Tourisme et changement climatique - Ministère de l`Environnement

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Tourisme et changement climatique - Ministère de l`Environnement
Publié par la
En collaboration avec le Ministère
de l’Equipement, de l’Aménagement du
Territoire et du Développement Durable
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts environnementaux
et socioéconomiques du changement climatique sur
les principales activités touristiques en Tunisie
Publié par Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH
Siège de la société : Bonn et Eschborn
Bureau de Tunis
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Email: [email protected]
Responsables
Anselm Duchrow (GIZ)
Ali Abaab (GIZ)
Auteurs
Marie Lootvoet (TEC), Jean-Paul Ceron (TEC),
Louise de Torcy (TEC), Norbert Trehoux (TEC),
Jean Medhi Chapoutot, Zied Ouelhazi, Prof. Latifa Henia, Dr. Bas Amelung
Mise à jour Janvier 2010
Photo
Firas Ben Khelifa
Conception couverture
i.Grafik
Le contenu de la présente publication relève de la responsabilité de la GIZ.
Mandaté par Ministère fédéral allemand de la Coopération
économique et du Développement (BMZ)
Institution partenaire
Ministère de l’Equipement, de l’Aménagement du
Territoire et du Développement Durable (Tunisie)
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Avant propos
Dans le cadre de la coopération tuniso-allemande, le Ministère de l’environnement et
du développement durable (MEDD) tunisien collabore avec la coopération technique
allemande (GTZ) dans l’exécution d’un projet relatif à la mise en œuvre de la
convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique (Projet CCC/GTZ).
Ce projet vise à renforcer les capacités d’action de la Tunisie dans le domaine du
changement climatique (CC) et s’articule autour de deux composantes :
•
la Vulnérabilité & et l’Adaptation au changement climatique (V&A), composante
concernée par la présente étude ;
•
le Mécanisme du Développement Propre (MDP).
Au niveau national, plusieurs activités en matière d’adaptation au changement
climatique sont en cours de réalisation, selon une approche sectorielle. A terme, il est
prévu de fusionner l’ensemble de ces stratégies sectorielles en vue d’élaborer une
stratégie nationale intégrée d’adaptation au changement climatique.
Le présent projet s’inscrit dans ce cadre et concerne l’élaboration d’une stratégie
d’adaptation au changement climatique du secteur touristique tunisien.
Il s’articule autour de trois phases :
•
phase 1 : évaluation des impacts environnementaux et socioéconomiques du
changement climatique sur les principales activités touristiques en Tunisie ;
•
phase 2 : proposition d’une stratégie d’adaptation du secteur touristique au
changement climatique;
•
phase 3 : élaboration d’un plan d’actions et de deux projets prioritaires.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Le présent rapport intermédiaire présente les résultats de la première phase de cette
étude.
Son premier chapitre expose la méthodologie déployée pour mener à bien les travaux
de cette première phase avec, notamment, les sources sollicitées pour réunir
l’information nécessaire.
Le second chapitre brosse le portrait synthétique du secteur touristique, insistant
particulièrement sur les caractéristiques qui vont induire des vulnérabilités aux effets du
changement climatique.
Le troisième chapitre rappelle les principaux résultats sur le climat de la Tunisie et les
projections climatiques pour le futur et détaille les impacts du tourisme sur le
changement climatique,
Le quatrième chapitre rappelle que le tourisme aussi contribue au changement
climatique et que la conjoncture internationale des politiques d’atténuation des
émissions de GES impactera également le secteur.
Le cinquième chapitre fait le point sur les approches du lien tourisme et changement
climatique et les expériences significatives à l’international.
Le sixième chapitre propose une synthèse des éléments précédents et souligne les
priorités pour ouvrir la réflexion vers les pistes d’adaptation du secteur.
Les travaux ont été menés par le cabinet TEC (Marie LOOTVOET, Jean-Paul CERON,
Louise de TORCY, Norbert TREHOUX) et ses partenaires : Jean Medhi CHAPOUTOT et
Zied OUELHAZI, experts indépendants du tourisme tunisien, le Pr. Latifa HENIA, docteur
en climatologie des Universités de Tunis et de Paris-La Sorbonne et le Dr. Bas AMELUNG,
Directeur de Amelung Advies.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Sommaire
AVANT PROPOS ...................................................................................................................... 2
TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX ........................................................................................... 8
ACRONYMES ......................................................................................................................... 10
RESUME DE LA PREMIERE PHASE........................................................................................... 11
1
INTRODUCTION ............................................................................................................... 17
1.1
LE CONTEXTE DE L’ETUDE ..........................................................................................................18
1.1.1
Quel lien entre tourisme et changement climatique ? .............................................. 18
1.1.1.1
Le tourisme contribue au changement climatique ............................................ 18
1.1.1.2
Les impacts du changement climatique dans les destinations touristiques ... 19
1.1.2
Une nécessaire adaptation du secteur ........................................................................ 20
1.2
LES OBJECTIFS ET RESULTATS ATTENDUS DE L’ETUDE ........................................................................21
1.3
METHODOLOGIE : L’ORGANISATION DES TRAVAUX DE LA PHASE 1 ..................................................23
1.3.1
Le lancement de l’étude ................................................................................................ 23
1.3.2
Une analyse documentaire préalable .......................................................................... 23
1.3.2.1
Les caractéristiques du secteur touristique tunisien............................................. 23
1.3.2.2
L’analyse de la littérature nationale et internationale........................................ 24
1.3.3
L’étude et l’approfondissement des données climatiques relatives à la
Tunisie 24
1.3.4
La consultation des acteurs tunisiens ............................................................................ 25
1.3.5
L’analyse et la restitution des résultats .......................................................................... 26
2 L’ANALYSE DES ACTIVITES TOURISTIQUES EN LIAISON AVEC LE CHANGEMENT
CLIMATIQUE .......................................................................................................................... 27
2.1
DEVELOPPEMENT ET PLACE (ECONOMIQUE ET SOCIALE) DU SECTEUR TOURISTIQUE EN TUNISIE ..............28
2.1.1
Un moteur pour l’économie tunisienne ........................................................................ 28
2.1.2
Une part essentielle des emplois… ................................................................................ 29
2.1.3
Et une participation aux finances locales .................................................................... 29
2.1.4
Les évolutions de la demande ....................................................................................... 29
2.2
LES CARACTERISTIQUES DU TOURISME TUNISIEN ET SA SENSIBILITE AUX PARAMETRES CLIMATIQUES ..........31
2.2.1
Les clientèles ...................................................................................................................... 31
2.2.1.1
Les européens ............................................................................................................ 31
2.2.1.2
Le tourisme maghrébin............................................................................................. 33
2.2.1.3
Les clientèles lointaines ............................................................................................ 35
2.2.1.4
Le tourisme domestique ........................................................................................... 35
2.2.2
Les caractéristiques de l’offre......................................................................................... 37
2.2.2.1
Un tourisme avant tout balnéaire........................................................................... 37
2.2.2.2
Le golf .......................................................................................................................... 39
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.2.2.3
La thalassothérapie................................................................................................... 40
2.2.2.4
Le tourisme culturel ................................................................................................... 41
2.2.2.5
L’écotourisme et le tourisme de découverte ....................................................... 42
2.2.2.6
Le tourisme saharien ................................................................................................. 43
2.2.2.7
La plaisance ............................................................................................................... 45
2.2.3
2.3
Commercialisation et communication ......................................................................... 46
CADRE INSTITUTIONNEL ET PLANIFICATION DU SECTEUR DU TOURISME ...............................................48
2.3.1
Organisation du secteur .................................................................................................. 48
2.3.2
Perspectives et évolution attendue du secteur du tourisme en Tunisie .................. 50
2.3.2.1
Les orientations de l’administration du tourisme .................................................. 50
2.3.2.2
2007-2011 : le XIème plan............................................................................................ 50
2.3.2.3
Le plan d’actions du Ministère du Tourisme.......................................................... 52
2.3.2.4
La stratégie touristique à 2016 ................................................................................ 52
2.4
LES LIENS AVEC LES AUTRES SECTEURS .........................................................................................53
2.5
MESURES (INSTITUTIONNELLE,
JURIDIQUE, FINANCIERES…) ET PROGRAMMES ENVIRONNEMENTAUX
DU SECTEUR TOURISTIQUE .......................................................................................................................54
2.5.1
Les outils de planification ................................................................................................ 55
2.5.1.1
L’aménagement du territoire .................................................................................. 55
2.5.1.2
Les zones touristiques et les plans d’aménagement touristique ....................... 55
2.5.1.3
La planification spécifique à l’écotourisme ......................................................... 56
2.5.2
Les espaces naturels protégés ....................................................................................... 56
2.5.3
En amont des projets ....................................................................................................... 57
2.5.3.1
Le code de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme ............................. 57
2.5.3.2
Les études d’impacts................................................................................................ 57
2.5.4
La conception et l’exploitation des hébergements ................................................... 58
2.5.4.1
Les normes des hébergements touristiques .......................................................... 58
2.5.4.2
Les lois et programmes sur l’eau ............................................................................. 58
2.5.4.3
La politique de réduction des consommations d’énergie ................................. 59
2.5.4.4
L’écolabel tunisien .................................................................................................... 60
2.5.5
L’aménagement des plages .......................................................................................... 61
2.5.5.1
Les plans d'occupation des plages ....................................................................... 61
2.5.5.2
Le label Pavillon Bleu ................................................................................................ 61
2.5.6
En synthèse ........................................................................................................................ 62
3 LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX ET SOCIO-ECONOMIQUES POTENTIELS DU
CHANGEMENT CLIMATIQUE SUR LES ACTIVITES TOURISTIQUES ......................................... 63
3.1
REMARQUE PRELIMINAIRE ........................................................................................................64
3.2
LA MISE EN ŒUVRE DE L’APPROCHE DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES EN TUNISIE .............................66
3.2.1
Les hypothèses de travail ................................................................................................ 66
3.2.1.1
Le choix du modèle .................................................................................................. 66
3.2.1.2
Le choix des échéances .......................................................................................... 68
3.2.1.3
Le choix des scénarios .............................................................................................. 68
3.2.2
L’étude du climat et de ses évolutions en Tunisie ....................................................... 70
3.2.2.1
Caractéristiques générales du climat de la Tunisie ............................................. 70
3.2.2.2
Evolution récente observée du climat de la Tunisie ............................................ 74
3.2.2.3
Les avenirs climatiques possibles pour la Tunisie .................................................. 76
3.2.3
Le niveau de la mer ......................................................................................................... 78
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.2.3.1
Le niveau actuel de la mer en hausse en Tunisie ................................................ 78
3.2.3.2
La hausse accélérée du niveau de la mer dans la perspective du
changement climatique ............................................................................................................ 78
3.3
LES IMPACTS DIRECTS DES EFFETS CLIMATIQUES SUR LE TOURISME .....................................................81
3.3.1
Le potentiel climato-touristique...................................................................................... 82
3.3.2
L’indice de potentiel climato-touristique journalier (IPCTJ) pour la Tunisie ............. 83
3.3.2.1
Cadrage méthodologique...................................................................................... 83
3.3.2.2
Données et résultats spécifiques à la présente étude ........................................ 86
3.3.2.3
Les conditions climato-touristiques actuelles ........................................................ 87
3.3.2.4
Les caractéristiques du potentiel climato-touristique actuel ............................. 90
3.3.2.5
Le potentiel climato-balnéaire ............................................................................... 93
3.3.2.6
Les tendances récentes ........................................................................................... 94
3.3.3
Les effets possibles du changement climatique sur le potentiel climatotouristique de la Tunisie ................................................................................................................... 96
3.3.3.1
L’évolution du potentiel climato-touristique à l’échelle annuelle .................... 96
3.3.3.2
L’impact possible du changement climatique sur les activités balnéaires ...100
3.3.3.3
Les impacts potentiels sur l’activité touristique ..................................................102
3.3.4
3.4
LES IMPACTS SUR LES RESSOURCES TOURISTIQUES ........................................................................106
3.4.1
Le littoral et les plages....................................................................................................106
3.4.1.1
La vulnérabilité du littoral tunisien.........................................................................107
3.4.1.2
Un risque réel pour le tourisme tunisien ................................................................109
3.4.2
La ressource en eau .......................................................................................................114
3.4.2.1
Un pays déjà pauvre en eau et une ressource amenée à diminuer .............114
3.4.2.2
Les conséquences potentielles pour le tourisme ...............................................115
3.4.3
L’approvisionnement alimentaire ................................................................................118
3.4.4
La biodiversité, les écosystèmes et les paysages ......................................................119
3.4.4.1
La biodiversité ..........................................................................................................119
3.4.4.2
Les paysages ............................................................................................................120
3.5
4
La sécurité sanitaire des touristes : risques et santé ..................................................104
LES COUTS ASSOCIES AUX IMPACTS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE ...............................................121
3.5.1
Les sources potentiels de coûts du changement climatique .................................121
3.5.2
Les limites de l’étude des coûts....................................................................................122
3.5.3
Les coûts liés à la dégradation environnementale du littoral .................................122
3.5.3.1
Les coûts directs de la dégradation environnementale ..................................122
3.5.3.2
Les impacts sociaux et économiques sur le secteur touristique ......................123
LA CONJONCTURE INTERNATIONALE ET SES IMPACTS SUR LE TOURISME TUNISIEN . 127
4.1
LA CONTRIBUTION DE LA TUNISIE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE...................................................128
4.1.1
L’évaluation des émissions tunisiennes........................................................................128
4.1.2
La politique de réduction des émissions .....................................................................129
4.2
LA CONJONCTURE INTERNATIONALE : LE FUTUR DE LA CONTRAINTE CARBONE .................................130
4.2.1
Des objectifs de réduction des émissions ...................................................................130
4.2.2
Les conséquences pour le secteur de l’aérien..........................................................132
4.2.2.1
Vers une régulation internationale des émissions de l’aérien ..........................132
4.2.2.2
La sensibilité du transport aérien à la hausse du prix du carburant et à
l’instauration d’un prix du carbone ........................................................................................133
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
4.2.3
Une préparation à l’adaptation au changement climatique est
incontournable ..............................................................................................................................134
4.3
LES IMPACTS INDIRECTS DES POLITIQUES D’ATTENUATION SUR LE TOURISME TUNISIEN .........................135
4.3.1
Le transport aérien .........................................................................................................135
4.3.2
Les transports internes ....................................................................................................137
4.3.3
La consommation d’énergie des hébergements touristiques ................................138
4.4
LES IMPACTS GENERAUX DU CHANGEMENT CLIMATIQUE SUR LES SOCIETES......................................139
5 EXPERIENCES INTERNATIONALES SUR LA VULNERABILITE ET L’ADAPTATION DU
SECTEUR TOURISTIQUE......................................................................................................... 140
5.1
L’ADAPTATION, QUELLE APPROCHE INTERNATIONALE ? ...............................................................141
5.2
LES PRINCIPALES EXPERIENCES INTERNATIONALES .......................................................................143
6 SYNTHESE : VULNERABILITE, IMPACTS POTENTIELS ET IMPERATIF D’ADAPTATION
DU SECTEUR TOURISTIQUE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ............................................. 147
6.1
VULNERABILITE ET IMPACTS POTENTIELS : SYNTHESE .....................................................................148
6.1.1
Les caractéristiques du tourisme tunisien....................................................................148
6.1.2
Les impacts potentiels du changement climatique .................................................149
6.1.2.1
Les impacts climatiques directs ............................................................................149
6.1.2.2
Les impacts indirects sur les ressources via l’environnement ...........................150
6.1.2.3
Les impacts des politiques d’atténuation sur les déplacements
touristiques. .................................................................................................................................151
6.1.2.4
Les impacts généraux du changement climatique sur les sociétés. ..............151
6.1.2.5
Les coûts associés aux impacts du changement climatique ..........................151
6.2
LA PRISE DE CONSCIENCE DES ACTEURS TUNISIENS .....................................................................152
6.3
LA NECESSITE DE S’ADAPTER AU CHANGEMENT CLIMATIQUE .........................................................154
6.4
LES PRIORITES POUR L’ADAPTATION DU TOURISME TUNISIEN ..........................................................155
6.4.1
L’analyse FFOM ...............................................................................................................155
6.4.2
Vers une stratégie d’adaptation .................................................................................159
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 161
ANNEXE 1 : LES PERSONNES RENCONTREES DANS LE CADRE DE L’ETUDE ...................... 167
ANNEXE 2 : ETUDE DU CHANGEMENT CLIMATIQUE ET LE POTENTIEL CLIMATOTOURISTIQUE DE LA TUNISIE ................................................................................................ 170
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Table des figures et tableaux
Figure 1 : Projection des émissions CO2 à 2035 avec un scénario tendanciel/ “business as usual”
(excluant les excursionnistes) ..................................................................................................................... 19
Figure 2 : Répartition géographique des principaux effets du changement climatique sur les
destinations touristiques .............................................................................................................................. 20
Tableau 1 : Les chiffres clés du tourisme tunisien (1987-1997-2008) ..................................................... 28
Figure 3 : Part de marché des principales destinations méditerranéennes (hors UE) ...................... 30
Figure 4 : Évolution des nuitées des principaux marchés européens .................................................. 31
Figure 5 : Évolution des nuitées des marchés russe, tchèque et polonais .......................................... 32
