Impossible d’aller à New York acheter un
iPod, mais si un cousin revient de Chine, il
a souvent avec lui une vingtaine de iPod
d’occasion qu’il revend bon marché. Ce
petit appareil est désormais associé à un
mode de vie chinois, à celui qui revient de
Chine avec un look particulier et son MP3
et qu’ils appellent « le Chinois ». Cela crée
une image forte pour le pays. N’oublions
pas que l’Asie centrale reste très pauvre,
sans industrie. Ce qui maintient les gens en
vie c’est le shuttle business. 90% de ce que
les gens consomment vient d’ailleurs : de
l’Ouest, de la Russie, des émirats — autre
grande découverte récente — et de la
Chine. A chacun son look. L’Asie centrale,
très isolée il y a seulement 10 ans, s’est
ouverte. Dans les capitales, des boutiques
allemandes ou des émirats voisinent avec
des boutiques chinoises… Chaque tenancier rapporte de ses voyages des denrées
qui véhiculent une culture. Par exemple à
Bichkek, on trouve partout des narguilés,
interdits sous les Russes car symboles de
décadence. Apportés par les Turcs, ils sont
devenus un produit et un style de vie.
L’Ouest a proposé ses vêtements cool, les
jeans, quelques restaurants. La Chine ses
iPod et ses MP3 bon marché.
C. : La Chine ne remplace donc pas l’Occident,
mais s’ajoute au menu… ?
F. N. : Exactement. La force de l’Asie centrale, soumise à tant d’empires et de cultures,
c’est d’avoir su les intégrer. L’indépendance
ne date que de 20 ans. Ces pays recherchent encore leur identité. Ils avaient perdu
la Chinese connection. Ils viennent de la retrouver et sa puissance économique renforce encore son attraction. Un exemple :
la présence des compagnies pétrolières
chinoises dans la zone. Un pipeline de
7 000 kilomètres a été construit pour transporter le pétrole du Turkménistan vers l’Europe via l’Azerbaïdjan, l’Arménie… Chacun
espère, en faisant étudier le chinois à son
enfant, qu’il trouvera ainsi un travail dans
une raffinerie du Turkménistan où son patron sera chinois. Propos recueillis
•
par Anne Garrigue
h t t p : / / f r. w i k i p e d i a . o r g / w i k i / O r g a n i s a t i o n _ d e _
coop%C3%A9ration_de_Shanghai
2
Les Hui sont des chinois musulmans venus du Shaanxi au
XVIIe siècle qui représentent environ 100 000 personnes
surtout présentes au Kazakhstan et Kirghistan
3
l’Asie centrale se compose de cinq pays : le Kazakhstan (16
millions d’habitants), avec Almaty l’ancienne capitale et
Astana la nouvelle capitale; le Kirghizstan (4,8 millions, capitale
Bichkek); l’ Ouzbékistan (25,1 millions ; Tachkent); le Tadjikistan
(Douchanbe, 6,7 millions) ; Turkménistan (Achkhabad,
4,8millions) www.asie-centrale.com/
1
72 Connexions / mars 2010
Les soldats de la célèbre Armée de Terracotta à Xi’an attirent de moins en moins les touristes
举世闻名的西安兵马俑吸引的外国游客越来越少。
Tourisme
Un déficit d’image
La Chine dispose d’une forte capacité
d’attraction touristique. Son patrimoine
ancien (34 sites classés par l’Unesco), ses
paysages magnifiques, sa gastronomie,
son artisanat, les conditions d’accueil et un
excellent rapport qualité/prix ont de quoi
séduire. Pourtant, malgré un quatrième
rang comme destination touristique mondiale (130 millions de voyageurs en 2008), le
constat mérite d’être nuancé pour plusieurs
raisons.
D’abord les chiffres. Les 130 millions globaux incluent en fait 105 millions de touristes en provenance de Hong Kong, Macao
et Taïwan. Non seulement ce chiffre est en
baisse de 1,4% par rapport à l’année précédente sur le total, mai si l’on ne garde que
les 25 millions de touristes qui viennent
vraiment du monde non-chinois, cette
baisse est encore plus forte (- 6,8%) et elle
s’est accélérée en 2009 : - 9,8%.
On observe donc une véritable désaffection des visiteurs étrangers qui inquiète
certaines métropoles touristiques comme
Xi’an où le tourisme représente 16% du
PIB municipal. Pourtant il semble que le
tourisme domestique, en augmentation, a
pris la relève avec 1 160 milliards de Rmb
étrangers.
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
de recettes en 2008 (environ 170 milliards
de dollars) et désormais 75% du total des
visiteurs.
La tenue des JO, le tremblement de terre
dans le Sichuan et les manifestations antichinoises liées à la question tibétaine
expliquent sans doute la mauvaise performance en 2008 qui fait suite à une forte
augmentation en 2007 (+ 17,5%).
Déjà, après les évènements de Tian An Men
en 1989, la crise du SRAS en 2003, avait provoqué une chute.
Absence de communication à
l’international
Pourtant l’explication ne suffit pas. D’autres
pays sont confrontés à ce type de problèmes (Indonésie, Egypte) et parviennent
à en limiter la portée grâce à un important
effort de communication. Le paradoxe de
la Chine réside dans l’absence de politiques
à destination des étrangers malgré l’essor
touristique. D’après Patricia Tartour, fondatrice du groupe français Maison de la
Chine spécialisé dans le tourisme vers la
Chine, la Corée et le Japon, l’office du tourisme chinois à Paris reste discret, reçoit peu
le public et ne s’occupe pas des professionnels français du secteur. « Il semble que
leurs équipes consacrent essentiellement
leur temps à organiser les séjours des délégations en France et n’aient pas de budget
communication. » Invitée l’année dernière
à Chengdu pour la conférence internationale sur la relance du tourisme, elle — et
d’autres professionnels du secteur — ont
tenu un même discours sur le modèle à
suivre de l’Inde ou du Maroc, qui organisent des campagnes de communication
exemplaires telle que « Incredible India ».
Finalement, pour l’instant, ce sont les
agences de voyage étrangères qui vendent
le mieux la Chine à leurs compatriotes, en
les aidant à comprendre ce pays en évolution sur lequel circulent des messages contradictoires. Qu’elles soient mieux placées
pour le faire n’est pas étonnant puisqu’elles
connaissent bien le goût et l’imaginaire de
leurs compatriotes, de la même façon que
les Chinois vendent sans doute mieux que
personne la France à leurs concitoyens.
La Chine a donc tous les atouts nécessaires
pour attirer les touristes étrangers, l’unique
bémol tenant aux limites de l’offre actuelle
par rapport au potentiel du pays — les infrastructures pour des produits tels que
le balnéaire, la location de voiture sans
chauffeur, les habitats dans les réserves
naturelles… Mais pour Patricia Tartour, le
problème est ailleurs : « L’intérêt [pour la
Chine] est profond et ce sera une montée
en puissance peut-être chaotique mais inéluctable. Ce qui retarde le processus c’est
un déficit d’image parce que la Chine n’a
aucune communication institutionnelle
soutenue en matière de tourisme. » •
Cat heri ne Debeau ma rché
旅游业:
形象宣传得不够
2008年,中国以接待1.3亿名游客成为世界第
四大旅游地,她拥有真正的吸引力。然而,
这个数字要相对看待。一方面,它包括来自
香港、澳门和台湾的游客,他们占总数的
1.05亿以上。另一方面,与上一年相比,游
客数量下降了1.4%,只保住了2500万来自国
外的游客,下降了6.8%。2009年,游客数量
继续减少,与2008年相比下降了9.8%。
即便如此,中国旅游收入却没有停止增
加—2008年旅游总收入为11600亿元(约合
1700亿美元),这是由国内旅游业的飞速增
长拉动的,国内旅游收入为8750亿元,占总
收入的75%。
外国游客的疏远让西安感到不安(西安旅
游业的收入占其GDP的16%),正如2008年
底《中国日报》一篇文章的题目所见证的那
样:“兵马俑感到了经济危机的打击”。
游客数量的减少或许是2007年增长17.5%的
反冲,以及奥运会召开、四川地震和西藏问
题所致的反华示威的影响。国际环境对旅游
业产生不利影响已经不是第一次了,相同的
现象在1989年天安门事件后以及2003年非典
中看到过。
其他国家像印度尼西亚和埃及也会碰到此
类问题,他们经常受到恐怖活动的袭击,但
他们总能通过有效的公关来控制恐怖活动的
影响。
因此,吸引力就起了作用。愿望不是自行
产生的,需要被鼓动......通过有效的旅游政
策。
中国的反常之处就在于缺乏针对外国游客的
这种政策,即使其旅游业正蓬勃发展。法国
法中之家旅行社(专门安排到中国、韩国
和日本的旅游)的创办人塔图尔(Patricia
Tartour )认为,在巴黎的中国旅游局鲜为
人知,很少接待公众,也很少关心法国的同
行。“他们的团队似乎把时间主要用来组织
赴法代表团,而且没有对外宣传的预算”。
去年她被邀请参加成都的一次振兴旅游业的
国际会议,她和其他业内人士发表了一篇关
于学习印度和摩洛哥模式的演讲,这两个
国家组织了一些值得效仿的宣传活动,例
如“不可思议的印度”。
目前,主要是外国旅行社在向它们的同
胞推销中国,尤其是帮助他们更好地了解这
个变革中的国家。关于这个国家,流传着一
些矛盾的信息。外国的旅行社更适合推销中
国,这一点都不奇怪,因为它们非常了解自
己同胞的喜好和向往,同样,中国人或许比
任何人都能更好地向自己的同胞推销法国。
无论如何,中国拥有吸引外国游客的一切
必要优势:古老的文化和自然遗产(有34处
被列入联合国教科文组织的世界遗产),优
美的景色,美食,手工艺,接待条件和极高
的性价比。与国家的发展潜力相比,唯一掣
肘的是目前所提供的旅游产品的限制:配套
的基础设施依然不够,例如海水浴场、自驾
车租赁、自然保护区的居住等。
塔图尔这样总结情况:“人们对中国的兴
趣浓厚,这将保持强有力的上升势头,或许
是混乱的,但是不可阻止的。耽误这一进程
是一种形象上的损失,因为中国没有任何持
•
久的在旅游方面的官方宣传。”
Connexions / mars 2010 73
DOSSIER
Les arts martiaux chinois et les arts énergétiques connaissent un véritable engouement en Occident.
中国的武术和气功在西方备受推崇
Chine éternelle
Quand la tradition devient commerce
A la fois source de crainte et de fascination, la Chine s’est peu à peu imposée à partir du
XIIIe siècle dans l’imaginaire occidental. Aujourd’hui, ce sont surtout des éléments de la
tradition chinoise qui attirent le plus les Occidentaux.
Sères, Cathay, céleste empire, terre des
fleurs, terre des herbes, fleuve bleu, fleuve
jaune, fleuve du dragon noir, grande
muraille… Voilà quelques pièces du
patchwork de la Chine éternelle encore
tissé aujourd’hui par l’Occident. Au
commencement, le pays fut d’abord le
symbole du mystère de la fabrication de
la soie, secret gardé pendant 3000 ans. La
fascination des Occidentaux grandit plus
tard, à la lecture des premiers récits de
74 Connexions / mars 2010
voyageurs, marchands et missionnaires
du XIIIe siècle, et notamment de Marco
Polo. Dans cette Chine dominée par les
Mongols, les ponts en pierre le disputent
aux épices, soieries et pierreries… « Il
décrit une terre si envoûtante de par
sa nouveauté qu’y pénétrer pouvait se
comparer au fait de passer de l’autre côté
d’un miroir. C’est ce passage — d’une
Europe restée provinciale vers un empire
d’une éclatante étrangeté — qui confère
au récit encore aujourd’hui une qualité
quasi onirique », écrit la New York Review
of books1.
Si le thème de la Chine éternelle emprunte
à Marco Polo, les voyageurs n’ont pourtant
pas toujours donné une image positive
de la Chine. Au XVIIIe siècle, la mode des
chinoiseries associe de nouveau Chine et
fantastique, et célèbre un univers hanté de
dragons et de phœnix. Comme l’explique
Cyrille Javary, sinologue et traducteur
© Imagine China
专栏
•••
© Imagine China
© Imagine China
du Yi Jing, le kaléidoscope de l’éternel de musée. Cette Chine d’autrefois, voire
chinois prendra d’autres couleurs par la hors du temps, fait aussi le bonheur des
suite. « Au XIXe siècle, la Chine apparaît vendeurs de reproductions (vases Ming)
comme un pays colonisé, avec en toile de et des antiquaires (vendeurs de pipes,
fond l’image, déformée par l’occupation pinceaux, cages à grillons des années
mandchoue, de Chinois fourbes, sales, 30…). « Alors que le fait marquant du XXIe
cruels, et portant la natte. » Aujourd’hui, la siècle fut l’enrichissement de l’Asie en une
Chine est aussi bien vue comme un pays génération, il semble que les Occidentaux
à la civilisation cinq fois millénaire que ont arrêté le temps au chapitre où ils
comme l’atelier du monde. A l’élément possédaient le monde », analyse Cyrille
de fantasme positif, par
Javary.
nature très vendeur, vient « Même
Outre les objets chinois,
correspondre
l’élément apposé à un
les soins du corps, la
repoussoir du fantasme
médecine traditionnelle
produit de
négatif.
et les arts énergétiques
Tradition contre
rencontrent aussi un gros
supermarché,
modernité
succès. Ke Wen, 43 ans,
Si des fragments de culture aujourd’hui
est l’une des premières
chinoise pénètrent de plus le taoisme
ambassadrices du qi
en plus dans le quotidien
gong et du tai-chi en
fait vendre.
des Occidentaux — timbres
France. Depuis la création
a
fait
Ç
postaux à l’effigie des
de son association « Les
signes du zodiaque chinois
Temps du Corps »2 en
mystérieux,
— la Chine qui séduit le
1992, elle a formé plus
plus l’Occident, celle du beau,
de 500 professeurs et
fantasme positif, reste brumeux.»
vient de publier un
très associée à l’his-toire
livre visant à « offrir
ancienne.
Inversement,
les clés nécessaires à
vendre des articles rappelant trop la l’entretien de la santé par une méthode
Chine contemporaine n’est pas toujours naturelle utilisée par les Chinois depuis
bien vu, comme l’explique Virginie des milliers d’années ». Ke Wen, on le
Fournier, patronne de Shanghai Trio, voit, met l’accent sur la tradition, et s’en
une boutique de mode et d’accessoires explique : « Ce que la culture chinoise
fabriqués en Chine. « Au début, dans les peut le mieux apporter à l’Occident, c’est
salons, certaines personnes nous ont cette confiance instinctive en la vie, basée
reproché de travailler avec la Chine », sur l’union de la matière et du souffle. En
explique-t-elle. Depuis la PME a révisé Chine, c’est à la fois un art de vivre et une
son identité visuelle pour apparaître plus philosophie de la vie quotidienne. Depuis
internationale.
son origine lointaine, la culture chinoise
En France, la Chine éternelle se retrouve n’a jamais cessé de privilégier l’harmonie
dans l’univers baroque d’Antoine et Lili et l’équilibre au cœur du mouvement
ainsi que chez Nature & Découvertes, incessant de la vie ».
dont les « théières à fleurs de cerisiers » Cet engouement pour les arts martiaux
sont présentées comme très en vogue chinois, la jeune fédération française de qi
sous les dynasties impériales. Revisités gong le mesure par la statistique : entre
à l’aune de l’histoire chinoise, les objets 2002 et 2009, elle est passée de 4 585 à
les plus banals apparaissent donc sous 13 000 membres, pour un total de 40 000
un jour nouveau, tel un tabouret que pratiquants réguliers. Le qi gong a même
les cordonniers chinois utilisent pour pénétré la sphère sociale, puisqu’on le
trouve aussi bien dans les écoles et les
« s’asseoir à dix centimètres du sol ».
La Compagnie française de l’Orient et maisons de retraite qu’en milieu carcéral.
de la Chine se positionne quant à elle A la popularité du qi gong répond celle
depuis quarante-quatre ans sur l’artisanat du taoïsme. Selon Frédérique Pons, des
de luxe, et ses boutiques ont des allures Editions Albin Michel, la traduction
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Quand les créateurs contemporains revisitent les classiques…
当当代艺术家重新看待古典作品……
Connexions / mars 2010 75
DOSSIER
专栏
du Yi Jing a connu un véritable
••• succès, avec 25 000 exemplaires
vendus. Les experts en management
l’ont compris, tel Hervé Sérieyx, auteur
de Dix leçons chinoises pour managers
occidentaux. « Même apposé à un
produit de supermarché, aujourd’hui,
le taoïsme fait vendre, remarque
Cyrille Javary. Ça fait mystérieux, beau,
brumeux. » A noter aussi que le Grand
Palais va consacrer pour la première fois
une exposition au tao à partir du 31 mars.
Une modernité stylisée
Si le potentiel d’attraction de la Chine se
situe plus dans le passé, cela n’a jamais
empêché les créateurs de revisiter la
culture traditionnelle. On l’a vu avec
des objets du quotidien, qui, rattachés
à l’histoire, prennent de l’épaisseur et
transportent dans l’univers chinois.
On le voit aussi à travers l’exemple de la
marque de prêt à porter hongkongaise
Shanghai Tang. Créée en 1994 par
David Tang, elle est considérée comme
la première maison de luxe chinoise et
possède 40 boutiques dans le monde.
Le concept de Shanghai Tang consiste
à mêler un design chic et contemporain
avec des éléments inspirés de la Chine
classique. « Shanghai Tang représente
l’essentiel de cinq mille ans de culture
chinoise propulsée dans le XXIe siècle »,
résume le fondateur. Or d’après le PDG
Raphaël Le Masne de Chermont, « le
potentiel d’inspiration du patrimoine
chinois est infini et extrêmement varié.
Les chinoiseries, le Shanghai des années
30, les meubles épurés, c’est bien, mais
la Chine c’est bien plus que ça. Nous
interprétons la tradition de manière
contemporaine ». A la clé : la collection
printemps 2010 « Love restraint » s’inspire
de la façon dont les Chinois expriment
leurs sentiments amoureux. Preuve que
le détail a son importance : pour dessiner
les motifs des robes en soie, les stylistes
ont fait appel à des maîtres calligraphes.
Revisité à l’aune de la modernité, l’éternel
chinois semble avoir de beaux jours
devant lui, y compris au cinéma, comme
le montrent les films de Wong Kar-wai.
•
Hélène Duv ig neau
76 Connexions / mars 2010
© Imagine China
3
« L’Amérique évoque d’abord un rêve pour leur propre pays, celui de dépasser ce géant
qui conserve jalousement son pouvoir sur le monde. » 美国首先令人想到的是一个对自己国家的梦
想,超过美国的梦想,这个大国小心翼翼地保持其世界权力。
Planète jeunes
Rêve chinois, rêve américain ou rêve
français ?
Que représentent la Chine, les Etats-Unis et la France pour les
jeunes étrangers qui viennent étudier et travailler en Chine et
pour les Chinois qui étudient le français ?
Une amie chinoise parlant français et travaillant à Pékin m’a d’abord malicieusement
répondu : le rêve américain se résume à
« pouvoir, pouvoir », le rêve chinois à « argent, argent » et le rêve français à « loisirs,
loisirs »… Explosion de rires des jeunes
Français et Chinois autour de la table, qui
ont trouvé cette caricature assez juste.
Le rêve chinois : dynamisme, nouveauté et opportunités
De fait, qu’on soit Chinois ou pas, la croissance économique de l’Empire du milieu
et ses promesses ont beaucoup à voir
avec la fascination qu’il exerce. Mais pas
seulement. Presque tous les sondés ont
placé le dynamisme de la Chine, et les innombrables opportunités que le pays peut
offrir, en matière de travail, mais aussi de découvertes et d’expériences variées, comme
premier critère d’attraction.
Certains Français ont pensé qu’avec un
diplôme moyennement reconnu, ils auraient plus d’opportunités de construire
une belle carrière en passant par la Chine.
Maxime a voulu tenter sa chance après un
voyage à Canton, et créer sa propre entreprise de sourcing, Laboit’Atout, plutôt que
de s’inscrire à l’ANPE. D’autres se sont laissés
attirer par l’envie de nouveauté, cherchant à
fuir le quotidien français pour se confronter
à la complexité de ce grand pays, qui impose une constante attention.
Plusieurs jeunes Asiatiques (Japonais,
Coréens, Malaisiens, Indonésiens) évoquent
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
également cette dernière raison, ainsi que française et de son industrie du luxe florisle resserrement des liens économiques en- sante. Une jeune Malaisienne travaillant
tre leur pays et la Chine et la possibilité pour à Pékin a résumé ainsi son idéal français :
des jeunes sans grands moyens d’avoir un « plus que le seul produit du travail, l’idée
meilleur niveau de vie en Chine où le coût qu’une partie de la vie est d’apprécier au
de la vie est faible. Plusieurs
mieux ce qu’elle a à ofd’entre eux sont également
frir. »
partis pour rechercher des « Un rêve
Rêve américain versus
origines chinoises oubliées.
rêve chinois
Le rêve français : qualité chinois
A cela s’oppose le rêve
de la vie et richesse cul- commun :
américain, qui renvoie
turelle
tous les jeunes étranla réduction
La majorité des Chinois ingers (non-Chinois) à sa
terrogés ont choisi la langue des inégalités
définition classique, soit la
française comme un avanpossibilité pour toute perde richesse. »
tage compétitif sur le marché
sonne vivant aux Etatsde l’emploi par rapport aux
Unis de prospérer par son
cohortes de jeunes diplômés parlant an- travail. Ils n’y croient pas pour autant, mais
glais, un atout supplémentaire pour tra- ont en tête l’image de la famille américaine
vailler avec l’Europe et les pays africains.
modèle, qui ne dit rien aux Chinois.
Le rêve français, lui, est placé sous le signe Ces derniers voient dans les Etats-Unis le
des loisirs, que ce soit pour les Français qui pays de la démocratie et de la liberté ainsi
évoquent la qualité de vie de leur pays ou que le plus grand diffuseur culturel monpour les étudiants chinois qui rêvent des ar- dial, le pays du cinéma et de la musique, de
tistes à Montmartre, de la richesse culturelle MacDo et KFC, etc.
Cependant, l’Amérique évoque aussi
d’abord un rêve pour leur propre pays : celui
de dépasser ce géant qui conserve jalousement son pouvoir sur le monde.
Quant aux étrangers, beaucoup pensent
que le mythe du « tout est possible en travaillant dur » a existé lorsque les Etats-Unis
étaient un jeune pays en croissance, comme l’est la Chine aujourd’hui. Une partie du
rêve américain se serait donc transformée
en rêve chinois, à ceci près que l’ascenseur
social semble déjà en panne pour de nombreux Chinois, cassé par le poids des inégalités ; et que le rêve des jeunes Chinois
qui commencent à gagner leur vie n’est
pas de consommer, mais d’épargner pour
acheter un logement et assurer sa sécurité
future.
Une jeune Chinoise m’a d’ailleurs dit que, s’il
existait un rêve chinois commun, c’était la
réduction des inégalités de richesse et une
amélioration du niveau de vie pour tous
lorsque croît le PIB.
•
Cat heri ne Debeau ma rché
Connexions / mars 2010 77
DOSSIER
专栏
Dong Qiang,
est professeur à l’Université de Pékin.
« La Chine manque
de discours d’interprétation »
Ami de l’écrivain Jean-Marie le Clézio et de l’architecte Paul Andreu,
conférencier, auteur, éditeur, artiste et traducteur, Dong Qiang
est l’un des intellectuels francophones chinois les plus actifs. Il a
participé activement dès 1995, à la création des éditions Bleu de
Chine en France, spécialisées dans la traduction d’auteurs chinois
contemporains. Traducteur de plus de vingt-cinq livres, il œuvre
dans les domaines de la philosophie, de la littérature et des arts, et
ceci dans les sens franco-chinois et sino-français, ce qui est rare.
Connexions : Que pensez-vous de la politique actuelle de développement
du soft power en Chine ?
Dong Qiang : J’ai été un des premiers Chinois conscients de la nécessité de mieux présenter la culture chinoise à l’étranger. Chinois
à Paris à la fin des années 80, je me suis rendu compte qu’il y avait
très peu de choses sur la Chine et j’ai réagi en traduisant, en aidant
à la création d’une maison d’édition. Aussi je vois d’un très bon œil
le fait que le gouvernement chinois se lance dans une politique
de promotion culturelle à l’étranger. Quand il monte des Instituts
Confucius, je ne peux qu’applaudir même si, dans le concret, j’ai
beaucoup de réserves.
C. : Pourquoi ces réserves ?
D. Q. : Dans les instituts Confucius, on apprend à parler le chinois,
mais où tout cela mène-t-il ? On retombe trop vite sur un peu de
cuisine et de calligraphie, sur quelque chose de fade. Le vrai problème de fond c’est que la Chine manque d’intellectuels capables
de tenir un discours d’interprétation sur leur propre culture. Quand
on évoque le soft power en Chine, on le trouve souvent associé à
cet autre concept 核心价值观 (hexinjiazhiguan c’est-à-dire « va78 Connexions / mars 2010
leurs noyaux »). Or quelles sont ces valeurs de base que la Chine
peut présenter au monde ? Aujourd’hui, on remet sur scène Confucius à travers les études nationales (guoxue 国学). Mais ce retour
en arrière n’est pas bien digéré. La force d’une culture, c’est d’être
capable de bien interpréter ses classiques. Or la Chine tâtonne,
parle de Confucius, de Laozi, met en valeur des tombeaux récemment découverts… sans savoir vers quoi tout cela va mener. C’est
de l’archéologie. Nous savons organiser de grands événements
comme les Jeux olympiques ou l’Exposition universelle mais nous
n’arrivons pas à nuancer les choses. Je ne vois personne capable
de nous expliquer pourquoi nous avons besoin des classiques, en
quoi ils peuvent nous être utiles. Je suis même incapable de vous
citer un nom d’intellectuel chinois qui écrit régulièrement des livres
qui me nourrissent et m’éclairent.
C. : On passe par un moment commun, depuis trois ou quatre ans, de prise
de conscience de sa force qui justifie une forme de nationalisme et un retour à des thèmes liés à l’histoire et à la grandeur de la Chine. En même
temps, l’irruption du marché semble réduire la possibilité de faire un travail
d’auteur et on peine à relier l’ancien et le moderne. Qu’en pensez-vous ? D. Q. : Le cas du réalisateur Zhang Yimou est très parlant. Son films
Les trois fusils est mauvais et a effaré le public chinois. Même chose
pour Confucius. Ce n’est pas parce que l’intention est bonne qu’on
aboutit à un bon résultat. On manque de direction générale. La
Chine aimerait créer des choses originales mais elle n’a pas encore réussi, sauf dans l’architecture peut-être avec Ma Qingyun par
exemple. L’art contemporain a du succès, mais les artistes les plus
connus ne font rien de chinois. Ils sont les descendants des Américains, du Pop art. Leur vraie force, c’est de regarder la réalité en face
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Dong Qiang, « Personnellement, j’agis tous les jours en faveur de l’ouverture de la Chine.»
董强说:
“作为个人,我每天都在为中国的开放而行动”。
et de témoigner de l’évolution rapide de la société chinoise mais
l’écart est trop grand entre cet art contemporain hyperréaliste, où
l’argent est roi, et un système hyperclassique d’études nationales
avec une interprétation au pied de la lettre de Confucius et des
tentatives pour faire lire aux enfants des textes anciens. Et au milieu,
on trouve une masse de gens qui essaie de vivre mieux, d’avoir une
voiture et une maison et qui conditionne le marché culturel.
Il y a pourtant un secteur qui mérite d’être suivi, c’est celui des
téléfilms qui véhiculent des valeurs contemporaines. C’est apparemment moins prestigieux que le cinéma qui fut l’arme principale
du soft power américain, mais contrairement à d’autres formes
de productions culturelles qui sont tellement marquées par leur
origine occidentale, le téléfilm est un genre que les Asiatiques ont
pu se réapproprier facilement parce qu’il correspond un peu au
roman fleuve traditionnel (roman par chapitres) comme Au bord
de l’eau, Le rêve dans le pavillon rouge. C’est un phénomène très asiatique et cela a un impact beaucoup plus important en Chine que
le cinéma. En principe, cela ne marche encore que dans le monde
chinois. Mais dans le futur ?
C. : Vous parlez d’un déficit de capacité d’interprétation. La Chine pourtant
fait beaucoup parler d’elle.
D. Q. : La Chine fait parler d’elle à cause de sa réalité, pas à cause
des images ou des discours qu’elle crée. Et ce réel est tellement
fort et puissant que cela donne à tout moment l’impression que
la Chine va créer des images fantastiques. C’est cette potentialité
permanente qui fascine.
Pour construire notre discours d’interprétation, nous devrons
éclaircir ce paradoxe. La Chine est entrée dans la modernité par la
force des canons de l’Occident. Comme les Chinois voulaient être
puissants, occuper une place dans le monde, beaucoup ont accepté les valeurs occidentales, ont copié des modèles occidentaux
mais ils préfèrent ne pas trop en parler. Il faut au contraire vanter
les origines chinoises de sa réussite. Dans les aéroports, passent
régulièrement des vidéos d’hommes d’affaires qui ont réussi et
expliquent leur succès par leur lecture de Confucius ou du Livre
des Mutations. Ils donnent une interprétation moderne des Classiques, certes, mais il s’agit plutôt d’un usage direct, pragmatique,
en prenant des phrases des classiques au pied de la lettre, parfois
en réécrivant la phrase. Ils peuvent utiliser n’importe quelle notion
comme ils veulent. Ils ont raison puisqu’ils ont réussi.
D’autre part, il ne faut jamais oublier qu’une vision nationaliste
purement chinoise, ne permet pas de comprendre la Chine moderne. La Chine n’est pas un bloc. La modernité depuis 100 ans a
complexifié la Chine. Il y une dose très forte d’occidentalisation,
en tout cas sur le côté « hard ». Les grands appartements sont tous
américains. Le rêve chinois, c’est presque une copie du rêve américain aujourd’hui. Si on ne comprend pas ça, on ne comprend
pas la Chine.
C. : Quand on parle de soft power culturel à des Chinois, très souvent ils le
voient comme une notion à usage interne : un retour à une fierté culturelle,
une forme de nationalisme ? Les Chinois s’intéressent-ils vraiment à leur
rayonnement culturel à l’étranger ?
D. Q. : La plupart du temps, le premier souci des Chinois n’est pas le
rayonnement du pays à l’étranger. Tous les Chinois — intellectuels
compris —, pensent que nous avons fait trop de bêtises, perdu
trop de temps, que nous sommes dans une période de
•••
Connexions / mars 2010 79
DOSSIER
© Imagine China
专栏
«Les téléfilms sont un genre que les Asiatiques ont pu se réapproprier facilement parce
qu’il correspond un peu au roman fleuve traditionnel ». Ci-dessus : La série TV « Dwelling
Narrowness », le quotidien de deux soeurs pour s’en sortir dans une métropole, rencontre
un vif succès en Chine. 电视剧是一种让亚洲人更容易找到归属感的类型,与长河小说有些一致。上图:电视剧
《蜗居》讲述了两姐妹在一座大城市的奋斗历程,该剧在中国大获成功。
rattrapage et que nous ne voulons pas de perturba•••
tions. Nous sommes dans l’état d’esprit du sportif qui veut
courir le plus vite possible et arriver au bout. Ce qui se passe
à l’extérieur ne nous intéresse que si ça peut nous aider. En
même temps, les Chinois aiment ce qui donne de la face, recevoir des compliments. Mais ce n’est pas le premier souci…
C. : Dans une planète qui rétrécit, il y a pourtant ceux qui demandent des
comptes à la Chine. Face à ces critiques, le soft power n’est-il pas un moyen
d’attirer la sympathie, d’exercer un leadership moral ?
D. Q. : Le plus souvent, vous le savez, la réponse chinoise c’est :
« Nous avons encore beaucoup de problèmes à résoudre. Nous
sommes encore peu développés ». Et puis, en Chine, il y a cette
idée taoïste : un vrai pouvoir n’est pas éclatant. Tous les Chinois
recherchent un peu de puissance. Même un laobaixing, un chinois
moyen, veut du pouvoir d’achat, un peu de puissance en tant que
consommateur.
Et en même temps, les Chinois savent que ce qui est tapeà-l’œil n’est pas la vraie puissance. On entend beaucoup ces
jours-ci parler de didiao 低调 gaodiao 高调, basse et haute tonalité… Les Chinois aiment les gens discrets, de basse tonalité,
mais puissants. En Chine, l’idée de séduire n’est pas forcément
connotée positivement ou associée à la puissance. Et puis les
Chinois sont pragmatiques. Ils pensent que si on présente un
intérêt, on est attractif. Nul besoin d’effort particulier de séduction.
L’autre viendra parce qu’il y gagne. Dans le taoïsme, d’ailleurs, l’eau
n’a pas besoin de séduire, c’est une puissance passive mais très
forte.
80 Connexions / mars 2010
C. : Selon vous, quels sont les éléments essentiels qui permettraient à la
Chine de mieux développer son soft power ?
D. Q. : S’ouvrir. Personnellement, j’agis tous les jours en faveur de
l’ouverture de la Chine. S’il n’y avait pas eu l’Inde, il n’y aurait pas
de bouddhisme chinois. S’il n’y avait pas eu l’Occident, il n’y aurait
pas eu de modernisation. La culture chinoise est forte parce qu’elle
est capable d’absorber, de siniser, mais aussi de s’adapter et de
changer. A Xi’an, la mosquée chinoise n’a rien à avoir avec une
mosquée musulmane mais les musulmans viennent y prier. L’esprit est musulman, mais la forme est chinoise. Avec cette force, la
Chine maintient une unité. Cette impression de non-changement,
de rester toujours elle-même, c’est grâce à ses adaptations et ses
changements qu’elle a pu se maintenir. C’est pour cela que suis
favorable aussi à des grands évènements comme l’Exposition universelle. La Chine est intéressante en tant qu’elle-même, même si
elle ne sait pas encore proposer des discours très intéressants. Il
est bon que les gens se déplacent et observent la réalité chinoise
directement. C’est le premier pas. Le jour où la Chine sera plus
ouverte, les choses changeront. Et un vrai soft power va apparaitre.
Mais cette ouverture ne passe pas que par Internet. Il faut venir sur
la terre chinoise. En surfant trop facilement, on n’entre pas dans
la profondeur, dans les détails. Personnellement, j’aime la terre
chinoise. Elle mobilise le corps comme l’esprit… Mais comme la
Chine fait aussi rêver par son côté céleste, il faut essayer d’injecter
un peu de réalité dans ce rêve céleste ou un peu de rêve dans cette
réalité trop terre à terre. Pour moi ça c’est le plus grand défi culturel
de la Chine ! .
Propos recueillis par Anne Garrigue
•
avec l’Equipe France de l’appui des entreprises en Chine
Une offre conjointe CCIFC/Ubifrance :
Un contact privilégié avec les autorités locales, aux côtés de l’Ambassadeur ou du Consul Général, avec le
soutien du Service Economique de l’Ambassade
Un retour d’expérience des entreprises déjà implantées dans ces villes.
Des programmes individuels sur mesure : rencontres avec des entreprises chinoises et interlocuteurs ciblés, et/
ou visites de sites sélectionnés en fonction des projets.
Les villes choisies (programmées en 2010)
Heilongjiang
天津
Tianjin
Jilin
Xinjiang
Mongolie Intérieure
Pékin
Ningxia
Qinghai
Shanxi
Shandong
Shaanxi
Tibet
Liaoning
Hebei
Gansu
Henan
Anhui
Sichuan Chongqing
Hubei
大连
Dalian
Jiangsu
Shanghai
Zhejiang
重庆
Chongqing
Guizhou
Yunnan
Hunan Jiangxi
Fujian
Guangxi Guangdong Taiwan
Canton Hong Kong
厦门
Xiamen
Hainan
Vos interlocuteurs du programme « Chine Villes d’Avenir »
Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine
www.ccifc.org
Claire ZHANG
Appui Commercial CCIFC
Tél : (+86 10) 6512 1740
Courriel : [email protected]
Mission économique-Ubifrance en Chine
www.ubifrance.fr
Marion LESPINE
Chef de pôle Intelligence Marchés, VIE,
Communication
Tél : (+86 10) 6539 1300 ext. 160
Courriel : [email protected]
DOSSIER
专栏
Rêves de Chinawood
Les cinéastes chinois sont pris entre censure politique et exigence commerciale.
Luisa Prudentino est
critique, spécialiste du cinéma de Chine continentale, chargée de cours à
l’INALCO et auteur du Regard des ombres, une histoire du cinéma chinois contemporain.
Connexions : Quand le cinéma chinois a-t-il commencé à se faire connaître hors de ses frontières ?
Luisa Prudentino : Le tout premier film
chinois qui a gagné un prix international
est Le chant des pêcheurs en 1935, au festival international de Moscou. Mais c’est en
1984, avec Terre jaune de Chen Kaige, que
le monde a découvert le nouveau cinéma
d’auteur chinois. Montré à Hong Kong, on
a crié au miracle. Il est vrai que les Chinois
reviennent de loin. Si leur cinéma a pu renaître de ses cendres aussi vite, c’est que,
même pendant la Révolution culturelle,
les films de propagande étaient techniquement aboutis. Quatre ans seulement
après la réouverture des portes de l’Institut,
a surgi la cinquième génération. Elle a lancé
le cinéma chinois dans une orbite internationale. Ses succès se sont prolongés dans
les années 90, avec, entre autres, Epouses
et concubines (Zhang Yimou) et Adieu ma
concubine (Chen Kaige), mais aussi Vivre
(Zhang Yimou) ou Le Cerf-volant bleu (Tian
Zhuangzhuang) jamais diffusés en Chine.
C. : Quelle image de la Chine véhiculaient les nouveaux réalisateurs de la 5e génération?
L. P. : La Révolution culturelle avait massacré
l’homme et ses idéaux de société parfaite.