Tableau 2 : Recettes touristiques par marché européen - 2008 .......................................................... 32
Tableau 3 : Part des arrivées internationales par mode de transport (en %)..................................... 33
Tableau 4 : Évolution de la demande maghrébine1998-2008 ............................................................. 33
Figure 6 : Répartition de l'hébergement par motivation en 2008 ........................................................ 37
Tableau 5 : Réalisations des principales régions touristiques - 2008 ..................................................... 38
Tableau 6 : Évolution de la capacité moyenne en lits .......................................................................... 38
Tableau 7 : Irrigation des parcours de golf - 2006 .................................................................................. 40
Figure 7 : Anomalies de température des régions du Sud de l'Europe et de la Méditerranée SEM
........................................................................................................................................................................ 67
Figure 8 : Evolution des précipitations selon les modèles ...................................................................... 68
Figure 9 : Température maximale moyenne du mois d’août ............................................................... 71
Figure 10 : Température minimale moyenne de janvier ........................................................................ 71
Figure 11 : Carte des régions climatiques ................................................................................................ 74
Figure 12 : Evolution de la température à Kairouan .............................................................................. 75
Figure 13 : Evolution du nombre annuel des jours caniculaires............................................................ 75
Figure 14 : Evolution de la température moyenne en Tunisie selon les scénarios ............................. 76
Tableau 8 : Evolution prévue de la température et des précipitations en Tunisie ............................ 76
Figure 15 : Projection de l’évolution de la température en °C selon le scénario A2 ........................ 77
Figure 16 : Projection de l’évolution des précipitations (en %) selon le scénario A2 ........................ 77
Figure 17 : Elévation du niveau de la mer selon le RSSE ........................................................................ 79
Tableau 9 : Les scénarios de l’évolution de la température et du niveau de la mer en Tunisie .... 79
Figure 18 : Quelques effets attendus du changement climatique sur les destinations touristiques
méditerranéennes ....................................................................................................................................... 81
Tableau 10 : Classes d'ambiances thermiques journalières (ATJ) selon les valeurs de l'IAT ............. 84
Tableau 11 : Les classes de l’IPCTJ ............................................................................................................ 85
Figure 19 : Quelques scénarios du GIEC .................................................................................................. 86
Tableau 12 : Fréquence des types d'ambiances thermiques (% du nombre total des jours de
l'année).......................................................................................................................................................... 87
Tableau 13 : Fréquence (% des jours) saisonnière des ambiances thermiques confortables à très
confortables.................................................................................................................................................. 88
Figure 20 : fréquence des phénomènes climatiques contraignants pour les activités de plein air
(% des relevés tri horaires du vent et en % des jours pour l’ensoleillement et la pluie.) ................... 89
Figure 21 : Fréquence annuelle (% des jours de l’année) des types d’ambiances climatotouristiques. ................................................................................................................................................... 90
Figure 22 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques défavorables et très
défavorables ................................................................................................................................................ 91
Figure 23 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques d’un confort moyen .................. 91
Figure 24 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques favorables ................................... 92
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 25 : Régime mensuel des potentiels climato-touristique très favorables ................................ 92
Figure 26 : fréquence annuelle (en % des jours de l’année) des ambiances climato-touristiques
balnéaires...................................................................................................................................................... 93
Figure 27 : Régime mensuel (en % du nombre total des jours du mois) des ambiances climato
touristiques balnéaires ................................................................................................................................. 94
Figure 28 : L’évolution de la fréquence des ambiances thermiques. ................................................. 95
Figure 29 : Evolution des ambiances climato touristiques défavorables (% des jours de l’année)
par rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et aux échéances
2030 et 2050. ................................................................................................................................................. 96
Figure 30 : Evolution des ambiances climato touristiques très favorables (% des jours de l’année)
par rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et aux échéances
2030 et 2050. ................................................................................................................................................. 97
Figure 31 : Evolution des ambiances climato touristiques favorables (% des jours de l’année) par
rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et aux échéances 2030 et
2050. ............................................................................................................................................................... 97
Figure 32 : Evolution saisonnière de la fréquence des jours à ambiances climato touristiques
défavorables ................................................................................................................................................ 98
Figure 33 : Evolution de la fréquence des jours très favorables ........................................................... 99
Figure 34 : Evolution du potentiel climato-balnéaire (en % des jours de l’année).......................... 100
Figure 35 : Evolution mensuelle de la fréquence des jours balnéaire (% des jours du mois.) ........ 101
Figure 36 : Evolution saisonnière de la fréquence du “balnéaire refuge” ....................................... 101
Figure 37 : Evolution saisonnière de la fréquence du “balnéaire favorable” .................................. 102
Tableau 14 : Les types de côtes par secteur côtier (en % du total du pays) ................................... 107
Tableau 15 : Répartition des plages sur la côte tunisienne ................................................................. 108
Tableau 16 : Linéaire des plages par zone touristique .........................................................................108
Tableau 17 : Retrait de la côte avec une EANM de 50 cm. ............................................................... 113
Figure 38 : Volume d'eau consommé par le secteur touristique (Millions de m3)........................... 116
Figure 39 : Consommation spécifique (litre/jour/lit) et Taux d'occupation (%) ............................... 117
Tableau 18 : Méthode d’estimation des coûts des impacts socio-économiques .......................... 124
Tableau 19 : La valeur du capital productif dégradé suite à une EANM......................................... 124
Tableau 20 : Perte du capital productif suite à l’EANM (en MDT et par gouvernorat côtier) ....... 125
Tableau 21 : Pertes de production occasionnées par une EANM de 50 cm................................... 125
Tableau 22 : Pertes des recettes touristiques (par zone), suite à une EANM de 50 cm.................. 125
Figure 40 : Evolution des émissions de GES par secteur .......................................................................129
Tableau 23 : Incidence du prix de la tonne de CO2 ............................................................................ 133
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Acronymes
ACC
AEP
AFD
AFT
AND
ANME
ANPE
APAL
APD
ATJ
BMNT
CC
CCNUCC
CNDD
CNT
CRT
DGAT
DGEDA
DGEQV
DGRE
DPM
EANM
FRAV
FRH
FTAV
FTH
GES
GIEC
GTZ
IAT
IE
IP
IPCTJ
IV
INM
INSTM
IPCT
MARH
MEAT
MEDD
MSP
MT
OMT
ONTT
OTEDD
PAU
PNUE
RSSE
SHO
SRES
THI
TO
URCE
Etude « Stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des
écosystèmes aux changements climatiques » MARH et GTZ 2007
Approvisionnement en eau potable
Agence française de développement
Agence foncière touristique
Autorité nationale désignée du mécanisme pour le développement propre
Agence nationale pour la maîtrise de l'énergie
Agence nationale de protection de l’environnement
Agence de protection et d’aménagement du littoral.
Aide publique au développement
Ambiances thermiques journalières
Bureau de mise à niveau du tourisme
Changement climatique
Convention cadre des nations unies sur les changements climatiques
Commission nationale du développement durable
Centre national de télédétection
Commissaire régional au tourisme
Direction générale de l'aménagement du territoire
Direction générale des études et du développement agricole
Direction générale de l'environnement et de la qualité de vie
Direction générale des ressources en eau
Domaine public maritime
Elévation accélérée du niveau de la mer
Fédération régionale des agents de voyage
Fédération régionale de l'hôtellerie
Fédération nationale des agents de voyage
Fédération nationale de l'hôtellerie
Gaz à effet de serre
Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’évolution du climat
La coopération technique allemande
Indice d’ambiance thermique
Indice d'ensoleillement
Indice de précipitation
Indice de potentiel climato touristique journalier
Indice du vent
Institut national de la météorologie
Institut national des sciences et technologies de la mer
Indice du potentiel climato touristique
Ministère de l’agriculture et des ressources hydrauliques
Ministère de l’équipement et de l’aménagement du territoire
Ministère de l’environnement et du développement durable
Ministère de la santé publique
Ministère du tourisme
Organisation mondiale du tourisme
Office national du tourisme tunisien
Observatoire tunisien de l’environnement et du développement durable
Plan d’aménagement urbain
Programme des nations unies pour l'environnement
Rapport spécial sur les scénarios d'émissions
Service hydrologique et océanographique de Tunisie
Special report on emission scenarios
Temperature-humidity index
Tour opérateur
Unité de réduction certifiée des émissions
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Résumé de la première phase
Cette étude vise à construire une meilleure compréhension des impacts possibles du
changement climatique sur l’activité touristique en Tunisie et de doter le secteur d’une
stratégie et d’un plan d’actions pour se préparer à faire face à ces évolutions. Elle vise
également à sensibiliser l’ensemble des acteurs du tourisme et à leur apporter des
éléments qui les aideront à comprendre les nouveaux enjeux du développement
touristique, les risques auxquels ils devront se préparer et les opportunités qu’ils pourront
saisir.
La première phase de l’étude concernait l’évaluation des impacts environnementaux
et socioéconomiques du changement climatique sur les principales activités
touristiques en Tunisie.
Un tourisme dépendant du climat estival et des évolutions du littoral
En réaction à la création d’un nombre de lits bien supérieure à la programmation
établie au début des années 1960, le gouvernement tunisien a mis en place, dans les
années 1970, une stratégie de développement touristique essentiellement balnéaire.
Au début des années 1990, la stratégie gouvernementale s’est orientée vers l’ouverture
de l’activité touristique à d’autres types de tourisme afin de passer d’une offre
quantitative à une offre plus qualitative (golf, casinos, thalasso mais aussi tourisme
saharien, culturel…). La mise en œuvre de cette vision a cependant pris du retard. La
volonté de changement semble s’affirmer actuellement pour aller vers un équilibre
entre les différentes régions (littorales et intérieures) et donc vers une diversification du
produit touristique tunisien. Si l’évolution des mentalités, tant des développeurs que des
touristes, demande du temps, le poids de l’image balnéaire du tourisme tunisien
contraint encore les démarches d’ouverture. Par ailleurs, cette dépendance au
balnéaire signifie une sensibilité particulière du tourisme tunisien au climat estival d’une
part, et à la montée du niveau de la mer et à l’érosion côtière d’autre part.
Et largement lié à l’accessibilité par le transport aérien
La relation du tourisme avec le secteur des transports nous paraît particulièrement
déterminante. Il a été amplement démontré que le transport de l’origine à la
destination est responsable de l’ordre de 75% de la contribution du tourisme au
réchauffement climatique. Des calculs spécifiques à la Tunisie montreraient sans aucun
doute une contribution plus forte en raison de la part de l’avion dans l’arrivée des
touristes internationaux, même si ces derniers en l’occurrence viennent de pays
européens qui ne sont pas si éloignés. On sait également que le transport est non
seulement le noyau dur de la dépendance au pétrole, mais également le secteur où
les perspectives de diminution des émissions sont les moins favorables à la fois en raison
de l’accroissement de la mobilité et de perspectives technologiques qui ne sont pas à
la hauteur des enjeux (en particulier pour l’aviation).
Des impacts potentiels du changement climatique
Plusieurs catégories d’impacts peuvent concerner la Tunisie :
•
des impacts climatiques directs à travers par exemple les températures ou les
précipitations, qui pourraient modifier les conditions d’attractivité des destinations.
A ce niveau on s’attend à un déplacement des conditions optimales vers des
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
latitudes et des altitudes plus élevées. Certaines destinations pourraient voire leur
position compétitive entamée, alors que d’autres (le Sud de l’Angleterre par
exemple) en bénéficieraient. Il n’est cependant pas évident de prévoir la
redistribution possible des flux, en raison d’un cumul d’incertitudes (niveau du
réchauffement global, modalités régionales et locales, exigences climatiques des
touristes). Globalement les facteurs climatiques directs ont plus un impact sur la
localisation des flux que sur leur volume.
Aujourd’hui, la Tunisie présente un potentiel plutôt élevé pour le tourisme d’un
point de vue purement météorologique, mais ce potentiel n’est pas exploité
aujourd’hui à son maximum pour des formes de tourisme alternatives au
balnéaire.
Pour la Tunisie, les impacts climatiques directs seront surtout marqués par une
hausse des températures et une diminution des précipitations. Les conséquences
sur le tourisme devraient entraîner une modification des saisons les plus propices
avec des étés devenus trop chauds dans la moitié sud et des intersaisons plus
favorables. Les régions du nord et les régions montagneuses devraient voir leurs
conditions climatiques s’améliorer pour le tourisme alors que les zones sahariennes
seront moins praticables.
Dans une perspective de changement climatique, le réchauffement des
températures ainsi que la diminution du nombre de jours de pluie devraient avoir
un impact significatif sur le potentiel climato touristique de la Tunisie et
notamment sur le tourisme balnéaire. Ces impacts pourront être contrastés selon
les saisons et les régions. Ces évolutions semblent tendre vers une distribution
saisonnière moins contrastée, plus plate, du potentiel climato-touristique et
balnéaire ainsi que vers une certaine convergence des conditions pour les 6
régions touristiques vers la fin de siècle, gommant sensiblement les disparités
régionales.
− La saison estivale devrait connaître une aggravation de l’inconfort du aux
fortes chaleurs et des canicules, la dégradation du répit nocturne, avec
l’accroissement des risques de coup de soleil et de coup de chaleur. Les
conditions du tourisme balnéaire restent très favorables par contre pour cette
saison. Ce type d’ambiance déborde même sur les saisons intermédiaires.
Comme nous l’avons vu, ces résultats sont sans doute à moduler compte tenu
des toutes dernières études disponibles.
− Les saisons intermédiaires connaîtront plutôt une amélioration de leur
potentiel, qu’il s’agisse du potentiel touristique en général ou balnéaire, avec
une augmentation du nombre des jours « balnéaires » et surtout du type
d’ambiances favorables aux corps fragiles (avril, mai, novembre) ;
− En hiver, les conditions climatiques s’améliorent sensiblement sur l’ensemble
du pays. Cela est particulièrement marqué dans le nord-ouest du pays et les
régions montagneuses où l’hiver est aujourd’hui une saison défavorable au
tourisme ;
− On constate également que les conditions pour les différentes régions
touristiques ont tendance à converger vers la fin de siècle, gommant les
disparités régionales. Les régions du sud subissent plus la dégradation des
conditions estivales avec des côtes qui conservent un potentiel balnéaire dit
« refuge » (on se baigne pour supporter la chaleur) et ce sont les régions
montagneuses et la côte nord qui ont le plus à gagner avec les évolutions
climatique en termes d’allongement de saison et de potentiel, notamment
pour des formes de tourisme alternatives.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
Les impacts indirects sur les ressources via l’environnement
Le tourisme est très dépendant des ressources environnementales locales. Par
conséquent, une grande diversité de changements environnementaux
consécutifs au CC pourraient avoir des effets marquants sur le tourisme : pertes de
biodiversité, baisse de la ressources en eau, perte de valeur esthétique des
paysages, changements dans les productions agricoles, élévation du niveau de la
mer, érosion du littoral et disparition des plages, risques naturels, impacts sanitaires
sont autant d’exemples. Ici encore les impacts pourraient être profonds et
entraîner une redistribution des flux, sans toutefois changer le niveau de la
demande globale.
Pour la Tunisie, les impacts indirects les plus importants seront incontestablement
liés au recul – voire la disparition – des plages, « matière première » incontournable
du produit balnéaire dominant. Le recul du trait de côte et le risque de
submersion menaceront également toutes les infrastructures touristiques
construites à proximité du littoral. Mais les tensions croissantes sur la ressource en
eau devraient également poser problème pour la consommation des hôtels,
notamment à travers les équipements les plus demandeurs et la qualité des eaux
de baignade. Les évolutions de la biodiversité et des paysages ne constituent
qu’un enjeu secondaire pour le tourisme tunisien.
•
Les impacts de la conjoncture internationale
Face aux conséquences du changement climatique, l’adaptation d’un secteur
d’activité ne peut être envisagée sans traiter également la question de
l’atténuation de ses émissions de gaz à effet de serre. Le tourisme contribue à
hauteur d’environ 5% aux émissions globales de CO2 dans le monde, notamment
par le transport aérien qu’il implique, et cette part est amenée à croître. Cette
tendance est confirmée en Tunisie où 64% des touristes arrivent en avion et la voie
aérienne représente plus de 95% pour les entrées des européens.
L’atteinte d’objectifs de réduction des émissions nécessiterait un considérable
effort pour les pays développés émetteurs de flux touristiques. Tous les secteurs
économiques et toutes les pratiques sociales (dont le tourisme) seront touchés et
aucun ne pourra s’exonérer d’un effort considérable. L’aviation internationale
(contrairement au transport aérien interne) n’a pas été prise en compte dans le
protocole de Kyoto mais un processus destiné à prendre la suite du protocole de
Kyoto est engagé, avec pour échéance la conférence de Copenhague fin 2009,
qui devrait concerner cette fois l’aérien. Or, face à la contrainte, les mécanismes
de compensation ou de souplesse (achat de permis d’émissions, MDP,
exemptions ou mesures transitoires pour des pays en voie de développement) ne
pourront que jouer à la marge, dans un contexte de concurrence exacerbée qui
ne pourra que faire monter les prix à un niveau qui n’aura rien à voir avec le prix
actuel de la tonne de carbone. Une crise du transport aérien paraît donc
inéluctable.
Pour la Tunisie, où la quasi-totalité des arrivées internationales (hors proximité) se
font par avion et où ce mode de transport fait l’objet d’investissements lourds, cet
impact est, à terme, une réelle menace. Cependant, la proximité des marchés
émetteurs laisse entrevoir des alternatives qui permettraient, mieux que d’autres
destinations exotiques lointaines, de maintenir la possibilité d’attirer les clientèles
européennes. Par ailleurs, le développement du tourisme domestique laisse
également une marge de manœuvre importante pour le secteur. La Tunisie a
déjà pris conscience de la nécessité d’atténuer ses émissions de CO2 et lancer
des programmes d’économie d’énergie et un écolabel qui s’applique
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
notamment à l’hôtellerie. Mais la question centrale reste aujourd’hui liée au poids
de l’aérien et des perspectives liées à la contrainte carbone sur cette activité.
Au-delà de la question des politiques d’atténuation, le changement climatique
devrait entraîner des risques pour l’économie et la stabilité politique, comme l’ont
montré le rapport Stern ou les travaux du GIEC. Dans ce contexte le budget
« vacances » des ménages risque évidemment de souffrir et la demande de
globalement diminuer. Pour la Tunisie comme pour toute autre destination, cet
impact est le plus difficile à évaluer. Les connaissances et les projections
manquent pour affiner cet exercice. Par ailleurs, on insiste fréquemment sur la
perspective que le changement climatique nuise plus aux pays du sud qu’à ceux
du nord et à l’intérieur des premiers aux couches défavorisées de la société avec
des conséquences en termes de sécurité et de stabilité politique.
La nécessité de s’adapter au changement climatique
L’Organisation Mondiale du Tourisme, à l’occasion de la conférence de Davos (PNUE,
2007) affirme qu’il est aujourd’hui absolument nécessaire de se préoccuper de
l’adaptation du secteur touristique aux conséquences du changement climatique. Si
l’on a pu constater par le passé (SRAS, attentats terroristes…) une capacité
d’adaptation du tourisme relativement meilleure que pour d’autres secteurs, on ne
peut néanmoins pas se passer d’une mobilisation de l’ensemble des acteurs et d’une
stratégie cohérente permettant à chacun de se projeter à long terme. Il ne s’agit pas
ici d’envisager des mesures ponctuelles et très localisées mais bien d’apporter une
vision de long terme des enjeux globaux et des incidences locales.