L’individu se retrouvait meurtri, à nu. Les
nouveaux réalisateurs de la 5e génération
ont montré cette détresse. C’est évident
quand on compare un film de propagande
comme L’Orient est rouge où les danseurs
remplissent tout l’écran, où pas un cheveu
ne dépasse, avec Terre jaune où la campagne nue et rude exprime le désarroi de
l’individu.
C. : Mais aujorud’hui avec certains films ou la
cérémonie d’ouverture des JO, ne revient-on
82 Connexions / mars 2010
pas à l’esthétique des films de propagande ?
L. P. : Tout à fait. Le film La Fondation d’une
pauvreté, de prostitution. Bref, elle a abordé
tous les thèmes qui fâchent. Et des noms
république, sorti en 2009 pour le 60e anni- très connus aujourd’hui ont commencé à
versaire de la Libération, ou la cérémonie apparaitre : Jia Zhang-ke, Wang Xiaoshuai,
d’ouverture des JO, c’est de la propagande Lou Ye… Ensuite, la situation est devenue
pure et dure. Il ne s’agit plus de films d’of- plus complexe. Devant les salles obscures
frandes1, avec des buts bien précis. Mais on vidées — les unités de travail ne donnent
plus de billets gratuitey retrouve les mêmes formes.
ment, la TV et les dvd
Pourtant la Chine a changé. « Le film Vivre
pirates font une forte
Le cinéma n’est plus seuleconcurrence — les automent une arme idéologique. de Zhang
rités, gênées en outre de
Il est devenu une industrie Yimou
feindre d’ignorer ce dont
qui doit rapporter de l’argent.
n’a jamais été
le monde parlait, ont
Il faut des grands spectacles,
passé en 2003, un accord
avec une dimension ludique, diffusé en
avec les chefs de file du
qui remplissent les salles. Les
Chine. »
mouvement du cinéma
autorités essaient de trouver
indépendant. En échanla recette miracle pour plaire
ge d’un assouplissement
au grand public, tout en faisant passer quelques valeurs. Quand on dans les règles de censure, les réalisateurs
regarde La Fondation d’une République1 ont renoué le dialogue. Entre 2002 et 2004,
de Han Sanping, président de China film le cinéma connut une période de grâce qui
group, c’est tout à fait ça. Mais ce film n’a a permis à la 6e génération de tourner et
pas été diffusé à l’étranger. Il était à usage diffuser chez elle ses films : Jia Zhang-ke
a réalisé The world, Wang Xiaoshuai Shaninterne.
ghai dream. Ils ont pu tourner les films qu’ils
C. : Comment le cinéma chinois s’exporte-t-il ?
L. P. : Pour comprendre comment le cinéma voulaient en s’adressant à la fois aux publics
chinois s’exporte, il faut revenir sur les trente chinois et étrangers. Mais ils se sont retroudernières années. L’histoire se répète. La vés confrontés à une autre réalité. Le public
première renaissance du cinéma chinois chinois n’était pas au rendez-vous. Leurs
s’était faite après la Révolution culturelle. compatriotes préféraient se distraire avec
La seconde a eu lieu après la répression de des blockbusters américains ou chinois, malTian an men. Les cinéastes de la 6e généra- gré quelques — rares — bonnes critiques,
tion sont devenus indépendants par néces- comme celles de l’excellente revue de cisité. En juin 1989, aucun studio ne voulait néma Dangdai dianying. Ils souffraient aussi
d’eux. Ils ont dû prendre le risque de tour- d’une mauvaise distribution de leurs films
ner sans passer par les structures officielles, dans leur pays, où n’existait toujours pas
donc sans possibilité de diffusion dans leur de circuit d’art et d’essai. Heureusement,
propre pays. Ce sont les festivals étrangers les choses changent et récemment une
qui les ont fait connaître. Cette 6e généra- première salle réservée au cinéma d’auteur
tion, née hors des structures officielles, sans s’est ouverte à Pékin, Moma Broadway2.
contraintes, a pu parler de ce qu’elle voulait, C. : Y-a-t-il aujourd’hui un cinéma qui s’exporte et
de la réalité quotidienne, du malaise indivi- plaît à la fois aux Chinois et aux étrangers ?
duel dans une société sans repère, qui allait L. P. : Le public chinois aime les films où il
vers la modernité avec un revers de la mé- se reconnaît. Par exemple, le film de Feng
daille, qui souffrait du pouvoir grandissant Xiaogang If you are the one a fait un tabac
de l’argent, confrontée à des situations de en 2009. C’est une comédie légère
•••
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Une famille chinoise (Zuo you), 2006. Film de Wang Xiaoshuai avec Liu
Weiwei, Jiayi Zhang et Chen Taisheng.《 左右》,2006年出品。该片由王小帅导演,
Les filles du botaniste de Dai Sije (2006).
刘威葳,张嘉译,成泰燊主演。
戴思杰的影片《植物学家的女儿》(2006年)
Extrait de The
World
(Shijie)
de Jia Zhang-Ke
(2004).贾樟柯的影片
© Imagine China
《世界》(2004年)
If You are the one de Feng Xiaogang. Cette comédie qui a fait un tabac en Chine en 2009 et a été bien accueillie lors de sa projection en
France n’a pas encore trouvé de distributeur étranger. 冯小刚的影片《非诚勿扰》。2009年,这部喜剧片在中国大获成功,在法国放映期间也备受欢迎,但还未找
到国外的发行商。
Connexions / mars 2010 83
DOSSIER
© Imagine China
© Imagine China
专栏
Grand spectacle sur le tournage de La Fondation d’une République…
… avec Han Sanping au cadre.
《建国大业》再现阅兵大场面
韩三平在《建国大业》拍片现场
qui parle des aspects de la vie mo•••
derne chinoise. Un jeune gars cherche à
se marier et se heurte à des filles qui ne
le trouvent pas assez riche. Tout ça dans
un langage très pékinois. Pour l’instant, ce
film de bonne facture et qui a séduit les
spectateurs français lors de sa diffusion
au festival du cinéma chinois de Paris, n’a
pas trouvé de distributeur, parce qu’il est
jugé trop « chinois ». On préfère des films
de réalisateurs plus connus comme Jia
Zhang-ke. C’est un paradoxe. Les festivals
étrangers ont permis au cinéma indépendant d’exister mais ils ont fini par véhiculer une image à sens unique du cinéma
chinois. On dirait que seul un cinéaste
indépendant mérite d’être distribué et
que tout réalisateur officiel ne peut que
faire de mauvais films ! C’est d’autant plus
dommage qu’aujourd’hui trop de jeunes
réalisateurs chinois tournent moins par nécessité intérieure que pour plaire aux étrangers — on me propose d’ailleurs régulièrement d’aider à écrire un scénario qui plaira
aux étrangers. Par ailleurs, le public français,
même averti, ne suit plus systématiquement le cinéma chinois jugé trop sinistre.
Finalement, en ce moment, ce qui marche
84 Connexions / mars 2010
aussi bien en Chine qu’à l’étranger, ce sont
les films historiques exotiques, avec des arts
martiaux et des effets spéciaux comme
La Cité interdite, ou Héros (Zhang Yi Mou).
C’est d’ailleurs cette recette qu’ont voulu
appliquer les producteurs de Confucius
(le groupe China Film, sous la houlette
de Han Sanping, le réalisateur tout puissant de La Fondation d’une République, et
Hong Kong Dadi Entertainment), mais ils
ont échoué. Je me demande si la pauvre
réalisatrice Hu Mei (5e génération) a vraiment eu son mot à dire... Les producteurs
ont pris le film en main, ils se sont même
essayés à la production de jeux vidéos à
partir des scènes d’arts martiaux, mais en
vain. Le film n’est pas exportable ; le scénario est catastrophique. En ne voulant
pas montrer la figure du sage, mais celle
d’un homme qui a voulu tenir tête au gouvernement, ils ont produit un film où, pendant deux heures, on ne parle jamais de
l’enseignement de Confucius ! Le film, très
critiqué sur l’Internet, parfois avec beaucoup d’humour, n’a pas marché en Chine,
malgré l’éviction d’Avatar pour éviter de lui
faire de l’ombre pendant le Nouvel An.
C. : Que pensez-vous de ce que certains appellent la
bataille de Chinawood contre Hollywood. Correspondelle à une réalité ?
L. P. : Oui ! Mais la Chine y va très doucement. Pour vaincre Hollywood, elle veut
apprendre à utiliser les mêmes ingrédients
et les mêmes recettes en les sinisant. Après
le succès d’Avatar, on va voir plein de films
chinois sous influence.
C. : Vous n’imaginez pas un modèle original chinois
de films à grand succès ?
L. P. : Les Chinois sont surtout forts dans
la sinisation d’un modèle d’origine étrangère. Ils ont pu, dans les années 30, faire
des merveilles en transposant le contenu
et la forme du cinéma américain et soviétique dans un contexte chinois. Ils ont
su puiser dans leur patrimoine culturel,
dans l’éthique et l’esthétique chinoises de
quoi réaliser des films originaux. Avantguerre, Les anges des boulevards reprenait
le thème du film Le septième ciel de Frank
Borzage. C’est la même histoire, mais c’est
un film chinois, tant du point de vue du
contenu, parce qu’il montre la pauvreté du
Shanghai des années 30, que du point de
vue de la forme parce que les flash-back
originaux s’inspirent dans leur forme du
principe du vagabondage (you), propre à
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Intimité et vie quotidienne dans Suzhou River de Lou Ye (2000)avec l’actrice Zhou Xun.
娄烨的影片《苏州河》里体现的亲密和平常生活。上图:主演周迅
l’esthétique des rouleaux chinois où le regard flotte librement d’une scène à l’autre
sans contrainte de perspective. De même,
le cinéma de la 5e génération, très influencé par la Nouvelle Vague française et notamment par Truffaut, reste très chinois.
Cependant, je m’interroge sur l’avenir. A
vouloir faire du cinéma un moyen de gagner de l’argent, je me demande quelle
liberté on laisse aux auteurs, pris entre la
nécessité de plaire au goût du public qui
se tourne vers des films commerciaux où
l’on ne doit pas réfléchir et une censure
politique qui s’est renforcée depuis 2007.
C. : Quel rôle joue le nationalisme dans la création
contemporaine ?
L. P. : Dans les moments de crise de créativité, le cinéma chinois s’est toujours
tourné vers son patrimoine national. Il y
puise l’inspiration que ce soit dans des
épisodes de guerre — et le conflit sino-japonais est le sujet numéro 1 comme dans
Nanjing Nanjing — ou dans la littérature et
il n’est pas anodin que la réalisatrice très
connue Li Shaohong sorte un remake du
Rêve du pavillon rouge3. S’ajoute à cela le fait
qu’aujourd’hui, pour ne pas s’embêter avec
la censure, les réalisateurs reviennent vers
les grandes figures du patrimoine national.
Pourtant, je ne pense pas qu’un Jia Zhangke, par exemple, sera sensible à ces sirènes
nationalistes bon marché.
C. : Comment s’exportent les stars chinoises ?
L. P. : Elles aussi doivent veiller à leur image
et écouter les autorités. Tang Wei a été
mise à l’écart de toute production et manifestation suite à sa participation au film
Lust caution. Zhou Xun a préféré s’éloigner
des réalisateurs avec qui elle avait commencé sa carrière (Lou Ye Suzhou river, Dai
Sijie Balzac La petite tailleuse chinoise). Sur
des injonctions indirectes des autorités
soucieuses de l’image d’une actrice très
populaire, elle a refusé de jouer un rôle
d’homosexuelle dans Les filles du botaniste
de Dai Sijie.
C : Les cinémas de Hong Kong ou de Taiwan ont
connu un assez fort retentissement à l’étranger (In
the Mood for love, par exemple). D’autre part, les
cinémas japonais et coréens sont aussi très appréciés.
Comment se situe le cinéma chinois du continent dans
l’exportation des cinémas asiatiques ?
L. P. : Les cinémas de Hong-Kong ou de
Hsien. D’autre part, les hongkongais sont
les maîtres de la comédie et des films d’arts
martiaux.
Le cinéma en provenance de Chine continentale n’a pas connu une période de
création aussi fulgurante que son voisin
japonais, mais, depuis dix ans, les réalisateurs chinois sont plus créatifs que leurs
collègues japonais. En fait aujourd’hui, le
cinéma d’Asie le plus impressionnant vu
de l’étranger est le cinéma coréen. On y
trouve à la fois un cinéma indépendant et
une organisation locale et internationale
d’exportation, parfaitement au point dans
toutes ses composantes.
•
Propos recueillis
par Anne Garrigue et Sophie Lavergne
Film de propagande réalise pour un but précis
http://www.dailymotion.com/video/xaromt_la-fondationdune-republique-report_shortfilms
2
http://www.echinacities.com/Cityguide/Beijing/news/NewOpenings.aspx?n=4344
3
Le Rêve dans le pavillon rouge, qui date du XVIIIe siècle, est un
des quatre grands romans de la littérature classique chinoise,
avec l’Histoire des Trois royaumes, Le Voyage en Occident et Au
bord de l’eau.
1
1
Taiwan ont plus facilement accès à l’étranger car ils sont tirés par de grands réalisateurs comme Wong Kar Wai ou Hou Hsiao
Connexions / mars 2010 85
DOSSIER
专栏
A propos du film 孔子
Kongzi (Confucius)
© Imagine China
par Jacques Leclerc du Sablon
Lors des études de chinois, j’étais « entré
en confucianisme » par la porte诚
dans le texte du Zhong Yong 中庸, ce
classique chinois ! J’avais envie de voir
le film Confucius, avec des amis chinois.
J’ai apprécié la langue assez accessible
à mon oreille étrangère, sans doute au
prix d’un certain anachronisme. Parlaiton ce putonghua standard à l’époque ?
J’ai trouvé dans le choix de Chow Yunfat dans le rôle de Confucius une bonne
idée : il est une sagesse ronde, souriante,
conviviale et non-raide, sévère et triste.
Heureusement quand même qu’il y a
la tradition du « frapper de tambour »
pour calmer ses nerfs politiques ! Zhou
Xun, dans le rôle de Nanzi la courtisane,
est très belle.
Au-delà des acteurs, qu’ai-je vu ? Un
cours de science politique décrivant
trois approches de la question du
pouvoir. L’approche Confucius : le
film met en avant les fondamentaux
éthiques rigoureux qui feront la
force de la figure de Confucius dans
la tradition chinoise depuis plus de
deux mille ans. Mais ces principes ne
parviennent pas à porter leurs fruits
politiques. Ils dégénèrent dans la force,
puis la violence du « légisme » postconfucéen. Le film montre assez bien
la blessure morale que cette violence
laisse sur Confucius.
L’approche taoïste introduite dans le
86 Connexions / mars 2010
film par une improbable conversation
entre Laozi et Kongzi : retire-toi de la
scène politique, laisse le pouvoir être
ce qu’il est et recule pour être toimême. Ainsi va le monde. Reculer pour
se sauver dans une époque d’extrême
violence. Selon Laozi, c’est toujours le
soft qui gagne finalement ! Y compris
par le sens de l‘humour. « Il faut savoir
de temps en temps avoir l’air stupide »
dit le Duc de Lu à son ministre Kongzi le
jour de sa révocation !
Enfin l’approche commune : la force et
le pouvoir des armes.
La dernière image du film qualifie
Confucius de « plus grand penseur,
éducateur et savant »… Le message
est dans le non-dit : s’il est tout cela,
il n’est pas autre chose, en particulier
un modèle de dirigeant politique.
Cela laisse toute sa place au système
commun de la force et à la pensée
fondatrice de la Chine actuelle, pensée
qui a théorisé cette nécessité des
armes. Le retour du vieux Kongzi au
Pays de Lu après tant d’années d’exil,
est un message clair pour la dissidence
de tous les temps : aimer et servir le
pays plus que soi-même ou toute
autre chose ; rentrer au pays ; ne
plus chercher à y faire de la politique,
retourner à ses chères études !
On sera sensible au dialogue et aux
images de la rencontre de Konzi
et de Nanzi, la dame de petite
vertu, concubine du Prince de Wei.
Finalement le système commun, le
pouvoir qui tire son épingle du jeu,
celui de la force, n’accepte pas que de
l’immoralité puisse surgir l’intelligence
morale, surtout en politique : Nanzi sera
tuée d’une flèche au cœur.
L’incompatibilité finale entre l’éthique
et le pouvoir rend le film pessimiste,
même si en chemin le bon ministre
libère l’esclave et sert le peuple. La
mort donnée est l’argument final. A
l’inverse d’un romantisme où la mort
est la victoire de l’idée, ici la mort scelle
sa défaite. Mort, où est ta victoire ?
Kongzi appartient-il au soft power
chinois ? La stratégie de création dans
le monde entier de multiples Instituts
Confucius semble le confirmer. Le
film sert cette stratégie. Il propose de
discerner qui a le dernier mot, du soft
et du hard. Le Confucius qui contribue
éventuellement au soft power est plus
le Maître-éducateur que l’homme
politique, plus le rêve que le réel.
•
Wang Xiaoshuai
Les tribulations
Réalisateur de la 6 e génération, Wang
Xiaoshuai vient d’être décoré par la
France de l’ordre de Chevalier des Arts et
des lettres après une brillante carrière à
l’étranger.
The Days (1993) son premier long métrage,
réalisé à 27 ans, a été désigné par la BBC
comme l’un des 100 meilleurs films de l’histoire du cinéma. En 1998, le film So close
to Paradise, a été sélectionné au Festival
de Cannes dans la catégorie « Un Certain
Regard », de même que Drifters (2003). Son
film Beijing Bicycle a remporté l’Ours d’argent au Festival de Berlin 2001. Shanghai
Dreams (2005) a obtenu le prix du jury au
Festival de Cannes. Une famille chinoise
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
vie en général. J’établis ainsi un lien entre
l’évolution historique et sociale de la Chine
et mon point de vue personnel. Cette démarche peut permettre des échanges riches entre les cinéastes de ma génération
et la France.
C. : Quels sont les thèmes que vous souhaitez aborder ?
W. X. : Le sens de la vie en général, les valeurs familiales, la relation avec nos enfants,
l’amour. Comment on perd tout cela dans
une société de plus en plus matérialiste, obsédée par l’argent. Mon prochain film sera
sur la jeunesse, à partir d’une expérience
personnelle. Il a été rendu possible par la
contribution du Fonds Sud (français).
© Imagine China
C. : Que pensez-vous des limites à la diffusion des
films étrangers en Chine ?
W. X. : On peut vouloir limiter les films étran-
王小帅
d’un cinéaste chinois
(2008) a remporté l’Ours d’argent au Festival de Berlin pour son scénario.
Pourtant, comme d’autres cinéastes chinois
qui défendent le cinéma d’auteur, Wang
Xiaoshuai souffre dans son propre pays
d’une diffusion restreinte, même si elle est
autorisée depuis 2003. Ainsi Une famille
chinoise n’est sorti que dans six villes. Actuellement, Wang Xiaoshuai prépare deux
films Chongqing blues en montage et Onze
fleurs qui devait être financé par une contributiondu Fonds Sud.
plus difficile. Les investisseurs privilégient
le profit plutôt que l’intérêt culturel et artistique. Je me demande tous les jours si je
dois continuer à faire ce que je fais. J’espère
pouvoir le faire mais, autour de moi, la pression commerciale est forte. En invitant des
amis et des médias pour fêter cette distinction, je cherche à susciter plus de confiance
dans ce que je fais.
Connexions : Vous venez d’être décoré de l’ordre de
Chevalier des arts et des Lettres. Que vous apporte
cette distinction ?
Wang Xiaoshuai : Dans la Chine d’aujourd’hui,
des Chinois, de leur vie quotidienne, dans
une société en pleine évolution. A l’instar
des réalisateurs français de la nouvelle
vague, je souhaite montrer ma façon de
percevoir, en tant qu’artiste, la société ou la
faire des films personnels est de plus en
C. : Quelles images de la société chinoise voulez-vous
montrer ?
W. X. : Je cherche à transmettre ma vision
gers pour protéger sa production nationale, mais finalement les seuls films étrangers
qui parviennent en Chine par des canaux
officiels sont les films américains. C’est
dommage. Le public chinois est trop peu
en contact avec les cinémas étrangers et
passe directement des films nationaux à
des films purement commerciaux, sans
avoir pu bénéficier d’un cinéma d’auteur
plus personnel et plus riche.
C. : Dans la diffusion de vos films — et des films
d’auteurs —, quel rôle jouent les films piratés ?
W. X. : Avant les films piratés, nous n’avions
pas la possibilité de voir beaucoup de films
français, ni de diffuser mes films dont certains, interdits par la censure, n’ont pu être
vus que grâce aux versions piratées. Reste
que maintenant que je peux diffuser mes
films, évidemment je suis contre. Difficile
finalement pour moi de dire si c’est bon
ou mauvais.
C. : Pour une meilleure diffusion, quels sont vos soutiens dans le monde du cinéma et à l’intérieur du
parti communiste ?
W. X. : En fait, aujourd’hui, même si les
autorités décident de la censure éventuelle d’un film, la sanction numéro 1 est
celle du marché. Même si un film d’auteur
reçoit une autorisation, il doit faire face à
la concurrence. C’est d’autant plus difficile
qu’il n’existe pas en Chine de circuit d’art et
d’essai. Quant à la presse people, elle préfère
parler d’histoires d’amour entre acteurs et
actrices ou de chirurgie esthétique.
•
Propos recueillis
par Anne Garrigue
Connexions / mars 2010 87
DOSSIER
专栏
c’est un film d’animation en 3D. Le Japon,
et particulièrement Hayao Miyazaki, pour
le style des dessins. C’est un grand maître.
C. : Comment votre film a-t-il été reçu en Chine et à
l’étranger ?
E. Y. : Il est sorti au moment du 60e anniversaire. En Chine, il a reçu le prix Huabiao. Il
n’a pas encore été acheté à l’étranger mais
il a gagné un premier prix au festival de
Liège du dessin animé en 3D. Dans le domaine de l’animé, le marché principal est à
l’étranger car le marché des films d’animation en Chine n’est pas encore très mature.
© Imagine China
C. : Comment avez-vous financé le film ?
E. Y. : Notre société CITV est à 100% privée.
Récompensé en Chine et en Europe, La légende du roi Milu est le premier succès de l’animation chinoise.
在中国和欧洲获奖的《麋鹿王》是首部最成功的国产动画大片
La légende du roi Milu
Une compagnie privée à l’assaut de la 3D.
Eisen
Yang,
président
et Xu
Wu viceprésident
le prix du long métrage à la première édition du festival européen de la 3D. La technologie a été mise au point par la Chinese
Academy of Science et Zhongke Weiwo
digital Technology Ltd. Il a été produit par
une compagnie privée CITV
de CITV new media group.
Connexions : Pourquoi le thème du roi Milu?
E. Y. : Le cerf Milu, connu en Occident sous
La légende du roi Milu est le premier blockbuster de l’animation chinoise. Il a reçu en
Chine le prix Huabiao, une des plus hautes
distinctions. Inspiré d’une légende tirée du
classique littéraire Légendes des Montagnes et
des mers, il raconte une histoire d’amour entre un prince et une jeune fille transformée
en cerf. Le film a aussi été choisi pour faire
partie du « Green Library Project », un effort
pour promouvoir l’environnement auprès
des enfants. D’une durée de 90 minutes,
sorti à l’occasion de la fête nationale d’octobre 2009 , il a reçu en décembre, à Liège,
le nom de cerf du père David , est un animal hybride qui n’existe qu’au Tibet. Il a
failli disparaitre au début du siècle dernier
et fut sauvé in extremis par… un aristocrate anglais. Cet animal donne un caractère
chinois au film tout en représentant un
symbole de la collaboration internationale
et de la protection de l’environnement. Ce
film qui parle d’animaux, est universel et
touche les jeunes enfants, premier public
pour un dessin animé en Chine.
88 Connexions / mars 2010
C. : Quelles ont été vos sources d’inspiration ?
E. Y. : L’Amérique pour la technique car
Elle existe depuis dix ans. Nous travaillons
dans trois domaines — les jeux électroniques et vidéo, la production de dessins
animés 3D (depuis 2007) et les nouveaux
médias. C’est notre premier long métrage.
Nous sommes aussi en train de tourner
d’autres films avec des investisseurs américains. Nous sommes en contact avec des
producteurs français et japonais. Nous
cherchons à l’étranger des soutiens artistiques — pour comprendre la formation
du goût à l’étranger — et financiers. Le
principe : chacun apporte de l’argent et
partage les risques. Sinon on ne peut pas
collaborer. Evidemment, avec Luc Besson,
on paiera et on acceptera tout !
C. : En quoi, à votre avis, les goûts chinois et occidentaux diffèrent-ils ?
E. Y. : Pour les spectateurs asiatiques, il est
plus facile d’accepter la transformation,
qu’un humain devienne animal et inversement. Et puis, les gens ne rient pas au
même moment.
C. : La diffusion de la culture chinoise progresse-t-elle
aussi vite que la place de la Chine en général dans
le monde ?
E. Y. : Tout le monde en Chine —privé et
gouvernement — veut que les produits
culturels étiquetés made in China soient
acceptés aussi facilement que les produits
industriels made in China. Les Américains
contrôlent les produits industriels de
création dans le monde car c’est eux qui
en produisent le plus et tout le monde
les consomme. Et, à travers leurs produits
culturels, ils influencent le monde entier,
y compris la Chine. En Chine, jusqu’ici, le
système a séparé les produits de consommation et la culture. La culture « pure »
passe par le gouvernement et les produits
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
de consommation ne véhiculent pas forcément notre culture chinoise. Chez CITV,
nous sommes plus attirés par le modèle de
diffusion culturel américain qui se sert des
produits culturels de masse pour véhiculer
la culture.
C. : Il semble qu’il y ait un écart entre ce que propose
le gouvernement chinois et ce que recherche le public
étranger. Etes-vous d’accord ?
E. Y. : Oui. Pour le moment le gouvernement
promeut des industries de loisirs traditionnels. Mais l’objectif pour l’industrie culturelle, c’est d’abord de plaire pour gagner de
l’argent. Il faut donc que la forme séduise.
Ceci dit, le gouvernement chinois a toujours considéré la promotion de la culture
comme une priorité. Il soutient aujourd’hui
certains films — très peu dans notre cas.
Mais s’il veut promouvoir la culture, il ne
sait pas toujours comment dépenser son
argent. C’est un « beau souci »...
C. : Quels sont les éléments de la culture chinoise que
vous voudriez transmettre ?
Xu Wu : Nous voulons avant tout que nos
films marchent. Pas nécessairement transmettre une histoire chinoise ou véhiculer
un message. Quant au choix des thèmes,
étant donnée la jeunesse de notre public,
on ne peut pas choisir des thèmes trop
difficiles.
C. : Que pensez-vous du public chinois ?
Xu Wu : Nous utilisons volontiers la métaphore de la fast food. En matière de consommation artistique, la grande majorité de nos
compatriotes veut quelque chose qui va
vite, du « fast art ». Ils ne veulent pas prendre le temps de cultiver un intérêt, comme
l’opéra par exemple. Même si l’éducation
dans les arts, en musique par exemple, se
développe, elle me paraît aujourd’hui plus
destinée à aider les jeunes à être davantage
compétitifs qu’à se cultiver en profondeur.
Côté production, investir dans l’art plutôt
que dans l’immobilier ou la bourse rapporte moins et surtout, avec un retour sur
investissement à plus long terme. Nous
avons mis deux ans à faire ce film mais
nous croyons dans notre spécialité car elle
a un seuil d’entrée élevé. Nous sommes
en train d’établir notre position et notre
marque.
Propos recueillis
•
par Anne Garrigue
http://www.miludeer.com/English.html
C’est un missionnaire lazariste français, le père Armand David
qui a trouvé cet animal et qui l’a présenté dans le monde entier.
Disparu au début du siècle, il fut sauvé grâce aux bons soins en
Angleterre du duc de Bedford.
1
2
《麋鹿王》:一家进军3D领域的民营企业
专访中视互动新媒体集团总裁杨维和副总裁吴旭
《麋鹿王》1是首部最成功的国产动画电
影,并且获得了中国电影界最高奖项之一
华表奖。本片取材自古籍《山海经》,讲
述了一段人类王子与麋鹿公主之间的爱
情故事。该片还是入选“绿书架”行动的
影视作品,这项活动是为了向孩子们宣传
环保的理念。
《麋鹿王》片长90分钟,于
2009年国庆节档期上映,同年12月,在比
利时举行的首届欧洲3D电影节上获得了
最佳长片奖。影片的3D技术由中科院和中
科帷幄数码科技有限公司联手打造完成,
并由一家民营企业— —中视互动集团出
品。
《联结》:为什么会以麋鹿作为电影的
主题?
麋鹿,在西方以“大卫神父鹿”2闻名,是
一种只存在于西藏的杂交动物。上世纪
初,麋鹿几乎灭绝,在危急情况下被一位
英国贵族挽救。这种动物赋予了影片中国
的元素,并且带有国际合作和环境保护的
象征。这部讲述动物的电影适合所有人观
看,主要面向儿童这一中国动画片的最大
观众群。
《联结》:你们的灵感源泉是什么?
技术方面的灵感来自美国,因为这是一部
3D动画电影。关于动画片的风格,其灵感
来自日本,尤其是日本动画大师宫崎骏。
《 联 结》:国内外如 何评价 你们 的 电
影?
影片选在中国60年大庆之际推出。在国
内,它获得了华表奖3优秀动画片奖。在国
外,影片尚未发行,但在比利时举行的欧
洲3D电影节上荣获了最佳长片奖。在动漫
领域,主要的市场是在国外,因为中国的
动漫市场还不太成熟。
《联结》:你们是如何为电影筹资的?
中视互动集团是100%的民营企业,已经运
营了10年。我们的业务主要在三个领域—
—电子游戏和影视剧、3D动漫制作(始于
2007年)和新媒体。
《麋鹿王》是我们制
作的第一部动画片。我们还在与美国的投
资者合拍其他的影片,与一些法国和日本
制片公司也有联系。我们在国外寻求艺术
支持——为了了解外国观众的品味,以及
资金支持。原则是:每方都要出资并分担
风险,不然就无法合作。当然,如果是与吕
克•贝松这样有知名度的制片人合作,我们
会出钱,还会接受所有条件!
《联结》:你们认为中国人和西方人的
品位有何不同?
对于亚洲观众,他们更容易接受人变成动
物,动物变成人。另外,中西方观众的笑点
也不同。
《联结》:中国文化在世界上的发展是
否与其整体地位的上升一样快?
在中国,所有人包括个人和政府都希望贴
上中国制造的文化产品如同中国制造的工
业产品一样容易被接受。美国在世界上控
制了创意产业的产品,因为他们制作得产
品最多,所有人都在消费。于是,美国通过
自己的文化产品影响全世界,包括中国。中
国至今的机制都是把消费品与文化一分为
二。单纯的文化由政府传播,而消费品不
一定承载中国的文化。在中视互动,我们
更欣赏美国借助大众消费品传播文化的模
式。
《联结》:中国政府希望传播的文化似
乎与外国大众希望了解的有一定差距。
你们觉得呢?
是的。目前政府鼓励的是传统的演出节
目。但文化产业的目标首先是娱乐赚钱,
因此形式必须要吸引人。当然,政府一直
把推广中国的文化作为优先考虑。现在它
也支持一些电影— —在我们这里情况很
少。虽然政府愿意推广文化,却不知钱该
如何花。这的确是个美丽的烦恼......
《联结》:你们希望传播哪些中国文化
的元素?
吴旭:我们首先希望制作的电影叫座,不
一定要传播一段中国的历史或承载某一信
息。关于主题的选择,鉴于我们的观众年
龄不大,我们不能选择太难懂的主题。
《联结》:你们如何看待中国观众?
吴旭:我们很愿意使用“快餐”这种比喻。
在艺术消费方面,我们的大多数同胞都喜
欢快的东西,
“快餐艺术”。他们不想花时
间培养兴趣,比如戏剧。即使是培养艺术
特长,例如音乐方面,我觉得它虽然发展
得很快,但更多的是用来帮助孩子们赢得
比赛,而不是加强自我修养。制作方面,在
艺术领域里投资比在房地产或股市里的
回报少,而且投资回报周期更长。我们花
了两年的时间拍摄这部电影,但我们认为
这是我们的特长,因为它有一个较高的门
槛。我们正在确立自己的定位和品牌。
•
http://www.miludeer.com/English.html
2
这是一位法国天主教传教士,他发现了麋鹿并把它介绍到全世界。
麋鹿在上世纪初曾一度灭绝,在英国贝福特公爵的精心护理下得以
幸存。
3
中国电影界的最高奖项之一。
1
Connexions / mars 2010 89
DOSSIER
© Imagine China
专栏
© Imagine China
Wang Anyi. 56 ans, Le chant des regrets
éternels… Présidente de l’association
des écrivains de Shanghai.
© Imagine China
Su Tong. 47 ans, Riz, Epouses et
Concubines qu’il a lui même adapté
pour Zhang Yimou…
© Imagine China
Yu Hua. 50 ans, Vivre ! Porté à l‘écran
par Zhang Yimou, Un monde évanoui,
Le Vendeur de sang, Brothers…
Mo Yan. 54 ans. Le Pays de l’alcool,
Beaux seins, belles fesses, La Mélopée
de l’ail paradisiaque…
Il n’y a pas de
best-seller mondial
chinois
Les éditeurs anglophones hésitent à prendre des risques alors
que le grand public ne les suit pas.
E ri c Ab ra h a m s e n ,
traducteur américain
est co-fondateur du site
Paper-Republic, qui
propose du conseil aux
maisons d’édition chinoises ou étrangères
Connexions : Pourquoi avoir créé le site Paper-Republic?
E. A. : Arrivé en Chine en 2001, j’ai commencé
à publier en 2007 des traductions de nouvelles et d’essais. J’ai deux traductions de
romans en préparation: une fiction sur des
fonctionnaires corrompus et un roman sur
deux jeunes migrantes. Nous avons créé le
site Paper-Republic1 en 2006. Nous étions
un groupe d’amis partageant les mêmes
difficultés à persuader les éditeurs anglosaxons, plutôt en retard sur les français, de
traduire des romans chinois. Il s’est d’abord
agi d’échanges informels, puis nous avons
réalisé que les maisons d’édition étrangères, qui manquent d’information sur la
Chine, consultaient régulièrement notre
site. Une bourse des Arts Council de Grande Bretagne nous a permis de devenir une
entreprise avec deux activités : l’édition et le
conseil aux éditeurs. Nous souhaitons être
une première étape pour de grosses agences — Andrew Nurnberg, Big Apple, Zaikai
media, Wilye agency…— avec lesquelles
nous voulons travailler, de préférence aux
petites agences spécialisées sur la Chine.
© DR
C. : Quels sont les auteurs chinois les plus connus dans
le monde anglo-saxon ?
E.A. : Dans l’ordre, Mo Yan, Su Tong et Yu
Wang Shuo. 52 ans, auteur de bestsellers : L’hôtesse de l’Air, Dans la chaleur du Soleil…
90 Connexions / mars 2010
Hua. Zhang Ailing, Wang Anyi, Wang
Shuo ont aussi un public. Mais les éditeurs anglo-saxons attendent encore le
best-seller qui fera exploser les ventes et
tirera le marché. Ils avaient espéré que Le
Totem du loup de Jiang Rong ou Brothers de
Yu Hua feraient l’affaire. Mais ni les critiques
ni les ventes n’ont été suffisamment excellentes. Et les éditeurs anglo-saxons hésitent
à prendre des risques. Penguin est la seule
maison d’édition qui a un bureau à Pékin.
C.: Pourquoi ce faible intérêt pour la littérature chinoise. Est-ce dû au style, au contenu, au rythme?
E. A. : Les Anglo-Saxons ne sont pas guère
friands de littérature traduite. Ils veulent du
chinois pas trop « chinois ». Ils sont fatigués
des sujets tragiques sur la Révolution culturelle, la famine ou la violence. Le style des
écrivains chinois ne correspond pas non
plus vraiment à leurs attentes : les romans
sont longs, pleins de détails, d’adjectifs et
de métaphores alors que les Anglo-Saxons
préfèrent des textes concis et plus rythmés.
Il est vrai que Brother aurait gagné à être
plus court. Mais, en Chine, le travail d’édition littéraire n’existe pas. Des correcteurs
vérifient les caractères et la typo mais les
auteurs interdisent qu’on touche à leurs
textes. Ils n’ont pas confiance dans le jugement littéraire des éditeurs. Aussi, techniquement parlant, leurs romans ne sont pas
aussi travaillés qu’en Occident.
C. : Voyez-vous arriver de jeunes auteurs brillants ?
E. A. : Il y a eu la mode des jeunes romancières sexy après Mian Mian. Elle a duré deux
ans. Aujourd’hui, on voit arriver une génération d’auteurs entre 28 et 35 ans, assez
bonne. Je pense à Xu Zechen par exemple. Un de ses romans vient d’être traduit
en allemand. Il raconte la vie quotidienne
de jeunes vendeurs de CD à Pékin dans
un style efficace qui permet d’entrer dans
leur vie sans tomber dans l’exotisme. Je
pense que cela correspond à l’attente des
lecteurs occidentaux qui veulent pouvoir
l’écrivain(e) Tie Ning, a pour rôle de manager les auteurs en leur trouvant un emploi,
des salaires, des formations, des fonds pour
payer les prix littéraires. Je ne crois pas, personnellement, à ce type de management
direct par l’Etat des écrivains mais leur
intervention peut être utile et ils ne s’immiscent pas directement dans le contenu.
Reste que les écrivains sont conscients de
ce qu’ils doivent au gouvernement.
Net. Mais le manque de créativité a des racines profondes. Les écrivains chinois, qui
font un excellent travail, souffrent sans
l’admettre de l’autocensure. La société
chinoise n’a pas appris à se regarder vivre.
Les écrivains font œuvre utile en aidant
leurs compatriotes à reconnaître leur histoire, à mieux se comprendre. La tâche est
énorme, bouleversante. Tout est si compliqué, change si vite. Ils le font le mieux qu’ils
peuvent. Je regrette seulement qu’il n’y
ait plus d’écrivains comme Wang Xiaobo,
mon auteur préféré. Les dissidents russes
avaient combattu à l’extérieur. En Chine,
le conflit a été refoulé à l’intérieur des personnes elles-mêmes. Je trouve dommage
que les écrivains n’écrivent plus les livres
qu’ils souhaitent vraiment écrire. Même s’ils
n’étaient pas publiés, ces livres seraient là
pour le futur.
C.: Vers quoi se dirige la restructuration du monde
de l’édition?
E.A. : De façon générale, les maisons d’édition, privées et publiques, collaborent pour
augmenter leur rentabilité. Le gouvernement a récemment reconnu qu’il était légal de publier librement, à condition que
les livres aient une autorisation officielle de
publication, ce qui permet au gouvernement de garder une prise. Sur Internet, pas
de numéro ISBN2, mais c’est toujours le Bureau des Publications qui contrôle. Shanda
litérature3 qui a racheté 90% des sites web
de littérature en Chine, se charge de faire
respecter les consignes.
© Imagine China
C.: Pensez-vous que l’édition papier risque de régresser avec l’Internet ?
E. A. : La liberté est plus difficile hors du
Han Han. 28 ans, premier blogger
chinois(blog.sina.com.cn/twocold) et
pilote de rallye professionnel.
© IDR
C. : Quel rôle joue l’association des écrivains dans le
dispositif ?
E. A. : Cette association, dirigée par
C. : Vous avez écrit que les fonctionnaires chinois
avaient manqué l’opportunité de la foire de Francfort
dédiée à la Chine en 2009. Pourquoi ?
E. A. : Les fonctionnaires du Bureau des Pu-
Mian Mian. 40 ans, Les Bonbons
chinois, Panda Sex, Acid Lovers. Ses romans restent interdits en Chine.
Zhang Ailing. (1920-1957), Le chant du
riz, Shanghai 1920-1940… Publiés sur
le continent à partir de 1984.
© DR
blications (GAPP) ne sont pas des littéraires.
Chargés du soft power chinois, ils veulent
entendre les étrangers louer leur culture,
gagner un Nobel de littérature chinois en
évitant, à tout prix, des critiques contre le
régime. Leur travail est purement politique.
Ils ne comprennent ni les écrivains, ni les
traducteurs, encore moins leur travail.
Les publications sur Internet de la nouvelle
génération sont totalement déterminées
par le marché mais les autres générations
écrivent encore pour eux-mêmes. Je suis
optimiste à long terme pour l’édition
chinoise. La nouvelle génération n’écrit pas
encore de bons romans mais elle s’exprime haut et fort et n’a pas le même rapport
à l’auto-censure qui reste très présente en
Chine. Les écrivains chinois les plus âgés ont
grandi dans une société où ils se sentaient
tenus d’être loyaux à l’égard du gouvernement. Même en colère, ils ne se sentent
toujours pas autorisés à exprimer toute leur
vision. Ma Jian4 ose aller au bout mais il vit
à Londres et a renoncé à publier en Chine.
Les écrivains, qui sont restés et qui sont publiés, ont tous fait des compromis, d’abord
avec eux-mêmes. Par contre, les jeunes
écrivains qui ont grandi après 1989, n’ont
pas souffert pour s’intégrer au système. Ils
diffusent une culture jeune, décomplexée,
un peu rebelle, à l’image de Han-Han, l’écrivain bloggeur, pilote de rallye et musicien
qui bat tous les records de clics. Personne
ne lit sa mauvaise fiction mais son blog est
incontournable.
Ma Jian. 57 ans, La mendiante de Shigatze, Nouilles Chinoises, Chemins de
poussière rouge, Beijing coma… Ses
livres sont interdits en Chine.
•
Propos recueillis par Anne Garrigue
et Sophie Lavergne
http://paper-republic.org/
ISBN : International standart book number. Ce numéro est
obligatoire pour toute parution. En Chine, ils ne sont accordés
qu’aux groupes d’édition d’Etat, mais ceux-ci peuvent les
céder à des éditeurs privés.
1
2
© DR
entrer dans l’histoire. Il y a, par ailleurs, pléthore de très jeunes écrivains de moins de
25 ans, assez déconnectés de la vie réelle,
qui publient sur le Net avec des millions de
lecteurs, étudiants comme eux. Vite écrite,
vite lue, c’est une littérature d’évasion, un
genre qui passe mal les frontières. Même
si Harry Potter et les vampires de Stephenie
Meyer ont bien marché en Chine, ce sont
des cas isolés. Le principe de l’édition en
ligne est de faire acheter pour quelques
maos les chapitres d’un livre, écrits au fur
et à mesure. Le modèle — la fiction sur téléphone mobile — vient du Japon. En Chine,
ça démarre très fort.
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Wang Xiaobo. (1952-1997), envoyé
dans le Yunnan en 1968 comme jeune
intellectuel. L’âge d’or…
Connexions / mars 2010 91
DOSSIER
专栏
Art contemporain : de la contreculture à l’intégration
L’attraction de l’art contemporain est le succès le plus éclatant de la culture chinoise à l’étranger.
Mais jusqu’où création et officialisation peuvent-elles faire bon ménage ?
Bérénice Angremy s’occupe d’art contemporain
à Pékin depuis 2002. Directrice de Thinking
Hands, une société qui
organise des expositions
et fait du consulting, elle a été à l’origine du
Festival d’art contemporain de 798, et dirige
actuellement le Caochangdi PhotoSpring
– Arles in Beijing.
Connexions : Pouvez-vous revenir sur la montée en
puissance de l’art contemporain chinois ?
Bérénice Angremy : C’est une histoire courte
— trente ans seulement — et rapide.
La première phase va de 1979 à 1989. Je
l’appelle « expérimentation et création
contemporaine ». Un groupe d’avant-garde autodidacte « Les Etoiles » lance l’art
contemporain chinois — formes et discours revendiquant la liberté de création
en dehors du diktat du prolétariat — en
s’exposant sur les grilles extérieures du
musée national NAMOC, haut-lieu de l’art
officiel. Les années 80 sont marquées par
l’émergence et la maturation de ce qu’on
appelle « la nouvelle vague », des artistes
sortis des Beaux Arts de toute la Chine qui
pratiquent toute forme d’expérimentations
du dadaïsme — Xiamen Dada avec Huang
Yongping — au performance art en passant par la photographie ou les prémices
de la vidéo. Ces artistes reprennent à leur
manière ce qui s’est fait en Occident, sans
jamais sombrer dans le « copié collé ».
En février 1989, l’exposition China /Avantgarde au NAMOC marque un tournant. Elle
rassemble plus de deux cents œuvres de
près de deux cents artistes. Elle a été préparée pendant des années par plusieurs
commissaires dont Gao Minglu qui souhaitaient que la société reconnaisse l’art
92 Connexions / mars 2010
contemporain. Elle est immédiatement
fermée par les autorités — parce qu’une
artiste Xiao Lu a tiré sur son œuvre. Son
ami Tang Song est emprisonné. L’histoire
de l’art se fige. On quitte l’expo pour entrer
dans Tian An Men.
Commence alors la seconde période, celle
des expositions dans les appartements. Les
réseaux et les écoles se forment, la critique
et le marché naissent. C’est le début des
grandes expositions. La scène artistique
est moins créative et expérimentale. Elle
consolide les acquis. Des noms de courants surgissent — political realism, cynical
realism — inventés par les nouveaux critiques, les commissaires indépendants, qui
désormais ont pris la relève des artistes
pour organiser des expositions en Chine
et à l’étranger, une étape essentielle pour
être reconnu. Parmi eux, outre Gao Minglu,
Li Xian Ting, Fan Di’an, aujourd’hui directeur
du NAMOC.
Après 1992, l’art contemporain suit les
consignes de Deng Xiaoping : enrichissez
vous ! Dès 1996, a lieu la première vente aux
enchères réalisée par Leng Lin, un critique
aujourd’hui galeriste. Entre 2000 et 2005, les
réseaux de distribution s’installent. D’abord,
les galeries étrangères (trois en 2001 à Pékin), puis, de plus en plus chinoises à partir
de 2007. En tout, on compte plus de cinq
cents galeries en 2007, dont deux cents à
« 798 ». Les nouveaux arrivants sont Chinois,
formés sur le tas. Plus rarement des critiques d’art, fatigués d’être sous-payés. Parallèlement, de 2003 à 2005, se développe
le quartier de Dashanzi art district « 798 »
dont l’étonnant succès marque l’ouverture
de l’art contemporain au grand public
et aux médias. Pékin est reconnu devant
Shanghai, comme un centre culturel économiquement viable.
A partir de 2006, le marché mondial de l’art
explose. La première grosse vente d’artistes
chinois a lieu à New York chez Sotheby’s au
printemps 2006 avec un chiffre d’affaires de
100 millions de Rmb. Au deuxième semestre 2006, la totalité des ventes d’art contemporain a dépassé 10 milliards de Rmb. Très
vite, des bureaux de vente s’ouvrent à Pékin et Hong Kong, puis Shanghai, Nankin,
Hangzhou, Taiwan. En 2008, on en comptait
159 et le volume de leurs transactions avait
triplé entre 2005 et 2008. Côté prix, c’est
de la folie ! En 2005, Pink de Zeng Fanzhi, un
des dix artistes chinois les plus populaires,
était vendu à 75 000 dollars. En 2008, une
œuvre assez semblable, de la série Mask,
partait à 9,6 millions de dollars en 2008. L’art
contemporain, en Chine comme ailleurs,
était devenu un investissement, une valeur refuge.
A partir de 2006-2007, les autorités commencent à récupérer le réseau de l’art
contemporain, le plan quinquennal mise
sur la création de zones de développement
des industries créatives pour regrouper les
créateurs par catégories dans des clusters.
L’idée vient de Grande-Bretagne. Elle est
stimulée par le succès de « 798 art district »
qui apparait comme un modèle, certes un
peu chaotique, mais dont le succès ne se
dément pas. Ce quartier né d’initiatives individuelles (minjian) a favorisé la création,
attiré des investisseurs étrangers et des touristes. Une fois réglés les litiges avec le propriétaire que la reconnaissance officielle du
quartier a calmé, 798 devient l’enfant chéri
des autorités qui se l’approprient et créent
ex nihilo dans son voisinage « D Park ».
Pour les autorités, ces zones de développement des industries créatives sont une
façon de reconnaître l’utilité sociale de la
création contemporaine tout en
•••
© DR
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
© DR
Zhang Huan To Raise the water level in the
fishpond.
张洹的作品《为鱼塘增高水位》
© Imagine China
Xia Guo Qiang Headon 夏国强的作品《撞墙》
Zhang Xiaogang Bloodline
张晓刚的《血缘》系列
Série « Mask »,Zeng Fanzhi
© DR
© DR
曾梵志的《面具》系列
Huang Rui « Chai-na (Demolition) /China », 2007.
黄锐的作品《拆-那/China》,2007年
Sans titre, Yue Minjun
岳敏君的作品
Connexions / mars 2010 93
DOSSIER
© Imagine China
专栏
Stimulé par le succès de « 798 Art district », le plan quinquennal mise sur la création de zones de développement des industries créatives pour regrouper
受到798艺术区成功的启发,十一五规划押宝在文化创意产业区的建立上,把艺术创作者们按类别集中在一个个群落里。
l’orientant et en contrôlant son
•••
développement. Le problème c’est qu’en
Chine, on croit trop qu’il suffit de reproduire
à l’infini un modèle qui a fonctionné. Or, en
réalité, les seuls quartiers vivants sont ceux
qui ont été créés spontanément par des
individus. Et, souvent, cette vie est étouffée
dans l’œuf par l’intermédiaire des autorités.
Voyez la polémique actuelle sur un projet
immobilier du Nord-Est de Pékin, qui menace plusieurs quartiers artistiques dont
Cao Chang Di . Le gouvernement rachète
les terrains et les revend à des promoteurs
immobiliers. C’est ce qu’on appelle un plan
d’Etat. Au passage, les petits quartiers artistiques, certains de grande qualité, sont
menacés de disparition avec des lieux aussi
exceptionnels que « Three Shadows Photography Art Center ». Une catastrophe !
Sans compter qu’à force d’associer art
contemporain et industries créatives, on
risque d’en arriver à assimiler production et
création contemporaine, et à détruire toute
tentative de création originale et novatrice.
C. : En décembre dernier est créée l’Académie de l’art
contemporain. Comment est-on passé si vite de la
contre-culture à l’intégration ?
B. A. : D’abord, c’est un phénomène récent.
Il y a trente ans, être artiste c’était encore
être en marge. Depuis cinq à six ans, l’artiste
est au centre, voire sur le devant de la scène. On le surveille en tant qu’image d’une
Chine contemporaine et progressiste.
Ensuite, il est erroné de croire que la créa94 Connexions / mars 2010
tion des artistes était dissidente à l’origine.
Certes elle s’insurgeait contre un dictat de
création, mais elle visait à une reconnaissance officielle. Les « Etoiles » ont voulu
faire leur dernière exposition au NAMOC
en 1980, tandis que les organisateurs de
China / Avant-Garde ont attendu cinq ans
pour exposer dans un lieu officiel en 1989.
Etre reconnu était extrêmement important
pour ces générations d’artistes baignées
dès l’école dans un système hiérarchique.
D’autre part, s’il est vrai que le gouvernement consacre encore une somme très
faible à son budget de la culture (autour
de 0,39%), il a su confier à des responsables
de qualité les rênes de l’art contemporain.
Fan Di’an est directeur du NAMOC, Wang
Huangsheng a longtemps été directeur du
Musée de Canton. Grâce à eux, des événements en Chine et à l’étranger, tels que
la Biennale de Venise, de Sao Paulo ou de
Canton, se sont multipliés. Cette compétence s’est accompagnée d’une volonté
nouvelle de la part de l’Etat de présenter
lui-même les grands projets d’exposition
et de ne plus laisser l’initiative au privé qui
pourrait apporter des éléments critiques.
Enfin, la dernière étape de cette récupération s’est déroulée en décembre dernier
avec la création soudaine d’une Académie
des arts contemporains. Etant donné la
faiblesse des budgets culturels et la politique actuelle d’élimination des quartiers
artistiques, je vois mal comment cette dé-
marche pourrait être autre chose qu’une
vitrine pour montrer qu’on est une capitale
« dans le coup ». Les vingt-deux artistes sollicités ont accepté sans se poser de questions ,ni avant ni après. A mes yeux, la faute
des grands artistes actuels qui servent le
régime actuellement n’est pas de donner
d’eux mêmes à leur pays. C’est légitime !
Mais ils devraient profiter de ces commandes pour défendre leur création originale.
C. : Quel regard neuf et original, quelle méthodes
de travail, quels thèmes apportent aujourd’hui les
artistes chinois contemporains au reste du monde ?
B. A. : D’abord, je tiens à faire la différence entre les artistes les plus connus qui se revendiquent chinois et se vendent très bien sur
le marché mondial, et ceux qui se trouvent
être chinois mais ne l’affichent pas et sont
souvent moins célèbres. Les premiers, je les
appelle « les made in China » — Yue Mijun,
Zhang Xiaogang, Zeng Fanzhi. Ils peuvent
être excellents mais ils ont délibérément
affiché une marque de fabrique qui leur a
permis d’attirer les collectionneurs. Cela a
beaucoup stimulé un certain type de production. Pour moi, les artistes les plus novateurs ont souvent vécu à l’étranger — Cai
Guoqiang, Chen Zhen, Huang Yongping,
Huang Rui, Wu Shanzhuan … — et posent
des questions universelles comme celles des
migrations par exemple. Malheureusement
certains se sont enlisés. Cai Guoqiang, par
exemple, dont la création était basée sur le
détournement des feux d’artifice, ne crée
les créateurs par catégories dans des clusters.
plus de la même façon depuis qu’il est entré
complètement dans le système. En concevant les feux des JO 2008, il s’est inscrit dans
la construction d’une image et d’une culture
nationales, dans le show. Pour lui, c’est une
façon de réintégrer le sol chinois dont il a été
exilé pendant de nombreuses années.
L’autre originalité des Chinois est de voir
tout en grand, grâce à cet accès incroyable
à des matériaux et à une main-d’œuvre bon
marché, qui stimule une production gigantesque et compliquée. Zhang Huan a une
centaine d’ouvriers dans son atelier, n’importe quel peintre peut en avoir entre cinq et
dix, voire trente. Ce système rapproche l’art
contemporain d’une production artisanale à
grande échelle, voire industrielle. Cela explique que les jeunes artistes voient de plus en
plus leur métier comme une fonction, une
manière de gagner leur vie.
C. : Pensez-vous que la Chine, qui revendique de plus
en plus un « modèle chinois » de diffusion de l’art
contemporain, risque d’influencer le reste du monde
dans ce domaine ?
B. A. : Nos interlocuteurs chinois font en effet
de plus en plus référence à un « modèle
chinois ». De quoi s’agit-il ? Tout système de
diffusion de l’art contemporain s’appuie sur
des relations entre différents acteurs : musées, commissaires privés indépendants,
agents d’artistes, galeries, maisons de vente, critiques, médias et artistes. Au départ,
en Chine, il n’y avait que les artistes. Pour
exposer leurs œuvres, ils ont commencé
© Imagine China
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Chen Zhen Purification Room (détails).
par payer : l’accrochage, la location de la
salle. Puis les intermédiaires sont arrivés en
masse depuis cinq-six ans. Dès le départ,
ce n’est pas le système occidental qui s’est
mis en place. Par exemple, les artistes, à
de rares exceptions près, n’ont pas signé
de contrat préférentiel avec une galerie
mais multiplié les « points de vente ». Au
niveau des musées nationaux, le nouveau
« modèle chinois » impose la location de la
salle, y compris pour des expositions aussi
prestigieuses que celle de Turner, alors que
partout dans le monde, le musée est non
seulement censé inviter mais éventuellement payer la location de l’exposition.
On voit aussi arriver dans les musées, des
expositions qui sont organisées par des
galeristes, avec mise en vente des œuvres.
Finie la rénumération sur billetterie. Les
artistes chinois ou étrangers peuvent économiser sur le tarif de location s’ils laissent
une œuvre. La plupart des musées n’ayant
pas de collection, c’est une façon comme
une autre d’acquérir des œuvres d’art. Et ce
modèle s’exporte déjà ! Des galeries installées en Chine organisent les expositions à
l’étranger, en se rémunérant sur la vente des
tableaux. On entre dans un système mercantiliste. Il y a de moins en moins de critiques d’art indépendants. Pourquoi rester
commissaire ou critique sans argent alors
qu’on peut monter un espace et travailler
avec des musées et des maisons de ventes
aux enchères ! Ce modèle conduit à un ap-
陈箴的作品Purification Room
pauvrissement intellectuel et à une confusion des responsabilités. Le galeriste devient
l’expert et remplace l’érudit. Des métiers se
créent aux dépens d’autres. On fait venir
des expositions en les faisant financer par
d’autres. Les vieux schémas européens ne
peuvent qu’être déstabilisés.
A cela s’ajoute le fait qu’en Chine, on
construit à tour de bras des musées sans
avoir ni contenu à proposer, ni personne
pour les faire tourner. Toutes les zones créatives en veulent un et cherchent à profiter
d’accords d’échange avec les Européens
— notamment les Anglais — pour envoyer
des jeunes Chinois se former dans les musées européens et y apprendre le management culturel. Des écoles commencent à se
monter en Chine dans ce domaine.
Enfin, il faut garder en tête que pour les
artistes chinois comme pour les organisateurs, ce qui se passe aujourd’hui est une
revanche sur le passé. Ils avaient été exclus. Ils sont sur le devant de la scène. Pour
l’instant, ils ne font pas encore attention à
l’art étranger. Ce qui les intéresse, c’est de
diffuser eux-mêmes l’image de leur art, de
ce qu’ils sont. Pourquoi devraient-ils suivre
des modèles occidentaux ? Les artistes les
plus chers, les plus en vue, sont chinois. Il
est temps de passer du « made in china » au
« created in China ».
•
Propos recueillis
par Anne Garrigue
Connexions / mars 2010 95
DOSSIER
© DR
专栏
Ding Yi Appearence of crosses (2007) 丁乙的作品《十字的外观》
Les collectionneurs ont une
vision plus ouverte
Shang’ART est une des premières galeries à avoir défendu l’art
contemporain chinois.
Wenjia Zhang dirige la
galerie ShanghART à Pékin, une galerie fondée à
Shanghai en 1995 par Lorenz Helbling, devenue une
des galeries d’art contemporain les plus influentes en Chine.
Connexions : Comment est née ShanghART ? Wenjia Zhang : Lorenz Helbling a commencé
à Shanghai dans son appartement après
avoir étudié l’art contemporain en Suisse et
à l’université Fudan dans les années 80. A
l’époque, les artistes contemporains chinois
lui paraissaient intéressants et mûrs, mais ils
manquaient d’intermédiaires pour les promouvoir à l’étranger et en Chine. En 1996, il
a ouvert sa galerie dans un corner de l’hôtel Portman. Il a contacté des commissaires d’exposition, des musées et persuadé
Harald Szeeman, le futur commissaire de
la Biennale de Venise du passage du siècle,
de venir découvrir la force du mouvement
d’art chinois. En 2000, il participe à la bien96 Connexions / mars 2010
nale de Bâle, en 2001 à la FIAC.
ShanghART Gallery represente des artistes
appartenant à différentes générations : Li
Shan, Liang Shaoji et Yu Youhan, à plus de
65 ans, représentent la première génération
de l’art contemporain. Ils ont commencé
une carrière académique, puis sont partis
travailler pendant la Révolution culturelle. Li
Shan a vécu à New York. La seconde génération — Ding Yi, Geng Jianyi, Zeng Fanzhi,
Zhou Tie Hai — née entre 1964 et 1966 et
formée en Chine, est plus expérimentale.
La troisième —Yang Fudong, Xu Zheng,
Yang Zhenzhong —, née dans les années
70 est plus versée dans l’art conceptuel, la
vidéo, la photo. Elle est plus individualiste,
moins directement concernée par le politique. Et de nouveaux artistes tels que Liu
Wejian, Sun Xun et Zhang Ding sont en
train d’émerger.
C. : Après le retournement du marché en 2008, où
en êtes-vous ?
W. Z. : L’art contemporain chinois s’est bien
stabilisé après 2008. Pendant trois-quatre
ans, beaucoup d’investisseurs étaient arrivés sans vision de collection, pour gagner
de l’argent. Après la crise, les vrais collectionneurs sont restés. De 2004 à 2008, le
regard extérieur du monde a beaucoup
compté. Maintenant c’est plus calme. Nous
allons en profiter pour ouvrir notre galerie
à des artistes étrangers, comme le Japonais Araki. Quant aux acheteurs, au début,
ils étaient tous étrangers. Aujourd’hui, les
Chinois représentent plus du tiers de nos
clients. Ce sont des gens cultivés, qui ont
de l’argent à placer. Ils peuvent développer une collection, avoir envie de montrer
leur statut ou bien de décorer leur maison.
Les motivations sont variées… Avant, les
étrangers cherchaient plutôt des œuvres
caractéristiques de la culture chinoise,
comme le Pop politique. Maintenant, les
collectionneurs ont une vision plus diversifiée et plus ouverte.
C. : Quels sont vos rapports avec la puissance publique ? A partir de quand le gouvernement a-t-il
pensé qu’il était utile d’intervenir sur le marché de
l’art contemporain ?
W. Z. : A partir de 2004, le gouvernement
s’engage pour le meilleur ou pour le pire
dans l’art contemporain. On voit apparaître des quartiers de développement des
industries de création sur le modèle de
« 798 », des subventions, des fondations
liées au ministère de la Culture pour aider
les galeries ou les foires artistiques. En tant
que Chinoise, je trouve ces subventions
bienvenues, même si nous n’en profitons
pas. Un pays qui ne soutient pas sa culture
n’est pas un pays normal. Mais cela peut
poser des problèmes. C’est à la fois un problème de compétence et un problème politique, mais je suis optimiste car des gens
compétents ont été nommés. Il faut cependant relever l’ensemble du niveau. De
plus en plus de Chinois étudient le management culturel à l’étranger et reviennent
travailler en Chine. Il y a beaucoup d’artistes
résidents étrangers qui s’installent en Chine
où la scène artistique est vivante, même s’il
règne une nostalgie de la Nouvelle Vague
des années 80. Il manque cependant une
synergie entre les différentes formes d’art
et notre public reste trop restreint. Cela
tient à l’éducation, à la presse. C’est peutêtre pour la prochaine génération.
•
Propos recueillis
par Anne Garrigue
DOSSIER
专栏
Su Tong, est le fondateur et directeur de l’Alliance industrielle pour la création en
Chine (CCIA).
Du “made in china” au
“created in china”
Su Tong, est le directeur de l’Alliance industrielle pour la création en Chine (CCIA), une « entreprise sociale », qui regroupe des
industries créatives à Pékin et qu’il a fondée en 2004, à la veille des
JO d’Athènes.
des entreprises qui font partie de cette alliance et qui relèvent de
tous les secteurs de la création culturelle — design, management
culturel, publicité, investissement, production cinéma et de TV,
architecture — est de promouvoir la culture chinoise tout en gagnant de l’argent. Nous avons déjà un espace dans la tour Gehua
Connexions : Pourquoi avez-vous fondé l’alliance pour les industries créa- à Pékin et nous allons ouvrir prochainement un nouvel espace au
tives ?
Stade des travailleurs, toujours à Pékin. Y seront organisés des évéSu Tong : Il s’agit de la première alliance d’entreprises chinoises dont nements à partir de la synergie entre entreprises membres, qui
l’objectif est de promouvoir le concept « created in China ». En août pourront profiter à titre provisoire de bureaux mis à leur disposition
2004, pendant les jeux olympiques d’Athènes,
et de cafés et de restaurants déjà présents dans le
nous avons organisé la première expo de pho- « Depuis
Stade. Notre concept de synergie se rapproche de la
tographies sur ce thème. Notre mission consiste 2009, avec
conception d’un lieu comme « Dashanzi Art District
à aider les secteurs traditionnels, qu’il s’agisse de
798 », mais, alors que dans « 798 » chaque entité —
fabrication ou de service, à intégrer le concept de le plan de
galerie, restaurants, ateliers d’artistes — fonctionne
relance
de
créativité dans leur démarche. Dans la province
séparément, dans notre projet, c’est l’Alliance qui
de Hunan, par exemple, nous avons aidé, à la de- la créativité,
coiffe toutes les activités.
mande de la municipalité de Liling, l’industrie de
C. : Etes-vous la seule Alliance en Chine à développer ce
le commerce
la porcelaine traditionnelle, qui était moribonde,
travail de réunification sous un même chapeau ?
à repartir. Nous avons favorisé sa promotion à culturel est
S. T. : Non. Ces alliances pour la créativité, qui peul’occasion des jeux olympiques d’Athènes et de encouragé
vent prendre différentes formes, existent dans toute
Pékin. Nous les avons aidés à faire revivre des pro- par les
la Chine et s’intègrent dans une politique nationale
cédés et des techniques disparus.
lancée dès 2005 par le gouvernement dans le cadre
autorités. »
Depuis 2007, nous coopérons avec le groupe
du 11e plan quinquennal pour promouvoir les inGehua development, une entreprise d’Etat sous
dustries culturelles. Le projet a été repris dès 2006
le contrôle de la municipalité de Pékin, pour créer
par la municipalité de Pékin, qui a financé l’espace
une plate-forme internationale : l’International Creative Industries de promotion pour la créativité chinoise que nous gérons dans la
Alliance Beijing (ICIA) qui veut promouvoir le design chinois à tour Gehua. Officiellement, la politique de soft power chinoise a
l’étranger. Nous avons adopté le statut d’entreprise sociale. Le but été lancée en 2007 pendant le 17e congrès. Pour la première fois,
98 Connexions / mars 2010
© Anne Garrigue
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
A l’intérieur du très select club des créateurs de Pékin, situé
dans la tour Gehua.
在北京歌华大厦里国际文化创意产业联盟旗下的顶级会所
le président Hu Jintao a mentionné la nécessité d’augmenter le
soft power culturel de l’Etat. En 2009, un projet de la relance de
l’industrie culturelle a été mis en place.
C. : Concrètement, quels produits et quelles images de la Chine voulez-vous
promouvoir à l’international ?
S. T. : Il y avait autrefois une forte influence chinoise en Europe, no-
teurs chinois qui ont manqué d’occasions de faire leur preuve. Mais
c’est en train de changer. La tendance au développement est forte.
La culture chinoise n’est pas une culture nationale unique, elle est
mélangée, diverse. Beaucoup d’éléments sont venus de l’étranger
(Mongolie, Inde…). Il n’y a pas encore de rêve chinois mais nous
sommes en train de le construire.
tamment au XVIIe et XVIIIe siècle. Aujourd’hui, la Chine recommence
seulement à diffuser sa culture à l’étranger. L’effort n’est pas suffisant. Depuis 2009, avec le plan de relance de la créativité culturelle,
le commerce culturel est encouragé. Mais il est encore trop tourné
vers l’intérieur. Il s’adresse au marché domestique plutôt qu’international. Le secteur des industries créatives manque d’ambition pour
exporter ses produits et n’est pas assez conscient du soutien qu’il
pourrait apporter à la politique de soft power du gouvernement.
Il y a des progrès cependant, d’année en année.
C. : Pourriez-vous nous citer un emblème du design chinois qui symbolise
aux yeux du monde le rêve chinois ?
S. T. : Le Nid d’oiseau.
C. : Mais ce n’est pas une création purement chinoise. Herzog et de Meuron,
le cabinet qui l’a conçue en collaboration avec Ai Wei Wei est suisse…
S. T. : J’ai du mal à vous répondre. Dans la Chine contemporaine, il
n’est pas facile de trouver quelque chose qu’on peut promouvoir
dans le monde entier et dont on se dise immédiatement « c’est
chinois ».
C. : En France, la culture chinoise est mieux connue pour ses traditions que
pour ses réalisations contemporaines. Que faites-vous pour améliorer la
situation ?
S. T. : Notre première mission est de promouvoir la créativité chinoi-
C. : Et Shanghai 2010, le pavillon chinois. Ne sera-t-il pas votre Tour Eiffel ?
S. T. : Si, c’est un symbole de l’architecture chinoise contemporaine,
se, pour montrer comment la Chine peut contribuer à la culture
mondiale. Notre deuxième mission est de promouvoir le design
pour remplacer le « made in China » par le « created in China ». On
est encore loin du but, mais, en 2008, la ville de Shenzhen a été
couronnée comme « ville UNESCO de design », dans le cadre du
Réseau des villes créatives de l’Organisation des Nations-Unies1.
Pékin et Shanghai sont aujourd’hui candidates.
Jusqu’ici, nous avons beaucoup copié et pas assez créé. Peut-être
parce que les investisseurs n’ont pas fait assez confiance aux créa-
même s’il est d’inspiration très traditionnelle avec sa couleur rouge
et la structure impériale de son toit, et son architecte en chef, He
Jingtang, est chinois2 !
•
Propos recuei l l is pa r A n ne Ga rrig ue
L’UNESCO a motivé sa récompense par sa volonté de récompenser le dynamisme des industries du
graphisme et du design industriel de Shenzhen, le développement rapide des secteurs du contenu
numérique et du design interactif en ligne, les solutions innovantes dans le domaine du conditionnement alliant techniques de pointe et le respect de l’environnement, l’intégration du design
au cœur de sa stratégie de transformation urbaine.
2
He Jingtang, 72 ans, concepteur en chef du pavillon chinois est membre de l’Institut d’architecture
de l’Université de Technologie de Chine méridionale et de l’Académie d’Ingénierie de Chine
1
Connexions / mars 2010 99
DOSSIER
专栏
Portrait d’une génération
d’architectes designers
Ils ont entre 35 et 55 ans et innovent sur le premier marché mondial de la construction.
Jérémie Descamps,
urbaniste. Enfant à Hong
Kong où son père travaillait
dans les travaux publics,
Jérémie Descamps, après
des études de chinois à
Paris et en Chine (Canton et Harbin), puis
un troisième cycle d’urbanisme à Paris,
a travaillé dans une école d’architecture
(Paris Malaquais) qui venait d’ouvrir une
convention avec l’Université de Tsinghua,
puis avec Françoise Ged à l’Observatoire
de la Chine à la Cité de l’architecture
pendant deux ans. Il a ouvert en 2007
un cabinet d’urbanisme à Pékin, Atelier
Huitième périphérique.
Connexions : Que représente, à l’échelle de la Chine,
la nouvelle génération d’architectes chinois que vous
rpésentez dans votre ouvrage Positions ?
Jérémie Descamps : Positions est le catalogue
d’une exposition organisée à la Cité de
l’architecture et du patrimoine en 2008. Il
vient après quinze ans de recherches et
de liens avec des institutions chinoises.
Françoise Ged et Frédéric Edelman sont
allés à la rencontre des acteurs pour
connaître leur philosophie.Tous les projets
présentés sont des projets réalisés. Mais
il faut reconnaître que ce mouvement
pour une architecture plus exigeante est
encore embryonnaire. Les architectes
que nous avons présentés espèrent que
leur exemple permettra un progrès par
contamination.
C : Peut-on revenir sur les premiers pas de cette
génération ?
J. D. : A la fin des années 90, des agences
internationales de renommée mondiale
avaient participé à des concours
internationaux assez politiques pour
prendre pied en Chine. Comme elles
avaient besoin d’un relais, des architectes
chinois les ont rejoints et se sont fait
100 Connexions / mars 2010
connaître. Puis, certains ont ouvert leur
propre agence. Beaucoup d’entre eux
avaient étudié à l’étranger, en Europe ou
aux Etats-Unis. Dans cette génération, qui
a 35-45 ans, certains noms commencent
à être connus. Yung Ho Chang, dirige le
département d’architecture du MITI. Il a
aussi sa propre agence en Chine Atelier
Feichang Jianzhu. Ma Qing Yun, directeur
de MADA s.p.a.m. à Shanghai, dirige
aussi le département d’architecture de
l’université de Californie du Sud, à Los
Angeles. Le travail de Wang Shu (Amateur
architecte studio) basé à Hangzhou est
particulièrement suivi par les critiques
étrangers.
C. : Qu’est-ce qui caractérise précisément cette
génération ?
J. D. : Dans un univers où l’on construit à
tour de bras des blocs posés n’importe
où, elle a en commun le souci de réaliser
des projets qui prennent en compte
l’environnement et la dimension locale.
Quand on leur demande quel rapport
existe entre la tradition chinoise et leur
création contemporaine, ils répondent
que c’est en puisant dans les savoir-faire
et les spécificités locales, en cherchant des
liens aux paysages, à la trame existante, à
l’histoire d’un site qu’ils établissent cette
filiation.
Une autre caractéristique de cette
génération est sa flexibilité. Qi Xin,
architecte à Pékin, qui a longtemps
vécu en France, dit qu’il travaille en
Chine « dans un paysage incertain » en
« tenant compte des aléas de la maîtrise
d’œuvre et d’ouvrage ». Cette génération
d’architectes commence à avoir son mot
à dire face aux promoteurs et aux maîtres
d’ouvrage, mais elle n’a pas, comme en
Europe, la haute-main de la conception
à la réalisation. Il lui faut faire preuve
de souplesse, savoir négocier avec les
commanditaires et les maîtres d’ouvrage
dont certains sont innovants. Ainsi Zhang
Xin et Pan Shiyi de Soho ont fait appel à
Ma Qing Yun pour le Guanghua Road
Soho et à Cui Kai pour le Soho New Town.
Dans l’ensemble, cette génération a
pourtant réalisé peu de projets à grande
échelle, à cause de la taille encore réduite
de ses agences. Ce sont les instituts (avec
plusieurs centaines d’employés) liés aux
autorités locales ou aux universités qui
occupent le terrain. Certains architectes
ont des doubles casquettes : Cui Kai, un
des pionniers de cette génération, est
à la tête de l’Institut d’architecture de
Chine tout en dirigeant aussi une petite
agence plus expérimentale. Pour pallier
les problèmes d’échelle, cette génération
fonctionne aussi en réseau, en synergie. Il
lui arrive de prendre collectivement des
projets en attribuant des lots. Reste qu’elle
ne représente encore qu’une goutte
d’eau dans l’océan d’une gigantesque
demande.
C. : Etant donnée l’énorme demande, que leur
manque-t-il encore pour devenir une référence
mondiale ?
J. D. : Rattraper le temps de la transmission.
Il n’y a pas encore eu une génération
complète d’architectes designers. On
enseigne encore en université avec des
méthodes anciennes pour former des
exécutifs. La Révolution culturelle a tout
arrêté pendant 10 ans. La formation a
repris dans les années 80, au moment
de l’explosion urbaine. Tout a dû se faire
en même temps. Comme l’économie
fonctionne grâce à coups de grands
projets, les architectes fraîchement
diplômés rejoignent les rangs des gros
instituts qui construisent sans finesse.
On entre pourtant dans une époque de
réalisations plus qualitatives, avec plus
de réflexion sur le territoire. Il y a de bons
magazines (Urban China, ideal space)
des sites Internet, une vie critique
•••
© DR
© DR
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Villa Shizilin (Pékin). Atelier Feichang Jianzhu, 2003. Chefs de projet : Chang Yung Ho et Wang Hui. 北京柿子林会所,2003年,非常建筑。建筑
Village-hôtel de la vallée de jade (Liantian, Xi’an). Agence
MADA spam, 2008. Chef de projet : Ma Qing Yun. 玉山酒馆(西安蓝
师:张永和、王晖。
田),2008年,马达思班。建筑师:马清运。
Siheyuan
Aire
(Pékin). Qi Xin
architects
and
Engineers, 2007.
Chef de projet : Qi
Xin. 似合院(北京),
Village de la Commune de la grande muraille (Pékin). Split House,
长城脚下的公社——二分宅,建筑师:张永和
Chang Yung Ho. © DR
师:齐欣。
© DR
© DR
2007年,齐欣建筑。建筑
Village de la Commune de la grande muraille (Pékin). «See» and
«Seen» House, Cui Kai. 长城脚下的公社: 三号别墅《看与被看》,建筑师:崔凯
Connexions / mars 2010 101
DOSSIER
专栏
qui débute timidement
••• des raisons politiques. D’autre
L’Opéra national, conçu par Paul Andreu, est devenu un emblème de la capitale
chinoise.