Pour répondre à ces enjeux, le secteur doit dès maintenant se doter d’une stratégie
d’adaptation, cadre global pour l’ensemble des acteurs du tourisme, des
administrations au secteur privé.
Les priorités pour l’adaptation du tourisme tunisien
Plusieurs enjeux prioritaires semblent émerger pour le tourisme tunisien. Sans préjuger
des moyens à mettre en œuvre et en se plaçant du seul point de vue des impacts du
changement climatique, il nous semble pouvoir dégager un certain nombre de
menaces et d’opportunités qui pourront guider la construction d’une stratégie
d’adaptation.
En préalable, il faut garder à l’esprit que l’une des conséquences du changement
climatique les moins aisées à cerner mais les plus probables, concerne, en Tunisie
comme
ailleurs,
la
stabilité
sociopolitique
des
pays.
Les
problèmes
d’approvisionnement alimentaire et d’accès à l’eau potable pèseront de plus en plus
fortement sur les populations et les structures sociales. Or les tensions sociales
découragent le tourisme. La Tunisie, où la stabilité rassure actuellement les touristes,
n’échappe pas à cette menace.
Par ailleurs, les menaces les plus préoccupantes sont liées :
•
au recul du trait de côte, aggravé par la hausse accélérée du niveau de la mer
avec :
− la perte ou la dégradation des plages, principale ressource touristique d’une
destination aujourd’hui essentiellement balnéaire ;
− la menace des infrastructures touristiques (hôtels, marinas, golfs) avec la
reprise par la mer des zones basses ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− mais surtout le risque croissant, pour les bien et les personnes, de submersion
marine liée à des évènements extrêmes (fortes marées, tempêtes). Ces
phénomènes soudains et incontrôlables ne laissent pas la place à une
adaptation progressive mais nécessitent une anticipation dès maintenant
pour limiter le risque ;
•
à l’élévation sensible des températures estivales et à l’augmentation des
phénomènes de « super canicule » avec :
− un risque de santé, en particulier pour les clientèles européennes moins
habituées à la chaleur ;
− une inadaptation de l’urbanisme des stations et des hébergements
touristiques. Les normes actuelles ne prennent pas suffisamment en compte
les très fortes chaleurs et la notion de construction ou d’urbanisme bioclimatique ;
− une offre d’activité inadaptée en termes d’horaires, d’aménagement des
sites, etc.
− une focalisation sur le tourisme estival qui pourrait devenir impraticable,
notamment dans la zone saharienne ;
•
à la baisse de la ressource en eau avec :
− des conséquences sur l’approvisionnement des hébergements et activités
touristiques ;
− une question sur le comportement des touristes et leur sensibilisation ;
− le risque de baisse de la qualité de l’eau, support des activités touristiques
(baignade, thalasso…) ;
•
aux impératifs d’économies d’énergie avec notamment une hausse des coûts
d’exploitation des entreprises touristiques et, là encore, une question sur la
sensibilisation des touristes sur les comportements responsables ;
•
à plus long terme, l’infléchissement de la demande des clientèles européennes
(diminution de la capacité à voyager et climat plus agréable sur le lieu de
résidence).
Les opportunités qui semblent les plus intéressantes reposent sur :
•
le développement d’une véritable offre à la fois alternative et complémentaire
au balnéaire, en particulier sur les thématiques Santé et Culture en dehors du
littoral. La Tunisie possède déjà des atouts certains pour mieux développer ces
thématiques qui sont moins sensibles aux paramètres climatiques, peuvent
permettre à la destination de se différencier dans un contexte de concurrence
méditerranéenne et peuvent générer une valeur ajoutée supérieure au tourisme
balnéaire banalisé ;
•
une organisation du secteur touristique permettant plus de souplesse dans la
structuration de l’offre et une plus grande autonomie dans la commercialisation,
avec une diminution de la dépendance aux TO étrangers, des modes de
coopération permettant de favoriser l’innovation et le développement d’offres
nouvelles ;
•
le développement d’une offre adaptée à la clientèle tunisienne et à la clientèle
maghrébine en termes de promotion et commercialisation, de tarification et de
produit ;
•
une nouvelle conception des hébergements touristiques et de l’urbanisme des
stations touristiques, plus proche des concepts et modes de vie méditerranéens
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
traditionnels. Cette idée permettrait à la fois de répondre de façon plus adaptée
aux impératifs climatiques tout en proposant aux clientèles étrangères un produit
plus spécifique à la Tunisie.
Enfin, la réflexion sur la question des transports, à la fois internes et externes, est
également cruciale mais dépasse le cadre du tourisme. Il s’agit d’un enjeu à
considérer dans un cadre très global, dans la perspective du réseautage des transports
autours de la Méditerranée (train) et de l’articulation avec les politiques de transport
de l’Europe. Dans une optique touristique et tunisienne, il semblerait néanmoins
intéressant d’inscrire à l’agenda des réflexions la valorisation du rail sur le territoire
national et la desserte par ferry depuis l’Europe.
Vers une stratégie d’adaptation
Cette analyse nous amène à identifier des grands dossiers prioritaires et transversaux
qui constitueront la trame de la future stratégie du tourisme tunisien :
− la gestion de la chaleur, notamment estivale ;
− la gestion de l’offre littorale face à l’élévation du niveau de la mer ;
− la gestion de l’eau douce ;
− la question des transports et de la mobilité.
Ces dossiers pourraient être formulés plus spécifiquement pour proposer des axes
stratégiques plus parlants pour les acteurs du tourisme tunisien :
− faire évoluer les composantes de l’offre pour prendre en compte les
modifications météorologiques ;
− réduire la dépendance au tourisme balnéaire ;
− réinventer un tourisme plus économe ;
− réduire la dépendance aérienne.
Pour chacun des grands axes identifiés, les différents types de stratégie d’adaptation
possibles seront analysés et évalués afin de proposer les orientations pour le secteur.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
1 Introduction
Cette introduction vise à présenter le cadre de l’étude « Tourisme et changement
climatique en Tunisie » en décrivant le contexte national et international dans lequel
elle s’inscrit (1.1), les objectifs assignés à ce projet (1.2) et enfin la méthodologie
employée pour mener à bien cette première phase (1.3).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
1.1 Le contexte de l’étude
1.1.1 Quel lien entre tourisme et changement climatique ?
1.1.1.1 Le tourisme contribue au changement climatique
La deuxième conférence mondiale sur le tourisme et le changement climatique qui
s’est tenue à Davos en septembre 2007 a été l’occasion de la première tentative
d’estimation1 des émissions de GES et du forçage radiatif au niveau mondial pour le
secteur touristique (UNWTO, UNEP et al. 2008).
L’ordre de grandeur de la contribution du tourisme aux émissions globales de CO2 est
de l’ordre de 5% du total mondial. Si l’on prend en compte le forçage radiatif,
méthode de mesure qui rend mieux compte des impacts spécifiques de l’aviation, la
fourchette est de 4,4% à 14,3% (si l’on inclut la contribution maximale des cirrus2 sur
laquelle pèse une très forte incertitude).
Si l’on décompose cette contribution, les transports de l’origine à la destination
représentent 75% de toutes les émissions de CO2 du tourisme alors que l’hébergement
rend compte de 21% et les activités de 4%. Pour le tourisme international, les voyages
par air causent 86% des émissions de CO2 (source OMT).
Des émissions qui vont augmenter
Alors que, dans d’autres secteurs, la tendance est à la stabilisation ou à la réduction
des émissions, le tourisme représente une part de plus en plus importante, en raison
notamment de l’accroissement du nombre de touristes, de l’augmentation de la part
des voyages longs courriers et enfin de l’accroissement de la fréquence de départ
(courts séjours), avec pour conséquence une augmentation des GES liées au tourisme,
et en particulier celle du transport aérien.
1 Cette évaluation inclut les émissions des allers et retours à la journée et considère les émissions du
transport, de l’hébergement et des activités liées au tourisme.
Les trainées des avions contribuent à la formation de cirrus (nuages), phénomène qui participe au
phénomène global d’effet de serre.
2
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 1 : Projection des émissions CO2 à 2035 avec un scénario tendanciel/ “business
as usual” (excluant les excursionnistes)
International (2005)
International (2035)
Domestic (developed world, 2005)
Air transport
Domestic (developed world, 2035)
Car transport
Other transport
Domestic (developing world, 2005)
Accommodation
Activities
Domestic (developing world, 2035)
0
500
1000
1500
CO2 emissions (Mton)
Source : (UNWTO, UNEP et al. 2008)
Le contexte dans le bassin Méditerranéen
En dix-sept ans, de 1988 à 2005, la part des arrivées internationales en avion en
Méditerranée est passée de 23 à 40%, représentant en volume respectivement 47 et
122 millions de touristes. Certains pays, notamment insulaires, sont quasi totalement
dépendants du transport aérien pour l’acheminement des touristes internationaux,
avec des taux d’arrivées par avion supérieurs à 90%.
Dans les pays du Sud et de l’Est, cette dépendance s’accroît dans la majorité des cas,
avec des taux d’arrivée par air en Israël, Égypte et Maroc atteignant respectivement
87%, 78% et 51% en 2005. Certains pays du Nord connaissent la même situation (73% en
Espagne par exemple). En Tunisie, ce sont 63% des touristes internationaux qui arrivent
aujourd’hui en avion et 95% des visiteurs européens. Les touristes de proximité, comme
les libyens et algériens qui arrivent actuellement en voiture, devraient bientôt bénéficier
de nouvelles lignes aériennes, accroissant ainsi les flux en direction de la Tunisie.
Selon les projections des arrivées internationales du Plan Bleu et si la part du transport
aérien reste constante, les touristes arrivant par avion pourraient être plus de 158
millions en 2025. Compte tenu du rôle du transport aérien dans les émissions de gaz à
effet de serre (GES), une telle évolution n’est clairement pas durable, surtout si l’on
considère les objectifs de réduction des GES liés à la lutte contre le changement
climatique.
1.1.1.2 Les impacts du changement climatique dans les destinations touristiques
La communauté internationale, tant scientifique que politique, reconnaît aujourd’hui le
changement climatique comme un risque croissant pour l’équilibre national et
international.
Les effets intégrés du changement climatique seront lourds de conséquence pour les
entreprises et les destinations touristiques. Il est important de noter que le changement
climatique aura des effets à la fois négatifs et positifs sur le secteur du tourisme et que
ces effets varieront considérablement selon les segments de marché et les régions
géographiques concernés.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 2 : Répartition géographique des principaux effets du changement climatique
sur les destinations touristiques
Source : OMT/ PNUE/ OMM, 2007
La figure 2 montre que le bassin méditerranéen, en tant que région touristique, est
particulièrement exposé à certains risques vers le milieu ou la fin du XXIème siècle :
hausse de températures estivales, raréfaction de l’eau, perte de biodiversité terrestre et
marine, augmentation des épidémies.
Cependant les évaluations réalisées par le GIEC restent très générales et nécessitent
des études plus précises localement avant de pouvoir évaluer les conséquences
possibles en termes d’effets économiques ou sociaux nets du changement climatique
sur le secteur du tourisme.
1.1.2 Une nécessaire adaptation du secteur
Si la question de l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre a longtemps
accaparé les discussions et les actions, il est aujourd'hui reconnu que les effets du
changement climatique se feront dans tous les cas ressentir et que toutes les sociétés
et les activités économiques devront aussi penser à s’adapter à ces évolutions. Les
destinations touristiques et leurs acteurs ne seront pas épargnés.
D’une façon générale, il semble que les touristes eux-mêmes ont la plus grande
capacité d’adaptation (choix de la destination, époque de leur voyage, choix des
activités…). Les acteurs socio-économiques (hébergeurs, communautés d’accueil,
voyagistes qui ont beaucoup investi dans des actifs immobiliers…) ont la capacité
d’adaptation la plus faible.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
La capacité de l’industrie touristique à faire face à une large gamme d’évènements
majeurs récents (SRAS3, attentats terroristes dans plusieurs pays, tsunami asiatique…),
permet cependant de considérer que la capacité d’adaptation de l’ensemble de ce
secteur est relativement élevée. Il semble que ce constat se confirme en Tunisie.
Expérience internationale
L’un des enseignements les plus importants tirés de l’ouragan Katrina et de l’hiver extrêmement
chaud de 2006-2007 dans les Alpes européennes est que les adaptations risquent de ne plus
suffire lorsque surviennent des phénomènes inattendus qui sortent du champ d’expérience du
secteur touristique. Ces phénomènes devraient être anticipés dans le cadre du changement
climatique ; il faut donc impérativement que le secteur du tourisme évalue l’efficacité des
adaptations actuelles dans des conditions climatiques projetées. À une époque où le climat
change dans le monde entier, il ne suffit plus de s’appuyer sur l’expérience passée. Les besoins
en informations indispensables à une adaptation efficace et anticipative au changement
climatique seront très importants et l’adaptation est par conséquent un domaine critique pour
les futurs travaux de recherche.
Source : OMT/ PNUE/ OMM, 2007
1.2 Les objectifs et résultats attendus de l’étude
Une stratégie d’adaptation par et pour les acteurs du tourisme en Tunisie
Cette étude vise à construire une meilleure compréhension des impacts possibles du
changement climatique sur l’activité touristique en Tunisie et à doter le secteur d’une
stratégie et d’un plan d’actions pour se préparer à faire face à ces évolutions. Elle vise
également à sensibiliser l’ensemble des acteurs du tourisme et à leur apporter des
éléments qui les aideront à comprendre les nouveaux enjeux du développement
touristique, les risques auxquels ils devront se préparer et les opportunités qu’ils pourront
saisir. Elle doit préfigurer des outils leur permettant de faire évoluer leur activité.
Les résultats de l’étude seront principalement utilisés :
•
par les différents ministères et institutions concernés (MEDD, Ministère du tourisme,
ONTT…) pour alimenter, voir infléchir, leurs politiques et stratégies ;
•
par les acteurs privés du tourisme pour anticiper les évolutions au sein de leur
activité et innover afin de rester compétitifs sur le marché international ;
•
par l’ensemble de ces acteurs pour travailler conjointement sur des actions
concrètes à court terme permettant une meilleure prise de conscience des
évolutions à venir et l’expérimentation de produits et de démarches pilotes.
Il est donc indispensable que l’ensemble de ces acteurs soit associé en amont à la
construction de la stratégie d’adaptation.
Syndrome Respiratoire Aigu Sévère, désigne l’épidémie mondiale de pneumopathie atypique
survenue en 2003
3
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Combiner adaptation et atténuation
Prenant en compte la vulnérabilité au changement climatique d’activités de tourisme
très liées aux caractéristiques environnementales locales, il faut envisager l’ensemble
des interrelations entre le tourisme et le changement climatique :
•
les effets du changement climatique sur les ressources climatiques et
environnementales du tourisme et des loisirs, problème dont les professions sont les
plus promptes à se saisir, puisqu’il les menace directement ;
•
la contribution du tourisme au changement climatique, en raison essentiellement
de son fort recours aux transports, contribution généralement passée sous silence ou
considérée comme une problématique « transport » plutôt que « tourisme », mais
dont les premières études montrent pourtant qu’elle est considérable et en
augmentation rapide ;
•
les effets possibles des politiques de lutte contre le changement climatique sur le
tourisme, qui devraient finalement influer plus rapidement sur le tourisme que des
évolutions climatiques encore difficiles à évaluer avec précision.
Cette étude vise donc à intégrer l’ensemble de ces thématiques, bien que la troisième
soit, selon les conventions en usage, exclue du champ de l’adaptation tel que défini
par le GIEC (Wilbanks, Romero Lankao et al. 2007).
En l’état actuel des connaissances scientifiques, les effets directs du changement
climatique sur les températures, les précipitations, les évènements extrêmes ou le
niveau de la mer sont encore entachés de fortes incertitudes quant à leur amplitude et
leur échéance, même si leur amplification à court terme est certaine. Il n’est donc pas
possible de proposer des évaluations certaines et fiables des impacts sur le secteur du
tourisme, en termes de coûts ou de modification des flux notamment. On peut
seulement envisager des impacts potentiels et identifier des vulnérabilités puis définir
des mécanismes de souplesses qui permettront de faire progresser la connaissance et
de réagir plus rapidement lorsque les impacts se préciseront.
Par contre, la lutte contre le changement climatique est déjà une préoccupation
majeure au niveau international et notre expérience des études d’impacts du
changement climatique nous persuade que les impacts les plus rapides risquent d’être
liés aux politiques d’atténuation menées à tous les niveaux (local, national,
international). En particulier dans le cas du tourisme tunisien, l’impact des politiques
internationales de lutte contre le changement climatique sur le transport aérien est une
donnée essentielle en raison des menaces qu’elle fait peser sur de la mobilité des
touristes, de la possible compensation financière des émissions liées aux vols
touristiques, de l’incitation à éviter les séjours touristiques de courte durée, de
l’incitation au tourisme de qualité au détriment du tourisme de masse, etc.).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
22/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
1.3 Méthodologie : l’organisation des travaux de la
phase 1
L’ensemble des outils et méthodes mobilisés pour la réalisation de la première phase
sont présentés ici. Pour chaque étape, les objectifs fixés, la méthodologie employée et
les résultats obtenus sont précisés. Les travaux s’appuient sur l’expertise des consultants
nationaux et internationaux mobilisés, tant sur le secteur touristique que sur le
changement climatique. Sur l’analyse des données, leur expertise a permis de
sélectionner les documents pertinents et d’en tirer l’information utile avec suffisamment
d’analyse critique. La diversité et la complémentarité des outils et l’expertise des
consultants ont permis d’atteindre les objectifs de cette phase.
1.3.1 Le lancement de l’étude
L’objectif de cette première étape de lancement était de cadrer les travaux avec les
principales parties prenantes du projet et appréhender les principaux enjeux de
l’étude.
Ce lancement a eu lieu les 15 et 16 juin 2009 à Tunis et s’est déroulé en trois étapes :
•
une réunion de travail entre le cabinet TEC les membres de la GTZ, destinée à
valider le cadre méthodologique du projet et son calendrier et collecter la
documentation disponible ;
•
une réunion de travail entre le cabinet TEC, la GTZ et l’ONTT, destinée à présenter
le projet, ses objectifs et son déroulement ;
•
la participation du cabinet TEC à la table ronde « Tourisme écologique : Réalités
et potentiels » organisée par le Ministère de l’Environnement et du
Développement Durable (DGEQV) le 16 juin au CITET, Tunis. Lors de cet atelier,
Mme KHAMASSI (ONTT) a présenté le contexte et les objectifs de l’élaboration de
la stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique au changement
climatique puis Mme LOOTVOET (TEC) à présenté la méthodologie et la
démarche pour l’élaboration de cette stratégie.
1.3.2 Une analyse documentaire préalable
L’objectif de cette étape était de collecter les données et informations documentaires
nécessaires à la réalisation de ce diagnostic. Cette étape documentaire était
nécessaire, avant tout processus de concertation, afin de préparer l’analyse à partir de
l’ensemble des travaux existants. Elle s’est organisée selon deux axes :
− l’analyse des caractéristiques du secteur touristique tunisien ;
− l’analyse de la littérature internationale concernant les impacts
changement climatique sur le tourisme et les mesures d’adaptation.
du
1.3.2.1 Les caractéristiques du secteur touristique tunisien
L’objectif de cette tâche était de dresser un état des lieux du tourisme tunisien centré
sur la question de la dépendance au climat. Il ne s’agit donc pas de dresser un état
des lieux exhaustif de ce secteur mais bien d’analyser les activités touristiques en
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
23/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
relation directe avec le changement climatique ainsi que le cadre institutionnel et
organisationnel de ce secteur.
La collecte de données et l’étude bibliographique ont particulièrement porté sur :
− les données et statistiques sur le tourisme tunisien : documents de stratégie et
de planification, rapports d’activité et compendium statistiques,
organigrammes, etc.
− diverses études sur le tourisme tunisien : études universitaires, rapports
d’études d’organisme et bureaux d’étude tunisiens, articles scientifiques, etc.
Toutes les sources de données utilisées sont citées dans la bibliographie annexée à ce
rapport.
Cette information a été traitée par l’équipe d’experts afin d’analyser le secteur
touristique en lien avec le changement climatique : la structure générale du secteur
touristique, les chiffres clés, l’organisation institutionnelle, les évolutions attendues au
regard de la planification et les orientations à long terme et, enfin, les vulnérabilités en
regard de l’élévation du niveau de la mer, des conditions climatiques et de l’utilisation
des ressources naturelle. Cette analyse a été réalisée pour le secteur touristique en
général, avec des approfondissements pour les thèmes suivants :
− le tourisme balnéaire ;
− le tourisme saharien ;
− le golf ;
− la thalassothérapie ;
− le tourisme culturel ;
− l’écotourisme.
− la plaisance ;
Cette analyse est restituée dans le chapitre 2 de ce rapport.
1.3.2.2 L’analyse de la littérature nationale et internationale
Une étude bibliographique des travaux réalisés à l’échelle de la Tunisie et à l’échelle
internationale a été réalisée. Elle porte sur l’évaluation des impacts du changement
climatique sur les activités touristiques et les mesures d’atténuation et d’adaptation au
changement climatique envisagées. L’ensemble des références bibliographiques est
présenté à la fin de ce rapport.
1.3.3 L’étude et l’approfondissement des données climatiques
relatives à la Tunisie
L’objectif de cette tâche était de collecter et analyser les travaux déjà réalisés en
termes de projections climatiques pour la Tunisie. Les termes de référence présent
projet ne prévoient pas de mener une nouvelle étude du climat tunisien et de ses
évolutions futures mais de s’appuyer sur les conclusions des travaux réalisés lors de
l’étude sur l’adaptation du secteur agricole : «Stratégie nationale d’adaptation de
l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques» (MARH et
GTZ 2007), dite étude ACC.
Le rapport de l’étude ACC a servi de base à la connaissance des évolutions
climatiques en Tunisie. Seuls les résultats présentés dans les rapports publiés
(intermédiaire et final) ont été utilisés.
Cependant, afin de compléter les données climatiques existantes, il nous a semblé
nécessaire de disposer de données climatiques plus directement pertinentes pour le
secteur touristique. Pour cela, des projections spécifiques à notre étude ont été
réalisées. Ces travaux ont consisté à :
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
24/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− identifier les paramètres climatiques qui intéressent le secteur du tourisme
(exemple : nombre de jours de pluie plutôt que cumul des précipitations) ;
− retraiter ces données pour créer des indices composites comme le TCI ;
− préparer des présentations attractives de ces éléments pour pouvoir
accompagner une consultation d’acteurs en Tunisie, et les faire réagir sur ces
données.
Ces travaux sont synthétisé en partie 3.2 de ce rapport et détaillés dans l’annexe 2.
1.3.4 La consultation des acteurs tunisiens
L’objectif de cette phase était de confronter et compléter le diagnostic réalisé à
travers des rencontres avec les acteurs tunisiens concernés par le tourisme. Il ne s’agit
pas à ce stade de réaliser une enquête détaillée et représentative mais de mener des
entretiens qualitatifs avec une diversité d’acteurs, dans une posture d’écoute plutôt
que de construction.
Les interlocuteurs visés représentaient à la fois l’administration et le secteur privé, les
acteurs du tourisme et les acteurs d’autres secteurs directement liés à la
problématique, des acteurs nationaux et des représentants régionaux. L’ambition de
cette série de rencontres n’était pas d’être exhaustive mais diversifiée.
Ces rencontres avaient pour but d’aborder les questions suivantes :
− de sentir le niveau de sensibilité des acteurs à la problématique du
changement climatique et leur perception de cet enjeu et de les sensibiliser
sur le sujet ;
− de collecter une information complémentaire (étude, données…) ;
− de discuter les impacts possibles des constats climatiques que nous
présentons sur l’activité touristique ;
− de tenter de recueillir des témoignages illustrant les impacts déjà observés des
phénomènes climatiques et sur leurs conséquences en termes de coût et
d’adaptation de l’activité touristique.
Ces rencontres ont pris plusieurs formes différentes :
− des entretiens en tête à tête. Ces rendez-vous ont été organisés soit par le
Ministère de l’Environnement et du Développement Durable (DGEQV), soit
directement par les consultants. Il s’agissait d’entretiens semi-directifs orientés
en fonction du type d’interlocuteur rencontré ;
− des réunions dans les différentes régions touristiques avec les commissaires
régionaux au tourisme et des représentants du secteur privé à travers leur
fédération et certains opérateurs locaux. Ces réunions ont été organisées par
l’ONTT. Pour chaque réunion, l’étude a été présentée, ainsi que la
problématique du changement climatique et du tourisme. Les consultants ont
exposé le type d’impacts attendus afin de faire réagir les participants.
Ces rencontres se sont déroulées du 28 septembre au 13 octobre 2009 en Tunisie. Elles
ont permis de rencontrer un total de 87 personnes, représentant plus de 30 organismes,
administrations et professionnels du tourisme. La liste des personnes rencontrées est
présentée en annexe à la fin de ce rapport.
Les expériences relatées par les acteurs rencontrées sont exposées dans le corps du
rapport sous forme d’encadrés comme illustration du propos. Une analyse globale du
ressenti des acteurs est exposée au chapitre 6.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
25/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
1.3.5 L’analyse et la restitution des résultats
L’objectif de cette dernière tâche était de compiler, analyser, synthétiser et restituer
l’ensemble des travaux décrits ci-dessus. Il ne s’agit pas d’exposer l’exhaustivité des
informations collectées lors cette première phase mais bien d’en proposer une synthèse
analytique destinée à préparer les travaux des phases suivantes.
A l’issue des étapes d’étude documentaire et de rencontres, les consultants ont mené
une analyse de l’ensemble de l’information collectée afin :
•
de mettre en perspective des vulnérabilités du tourisme tunisien avec les scénarios
climatiques
•
d’identifier les impacts potentiels du changement climatique sur le tourisme
− impacts environnementaux et socioéconomiques directs
− impacts liés à la conjoncture internationale
•
d’analyser la conjoncture internationale et ses impacts possibles. Il s’agira en
particulier d’analyser les impacts des politiques globales d’atténuation.
•
de proposer des pistes d’évaluation des coûts liés aux impacts du changement
climatique. Il est important de souligner à ce stade que le chiffrage des impacts
du changement climatique est un exercice extrêmement complexe pour lequel
la communauté internationale manque encore de méthodologie fiable. Il peut se
baser, en théorie sur plusieurs méthodes qui sont complémentaires :
− la bibliographie : il s’agit de répliquer (Benchmark) des exemples similaires au
cas de la Tunisie ;
− la modélisation économétrique : il s’agit de coupler des modèles climat/
fréquentation puis fréquentation/ impact économique (notamment par
l’intermédiaire des comptes satellites du tourisme) ;
− des entretiens avec des experts et personnalités qualifiés ;
− une consultation large d’acteurs.
En pratique ces méthodes doivent être adaptées à chaque contexte national. Dans le
cas de la Tunisie, l’absence de comptes satellites du tourisme (en cours d’élaboration
actuellement) ne permet pas une approche de modélisation économétrique. Ce sont
donc la bibliographie et la consultation des acteurs qui nous ont permis d’approcher
cette dimension.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
26/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2 L’analyse des activités touristiques en liaison
avec le changement climatique
Ce chapitre vise à présenter les grandes caractéristiques du tourisme tunisien, en se
focalisant sur les éléments qui peuvent constituer des atouts ou des vulnérabilités face
aux conséquences du changement climatique. Il rappelle tout d’abord le poids de
l’activité touristique en Tunisie (2.1), soulignant ainsi l’enjeu que représente la pérennité
de ce secteur économique. Il décrit ensuite les caractéristiques du secteur avec les
différentes composantes de la demande touristique puis de l’offre touristique déclinée
selon plusieurs thématiques (2.2). Les parties suivantes présentent le cadre
organisationnel du secteur (2.4), ses évolutions attendues (2.4) et ses liens avec les
autres secteurs dans le cadre de la prise en compte du changement climatique (2.5).
Enfin, la dernière partie fait l’inventaire des différents outils et mesures
environnementales qui l’appliquent au secteur touristique (2.6).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
27/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Identifié comme l’une des activités économiques les plus importantes dans le monde,
le tourisme joue en effet un rôle considérable en Tunisie. Comptant parmi les grandes
destinations touristiques du Sud de la Méditerranée, la Tunisie a accueilli en moyenne 5
millions de visiteurs par an entre 2000 et 2005. Les performances du tourisme sont
essentielles à son économie. Après avoir enregistré une croissance rapide entre les
années 1988 et 1995, ce secteur rencontre des difficultés, dans un contexte marqué
par le renforcement de la concurrence en Méditerranée.
2.1 Développement et place (économique et
sociale) du secteur touristique en Tunisie
2.1.1 Un moteur pour l’économie tunisienne
Différents chiffres reflètent de l’importance du secteur touristique pour l’économie
tunisienne, résumés dans le tableau ci-dessous.
Tableau 1 : Les chiffres clés du tourisme tunisien (1987-1997-2008)
1987
1997
2008
443
662
836
Capacité disponible en lit
100 456
178 176
238 495
Capacité mise en exploitation
86 496
154 829
197 780
Arrivées aux frontières des non-résidents
1 874 734
4 263 107
7 048 999
Arrivées aux frontières des européens
1 547 637
2 845 952
4 106 675
Arrivées aux frontières des maghrébins
265 057
1 281 298
2 779 859
Nuitées globales
18 556 793
29 795 812
38 112 352
Nuitées des non-résidents
17 515 741
27 684 239
35 048 653
Nuitées des résidents
1 041 052
2 111 573
3 063 699
Durée moyenne de séjour
9,3
6,5
5,0
Taux d'occupation (%)
58,8
52,7
52,7
550,2
1565,3
Valeur ajoutée (en millions de dinars)
x
x
1 917
Part du PIB
x
x
7%
77,0 %
60,1 %
50,6 %
x
x
17 %
63
360
253,6
40 182
71 300
95 398
x
x
286 194
Nombre d'hôtels
Recettes touristiques (en millions de dinars)
Taux de couverture du déficit commercial
Part des exportations
Investissements millions de dinars
Emplois directs
Emplois indirects
3077,3
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
28/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.1.2 Une part essentielle des emplois…
Les impacts sociaux du tourisme sur la croissance sont appréhendés à travers
l'indicateur essentiel, à savoir la création d'emplois. Depuis les années 1960, l'extension
de l'activité touristique a permis d'atténuer les tensions sociales et ce, en particulier
grâce aux emplois directs et indirects créés. D'année en année, la part du tourisme
dans le total de la création d'emplois en Tunisie, n'a fait qu'augmenter. Inférieure à 7%
de 1975 à 1984, elle est passée à plus de 8% de 1984 à 1994 et est actuellement de
l'ordre de 10%. Durant l'année 2007, 1556 emplois directs et 4667 emplois indirects
supplémentaires ont été générés par l'activité touristique4. On estime aujourd’hui à un
tunisien sur cinq le ratio d’emploi dans le secteur du tourisme.
2.1.3 Et une participation aux finances locales
Il existe un lien entre finances locales et développement touristique. En effet, l'activité
touristique est la plus productrice de fiscalités locales. En conséquence, le potentiel de
prélèvement touristique au niveau des municipalités, est une source de financement à
la réalisation d'équipements sur le territoire de ces mêmes municipalités.
Pour permettre une distribution équitable des revenus touristiques, sans pour autant que
l'État, déjà fortement engagé dans le volume des budgets locaux, y participe
directement, d'autres mesures ont été mises en place, comme les taxes et impôts5 au
niveau des municipalités.
Ces éléments de cadrage soulignent la place importante que tient le secteur du
tourisme en Tunisie et la nécessité d’anticiper les évolutions de cette activité dans la
perspective du changement climatique.
2.1.4 Les évolutions de la demande
Développée à partir des années 60, l’offre touristique a d’abord visé une clientèle
internationale de masse, basée pourtant sur une offre d’hébergement de qualité
supérieure à la moyenne méditerranéenne. Cette politique permettait de s’assurer des
entrées en devises avec des coûts raisonnables d’investissement par lit. Les trente
premières années6, cette stratégie a connu un grand succès résistant aux crises : chocs
pétroliers, changement de régime, guerre du Golfe, entre autre. Par la suite la
croissance s’est tassée, à un rythme annuel de 4,7% par an entre 1990 et 20007.
4 La projection des emplois engendrés par l'implantation touristique se base sur les normes suivantes, soit 1
lit touristique créé 0,40 emploi direct et 1 emploi direct génère 3,5 emplois indirects. En terme de type
d'emploi, et selon les normes admises, le taux moyen de postes d'encadrement du personnel de
commandement et du personnel "cadre moyen" est de 25 %; le taux d'encadrement pour le personnel de
base et de service est de 75%.
5 Loi n°75-34 du 14 mai 1975 a fixé le taux de la taxe hôtelière à 1% du chiffre d'affaires des établissements
touristiques.
6La croissance moyenne annuelle s’est élevée à 17 %. (La Tunisie et le marché euro-méditerranéen du
tourisme. Document de travail 7, AFD, septembre 2005).
7 Ibid.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
29/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Depuis, le modèle tunisien laisse apparaître des faiblesses face à une concurrence
accrue8, et perd des parts de marché par rapport aux destinations méditerranéennes,
ces faiblesses étant davantage d’ordre structurel que conjoncturel. Selon l’étude
menée en 2005 par l’AFD9, en dépit d’une compétitivité-prix remarquable et d’une
augmentation de la fréquentation, la part de marché de la Tunisie dans le tourisme au
Sud de la Méditerranée diminue.
Figure 3 : Part de marché des principales destinations méditerranéennes (hors UE)
Sur cette période encore, il faut relever la bonne résistance de l’activité touristique aux
différents évènements conjoncturels : attentats du 11 septembre (2001), attentat de
Djerba (2002), crise internationale. La relative proximité des marchés émetteurs, l’image
sure de ce pays et le potentiel représenté par le tourisme domestique pourraient
contribuer à expliquer cette résistance et constituer autant d’atouts pour l’adaptation
aux impacts du changement climatique
Depuis 3 ans, les arrivées augmentent à nouveau, avec en même temps une
diminution de la durée des séjours. Les recettes et les emplois sont également tournés à
la hausse sur ces trois années.
En 2008, le nombre de visiteurs a dépassé les 7 millions, réalisant un total de plus de 38
millions de nuitées, soit 5 nuitées par voyageur en moyenne. Le taux d’occupation
annuel moyen s’est élevé à 52,7% en 2008. Les recettes touristiques, quant à elles,
atteignent près de 1 885 millions d’euros, avec une hausse des dépenses moyennes par
touriste et par nuitée10.
Aujourd’hui, deux types de tourisme coexistent :
− un tourisme hôtelier, pratiquement sédentaire, pour les marchés européens
qui utilisent les transports aériens ;
− un tourisme de plus grande mobilité pour les marchés maghrébins.
8 Parmi les destinations de la Méditerranée (hors UE), la part de marché de la Tunisie est passée de 20 % en
1994 à 14 % dix ans plus tard. (La Tunisie et le marché euro-méditerranéen du tourisme. Document de
travail 7, AFD, septembre 2005, p11).
9 Ibid.
10 687 dinars par visiteur européen en 2008 (soit 380€ par séjour), Le tourisme tunisien en chiffres 2008, p15.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
30/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.2 Les caractéristiques du tourisme tunisien11 et sa
sensibilité aux paramètres climatiques
2.2.1 Les clientèles
2.2.1.1 Les européens
Les marchés européens, qui représentent 93% des nuitées des non-résidents, ont évolué
depuis le début des années 2000. Le marché français conserve sa première place avec
plus de 9,2 millions de nuitées suivie de l’Allemagne (6,1 millions), l’Italie (3 millions), la
Grande-Bretagne (2,5 millions) et la Belgique (1,6 millions) en 200812.
Figure 4 : Évolution des nuitées des principaux marchés européens
12 000 000
10 000 000
8 000 000
2000
2004
2007
6 000 000
4 000 000
2 000 000
0
Français
Allemand
Italiens
Anglais
Belges
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
Si les marchés italien et anglais stagnent, le marché allemand est désormais loin de ses
positions de l'année 2000 ; seul le marché français progresse.