保罗.安德鲁设计的国家歌剧院已经成为中国首都的象征性建筑
Hier, la Chine montrait sa grandeur
depuis les pavillons de la Cité Interdite ;
aujourd’hui, elle le fait à partir des
fauteuils de l’Opéra national. « La Chine
a besoin d’ouvrages exceptionnels pour
montrer au monde ce qui se passe dans
le pays » affirme Tang Jun, architecte
en chef du cabinet français Arep à
Pékin. « Le thème de l’Expo 2010 en
est le dernier exemple. Aujourd’hui
chaque ville cherche à construire une
nouvelle identité grâce à la construction
d’un opéra, d’un musée ou d’un
centre culturel », ajoute Zhou Wenyi,
associée du cabinet Arte Charpentier
à Shanghai. Récemment, le nombre
d’architectes étrangers installés en Chine
a beaucoup augmenté. Les cabinets
français, italiens, allemands, anglais et
même indiens fleurissent dans le pays.
La Chine était, à la fin des années 1990,
une terre vierge et l’ambition créatrice
étrangère est regardée avec beaucoup
d’estime.
« Ici, il faut toujours apporter une valeur
ajoutée, un savoir-faire inspirant et
faire preuve de capacité d’évolution »,
explique Fleur des Diguères, directrice
générale de Arep en Chine.
En effet, être architecte en Chine implique une façon de travailler différente.
« Ce que peut faire un architecte chinois
est limité, explique Tang Jun, car il ne
doit pas imaginer quelque chose de
trop difficile à mettre en place pour
la structure, l’architecte et l’ingénieur
technique travaillant séparément ». La
créativité est cantonnée à la production
d’un dessin. L’innovation est souvent
102 Connexions / mars 2010
© Imagine China
Les architectes étrangers en Chine
freinée par des obstacles pragmatiques.
Par contre, aux étrangers, tout, ou
presque, est permis car ils sont là pour
« apporter de nouveaux concepts,
technologie ou méthodes et les mettre
en pratique » explique Tang Jun.
« Les étrangers sont attirés en Chine
par la variété de secteurs où peut
s’exercer leur créativité» ajoute Fleur de
Diguères. Fascinés par les éléments de
l’architecture traditionnelle chinoise, tel
que le fengshui, ils s’en inspirent pour
donner une identité à leur projets. « Pour
les Chinois c’est beaucoup plus difficile
d’harmoniser tradition et modernité,
car constamment baignés dans des
éléments traditionnels, ils sont moins
enclins à les utiliser » selon Tang Jun.
Pourtant, l’architecture chinoise se
renouvelle et l’on voit émerger de
jeunes talents. « Il y a une grande
évolution en Chine concernant la
créativité, la modernité et l’image
de l’architecture chinoise, explique
Zhou Wenyi . Ceci concerne aussi bien
les auteurs de projets que ceux qui
prennent les décisions ou réalisent
les projets ». Certains jeunes cabinets
made in China sont désormais connus
dans le monde entier. « On voit arriver
une nouvelle génération d’architectes,
dont certains ont suivi des formations
à l’étranger. Ils commencent à trouver
un style en rapport avec leurs origines
culturelles, mais ils manquent parfois
d’expérience sur les détails, et leur façon
de considérer l’architecture comme des
« folies » gagnerait à être maitrisée. ».
•
Antonia Cimini
pour
part,
beaucoup de villes chinoises ont terminé
la planification de leur schéma directeur
et reviennent sur les détails où les
architectes ont un rôle important à jouer.
C’est cela qui intéresse d’abord cette
génération : travailler avec les autorités
locales sur le tissu urbain.
Quant au retentissement international de
cette génération, même si ses membres
ne sont pas encore aussi connus que
Rem Koolhaas ou Kengo Kuma, le fait que
Yung Ho Chang et Ma Qing Yun soient à
la tête d’établissements internationaux
prestigieux, est la preuve de son influence
croissante. Celle-ci s’est opérée d’abord
par le biais des Ecoles d’architecture
chinoises et occidentales, qui, depuis
une décennie, ont largement accru
leurs échanges. Ainsi en France, ont eu
lieu des ateliers de travail entre étudiants
et professeurs chinois et français au cours
desquels l’étude du contexte urbain
chinois — territoires à grande échelle,
contraintes démographiques, temps
de conception très courts, aléas de la
maîtrise d’ouvrage... — ont modifié petit
à petit la vision occidentale de fabrication
de projet. Cela va de pair avec l’évolution
urbaine globale. Des villes comme Dubai,
Pékin ou Shanghai, où tout semble
possible a priori, renouvellent l’approche
classique du rôle de l’architecte, de
la maîtrise d’ouvrage, le processus de
projet…
Le projet d’architecture n’est plus
tellement considéré comme une œuvre
à part, mais comme le composant de
vastes puzzles urbains, aux acteurs et
possibilités multiples. Avec la globalisation
de ces modes de fabrication de la ville, les
architectes chinois auront alors peut-être
des réponses et des solutions à exporter,
puisqu’ils tentent déjà de trouver des
solutions pour leur propre pays.
•
Propos recueillis par Anne Garrigue
. Positions, portrait d’une nouvelle génération d’architectes
chinois, catalogue de l’exposition conçue et réalisée par
la Cité de l’architecture et du patrimoine / Institut français
d’architecture, textes Frédéric edelman et Jérémie Descamps
2
. China architecture and design research group
1
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Artisanat d’art
Christofle collabore avec des artistes chinois
Fer de lance d’un artisanat français haut- Christofle qui a choisi d’inviter la Chinoise
de-gamme de réputation internationale, Wang Xiaohui pour dessiner une pièce
l’argentier Christofle s’intéresse depuis pour la marque. Formée à l’Université de
longtemps à des techniques bien Tongji à Shanghai dans les années 1980,
chinoises. « Nous utilisons déjà la laque Wang Xiaohui est une artiste qui touche
de Chine », explique ainsi le directeur de à tout, aussi bien à la photo, à l’art, qu’au
Christofle en Chine, Benjamin Bilteryst. design extérieur ou à la sculpture. Mais
Jusque-là, l’orfévre utilisait cette matière, c’est sans doute pour ses sculptures et
ses peintures qu’elle est le
chinoise
par excellence,
pour ses bijoux, essentiel « Les villages plus reconnue. « Cela fait
deux ans que nous nous
l e m e n t , e t l a c o l l e c sommes liés d’amitié. Son
tion « laque de Chine » c artisanaux
travail sur le symbolisme
ompte déjà de nombreux comme
m’avait alors interpellé »,
articles mais l’usage de
cette technique ancestrale Jingdezhen
confie Benjamin Bilteryst.
pourrait s’étendre à d’autres se font
Conquis, le Français avait
produits de la gamme.
alors parlé de l’artiste
rares.»
« Nous avons des projets
chinoise. « Et le siège à Paris
avec un fabricant pour
s’est montré intéressé »,
travailler la laque de Chine, sur des boîtes raconte le directeur. La collaboration s’est
ou sur des plateaux notamment », précise dès lors rapidement mise en place. Une
le responsable français.
fois l’oeuvre réalisée par Wang Xiaohui, les
Chrisofle ne cache ainsi pas son attirance orfèvres de la marque ont travaillé à partir
pour l’artisanat chinois qui tend pourtant d’un moule de l’artiste pour reproduire
à disparaître, la conversion du pays à la la sculpture. Elle est aujourd’hui exposée
modernité ayant souvent emporté avec dans la boutique-phare de la marque à
elle de précieux savoir-faire. Certaines Shanghai, située sur la célèbre Huashan
régions de Chine font toutefois encore lu, aux abords de la concession française.
de la résistance. Au sud de Shanghai, par Christofle a l’habitude de travailler avec
exemple, à Jingdezhen, se trouve une des artistes ou des designers de renom,
véritable expertise ancestrale. La petite à l’instar d’Andrée Putman ou de Ora Ïto. Il
ville de la province de Jiangxi, près de la est dès lors peu étonnant que la marque
frontière avec le Zhejiang, est spécialisée ait montré de l’intérêt pour une artiste
depuis presque deux mille ans dans le chinoise, d’autant que l’orfèvre n’en est
travail de la céramique et de la porcelaine, pas à sa première collaboration avec la
qui ont pris leur réel essor il y a un Chine. « Nous avions déjà travaillé avec
millénaire. La ville compte un institut de un artiste hongkongais pour une œuvre
Céramique et est même considérée au intitulée Main dans la main, représentant
niveau mondial comme la capitale de la deux mains qui s’entrelacent », rappelle
porcelaine passée et présente.
Benjamin Bilteryst.
Des berceaux artisanaux comme Cette année, Wang Xiaohui a aussi
Jingdezhen se font cependant de plus en réalisé un marque-page en argent
plus rares face à l’industrialisation du pays pour Christofle. Un clin d’oeil au travail
et les meilleurs porte-paroles du savoir- d’écrivain de l’artiste chinoise, qui vient
faire chinois restent les artistes locaux. Une de rééditer son livre Mon journal intime
réalité dont a bien conscience l’argentier visuel – 15 ans en Allemagne, qui devait
L’artiste chinoise Wang Xiaohui réalise
des modèles pour Christofle. 中国艺术家王小
© Imagine China
A travers les vitrines de l’orfèvre de luxe se diffusent savoir-faire et création contemporaine.
慧为法国昆庭完成了几款设计
sortir au moment de la foire du livre de
Francfort. La Shanghaienne a ainsi vécu
de longues années à Munich, où elle
a gardé des attaches. Mais au-delà de
l’écho donné à sa plume, le marque-page
commercialisé par l’argentier français est
un emprunt au symbolisme chinois. Il y
a d’abord le lotus, très présent dans le
bouddhisme. « Le lotus, c’est la plante
qui se régénère même si elle croît dans la
boue », précise le directeur de Christofle
en Chine. Il y a ensuite le chiffre « cinq »,
symbole de bénédiction.
Chaque boutique de Christofle dans
le monde choisit les collections qu’elle
décide d’exposer, mais après Shanghai,
Benjamin Bilteryst « espère qu’il y aura
un rayonnement » des œuvres de Wang
Xiaohui. L’art chinois pourrait alors se
propager au niveau international à travers
les vitrines de l’orfèvre de luxe.
•
Julie Desné
www.wangxiaohui.com
Connexions / mars 2010 103
DOSSIER
© Imagine China
专栏
Un défilé Vivienne Tam, une des premières stylistes chinoises dont la notoriété a dépassé l’Asie. 谭燕玉的时装秀,她是国际顶尖的华裔时装设计
师之一,其知名度已超出亚洲。
Mode : petits designers deviendront grands
Encore inexistante dans l’univers très select de la haute-couture, la Chine connaît un réveil
créatif depuis les années 2000, encouragé en haut-lieu.
En Chine, la mode n’est jamais qu’un reflet
des rebondissements de l’histoire. Sous
Mao, les Chinois disaient d’un vêtement
qu’il fallait « le porter neuf pendant trois
ans, usé pendant trois autres années et
rapiécé pendant encore trois autres »... De
la qipao mandchoue, considérée sous la
République comme la quintessence de la
féminité, au costume Sun Yat-sen et autres
tricots albanais, des robes fleuries en coton
104 Connexions / mars 2010
importé d’URSS jusqu’à l’océan gris-kaki de
la Révolution culturelle, chaque période
politique a imposé son style. Il aura fallu
attendre l’ère des réformes pour que la
mode ne soit plus considérée comme un
concept « bourgeois » et pour voir ressurgir
fantaisie et couleurs. Désormais, les Chinois
n’auront plus besoin de bons pour acheter
trois à quatre mètres de tissu par an. Place
au polyester, aux pattes d’éléphant, aux
costumes occidentaux, aux mini-jupes,
bref « aux styles ».
Trente ans après, le paysage s’est étoffé.
Les facs de mode ont fleuri, et la profession
s’organise : modélistes, stylistes, experts en
marketing de mode se dotent de représentants, tandis que des jeunes créateurs apparaissent, prêts à en découdre avec l’étranger.
C’est pour former ces jeunes pousses que la
célèbre école Esmod, créée en 1841 par le
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
tailleur de l’impératrice Eugénie, s’est installée à Pékin en 2004. « La Chine est encore
cataloguée comme un pays façonnier mais
elle entend bien monter en gamme », commente Zora Gérault, directrice de l’école
à Pékin. Preuve que les choses bougent :
des dizaines de concours sont organisés
chaque année, avec à la clé de coquettes
bourses.
Certes, la robe portée l’an dernier par
Dong Qing, célèbre animatrice du gala du
Nouvel An sur CCTV, a créé la polémique
sur internet. Copiée ? Pas copiée ? Certes
aussi, Zora Gérault trouve les vêtements
de ses étudiants trop « passe-partout » à
son goût. « Leur créativité n’est pas encore
débordante, mais ils ont grandi avec beaucoup moins de couleurs qu’en Occident.
Inconsciemment, ça joue. »
Lu Liu1, 29 ans, appartient justement à
la nouvelle génération des créateurs de
mode. Comme beaucoup de ceux qui ont
percé avant elle (Vivienne Tam, Sue Wong,
Ma Ke), elle quitte son Pékin natal à 16 ans
pour une pension en Suisse, avant d’étudier
le stylisme à Paris, puis à la prestigieuse Parsons School de New York. Depuis, elle a ouvert sa boutique à Shanghai il y a deux ans,
mais rien n’est facile. « La mode chinoise
n’est pas encore mature. Chacun crée de
son côté et personne ne sait dans quelle
direction aller. »
De fait, si beaucoup de designers chinois
sont invités à montrer leurs créations à
l’étranger, le succès commercial n’est pas
toujours au rendez-vous. Pauline Su, viceprésidente de l’Association de la Mode de
Chine, explique que les créateurs ne manquent pas (plus de 200 studios à Pékin),
mais qu’ils travaillent souvent dans des petites structures et pour un cercle restreint
de clients. « Sauf exception, les marques
des créateurs chinois ne sont pas très connues en Chine et sont loin d’avoir le prestige de leurs homologues étrangères. »
En attendant, tous les grands noms de la
haute-couture se sont inspirés de la Chine.
Tous aussi lorgnent sur le marché chinois, troisième pour le luxe. Cette année,
Armani ouvrira 25 magasins en Chine,
Hermès va lancer une marque en Chine
et Chanel a ouvert une boutique amirale
à Shanghai. Hélène Duv ig neau
1
•
http://lu1228.360fashion.net/
Un “glamour” de Chine
Depuis l’avènement des pieds bandés, l’un des critères de beauté féminins qui
critère esthético-érotique lancé à la cour domine avec la peau, est d’avoir une
impériale et pratiqué pendant plus de longue et soyeuse chevelure noire.
mille ans jusqu’au glamour hollywoodien, L’explosion du marché des cosmétiques
en passant par l’asexualité du maoïsme (+10% par an selon le China Beauty Salon),
triomphant, l’idéal féminin chinois a par ailleurs aidé les Chinoises à affirmer
apparaît une succession d’avatars. Sauf leur beauté. Dans les années 1990, Yu Sai
sous l’ère Mao, un critère n’a pourtant pas Kan, Américaine née en Chine, avait déjà
changé, hérité de la poésie traditionnelle : cassé la baraque en lançant une marque de
la peau des femmes doit être claire, lisse et cosmétiques adaptés aux caractéristiques
pure comme le jade. La peau mise à part, faciales et au grain de peau chinois. Elle
où en sont les Chinois avec leur beauté ?
avait même lancé une wawa (poupée)
« Les Chinoises, qui prenaient encore pour anti-Barbie : Yu-Sai. « J’ai permis aux
modèle l’Européenne aux yeux larges il y Chinoises, bien avant mes concurrents,
a dix ans, reviennent aujourd’hui vers des de concilier la spécificité asiatique avec la
modèles plus asiatiques »,
technologie occidentale »,
observe Zhenzhen Lan,
explique-t-elle.
« Les
vice-présidente
Parallèlement,
de L’Oréal Chine. Avec la Chinoises
l’avènement de Gong Li
mondialisation, les influsur le grand écran dès
ences sont par ailleurs reviennent
la fin des années 1980,
de plus en plus variées. vers des
puis de Zhou Xun et
« Chaque femme cherche
Zhang Ziyi, a contribué
le style de beauté qui modèles plus
à populariser la beauté
lui convient le mieux asiatiques.»
chinoise hors frontières.
parmi tous ceux qui lui
Chez les hommes, ce sont
sont offerts, poursuit la
surtout les acteurs de
spécialiste. Quant aux jeunes, ils n’hésitent Hong Kong (Tony Leung, Andy Lau) ou
pas à teindre leurs cheveux en blond et d’origine hongkongaise (Daniel Wu), qui
revendiquent le droit d’être acceptés tels se sont fait remarquer.
qu’ils sont. »
Mais si les stars chinoises gagnent de
Si les Japonaises ou les Coréennes sont l’influence, y compris dans le sport, sontcertes très imitées, les mannequins des elles pour autant devenues l’armée de
magazines féminins sont encore à 50% charme de la Chine ? D’après Hong Huang,
occidentaux. Le mensuel Beauty ouvre éditrice, bloggeuse et animatrice d’une
ainsi son numéro de février avec une pub émission télé, la Chine aurait bien besoin
Estée Lauder montrant Gwyneth Paltrow d’une telle « armée », et de citer la phrase
en tenue fine. Au milieu, une feuille volante d’un professeur de Beida, prononcée en
vante les mérites des opérations des 2006 : « Un Yao Ming, une Zhang Ziyi sont
seins, très en vogue chez les diplômées plus efficaces que dix mille Confucius ».
ayant des économies. Double paupière, Une idée qu’elle applique à la lettre
nez plus étroit, pommettes arrondies… puisque son magazine iLook, sorti pour
les améliorations recherchées ne sont pas la première fois à Taiwan en janvier, fait
très asiatiques.
sa couverture sur Zhang Ziyi. « C’est notre
Autre illustration, caricaturale, de la contribution au soft power chinois. ».
popularité des beautés occidentales : Reste que cette armée de beaux et belles
quand Mattel a ouvert en 2009 son ne se laisse pas si facilement enrôler. Pour
magasin de six étages à Shanghai, les des raisons de cœur, Gong Li est devenue
trentenaires n’étaient pas les dernières singapourienne. Quant à Zhang Ziyi et
à se précipiter. Or 90% des Barbie en Zhou Xun, elles ont obtenu la citoyenneté
stock étaient blondes aux yeux bleus. hongkongaise, cette fois pour des
« Chaque Shanghaienne veut être une raisons pratiques. Dernier « transfuge »
princesse », expliquait une jeune femme en date : le bébé de Yao Ming, bien
à un journaliste du Hufftington Post. Mais parti pour naître aux Etats-Unis, donc
toutes les Chinoises ne se rêvent pas en devenir citoyen Américain. Barbie et font clairement la différence H. D.
entre fantasme et réalité. A titre d’exemple,
•
Connexions / mars 2010 105
DOSSIER
专栏
L’essor des marques chinoises
Même si la réputation du « made in China » ne décolle pas en Occident, quelques marques
chinoises ont pourtant réussi à s’imposer comme des références dans leur secteur. Les autres
attendent leur heure, se concentrant pour l’instant sur le marché intérieur.
Google, L’Oréal, Nike, Nokia, Canon, BMW... tation de soi » lors des JO a été mis cruelLe classement BrandZ 2009 des 100 mar- lement en échec par le scandale du lait
ques mondiales les plus puissantes réalisé contaminé. Or l’image d’un pays a un effet
par le cabinet Millward Brown1, reflète sans halo pour ses marques.
surprise la domination des marques oc- A la rescousse du « Made in China »
cidentales, notamment américaines. Nu- Pour redorer le blason de son industrie,
méro 7, China Mobile est consacré comme durablement écorné par des scandales
premier opérateur mondial de téléphonie à retentissement international, dont les
mobile. C’est aussi la seule entreprise chinoi- épisodes ne sont pas toujours clos, Pékin
se, hors secteur bancaire, à figurer dans la a lancé fin 2009 sur CNN une campagne
liste. S’il ne mesure pas la renommée directe de sauvetage du made in China. Pendant 4
des marques, ce classement traduit malgré mois un spot de 30 secondes explique aux
tout la difficulté des marques chinoises à téléspectateurs américains que les articles
rayonner hors frontières.
chinois sont aussi
« Au village, sans prétention, j’ai «Pendant
fabriqués « avec le
mauvaise réputation », chantait quatre mois, un
monde ». Made in
Brassens. Serait-ce à cause de
China, les baskets styspot de trente
la mauvaise réputation qui,
lées de Nike seraient
elle aussi, colle à l’étiquette secondes
peu de chose, explides produits chinois, que le fa- explique aux
que la pub, sans la
bricant d’appareils électromé« technologie sportéléspectanagers Haier a choisi un nom
tive américaine ».
Jusqu’à présent,
à consonance allemande ? teurs
Pourquoi un produit made in américains que
Pékin ne s’était pas
China serait-il a priori moins les articles
vraiment démené
bon qu’un autre fabriqué en
pour aider les fourchinois sont
Indonésie ou au Mexique si
nisseurs chinois de
ce n’est pour des questions aussi fabriqués
marques étrangères,
mais l’arrivée de la
d’image ? Selon l’étude made avec le monde. »
in China 2008 réalisée par le
crise a sans doute
cabinet Interbrand auprès de
rendu l’exercice plus
700 professionnels non-chinois, seuls 6% urgent. Paradoxalement, explique le blogdes sondés affirment « aimer acheter des geur Kaiser Kuo sur Youku, le spot pourrait
marques chinoises » et 68% jugent que le avoir un effet contraire en renforçant l’idée
made in China nuit au développement de que l’atelier du monde est en Chine.
ces marques. Malgré la couverture mondia- Toujours est-il que pour l’instant, leur princile des produits chinois, les marques, elles, pal atout, à savoir des prix compétitifs, perd
n’ont donc pas encore conquis le cœur et son aspect positif dans la mesure où il est
l’esprit des consommateurs étrangers.
souvent associé à une qualité médiocre ou
L’effet loupe lié aux JO et à son statut de à un risque pour la santé. Selon l’enquête
grande puissance émergente a par ailleurs d’Interbrand, les marques chinoises renconeu tendance à se retourner contre la Chine. trent quatre types d’obstacles à l’étranger :
Ainsi, l’exercice remarquable de « représen- la réputation de mauvaise qualité (80%),
106 Connexions / mars 2010
l’absence d’avantages compétitifs en dehors du prix (53%), le ressentiment antichinois (45%) et une mauvaise communication (31%). Sans travail sur leur personnalité,
comment attirer en effet des consommateurs étrangers ? Mais ces marques ont-elles vraiment besoin de s’exporter en leur
nom sur des marchés occidentaux déjà
archi-mûrs ? « Pas forcément », répond Nathalie Bastianelli, experte en marketing ancienne directrice générale de Havas
Sports Chine, pour qui les opportunités de
développement se situent en priorité sur
le marché intérieur. « Certains secteurs,
comme l’automobile, sont saturés à l’international, alors que le marché domestique
est en plein boom, obligeant les marques
chinoises à bâtir des stratégies coûteuses
d’innovation, d’alliance ou de rachat si elles
veulent exporter. La décision de se concentrer sur la Chine n’a rien à voir avec le fait
qu’elles soient chinoises. »
Shopping hors frontières
Depuis l’entrée de la Chine à l’OMC en 2001,
les rachats ou tentatives de rachat parfois
spectaculaires de fleurons étrangers se sont
multipliés. Après avoir engrangé du capital
sur le marché domestique, les entreprises
chinoises rachètent hors frontières pour
sauter des étapes technologiques. Fusion
TCL-Thomson en 2004, rachat de la division
PC d’IBM par Lenovo en 2005, ou du Suédois Volvo (propriété de Ford), par Geely,
encore inconnu en Occident… Très médiatisées, ces emplettes ne sont pourtant pas
toujours couronnées de succès. Parfois précipitées, réalisées à l’initiative d’acteurs pas
toujours préparés, elles reflètent néanmoins
un appétit croissant d’internationalisation.
A l’exemple de Lenovo, propulsé numéro
4 mondial en ventes de PC, les percées de
marques chinoises à l’étranger existent,
même si elles ne sont pas toujours connues
© Imagine China
© Imagine China
© Imagine China
© Imagine China
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© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Lenovo, Buy your Dream, Li Ning, Haier, Tsingtao et China Mobile… les marques chinoises affichent des ambitions internationales.
联想、比亚迪、李宁、海尔、青岛啤酒、中国移动等中国品牌彰显出国际化雄心。
du grand public. « Parmi les firmes chinoises
qui émergent et conquièrent des marchés
avec de gros moyens financiers, on trouve
les grandes sociétés d’Etat, dans l’énergie
notamment », explique Vladimir Djurovic, fondateur de Labbrand2, un cabinet
de conseil pour les marques. L’exemple de
l’équipementier télécoms Huawei, devenu
en peu de temps, numéro 2 mondial dans
le secteur des réseaux mobiles (avec 20%
des parts de marché 2009) et la bête noire
d’Alcatel Lucent, est très frappant. Que dire
aussi de CNPC (China National Petroleum
Corporation), partenaire des JO, qui a gagné
fin décembre le contrat d’exploitation d’un
champ pétrolier irakien avec le quatrième
groupe pétrolier Total en partenaire minoritaire (25%) ?
Bâtir des marques fortes
Outre les exemples de marques dites « ethniques » diffusées auprès de la communauté des Chinois de l’étranger, telle la bière Tsingtao, on trouve aussi des exemples
d’acteurs privés, tels Haier et Li Ning, qui ont
misé dès le départ sur la construction d’une
image de marque auprès des consommateurs étrangers. « Ce sont des stratégies
conscientes et professionnelles, souligne
Olivier Vérot, expert en marketing et
auteur du blog « Marketing en Chine »3. En
travaillant sur l’innovation, Haier a réussi à
s’imposer — aidé, il est vrai, par sa JV avec
Liebherr — dans les réseaux de distribution
occidentaux. « Il a innové sur les fonctionnalités en ciblant le public étudiant et s’est
donné pour mot d’ordre « Détruisez ce qui
n’est pas de bonne qualité », note Vladimir
Djurovic. Quant à Li Ning, ancien gymnaste
triple médaillé olympique aujourd’hui patron d’une marque de vêtements de sport
éponyme, il a réalisé un coup de maître en
allumant la vasque olympique lors de la
cérémonie d’ouverture des JO. Certes, son
logo imite le Swoosh de Nike et son slogan
« Anything is possible » rappelle le « Impossible is nothing » d’Adidas, mais Li Ning ne
s’en soucie guère et affiche ses ambitions
internationales. « Il a compris qu’il lui fallait
multiplier partenariats et publicités à grande échelle pour gagner en crédibilité », observe Nathalie Bastianelli. Accord avec l’ATP
(tennis) ou avec la star du basket Shaquille
O’Neal, contrat de sponsoring avec le club
de foot Espagnol, ou même avec la Caisse
d’Epargne… Li Ning sème ses graines.
L’arrivée d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, jeunes et polyglottes, va sans
doute renforcer à l’avenir l’influence des
marques chinoises à l’étranger. Dans l’automobile, BYD créé le buzz avec son e6 100%
électrique, tandis que le patron d’Aigo, société high-tech de produits multimédia,
se rêve déjà en Samsung. Et si les marques
chinoises suivaient la voie de leurs cousines
coréennes ou japonaises ?
•
Hélène Duvigneau
Réalisé chaque année, le classement BrandZ évalue les
marques en fonction de leur potentiel de création de valeur
financière. Il s’appuie sur les chiffres rendus publics par les
entreprises et sur l’appréciation de leurs clients.
2
www.labbrand.com
3
Blog : http://www.marketing-chine.com/
1
Connexions / mars 2010 107
DOSSIER
专栏
Benjamin Joffe est fondateur et CEO de
Plus 8 Star.
La Route de la soie numérique
Benjamin Joffe est Pdg d’un cabinet d’études stratégiques
spécialisé sur le marché Internet et télécom en Asie de l’Est
(Chine, Japon, Corée). Il observe attentivement la zone depuis
une dizaine d’années et est impliqué dans deux startups dans
le domaine du social gaming et de l’« expertcrowdsourcing ».
Dans son secteur, l’innovation en matière de modèles d’affaires
(business model) est souvent originaire d’Asie.
Connexions : Peut-on parler d’innovation venant d’Asie de l’Est, et notamment
de Chine, dans votre secteur Internet et Telecoms ?
B. J. : Avant de vous répondre, je tiens à préciser que parler de la
nationalité d’une idée n’a pas de sens. On peut seulement identifier
dans quel pays une idée a réussi à trouver un marché important. Il
arrive fréquemment que des idées apparaissent indépendamment
dans des lieux différents dès lors que les conditions sont réunies. La
plus grande difficulté est d’arriver à comprendre l’environnement
qui a permis à une innovation de prospérer, de ne pas simplifier
excessivement la description d’une innovation et d’éviter les stéréotypes culturels. Un exemple : si l’on dit que Tencent, le développeur
de la messagerie instantanée QQ, est le « Facebook » ou le « MSN »
de Chine, on n’explique rien. Souvent, il n’y a pas d’équivalent direct
et l’important est justement dans les différences.
J’aime la métaphore du « darwinisme technologique ». Si les premiers modèles d’affaires qui ont fonctionné dans le secteur sur
la plupart des marchés étaient américains et privilégiaient la recherche d’information et les revenus publicitaires, une fois arrivés
dans des écosystèmes locaux, ces modèles ont dû être adaptés
et ont commencé à diverger. C’est le cas de Tencent, qui a com108 Connexions / mars 2010
mencé sur le modèle de ICQ, mais réalise maintenant 90% de ses
revenus grâce aux services à valeur ajoutée, jeux et objets virtuels.
Bien qu’encore très peu connue à l’étranger, — et encore plus mal
comprise — Tencent est la troisième plus grande société Internet
du monde derrière Google et Amazon.
J’emploie aussi volontiers l’image de la « Route de la soie numérique ». Prenons l’exemple des services question-réponse. C’est
Naver en Corée du Sud qui, le premier, en a fait un succès massif.
Hors de Corée, il a été copié par Yahoo (Yahoo Answers), puis par
Google, qui n’a pu rattraper Yahoo et a finalement renoncé. Yahoo
a ensuite été copié par Baidu en Chine et les Japonais l’ont adapté
directement à partir de Naver. Peu importe que Naver l’ait inventé
ou pas, l’important est de noter ce qui marche, le comprendre et
l’adapter quand cela peut l’être. Les idées circulent et peuvent avoir
encore plus de succès hors de leur lieu de naissance…
C. : Pouvez-vous revenir brièvement sur l’histoire d’innovations venues d’Asie
de l’Est ?
B. J. : Pour prendre quelques exemples marquants : le modèle
économique et l’écosystème technologique de l’iPhone existe au
Japon depuis 1999 et NTT DoCoMo avait lancé un « apple store »
dès 2001. Difficile de dire si Apple a « adapté » ce modèle ou l’a
réinventé… près de dix ans plus tard ! En Corée du Sud, où le gouvernement avait beaucoup investi dans les infrastructures des
réseaux, un journalisme citoyen efficace a pu se développer avec
Ohmynews1. Ce site d’information sur Internet existe depuis dix
ans. Il compte 40 000 contributeurs et a même fondé une école de
journalisme pour former des « citizens reporters ». C’est Rue 89 dix
ans avant l’heure, et Ohmynews n’a cessé d’innover. Le site a même
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
La comercialisation des jeux en ligne est un modèle qui a fait école en Corée, puis
en Chine.
网络游戏的商业运营模式在韩国兴起,然后来到中国。
contribué à élire un président alors que les médias soutenaient les
partis classiques. Un modèle d’affaires qui a fait école, en Corée
puis en Chine, est celui de la commercialisation des jeux en ligne.
Pour se défendre contre la copie, les sociétés coréennes ont préféré les jeux en ligne sur abonnement à la vente sur étagères. Les
modèles ont évolué rapidement, au fur et à mesure que montait
la concurrence : d’abord le logiciel gratuit et l’abonnement payant, puis des périodes d’essai gratuites, enfin le marché des objets
virtuels. Electronic Arts, un géant du jeu vidéo américain, a licencié
récemment 1 500 employés et acheté pour 300 millions de dollars
la société Playfish, créatrice de jeux sur les réseaux sociaux sur le
modèle de free-to-play. Dans les réseaux sociaux aussi, la Corée a
été très innovante puisque son service Cyworld, lancé en 1999,
repose aussi sur des objets virtuels. Facebook fait encore 90% de
son revenu par la publicité.
C. : Et la Chine ?
B. J. : La Chine a beaucoup appris de ses voisins, après avoir été
fascinée par le modèle américain. Aujourd’hui, c’est elle qui a le
marché des jeux en ligne le plus développé qui représente trois à
quatre fois le marché coréen). Et, sur le marché des objets virtuels,
l’addition des marchés japonais, coréen et chinois représentait en
2009 plus de sept fois le marché américain, estimé à 1 milliard de
dollars. En Chine, les innovations sont rarement spectaculaires,
ne serait-ce que parce que l’infrastructure Internet n’est pas aussi
rapide que les autres : leur haut débit ne compte que 1 ou 2 mégas
alors qu’en Europe, on en est à 5 mégas et au Japon à 100 mégas.
Ils viennent seulement de lancer la 3G. Mais l’infrastructure et la
technologie ne sont pas tout. L’innovation peut être aussi au niveau
des concepts, des méthodes de marketing ou des aspects communautaires. En Chine, les services s’adressent plutôt à un marché
de masse qui cherche du divertissement. Elles sont rarement issues
de technologies de pointe très coûteuses et risquées, sauf le peerto-peer2 très développé pour répondre aux limitations de réseau et
à des exigences de faible coût.
En matière d’innovation, les Chinois sont des entrepreneurs pragmatiques, qui essaient en général de limiter les risques en commençant par adapter une idée qui a déjà marché ailleurs. Tencent
est devenu une superstar du Net en commercialisant, pour la première fois, une combinaison de messagerie instantanée avec des
services à valeur ajoutée à faible coût (musique de fond pour page
perso, jeux, avatars). Elle a rajouté des jeux en ligne, des services
mobiles et a résolu initialement les problèmes de paiement pour
un public jeune, qui ne disposait pas de cartes de paiement, avec la
diffusion de cartes prépayées. En 2009, ses revenus seront de plus
de 1,5 milliards de dollars, soit environ 3 fois ceux de Facebook. La
marge nette de Tencent est de plus de 40% !
Aujourd’hui, dans le domaine des jeux en ligne, neuf sociétés chinoises sont cotées en bourse alors que les sociétés occidentales
(Electronique arts, Ubisoft, Atari) sont en transition pour faire face
aux mutations du marché vers les jeux en ligne et les nouveaux
modèles d’affaires, déjà utilisés en Asie depuis des années. C’est
aussi un grand changement dans la gestion de la vie du jeu, devenu un service plutôt qu’un produit, qui a intégré dans son évolution les souhaits des utilisateurs.
C. : Qu’est-ce qui explique l’explosion de ces innovations en Chine ?
Notre modèle pour l’expliquer est le « 5 C » : Copie,
•••
Connexions / mars 2010 109
DOSSIER
© Imagine China
专栏
En Chine, pour les résaux sociaux, cinq grands s’affrontent, créant une concurrence qui force les sociétés à innover. 中国五大社交网站鼎立,造成的竞争迫使企业去创新。
Compétition, Contrainte, Combinaison, Chine. Dans un pays
•••
qui compte de multiples compagnies pour chaque service dominant aux Etats-Unis et en Europe (la Chine compte 5 « Facebook »,
3 « Yahoo », 4 « Twitter », une demie douzaine de « Meetic »), la
concurrence force les sociétés à innover pour se différencier par
leurs services, leurs stratégies marketing. L’innovation est souvent
une question de survie, lorsque les modèles d’affaires d’origine ne
fonctionnent pas. Rien que pour les réseaux sociaux, en Chine cinq
grands s’affrontent : Renren (ex Xiaonei), Kaixin 001, Q zone (par
Tencent), 51.com et la plupart des Chinois branchés sont présents
sur plusieurs d’entre eux, parfois même sous plusieurs identités sur
un seul réseau, pour des usages variés. De plus, la croissance de la
Chine en a fait un pays d’entrepreneurs qui attire le capital risque
du monde entier.
C. : Ces innovations sont-elles reproductibles ailleurs ? Influencent-elles le
reste du monde ?
Parmi les innovations identifiées, les plus intéressantes sont au
niveau des concepts, des innovations marketing et des modèles
d’affaires, dont un certain nombre sont adaptables à d’autres
marchés. Un exemple : celui du réseau social P1, qui se concentre
sur la classe moyenne montante chinoise. Pour recruter des membres, les fondateurs ont eu l’idée d’employer à temps partiel des
jeunes qui proposent à des clients de galeries marchandes hautde-gamme d’être photographiés gratuitement et d’être inscrits au
réseau social ! Cela permet de collecter l’email puis le numéro de téléphone mobile lors de la confirmation par SMS. L’employé à temps
partiel est rémunéré 10 Rmb (1 euro) par client qui confirme son
inscription, soit l’équivalent d’une heure et demi de travail au Mac
Do. Un des fondateurs de ce réseau a été inspiré par un magazine
suédois qui prenait des photos dans les night-clubs pour les publier sur papier et en ligne. Ce type de modèle peut être reproduit
à condition de faire preuve de curiosité et de mettre de côté ses
110 Connexions / mars 2010
préconceptions pour analyser les succès asiatiques en profondeur.
On en est encore loin.
Le monde entier semble facilement convaincu que ce qui est
américain passe partout alors que ce qui est asiatique ne marche
qu’en Asie. Les sociétés asiatiques qui réussissent, les chinoises en
tête, achètent maintenant des marques, du savoir-faire et des distributeurs en Occident. Tencent, Alibaba, Shanda, Haier, Lenovo,
Huawei… se fondent très bien dans le paysage et avancent peu à
peu, laissant leurs concurrents débattre sur l’existence d’innovation
en Asie
C. : Quelle est la part du facteur culturel dans le succès de ces modèles nés
en Asie de l’Est ?