De nouveaux marchés sont apparus permettant une croissance des nuitées. Ainsi, les
plus fortes progressions ont été enregistrées par les marchés roumain (143%), russe
(21%), bulgare (21%), hongrois (20%), slovaque (11%) et polonais (10%) qui ont contribué
à près de 50% de l’augmentation des nuitées totales.
11
Sauf indication contraire, tous les chiffres ont pour source : ONTT, Le tourisme tunisien en chiffres 2008
12
En nuitées hôtelières.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 5 : Évolution des nuitées des marchés russe, tchèque et polonais
1 800 000
1 600 000
1 400 000
1 200 000
1 000 000
2000
2004
2007
800 000
600 000
400 000
200 000
0
Russe
Tchèque
Polonais
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
Il y a 15 ans, en 1994, ces trois marchés ne représentaient que 1,5% des nuitées des
européens ; en 2008, 14,7%. C'est dire la place qu'ils occupent dans le tourisme tunisien,
avec, dans une moindre mesure, les marchés roumains, hongrois, bulgares et slovaque.
Par contre, en termes de durée de séjour et de recette touristique, ces trois marchés
n'ont en aucun cas remplacé le marché allemand. En effet, si la durée de séjour des
marchés russe avec 7,7 jours, tchèque avec 8,1 jours et polonais avec 7,3 jours est
supérieure à la moyenne des européens, 6,8 jours, elle reste toutefois inférieure à celle
du marché allemand, 9,6 jours. Il en est de même au niveau des recettes.
Tableau 2 : Recettes touristiques par marché européen - 2008
Pays
Recettes touristiques (Millions de DT)
France
875,6
Allemagne
542,3
Grande Bretagne
223,8
Italie
277,9
Belgique
137,4
Pologne
108
Tchéquie
77,4
Russie
108,6
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
D’une façon générale, la fréquentation des clientèles européennes est caractérisée
par une saisonnalité marquée : deux tiers des visites ont lieu entre les mois de juin et
octobre. Cette fréquentation estivale et l’origine géographique de ces clientèles
européennes laissent penser qu’elles sont sensibles au climat, recherchant soleil et
chaleur propices à la baignade mais peu habituées aux fortes chaleurs du sud
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
32/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Méditerranée. Par ailleurs, il faut aussi souligner que cette saisonnalité est fortement
contrainte par des facteurs sociaux (vacances scolaires, fermetures d’entreprises) qui
renforcent la sensibilité de ces marchés au climat estival. Enfin, les motifs de visites sont
quasi uniquement liés à l’agrément et au balnéaire, la fréquentation est donc très
sensible à la qualité de l’offre balnéaire.
Plus de 60% des entrées des non-résidents se font par air et 35% par voie terrestre.
Néanmoins, il y a lieu d'affiner ces résultats. En effet, la voie aérienne représente plus de
95% pour les entrées des européens, tandis que la voie terrestre représente 93% des
entrées des maghrébins. Ainsi, la relative diminution de l’aérien au profit du transport
routier est à imputer au développement du tourisme maghrébin.
Tableau 3 : Part des arrivées internationales par mode de transport (en %)
1964
1965
1968
2006
Aérien
X
58
74
63
Routier
41
32
X
35
Maritime
X
X
X
2
La part de vols charters est assez fluctuante. En 1971, 52% des passagers des aéroports
de Tunis–Carthage, Djerba–Mellita et Monastir–Skanès empruntaient des vols charters.
En 1972, 66% des touristes empruntant la voie aérienne, sont transportés par des
compagnies charters. Mais, il est difficile de donner des statistiques fiables. De
nombreux vols réguliers sont en partie des vols charters. En 1987, 57% des passagers,
passant par les 5 aéroports de Tunisie, empruntent des vols non réguliers. En 1997, cette
part était de 58%.
Compte tenu de ces éléments, on peut imaginer que les clientèles européennes sont
sensibles au prix de l’aérien. Cependant, ceci est à nuancer, comme nous le verrons
plus loin, par le mode de commercialisation au forfait qui permet d’absorber dans une
certaine mesure les variations de prix des vols. Par contre, il est possible de dire que ces
clientèles développent de plus en plus une conscience environnementale qui peut les
amener à réfléchir sur les impacts de leurs vacances et en faire un critère de décision.
Cette tendance commence à être sensible pour les clientèles d’Europe du Nord.
2.2.1.2 Le tourisme maghrébin
Les maghrébins, avec 39,4% des arrivées aux frontières, représentent la seconde région
d’origine des touristes. Avec 1,8 millions d’arrivées, le marché libyen se situe en 1ère
position, devant les marchés français, 1,4 millions d’arrivées, et algérien, 0,97 millions
d’arrivées.
Tableau 4 : Évolution de la demande maghrébine1998-2008
Arrivées aux
frontières
Arrivées dans les
Hôtels
Nuitées
Durée de séjour
hôtelier
1998
Marocains
45 111
28 144
64 297
2,3
Algériens
684 221
223 957
521 519
2,3
Libyens
834 473
154 232
262 250
1,7
2000
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
33/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Marocains
37 689
22 907
59 135
2,6
Algériens
611 620
195 578
437 757
2,2
Libyens
685 208
128 716
234 701
1,8
32 430
16 820
46 705
2,8
968 499
262 432
758 517
2,9
1 766 881
165 979
340 058
2,0
2008
Marocains
Algériens
Libyens
Source : ONTT, Le tourisme tunisien en chiffres 2008
Mais en termes d'arrivées dans les hôtels, la situation est tout à fait différente : ces
clientèles de proximité ne génèrent que peu de nuitées dans l’hôtellerie et préfèrent
généralement la location de meublés. En termes de durée de séjour à hôtel, les
marchés algériens, 2,9 jours, et libyens, 2 jours, sont très loin de la moyenne qui est de
6,3 jours. Finalement, ils totalisent environ 1,1 millions de nuitées en hébergement
marchand (3% des nuitées des non-résidents dans les hôtels) alors que le marché
national atteint les 3 millions. En termes de recettes touristiques, le marché libyen, avec
255,3 millions de dinars, se situe en 3ème position après les marchés français et allemand
et le marché algérien, 116 millions de dinars, en 6ème position.
Les arrivées aux frontières des clientèles libyennes ont progressé de 14,5% entre 2007 et
2008, tandis que les nuitées ont progressé de 19%. Il s'agit d'un tourisme de santé, de
famille, d'affaires mais également un tourisme ludique. Aujourd’hui, ces touristes arrivent
à 86% par voie terrestre mais la création de plusieurs lignes aériennes entre la Libye et la
Tunisie devraient bouleverser la donne dès 2010.
Le marché libyen se caractérise par un étalement réel de la fréquentation au long de
l’année. Ceci s’explique en partie par le motif du déplacement : le tourisme de santé
en majorité, ainsi que par sa proximité. Alors que les arrivées internationales varient de
300 000 en janvier à plus d’un million en août, celles des libyens oscillent entre 100 000
et 170 000 toute l’année.
Le marché libyen, compte tenu de la proximité mais également de la langue et des
traditions communes, est un marché solide pour la Tunisie. Il représente de réelles
opportunités dans l’optique du changement climatique car c’est un marché qui
apparaît peu sensible au climat et au prix de l’aérien. C’est d’autant plus vrai qu’il n’est
pas focalisé sur le produit balnéaire d’agrément mais sur d’autres types de produits et
de motifs, moins sensibles aux conséquences des évolutions climatiques. Cependant,
ce marché reste aujourd’hui peu organisé. Il s’agit essentiellement de voyage
individuel, de très courte durée et sa connaissance du produit touristique tunisien est
très limitée. Il offre ainsi une réelle marge de progrès en termes de revenus pour le
tourisme tunisien.
Certaines caractéristiques diffèrent pour le marché algérien, en particulier la
saisonnalité qui reste marquée avec 38,5% des arrivées aux frontières en juillet et août.
Les principales régions visitées sont Tunis, Cap bon, Sousse et naturellement Tabarka.
Cependant, il est important de noter que 60% des arrivées proviennent de l’est
algérien, laissant supposer que ces clientèles sont relativement captives aujourd’hui du
fait de leur proximité et de motifs familiaux et que ce marché reste fragile devant le
développement des infrastructures de transport et l’amélioration du pouvoir d’achat
des algériens. Même s’il est également insensible au climat et au prix de l’aérien, il ne
semble pas aussi solide que le marché libyen.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
34/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.2.1.3 Les clientèles lointaines
Les clientèles lointaines sont minoritaires en Tunisie :
•
Les arrivées des marchés américain et canadien ont progressé de 7,3 et 7,7%
entre 2007 et 2008. Concernant les nuitées, la hausse atteint 12,2%. En 2008, la
dépense des marchés américains progresse de 17% et atteint 34,6 millions de
dinars.
•
Les autres marchés lointains, Japon, Brésil, Chine et Australie, voient le nombre de
leurs arrivées diminuer entre 2007 et 2008 excepté l’Australie (+1,2%). Cependant,
le total des nuitées augmente fortement, hormis pour le marché japonais. Au
niveau des dépenses, les devises japonaises diminuent de 3,4% entre 2007 et 2008,
passant de 8,7 à 8,4 millions de dinars. Par contre, celles des autres pays
augmentent de plus de 20%, atteignant 11,1 millions de dinars en 2008.
En conclusion, le nombre de nuitées des marchés éloignés diminue entre 2007 et 2008,
passant de 941 000 à 936 000, tandis que la dépense quotidienne augmente
légèrement de 50 à 57 dinars. Ces marchés restent néanmoins confidentiels, comptant
pour seulement 2,45% du total des nuitées touristiques et ne justifient surement pas un
investissement marketing coûteux, qui pourrait être mieux rentabilisé sur d’autres cibles
(marché européen ou de proximité).
2.2.1.4 Le tourisme domestique
En 2008, les résidents ont atteint 1,3 millions d’arrivées dans les hôtels. Ils ont généré 3
millions de nuitées, soit 8% des nuitées globales, les plaçant au 3ème rang dans la
structure des nuitées globales, après les marchés français et allemand. La motivation
première est le balnéaire. La région de Hammamet-Nabeul (19%) reste la plus
fréquentée. Hammamet, relié par l'autoroute A1, est considéré comme la grande
banlieue de Tunis et totalise près de 600 000 nuitées. Les résidents qui fréquentent les
hôtels sont issus de catégories socioprofessionnelles élevées et la majorité fréquente
des établissements 4*.
Cependant, les nuitées hôtelières ne donnent qu’une indication très partielle de la
réalité du tourisme interne.
Une étude sur « Le marché touristique interne » a été réalisée en 2004 par le bureau
d'études ACC. Selon cette étude, le taux13 de départ du tunisien en vacances se situe
à hauteur de 59%. Plus de la moitié des nuitées sont passées en hébergement « non
marchand » (parents et amis). L’hébergement en résidences louées concerne environ
8% des séjours avec une durée moyenne de séjour de 12 nuitées (estimé à 8,1 millions
de nuitées). Ce marché est toutefois difficile à mesurer car il est peu structuré et les
tunisiens passent rarement par une agence immobilière pour la location de ces
résidences (environ 3% des cas). On prend conscience, à la vue de ces données, de
l’importance de ce marché pour la Tunisie.
La même étude permet également de mieux comprendre les caractéristiques de ce
marché. Il ressort que, comme pour les touristes internationaux, les flux de touristes
internes vers l’intérieur du pays sont faibles, restant plutôt concentrés sur la côte, et que
ces vacances ont lieu plutôt en été (75%). Neuf destinations touristiques
« traditionnelles » (le Grand Tunis, Sousse, Hammamet, Djerba, Nabeul, Bizerte, Tabarka-
13 Ce taux détermine le rapport entre le nombre d’enquêtés ayant affirmé avoir passé au moins une
nuitée en dehors de leur environnement habituel à des fins non liées à l’exercice d’une activité
rémunérée (loisirs, visite à des parents et amis, santé,…) et le nombre total d’enquêtés.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
35/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Aïn Draham, Mahdia et Monastir) accueillent environ 80% de l’ensemble des séjours et
vacances.
La voiture particulière occupe la première position dans le mode de transport le plus
utilisé (dans plus de 50% des vacances passées en 2004). Cependant, l’étude fait
ressortir les attentes des tunisiens sur une meilleure desserte des espaces de loisirs par les
transports en commun.
Le tourisme domestique mérite d’être considéré comme un réel atout dans la
perspective du changement climatique. Les tunisiens sont moins sensibles que les
européens au climat méditerranéen auquel ils sont habitué et ils ne sont pas
dépendant d’une desserte aérienne mais sont sensibles à l’offre de transport en
commun.
Dans les années 1970 et 1980, la demande nationale n'a pas été bien appréciée et ses
impacts n’ont pas été anticipés. Cependant, la situation évolue et plusieurs types de
mesure ont été pris :
•
pour le tourisme de proximité, des espaces réservés ont été affectés à l’usage de
vacanciers nationaux (plan d'occupation des plages, zones réservées au tourisme
intérieur sont en cours d'aménagement).
•
des modes d’hébergement marchand alternatifs se développent : hébergement
collectif, camping, maisons de jeunes ;
•
une politique de loisirs est mise en place avec des agences de voyages qui se
spécialisent dans le créneau national, afin de faire bénéficier les résidents des
tarifs groupes et une politique de réduction des prix pour le tourisme intérieur.
En synthèse
Le tableau suivant résume les éléments décrits dans les paragraphes qui précèdent sur la
sensibilité des différents types de clientèle aux paramètres qui pourront être affectés par le
changement climatique.
Paramètres
Européens
Maghrébins
Tunisiens
XXX
X
X
XX
XX
XX
XXX
XX
XX
X
X
X
Problèmes sanitaires
XX
X
X
Qualité des eaux de
baignade/Thalasso
X
X
X
XX
X
-
Chaleur
Intempéries
Montée des eaux/ érosion
Modification des écosystèmes
(moustiques, méduses, algues…)
Coût du transport aérien
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
36/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.2.2 Les caractéristiques de l’offre
Aujourd’hui l’offre tunisienne est principalement axée sur un tourisme balnéaire, enrichi
par des produits complémentaires : balnéothérapie, golf, sites archéologiques,
excursions dans le Sahara. Sur le plan quantitatif, on dénombre en 2008 :
− 836 établissements hôteliers totalisant 238 495 lits ;
− 358 restaurants touristiques ;
− 9 parcours de golf ;
− 6 ports de plaisance ;
− 474 agences de voyage.
2.2.2.1 Un tourisme avant tout balnéaire
Sauf dans les années 1960 au cours desquelles la région de Tunis comptabilisait le plus
grand nombre d'établissements, ce sont désormais les régions littorales qui en
dénombrent le plus. L’offre est aujourd’hui essentiellement concentrée sur un produit
balnéaire qui enregistre 92% des nuitées.
Figure 6 : Répartition de l'hébergement par motivation en 2008
100%
90%
Autres 8%
Autres 13%
Balnéaire
92%
Balnéaire
87%
Nuitées
Capacité
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
Plusieurs stations composent cette offre. La Tunisie compte en effet différentes régions
touristiques, de Tabarka-Aïn Draham au nord ouest à Jerba-Zarzis au sud en passant par
Tozeur au centre ouest, disposant de caractéristiques qui leur sont propres. La majorité
des nuitées est cependant concentrée sur la côte Est de la Tunisie. Les 6 régions
suivantes représentent plus de 68% des nuitées globales14.
14
Les 5 premières constituent des zones balnéaires et la 6ème, une zone saharienne.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
37/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Tableau 5 : Réalisations des principales régions touristiques - 2008
Régions
Arrivées
Nuitées
Taux
d'occupation
Nabeul Hammamet
746 322
6 538 815
51,1
Yasmine-Hammamet
417 348
3 117 691
54,8
Sousse-Kairouan
929 980
7 853 446
56,5
Monastir-Skanes
472 343
4 127 486
56,6
Djerba-Zarzis
1 315 549
9 706 873
60,0
Tozeur-Gafsa
663 481
1 093 697
33,5
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
Adapté au tourisme de masse européen
Il existe une forte adéquation entre l'offre hôtelière et le type de demande. La taille des
établissements répond, en effet, à la demande d'un tourisme de masse : plus de la
moitié de la capacité est concentrée dans des hôtels de 500 à 1000 lits.
Depuis les années 1970, la capacité moyenne des unités hôtelières a toujours
augmenté. Il est à noter que les établissements haut de gamme ont une capacité
moyenne en lits bien plus élevée. Ainsi, en 2007, la capacité moyenne en lits des hôtels
5* est de 475 lits ; des hôtels 4*, de 505 lits ; des hôtels 3*, de 353 lits.
Tableau 6 : Évolution de la capacité moyenne en lits
Années Capacité moyenne en lits
1969
158
1979
225
1989
231
1999
266
2008
285
Source : le Tourisme en chiffres, ONTT
Les principales vulnérabilités au changement climatique
D’une façon générale, l’offre touristique tunisienne est concernée par un certain
nombre de paramètres liés aux conditions climatiques. Ce lien peut constituer une
vulnérabilité, mais, comme nous le verrons, ce n’est pas toujours le cas.
Plusieurs points font du tourisme balnéaire une forme de tourisme particulièrement
vulnérable au changement climatique :
•
sa dépendance au rivage : la majeure partie de la capacité d’accueil 87% est
située sur le littoral. Ces infrastructures sont menacées par l’élévation rapide du
niveau de la mer avec un risque de submersion des infrastructures
particulièrement élevé pour certaines zones. L’érosion des plages est également
un problème, déjà constaté par nombre d’hôteliers, qui sera aggravé par les
conséquences du changement climatique. Ces vulnérabilités sont
particulièrement élevées face aux évènements extrêmes qui représentent un
réel risque pour les biens et les personnes, notamment en bord de mer
(tempêtes, fortes précipitations entrainant le débordement des oueds en
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
38/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
aval...) ;
•
sa dépendance au confort climatique : une activité de plein air qui dépend
forcément des conditions climatiques. A noter cependant que l’activité
purement balnéaire (baignade) ne semble que peu sensible au problème des
très fortes chaleurs. Cependant, au-delà du confort ce sont aussi les questions
de santé qui constituent une vulnérabilité en fonction des clientèles (sénior,
familles avec enfants en bas âge, européens du Nord…). Par ailleurs, les
hébergements touristiques actuels apparaissent vulnérables aux paramètres
climatiques à travers leurs coûts d’exploitation (dépense énergétique) car ce
sont souvent des constructions qui n’ont pas suffisamment pris en compte les
questions d’isolation et d’efficacité énergétique avec, notamment, un recours à
la climatisation à outrance ;
•
sa dépendance à la qualité et à la disponibilité de la ressource en eau : des pics
de demande en eau potable à une saison et dans des zones où elle se fait le
plus rare, des attentes en termes de qualité pour la pratique des activités
touristiques (baignade, thalasasso…), le besoin de proposer des espaces verts
de qualité en rapport avec la gamme des hébergements, une tarification déjà
peu favorable aux établissements touristiques.