B. J. : A la fin des années 90, j’ai souvent entendu justifier l’avance
des Japonais sur les services mobiles par des explications culturalistes : les Japonais ont une culture indirecte ; ils préfèrent écrire
que parler ; ils sont tout le temps dans le métro ; ils n’ont pas de
PC ; ils aiment le karaoké, le manga ; ils ont des petits doigts ! Ce
sont des fautes de logique classique de confondre corrélation et
conséquence ou de prendre un facteur amplifiant pour une cause.
Le temps passant, on a vu apparaitre les mêmes services dans le
reste du monde, plus ou moins « réinventés », quand l’écosystème
atteignait un niveau comparable. On parle bien « d’air du temps »,
c’est certainement valable pour l’innovation. Il y a souvent des raisons structurelles pour lesquelles un service ne marche pas, mais
comprendre les raisons d’un succès et les conditions nécessaires
permet d’anticiper avec davantage de chances d’avoir raison et ne
pas réinventer la roue. Finalement, pour maitriser un transfert, il faut
bien connaitre les deux cultures et les deux marchés.
•
Propos recuei l l is pa r A n ne Ga rrig ue
Créé en 2000, version anglaise depuis 2005 et japonaise depuis 2006, 50 000 participants http://
fr.wikipedia.org/wiki/OhmyNews
2
Modèle de distribution où l’on récupère du contenu de façon fragmenté à partir d’une multitude
de sources
1
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Connexions / mars 2010 111
DOSSIER
专栏
Leadership and
management in China
Philosophies, theories and practices
Éd. par Chao Cahuan Chen et Yueh
Ting Lee
Ce manuel sur le leadership est une
oeuvre assez pionnière. Les ouvrages
universitaires en anglais sur le
leadership chinois ne sont pas légion.
Encore moins ceux qui sont dirigés et
écrits par des chercheurs d’origine
chinoise. Chao Cahuan Chen et Yueh
Ting Lee enseignent aux Etats-Unis,
l’un est professeur de management
à Rutgers Business school et l’autre
est professeur de psychologie et
doyen de l’université de Toledo. Ils
ont rassemblé des textes écrits (sauf le
dernier) par des Chinois. Leur ouvrage
ouvre sur les origines des philosophies
du leadership : le confucianisme
et les philosophies alternatives
(taoïsme, légalisme, art de la guerre
de Sunzi). Il se poursuit donc sur des
enquêtes de terrain ou des réflexions
sur la situation contemporaine — le
leadership paternaliste, le leadership
communiste (Mao Zedong et Deng
Xiaoping), le métissage des traditions
chinoises et des théories occidentales.
Il conclut sur l’article d’un expert
occidental George Bear Graen qui fait
le point sur ce qu’apporte la Chine à
l’approche mondiale du leadership.
D’une lecture assez austère, cet
ouvrage académique, extrêmement
sérieux et référencé, peut servir de
cadre à une réflexion personnelle.
Il fait le point sur les recherches
académiques dans des entreprises du
monde chinois depuis une vingtaine
d’années. Il étudie en profondeur
les trois dimensions du modèle
paternaliste : autorité, bienveillance
et moralisme. Il détaille les résultats
d’une grosse enquête de terrain sur
les leaders chinois contemporains qui
met l’accent sur six caractéristiques :
l’impor tance de la sincérité, la
poursuite de l’excellence, la nécessité
de l’harmonie, la voie du Milieu, la
spécialisation et le management
A. G.
scientifique. 112 Connexions / mars 2010
China Europe International Business School (CEIBS), un des meilleurs MBA de Chine, a créé deux
中国最好的MBA商学院——中欧国际工商学院建立了两所研究中心。
De plus en plus de MBA
En vingt ans, la Chine a créé plus de deux cents MBA, mais
de management et de modèles référencés.
Edith Coron1 est coach en
leadership global et spécialiste en communication interculturelle. Basée à Pékin,
elle a fondé et dirige EOC
Intercultural Ltd.
Connexions : Quand sont apparus les MBA en
Chine ? Où en est-on aujourd’hui ?
Edith Coron : Au début des années 80, il n’y
avait que des entreprises d’Etat avec, aux
commandes, des ingénieurs en grande
partie formés à l’Ecole du Parti. Avec l’arrivée de multinationales, il a fallu trouver
des cadres qui intègrent des repères occidentaux dans leur pratique. Les premiers
MBA sont apparus il y a un peu moins de
vingt ans. Aujourd’hui, il y en a plus de 230
dont certains sont excellents. Business Week
China distingue en tête CEIBS ( Shanghai),
Bimba (Pékin), Tsinghua (SEM avec Sloane
de MIT) et Cheung kong business school
(Shanghai). La majorité des MBA chinois
reste cependant d’une qualité médiocre.
L’ambition du gouvernement est d’augmenter encore de 24% le nombre des
inscriptions dans les business schools en
Chine et d’accréditer trente nouvelles universités à délivrer des MBA — actuellement
elles ont un peu moins de cent.
C. : Quelle proportion de Chinois préfèrent
aujourd’hui suivre un MBA en Chine?
E. C. : Au départ, les étudiants allaient se
former à l’étranger surtout aux Etats-Unis.
Depuis quelques années, de plus en
plus de jeunes Chinois préfèrent rester
en Chine parce qu’ils veulent peaufiner
en priorité leur réseau chinois et s’initier
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
vient de créer deux centres de recherche.
Une des difficultés des écoles de commerce chinoises est de trouver des intervenants. Il est encore tôt en Chine pour avoir
suffisamment de professeurs. Les écoles
ont recours ponctuellement à des cadres
ou des CEO chinois. De même, on commence seulement à publier des livres en
anglais sur le leadership et le management
chinois, alors que tous les modèles occidentaux ont été largement traduits en Chine.
© Imagine China
C. : Assiste-t-on à l’émergence d’un modèle chinois
de leadership ?
E. C. : Pour l’instant, je vois dans ma pratique
centres de recherche.
manque encore de professeurs
aux modèles occidentaux appliqués à
partir de la réalité chinoise. On constate,
d’autre part, un fort intérêt de la part des
étudiants étrangers pour les meilleurs
MBA chinois. John Yang, doyen international de BImba, explique qu’il a dû
imposer un quota d’étudiants étrangers
dans son MBA pour éviter que leur nombre n’excède celui des étudiants chinois.
C. : Voit-on émerger une sinisation des MBA
chinois ?
E. C. : On en est aux prémices. Les cours
sont en grande partie en anglais car les
professeurs des meilleurs MBA sont étrangers à 60%. C’est aussi une question de maturité de marché. Au départ, les programmes étaient des « copié-collé » de Harvard.
Maintenant, on voit circuler des études de
cas chinois (Haier, Lenovo, Wahaha). CEIBS
des références constantes à des modèles
historiques – Confucius, Mencius, le taoïsme, l’art de la guerre de Sunzi, mais aussi
Mao, Deng Xiaoping, voire Sun Yat-sen. Je
vois circuler les « buzz words » : harmonie,
voie du milieu, bienveillance mais dans la
réalité quotidienne, le court terme, le pragmatisme, la volonté de gagner de l’argent
dominent chez la majorité des cadres que
je côtoie.
En outre, il est important de distinguer
entre hard skills et soft skills. Pour les hard
skills, ce qui a trait à la rationalisation et au
contrôle des méthodes de production
— il y a un consensus pour appliquer les
méthodes occidentales qui ont fait leur
preuve. Par contre pour les softs skills, les
approches managériales, j’entends souvent dire par les managers chinois : « on
ne peut pas faire du “copié-collé“. Ça ne
marche pas ». On nous renvoie aux modèles historiques, mais on se rend compte,
dans une pratique professionnelle, que la
connaissance réelle des valeurs chinoises
classiques reste superficielle, même si on
assiste à un regain d’intérêt.
C. : Y a-t-il des tentatives concrètes d’adapter les
classiques au monde de l’entreprise ?
E. C. : C’est en train d’émerger, notamment
dans le domaine de la responsabilité sociale d’entreprise, dans la manière de traiter
son personnel, avec le modèle du patron
bienveillant. C’est une approche différente
de l’approche pragmatique occidentale. J’ai
des collègues de Singapour qui réfléchissent beaucoup sur l’articulation des valeurs
confucéennes et de la responsabilité d’un
cadre d’entreprise. Pour l’instant, j’entends
moins ce discours en Chine continentale.
Les Chinois qui sont dans l’articulation
Est-Ouest viennent plus souvent de Sin-
gapour ou de Hong-Kong. Il y a aussi un
problème de qualité de la recherche. Beaucoup d’étudiants font des MBA en Chine
pour obtenir un diplôme et des guanxi
plutôt que pour développer un contenu.
C. : Quel modèle alternatif proposent les cadres
chinois ?
E. C. Tout a commencé quand les enfants
de cadres supérieurs du Parti se sont engouffrés dans des MBA. Le Parti a recruté
des entrepreneurs et les multinationales ont commencé à promouvoir des
Chinois. Tout cela a modifié la donne. Le
management par les cadres chinois sera
différent du management par les cadres
occidentaux. Un manager chinois donne
plus l’importance à la dimension humaine
de la relation, alors qu’en Occident, il faut
parfois l’imposer. En même temps, émerge une dimension de fierté nationale. On
commence à percevoir une fin de recevoir,
parfois liée à une certaine arrogance des
sociétés étrangères en Chine qui ont voulu
imposer leur modèle en Chine et qui commencent à réfléchir à son adaptation.
Reste qu’aujourd’hui le personnel en
charge des RH, recruté avec peu d’expérience, peu de vision stratégique, est encore, en grande partie, immature. Mais des
entreprises sont en train de donner une
dimension stratégique aux RH : Motorola,
Schneider…
Sur le terrain, en tant que coach, j’observe
que les cadres chinois trentenaires ont
une approche très pragmatique. Ils veulent réussir et ont un peu de mal à accepter
de se remettre en question. Ils ne sont pas
très bons en soft skills. Dans la pratique, on
en est paradoxalement à une application
relativement simple du modèle , sans vision globale. Le développement des soft
skills, on sait qu’il faut le faire. Mais on en
est encore loin du but et il n’y a pas encore
vraiment de livre de référence.
•
Propos recueillis par Anne Garrigue
http://www.eoc-intercultural.com/english/who-we-are/biography.html
2
CEIBS a été classé 22e mondiale par le Financial Times (2010).
3
http://www.chinaeconomicreview.com/industry-focus/in-themagazine/article/2009-07-01/Brain_drain.html*
Selon les statistiques nationales, en 2007, 4,4 millions de Chinois
ont été diplômés de l’enseignement supérieur. 41 464 ont obtenu
un doctorat dont 14 000 en tant qu’ingénieurs et un peu plus de
3 000 dans le management
4
Pour améliorer l’adéquation des programmes aux besoins
chinois, CEIBS a ouvert deux centres de recherche, l’un avec
Shanghai Lujiazui Development, l’autre avec Zhejiang University
School of Management.
1
Connexions / mars 2010 113
DOSSIER
专栏
Etudier en Chine
Cindy Arnold est déléguée en Chine de Sciences Po.
Connexions : Pourquoi les étudiants étrangers viennent -t-il
étudier en Chine ?
Cindy Arnold : Selon le ministère de l’Educa-
tion chinois1, de janvier à novembre 2008,
223 499 étudiants étrangers avaient étudié
en Chine, venant de 189 pays et régions,
soit une augmentation de plus de 14% par
rapport à l’année précédente. Les plus forts
contingents viennent d’Asie (68,5%), 14,5%
d’Europe, 11,8% d’Amérique , 3,9% d’Afrique
et 1,2% d’Océanie. En tête, arrivent les Coréens du Sud (66 806), suivis des étudiants
en provenance des USA (19 914) et des Japonais (16 733). La France est au onzième
rang derrière le Kazakhstan, l’Indonésie
ou le Pakistan et juste devant la Mongolie.
Dans le paysage de la mobilité internationale, la Chine arrive en cinquième position
à peu près au niveau de l’Allemagne.
Ces chiffres sont difficiles à analyser. Il
faut distinguer entre les programmes qui
permettent d’acquérir un diplôme et les
programmes de langue. La majorité des
étudiants occidentaux viennent en Chine
pour perfectionner leur chinois et se familiariser avec un pays important. Ils restent
six mois ou un an. Par contre, les étudiants
d’Afrique ou d’Asie viennent suivre des formations diplômantes, notamment techniques, après avoir appris la langue sur place.
Certains Coréens ou Japonais choisissent la
Chine car les études y sont moins chères
que chez eux et les préparent à travailler
avec le pays. Ils peuvent être envoyés par
leur pays ou par leur entreprise.
C. : Quels sont les efforts consentis par le gouvernement chinois pour encourager la venue d’étudiants étrangers ?
C. A. : Le gouvernement chinois multiplie
les bourses. En 2008, 13 516 étudiants
étrangers en Chine en ont bénéficié. Un
chiffre en hausse de 33% par rapport à
l’année précédente. En visite au Kazakhstan, Hu Jintao, par exemple, a annoncé la
multiplication par deux du nombre des
bourses pour les étudiants kazakhs. Autre
atout : les frais d’inscription dans les univer114 Connexions / mars 2010
sités chinoises restent modiques (de 600 à
900 euros par an). Il suffit d’avoir obtenu un
niveau 6 au HSK2.
Par ailleurs, les meilleures universités chinoises cherchent à attirer des étudiants étrangers vers des programmes diplômants en
anglais et développent des doubles diplômes. Ainsi, Sciences Po vient de créer deux
doubles diplômes avec Fudan à Shanghai
et Beida à Pékin, qui ouvriront en 2010.
La Chine augmente aussi son soft power
grâce au classement Jiao Tong dit « classement de Shanghai3 » qui lui permet de
jouer un rôle-clé dans le classement mondial des universités. Au sein de ce classement, les universités chinoises montent
régulièrement4.
C. : Que signifie passer un an en Chine pour un
jeune étudiant, français de Sciences Po ?
C. A. : Nos étudiants ont, en général, commencé l’étude du chinois à Sciences Po. Ils
viennent pour pratiquer la langue et pour
valider une première expérience asiatique
utile dans un cursus professionnel, ce n’est
pas la qualité des formations qui les attire.
Leur objectif est de se perfectionner et
mieux comprendre la réalité chinoise. Ceci
dit, encore peu d’entre eux sont à même
de suivre des cours en chinois. Par ailleurs,
la vie n’est pas chère, les grandes villes sont
excitantes. En arrivant, ils peuvent éprouver
un choc culturel et doivent s’adapter aux
lourdeurs administratives, mais en général
ils s’intègrent sans difficultés et sont très satisfaits de leur séjour. Beaucoup reviennent
pour des stages professionnels. Le nombre
d’étudiants de Sciences Po qui veulent étudier en Chine continentale tourne autour
de 20 par an depuis 2004, et à peu près
autant à Hong Kong, où ils peuvent aller
au-delà d’un apprentissage de langue.
Les programmes en anglais qu’ouvrent les
universités du Continent restent rares et
chers.
•
Propos recueillis par Anne Garrigue
(Source d’information : http://www.cafsa.org.cn/index.
php?mid=6)
2
test de langue. http://www.afpc.asso.fr/HSK/Presentation.
php
3
http://www.lefigaro.fr/international/2009/11/30/0100320091130ARTFIG00002-universites-les-secrets-du-classement-de-shanghai-.php;
4
h t t p : / / f r. w i k i p e d i a . o rg / w i k i / C l a s s e m e n t _
acad%C3%A9mique_des_universit%C3%A9s_mondiales_
par_l’universit%C3%A9_Jiao_Tong_de_Shanghai
1
La recherche devrait représenter 2,5% du PIB en 2020,
2020年,我国研发投入占国内生产总值2.5%,目前已达到1.5%。
R&D : l’élan positivi
La recherche scientifique chinoise se dé
académique et d’un manque d’ambitio
Lorsqu’elle fut confrontée, à la fin de l’Empire, à la supériorité technologique occidentale, la Chine s’est interrogée sur les
savoirs occidentaux qu’il lui faudrait ou
non adopter. Un siècle plus tard, Deng
Xiaoping prenait sans réserve le train de
l’innovation scientifique et tournait la page
des errements de la Révolution culturelle.
Aujourd’hui, c’est au tour du « développement scientifique » de Hu Jintao de prendre le relais, et la Chine vise la place de première puissance scientifique. Les jeunes
Chinois se retrouvent donc baignés dans
une ambiance positiviste, marquée par
des hymnes à la science, et les meilleurs
se tournent naturellement vers des études
scientifiques.
Certes, comme l’explique Stéphane Grumbach1, directeur de recherche à l’INRIA2, la
science chinoise est encore peu visible sur
le plan international, mais sa croissance est
impressionnante et son potentiel sous-es-
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
contre 1,5% aujourd’hui.
iste
éveloppe très vite mais souffre de fraude
on en recherche fondamentale.
timé. Il suffit de citer quelques chiffres pour
s’en rendre compte : la Chine, qui investit
1,5% de son PIB dans la recherche, souhaite
monter à 2,5% en 2020, soit l’équivalent de
l’objectif européen. Partie de rien, elle se
classe aujourd’hui en 3e position par son
budget R&D (150 milliards de dollars), en 4e
par le nombre de ses publications.
En plus d’investir, la Chine regorge aussi
de programmes de développement à
échéance de douze ans et a déjà un pied,
voire deux, dans la plupart des grands
projets scientifiques internationaux (ITER,
CERN…). Désireuse d’apprendre de l’extérieur, elle recrute les meilleurs spécialistes
dans Nature et Science, et les invite cordialement à venir piloter des programmes.
Enfin, depuis récemment, elle réactive les
bourses d’études à l’étranger pour les premiers de la classe, qu’elle assortit astucieusement d’une condition de retour.
Cette politique a fortement contribué à
faire sortir la Chine scientifique du désert
où elle se trouvait. Selon une étude Jülich,
elle publie3 principalement en chimie, physique, matériaux, médecine et biotechnologies. Elle commence aussi à s’imposer
dans des niches (nanotechnologies), et
réalise une percée dans le domaine des
télécommunications, tirée par son gigantesque marché d’utilisateurs de mobiles.
Malgré ces succès, la recherche chinoise
n’est pourtant pas exempte de faiblesses.
Récemment, un article du Quotidien du
Peuple critiquait vivement l’absence de
contrôle sur l’utilisation des budgets ce
qui se traduit notamment par des achats
« prestige » d’équipements de pointe.
Par ailleurs, si la Chine publie beaucoup,
la qualité des travaux demande encore à
être améliorée. « Un article chinois est en
moyenne 3 à 4 fois moins cité qu’un article
japonais ou européen », observe Georges
Papageorgiou, ministre conseiller à la délégation de l’UE de Pékin. Sur ce point, la
Chine est victime de sa politique de pression à la publication, qui pousse les chercheurs à scinder leurs travaux pour gagner
plus, ou à frauder.
Autre élément qui pourrait se révéler handicapant, la Chine investit peu en recherche fondamentale, pourtant fer de lance
de l’innovation. Or comme le rappelle
Robert Farhi, conseiller adjoint pour
la science à l’ambassade de France en
Chine, « la moitié des brevets d’invention
déposés en Chine le sont encore par des
entreprises étrangères. » Pour que la Chine
suive la voie du Japon, il faudrait donc sans
doute qu’elle table moins sur le transfert de
technologies, et que les mentalités changent, notamment dans l’enseignement.
Jean Dorey, directeur de l’école Centrale
de Pékin, connaît bien ce problème. « En
Chine, l’enseignement développe peu
l’esprit critique. Les professeurs se contentent de présentations PowerPoint et les
examens consistent à refaire des exercices
vus en cours ». Au pays de la vérité révélée,
imagination critique et curiosité intellectuelle, ingrédients précieux de la culture
scientifique, ne sont donc pas, a priori, les
points forts des jeunes Chinois. Ce sont ces
mêmes critiques qui ont coûté son poste,
l’an dernier, au ministre de l’Education.
Dans une interview accordée le 9 mars
au Global Times Zhao Zhiyun, directrice
adjointe de l’ISTIC4, appelle à développer
en toute urgence l’innovation. « Malgré les
investissements, la Chine manque encore
d’une recherche de qualité. (…) La prochaine étape sera d’encourager la curiosité pour la science pure et de promouvoir
l’exploration d’univers inconnus ».
Autre gros problème : la fraude académique, qui n’est certes pas propre à la Chine
mais prend tout de même des proportions
inquiétantes. Rien que le commerce des
thèses atteindrait 100 millions d’€ par an
et selon une enquête parue l’an dernier,
sur 30 000 scientifiques interrogés, 55,5%
connaissaient un fraudeur. Malgré ces handicaps, la recherche scientifique chinoise
dispose d’un atout souvent sous-estimé, à
savoir une bonne connaissance de ce qui
se passe dans les labos étrangers, l’inverse
étant beaucoup moins vrai.
•
Hélène Duvigneau
http://stephanegrumbach.blogspot.com/
Institut national de recherche en information et en
automatique (INRIA)
3
en volume de publications parues entre 1998 et 2007
4
Institut de l’information scientifique et technique de Chine
1
2
Le complexe du Prix Nobel
La Chine, qui a inventé le papier et la
poudre à canon, manque encore d’un
Prix Nobel autochtone. « Quand la Chine
aura un Prix Nobel, elle pourra gagner
la Coupe du monde de foot », affirmait
le président de l’Académie des Sciences,
critiquant le manque d’esprit d’équipe.
En octobre, Charles Kao, Américanobritannique, est devenu le 8e prix Nobel d’origine chinoise1. Les Chinois se
considèrent généralement victimes de
discrimination. Pour Evelyne Micollier,
anthropologue, l’aspect politique joue
sans doute un rôle. Récompenser un
Chinois, ne serait-ce pas cautionner le régime ? D’autres évoquent un manque de
transparence de la recherche chinoise,
ou y voient un problème systémique,
et parient que le jour où un chercheur
révèlera l’effet des ondes électromagnétiques sur la santé, Chinois ou pas, il aura
ses chances. En attendant son prix, Pékin
offre des ponts d’or aux meilleurs chercheurs chinois installés à l’étranger. H.D
1 Avec Roger Tsien (chimie, 2008), Gao Xingjian (Littérature,
2000), Daniel Tsui (Physique, 1998), Steven Chu (Physique,
1997), Yuan Lee (chimie, 1986), Samuel Ting (physique,
1976), Chen Yang (Physique, 1957) et Tsung-Dao Lee
(Physique, 1957).
Connexions / mars 2010 115
DOSSIER
专栏
Vivian Wu, formatrice ex-correspondante
du South China Morning Post (SCMP)
Filip Noubel, expert médias chinois
Internet et soft power
Internet est une fenêtre sur l’évolution rapide de la société chinoise
mais le contrôle qu’exerce sur lui le gouvernement a un impact
négatif très fort sur l’image de la Chine hors de ses frontières.
Vivian Wu, ancienne correspondante du SCMP, et Filip Noubel,
formateur auprès des médias chinois, analysent le rapport complexe
entre Internet et soft power.
Connexions : Internet ouvre-t-il vraiment une fenêtre sur la Chine pour les non
Chinois ?
Vivian Wu : Avec plus de 600 millions d’usagers, Internet est de
plus en plus populaire. Il fait partie de la vie des gens, qui, pour la
plupart des Chinois l’utilisent pour s’amuser, télécharger des films,
de la musique, faire leur courses. Par ailleurs, c’est un outil précieux
pour la presse étrangère, une façon de récupérer de l’information
et de comprendre ce que pensent les Chinois. Ces dix dernières
années, correspondante de journaux anglophones, l’Internet était,
tous les jours, ma source majeure d’informations de première main.
Il existe beaucoup de mini-blogs, de versions chinoises des sites
interdits (Fanfou.com pour twitter, kaixin.com pour Facebook). C’est
un moyen rapide de récupérer des informations avant qu’elles ne
soient censurées. Les médias chinois étant toujours contrôlés,
Internet ouvre une fenêtre fraîche et réaliste sur la Chine, à condition
de lire le chinois !
D’autre part, comme le gouvernement a pris conscience de l’intérêt
que présente Internet en anglais pour améliorer l’image de la Chine,
des efforts ont été entrepris pour lancer des sites conçus avec soin
pour répondre aux demandes de lecteurs telles qu’on les imagine
et, en même temps, pour convoyer l’image de la Chine souhaitée.
C’est ainsi que sont nés sur le web Global Times (http://china.
globaltimescn), Shanghai Daily (http://www.shanghaidaily.com),
China Daily, China Radio International, CCTV international on line…
116 Connexions / mars 2010
Les sites sponsorisés sont différents des sites chinois en chinois où
les gens jurent, utilisent un langage très cru. Reste que, si on ne
parle pas de sujets trop sensibles, ces sites ouvrent des fenêtres
nouvelles, parlent de la vie urbaine, d’histoires drôles.
C. : En quoi Internet s’est-il révélé un bon outil de soft power ?
F. Noubel : La présence massive de la Chine sur Internet montre son
pouvoir global. La croissance rapide de la Chine en ligne fascine, et
suscite d’autant plus d’interrogations que 95% du contenu est en
chinois et que la plupart des internautes étrangers ne lisent pas le
chinois. Il y a une énorme curiosité à l’extérieur de la Chine mais,
pour l’instant, elle n’est pas satisfaite.
V. Wu : Les étrangers savent qu’il existe un cyberword en Chine
mais il leur est fermé. Quelques sites cherchent à faire le pont.
Plusieurs sont censurés en Chine (Yeeyan fermé en décembre,
Danwei et Chinadigitaltimes). Parmi les sites accessibles, on
peut citer globalvoices.online (http://globalvoicesonline.org//
world/east-asia/china), China dialogue sur l’environnement
(http://www.chinadialogue.net), très bon site bilingue consacré
à l’environnement et China media project (http://cmp.hku.hk) du
China media study center de l’université de Hong Kong. Malgré
les bonnes volontés, ces ponts restent très limités et les médias
sponsorisés accroissent plutôt le fossé en utilisant un langage qui
n’est pas celui des Chinois sur le web et en ne se montrant jamais
critiques. Leur absence d’ouverture s’explique par le fait que ces sites
ne savent pas bien ce qu’attendent les lecteurs anglophones. Et le
gouvernement reste nerveux sur l’ouverture. Mais tout le monde, y
compris le gouvernement, réalise qu’il est important d’augmenter
la communication et la compréhension mutuelles alors qu’à
l’heure actuelle l’image de l’Internet chinois reste assez mauvaise à
l’étranger et ne correspond pas à la réalité. La plupart des articles de
la presse étrangère se focalise sur la liberté d’expression. Cela induit
© Imagine China
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
Des efforts ont été entrepris pour lancer des sites conçus avec soin, pour
répondre à la demande des lecteurs et convoyer l’image souhaitée de la
Chine. 为了推出设计精良的网站,满足读者的需求以及传递中国希望塑造的形象,政府付出了努
力。
un décalage dans les perceptions. Les étrangers qui ne parlent pas
chinois se concentrent sur l’absence d’Internet au Xinjiang ou chez
les plus pauvres, sans mesurer la diversité des usages d’Internet en
Chine ou l’existence d’une opinion publique en Chine qui, en ligne,
a un certain pouvoir.
C.: Quel rôle joue Internet pour l’ouverture vers l’extérieur des Chinois ?
V. Wu : Les gens vraiment intéressés apprennent avec ingéniosité
à surmonter le « firewall », mais la plupart des internautes veulent
surtout jouer, acheter, regarder la TV… Sur Internet la Pop culture
est omniprésente. On peut trouver des versions chinoises de tous
les magazines, des programmes internationaux reproduits dans un
contexte chinois.
C. : En quoi Internet aide-t-il la culture populaire chinoise à être mieux connue dans
le monde ?
F. N. : Jusqu’ici la Chine n’a pas su exporter sa culture populaire.
Elle manque de créations originales. La télévision CCTV achète
beaucoup de programmes mais elle en crée peu. En Asie centrale,
où il y a beaucoup de TV par câble venant de Chine à bon marché,
et les jeunes commencent seulement à poser quelques questions
sur les chanteurs chinois. En Europe et aux Etats-Unis, l’impact hors
de la communauté chinoise reste faible.
V. Wu : Les intellectuels chinois parlent beaucoup de l’absence de
culture ou de valeurs à exporter et déplorent que les étrangers ne
puissent pas citer le nom de créateurs chinois ou que la Chine n’ait
pas reçu de prix Nobel — probablement à cause de la pression subie
dans les années 50 et 60, les intellectuels se sont auto-censurés et
gardent un esprit moins libre (Ndrl : littéralement “restricted mindset”).
Beaucoup produisent pour le pouvoir. Il commence à y avoir des
producteurs indépendants, mais le gouvernement n’encourage
pas ce genre de démarche. Différents facteurs, l’éducation et la
bureaucratie, le manque d’efficacité du gouvernement, le langage
la vitesse de changement de la société, expliquent la difficulté à
exporter les produits culturels chinois. Le problème, pour tout le
monde, est de savoir comment faire passer des idées sur la Chine
quand les gens ont seulement 5% de leur temps à lui consacrer.
Jouer les intermédiaires requiert un très bon niveau de langue, une
compréhension mutuelle. Il y a des Sino-Américains qui essaient
de faire ce travail de communication mais ce ne sont pas de vrais
Chinois. Les gens ont des stéréotypes qui datent des années 80.
Or, la Chine change tous les jours. Devant la difficulté à décoder la
Chine, devant la masse des informations sur Internet, le recours est
encore de passer par les sinologues.
C. : Vous êtes des passeurs. Pour vous, existe-t-il un « rêve chinois » et comment le
qualifieriez-vous ?
V. Wu : La Chine pose une question mystérieuse : comment un si
grand pays avec un contrôle si strict peut-il avoir une économie qui
bouge aussi rapidement ? La Chine, ce n’est ni une terre romantique,
ni une terre de rêve. c’est l’endroit où l’on peut devenir riche. Pour un
journaliste c’est une mine d’or mais ce n’est pas un endroit où vivre
une vie simple et agréable. La Chine fait penser aux Etats-Unis d’il y
a un siècle.
F. N. : Pour moi le rêve chinois, c’est la résilience. Etre russe ou chinois,
c’est avoir avalé une pilule amère. Cela pousse à créer quelque
chose. La résilience est une qualité chinoise. Etre résilient, c’est créer
de l’espace, quelles que soient les circonstances. C’est une valeur
active, positive. Regardez le livre Passagère du silence de Fabienne
Verdier. C’est un des meilleurs livres écrits sur la Chine. Calligraphe,
elle a été initiée par des peintres à qui on avait cassé les mains et qui
lui ont passé leur art…
•
Propos recueillis pas Anne Garrigue
Connexions / mars 2010 117
DOSSIER
© Imagine China
专栏
En 2009, le groupe Quotidien du Peuple a lancé le Global Times, en anglais, conformément au plan de communication vers l’étranger
pour lequel Pékin a débloqué un budget de 45 milliards de Rmb. 按照国家对外公关战略,人民日报社2009年推出了《环球时报》英文版。中国政府为启动这
项战略斥资 450亿元。
Fait en Chine, lu par le monde
En 2008, le parcours chaotique de la flamme olympique révélait aux Chinois une antipathie
caractérisée envers leur pays, tandis que les médias chinois manquaient à leur rôle de parechocs. Depuis lors, la Chine s’est lancée dans un plan de communication offensif.
Après avoir pensé pendant longtemps
que communiquer auprès de l’étranger,
c’était jeter de l’argent par les fenêtres, le
gouvernement chinois a fait volte-face en
2008, mal remis du parcours cauchemardesque de sa flamme olympique. Pour son
plan de « com », Pékin a donc débloqué 45
milliards de Rmb (4,8 milliards d’euros), soit
plus que le budget global de la BBC (4 milliards d’euros). Un article du 21st Century,
paru en février dernier, dresse ainsi la liste
118 Connexions / mars 2010
des médias officiels autorisés à partir au
« casse-pipe » à l’étranger, là où l’information regorge et où la parole d’Etat fait en
général figure d’ovni médiatique.
Selon cette liste, les dix lancements étalés
sur l’année 2009 et planifiés au jour près,
concernent tous types de supports (radio,
télé…) du moment qu’ils sont contrôlés
par l’Etat. En février, une version spéciale
du China Daily s’envole ainsi pour les EtatsUnis. Deux mois plus tard, c’est au tour du
groupe Quotidien du Peuple, courroie du
Parti, de sortir un Global Times en anglais. A
la faveur de l’été, Xinhua se métamorphose
en télé. D’abord en diffusant des spots d’information en temps réel sur le réseau social
Kaixin, les portables 3G, les murs des ambassades et jusque dans les supermarchés
belges… Puis en passant à la vitesse supérieure en 2010, avec le lancement de CNC
(China News Network Corporation), future
France 24 chinoise. L’été 2009 profite encore
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
à CCTV, qui émet pour la première fois en
arabe puis en russe, et prévoit de multiplier
au moins par deux ses bureaux étrangers
d’ici fin 2011. Quant aux membres du Comité central, ils pourront pratiquer les langues,
avec la sortie à la veille du 1er octobre d’une
édition anglophone de la revue théorique
« à la recherche de la vérité » (Qiushi).
A cette stratégie publique, il faut ajouter
des stratégies privées, moins visibles, telle
celle du moteur de recherche Baidu, qui a
ouvert une version japonaise en 2007, ou
encore les services d’IPTV aux Etats-Unis,
avec Kylin TV.
Montée en puissance
Pendant que les médias chinois dépensent,
les groupes de presse occidentaux, eux,
raclent les fonds de tiroirs. En juin 2009,
Didier Pillet, PDG du quotidien La Provence,
décide de se désabonner du fil AFP, jugé
trop cher, et d’opter pour le fil français de
Reuters. S’il a démenti l’an dernier, sur le site
d’Aujourd’hui la Chine, tout contact avec
Xinhua, d’autres journaux régionaux, eux,
ont été abordés par les VRP de l’agence, qui
compte 26 abonnés en France. Pourtant selon les services marketing de Xinhua, aucun
nouvel abonnement n’a été signé en 2009
en France.
Reste que la petite santé financière des
groupes de presse étrangers ouvre une
marge d’action à la Chine. En octobre 2009,
un événement passé quasi-inaperçu dans la
presse occidentale, mérite pourtant d’être
signalé. Pékin a en effet accueilli, dans l’enceinte du Grand Palais du Peuple, le « Sommet mondial des médias », qualifié par
ailleurs d’« olympiades des médias ». Plus
de 130 groupes de médias ont été invités,
une occasion rêvée pour la Chine d’affirmer
ses ambitions dans le secteur des médias.
Parmi les objectifs fixés à ce « go global »,
il s’agit d’abord de faire entendre un autre
son de cloche que celui de la presse occidentale. Ce pour contrebalancer les « attaques gratuites et infondées contre le
système politique chinois », selon les mots
d’un éditorial du Quotidien du Peuple paru
en août 2009. « L’image fictive, imaginaire
de la Chine ne peut être fabriquée et manipulée longtemps.» Dans ce but, Pékin
mise sur un renforcement quantitatif de
ces équipes à l’étranger. L’agence Xinhua
va par exemple passer de cent vingt-trois
bureaux actuels à deux cents en 2020 et
recruter quatre mille journalistes locaux, sont parfois recopiées, et le fossé mental
fins connaisseurs du terrain, contre quatre entre communisme et capitalisme.» Selon
cents aujourd’hui. « Nous voulons offrir au une source bien placée, les journalistes de
monde une image correcte du gouverne- Xinhua recrutés pour le lancement de la
ment chinois et de sa population, et faire nouvelle chaîne de télé manquent d’exen sorte que les Chinois aient également périence technique, habitués qu’ils sont à
une vision objective du monde », souligne l’écrit. Vivian Wu, ancienne journaliste au
Peng Shujie, directeur du département in- South China Morning Post et analyste des
ternational de l’information.
médias chinois, juge elle aussi défaillante
C’est pour des raisons identiques que le la formation des journalistes chinois : « Les
China Daily, propriété du bureau de l’infor- professeurs enseignent le journalisme avec
mation du Conseil d’Etat,
un manuel et apprennent
s’est refait une beauté le
aux étudiants à être res1er mars, avec une nouvelle « La petite
ponsables de la stabilité
maquette bleue présentée santé
du pays, un dogme qui
passe avant le respect des
sous le titre « fait en Chine, financière
faits. »
lu par le monde ». Au prodes groupes
Dans ces conditions, les
gramme : plus d’analyses,
plus de reportages à l’étran- de presse
médias chinois parvienger, plus de sujets contro- étrangers
dront-ils à conquérir les
versés, et plus de place
cœurs des étrangers ?
ouvre une
Augustin Sulkowsky, qui
« aux opinions diverses ».