•
la baignade en mer comme principale activité : la qualité des eaux marines en
zones côtières est essentielle à l’attractivité de l’offre balnéaire. Or, toute
altération de cette ressource (dépôts d’algues dans certaines zones, recul des
plages, multiplication de certaines espèces comme les goélands, les méduses
ou les moustiques), altérations déjà constatées, représente un réel risque pour
cette attractivité.
2.2.2.2 Le golf
La possibilité de pratiquer le golf en hiver et au printemps, ce qui peut être une raison
décisive de voyage à l'étranger, et un fort potentiel de golfeurs en Europe, 2 millions,
ont encouragé les destinations touristiques à développer le tourisme golfique.
La Tunisie s'est lancée dans une politique golfique dont l'objectif premier a été de
drainer une clientèle aisée en hors saison grâce à des conditions climatiques
favorables. Cet équipement, tout comme la plaisance, devait structurer la zone
touristique, créer un pôle d'activités et ainsi enrichir le produit balnéaire en mettant à la
disposition de la demande une nouvelle offre touristico-sportive.
Cependant, le golf est une activité de niche, qui nécessite une chaîne de services de
très haute qualité, du transport (aéroport sur place) à la restauration (gastronomie,
service et hébergement de luxe).
Aujourd’hui, le tourisme de golf en Tunisie est :
•
un segment très important en termes de dépenses, puisque les dépenses des
golfeurs sont 30% supérieures à celles du touriste classique ;
•
une offre de qualité (choix des architectes, normes internationales, accueil de
compétitions internationales) ;
•
une rentabilité assurée par un programme immobilier qui accompagne la
réalisation des golfs (comme partout dans les destinations touristiques, le golf
touristique n'est pas rentable) ;
•
une commercialisation au forfait en établissements 5*. Pour les mêmes prestations
de base, à savoir le transport aérien A/R, les transferts aéroport-hôtel-aéroport, les
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
39/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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7 nuitées en LPD (logement petit-déjeuner), le prix de base est multiplié par 2,7
avec obligation de prendre ses repas au restaurant à la carte.
Les principales vulnérabilités au changement climatique
Le tourisme golfique présente une vulnérabilité contrastée aux différents paramètres
climatiques :
•
les conditions climatiques en hiver et au printemps permettent la pratique du golf
« toute saison » mais de très fortes chaleurs estivales risquent peser sur la pratique
(on pense notamment à Tozeur) ;
•
les golfs tunisiens sont conçus selon des critères internationaux impliquant un fort
besoin en irrigation. Le maintien de la qualité des parcours dépend très
directement de la disponibilité de la ressource en eau. Même si les golfs sont
généralement arrosés au moyen d’eaux usées traitées, les besoins d’irrigation vont
croître et les arbitrages sur les usages de l’eau (même les eaux traitées) pourraient
leur être défavorables ;
Tableau 7 : Irrigation des parcours de golf - 2006
Golf
Superficie (ha)
Superficie irrigable (ha)
Volume d'eau épurée m3/jour
Carthage
30
18
600
Yasmine Hammamet
80
45
1800
Citrus Hammamet
172
90
2700
El Kantaoui – Sousse
132
110
3456
Flamingo Monastir
80
60
1900
Palm Links Monastir
80
50
2200
Jerba
92
44
1500
Tabarka
110
45
1500
Tozeur
150
75
NC
Source : SONEDE
•
certains terrains sont construits sur le rivage (Hammamet, Sousse-Monastir,
Djerba…), donc vulnérables au risque de submersion et de recul du trait de côte.
2.2.2.3 La thalassothérapie
Bien que le développement de la thalassothérapie soit assez récent, la Tunisie a pu se
créer une image confirmée en occupant la deuxième position derrière la France.
La capacité d’accueil des centres a enregistré une croissance entre 1999 et 2007.
Cette capacité est totalement intégrée dans des unités hôtelières de catégories 4 et 5
étoiles et reste concentrée dans les régions de Hammamet et de Djerba.
La clientèle est principalement féminine, âgée de 40 ans et plus avec une certaine
tendance au rajeunissement, disposant d’un revenu moyen à élevé et réservant de
plus en plus de manière individuelle. Les curistes sont à 94% des européens. Les français
représentent environ la moitié des curistes qui viennent en Tunisie avec une part de
47,2%. La croissance du marché russe a entraîné la perte d’un marché assez important
de point de vue recettes qui est le marché suisse.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
40/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
La thalassothérapie tunisienne permet de drainer à peu près 97,6 millions de DT et de
créer 1 237 emplois. Au niveau des unités hôtelières, l’offre de thalassothérapie
contribue à améliorer la rentabilité.
L’un des points faibles de la thalassothérapie tunisienne est son positionnement encore
limité aux cures. L’offre n’est pas intégrée dans un cadre plus global du tourisme de
santé et de bien-être offrant des activités sportives et culturelles aux curistes.
Les principales vulnérabilités au changement climatique
La thalassothérapie est une activité vulnérable à certains aspects du changement
climatique.
•
la majeure partie des centres étant située en bord de mer, les infrastructures de
captation et d’évacuation sont très vulnérables à l’élévation rapide du niveau de
la mer et les bâtiments au risque de submersion ;
•
la principale ressource de ce produit étant l’eau, avec une exigence de qualité
élevée, l’amenuisement de cette ressource et son renchérissement constituent
une réelle menace ;
•
le réchauffement des températures de l’eau de mer, quoique peu étudié,
pourrait également modifier la qualité des soins
Par ailleurs, l’activité de thalassothérapie est parfois montrée du doigt comme une
pression supplémentaire sur le littoral, à travers la pose de canalisations et le rejet d’eau
insuffisamment traitée. L’attention croissante portée au respect de l’environnement
littoral pourrait renforcer les pressions, et donc les coûts, sur cette activité.
2.2.2.4 Le tourisme culturel
Les différentes civilisations qui se sont succédé en Tunisie ont permis au pays d’hériter
d’un patrimoine historique et culturel d’une valeur incontestable (sites archéologiques,
musées, forts, ribats et médinas). La Tunisie est le premier pays mondial en termes de
densité de sites archéologiques, dont plusieurs sont inscrits au Patrimoine Mondial de
l’UNESCO. Outre ces sites, la Tunisie offre une panoplie de festivals tout au long de
l’année, d’envergure locale, régionale, nationale ou internationale. Ces potentialités,
la croissance de la demande mondiale et son engouement pour les richesses
culturelles de la destination visitée, ont incité la Tunisie à accorder au développement
du tourisme culturel une attention particulière dans le cadre de ses politiques de
développement touristique et de diversification.
Pourtant, tous les sites culturels de Tunisie ne sont pas aménagés et valorisés
aujourd’hui. La plus forte densité des sites touristiques se situe dans les régions
balnéaires du nord et du centre de la Tunisie. Leur diversité est cependant amoindrie
par une qualité touristique des sites assez faible. Bien que plusieurs programmes soient
mis en place avec le concours de bailleurs de fond internationaux, les sites culturels
n’ont pas fait l’objet d’investissement de grande ampleur.
Le tourisme culturel devrait permettre de diversifier le produit touristique tunisien, de
générer une clientèle plus rémunératrice et de réduire la saisonnalité. Dans les faits, les
entrées aux sites ont enregistré une évolution assez fluctuante dans le temps, avec des
entrées aux sites archéologiques représentant près de 51%. Les entrées sont saisonnières
avec des pics qui correspondent aux pics de l’activité touristique en Tunisie. Cette
saisonnalité apparaît aussi pour les musées, les forts les ribats et les médinas des sites qui
peuvent être visités toute l’année. Cela tend à montrer que le produit culturel reste un
enrichissement au produit balnéaire. A noter cependant que les régions de l’intérieur
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
affichent une saisonnalité inverse aux zones côtières : le pic des entrées aux sites
culturels est enregistré au cours des mois de mars et d’avril, avec des performances
légèrement supérieures à la moyenne au cours de la période août-octobre. Il s’agit
alors de produits exclusivement programmés dans des circuits culturels (cas des régions
de Bizerte-Béjà et de Tabarka-Aïn Drahem) ou encore à la programmation de certains
sites dans les circuits et les excursions partant vers le sud tunisien (cas des régions de
Sbeïtla-Kasserine et de Gafsa-Tozeur).
Les principales vulnérabilités au changement climatique
D’une manière générale, on peut dire que le tourisme culturel est peu vulnérable au
changement climatique. Les visites sont peu dépendantes de la météo et les
problématiques liées au littoral ne concernent que peu de sites.
Cependant, deux facteurs augmentent sa vulnérabilité en Tunisie :
•
la qualité encore insuffisante de l’aménagement des sites qui vont nécessiter une
conception adaptée aux fortes chaleurs ;
•
la forte dépendance au produit balnéaire et la conception même des excursions
(horaires notamment).
La question de la dégradation des sites face à certains paramètres climatique reste
aujourd’hui à étudier en détail.
Au-delà des sites d’accueil du public, toutes les richesses culturelles immatérielles
constituent une ressource touristique particulièrement peu vulnérable au changement
climatique : artisanat, traditions, spectacles… Ce sont autant d’atout pour le
développement d’un tourisme spécifique à la Tunisie (contrairement à un produit
balnéaire plus banal en Méditerranée), non saisonnier, potentiellement support de
développement économique et de conservation des savoir-faire, non attaché à la
frange littorale et intéressant aussi les touristes domestiques en recherche d’une
meilleure animation de leurs régions.
2.2.2.5 L’écotourisme et le tourisme de découverte
La Tunisie possède les ressources nécessaires pour développer une offre d’écotourisme.
Une soixantaine de sites ont retenu l'attention des spécialistes nationaux et
internationaux pour leurs ressources naturelles (faunistiques, floristiques et géologiques)
culturelles et humaines, source d’activités très diversifiées : observation de la nature,
randonnées, agritourisme, arts et traditions populaires.
Un décret de 1998 (voir 2.5.1.3) prévoit le développement du tourisme vert et
écologique dans les zones suivantes :
− Parc d'Ichkeul (délégation de Tinja) ;
− Parc de Bou Hedma (délégation de Mezouna) ;
− Parc de Chaambi (délégation de Kasserine) ;
− L'île de Kerkennah (délégation de Kerkennah).
Depuis, le développement de l’écotourisme s’appuie sur :
•
le tourisme de montagne dans les gouvernorats de Tataouine (délégations de Bir
Lahmar, de Tataouine, de Ghomrassen et de Smar), de Matmata (délégations de
Matmata nouvelle et Matmata ancienne) et de Médenine (délégations de Beni
Khedache) ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
42/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
une station éco-touristique dans le parc national du Boukornine avec des espaces
de loisirs ;
•
une réserve naturelle de 2322 ha à Jebel Sif dans le gouvernorat de Kef ;
•
le développement du tourisme côtier du Nord dans les gouvernorats de
Jendouba (délégations de Tabarka, Aïn Draham) et de Béja (délégation de
Nefza).
Aujourd’hui, le développement de l’écotourisme reste à concrétiser en Tunisie avec
des circuits thématiques (déjà identifiés mais non valorsiés), la mise en tourisme
l’intérieur du territoire et l’ouverture des parcs nationaux au public.
De nombreuses limites s’opposent à ce développement, avec notamment la difficulté
à concrétiser une véritable transversalité entre les acteurs du tourisme, de
l’environnement et du développement local, une transversalité également entre
acteurs publics et privés ainsi que des outils réglementaires inadaptés ou très récents.
En 2008, une étude stratégique sur le développement de l'écotourisme en Tunisie a été
menée par le ministère de l'Environnement et du Développement Durable, avec le
concours de l'Agence de coopération technique allemande, détaillant les potentialités
pour l’écotourisme et les moyens de le développer.
Les principales vulnérabilités au changement climatique
L’écotourisme est moyennement vulnérable au changement climatique.
Les questions de confort et de santé des touristes restent à l’ordre du jour en fonction
des régions. Ce type de tourisme, généralement de plein air, reste compatible avec de
nombreux types de temps moyennant des adaptations en termes d’horaires et
d’aménagement des sites. Cependant, les régions les plus septentrionales sont plus
vulnérables, particulièrement en saison estivale (voir tourisme saharien). A contrario, les
régions les plus fraiches (montagne, nord) présentent des atouts pour le
développement de ce type de tourisme en été.
La principale vulnérabilité réside dans la dépendance de l’écotourisme à ses
principales ressources : la biodiversité, les écosystèmes et les paysages. Ces éléments
sont susceptibles d’être modifiés dans la perspective du changement climatique.
Cependant, cette vulnérabilité ne semble pas trop préoccupante si elle est connue et
assumée. Les évolutions des paysages et des espèces présentent ne mettent pas en
péril l’activité touristique mais demandent une souplesse dans l’organisation et la
promotion des activités.
A noter enfin la vulnérabilité à certains évènements extrêmes types orages violents et
inondations dans des zones reculées où l’accès des secours et des soins pourrait être
problématique.
2.2.2.6 Le tourisme saharien
Le tourisme saharien occupe une place un peu particulière dans l’offre tunisienne.
Comme d’autres produits, il vise la diversification du produit touristique, notamment
pour les clientèles européennes, avec un étalement de la saisonnalité. Mais il doit
également contribuer au développement régional et permettre aux régions
sahariennes déshéritées de trouver, dans le tourisme, une solution à leurs problèmes
économiques tout en préservant leur patrimoine culturel et naturel.
Dès lors, le tourisme saharien a bénéficié de certaines mesures spécifiques qui ont
permis de développer l’infrastructure de base (2 aéroports, l’infrastructure routière, une
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
station d’épuration qui permet notamment de récupérer l’eau traitée pour l’arrosage
du golf) et moyens d’appui juridiques (incitations financières et fiscales spécifiques),
humaines (école hôtelière touristique à Tozeur).
Le tourisme saharien tunisien concerne principalement trois régions :
− la région de Gafsa et du Jérid avec les oasis de Tozeur, Nefta et les oasis de
montagne (Chbika, Midès et Tamerza) ;
− la région de Nefzaoua avec Kébili, Douz, le Grand Sud et le parc national de
Jbil ;
− la région des troglodytes de Matmata, les Ksours de Tataouine avec Gabès,
Médenine et Tataouine.
Pourtant, le tourisme saharien reste un produit complémentaire au balnéaire. Il est
concentré sur les circuits partant des zones balnéaires vers Tozeur avec des excursions
en étoiles, avec une durée de séjour courte (environ 1,4 jour). Par conséquent, l’activité
est affectée par une saisonnalité similaire à celle observée dans les régions balnéaires.
Mais il faut noter que seules les performances touristiques des excursions classiques, en
termes d’arrivées et de nuitées ainsi que de création d’emplois, sont captées par le
système statistique touristique national publié par l’Office National du Tourisme Tunisien.
Pour accompagner ces produits, l’industrie touristique dans les régions sahariennes est
principalement concentrée sur l’hôtellerie. La région de Gafsa-Tozeur compte en 2008
77 établissements pour environ 11 000 lits. Cette capacité reste stable depuis plusieurs
années.
Mais au-delà de ces excursions « classiques », l’offre et la demande pour d’autres types
de produit est en pleine croissance (Chapoutot 2007) :
•
le tourisme d’aventure et sportif où la motivation principale est le sport
mécanique, l’aventure sportive et la vitesse en 4x4, motos et quads.
•
les circuits de re-création pour lesquels le cadre primordial et la consommation
touriste est essentiellement symbolique, à savoir celle du regard, du silence avec :
− des circuits « confort personnalisé » combinant promenades, repos, rencontres
et soins du corps traditionnels dans le dépaysement de campements fixes en
plein désert ;
− des randonnées à dos de dromadaires ou méharées, les randonnées pédestres
ou trekking de 2 à 3 heures de marches sur une période de 6 jours ou plus et
même parfois plus.
Et d’autres types d’hébergement sont en développement, bien que le manque de
données relatives aux investissements réalisés ne permette pas d’apprécier la
diversification et la croissance de cette activité. Pour les excursions de re-création,
l’offre d’hébergement est principalement composée de lits sous tentes et en bivouac.
D’autres formes sont entrain de se développer avec la reprise de certains Ksours qui
sont réaménagés pour accueillir les touristes.
Au-delà de l’hébergement, l’offre touristique en matière d’attractions et d’activités est
assez diversifiée dans le sud. L’offre sportive dans la région de Gafsa-Tozeur est assez
riche. Elle varie des vols en montgolfières, en ULM, aux raids en quads, en motocross et
en 4x4. Récemment, la région de Gafsa-Tozeur s’est vue dotée d’un terrain de Golf. En
matière d’attractions culturelles, celles-ci comptent les musées (musée du Sahara à
Douz, l’initiative privée de Dar Chraïet, parc à thème Chak Wak à Tozeur) et les
spectacles (festival de Douz, festival des oasis de Tozeur, festival des ksours).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Les principales vulnérabilités au changement climatique
Le tourisme saharien s’avère très vulnérable aux paramètres climatiques compte tenu
du climat déjà extrême qui le caractérise. Les chaleurs estivales sont déjà difficilement
compatibles avec une activité touristique. Les nouvelles formes d’hébergement basées
sur l’habitat traditionnel du désert constituent le meilleur atout pour ce tourisme, car les
hébergements touristiques « classiques » (constructions récentes, mal isolées et recours
massif à la climatisation) ne semblent pas à même de répondre aux enjeux de confort
à des coûts acceptables. C’est la principale vulnérabilité du tourisme saharien, déjà
identifiée par les acteurs locaux.
Au-delà du confort thermique des touristes, difficulté immédiate et déjà bien cernée,
c’est plus largement la question de l’avancée du désert qui pourrait se poser.
L’amenuisement de la ressource en eau conduit à des conflits d’usage plus importants
graves encore que sur les côtes. Et des phénomènes comme les tempêtes de sable ou
l’avancée des dunes, certainement aggravés par les évolutions climatiques,
nécessiteront des moyens de protection supplémentaires.