Dans ce tir groupé vers marge d’action édite depuis deux ans des
l’étranger, le Global Times à la Chine. »
articles rédigés en français
(en anglais) a démarré sur
par des journalistes chinois,
les chapeaux de roues. Deux
se montre très critique sur
mois après son lancement,
ce point. « Plus le singe
ses éditeurs décomplexés publiaient deux grimpe haut, plus il montre son derrière. Il
articles sur « l’incident » de Tian an Men, me semble que les Chinois se trompent en
dans lesquels ils affirment que le sujet est pensant qu’ils pourront changer leur image
encore « sensible », ce qu’ils mesurent à la par des moyens techniques, sans modifier
difficulté de décrocher des interviews. Une le contenu. En Occident, on n’écoute plus
audace que Renaud de Spens, spécialiste la voix de son maître. »
des médias chinois, explique par la concur- Avant d’être entendus, les médias chinois
rence avec le China Daily. « Chacun cherche devront donc sans doute se contenter
le sujet le plus vendeur, notamment le Glo- d’être des voix amies supplémentaires dans
bal Times, qui craint de ne pas rentrer dans le bruit du monde. « Il ne s’agit ni d’imposer nos idées ni de rivaliser avec CNN en
les clous financièrement. »
Michaël Anti, journaliste chinois et ancien contrôlant le flot de l’information », affirme
collaborateur du New York Times, se verrait à cet égard Peng Shujie. Trouveront-elles
bien écrire dans ce journal. « Le Global Times un écho dans l’avenir ? Nicholas Bequelin,
a suscité une ambiance de compétition chercheur à Human Rights Watch, se monparmi les journalistes qui veulent faire car- tre sceptique: « Le pouvoir d’influence ne
rière. C’est un moyen de se faire un nom. » peut venir que de médias libres (...) et qui
Même si la liberté a ses limites… « Les jour- informent, plutôt qu’ils n’induisent en ernalistes ont généralement carte blanche, reur. » A défaut de jouer totalement en sa
sauf quand le Parti a besoin d’eux. C’est faveur, le « go global » des médias chinois
comme si on mobilisait un bataillon pour ne serait-il pas à double tranchant ? Quesun seul combat ».
tion soulevée par Renaud de Spens : « Plus
Un accueil réservé
ces médias seront ouverts, plus le gouverQue dire enfin de l’influence de ces mé- nement aura une bonne image, mais cette
dias ? Sur ce point, Peng Shujie (Xinhua) ouverture ne finira-t-elle pas par se retourcompte au moins trois obstacles : « la ner contre lui?».
rédaction dans une langue étrangère, le
Hélène Duvigneau
manque d’originalité des dépêches qui
•
Connexions / mars 2010 119
DOSSIER
专栏
Jeux de miroirs
L’aventure des numéros spéciaux du Point sur la Chine en dit long sur les différences de
conception du rôle des médias dans les deux pays.
Caroline Puel, correspondante du Point en
Chine.
Le dernier numéro spécial consacré à la Chine,
(décembre 2009), a battu des records de
vente et touche en moyenne trois millions
de lecteurs en France et à l’étranger ainsi
que sur Internet. Retour sur l’évolution des
numéros spéciaux et sur les images réciproques qu’ils suscitent
Connexions : Pouvez-vous revenir sur l’histoire des
numéros spéciaux du Point sur la Chine ?
Caroline Puel : Le premier est sorti en décembre 1996. On l’avait intitulé « 1997, l’année
de la Chine ». Il
était axé principalement sur la rétrocession de HongKong et les grands
mouvements de
la société chinoise
ainsi que sur le début de l’envolée
culturelle, thème
auquel je tenais
particulièrement.
L’enjeu était de
montrer au public français qu’on
sortait de « l’après
Tian an men », qu’il
y avait des grandes
réformes économiques en cours, ce dont
les correspondants étrangers avaient
beaucoup de mal à convaincre le public
occidental. On avait envisagé un numéro
de ce type tous les cinq ans. Le suivant est
sorti en décembre 2001, axé sur l’entrée
de la Chine dans la mondialisation sous
deux angles : les Chinois deviennent citoyens du monde (ils venaient d‘obtenir
120 Connexions / mars 2010
l’organisation des JO, de l’Expo universelle
de Shanghai, de la coupe du monde de
football et l’entrée dans l’OMC) ; et le rôle
de la diaspora dans le financement de la
croissance. L’intitulé en était « Cet empire
qui fascine ».
Le numéro suivant arrive dès 2005. C’est
un numéro allégé, essentiellement consacré aux questions économiques. On entre
alors dans la période où l’Occident commence à s’inquiéter de la Chine. Le rythme
s’accélère : le numéro de décembre 2007
est axé sur l’émergence chinoise et ses
points noirs.
Le numéro de 2009 arrive à l’issue de deux
années-clés, dont on verra dans quelques
années à quel point
elles auront été fondamentales avec la
crise économique et
la manière dont Pékin
l’a gérée, accélérant
la reconnaissance du
rôle international de
la Chine. Je souhaitais l’appeler « L’autre
grande puissance »
car la Chine est encore, par beaucoup
d’aspects, un pays
émergent, mais à Paris,
ils ont retenu le titre de
« Comment la Chine
devient la première
puissance », « Les nouveaux maîtres du
monde », plus accrocheur.
C. : Ce numéro spécial — et c’est la première fois — a
bénéficié d’une seconde vie dans les médias chinois.
Il a provoqué plusieurs vagues de réactions. Pouvezvous nous en parler ?
C .P. : On a relevé en Chine une soixantaine
d’entrées — articles papier ou internet et
TV. La première vague de réaction a été
très rapide. Deux jours après la publication du numéro, elle venait de China
news, une agence de presse gouvernementale. La dépêche, reprise par de
nombreux grands quotidiens chinois,
était très factuelle et positive. Elle notait
que, pour la première fois un grand média occidental réalisait un numéro sur la
Chine qui leur paraissait objectif. Même
si ce numéro était critique sous différents aspects, il leur a paru correspondre
à l’idée qu’ils se faisaient d’eux-mêmes.
La deuxième vague, plus critique, a été
lancée encore une fois par China news.
« Le Point, a changé de point de vue sur
la Chine ! » affirmait la dépêche et la plupart des articles qui ont repris ce thème.
Selon eux, le magazine aurait prôné
la chaise vide aux JO. Or à ma connaissance, et après vérification, cela n’a pas
été le cas. J’ai retrouvé trace de l’origine
de cette critique : le correspondant du
Wenhuibao, grand journal de Shanghai,
a écrit une charge, basée sur une brève
signée par un remplaçant en juillet 2008
qui se demandait si Sarkozy irait à Pékin
sachant que Merkel et Gordon Brown n’y
allaient pas. Le Wenhuibao y voyait une
manipulation des hommes politiques
par la presse occidentale. Une quinzaine d’articles ont repris ce deuxième
commentaire critique sans vérifier l’information. Puis, à partir du 6 janvier, une
troisième vague est lancée par Global
Times estimant que ce « Spécial Chine »
augurait d’un revirement diplomatique
de la France, la presse française préparant l’opinion pour un rapprochement
franco-chinois. Cela montre l’ampleur
de l’incompréhension sur la manière
dont fonctionne la presse occidentale.
Cette analyse a coïncidé avec le durcissement des relations sino-américaines.
Le soft-power de la Chine 中国的软实力
La quatrième vague a fait suite à la conférence du 2 février, organisée sous l’égide
de la CCIFC. Une vingtaine de journalistes
chinois y ont assisté. J’ai été interrogée sur
les deux titres : « Comment la Chine devient le nouveau numéro 1 mondial » et
surtout pourquoi parler des « Nouveaux
maîtres du monde ». L’exemple du Shaanxi
et du remplacement du chef de village
corrompu par les élections a été repris par
la presse, notamment le Shanghai zhibao.
Enfin, un journaliste chinois m’a demandé
quelle avait été l’évolution de la perception de la Chine par les Français. Les articles n’ont repris que très partiellement
ma réponse. Je distinguais la période des
années 80 — avec les interrogations sur
la manière dont la Chine pouvait sortir
du communisme — la grande rupture
de Tiananmen, avec la condamnation de
la dictature 89-92 ; 93-97 l’ébullition de
la société et l’envers du décor; 98 -2002 :
l’entrée de la Chine dans la mondialisation
et la fascination pour cet Empire millénaire
et Zhu Rongji, qui savait très bien parler
aux médias occidentaux ; 2003-2005 : la
crise du SRAS et le début de la peur de
la mondialisation ; et, à partir de 2005, ce
mélange de fascination et de peur face
aux crises sanitaires, aux délocalisations
— qui prévaut encore aujourd’hui. Les
médias chinois n’ont parlé ni de la dictature ni des droits de l’homme, ni du SRAS.
Par contre, ils ont gardé la question des
délocalisations.
C’est là où le bât blesse. Les autorités
chinoises veulent être mieux comprises du
monde extérieur, mais gomment auprès
de leur propre public les critiques qui leur
sont adressées de l’étranger. Le soft power
est à double face : l’image qu’un pays veut
donner de lui mais aussi la perception du
reflet de cette image. En refusant de publier
les critiques internationales, ils empêchent
les Chinois de prendre conscience de ces
différences de perception et limitent leur
capacité d’analyse, ce qui conduit à une
forme de naïveté. Le malentendu autour
de la flamme olympique en est la triste
illustration. Or, aujourd’hui, la renaissance
chinoise est plus rapide que nul ne l’avait
imaginée. Comment l’Europe va-t-elle
réagir ? Est-ce que sa rondeur va jouer ?
Est-ce que le sentiment de peur va l’emporter ? Les stratèges, Clausewitz comme
Sunzi, ont écrit que c’est d’un défaut de
compréhension de l’autre que naissent les
grands conflits. On en est là aujourd’hui.
Les Chinois ont une image faussée de
l’Occident et les Occidentaux aussi. Il est
impératif que nous montrions de part et
d’autre la réalité telle qu’elle est et non telle
que nous aimerions qu’elle soit, des images justes.
Propos recueillis par Anne Garrigue
•
Connexions / mars 2010 121
姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES
Canton fait peau neuve
Forte de ses 12 millions d’habitants et d’un PIB qui a dépassé les 90
milliards d’euros en 2009, affichant au passage une croissance de 11%,
Canton se prépare à accueillir, en novembre 2010, la 16e édition
des Jeux asiatiques. Bénéficiant du soutien politique et financier de
Pékin, la capitale du Guangdong est devenue le nouveau centre
économique de Chine méridionale.
Par Alain Berder, chef du Service économique régional
Canton est devenue en 30 ans le
principal pôle économique de Chine
méridionale.
La croissance du PIB de Canton a atteint
11 % en 2009.
En 2008, le PIB de Canton avait atteint
821,6 Mds Rmb (+12,3%) et le PIB par
habitant était resté l’un des plus élevés de
Chine à 81 233 Rmb (8 100 euros). La
croissance avait reposé sur l’investissement
qui avait progressé de 12,9% à 210,5 Mds
Rmb et sur la consommation qui, avec un
montant de 314 Mds Rmb, enregistrait
une progression de 21%. Le secteur privé
avait représenté 34% du PIB, soit 282,9
Mds Rmb dont 154,3 Mds Rmb pour
l’industrie (+17,3%). En 2009, la croissance a légèrement ralenti à 11% tout en
restant supérieure à l’objectif fixé en début
d’année (+ 10%) avec un PIB qui selon les
premières estimations a pour la première
fois franchi la barre des 90 Mds d’euros.
Comparée à d’autres villes du delta de la
rivière des Perles, Canton a mieux résisté à
la crise en raison de la structure de son PIB
qui est dominé par les services (59,2%) et les
122
Connexions / mars 2010
Pékin
Shanghai
Canton
Hong-Kong
Canton en chiffres
Superficie : 7434.4 km2
Population : 12 millions d’habitants
PIB : 821,6 Mds de Rmb (2008)
PIB annuel par habitant : 81 233 Rmb
(2008)
industries à forte valeur ajoutée (38,94%).
La part des services est nettement supérieure à celle observée au niveau national
(41%). La croissance a été principalement
soutenue par l’investissement dans les infrastructures qui représentent un montant
de 350 Mds Rmb (35 Mds €) répartis sur
2009 et 2010.
Canton compte 8 millions de résidents
auxquels s’ajoutent 4 millions de travailleurs migrants.
Les effets de la crise ont été amoindris grâce à une diversification réussie des exportations.
En trente ans le commerce extérieur de
Canton est passé de 200 M USD à 82 Mds
USD. En 2008, le montant moyen d’une
journée de commerce extérieur était supérieur à celui de l’année 1978. Depuis
l’accession de la Chine à l’OMC, le commerce extérieur de Canton a progressé de
10 Mds USD par an.
Il est resté très dynamique (+ 10%) en dépassant pour la première fois le seuil des
80 Mds USD en 2008. Les exportations
ont atteint 43 Mds USD (+ 13,4%) et les
importations 39 Mds USD (+ 9,54%).
La montée en gamme de l’appareil productif de Canton se confirme : les biens
d’équipement et les appareils électroniques
ont représenté 52,43% des exportations en
2008, soit 22,52 Mds USD. Les exporta-
© Alain Berder
CANTON 广州
La toute récente tour de la télévision de Canton qui mesure 608m de haut est le nouvel
emblème de la ville. 广州国际会议展览中心(琶洲展馆)
tions de l’industrie automobile (véhicules
et composants) ont progressé de 24,39%
(1,32 Mds USD) et celles de navires de
111% (1,60 Mds USD). Les exportations
de machines-outils et d’équipements ont
atteint 6,43 Mds USD (+ 12,7%).
En 2008, l’Union européenne est devenue le premier partenaire commercial de
Canton avec un volume d’échanges de
14,743 Mds USD (+15,87%). Canton
a réussi à limiter l’impact de la crise en
diversifiant ses exportations. Si l’Union
européenne, les Etats-Unis, Hong Kong
et le Japon restent les principaux débouchés de ses exportations, la part des pays
d’Asie du sud, d’Asie centrale, du Moyen
Orient, d’Amérique du sud, de l’ancienne
Europe de l’Est et d’Afrique atteint 23,2%
(+ 24,59%).
Canton continue d’attirer de nombreux investissements directs étrangers (IDE).
Canton accueille 7 400 sociétés à capitaux
étrangers qui emploient 1,25 million de
personnes. Elles représentent 60% de la
production industrielle, un tiers des recettes fiscales et 60 % des exportations. Le
montant cumulé des IDE reçus par Canton s’élève à 72 Mds USD dont 43 Mds
USD réalisés. Cent soixante-neuf groupes
du TOP500 mondial ont créé 385 sociétés à capitaux étrangers à Canton. Elles
représentent un investissement total de 16
Mds USD dont 6 Mds USD de capitaux
étrangers.
En 2008, Canton a reçu 6 Mds USD
d’IDE (- 15,87%) dont 3,6 Mds USD
effectivement réalisés, soit + 10,3% par
rapport à 2007. La part des services a
atteint 59%. Parmi les investissements
réalisés dans le secteur des services, on
peut citer : Guangdong Golden Rainbow
Animation et Web Game Digital Technology Co Ltd pour un montant de 99,80 M
USD, Guangdong Guanghang Shipping
Co. Ltd (87,19 M USD) ; Guangzhou Anhua Logistics Co. (23 M USD), Sofstone
South China Headquarters, Global Data
Solutions et Bloombase Technologies.
197 projets ont dépassé 10 M USD et représenté un investissement cumulé de 5
Mds USD soit 84% des IDE destinés à
Canton. Il s’agit en particulier de Guangzhou Skyworth Flat Panel Display Co. (99
M USD), de Guangzhou Johnson Automotive Interior Co. Ltd, TESCO (China)
Investment Co., de Guangzhou Hitachi
Koki Co Ltd (60 M USD), de la phase II
de l’usine Toyota (526 M USD) et de 3M
(22,50 M USD), ces trois derniers projets
représentant des extensions d’implantations existantes.
Dans le cadre d’une stratégie dite « Going
Global » la municipalité de Canton encourage les sociétés locales à s’implanter
à l’étranger. En 2008, la municipalité a
approuvé 33 nouveaux projets d’implantation à l’étranger de sociétés cantonaises
pour un montant total d’investissement
de 119 M USD. Les investissements des
sociétés cantonaises concernent 45 pays
et représentent un investissement cumulé
de 1,1 Md USD. Elles sont encouragées à
acquérir des sociétés étrangères détenant
des technologies de pointe, des marques
connues ou des réseaux de distribution.
Canton accueillera en novembre
2010 la 16 e édition des Jeux asiatiques.
Si Canton n’a pas obtenu en 2008 le label
tant recherché de « Ville de Civilisation »
elle poursuit ses efforts pour être prête à
recevoir en novembre 2010 les 54 délégations étrangères qui participeront à la
16 e édition des Jeux asiatiques. A cette
fin, le gouvernement municipal consacre un effort financier important à
•••
Connexions / mars 2010 123
姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES
l ’a m é l i o r a t i o n d e s
•••
tructures de tra nsports
i n f r a s - Il comprend de nouveaux projets de traitee t à l a ment des eaux usées domestiques, de noup r o t e c t i o n d e l ’e n v i r o n n e m e n t . velles stations de traitement des eaux de la
Le renforcement des infrastructures rivière des Perles, des projets visant à séparer la collecte des eaux de pluie et des eaux
de transports.
usées, l’amélioration du
Il s’agit en particulier de la
système d’évacuation des
seconde phase de l’aéroport
« En préparation
eaux de pluie (mousson,
international de Baiyun, de
typhons,…) et le renla phase III des travaux de des Jeux
forcement des contrôles
drainage de la rivière des Asiatiques de
des rejets d’eaux usées.
Perles, de la gare TGV sur 2010, Canton a
Les industries agroale district de Panyu qui a été reçu le soutien
limentaires et du BTP
inaugurée au mois de jan- financier de Pékin
devront contribuer à une
vier 2010, de la ligne TGV pour se doter
amélioration significative
Wuhan-Canton également
d’infrastructures
de la pollution atmosphéinaugurée début janvier. Au
qui en feront
rique. 85 % des bus et
total 34 projets qui renfor100 % des taxis utilisent
ceront les infrastructures de l’un des centres
le GPL comme carbutransports sans oublier la régionaux de
rant.
première phase du Bus Ra- l’économie
La proportion des jours
pid Transit (30 km) qui est asiatique. »
ayant atteint les stanentrée en service dans le centre-ville au mois de février 2010. De 2008 dards de qualité de l’air a atteint 94,3%.
à 2011, Canton consacrera 463 M Rmb de Le nombre de jours de brume a été réduit
subventions aux transports en commun et de 16% passant de 131 en 2007 à 110 en
1,8 Md Rmb aux compagnies de bus et de 2008. Treize centrales thermiques de faimétro pour rendre accessible au plus grand ble capacité, 66 petites cimenteries et 140
entreprises polluantes ont été fermées en
nombre ces modes de transport urbain.
L’amélioration de la qualité de l’air 2008.
Canton est devenue l’un des princiet de l’eau.
Canton accorde une priorité croissante à la paux pôles de l’industrie automobile
protection de l’environnement et à l’amé- chinoise.
lioration du cadre de vie. Son parc auto- Ce secteur a représenté 15,9% de la promobile compte dorénavant plus de deux duction industrielle de Canton en 2008.
millions de véhicules et croît au rythme Depuis 2000, le volume de la production
700 immatriculations par jour. L’effort automobile a été multiplié par 23 passant
sera porté sur l’achèvement de la ligne 4 de 38 100 à 881 600 véhicules en 2008
du métro, la ligne étant entrée en service soit 9,43% de la production chinoise
fin 2009, et sur la construction des lignes (9,345 millions). Avec 400 équipementiers et constructeurs automobiles (Nissan,
6 (phase II), 7 et 9.
La seconde phase du programme Green Honda, Toyota, Hino, GAC,…), Canton
landscape, Blue sky and Blue water a été est devenue en moins de 10 ans l’un des
mise en œuvre. Les espaces verts repré- principaux pôles de l’industrie automobile
sentent 44,4% du territoire municipal et chinoise. Les IDE réalisés dans ce secteur
les forêts 38,2%. Un important effort de atteignent 1,836 Md USD pour un invesreboisement a été réalisé dans les zones tissement total de 7,259 Mds USD. La vareculées de la banlieue de Canton. Plu- leur des exportations est passée de 37 M
sieurs manifestations de la population de USD en 2001 à 1,32 Md USD en 2008
Canton contre des projets d’incinérateurs soit 58 900 véhicules (10% des exportasitués en centre-ville ont conduit les auto- tions chinoises).
rités à suspendre ces projets dans l’attente Guangzhou Dongfeng Nissan a annoncé
des conclusions d’audits environnemen- le 30 juillet 2009 un investissement de 5
Md Rmb pour augmenter la capacité de
taux.
Un plan spécifique a été adopté en vue de production de son usine de Huadu (Canl’organisation des Jeux Asiatiques de 2010. ton). Elle permettra de créer 3 000 emplois
124
Connexions / mars 2010
qualifiés et aura une capacité de 240 000
véhicules ce qui portera la capacité totale
du site de Huadu à 600 000 véhicules en
2012. Le groupe qui est devenu le premier
constructeur automobile de Chine du Sud
en 2008 avec une production de 350 000
véhicules a déjà produit 225 073 automobiles au premier semestre 2009, soit une
hausse de 41,3% par rapport au premier
semestre 2008.
FIAT et Guangzhou Automobile Group
Co. (GAC) ont signé le 6 juillet 2009 à
Rome un accord sur la création d’une
société à capitaux mixtes détenue à parts
égales par les deux constructeurs. Elle
conduira à un investissement de 400
millions d’euros dans une nouvelle usine
automobile à Changsha (Hunan) qui produira 140 000 véhicules et 220 000 moteurs en 2011. Ce projet devrait permettre
à GAC d’atteindre l’objectif de 1,3 million
de véhicules et 200 Mds Rmb de chiffre
d’affaires en 2010.
Volkswagen et FAW Group Corp. ont,
de leur côté, annoncé en février 2010 leur
intention de construire à Canton une
nouvelle unité de production automobile
d’une capacité de 300 000 véhicules. Ce
projet qui n’a pas encore été approuvé par
les autorités centrales doit permettre à la
marque allemande et à son partenaire
chinois de se positionner sur le marché
très convoité de la Chine du Sud.
Des pôles de compétitivité seront
développés dans d’autres secteurs
industriels.
La capitale du Guangdong s’est ainsi dotée en 2008 d’un nouveau chantier naval
sur l’île de Longxue à Nansha. Les exportations de navires ont représenté 1,6 Md
USD en 2008. Les industries de la pétrochimie, de la sidérurgie, de l’électronique,
pharmaceutique et mécaniques y sont très
bien développées grâce aux nombreux partenariats sino-étrangers.
Canton souhaite également se doter d’un
pôle de compétitivité Digital Home dans
le domaine des technologies de l’information en accordant une priorité au développement de six secteurs d’activité : les
composants électroniques, les services
d’outsourcing, les machines à commandes numériques, les équipements pour la
maison numérique, les écrans plats pour
la télévision numérique, les nouveaux ma-
CANTON 广州
•••
La « Californie chinoise »
La province du Guangdong et sa capitale sont engagées depuis 2007 dans
une profonde mutation pour s’affirmer
à l’horizon 2020 en tant qu’économie
moderne, tournée vers les services et les
nouvelles et hautes technologies, en symbiose avec les économies hongkongaises
et macanaises (les 1er investisseurs de la
province), intégrée au vaste marché de
libre échange avec les 10 pays de l’Asean,
en phase d’accélération dans ses échanges
avec Taiwan (2 e investisseur de la province).
Canton est historiquement la première
ville à avoir été en contact avec le monde
extérieur, dés le VIIe siècle avec l’arrivée
des marchands arabes et persans, à partir
du XVIe siècle avec celle des Portugais.
C’est la capitale administrative de la
province la plus développée de Chine.
Pour les dirigeants chinois, c’est surtout
la « première économie provinciale » 第
一经济大省. Elle assure à elle seule 30%
des échanges extérieurs de la Chine, 1/7e
des recettes fiscales du pays, etc. Si la
province du Guangdong était un pays,
son économie serait classée au 23e rang
mondial ou au 14e en parité de pouvoir
d’achat. Deuxième « petit dragon »
d’Asie (son PIB excède 400 mds USD),
le Guangdong est en quelque sorte la
« Californie chinoise ». C’est aussi LA
région pionnière 排头兵 en matière de
réformes, en 1989 et en 1992 sous l’impulsion de Deng Xiaoping, actuellement
sous celle du président Hu Jintao et du
secrétaire du Parti de la province, Wang
Yang, ardent défenseur de la globalisation et de l’économie de marché de type
libéral.
Ce sont les raisons pour lesquelles Canton accueille une communauté française
sans cesse grandissante (+ 17% en 2009)
même si celle-ci demeure très en-deçà de
ce qu’elle devrait être en nombre, compte
tenu de l’énorme potentiel et des atouts
de cette région (proximité avec Hong
Kong notamment). Actuellement plus de
2 200 de nos compatriotes sont inscrits au
registre des Français au Consulat général
de France à Canton, ils se répartissent à
égalité entre Canton et Shenzhen.
Quelque 400 entreprises françaises,
dont un nombre important de PME,
exercent leurs activités dans la circonscription. Une nouvelle école qui a
l’ambition de devenir un véritable lycée
international français ouvrira ses portes
à Canton à la rentrée 2010-2011 pour accueillir les enfants des familles françaises
et francophones. Une structure analogue
est en train de se mettre en place à Shenzhen, du fait de l’arrivée massive de familles employées par les groupes Areva
et EDF notamment. Car la France a en
effet des intérêts stratégiques majeurs à
Canton et dans sa circonscription.
J e a n -R a p h a ë l P e y t r e g n e t
Consu l Génér a l
Vue du nouveau centre d’exposition international de Canton (Pazhou).
de
Fr a nce
à
C a nton
© Imagine China
tériaux (plasturgie,…).
A partir de 2009, chacun des 12 districts
municipaux recevra une allocation de 60
millions de Rmb afin de promouvoir le
développement scientifique et technologique dans sa circonscription.
Par ailleurs, les autorités de Canton soutiennent la transformation de l’industrie
locale du « processing trade » dont les
entrepreneurs sont invités à passer d’une
activité d’OEM (Original Equipment
Manufacturing) à une activité d’ODM
(Original Design Manufacturing) voire,
dans le meilleur des cas, d’OBM (Original
Brand Manufacturing). Ces entreprises
sont ainsi encouragées à développer leurs
propres capacités de R&D et à enregistrer leurs marques et brevets en Chine et
à l’étranger.
Les autorités de Canton accordent
dorénavant la priorité au développement des services.
Canton souhaite devenir un centre de
services et promeut à cette fin la marque
« Guangzhou Service » en particulier dans
le domaine de l’outsourcing. En 2008, les
services ont représenté 59% du PIB soit
484,9 Mds Rmb (+13,6%) et contribué à
hauteur de 64,6% à la croissance.
Les 75 principales entreprises de services
d’outsourcing implantées à Canton ont
signé en 2008 pour 443 millions USD
de contrats. La valeur des exportations de
logiciels a atteint 146 M USD soit un des
niveaux les plus élevés parmi les principales villes chinoises. Le développement des
services d’outsourcing bénéficie également
d’une initiative originale associant Hong
Kong (Guangzhou Hong Kong Services
Outsourcing Union) qui vise notamment
à créer des relais en Europe, au Japon, aux
Etats-Unis et à Hong Kong pour soutenir
l’activité d’outsourcing.
Canton ambitionne de devenir un centre
régional (hub) de services à partir de quatre plateformes : le centre des expositions
de Pazhou (expositions, foires et conférences), le quartier d’affaires de Tianhe
(services financiers, outsourcing, sièges
régionaux,…), le quartier de Baietan
(restauration, loisirs et divertissements)
et le district de Baiyun (services aéroportuaires, parcs logistiques, entrepôts
sous douane,…). Les sociétés de services ont ainsi vocation à remplacer
广州国际会议展览中心(琶洲展馆)
Connexions / mars 2010 125
姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES
les entreprises industrielles du cen•••
tre urbain qui devront se relocaliser dans
les régions reculées des districts municipaux ou du Guangdong.
Le trafic du port de Canton est resté stable
(+1%) avec un volume de fret de 347 millions de tonnes faisant de Canton le quatrième port de Chine en volume. L’achèvement de la seconde phase du port en eau
profonde de Canton, situé sur le nouveau
district de Nansha, a permis un trafic de
conteneurs de 11 millions d’EVP en 2008,
Canton devenant un des 10 plus importants ports à conteneurs au monde.
Les autorités chinoises souhaitent faire
de Canton un « hub » international de
services logistiques en s’appuyant notamment sur le nouveau siège Asie-pacifique
de FEDEX inauguré début 2009, le port
en eau profonde de Nansha, le port fluvial
en eau profonde de Huangpu et les zones
sous douane de Baiyun (aéroport) et de
Nansha (port maritime). La gare TGV située à 45 mn du centre ville sur le district
de Panyu permettra de relier Shenzhen en
40 mn en 2010 et la plupart des grandes
villes chinoises au-delà de cette échéance.
L’inauguration en 2009 de la troisième
phase du parc des expositions de Pazhou
qui accueille notamment les deux éditions
annuelles de la foire de Canton, a fait de
ce centre le plus grand centre d’expositions
couvert au monde.
Enfin, les revenus du tourisme ont représenté 80 Mds de Rmb en 2008. Depuis
janvier 2005, six hôtels cinq étoiles ont
ouvert leurs portes à Canton (Westin,
Grand Hyatt, Ritz-Carlton, ShangriLa, Mandarin Oriental, Pullman). Une
dizaine d’autres sont en construction
et devraient être inaugurés d’ici la fin
2010 (Four Seasons, Sheraton, W, Sofitel, Jumeirah, Intercontinental,…). Une
quinzaine d’hôtels 5 étoiles aura ainsi été
construite en cinq ans à Canton. La Nouvelle Cité de la Rivière des Perles où se
concentre la plupart de ces hôtels sera la
nouvelle vitrine de Canton et sa Tour de
Télévision de 608 m le symbole international de la ville au même titre que la Tour
Eiffel pour Paris.
•
126
Connexions / mars 2010
L’équipe de la CCIFC Sud Chine. De g. à dr. : Victor Chen, Thierry Tang, Léa Feng, Christine Dai,
Yang, Marie Robert-Drissi, et Frédérique Consigny. 中国法国工商会华南区办公人员,从左至右:陈庆安、
谢梓盈、杨帆、Marie Robert-Drissi、 Frédérique Consigny。
CCIFC : De plus en plus d’entreprises françaises
Ouver t en 2001, le bureau de la CCIFC
Canton rassemble aujourd’hui près de
240 entreprises françaises, un chif fre
d o n t l a c r o i s s a n ce n e s ’e s t j a m a i s
démentie et qui a été multiplié par
deux depuis 2006. L’ac tuel direc teur
Her vé L amb elin pré cise que la pro vince du Guangdong a enregistré en
2008 une progression de 15% de ses
échanges avec la France — lesquels
représentent 1/5 e du commerce entre
la France et la Chine.
A la tête des deux bureaux CCIFC Sud
Chine, Canton et Shenzhen (ouver t
en décembre 2008), Her vé Lambelin
qui a auparavant travaillé pour plusieurs grandes compagnies aériennes
europ éennes, souligne la t ypologie
par ticulière des entreprises membres
dans le Guangdong : « A la dif férence
de Pékin et Shanghai où se concentrent les sièges sociaux des entreprises françaises, à Canton, les implantations sont en majorité industrielles et
nous comptons environ 80% de PME
parmi nos membres. L’esprit d’entreprise bat son plein. Tous les sec teurs
d’ac tivité sont bien représentés . L a
haute technologie est marquée par la
présence historique d’EDF et d’Areva
à Daya Bay (b erceau de la co op éra tion nucléaire franco -chinoise), mais
sont é galement présent s la gr ande
distribution, plusieurs cabinets
d’avocats français, le tourisme et les
loisirs, les ser vices de cer tif ication,
les produits et ser vices pour la santé
et la protec tion de l’environnement,
les transpor ts urbains, la logistique,
les ser vices d’audit et de conseil, les
ser vices informatiques et d’outsourcing et les ser vices financiers. »
Avec son équipe mixte franco-chinoise de huit collaborateurs permanents,
H er vé L amb elin p ro p os e un e larg e
gamme de ser vices aux entreprises :
conférences, séminaires, networking,
bureaux de domiciliation, aide au recrutement, formations… auxquels se
sont récemment ajoutés des groupes
de travail RH et grande distribution
qui permettent aux professionnels du
secteur d’échanger leurs expériences
et leurs exper tises. Fait nouveau également, depuis juin 2009, la collabo ration avec la Chambre de commerce
CANTON 广州
FFG Bags Ltd. veut
grandir sur des bases
saines
Les stocks de tissus de FFG Bags FFG Bags公司的布
© CCIFC
料库存
Hervé Lambelin,Charlène Wu, Claire Xie, Fan
Thierry Tang、冯蕾、 戴俊婷、Hervé Lambelin、吴楚园、
all e ma n d e s ’e s t co nsi d é r a b l e m e nt
renforcée. Her vé Lambelin explique :
« Nous avons mis au point des of fres
co mmun es , n o us t r av aill o ns b eau coup en anglais ce qui nous permet
de rassembler au niveau européen et
de rép ondre à la demande des en treprises, notamment en matière de
formation.»
Mais ce qui, sans doute plus que
to u t , f a i t l a n o to r i é té d e l a CC I F C
Canton, ce sont ses deux événe ment s majeur s : le 14 juillet « Côté
plage » et, en novembre, sa soirée de
prestige « Côté Jardin » qui fédérent
au-delà des communautés d’af faires
f r an co - chin o is es . « Les entrep r is es
étr an g ères s o nt très ép ar p illé es et
relativement isolées, elles sont très
demandeuses d’événements, ce qui
explique le succès que rencontrent
nos events » souligne Her vé Lambelin. En 2010 pour la première fois, la
CCIFC Canton organisera la remise du
prix PME, un signe de l’imp or tance
stratégique croissante de la capitale
du Delta de la rivière des Perles.
•
S o p h i e L av e r g n e
« Toute la Chine se retrouve à Canton.
Sur les marchés de gros, les négociants
locaux sont minoritaires », assure Nicolas Libaude, le directeur de FFG Bags
Ltd. La toute jeune structure (un an et
trois mois) compte déjà 70 employés qui
produisent 10 000 pièces par mois : des
sacs de montagne, de sports nautiques et
autres activités de plein air. « Ce n’est pas
la quantité qui est privilégiée, c’est la qualité », précise-t-il.
Si l’entreprise exporte pour l’instant essentiellement en Europe, l’objectif pourrait être un jour la pénétration du marché
chinois. « La contrefaçon ne me fait pas
peur. Car les Chinois qui se tournent vers
ces activités sportives commencent à avoir
assez d’argent pour bien s’équiper. »
Avec la densité du réseau de production du
Guangdong, l’approvisionnement est aisé.
FFG Bags Ltd. compte entre « 60 et 70
fournisseurs ». Pour autant, afin d’éviter
les mauvais produits, l’entreprise négocie
surtout avec de grosses usines, en particulier taïwanaises. Forte de ces exigences,
la vente des produits made in China ne
suscite ni réserve ni suspicion de la part
des clients européens. D’autant que pour
eux, « c’est rassurant d’avoir un interlocuteur français. »
Et si Nicolas Libaude approvisionne des
clients qui commandent de petites quantités (500 pièces par exemple), c’est volontairement à contre-courant des pratiques
chinoises. « Quelle que soit la gamme de
produits, ici les usines produisent pour de
gros clients, car elles pensent qu’il n’y a pas
d’argent à se faire avec des clients comme
les miens. » Or le jeune directeur sait, lui,
qu’il y a « une multitude de ‘’petits clients’’
qui ne savent pas à qui commander... »
« Mes clients sont des petites marques avec
des petites quantités qui ne trouvent pas
d’usine capable de répondre à leurs attentes. On trouve soit l’usine taïwanaise de
2 000 personnes, capable de produire de
la très bonne qualité pour Samsonite ou
Nike, soit des usines chinoises plus basiques, qui font des sacs rentrée des classes
par exemple, et qui, elles aussi, privilégient
la quantité, car leurs clients veulent un
prix le plus bas possible. »
Avec un chiffre d’affaires « de 800 000 €
lors du premier exercice et qui pourrait
passer à 1,2 million en 2010 », les résultats
sont conformes aux prévisions établies par
Nicolas Libaude. Et si, à l’occasion de la
fête de printemps, FFG Bags Ltd. a perdu
des employés, revenus dans leurs familles,
l’heure n’est pas à l’inquiétude. « Je sais
qu’ils reviendront après les fêtes », promet-il. Soucieux de leur offrir de bonnes
conditions de travail, il a engagé un processus de certification BSCI (Initiative
Conformité Sociale des Affaires), qui
devrait favoriser la saine croissance de sa
toute jeune entreprise.
Sogal propulsé par le
marché chinois
En s’implantant à Zengcheng, au nordest de Canton, en 2004, le leader français
de placards coulissants et des meubles de
rangement sur mesure Sogal a fait le beau
pari de se lancer le premier sur ce marché
embryonnaire. « Les premières années ont
été très difficiles », admet Yu Xiaomin, le
directeur général de Sogal Guangzhou
Industry & Design Co., Ltd. Mais désormais, les commandes explosent. À tel
point que, malgré l’arrivée de concurrents,
désormais, « personne n’arrive à satisfaire
la demande. Le marché des placards sur
mesure, c’est un tout nouveau marché, le
“blue sea“. »
En installant son usine à Canton, Sogal a fait le bon choix stratégique. Car
« on y trouve de nombreux fournisseurs
de meubles contemporains et
•••
Connexions / mars 2010 127
姊妹省份 RÉGIONS JUMELLES
Un petit bout
d’Alsace naît au cœur
de Canton
Des meubles sur mesure. 定制家具
de quincailleries, et que l’on est pro•••
che de Hong Kong ». Son développement
s’appuie sur le réseau de distribution de
son partenaire chinois Ningji. Grâce à lui,
l’entreprise compte déjà plus de 500 points
de vente en Chine en 2009.
Ce dynamisme trouve aussi son origine
dans les caractéristiques du tissu économique de la région : « Canton s’ouvre au
commerce mondial depuis 30 ans. Les habitants sont pragmatiques, et les ouvriers
très travailleurs », analyse Yu Xioamin.
Pour autant, le jeune directeur reconnaît
rencontrer parfois quelques difficultés
avec les douanes, mais « il y en a relativement moins qu’ailleurs, notamment
qu’à Shenzhen. » D’ailleurs, « à Canton le
gouvernement intervient moins que dans
d’autres régions de Chine, ce qui facilite
le commerce. Il y a un meilleur respect
des règles... »
Ce natif de Canton nuance pourtant ce
tableau flatteur : « les fournisseurs ont toujours du mal à livrer dans les délais convenus ». Rien de rédhibitoire pourtant : il
suffit de multiplier les partenariats. Mais
« si on ne veut pas avoir de mauvaises surprises, il ne faut pas acheter les produits les
moins chers », prévient Yu Xiaomin, qui
sait que la différence du coût de production final est largement compensée par le
prestige de la french touch de Sogal.
Un diagnostic que les chiffres ne démentent pas : avec un chiffre d’affaires passé de
500 000 € en 2005 à 7 millions d’euros en
2009, le pôle Chine a fait « plus que compenser la baisse des commandes françaises » provoquée par la crise économique. À
tel point que le fabricant de placards affiche
dors et déjà ses ambitions : « Doubler notre
chiffre d’affaires à l’horizon 2014, et renforcer l’exportation vers les États Unis et
le reste de l’Asie. »
128
Connexions / mars 2010
Cuisine et décor alsaciens pour dépayser les
clients. 阿尔萨斯的特色菜肴与装修风格让顾客感受不
同的就餐氛围
« J’ai toujours baigné dans la Chine », raconte Christophe Bilde. Pendant sa jeunesse dans les années 80, c’est d’ailleurs
plutôt la Chine qui vient à lui. Jusque
dans sa maison à Strasbourg. Son père,
Jacques, propriétaire d’une chaîne de magasins, importe massivement des produits
ménagers et des décorations de Noël. Ses
partenaires chinois, devenus peu à peu
des amis, viennent alors régulièrement
leur rendre visite en Alsace.
Ce n’est pourtant qu’en 2005, à l’occasion de la foire internationale de Canton,
que Christophe met réellement les pieds
en Chine. « Pour moi, ce fut un coup de
foudre pour le pays et ses habitants. J’ai
immédiatement compris que j’allais venir
vivre ici », raconte-t-il. L’année suivante, il
s’installe à Canton et travaille pour China
New Product Factory, spécialisée dans les
solutions d’export et de sourcing, dont il
prend rapidement la tête.
Parallèlement, il cultive son amour pour
la Chine, et en particulier pour la cuisine
chinoise. Pourtant, il lui manque quelque
chose. « C’est vrai qu’après quelques années passées ici, on se sent loin de notre
culture. L’idée d’ouvrir un restaurant
français a alors commencé à germer ».
Le projet reste alors en attente... jusqu’à
la crise financière de 2008 qui, « au vu
des perspectives de développement en
Chine par rapport à l’Europe durement
touchée », accélère alors la décision de se
lancer.
Pour populariser leur gastronomie, les
Alsaciens doivent la rendre accessible aux
bourses chinoises. « Les prix commencent
à 28 Rmb. » Tartes flambées, choucroutes
ou spatzele, la carte propose aussi des plats
« que mangent vraiment les Français au
quotidien. » Et, plus encore que la cuisine,
c’est le dépaysement que Alsace Village
veut offrir. La décoration typique de sa région d’origine sert de cadre à un mini-musée : « 500 objets anciens, accompagnés de
plaques explicatives traduites en chinois,
racontent notre histoire. Des télévisions
diffusent des vidéos sur notre patrimoine
régional. » Pour donner un peu de liant
à l’ensemble, les serveuses ont reçu une
formation spécifique. « Je les considère
comme des hôtesses, elles se sentent valorisées. » À tel point que certaines veulent
désormais apprendre le français.
Alsace village compte déjà quelques habitués parmi les clients cantonnais. « Si
nous voulions les faire venir, il fallait
nous adapter à leurs habitudes : manger
rapidement, leur donner la possibilité de
commander des plats collectifs ou de rapporter de la nourriture à la maison. »
Christophe est optimiste. Depuis l’ouverture du restaurant le 28 janvier, lui et
son jeune frère Rudy, associé à l’activité,
constatent des « débuts très prometteurs ».
Un bon signe, d’autant que le développement rapide de Canton ouvre des perspectives favorables. « Dans le cadre des
Jeux Asiatiques organisés dans la ville
cette année, le gouvernement a massivement investi dans les infrastructures et les
équipements.» De bon augure pour le développement touristique. Plus largement,
Christophe considère l’enrichissement du
pôle Hong-Kong, Macau, Canton, Shenzhen, comme une opportunité à plus
long terme. « Si le principe du restaurant
fonctionne, nous souhaiterions en ouvrir
d’autres. Peut-être sous la forme d’une
chaîne ou d’une franchise. » L’Alsace à la
conquête de la Chine ? Le pari est séduisant...
Le restaurant-musée de Christophe Bilde. 阿尔萨
斯的特色菜肴与装修风格让顾客感受不同的就餐氛围
CANTON 广州
À Xiaolan, Extruflex
tourne à plein régime
Les bobines de PVC d’Extruflex. 爱托福生产的
PVC材料
Lorsqu’Extruflex a décidé de s’implanter en Chine en 2005, plusieurs zones
de recherche ont été explorées. « Nous
avons opté pour X iolan, parce que
c’était la seule qui nous garantissait une
livraison d’énergie permanente », raconte Yoann Coutherut, le directeur
général. Or, pour cette entreprise spécialisée dans la fabrication de bobines
de PVC pour portes souples, qui avait
l’intention de produire 24h/24 et 7j/7,
une telle fonctionnalité était essentielle.
Ce choix de Xiaolan s’explique aussi par
« la proximité avec nos fournisseurs et avec
le port qui se trouve à moins de dix minutes de l’usine. » Ajoutez à cela le niveau raisonnable des coûts de fonctionnement, et
Xiolan serait presque l’emplacement idéal.
À ceci près qu’il faut encore réussir à faire
venir les collaborateurs dont on a besoin.
Or, « trouver les profils adéquats est très
difficile », déplore-t-il. C’est que, dans cette zone industrieuse, à part travailler, il n’y
a pas beaucoup d’activités pour s’occuper.
Le directeur général regrette par ailleurs
une certaine vision à court terme dans la
manière dont certains partenaires mènent les affaires, bien qu’elle soit « typique de la culture locale ». Ainsi « l’un de
nos fournisseurs a vendu notre produit
à un concurrent. » Un mauvais calcul
qui a provoqué la rupture du contrat.
Malgré ces difficultés structurelles, la production d’Extruflex grimpe régulièrement :
3 500 tonnes en 2007, 4 000 en 2008,
4 500 en 2009 et une prévision établie
à 5 500 pour cette année. Elle progresse même à un rythme tel que 2 000 m²
d’usine supplémentaires vont devoir être
aménagés dans le courant de l’année. C’est
d’autant plus encourageant que la concurrence locale n’est pas réellement compétitive. D’une part parce qu’Extruflex exploite un marché de niche, d’autre part parce
que les standards de qualité chinois sont
nettement inférieurs. Et c’est de bon augure, dans la perspective d’une conquête du
marché chinois dans les années à venir...
L’énergie de Xiaolan
au service des
batteries d’Uniross
Batteries et chargeurs d’Univox.
欧力生产的电池
和充电器
Se trouver « à moins de deux heures de
tous nos fournisseurs. » Tel est le critère
principal qui a présidé, en 2003, à l’installation d’Uniross à Xiaolan, au sud de
Canton. Boris Duhamel, le directeur Asie
de ce grand fabriquant de batteries et de
chargeurs, explique que pour faire fonctionner au mieux l’entreprise tournée « à
95% vers l’exportation, il fallait aussi être
proche d’un grand port commercial. »
En construisant les 6000m² d’ateliers et
de bureaux à Xiaolan, Uniross a bénéficié
d’un autre atout majeur : la grande disponibilité des autorités locales. « Dans
cette petite ville de 300 000 habitants,
nous avons un accès direct à la mairie
et au chef local du parti. » Une familiarité qui s’explique notamment par le fait
que « nous sommes dans le ‘’top10’’ des
investisseurs étrangers de la ville depuis
plusieurs années », ainsi que par une volonté de Xiaolan de « nous aider à être performants ». En particulier sur la partie la
plus austère de l’activité : les démarches
administratives. « Plusieurs personnes de
la ville parlent parfaitement anglais », et
sont naturellement devenues leurs interlocuteurs-clef.
Cette atmosphère de travail « amicale »
s’est aussi déclinée dans l’enceinte même
de l’entreprise, « qui jouit d’une bonne
image auprès les employés ». D’abord,
les activités extra-professionnelles ainsi
que des avantages, comme des aides au
logement, favorisent leur attachement à
l’enseigne. Ensuite, « nous avons mis en
place un double système de formation et
d’évaluation, qui leur permet de gravir les
échelons année après année. »
Ce lien entre Uniross et son staff permet
aussi une flexibilité efficace en terme de
main-d’œuvre : « En fonction de l’activité,
il y a entre 200 et 400 ouvriers ». De bon
augure, puisque le potentiel de développement de l’usine est important : outre la
fabrication de batteries et chargeurs pour
les terminaux de paiements, les vélos électriques, les professionnels de l’électroménager et de tous les produits qui nécessitent des sources d’énergie rechargeables,
Boris Duhamel aimerait « développer le
savoir-faire dans l’assemblage, notamment pour des produits comme les torches électriques. Le potentiel est là, nous
avons une bonne réserve de capacité de
production. »
À l’origine de l’implantation d’Uniross,
tout n’a pourtant pas été tout rose. Le premier « challenge, c’était la communication
avec les douanes. Mais leur système s’est
amélioré avec la mise en place de l’EDI,
l’échange de données informatiques. Ça
nous a permis d’économiser beaucoup de
temps et d’énergie... » Autre point noir qui
a peu à peu disparu : l’isolement. « Lorsque nous nous sommes installés sur le
site, la zone était complètement vierge... »
Signe du grand dynamisme local, on
trouve, à peine sept ans plus tard, « un
shopping mall, un hôtel cinq étoiles, un
cinéma, de plus en plus de restaurants et
d’étrangers ». Une attractivité croissante
qui pourrait compenser bientôt la principale lacune de la zone : la difficulté à recruter « des personnes très qualifiées, qui
préfèraient jusqu’à maintenant s’installer
dans une métropole comme Canton ou
Manuel Rambaud
Shanghai. »
•
Connexions / mars 2010 129
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旅游 TOURISME
里昂歌剧院 L’opéra de Lyon
里昂(LYON)
里昂坐落在西欧的十字路口,是巴黎(Paris)与地中海(la Méditerranée)之间不可错过的
中途旅站,是法国的经济金融中心以及罗讷-阿尔卑斯大区(la région Rhône-Alpes)的
首府。闻名遐 迩的“祈祷山”弗尔 维埃(Fourvière)和“工作山”克鲁瓦- 鲁斯(CroixRousse)俯瞰着这座位于河流交汇处的独特城市。里昂的财富与这里两千年深远丰富的
历史相符相称,它在1998年被载入联合国教科文组织世界遗产 (Patrimoine mondial de
l’Unesco)名录也可谓实至名归。里昂这座“南方的门户”(la « Porte du Midi »)有时被形容
为冷漠而低调,实际上里昂是一座宽容、亲切而好客的城市,对于肯为它付出些许时间
的游客而言,里昂独特的魅力一定会让人流连忘返。
如果您有兴趣阅读更多的旅游资讯文章可登陆www.michelin.com.cn本版文章及图片由“米其林地图和旅游指南”提供,版权专有。未经
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Connexions / mars 2010
本专栏内容由米其林旅游出版公司提供
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Lyon 里昂
老城的文艺复兴风格的长廊
漫步弗尔维埃山
如同里昂北部的棕红十字架 ( la Croix
Rousse) 山一样,弗尔维埃 (Fourvière) 山
俯瞰着里昂的西部,这里曾有一座古罗马
城市。
“弗尔维埃”(« Fourvière »)一名源于古
罗马时期,古城建于公元前43年,如今依
旧保留有若干遗迹:剧场、音乐堂、引水
渠,等等。公元3世纪,弗尔维埃山被慢慢
遗弃,人们开始使用山上的石块来建设
Une cour intérieure dans une traboule
道院,如今修道院内坐落着省立档案馆
城市简介
面积: 39.5 平方公里
人口:472530
旅游局网址:
www.cn.lyon-france.com 如何前往?
乘坐TGV高速火车从巴黎出发,大约
需要2小时抵达里昂的佩拉什火车站
(gare de Perrache)和拉帕尔迪约火车
站(gare de la Part-Dieu)。火车站紧邻
市中心,可直接换乘地铁。
(les Archives départementales)。这条坡
道共有238级台阶,加上第二条坡道的
560级台阶的话,从弗尔维埃铁塔(la tour
métallique de Fourvière)走到下面的圣
保罗广场(la place St-Paul)总共有798级
台阶。下山时,这样的坡度令人能够欣赏
到有趣的景致:从索恩河(la
Saône)畔建
筑群中冒出的圣尼奇耶教堂(l’église StNizier)尖顶。取道加里亚纳 (Garillana) 山
坡路时,人们为其曲折的阶梯(224级台
下面的新城。中世纪,山上大部分地方被
重新用于培植作物(特别是葡萄种植)。
若想攀爬弗尔维埃山,须取道迂回曲折的
阶)而叹服。若想欣赏里昂城的全景,还
17世纪,许多教会在山上建造了自己的修
阶梯,或者那些被称为“山坡路”的陡坡
可以攀登新路(Chemin-Neuf)山路和圣巴
道院,此山因而得名Fourvière,意为“祈
街巷。每条道路都独具魅力,能够俯瞰老
泰勒米(St-Barthélemy)山路,从这两条坡
祷山”,它的对面是棕红十字架 (la Croix-
城的美景。还可以乘坐缆车抵达山顶,里
道开始,游客就能一览里昂老城的所有街
Rousse) 山则被称为“工作山”。
昂人称其为“绳子”。
区和主教教堂。最后,还有著名的古尔吉
如今,弗尔维埃山及其大教堂、古罗马时
首先可以取道卡尔姆•德肖塞 ( Carmes-
永(Gourguillon)山路,中世纪时,前往奥弗
期的古迹、博物馆已经成为游客众多的旅
D é c h a u s s é s) 坡 路 和尼古 拉 • 德 朗 热
涅地区(Auvergne)的四轮运货马车通常会
游胜地,一如山下绵延100多米的古老街区
(Nicolas-de-Lange)坡路。第一条坡道的
走这条坡道;今天的人们很难想象负重
(里昂老城le Vieux-Lyon)。
名字源自建于17世纪初期的一座同名修
的车队如何攀爬如此陡峭的山坡。
•••
Connexions / mars 2010 131
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旅游 TOURISME
弗尔维埃山的夜景 •••这条道路上能够看到一座文艺复兴
L’église St Georges et la basilique de Fourvière sur la colline
笔”的里昂信贷银行大厦(la tour du Crédit
联想到基督教早期时光。参观高卢-罗马
时期风格的建筑,更高处则是图尔凯胡同
Lyonnais)所在的罗讷河(Rhône)左岸;远
文明博物馆(le Musée de la Civilisation
(l’impasse Turquet),这条秀丽的小巷拥有
处,东面依稀可见群山的身影:比热山地
gallo-romaine)让游客继续沉浸在悠久的
古色古香的木长廊。享受山坡上的美景之
(Bugey)、阿尔卑斯山脉(Alpes)、沙特勒斯
历史中。这间博物馆因其建筑而与众不同
后,即可抵达弗尔维埃圣母大教堂。
山地(Chartreuse)、韦科尔山脉(Vercors)。
(它几乎完全位于地下!),凭借丰富的
“ 祈 祷山”上 纪念圣母的宗教 建筑已
若想饱览360度全景,游客可以步行登上
高卢-罗马时期的藏品而出类拔萃。最后,
经拥有近8个世纪的历史。圣母大教堂
大教堂的瞭望台(287级台阶— —有方
游客还能探访古罗马剧场遗迹— —气势
(basilique Notre Dame)矗立在弗尔维埃山
位指示台);届时将能瞭望到里昂人山
宏伟的建筑群包括一座音乐堂和一座剧
丘上,那恢宏的身影已经成为里昂风景的
( les monts du Lyonnais)、皮拉山(le mont
场(建于公元前1世纪),音乐堂在当时用
一部分。夜间灯光照明时,
气宇轩昂的大教
Pilat)以及金山(le Mont-d’Or);天气晴朗
于举办音乐会和精英论谈会,而剧场则
堂仿佛山顶的一座灯塔。大教堂的庞大身
时,人们还可以分辨出西面的阿尔卑斯山
堪称法国古剧院之最。在夏季举办“弗尔
躯也为它赢得了一个有趣的绰号中:
“翻
和勃朗峰(le mont Blanc)以及东面的多姆
维埃之夜”艺术节(festival « les Nuits de
倒的大象”,看来大教堂也并不仅仅拥有
山(le puy de Dôme)。
Fourvière »)之际,这两座古建筑重新迎来
仰慕者。这座大教堂是著名的朝圣之地,
在结束我们的弗尔维埃山漫步之前,还
观众,人们在露天欣赏戏剧、音乐会和舞
遵照热努亚克大人(Mgr de Genouilhac)的
可以在考古公园了解里昂的古老历史,园
蹈的同时,还能饱览城市美不胜收的景致
心愿建造于1870年普法战争之后:因为这
内的一些古代公共建筑于1933年出土。
(活动网址:www.lesnuitsdefourviere.fr )。
位里昂的大主教曾经承诺,如果敌人未靠
在法尔热路(rue
近里昂城,他将在此建造一座教堂。
卢-罗马时期的公 共浴池 ,在马卡贝路
里昂老城的穿街小巷
作为对游客努力爬山的回报,山顶还有许
(rue des Macchabées)和菲勒希龙堤岸
这是里昂老城的特色之一,绵延在索恩
多观景点。从大教堂左面的广场空地能够
(quai Fulchiron)(舒朗山坡路montée de
河(la Saône)与弗尔维埃山之间的圣让
俯瞰半岛街区(la Presqu’île)以及绰号“铅
Choulans)还保存了一些教堂遗迹,令人
街区(le quartier de St-Jean)拥有
132
Connexions / mars 2010
des
Farges),有一座高
•••
Lyon 里昂
(Vieux Lyon)的主街区— —圣让街(rue
La
最 老 道的饕客 将美食之都定在里昂
St-Jean) ,热闹的小酒馆(bouchon)和手
–地址:30 cours de Verdun –电话:04
绝非偶然。在里昂周边汇集了许多布
工艺店铺是体验当地风情和掏宝的好地
72 56 54 54 -电邮:brasserie.georges@
雷斯地区(la
Bresse)和沙罗莱地区(le
方。« bouchon »一词原来是指悬挂在小
wanadoo.fr –5月1日休息 -价格:18/24€。
Charolais)的畜牧场,除此以外还有栋布
酒馆门前的一把麦秆,表明人们可以在
这间餐厅邻近佩拉什火车站(la gare de
(la Dombes)地区的野味、附近萨瓦湖泊
店内喝到葡萄酒。如今这个词汇指代里
Perrache),于1836年开业,深受好评,是
产量丰富的鱼类、罗讷河谷(la vallée du
昂城的典型小酒馆,供应传统的当地菜
里昂不容错过的地方。巨大的用餐厅有
Rhône)及福雷地区(le Forez)的菜园和果
肴,其中有些小酒馆已经拥有百年历史。
舒适的红色软垫长椅、装饰艺术风格的
园。料理所用的食材全部由最顶级的主
以下为您推荐几个不可错过的美食餐
枝形吊灯和壁画,仅是这间用餐大厅本
厨及著名的“里昂厨娘”精挑细选,因
厅,带您去体验地道的里昂佳肴:
身就值得前往参观。餐厅提供地道的烹
里昂—令人大快朵颐的美食
Brasserie
Georges(乔治啤酒屋)
饪。
此,里昂的美食名声在很大程度上应当
归功于其对高品质食材的巧妙运用。
餐厅
Restaurant
这里为您介绍几道著名的里昂菜肴,让
Le Vieux Lyon(里昂老城餐厅) – 地
斯餐厅)–地址:pont
您在出发之前憧憬享受美食的快感:
址:44 r. St-Jean – 电话:04 78 42 48
Nord 69660 Collonges au Mont d’Or:
圆鼓鼓的烤炉焗鱼肠(la
de
89 –价格:13,50/20€。里昂所有的食客
距离索恩河( Saône)岸1 2 公里( D 433,
brochet)浸在嗞嗞作响的金黄色黄油中
都知道这间热情好客的小餐馆:开业于
D51)- 电话: 04 72 42 90 90 –电邮:
色泽诱人;包裹在热松甜面包中的里昂
1947年,如今依然保持着欢聚一堂的幸
[email protected] –价格:109-185€
腊肠(le saucisson de Lyon)美味可口;添
福氛围。餐厅用布拉桑斯(Brassens)、布
- “保罗先生”迎接来自世界各地的饕
加了松露或开心果的热香肠(le cervelas)
雷勒(Brel)以及阿里奥(Herriot)等名人的
客……
香气扑鼻;鳟鱼在烹饪时填入馅料用小
照片作为装饰,以里昂家常菜为主。
火慢慢煨炖鲜美异常;而家禽、特别是松
Le Café 203(203咖啡馆)-地址:9 r. du
美食购物
露馅鸡(la poularde demi-deuil)在高汤
Garet -电话:04 78 28 66 65 -电邮:
Reynon(雷农猪肉食品外卖店) –地址:
中烧煮之前还会塞入松露薄片;更为传
[email protected] -12月24日至1月3日
13 rue des Archers –电话:04 78 37 39 08
统的美味特色菜肴是:奶油鸡(le poulet
休息 -价格:10€。一些食客光顾这间小
–网址: www.reynon.com – 营业时间:
à la crème)、牛骨髓刺菜蓟(les cardons
餐馆氛围的咖啡馆是为了品尝当日推荐
周二至周六:8 :30-13 :30,15 :00-19 :30
à la moelle)或者焗刺菜蓟、佩鲁日烘饼
的集市新鲜食材烹饪。还有的客人是为
– 7月底至8月中旬、节假日(圣诞节及元
(les galettes de Pérouges)、以及封斋前
了追求精神食粮:来这里欣赏画展、青
旦除外)休息。从1937年创建伊始,这间
周二的油炸甜糕(les bugnes de Mardi
年作家的作品展或聆听音乐。无论是美
店铺就由同一个家族经营至今。店内精
gras) 。
食还是文化、艺术——每个人都有一个
心陈列着大腊肠、干红肠、大型干香肠以
因此,法国烹饪界的教主之一出自里昂不
爱上203的理由。
及成品菜肴。热衷逸闻趣事以及菜谱的
足为奇——保罗•博居斯(Paul Bocuse)于
Le Casse-Museau(硬糕点餐厅)–地址:
人士可以阅读由奥古斯特•雷农(Auguste
1926年出生在一个厨师世家,其家族厨
2 r. Chavanne –电话:04 72 00 20 52 –
Reynon)先生所著的《猪肉食品商之子》
艺史可追溯到17世纪。这位天才厨师(
8月、周日、周一以及节假日休息。营业时
(Le fils du charcutier)一书。
人们甚至称其为“世纪厨师”)在为法国
间:周二中午、周三中午、周四中午和晚
Voisin(邻居食品店) –地址:28 r. de la
烹饪赢得国际声誉方面功不可没。他同
上、周五中午和晚上、周六晚上- 必须预
République –电话:04 78 42 46 24 -营
时还是一位成功的商人,不仅开设了许
订 –价格:中午9€ - 晚上12/25€。
“波
业时间:周一14 :00-19 :00;周二至周六
多餐厅,还在里昂近郊埃居利(Ecully)开
莱特阿姨”(Tante Paulette)的小酒馆
9 :00-19 :30。这间食品店制作出售50多
办了烹饪学校 。有机会的话可以到他
始于1947年,以其轻松随意的风格受到
种巧克力、水果软糖、糖渍水果以及其
在里昂开 设的著名餐厅“ 保罗•博居
追捧。小酒馆愉悦舒畅的氛围依旧,但餐
他美味的里昂特产。该品牌在里昂共有
斯”(restaurant Paul Bocuse)用餐 ,那里
厅的当日主菜、沙拉拼盘以及快餐已经
19间店面,食品店还提供新鲜烘焙的咖
的美味定会让您赞不绝口。
取代了这里曾经著名的蒜蓉鸡。餐厅价
啡和特级名茶。一定不要错过哦!
若想了解里昂的特产,还需前往里昂老城
廉物美,在里昂人中的知名度很高。
quenelle
Paul
Bocuse(保罗•博居
de
Collonges
Connexions / mars 2010 133
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旅游 TOURISME
生让街 La rue St-Jean dans le Vieux-Lyon
••• 许多穿街小巷(traboules,源于
镀金圣母像 (la Vierge dorée de Fourvière)
院仅两步之遥。实用而整洁的酒店客房非
拉丁语,意为“穿行”),尤其集中在圣
的落成。当年,由于河水泛滥,雕塑师延
常安静。接待服务令人愉悦,价格适中。
让街(la rue St-Jean)、三玛丽路(la rue
迟到9月8日才完成雕像。于是,庆祝仪式
Élysée Hôtel(爱丽舍酒店)–地址:92 r.
des
Trois-Maries)和罗曼•罗兰堤岸(le
便被推迟至12月8日的圣母无玷始胎节
du Prés.-Edouard-Herriot –电话:04 78
quai
Romain-Rolland)之间,以及圣乔
(fête de l’Immaculée Conception)举行。
42 03 15 – 电邮:elysee-hotel@wanadoo.
治路 (la rue St-Georges)和菲勒希龙堤
当天,人们因为暴雨打算取消晚间的庆祝
fr -房间:29间,价格:44/67€ - 早餐:
岸(le quai Fulchiron)之间。由于缺少地
活动;然而暴雨竟然在预定的庆祝时间奇
7.60€。如果您希望以合理的价格在半岛
方规划的宽广道路网络,这些与索恩河
迹般停止。于是,里昂人自发用成千上万盏
街区(la
垂直的穿街小巷就起到衔接各 街区建
灯笼点亮自家的窗台,让整个城市笼罩在
庭氛围的小酒店。红黄色调的小房间虽然
筑的作用。通道的风格相近,拥有尖拱
灯光之中。这一宗教传统如今已经成为大
朴素简单但干净整洁、令人愉悦。朝向后
顶或法式顶棚,通往建有文艺复 兴风
众节日,小商贩会在这一天开启圣诞节摊
院的客房能够保证您度过宁静的夜晚。
格长廊的内部庭院。这些穿街小巷通常
位,无数游客涌入里昂的大街小巷,热闹
Savoies(萨瓦酒店)–地址:80 r. de la
是私家通道,以前并不对沿街居民所开
非凡。
Charité –电话:04 78 37 66 94 -电邮:
Presqu’île)住宿,
可以选择这间家
[email protected] -房间:
放。根据约定,人们可以自由出入这些
穿街小巷中的大部分;建议您上午在旅
住宿
46间,价格:63/67€ -早餐:5€。酒店位
游局的一位导游的陪同下观光游览。
St-Pierre-des-Terreaux (圣皮埃尔代泰罗酒
于佩拉什火车站(gare
de
Perrache)街
店)–地址:8 r. Paul-Chenavard –电话:04
区,外立面衬托以萨瓦徽章。干净的标
灯光节
78 28 24 61 – 每年8月及圣诞节到新年期间
准客房(配备简单家具和彩色地毯)、
12月8日,里昂以其特有的方式来纪念天
各休息15天 – 房间:16间,价格:31.50/45€
非 常 方 便 的 车 库以 及 适 中 的 价 格 都
主教的圣母玛利亚节日。夜幕降临后,成
-早餐:5.50€。若想在里昂城内住宿,选
令 这 里 成 为深受客人 欢迎 的 地 方。
千上万盏彩色折纸灯笼点亮里昂的所有窗
择这间酒店非常方便,它坐落在圣皮埃尔
台。这个节日起源于1852年庆祝弗尔维埃
博物馆(musée
134
Connexions / mars 2010
St-Pierre)对面,距离歌剧
•
French Chamber of Commerce
and Industry in China
2009-2010 Directory
ANNUAIRE CCIFC 2009-2010
Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine
Exposition universelle Shanghai - 2010
Pavillon de la Chine
中国法国工商会年鉴
www.ccifc.org
About 1 200 French companies all over Mainland China
More than 3 500 contacts
Bilingual French/English – Chinese
Contact : Patricia RUAN
[email protected]
中国旅游 TOURISME CHINE
Le petit étang du restaurant The Orchard dans la banlieue de Pékin.
© DR
Hegezhuang aux portes de Pékin,
un village vert et protégé
Wu Ertao et Lise Minder 阿尔
Ils étaient des centaines, ils se comptent
aujourd’hui sur les doigts de la main. Ce sont ces
villages traditionnels de paysans situés au milieu
des larges terres agricoles qui entouraient Pékin,
la capitale, il y a encore moins de dix ans.
萨斯的特
Au milieu des chantiers de construction
des lignes de trains rapides, de métro,
de périphériques, de centres commerciaux
et de nouveaux complexes résidentiels
situés dans la riche banlieue proche de
l’aéroport à l’Est de la capitale, se trouve
un petit village traditionnel qui survit
envers et contre tout grâce aux efforts
éclairés des villageois, des officiels et
d’un couple sino-américain, Lisa Minder
et Wu Ertao, propriétaires du fameux
restaurant The Orchard.
Un vaste chantier en construction
Résultat de l’urbanisation fulgurante des
136
Connexions / mars 2010
zones vertes de la capitale, les villages
traditionnels avec leurs cours carrées et
leurs toits de tuiles noires disparaissent
progressivement du paysage. Ils sont remplacés par des villes nouvelles de tours
résidentielles, comme le centre d’affaires
de Wangjing, où vit la classe moyenne
branchée, et surtout par des ensembles de
villas de style varié, allant du style californien au traditionnel pékinois, comme les
« hutongs » du Cathay View. Aujourd’hui,
le paysage est dantesque, car les chantiers
sont partout. Des écoles internationales,
des centres d’expositions et de shopping
poussent comme des champignons sur les
anciennes terres agricoles.
Entre les débris des sites démolis des villages de Chaoyang et de Shunyi, les énormes
pylônes en ciment des bretelles d’autoroute
à huit voies et des trains rapides, les massifs poteaux électriques, le style débridé et
contrasté des nouvelles constructions, le
paysage n’a plus aucune harmonie.
Seuls demeurent miraculeusement le charmant village de Hegezhuang, le verger des
pommes et poiriers et le lac du The Orchard, refuge des amoureux de la cuisine
saine et fraîche et des familles à la recherche d’espaces verts et de chlorophylle.
Nouvelle destination verte
Le village de Hegezhuang est situé dans
le district de Chaoyang, à seulement
quelques kilomètres de Pékin, à côté de
Shunyi. Le projet de rénover le village est
né en 2007 à l’initiative de Lisa Minder
et de Wu Ertao. Plus de quatre années de
lobbying et de collaboration étroite avec
les villageois, les autorités locales et celles
du district ainsi qu’une poignée d’investisseurs ont permis de créer un partenariat
sans précédent, le Real Life Beijing, pour
© DR
Hegezhuang 何各庄
北京郊区The Orchard餐馆里的小池塘
protéger le village et rénover les maisons
ancestrales. Cité comme projet-modèle par
le gouvernement municipal de Pékin et le
secrétaire du Parti Liu Qi, Hegezhuang
sera le dernier village restant dans la nouvelle zone urbaine et bénéficiera d’une station de métro sur la nouvelle ligne 15 qui
sera opérationnelle à la fin de 2010.
Un art de vie préservé
Le projet Real Life consiste à préserver
l’architecture des maisons et le style de
vie d’antan. Une équipe d’architectes a
rejoint Real Life pour participer à cette
entreprise courageuse. Des contrats ont
été passés avec une centaine de villageois
propriétaires qui ont accepté de louer leur
maison pour un bail déterminé. Après
rénovation, ces maisons traditionnelles
seront louées avec des baux de trois à dix
ans, le propriétaire recevant un pourcentage sur la location. Une aubaine pour ces
paysans dont les maisons étaient détériorées et inconfortables, qui retrouveront
une propriété améliorée à la fin du bail et
un revenu garanti de loyers pour les années à venir. Certains décident d’aller dans
d’autres quartiers, d’autres veulent rester
dans le village où des appartements à bas
prix, à l’ouest du village, leur sont proposés
à partir de 2010.
Déjà de nombreuses cours carrées spacieuses et rénovées, d’environ 300m 2 ,
sont occupées par des locataires, chinois
et étrangers, ravis de vivre dans l’un de
ces pavillons traditionnels de bois rouge
et toits courbés et d’apprécier les charmes
de cet habitat exceptionnel. Le Centre
Communautaire Yin Yang, fondé par Lisa
Minder, pour offrir des activités de créativité et de bien-être pour la communauté
environnante, occupe la première cour
carrée à l’entrée du village.
Un couple d’entrepreneurs dynamiques
En 2002, Lise Minder et Wu Ertao
s’étaient lancés dans le projet ambitieux
d’aménagement d’un ancien verger à
l’abandon et de rénovation d’une maison
de paysan pour en faire un restaurant de
cuisine occidentale. Rien ne décourageait
ces intrépides qui avaient déjà ouvert auparavant un restaurant dans les environs,
mais s’étaient vus obligés de quitter les
lieux pour cause de projet immobilier. Y
mettant toutes leurs passions et énergies,
ils transformèrent leur nouvelle acquisition en un lieu de charme exceptionnel
et unique. Aujourd’hui, la propriété est
entourée de murs de briques percés de fenêtres aux dessins traditionnels, les mares
aux poissons sont devenues lacs, le verger
produit chaque année des fruits savoureux
et la maison s’est métamorphosée en un
restaurant étoilé, apprécié pour sa cuisine
naturelle saine et raffinée, sa boutique
d’œuvres de designers et d’artistes entouré
d’un jardin où se mêlent les parfums des
roses et des herbes essentielles.
Les efforts du couple se sont vu récompenser par plusieurs honneurs pour leurs
travaux dans le développement vert et durable de Chaoyang, le plus vaste district de
la capitale chinoise.
Beaucoup de vieux quartiers de cours carrées de Pékin n’ont pas eu la chance de
Hegezhuang !
•
V é ro n i qu e
d ’A n t r a s
www.realifebeijing.com
www.the-orchard.com.cn
Connexions / mars 2010 137
Nava jeune opérée du coeur.
© DR
© DR
协会 associations
L’équipe de A pleines mains
A Pleines mains的志愿者们
A pleines mains
… et le cœur au chaud
Nava, petite orpheline, avait besoin d’être
opérée du cœur, ce qui coûtait 35 000
Rmb. Recueillie dans une maison d’accueil privée de Xi’an, elle n’avait aucune
chance de voir réunis les fonds. Et pourtant ! Quand Valentine Sorret a décidé de
consacrer l’intégralité des revenus générés
par la première édition de son livre Instantanés instants de vie à Shanghai, la petite
fille s’est vu accorder une deuxième chance. Aujourd’hui elle est en pleine forme
(voir photo).
« Mettre en relation des projets et des
bonnes volontés », tel est le but que se sont
fixé les « bonnes âmes de Shanghai », une
trentaine de bénévoles issus d’un groupe
créé en 1999 par un couple de français qui
visait à aider des expatriés francophones
de bonne volonté ne parlant pas anglais.
Après avoir repéré des orphelinats publics,
des maisons de personnes âgées et handicapées en manque de ressources financières, APM (A pleines mains) a commencé
à organiser des kermesses annuelles, puis
à récupérer des objets ou des vêtements
que les expatriés laissaient en partant, à
les stocker, à les trier pour les redistribuer,
voire les vendre.
« Dix ans après, les résultats financiers
sont là, souligne Claire Rechatin. Nous
sommes passés de un à quatre lieux de
stockage. Les donateurs nous confient
aussi bien de l’argent que des affaires neu-
138 Connexions / mars 2010
ves. Des entreprises de sourcing n’hésitent
plus donner à leurs stocks qu’APM n’a pas
toujours le droit de revendre, pour préserver les marques. « Nous trions ces objets
toutes les semaines un peu comme le font
les chiffonniers d’Emmaus. Cette activité
très chronophage, même si elle n’est pas
toujours efficace économiquement, nous
a permis d’aider un millier de personnes
en 2009 et de contribuer à créer de la solidarité au quotidien. Nous facilitons aussi
l’intégration de bénévoles encore un peu
perdus à Shanghai. Nous accueillons toutes les bonnes volontés, celles qui prêtent
leur garage, celles qui tiennent un point
de vente, celles qui récoltent ou trient des
dons et… celles qui mettent à disposition
leurs réseaux. »
Autres sources de revenu : la vente d’exemplaires de guides sur Shanghai (Passeport
Shanghai, Promenades dans l’ancienne
concession française, Instantanés, instants de
vie à Shanghai ou Shanghai en filigranne)
qui reversent toutes leurs recettes à APM.
Aujourd’hui, ces revenus permettent à
APM d’aider plusieurs groupes dans et
hors de Shanghai : une association de
handicapés Soho, des groupes qui visitent
des mendiants, « Home sweet home » par
exemple, des services sociaux, une maison
d’accueil. Hors de Shanghai, APM aide
un orphelinat très pauvre qui réunit 500
enfants en finançant le salaire d’un méde-
cin (1 000 Rmb par mois) et de plusieurs
ayi (700 Rmb par mois). APM aide aussi
l’association Bethel, la maison d’accueil
Starfish foster Home à Xi’an. Elle finance
des opérations d’enfants handicapés (bec
de lièvre, problèmes cardiaques) pour les
aider à être candidats à l’adoption dans les
orphelinats publics. APM aide aussi des
bénévoles auprès de villages de lépreux
dans le sud de la Chine, qui fournissent
des soins infirmiers dans six villages et visitent 800 personnes par semaine depuis
quatre ans et demi. Ces lépreux organisent eux-mêmes des services de cantines
pour malades mentaux sans logis. APM
appuie enfin diverses associations, telles
que Morning tears, Madaifu, Couleurs
de Chine…
« Aujourd’hui notre objectif est de pérenniser l’association mais aussi de la développer dans d’autres villes tout en renforçant
nos contacts avec des entreprises donatrices », explique Claire Rechatin. « Il y a du
pain sur la planche mais aussi de quoi bien
vivre son expatriation. »
A n n e G a rr i g u e
•
APM organise une vente de vêtements enfant par mois près de l’Ecole française, type
« Puces », sur des parkings de Shanghai
et des ventes sur Internet. Contact : Katia
Gailliegue anime le site et répond aux mail
sur http://apleinesmains.e-monsite.com/;
[email protected]
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Française
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另一种角度看当代中国
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Code Banque : 30003
Code Agence : 03020
文化 CULTURE
Yuan Yanwu
souvenirs d’enfance
Jeune artiste chinoise installée à Paris, Yuan Yanwu se
réapproprie des photos d’elle-même prises par d’autres et
réinvente son enfance.