Enfin, à noter que le développement des sports mécaniques, aujourd’hui en plein essor,
est contraire à une approche durable du tourisme. Fortement consommatrices de
carburants, ces activités pourraient subir de plein fouet le renchérissement de l’énergie.
Par ailleurs, elles sont de plus en plus mal vues (bruit, dégradation des sols et des dunes,
dégradation du couvert végétal et, plus généralement, dégradation du paysage
saharien) d’une certaine catégorie de touristes dont la conscience environnementale
est de plus en plus prégnante et qui recherche dans le désert calme et relaxation.
2.2.2.7 La plaisance
Le développement de la plaisance s’est fait en parallèle avec le développement du
tourisme en Tunisie. Malgré l’initiative prise par les pouvoirs publics, la capacité
d’accueil reste assez limitée par rapport au potentiel plaisancier et à l’offre en
Méditerranée. La plaisance permet de générer près de 16 millions DT par an (Source
Créocéan 2005).
La filière plaisance souffre aussi de certaines faiblesses liées à sa position géographique,
à l’infrastructure d’accueil et aux prestations de services techniques offertes. Malgré
ces insuffisances, les flux de bateaux et de passagers affichent une tendance à la
hausse.
La Tunisie reste bien positionnée sur certains segments de marchés de la plaisance pour
les bateaux de taille réduite mais la capacité d’accueil adressée aux grands
plaisanciers reste très faible. Par contre la destination est absente sur d’autres formes
de pratique, notamment le marché de la location qui semble pourtant intéressant dans
une optique de diversification de l’offre balnéaire.
Les principales vulnérabilités au changement climatique
La plaisance reste une forme de tourisme relativement vulnérable aux conséquences
du changement climatique à travers :
•
la vulnérabilité de ses aménagements en dur face à l’élévation rapide du niveau
de la mer ;
•
les nuisances que connaissent déjà les marinas avec l’invasion des rives par les
algues par exemple. Les évolutions de la biodiversité concernent également la
qualité des activités que pratiquent généralement les plaisanciers, en particulier la
plongée sous-marine ;
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
les contraintes croissantes sur la qualité des eaux
réglementations en matière d’évacuation des eaux usées ;
côtières
avec
les
•
les évènements extrêmes : orages en été, épisodes de tempêtes plusieurs fois par
an, etc.
Par ailleurs, les aménagements nécessaires au développement de la plaisance
(artificialisation du rivage) posent de nombreuses questions environnementales. Déjà
montré du doigt par certains protecteurs du littoral, cette artificialisation est un facteur
aggravant de plus, aux côté des conséquences du changement climatique, de la
dégradation du littoral (modification des courants marins notamment).
2.2.3 Commercialisation et communication
La commercialisation du produit tunisien sur les marchés internationaux (excepté pour
les marchés maghrébins) est réalisée principalement selon le principe du forfait, à
savoir, la combinaison d'au moins deux opérations : le transport et l'hébergement
(avec restauration au choix) auxquelles l'hôtelier ajoute des activités d'animation. Pour
le marché européen, environ 85% des touristes ont recours à un tour-opérateur qui sont
plus de 400 à commercialiser la destination Tunisie. La promotion de la destination se
fait à partir des foires et salons, des actions conjointes avec les TO, des invitations, des
workshops et des actions spécifiques.
Malgré le développement de produits complémentaires et de bons positionnements
sur certains marchés de niche comme celui du golf ou de la thalassothérapie (2ème
marché après la France), ceux-ci ne sont que faiblement rémunérateurs, et constituent
des produits d’enrichissement plutôt que de réels produits de diversification. Le mode
de développement du tourisme en Tunisie a en effet peu évolué depuis une
quarantaine d'années. Il connait donc un essoufflement pour plusieurs raisons.
Un investissement de plus en plus lourd
Le coût d’investissement au lit représente entre 3 et 4 fois les recettes/lit. Cette situation
a engendré une situation de surendettement du secteur hôtelier.
Un marché en mutation
Les « Trente Glorieuses » ont correspondu à une forte demande touristique européenne
et à l'essor du tourisme en Méditerranée et donc en Tunisie. Du fait de leur confiance
dans l'avenir, de leur culture de la sécurité et de leur style de vie, les classes moyennes
ont eu une consommation touristique élevée. Elles ont fait la fortune du tourisme
méditerranéen grâce à l'adéquation entre le produit hôtelier balnéaire et la demande.
Aujourd'hui, les départs sont toujours importants, mais la destination Tunisie, qui connaît
un déficit d'image, attire essentiellement une clientèle « last minute » qui procède de la
recherche des bas prix.
Une dépense moyenne en hausse…
La dépense moyenne par visiteur s’est élevée en 2008 à 481 dinars par séjour15. Ce
chiffre est en hausse constante depuis 2004. Néanmoins, il reste faible au regard de la
concurrence méditerranéenne. De plus, le développement d’une clientèle moins
15
Soit 267 euros.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
46/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
rémunératrice d’Europe de l’Est aux dépens de celle d’Europe occidentale, pourrait
affecter cette progression.
Enfin, autre fait surprenant, c’est à la basse saison que la dépense moyenne est la plus
élevée alors même que les tarifs sont plus bas, soit 544 dinars contre 458 en haute
saison16 ! Cela peut s’expliquer par le motif des visiteurs, qui relèvera davantage de
circuits ou de produits thalasso plus que de balnéaire pur. Ou encore par la présence
de marchés plus rémunérateurs, les libyens entre autre.
Cela peut donc traduire une mauvaise exploitation du potentiel touristique tunisien,
avec une inadéquation entre la commercialisation et la valorisation du produit.
Mais une concurrence sans cesse accrue
Le mouvement de concentration des tours opérateurs, qui proposent une palette de
plus en plus diversifiée de destinations, associée à la baisse des prix du transport, a
exacerbé la concurrence entre les destinations. Cette tendance est renforcée par
l’essor du commerce électronique : au niveau mondial, ces transactions auraient
dépassé les ventes des agences de voyage. Aussi, la Tunisie n’est pas seulement
confrontée à la concurrence des autres pays méditerranéens mais doit faire face à la
concurrence de toutes les destinations qui se situent dans sa gamme de prix. Toutefois,
dans une optique de limitation de la mobilité touristique des principales clientèles, on
s’attachera surtout à la concurrence exercée par les autres pays méditerranéens,
principalement la Turquie, l’Egypte, la Croatie et le Maroc, destinations situées à moins
de quatre heures des marchés centraux d’Europe.
Entrainant une perte de compétitivité inquiétante à l’aube de difficultés nouvelles
L’adaptation au changement climatique viendra s’ajouter aux difficultés actuelles.
Principalement situées sur les côtes, les stations tunisiennes sont fortement concernées
par l’élévation accélérée du niveau de la mer mais aussi par les changements de
températures et la modification des précipitations. La réglementation du transport
aérien est là encore une incertitude pesant sur la croissance touristique de la Tunisie.
La Tunisie saura-t-elle s’adapter au changement climatique, ou subira-t-elle cette
nouvelle contrainte de plein fouet ? Sera-t-elle mieux préparée que ses concurrents ?
Pour sortir par le haut de cette situation préoccupante, la Tunisie devra différencier son
offre et entre autre miser sur une stratégie de mise en valeur de ses dotations naturelles
et culturelles.
16
Le tourisme tunisien en chiffres 2008, p85.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.3 Cadre institutionnel et planification du secteur
du tourisme
2.3.1 Organisation du secteur
Le diagramme ci-dessous propose une vision fonctionnelle simplifiée des structures et
principaux outils qui organisent le secteur touristique en lien avec la prise en compte
des impacts du changement climatique.
Ministère du tourisme
Tutelle et orientation
Fédérations professionnelles
AFT
ONTT
•
Promotion : code d'incitations à
l'investissement touristique, cadre juridique :
incitations financières et exonérations
fiscales et douanières (loi n° 86-85, loi n°90-21
du 19 mars 1990)
•
Contrôle du produit touristique
•
Commercialisation
Commissariats
régionaux
MEDD
ANPE
APAL
validation
•
Maîtrise du foncier et
mise en place des
infrastructures de base
•
Conception et
réalisation des plans
d’Aménagement
touristiques
Direction de
l’environnement
et du patrimoine
Représentations
du tourisme
tunisien à
l’étranger
FTH
FTAV
Etude d’impacts
environnementale
préalable à chaque
projet
OTEDD
En complément à ces organes, notons l’importance et le rôle des pouvoirs locaux et
régionaux (municipalités et gouvernorats) à travers notamment la validation des plans
d’aménagement, les autorisations de construire, etc.
Aujourd’hui, le contexte institutionnel est extrêmement centralisé et privilégie une
structure hiérarchique plutôt que la transversalité entre les différents acteurs. C’est
particulièrement le cas pour la prise en compte les impacts du changement
climatique.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
48/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Le cadre institutionnel du tourisme seul est aujourd’hui peu adapté pour traiter les
aspects liés au changement climatique car les structures spécifiques n’ont pas été
prévues.
C’est surtout sur d’autres structures que repose l’enjeu environnemental. Dans le
contexte de mondialisation et de prise en compte des aspects environnementaux, de
nouvelles institutions ont en effet été créées, qui peuvent apporter les compétences
nécessaires au secteur du tourisme, sous réserve d’assurer la transversalité entre les
secteurs :
•
un ministère de l'Environnement en 1992. Son rôle auprès du secteur touristique est
central pour la prise en compte du changement climatique, par sa vocation à
coordonner l’ensemble des programmes relatifs à ce thème en Tunisie, apportant
les compétences qui font défaut aux différents secteurs et assurant une vision
globale absolument nécessaire pour traiter ce sujet ;
•
une Agence nationale de la protection de l'environnement qui a en charge les
études d’impact, préalable aux études d’aménagement, décret n°91-362 du 13
mars 1993, s’appliquant notamment au tourisme ;
•
une Agence de protection et d'aménagement du littoral créée par la loi n°95-72
du 24 juillet 1995 pour la sauvegarde de l’environnement côtier. Elle est chargée
entre autres de la gestion des espaces littoraux et du suivi des opérations
d'aménagement ainsi que de la surveillance des règles et des normes fixées par
les lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de ces espaces, leur
utilisation et leur occupation ;
•
l'observatoire du littoral mis en place en 1997 dont les objectifs vont de la collecte
et la mise à jour des informations sur le littoral, de la mise en place d'un système
de surveillance et d'une base de données et d'un système d'information
géographique ;
•
le centre international des techniques de l'environnement de Tunis (CITET) qui
organise notamment la mise en place de l’écolabel ;
•
l'agence nationale de maîtrise de l'énergie (ANME) qui définit les politiques
d'accompagnement des hôtels dans leurs efforts de réduction des dépenses
énergétiques.
Cette politique de maîtrise des impacts territoriaux a été accompagnée par des
financements tels que des fonds et des lignes budgétaires :
•
le fonds de protection des zones touristiques (loi n°92-122 portant loi des finances
pour la gestion 1993 et notamment les articles 38, 39 et 40 relatifs à la création d’un
fonds spécial) a pour objectif l'amélioration de l’environnement (pavage et dallage
des circuits touristiques, éclairage public) et de l'assainissement. Il est géré par le
ministère des Finances, le ministère du Tourisme et la Fédération Hôtelière de Tunisie ;
•
les zones touristiques municipales qui permettent aux villes touristiques de bénéficier
de lignes budgétaires pour l'amélioration du cadre de vie. Elles sont gérées par le
ministère de l'Intérieur, le Secrétaire d'état chargé des Affaires Régionales et des
Collectivités Locales et le ministère du Tourisme.
Les structures qui précèdent semblent les plus à même de traiter les questions
environnementales liées au tourisme dans la mesure où il est nécessaire qu’une
administration indépendante des secteurs économiques assure la bonne prise en
compte de ces enjeux (qualité des études d’impacts, gestion raisonnée et durable des
espaces littoraux largement concernés par le tourisme, respect des labels,
accompagnement des professionnels…) et apportent les compétences techniques qui
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
ne sont pas du ressort des professionnels du tourisme. Cependant, il est encore
nécessaire de renforcer les liens et la coordination entre ces structures et les acteurs du
tourisme pour assurer une meilleure transversalité et l’efficacité du dispositif.
2.3.2 Perspectives et évolution attendue du secteur du tourisme en
Tunisie17
2.3.2.1 Les orientations de l’administration du tourisme
Pour 2007-2011, cinq orientations marquent la stratégie de l’administration du tourisme :
•
L’encouragement au dynamisme régional et le développement des spécificités
locales ;
•
La diversification des produits touristiques ;
•
La diversification de l’offre d’hébergement ;
•
L’amélioration de la compétitivité des produits ;
•
L’encouragement de l’investissement local et étranger ainsi que l’implication du
secteur privé.
Pour répondre à ces axes, l’administration du tourisme a acquis les terrains et défini le
plan d’aménagement de 15 zones sur l’ensemble du territoire tunisien18, réparties
comme suit sur quatre aspects thématiques :
•
Le produit balnéaire : Cap Gammarth, Jenan el Ouest, Bekalta, Sidi Salem, Chott
Ennassim, Lella Mariem, Lella Hadhria, Salloum, Hergla, Ghedhabna, Gabès ;
•
Le produit écologique : Sidi Founkhall, Zouaraa ;
•
Le produit familial : Chaffar ;
•
Le produit thermal : Grand Kourbous, Khebayet ;
2.3.2.2 2007-2011 : le XIème plan
Les objectifs du XIème plan (2007-2011) visent un taux de croissance annuel de 6,5%,
permettant de recevoir prés de 9 millions de touristes et d'atteindre les 50 000 000 de
nuitées. Pour y parvenir, la Tunisie souhaite se doter d’une capacité totale de 258000 lits
en 2011, grâce à capacité additionnelle de 5 000 lits par an. Le taux d'occupation
prévisionnel atteindrait alors 59%. Selon ce même plan, les recettes devraient dépasser
les 4 500 millions de dinars, grâce à un taux de croissance annuel des recettes de
l'ordre de 10%.
De nouvelles zones touristiques ont donc été programmées :
17
18
•
sur le littoral Est à Hergla, Ghedhabna et Gabès,
•
sur l'ile de Djerba à Lella Hadhria,
•
sur l'ile de Kerkennah à Sidi Founkhal,
•
sur le littoral nord à Zouaraa.
Cf Annexe 1 : Le cadre institutionnel
Décrété lors du Conseil Ministériel restreint du 20 Octobre 1999 consacré au secteur touristique.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Il s'agit en fait d’une confirmation du tourisme balnéaire. Seule la station d’El Khabayet
Hamet à proximité de Gabès présente un produit thermal.
Les marchés ciblés
La stratégie actuelle prévoit que toute adaptation du système touristique tunisien doit
nécessairement passer par l'identification de nouveaux segments de clientèle et par
une nouvelle stratégie de communication et de promotion afin de :
•
présenter une image innovante de la Tunisie valorisant l'ensemble des différents
produits touristiques ;
•
s’adapter aux exigences de la demande ;
•
cibler des segments de la demande qui élargiraient l'éventail de la clientèle
comme la clientèle golfique, les séniors, les adeptes de thalassothérapie ;
•
accéder aux marchés lointains tels le Japon, la Chine, les Etats-Unis et le Canada
qui ne représentent que 0,9% des nuitées des non-résidents en 2007.
La commercialisation
En outre, la destination Tunisie devrait être commercialisée sur internet grâce à un
nouveau portail du tourisme tunisien "tunizie.com", ouvrant la Tunisie aux marchés
étrangers. Ainsi, chaque professionnel tunisien aura l'opportunité de toucher
directement 500 millions de touristes européens potentiels. Le site offrira un portail de
commercialisation, pour l’ensemble de la filière : billet d’avion, chambre d’hôtel, taxi
menant de l’aéroport à l’hôtel, etc. Ce site donnera une information pertinente et
contextualisée et fera figure de benchmark permettant aux touristes de comparer les
hôtels en Tunisie, avec ceux d’autres destinations. Ce portail devrait diminuer l’emprise
des Tour-operators sur le secteur.
Le développement de nouveaux produits dans la région de Tozeur
Par ailleurs, d'autres produits font l'objet d'une attention particulière, comme le tourisme
spatial via l'aéroport international de Tozeur qui prévoit d’accueillir des vols
paraboliques en apesanteur19 et des vols sub-orbitaux dans les années qui viennent20.
Parallèlement, une réflexion est actuellement menée sur l’aéroport de Tozeur, qui
prévoit le développement de produits comme des excursions en hélicoptère, des
initiations au pilotage, des vols en chute libre ou du saut en parachute mais aussi la
découverte de sensations fortes grâce à la participation à des exercices de voltige
dans des avions de chasse.
Situé à la lisière du Sahara, l'aéroport de Tozeur dispose de nombreux atouts (excellente
visibilité, proximité avec l'Europe, espace aérien non-congestionné) pour séduire une
clientèle à la recherche de sensations fortes.
Ces vols s'inscrivent dans le cadre d'un grand projet de tourisme spatial annoncé en juin 2007 par le
géant européen de l'aéronautique EADS. Les vols paraboliques, qui seront effectués à bord d'Airbus A300600 ou d'un Antonef 74, devrait offrir environ 23 secondes en apesanteur.
20 Les vols sub-orbitaux seront effectués à bord d'un avion-fusée dévoilé en juin 2007 par Astrium, filiale du
groupe EADS. La propulsion de cet avion est assurée par des moteurs à réaction pour la phase
atmosphérique et un moteur-fusée pour la phase de tourisme spatial.
19
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.3.2.3 Le plan d’actions du Ministère du Tourisme
Toutes ces orientations permettant de développer le secteur sont traduites dans le plan
d’actions du Ministère. Il est divisé en cinq axes21 :
•
Le maintien et la prospection de nouveaux marché, grâce à :
− un observatoire des tendances du secteur ;
− un Fonds de promotion alimenté par les hôteliers (à hauteur de 1% de leur
chiffre d’affaires) et l’Etat ;
− une Commission Nationale du Tourisme chargée de définir les priorités et de
coordonner le développement du tourisme tunisien ;
− au développement de la promotion par Internet.