Une série de portraits grand format affichant une petite fille figée, inexpressive, au
regard intense et fixe, presque accusateur.
C’est avec ce travail exposé en septembre
2009 à la galerie Dixie à Paris que Yuan
Yanwu a fait son entrée sur la scène de l’art
contemporain.
Née en 1976 dans la région des Montagnes
Jaunes, Yuan Yanwu a été pendant cinq
ans journaliste à la section photo du Xinminwanbao, un quotidien de Shanghai,
avant de partir en France en 2003, étudier
la photo et travailler.
Lors d’un retour à Shanghai pour fêter
le nouvel an chinois avec sa famille, elle
tombe sur des photos d’elle, petite fille.
« Pour moi c’était le portrait d’une morte
et pourtant je m’y suis reconnue.» dit-elle
aujourd’hui.
A partir des archives familliales, des photos
prises, pour la plupart, par son grand-père,
140
Connexions / mars 2010
Yuan Yanwu se lance alors dans un projet
d’autobiographie photographique.
Les formats de départ sont minuscules,
les photos pliées, abîmées et jaunies. Yuan
Yanwu récupère les clichés et s’attèle à
un long travail, à la fois restauration et
recréation : « Je les ai recadrées, retouchées, agrandies. J’ai patiemment repris
chaque pixel un par un et finalement je les
ai entièrement recrées. Elle m’ont servi de
“miroir”, m’ont aidée à me reconnaître et
à m’identifier. »
Ces photos de famille ont été prises en
Chine, de la fin des années 1970 jusqu’au
milieu des années 80, Yuan Yanwu a de
deux à seize ans. Elle raconte : « Ce sont
mes grands-parents qui m’ont élevée. A
l’âge de huit ans j’ai quitté mon petit village de l’Anhui et mes parents pour aller
vivre à Shanghai chez mes grands-parents.
Entre ces deux endroits, par train à l’épo-
que le voyage durait au moins dix heures.
Pour les Français, c’est incompréhensible,
presque cruel, d’être séparés de ses parents.
En Chine beaucoup d’enfants de ma génération dont les parents avaient été envoyés
à la campagne pour être rééduqués ont été
confiés à leurs grands-parents afin qu’ils
reçoivent la meilleure éducation possible.
Mon grand-père était un haut fonctionnaire, un communiste très rigoureux, nous
avions une vie simple, très stricte, mais matériellement correcte. Tout ce qui mettait
en valeur la féminité était mal vu.»
Des photos de famille originales, ne reste
que le visage de l’enfant, pas de décor, pas
d’autres personnes. « J’ai coupé le reste de
ma famille pour que le regard ne se focalise
que sur moi. Et puis c’est vrai que le reste
ne me convient pas. J’ai toujours éprouvé
de la gêne face à ma famille depuis que je
suis enfant. C’est sans doute pour cette rai-
Le photographe à la une
封面摄影
Deux portraits de
la série « Youth
self-portrait ».
Ci-dessous :
Yuan Yanwu.
© YUAN Yanwu
左边 “童年自画
像”作品系列,
下图:摄影师袁燕舞
son que je m’exprime dans un pays étranger et dans une langue étrangère.»
Avec ses portraits à mi-chemin entre photo
et peinture, Yuan Yanwu ne parle pas directement de son pays. Elle reconnaît que
son histoire en est indissociable et est à
chercher dans le non-dit.
Face à ces étranges images de petite fille
sage et sévère, c’est le vide qui est parlant :
« Mes photos ne sont pas des autoportraits mais renvoient à des problématiques
d’identification du sujet et de représentation de soi. La société nous impose son
droit de regard, nous menace d’impersonnalité et nous rend étranger à nous-même.
Comment dès lors se reconnaître ? Visage,
yeux, nez et bouche constituent mon identité primordiale : une fille asiatique. Des
informations complémentaires sont données par la coiffure, les vêtements, le style,
le foulard rouge des pionniers. Tout ce que
l’on sait est ce que l’on voit ; le reste est à
imaginer. »
Ces photos « muettes » sont paradoxalement « parlantes ».
Le regard droit qui défie l’objectif, l’absence absolue de joie évoquent des séances de
poses obligatoires auxquelles l’enfant devait se soumettre, mais sans complaisance.
La froideur du visage ressemble à un acte
de résistance. Reflète-elle également le peu
de place et de considération accordées à
l’enfant lui-même dans sa propre famille ?
dans la société chinoise des années 80 en
général ? Est-elle, plus simplement, le signe
d’une enfance très stricte, ou celui encore
d’un caractère introverti ?
Les aplats de couleurs sans zones d’ombre, la suppression systématique et quasiacharnée des décors et des personnages
rappellent aussi, immanquablement, des
procédés de censure. Une forme de revan-
che de l’adulte sur ses propres censeurs ?
Un barrage contre le réveil d’une douleur
trop enfouie ?
Entre les documents réels, les vieilles photos et les portraits réparés, réinventés et
fanstasmés, se crée un mouvement de balancement. Tout est modifé, rien n’est modifié et c’est autour de cet insaississable que
prennent forme les projets de l’artiste.
Yuan Yanwu a déjà en tête de nouveaux
travaux. Elle souhaite poursuivre sa démarche si singulière et si personnelle, notamment à partir d’une des rares photos
d’elle enfant avec sa grand-mère.
Yuan Yanwu revient régulièrement en
Chine où son travail n’est pas encore exposé. A bon entendeur…
•
S o ph i e L av e rg n e
www.yuanyanwu.free.fr.com
Connexions / mars 2010 141
文化 CULTURE
Blanche Neige par le chorégraphe Angelin Preljocaj (26 danseurs, des costumes signés JP Gaultier) sera repris à Shanghai, Pékin, Canton et
法国编舞大师普雷罗卡创作的现代舞剧《白雪公主》(高缇耶设计26名演员的服装)在上海、北京、广州和香港重演。
Festival Croisements 2010 :
entrez dans la danse
Initié en 2006 dans la continuité de l’élan créatif des Années croisées France-Chine 20042005, le festival Croisements est devenu le rendez-vous incontournable de la culture
française en Chine.
Depuis sa création en 2006, Croisements
enrichit sa programmation et étend sa présence en Chine. Entre le 15 avril et le 21
juin 2010, pas moins de 200 événements
culturels seront présentés dans vingt villes de Chine, couvrant des domaines aussi
variés que la danse, le cinéma, le théâtre,
la poésie, la musique, les arts visuels ou
encore les spectacles pour enfants...
L’édition 2010, marquée à la fois par le cinquième anniversaire du festival et l’exposition universelle de Shanghai, offrira « une
142
Connexions / mars 2010
programmation particulièrement riche »,
annonce Sébastien Cavalier, attaché culturel de l’ambassade de France en Chine et
directeur de Croisements. Signe de l’intérêt grandissant des partenaires chinois,
cette année, la cérémonie d’ouverture du
Panorama du cinéma français sera filmée
par Hunan TV, qui suivra les stars françaises et chinoises et diffusera des sujets
sur les événements pendant toute la durée
du festival.
L’objectif reste le même que les années pré-
cédentes : proposer des projets de grande
qualité, en mettant l’accent sur la création
contemporaine. Sans tourner le dos à la
richesse patrimoniale française et à son
image « romantique » auprès du public
chinois, Croisements souhaite présenter
une France moderne, créative, entreprenante et favoriser les collaborations franco-chinoises. Symbole de cette volonté de
montrer le dynamisme de la création française, la venue d’Izia, nouvelle coqueluche
de la scène rock, qui jouera à Chengdu au
Croisements 交流
© JC Carbonne
vu le jour en France en 1982 et a depuis
fait des émules à travers le monde, le maire
de Shanghai a accepté que des groupes se
produisent dans différents endroits de la
ville. « Nous avions envie de perpétuer
l’esprit de la fête française, celle d’un événement populaire, où les musiciens amateurs jouent à côté des artistes confirmés »,
dit Sébastien Cavalier. La grande musique
sera aussi à l’honneur avec l’orchestre philharmonique de Radio France, qui jouera
au grand théâtre de Shanghai où il est en
résidence dans le cadre de l’exposition
universelle. Au Musée d’art de Shanghai,
une exposition conjointe des musées de la
région Rhône-Alpes réunira une centaine
d’œuvres des plus grands artistes du XXe
siècle, sur le thème de l’image du corps.
L’occasion de mettre en valeur une collaboration qui dure depuis vingt ans entre la
ville de Shanghai et les musées de la région
Rhône-Alpes.
Le corps sera dans tous ses états grâce à la
danse, le thème central de l’édition 2010.
La cinémathèque de la danse, qui va créer
en 2010 une antenne au Centre culturel
français, ouvrira le volet France danse du
festival. Au Centre culturel français et à
l’Académie de danse de Pékin, des films
issus de sa collection exceptionnelle riche
Hong Kong.
de 400 films et de plus de 2 000 vidéos
seront présentés en présence du directeur
de la cinémathèque, Patrick Bensard,
et de chorégraphes invités. A l’issue des
Zebra media festival, à Pékin au Midi fes- projections de films, des ateliers seront
tival, et à Shanghai au Mao Live House.
organisés. Ce sera l’opportunité pour le
Au grand rendez-vous inpublic de s’entretenir avec
ternational que sera l’exles chorégraphes et les danposition Universelle de « Parmi les
seurs français.
événements
Shanghai, Croisements
Croisements rendra aussi
sera partenaire du pavillon phares, le
hommage au travail de colFrance, du pavillon de la
laboration qui se construit
concert de
région Rhône-Alpes et de
depuis dix ans entre les
celui de Lille Europe. Par- M qui viendra
cinq grands ballets clasmi les événements-phares, présenter,
siques de Chine (Pékin,
Shanghai, Canton, Tianjin
le concert de « M », qui après six ans
viendra présenter, après six
et Shenyang) et l’école de
d
’
absence
,
danse classique française.
ans d’absence, son nouvel
Grâce à ce travail, chaque
album Mister Mystère, son nouvel
pour lequel il a collaboré album…»
année un ballet partenaire
notamment avec Brigitte
chinois présente une choFontaine et son père Louis Chedid. Il se régraphie française ou invite un choréproduira à Pékin au Starlive et à Shanghai graphe français à monter un spectacle.
le 21 juin dans le cadre de la fête de la En 2010, le danseur étoile du Ballet de
musique. A l’occasion de cette fête qui a l’Opéra de Paris, Manuel Legris,
•••
Coup d’oeil sur le
programme
Cinéma
La Cinémathèque de la danse : Pékin
7, 8, 9 mai
6e Festival du film d’animation : Hangzhou 23 avril-3 mai
7e Panorama du Cinéma français : Canton
11 avril au 10 mai, Chengdu 6-13 mai,
Wuhan 12-13 avril, Pékin 14-30 avril
Shanghai International Film Festival :
Shanghai 12-20 juin
Ubu Roi : Pékin 23 avril
Colloque
Centenaire du chemin de fer Yunnan-Vietnam : Kunming mi-Mai
Cultures Urbaines
Yamakazi : Pékin mai
Danse classique
Chorégraphies françaises pour le Ballet
National de Chine : Pékin 14-15 mai
Don Quichotte : Shenyang 21, 22, 23 mai
Danse contemporaine
Blanche Neige : Shanghai 8, 9 mai
Le Manuel du Merveilleux : Pékin 15 mai,
Shanghai 21 mai
Transports exceptionnels : Pékin 28 avril,
Chengdu, 8 mai, Wuhan, 1er mai
Voy : Pékin 23, 25, 26 et 27 juin
Danse Hip-Hop
Urban Ballet : Shenzhen 12 mai, Kunming 15 mai, Wuhan 18 mai, Pékin 21,
22 mai
Exposition
Abysses : Shanghai 3 avril-7octobre
100 lithographies des maîtres européens :
Pékin 15 avril-16 mai
Centenaire du chemin de fer Yunnan-Vietnam : Kunming mi-Mai
La Chalcographie du Louvre : Chongqing
18 mai-4 juillet, Chengdu 9 juillet-15
août
Contemplation de l’Orient : Pékin
26-31 mai
Le Corps image, Portrait du XXe siècle :
Shanghai 23 avril-6 juin
Errance, de Martin Salazar : Pékin
29 mai-20 juin
Expo Hermès : Shanghai 15 mai-5 juin
Féminité : Pékin juin
Here There the world in motion :
•••
Connexions / mars 2010 143
文化 CULTURE
•••
Shenyang16 avril-29 avril, Pékin 29
mai-21 juin. Mix : Xiamen 28 mai au 12
juin, Wuhan, 18 juin-04 juillet ,Shenyang
23 avril-29 avril
La Période chinoise 1927-1930, Elise Rieuf :
Shanghai 22 mai-6 juin
Traffic – Art Highway Besançon Shanghai :
Shanghai mai à septembre
La Villa de Mademoiselle B : Wuhan 1-23
juin, Canton 15-30 septembre
Visions Croisées : Qingdao mai
Exposition photo
Caochangdi Photospring : Pékin 17 avril-30 juin
Anaïs Martane : Tianjin 14 avril
Marc Riboud, L’instinct de l’instant : Pékin
23 avril-6 juin
Jonglage
Pan-pot ou modérément chantant : Tianjin
29 mai, Shenzhen 4 juin
Lectures
A toi pour toujours, ta Mari-Lou, Théâtre des
Lanternes : Pékin 15-18 avril
Littérature
Les romans de l’été : Shanghai 10-13 juin
Printemps des poètes : Chengdu 10-12
avril, Pékin 24 avril
Musiques actuelles
Beat Torrent : Qingdao 19 mai, Pékin 21
mai Jinan 20 juin
Gong Gong : Qingdao 12 juin, Pékin 18
juin, Hangzhou 19 juin, Shanghai 20 juin
Inspecteur Cluzo : Pékin 1er mai
IZIA : Pékin 1er mai
M : Pékin 19 juin, Shanghai 21 juin
Ma Valise : Jinan 23 juin, Dalian 11 juin,
Pékin 12 juin, Canton 18 juin, Macau 19
juin, Qingdao 21 juin
Manuel du Merveilleux : Kunming 12 mai
Zebra media festival : Chengdu 3 mai
Musique classique
Carnaval français en Chine : Chongqing 23 avril
Concert Spirituel, Hervé Niquet : Shanghai
21 juin
Marc Trautmann avec l’Ensemble de Musique
et danse du Hubei : Wuhan 5 juin
Marina CHICHE (violon) et Constance LEE
(piano) : Xiamen 9 juin, Wuhan 12 juin
Olivier Moulin : Nanshang 24 avril
L’Orchestre National de Chine dirigé par
Michel Plasson : Pékin 12 mai et 11 juin
L’Orchestre Philharmonique de Radio France :
144
Connexions / mars 2010
Shanghai 2 et 4 mai. Voici le nouveau jardin : Shanghai 8 mai, Shenzhen 15 mai
Musique contemporaine
Trois Femmes : Hangzhou 11 avril, Nanjing
8 avril, Pékin 17 avril, Shanghai 13 avril
East West Quartet : Pékin 1, 2 juin, Shenzhen 4 juin, Canton 5 juin
Musique Jazz
Jazz French Stories : Shanghai 20 juin,
Dalian, 2 juillet, Xi’an 28 juin, Nanjing
16 juin, Chengdu 26 juin, Chongqing
25 juin, Wuhan 24 juin, Qingdao 30 juin,
Pékin 3 juillet
Jean Philippe Viret Trio invite Wu Na : Shenzhen 18 mai, Canton 17 mai, Kunming
16 mai, Wuhan 20 mai, Pékin 21 mai,
Shanghai 23 mai
Opéra
Le silence de la mer : Pékin 28 mai
Cendrillon, David Li et Wu Zhong : Shanghai
1er et 3 mai
Opéra Pékin / Danse
La fable du rouge et du Blanc : Pékin 18, 19,
20, 22, 23 mai
Récital Piano
Jean-Efflam Bavouzet : Pékin 16 mai
Bruno Fontaine : Xiamen 8 juin
Festival Piano aux Jacobins, David Kadouch :
Pékin 4 juin, Changchun 6 juin, Shanghai 11-12- 13 juin
Tigran Hamasyan : Xiamen 7 juin
Roger Muraro : Shenzhen 30 avril
Théâtre
Arlequin navigue en Chine : Wuhan15 mai,
Dalian 25 mai, Chongqing 17 mai, Shanghai 19 mai, Shenyang 21 mai, Changchun 22 mai, Pékin 28, 29 mai
L’augmentation de Georges Perec : Shanghai 15 - 20 juin
La Double Inconstance de Marivaux : Shanghai 2 juin au 6 juin
11 septembre, Michel Vinaver : Pékin 22 avril
Labyrinthe : Pékin 14-23 mai
La Peste de Camus : Shanghai 20 au 23 mai
Théatre de rue
Compagnie ilimitrof : Canton mai
Vidéo / musique Jeune public
3 contes, Percussions de Lyon : Shanghai 28
mai, Pékin 30 mai
Certaines dates restent à confirmer. Pour
tout savoir : www. Faguowenhua.com
•
sera l’invité du Ballet Central de
•••
Chine à Pékin, où il interprétera l’Arlésienne de Roland Petit et animera des master
class à l’intention des danseurs chinois.
Le ballet du Liaoning à Shengyang, dirigé depuis août 2009 par le français James Amar, présentera le ballet Don Quichotte chorégraphié par Jean-Paul Gravier.
Dans le domaine de la danse contemporaine, l’objectif est de contribuer au
développement et à la diffusion de cette
discipline en Chine, où elle est encore
émergente. Parmi les événements-phares
de la programmation, le ballet romantique et contemporain Blanche Neige, pour
lequel le chorégraphe Angelin Preljocaj
et le costumier Jean-Paul Gaultier bousculeront le mythe des frères Grimm, sur
les plus beaux airs de Gustav Malher. Le
ballet sera joué à Shanghai, Hong Kong,
Pékin et Canton.
La danse hip-hop ne sera pas oubliée grâce
au spectacle Urban Ballet de la compagnie
Rêvolution, présenté à Pékin, Kunming,
Wuhan et Shenzhen. Clin d’oeil à une
Chine en pleine mutation, Transport exceptionnel de la Compagnie Beau Geste
de Dominique Boivin est une rencontre
inattendue, un duo entre fer et chair, une
chorégraphie pour une pelleteuse mécanique et un danseur qui nous invite à voir
un engin de chantier autrement. Comme
un bras humain qui prend, repousse ou
cajole, la machine crée une tension avec
le corps du danseur. Ce chant lyrique et
onirique sera joué à Pékin, Wuhan, Chengdu, et Shanghai.
Sur le plan des collaborations francochinoises, Sébastien Cavalier met en avant
deux créations, Le Manuel du merveilleux
de la compagnie Système Castafiore et
Labyrinthe de Marion Coutris, qui partagent la particularité de présenter à la fois
des propositions artistiques qui sortent de
l’ordinaire et qui sont le fruit d’un travail
en commun entre des artistes français et
chinois. La narration du Manuel du merveilleux, spectacle entre danse et théâtre,
sera assurée par un comédien du théâtre
national de Chine, Wu Xiaodong, qui a
travaillé son rôle en France avec le metteur
en scène et le comédien français dont il
reprendra le rôle en chinois. Le Manuel
du merveilleux sera présenté à Kunming,
Pékin et Shanghai. Dans Labyrinthe, ou
des comédiens chinois ont repris les rôles initialement tenus par des comédiens
français, les spectateurs seront invités à
évoluer et à se perdre dans les pièces d’un
labyrinthe.
Parmi les événements marquants, Sébastien Cavalier évoque aussi le « Caochangdi
PhotoSpring », pendant lequel une quinzaine de galeries de Caochangdi et ses environs accueilleront à Pékin les Rencontres
d’Arles, le plus grand festival international
de photographie. Du 17 avril au 21 avril,
parallèlement aux expositions, Caochangdi sera animé de conférences, de rencontres avec les photographes, de promenades
nocturnes lors des soirées de projection et
permettra aux jeunes photographes vivant
en Chine de se confronter à des experts
avec les portfolios reviews.
Dans le domaine des cultures urbaines,
Les Yamakasi, acrobates des temps modernes devenus très populaires parmi les
jeunes chinois sous le nom de « Pao Ku »
donneront libre cours à Pékin et Shanghai
à leur art du déplacement. Parmi les fidèles de Croisements, le festival « Piano aux
Jacobins » qui fête ses cinq ans de collaboration avec la Chine accueillera Bruno
Fontaine, David Kadouch et Tigran Hamasyan à Pékin, Shanghai et Gulangyu.
Enfin, en ce qui concerne les villes dans
lesquelles la France n’a pas de consulat,
des événements « coup de poing » ont été
mis en place, comme à Kunming où quatre événements seront présentés pendant
une semaine.
L’avenir de Croisements en Chine ? Sébastien Cavalier le voit plutôt en rose. Au-delà
d’une conception de la culture comme élément obligé du « soft power », les municipalités chinoises l’envisagent aussi de plus
en plus comme un facteur qui contribue
au dynamisme et à l’attractivité de leur
ville. A travers la Chine, les festivals culturels se développent et les pouvoirs locaux
observent avec beaucoup d’intérêt le savoir-faire français dans ce domaine. Pour
les industries culturelles françaises qui
souhaitent se développer en Chine, une
collaboration avec Croisements peut ainsi
représenter une bonne carte de visite pour
la mise en place de projets futurs.
© DR
Croisements 交流
L’aventure d’un chantier théâtral
franco-chinois avec des non-voyants
Des Chinois et des Français, voyants, mal-voyants et non-voyants
montent ensemble La Princesse Maleine de Materlinck.
En 2009, Hongdandan, une association
chinoise de malvoyants qui se consacre au
développement culturel, s’est associée au
metteur en scène Lin Zhaohua pour créer
Les aveugles de Maeterlinck. En 2010, du
26 juillet au 15 août, à Pékin, Hongdandan, avec le metteur en scène J-C Blondel
(de la Compagnie Divine Comédie qui
a joué en Chine dans le cadre du festival
Croisements 2009 Le Partage de midi de
Claudel) créent La Princesse Maleine de
Maeterlinck.
La pièce sera aussi jouée à Pékin au Théâtre
National à partir du 15 octobre et partira
en tournée dans toute la Chine pour une
vingtaine de représentations.
Les thématiques de cet atelier théâtral rejoignent des valeurs d’entreprise : créativité, lien social, place du handicap, inter
culturalité, audace artistique…
EDF soutient déjà l’aventure de cet
Atelier. Vous pouvez y participer, promouvoir ce spectacle par un don f inancier (déductible des impôts) et en
nature, venir aux répétitions en août,
communiquer…
Contacts :
A Pékin : [email protected] et [email protected]
A Paris : [email protected].
•
w w w . hong da n da n . org
© DR
•
P au l i n e B a n de l i e r
当戏剧超越差异而结盟
Quand le théâtre fédère au-delà des différences… Le Partage de midi de Paul Claudel au CCF de Pékin en 2009, mis en scène par JeanChrsitophe Blondel. 2009年,保罗.克洛岱尔(Paul Claudel)的作品《正午的分割》在北京法国文化中心上演,
由让-克里斯托弗·布隆岱尔(Jean-Christophe Blondel)搬上舞台。
Connexions / mars 2010 145
读书
Lire
Les éditions Bleu de Chine, créées en 1994 par Geneviève
Imbot-Bichet pour publier des traductions de littérature
chinoise contemporaine, viennent d’être reprises par
Gallimard dont elles deviennent une collection. Cinq à
six titres sont prévus chaque année par Généviève ImbotBichet qui reste aux commandes. Voici les deux premiers
pour l’année 2010.
Lèvres de pêche, Par Cui Zi’en, Traduit du chinois par Sylvie Gentil, Editions
Gallimard/ Bleu de Chine,
19,95 euros
Il s’agit du premier roman traitant du
sujet de l’homosexualité en Chine populaire où la question est encore assez tabou — ce qui
est loin d’être le cas à Taiwan — malgré une ouverture
certaine, comme en témoignent les difficultés rencontrées par la diffusion de ce livre juste après sa publication. Le roman raconte le mal de vivre, les épreuves et les
pressions familiales et sociales — le mariage mixte par
exemple imposé par les parents — auxquelles sont soumis
les homosexuels chinois. Le personnage principal ici, un
médecin emprisonné pour avoir châtré son fils violoniste
homosexuel, n’a pas su y résister et sombre dans la honte
de la perte de la figure paternelle.
Un vol, Par Yu Jian, Traduit du chinois par Li Jinjia
et Sebastien Veg, Editions
Gallimard/ Bleu de Chine,
10,36 euros
Ce second texte adopte la
forme d’un long poème
narratif pour évoquer un voyage à la fois réel et symbolique. Yu Jian dans son avion traverse l’espace et le temps,
parle avec l’Himalaya et le poète anglais T.S. Eliot, tout
en se remémorant la Révolution et le maoïsme. Survolant
avec dédain les touristes chinois nouveaux riches arpentant les canaux d’Amsterdam, il entend rester dans les
hauteurs où se croisent et dialoguent « les hommes et les
dieux qui vivent en voisins ».
Au cœur de la Cité interdite, Par Reginald F. Johnston, Traduit de l’anglais par Christian Thimonier, Préface
d’Alan Peyrefitte, Edition Mercure de France, coll. Le temps
retrouvé, 392 pages, 7 euros
Reginald Johnston devient à partir de mars 1919 le pré-
146
Connexions / mars 2010
Par Laurent Ballouhey
cepteur ou le tuteur de Pu Yi, en fait le dernier empereur
de la dynastie des Qing. Au lendemain de la Révolution
de 1911, celui qui était encore considéré comme le Fils
du Ciel continuait de vivre dans la Cité interdite, privé
de tout pouvoir mais entouré d’une Cour et de serviteurs,
et bénéficiait de toutes les préséances liées à son rang.
Johnston qui vivait auprès de l’empereur jouissait lui aussi
de privilèges et d’un traitement de faveur, dû à sa qualité
exceptionnelle et rare pour un étranger de « dishi », précepteur impérial. Lorsqu’il entrait dans une salle où se
trouvait le jeune empereur, c’est ce dernier qui devait se
lever et attendre qu’il se soit assis, au contraire du « kotow », le prosternement que chacun devait à l’empereur
et dont le « dishi » était l’un des seuls dispensés. Ayant
commencé comme simple professeur d’anglais, Reginald
Johnston nous raconte les journées d’enseignement avec
Pu Yi, décrit ses traits de caractère, son intelligence et sa
curiosité pour la nouvelle vie politique de la République.
Il nous présente les scènes de la vie officielle comme de la
vie privée auxquelles il a assisté à titre de témoin ou parfois de participant. Il nous permet de suivre de l’intérieur
de la Cité interdite, les conflits de pouvoir, les rivalités
entre factions et entre personnalités politiques. Celles-ci
nous donnent à comprendre au plus près les causes de
la décadence qui accompagne et précipite la chute de la
dynastie mandchoue. Elles expliquent en même temps
comment toutes les velléités de transformation constitutionnelle de la monarchie qui agitaient la vie politique
de la Cour à l’époque étaient vouées à l’échec.
Histoire de la société chinoise
1949-2009, Par Tania Angeloff,
Ed. La Découverte, Coll. Repères,
126 pages, 9,5 euros
La société chinoise fascine et fait
peur, aujourd’hui comme hier, le
China bashing s’étant substitué
au « péril jaune ». Depuis 1949, elle a traversé des phases
diverses et souvent contradictoires, puisqu’elle a connu
l’arrivée des communistes au pouvoir, a construit une
économie socialiste d’Etat, a épousé le maoïsme et les
convulsions de la Révolution culturelle, avant d’entrer
avec Deng Xiaoping dans une ère de réformes et d’ouverture à la fois de l’économie et de la société.
A l’heure d’un libéralisme ouvertement capitaliste rechignant au maximum aux régulations intérieures et
internationales, elle vit une mutation socio-économique
作品赏析Vu de l’esprit
Par Sophie Lavergne
accélérée, tandis qu’officiellement elle entend conserver
un régime politique presque intact et veut rester « une
dictature démocratique du peuple ».
Comment la Chine est-elle parvenue malgré tout à accéder à la modernité en une période record ? Comment
un régime autoritaire peut-il organiser l’ouverture économique et sociale ? Entre ruptures et continuité, la société chinoise est ici abordée sous de multiples angles
qui rendent compte de sa diversité et ses contradictions :
l’éducation, le travail, la santé, les ethnies, les courants
migratoires, les relations hommes-femmes, la jeunesse, les
inégalités sociales et les nouveaux riches, enfin les mouvements de contestation.
Le découpage chronologique adéquat permet de bien
se repérer dans les soixante années mouvementées qu’a
connues cette société complexe. De nombreux encadrés
proposent des éclairages pertinents et fournissent des
données mises à jour sur des aspects peu connus de la
société chinoise. L’ensemble permet une meilleure compréhension de la direction qu’entend suivre ce pays en
pleine mutation, sans ignorer les obstacles qui peuvent
freiner ou entraver son élan.
Les ruses de la démocratie :
protester en Chine, Par Isabelle
Thireau et Hua Linshan
Ed. du Seuil, coll. L’ histoire immédiate, 450 pages, 22 euros
Un organisme spécial a été créé
en 1951 au tout début de la République populaire à l’initiative de Mao lui-même : il
s’agissait de l’ « Administration des lettres et visites ». Sa
mission devait être, anticipant sur les abus de pouvoir
dont pouvait se rendre coupable la bureaucratie communiste naissante, de répondre aux plaintes, protestations,
doléances des citoyens, notamment lorsqu’elles mettaient
en cause les fonctionnaires et les cadres du Parti communiste et de l’administration. Malgré les vicissitudes
et les manipulations dont il fut victime, cet organisme a
subsisté au fil des années pour devenir une « grosse machine », selon les auteurs, en tissant des liens et servant
de « boite aux lettres » dans tout le pays.
Les plaintes et doléances pouvaient s’exprimer par écrit
(les lettres) ou par oral (les visites) souvent itinérantes qui
poussaient les plaignants du village au district, de la capitale provinciale à Pékin au fil des échecs successifs pour
finir expulsés vers le pays natal sans résultat positif.
•••
Comment ne pas faire perdre la face à un Chinois.
Petit guide à l’usage de ceux qui travaillent avec la Chine
Anne-Laure Monfret
Dunod, 162 p, 14,9 euros
Tout ce que vous avez toujours voulu
savoir sur la “face”…
Ceux qui travaillent de près ou de loin
avec les Chinois savent que le terme de
“face” a un sens particulier et que “garder
la face” est crucial dans l’Empire du
milieu. Mais que signifie en profondeur
cette notion, comment ne pas “faire perdre la face” à ses
interlocuteurs ou comment leur en donner ?
Anne-Laure Monfret qui a vécu huit ans à Shanghai après
avoir travaillé comme conseil en Ressources Humaines,
propose une synthèse claire et pratique sur ce qui
constitue une embûche interculturelle, source de fréquents
malentendus.
Si pour un Occidental, la face est une notion d’abord
individuelle, synonyme d’orgeuil et surtout comprise
comme une blessure d’amour propre, en Chine, “la face est
d’abord une notion sociale, explique Anne-Laure Monfret.
Dans une société confucéenne, l’individu existe en tant que
membre d’un groupe, sa famille, son entreprise, sa région,
son pays… Si vous faites perdre la face à un Chinois, c’est
tout son groupe qui perd la face avec lui.”
Indissociable de la position sociale et de l’image de
l’individu, la notion de “face” rejoint celle de hiérarchie
et de relations dans le contexte professionnel. Celui qui
perd la face, perd sa position par rapport aux autres, ce
qui, dans une société très hiérarchisées où la réussite est
archi-valorisée, constitue un dénigrement suprême. Au sens
propre la face (mianzi ou lian) c’est le visage, perdre la face
équivaut donc à ne plus exister.
On comprend dès lors que “garder la face” soit une
nécéssité impérieuse qui légitime au besoin le sacrifice de
“l’efficacité” ou de la “vérité” si chères aux Occidentaux.
Ce qui est un “mensonge” aux yeux des uns, n’est souvent
qu’un moyen de sauver sa face pour l’autre.
A travers des témoignages et des anecdotes issus du monde
du travail et de la vie quotidienne, Anne-Laure Monfret
décrypte des réactions qui peuvent sembler inadéquates
et donne une mine de conseils pratiques, le tout sans
prétention et avec une bonne dose d’humour. Chaque
chapitre se termine par un test qui permet au lecteur à la
fois de s’évaluer et de refaire le point.
•
Connexions / mars 2010 147
读书
Lire
•••
On peut lire au travers de cette enquête sur la protestation populaire et citoyenne une histoire « en creux »
de la Chine contemporaine et c’est bien le fruit du travail,
inédit jusqu’ici dans le monde sinologique, de nos deux
auteurs qui ont examiné des centaines de lettres et se
sont confrontés sur le terrain à la pratique de ces visites.
Ils y puisent une histoire originale de la protestation en
même temps qu’un tableau de la réalité politique et sociale
de la Chine d’aujourd’hui. Ils estiment, avec un certain
optimisme teinté de réalisme, qu’un espace de parole et
de liberté d’expression a ainsi été ouvert au peuple par
cette « Administration des lettres et visites » née au cœur
même du système. Mais on peut aussi s’interroger sur
l’efficacité réelle de cet organisme puisque les pétitions
ne cessent de s’accumuler, pour atteindre aujourd’hui le
milliard soit presque autant que la population, et qu’il
semble ne pas avoir permis de faire changer les choses ni
même les mentalités, ce dont se plaignent les plaignants
dans la presse faute d’avoir été entendus ailleurs.
Chine ou Japon : quel leader pour l’Asie ?,
Par Claude Mayer , Presses de Sciences Po, 232
pages, 12 euros
Les effets de la crise financière accélèrent le
déplacement du centre de l’économie mondiale vers l’Asie.
Pékin et Tokyo se disputent l’autorité et
l’influence sur la région, avant de pouvoir parler de leadership, dans une compétition qui semble a priori inégale
et risque de renverser à terme les plateaux de la balance
et d’inverser les équilibres hérités de la fin de la Seconde
Guerre mondiale, grâce à la présence américaine. Assistera-t-on donc à la montée d’une Chine dynamique et
conquérante ? Le déclin annoncé comme inéluctable d’un
Japon sera-t-il confirmé ou infirmé ?
Face à cette vision d’un destin qui semble tout tracé,
l’auteur, fin connaisseur du Japon, analyse la légitimité
des deux termes de la comparaison et les chances des deux
puissances à revendiquer la suprématie économique et
stratégique dans les années à venir. Il situe cette évolution
dans le cadre plus large d’une Asie en voie d’intégration
où d’autres intervenants auront droit à la parole. Il propose les scénarios les plus probables.
Même si les Etats-Unis, puissance du Pacifique, continueront de jouer un rôle de premier plan dans cette évolution, il ne faut pas oublier que le destin de l’Europe se joue
aussi dans cette compétition entre Pékin et Tokyo, tandis
que s’ébauchent les contours d’une future communauté
asiatique où elle devra sans tarder trouver sa place, sous
peine d’en devenir absente.
•
148
Connexions / mars 2010
图书精选Coup de coeur
Par Laurent Ballouhey
Vies de Chinois illustres ou Mémoires Historiques.
par Sima Qian, Traduction, introduction et notes de
Jacques Pimpaneau, Editions You Feng ,
550 pages, 30 euros
Les Mémoires historiques (Shiji) de Sima
Qian sont considérés comme le plus
célèbre livre d’histoire chinois et un
des chefs-d’œuvres littéraires. Il a eu un
rôle prépondérant dans l’histoire de la
littérature. De nombreux passages figurent
dans les manuels de classe et sont connus
de tous les Chinois. Ils ont inspiré un grand
nombre de romans et de pièces de théâtre
qui sont la transposition d’épisodes repris de ces Mémoires
historiques. C’est dire à quel point ils contribuent encore
aujourd’hui à la construction de la mémoire collective des
Chinois depuis des siècles.
Certes Sima Qian n’est pas le premier historien chinois, comme
on l’entend dire parfois. Dès l’antiquité, les différents royaumes
indépendants faisaient noter les entretiens, les discours et les
événements importants, et des annalistes constituaient les
premières archives. Mais en 213 avant notre ère, sous l’empereur
Qin Shi Huangdi, le ministre Li Shi ordonna de détruire
tous les écrits, et Sima Qian, privé de tous ces documents, fut
contraint de recommencer à zéro son œuvre de réécriture de
l’Histoire.
Mais le grand mérite de Sima Qian se trouve dans la conception
générale de l’ouvrage et donc de l’histoire qu’il donne à
connaître. Il est bien le premier à avoir tenté une histoire
totale en adoptant plusieurs angles de vue successifs : celui
de l’histoire chronologique des rois, celui du rôle joué par les
seigneurs et personnages importants, celui des données sociales,
géographiques et culturelles qui transcendent le cours temporel,
et dans les biographies, celui d’un panorama des différents
types sociaux. Confucianiste et contemporain du début de
l’époque des lettrés, il a en même temps nourri une idée de la
société beaucoup plus large que celle qui avait prévalu jusquelà, et il nous donne à travers des exemples et des personnages
remarquablement choisis un tableau de la société qui va du
général et du souverain à l’assassin, du poète au bouffon et qui
inclut même les marginaux.
Tout en voulant poursuivre et approfondir l’œuvre de
Confucius, il développe sa propre conception de l’histoire. C’est
elle qui prévaudra en Chine dans la suite des siècles.
Il ne s’agit de dire et de transmettre exactement ce qui s’est
passé en s’approchant au plus près d’une vérité historique, mais
de consigner ce qui doit servir de leçon et être utile pour la
morale et la société. Il s’est confronté à cette question essentielle
pour lui comme pour Confucius : comment éviter la violence
dans la société.
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