•
La diversification du produit, grâce à :
− aux Stations Touristiques Intégrées offrant une gamme de services en plus du
produit balnéaire : golf, thalassothérapie, centres commerciaux…
− la mise en valeur des sites archéologiques (signalétique) ;
− au développement de différentes formes de tourisme : écologique (parcs et
réserves naturelles), bien-être, tourisme médical, événementiel, agritourisme…
− au développement du tourisme saharien.
•
L’amélioration de l’environnement, grâce à :
− au fonds de protection des zones touristiques financés par les professionnels22 ;
− la collaboration des différentes agences : ONTT, APAL, ANPE ;
− au renforcement de la réglementation : Etude d’impact Environnementale
obligatoire, Utilisation rationnelle du sol et des matériaux de construction et
respect de l’architecture locale, Réglementation du littoral ;
•
La libéralisation du secteur et l’incitation des investisseurs en vertu de l’adhésion
de la Tunisie à l’OMC et de l’inscription du tourisme dans la liste des secteurs à
libéraliser :
− liberté d’investissement,
− liberté de transfert des bénéfices,
− protection de l’investissement,
− reconnaissance des sentences arbitrales étrangères,
− couverture des risques non commerciaux
− protection des droits de propriété
•
Le développement de la qualité, grâce à :
− la réévaluation du système de classement des hôtels ;
− la mise en place de normes de qualité et de labels en partenariat avec
l’Europe : Ecolabel, la Clé verte, Pavillon Bleu…
2.3.2.4 La stratégie touristique à 2016
L’élaboration d’une stratégie touristique à 2016, accompagnée d’un plan d’actions,
est en cours de réalisation par le Ministère du tourisme et l’ONTT.
21
22
Cf annexe : Le plan d’actions du Ministère.
A hauteur de1% de leur CA.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.4 Les liens avec les autres secteurs
Le tourisme est un secteur d’activité transversal. Il s’agit d’une activité qui interagit
avec de nombreux autres secteurs. Le développement du tourisme en Tunisie,
s’appuyant sur un engagement fort de l’Etat et un tissu d’hôtelier tunisien, a eu un
impact économique certain dans le pays. En s’appuyant largement sur les ressources
locales, ce secteur a contribué à lancer ou renforcer des industries tunisiennes par effet
d’entrainement comme des industries de construction ou d’ameublement et
décoration, mais également le secteur agricole qui fournit les denrées alimentaires. Le
modèle de développement a également permis, contrairement à d’autres littoraux
méditerranéens, de préserver de larges portions de côtes grâce à la concentration des
infrastructures touristiques sur quelques zones bien délimitées. On peut également
considérer des interactions où d’autres secteurs ont permis au tourisme de se diversifier
comme celui de la santé. Grâce à la qualité de l’offre de santé, une forme de tourisme
se développe autour de cette thématique.
Ce constat de transversalité du tourisme, qui n’est ni récent ni limité à la Tunisie, a
toujours constitué une difficulté à la fois dans l’analyse de l’activité (périmètre de
collecte des chiffres, multiplicité des acteurs et sources de données…) et dans
l’établissement de stratégies (maîtrise des leviers d’action).
C’est notamment vrai en Tunisie, où la transversalité s’est naturellement établie sur le
terrain, entre les acteurs socio-économiques, mais où elle reste à renforcer au niveau
institutionnel. Comme nous l’avons vu, les liens entre les différentes administrations ne se
font pas toujours pour mettre en commun les efforts et les compétences.
Pour prendre en compte les contraintes liées au changement climatique, le secteur
touristique devra impérativement travailler avec de nombreux autres secteurs, à tous
les niveaux. Nous avons tenté ici d’identifier les principaux points d’interaction
nécessaires en lien avec les enjeux du changement climatique. Ces interactions
nécessitent le renforcement des ponts entre les administrations concernées pour
assurer une bonne coordination en matière de gestion des espaces, de collecte de
données, de formation et d’évolutions législatives.
Secteur
Sujets d’interaction
Equipement et
Aménagement du
Territoire
Politique de desserte aérienne et réflexion sur les autres modes de
desserte (route, fer, maritime)
Développement du réseau ferré sur le territoire national
Maillage du réseau routier dans les régions intérieures
Code de l’urbanisme et de l’aménagement : évolution du DPM et des
contraintes d’urbanisme sur le littoral
Environnement
Gestion des espaces naturels protégés
Observation et suivi scientifique des évolutions du trait de côte
Gestion intégrée du littoral : recherche de l’équilibre entre aménagement
et protection
Ressource en eau
Observation et suivi scientifique des ressources en eau et des
consommations par secteur
Observation et suivi scientifique de la qualité de l’eau (baignade en mer
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
et thalassothérapie notamment)
Prospective de l’état futur des réserves en eau potable et définition des
critères d’arbitrage entre usages
Mesures d’économies d’eau adaptées à l’économie touristique
Agriculture
Prospective de l’approvisionnement alimentaire des établissements
touristiques
Partage des ressources en eau (voir ci-dessus)
Energie
Observation et suivi scientifique des ressources énergétique et des
consommations par secteur
Mesures d’économies d’énergie adaptées à l’économie touristique
Culture et
sauvegarde du
Patrimoine
Suivi et entretien des sites patrimoniaux
Artisanat
Inventaire des productions artisanales traditionnelles, valorisation
touristique et transmission des savoir-faire
Petites et
Moyennes
Entreprises
Sensibilisation et éducation des corps de métiers fournisseurs du secteur
touristique, en particulier celui de la construction
Urbanisme et
construction
Evolution des normes de construction (isolation, choix des matériaux…) et
d’urbanisation
Santé
Observation et suivi scientifique des conditions sanitaires
Aménagement des sites patrimoniaux pour la visite
Plans d’urgence canicule : application aux établissements touristique et
formation des personnels
Développement de l’offre de tourisme de santé en coordination avec le
secteur touristique
Education
Sensibilisation et éducation des professionnels du tourisme et des
responsables administratifs sur la problématique du changement
climatique et ses impacts.
2.5 Mesures (institutionnelle, juridique, financières…)
et programmes environnementaux du secteur
touristique
La Tunisie a, depuis longtemps, pris conscience des défis environnementaux. Pour y
répondre, plusieurs outils ont petit à petit été développés, des outils réglementaires aux
engagements volontaires. Ces outils ne sont généralement pas spécifiques au tourisme
mais peuvent s’y appliquer. Nous décrivons ici les principaux éléments de politique
environnementale qui peuvent s’appliquer au secteur du tourisme.
A partir des années 1990, la Tunisie s'est engagée dans une nouvelle stratégie
économique qui se caractérise par l'acceptation des notions de développement
durable et de partenariat, deux notions qui renvoient à la Conférence de Rio en 1992,
et à la Déclaration de Barcelone en 1995.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
A la suite des recommandations de la Conférence de Rio, une commission nationale
pour le développement durable a été créée (décret n°93-2061 du 11 octobre 1993). Un
atelier de travail, se rapportant à l'Agenda 21, a élaboré un document fondamental
dans lequel il est recommandé de « développer et de promouvoir un tourisme
diversifié, intégré et respectueux de l'environnement en améliorant la localisation et la
qualité des unités touristiques et en développant et promouvant un système touristique
diversifié déconcentrant le tourisme des zones balnéaires en l'ouvrant sur l'intérieur du
pays et respectueux de l'environnement ».
Les institutions ayant la charge de protéger et de défendre l'environnement,
constituent la traduction, au plan des acteurs, de l'importance que les pouvoirs publics
tunisiens attachent à la notion de développement durable dans le cadre du
développement de l'activité touristique.
2.5.1 Les outils de planification
Le décret n°94-426 du 14 février 1994 a défini des zones réservées au tourisme.
2.5.1.1 L’aménagement du territoire
Le Schéma National d'Aménagement du Territoire est un document d’orientation dont
les objectifs sont de :
−
conditionner le cadre de vie ;
−
−
assurer l’exploitation rationnelle des ressources ;
protéger les zones de sauvegarde, les sites naturels et culturels ;
−
assurer la sécurité et la santé publique ;
−
garantir une répartition rationnelle entre les zones urbaines et rurales.
Les schémas régionaux de développement spatial servent de cadre de
développement spatial aux zones touristiques. En effet, la zone touristique doit s'inscrire
dans le cadre défini par le schéma directeur d'aménagement de la zone. Sur le plan
urbain, les constructions touristiques sont régies par des normes d’urbanisme définies
suivant les schémas directeurs de l’aménagement du territoire. Ces normes
déterminent le coefficient d’utilisation foncière et le coefficient d’occupation du sol
ainsi que le nombre de lits à l’hectare.
L’existence d’outils de planification de l’aménagement qui encadrent le
développement touristique est une base solide et indispensable pour faire face aux
enjeux du changement climatique. La réflexion doit en effet être globale à l’échelle
d’une région, voire du pays, afin de prendre la mesure de ces enjeux et d’envisager les
orientations adéquates.
2.5.1.2 Les zones touristiques et les plans d’aménagement touristique
De tels règlements présentent l’avantage de maîtriser le développement touristique de
grandes unités selon des règles urbanistiques et des contraintes économiques.
Cependant, comme de nombreux outils, les enjeux du changement climatique ne sont
pas encore réellement intégrés dans ces outils. En particulier, la possibilité de
développer une offre plus diffuse dans le territoire peine à s’affirmer.
En Tunisie, les plans d'aménagement touristique ont pour objectif d'offrir :
− 100 lits/ha ;
− 25 m de front de plage/lit ;
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− 8 à 10 m2 de plage/baigneur.
Les contraintes d’urbanisation s’appliquant aux zones touristiques sont définies par le
code de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire.
2.5.1.3 La planification spécifique à l’écotourisme
Le décret n°98-1042 du 5 mai 1998 précise les zones identifiées pour le tourisme vert et
écologique. Des régions ont ainsi été délimitées pour :
− Parc d'Ichkeul (délégation de Tinja) ;
− Parc de Bou Hedma (délégation de Mezouna) ;
− Parc de Chaambi (délégation de Kasserine) ;
− L'île de Kerkennah (délégation de Kerkennah).
Là encore, ces outils paraissent tout à fait nécessaires pour maîtrise le développement
de cette forme de tourisme, mais encore insuffisants. Nous souscrivons aux limites
identifiées par l'étude stratégique sur l'écotourisme :
•
le statut foncier des sites naturels sur lesquels des équipements pourraient être
réalisés ;
•
l'absence de cadre réglementaire régissant l'activité ;
•
l'inexistence de normes qui permettraient à l'Office national du tourisme tunisien
d'agréer des projets écotouristiques. Sur la question des normes, de nouveaux
textes commencent à exister pour les hébergements (voir plus loin).
2.5.2 Les espaces naturels protégés
Les espaces naturels protégés sont des territoires particulièrement intéressants pour
développer un tourisme de découverte, sous réserves qu’ils soient accessibles au public
et que leur vocation touristique soit prévue.
•
Les parcs nationaux : l'ensemble des parcs nationaux couvre une superficie de
197 048 hectares. Ils sont au nombre de huit, caractérisés par des paysages et des
écosystèmes spécifiques à chaque région. Chaque parc est doté d'un écomusée
conçu comme un outil éducatif. Actuellement, ces parcs font l'objet
d'aménagement (bureau d'accueil, pistes balisées et signalétique) afin de
satisfaire les visiteurs. Leur gestion devrait être confiée au secteur privé.
•
Les réserves naturelles : il s'agit de sites peu étendus ayant pour but le maintien
d'espèces individuelles ou de groupes d'espèces naturelles, animales ou
végétales ainsi que leur habitat et la conservation d'espèces de faune migratrice
d'importance nationale ou mondiale. Ces espaces n’ont pas toujours une
vocation touristique.
•
Les zones humides : les plus intéressantes sont les zones humides d'importance
internationale comme habitats pour les oiseaux d'eau protégés et pour lesquelles
la Tunisie a adhéré (24 novembre 1980) à la Convention de Ramsar. Les
distinctions internationales ont l’avantage de valoriser les espaces naturels auprès
d’un public averti et d’assurer une gestion réellement respectueuse de
l’environnement.
Par ailleurs, 19 nouvelles zones protégées devraient être intégrées au réseau national
d'aires protégées, ce qui porterait le total des zones protégées à 43, soit 7% de la
superficie de la Tunisie. Dans l’optique du changement climatique, en Tunisie comme
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ailleurs, la définition des périmètres des aires protégées va nécessiter de gagner en
souplesse. La modification des écosystèmes et des aires de répartition des espèces
impliquera potentiellement des révisions régulières de ces périmètres.
2.5.3 En amont des projets
2.5.3.1 Le code de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme
La question du recul du trait de côte
Le code de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme aborde la question de la
construction en bordure de mer. L’article 25 (modifié par la loi n°2003-0078 du 29
décembre 2003) définit le retrait en arrière imposé aux aménagements dans deux cas
distincts :
− dans les zones non couvertes par un plan d'aménagement urbain approuvé,
une distance de cent mètres à partir des limites du domaine public maritime
(DPM) ;
− dans les zones couvertes par un plan d'aménagement approuvé, une
distance minimum de vingt cinq mètres à partir des limites du DPM (fixée en
fonction des particularités de chaque zone).
Ces règles ne prennent pas en compte les perspectives du changement climatique sur
la hausse accélérée du niveau de la mer. Cela est d’autant plus préoccupant que les
règles précitées peuvent être contournées pour « harmoniser le tissu urbain situé sur
front de mer », ce qui laisse la porte ouvert à l’aménagement touristique en front de
mer.
Toutefois, si le code n’a pas encore intégré les impacts potentiels du changement
climatique, le cade prévoit que ces distances peuvent faire l'objet d'une extension
dans les zones menacées d'érosion maritime ou d'inondation, ce qui laisse la possibilité,
en l’état actuel du code, de prendre en compte, localement et au cas par cas, les
contraintes liées au changement climatique.
La question de l’urbanisme des stations touristiques
Aujourd’hui, la conception des stations touristique repose toujours sur des modèles
relativement anciens qui ont fait le succès du tourisme tunisien à ses débuts. Les
nouveaux enjeux du changement climatique, en particulier en termes de gestion de la
chaleur, ne sont pas pris en compte dans ces conceptions. La question d’un urbanisme
de fraîcheur, qui répond à des principes bioclimatiques, n’est pas encore traitée dans
les codes : aménagement des extérieurs ombragés, traitement des espaces verts,
utilisation des brises de mer, recours à l’architecture méditerranéennes traditionnelle…
2.5.3.2 Les études d’impacts
Afin de limiter les impacts du tourisme sur l’environnement naturel, chaque projet
touristique doit faire l’objet d’une Etude d’Impact Environnemental (EIE)23.
Néanmoins, l’EIE s’intéresse à l’impact du projet en question sur l’environnement et ne
prend pas suffisamment en compte les impacts cumulés des autres projets à proximité
23 Loi n° 88-91 du 2/08/1988 modifiée par la loi n° 115 du 30/11/1992 et par la loi n° 2001-14 du
30/01/2001, article 5 et décret n°91-362du13/03/1991. Décret n° 2005-1991 du 11 juillet 2005.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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ce qui peut rendre limiter l’intérêt de l’évaluation et surtout des mesures de correction
proposées. Ceci s’explique principalement par l’absence d’un système d’information
environnementale suffisamment précis qui permettrait de dégager ce type de
données.
2.5.4 La conception et l’exploitation des hébergements
2.5.4.1 Les normes des hébergements touristiques
Des normes ont été établies pour les différents types d’hébergements touristiques. C’est
normes n’abordent pas la plupart des points liés à la vulnérabilité au changement
climatique :
•
Notion d’économies d’énergie et d’eau, d’équipements économes ;
•
Conception bioclimatique/ isolation des bâtiments et non recours à la
climatisation (la climatisation est au contraire requise).
On note cependant des efforts en direction d’un style architectural local, mais qui
s’applique surtout à la décoration intérieure.
Ces normes sont inspirées de normes européennes. Elles ont le mérite d’encadrer la
profession et de fournir un premier niveau de guide pour les professionnels. Elles
apparaissent cependant insuffisantes sur les questions environnementales, en particulier
sur la question de la gestion des grandes chaleurs.
La climatisation semble être la réponse la plus utilisée. Cette solution semble
cependant partielle (climatiser une chambre suffit-il à faire rester les touristes ?) et
porteuses de problèmes (émissions de CO2 induites par la consommation d’énergie des
climatiseurs, tensions énergétiques estivales qui ne se produisaient pas dans le passé).
Au-delà de la climatisation, il faudrait encourager la réflexion sur l’architecture et la
construction des hébergements et équipements touristiques, notamment autour de
l’architecture à Haute Qualité Environnementale (HQE).
Avant même les normes spécifiques aux hébergements touristiques, ce sont donc les
normes de constructions des bâtiments qui sont à interroger. Aujourd’hui, nombre de
professionnels du tourisme sont soumis aux contraintes de bâtiments sur lesquels ils n’ont
pas forcément de maîtrise. La conception d’hébergements et d’équipements de
meilleur confort thermique et de moindre consommation énergétique est une priorité
qui va bien au delà de l’activité touristique. Encore faut-il veiller à ce que le tourisme
s’inscrive bien dans cette dynamique.
2.5.4.2 Les lois et programmes sur l’eau
La Tunisie, du fait de ses faibles ressources en eau, a déjà pris conscience de l’enjeu et
pris un certain nombre de mesures qui devraient lui permettre de mieux anticiper les
conséquences du changement climatique.
Des tarifs spécifiques ont été introduits, le tarif hôtelier étant supérieur au coût de la
production de l'eau (les hôteliers participent à hauteur de 11% aux recettes de la
Sonede). Dans un premier temps, la croissance de la consommation a sensiblement
fléchi grâce à l’introduction de ce tarif spécifique mais cet effet c’est rapidement
estompé. Par ailleurs, l'audit des systèmes d'eau, à l'intérieur des hôtels (Décret n°2002335 du 14 février 2002 fixant le seuil (2000 m3) à partir duquel la consommation des eaux
est soumise à un diagnostic), n'est pas réellement appliqué.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Cela a conduit les autorités à mettre en place une stratégie nationale de maîtrise de
l’eau dans les établissements touristiques. En effet, à la suite d’une étude de la
consommation, il a été établi que les établissements hôteliers utilisaient 22% de l’eau
pour l’irrigation, 13% pour la recharge des piscines, alors que les pertes représentent
près de 17%. La stratégie nationale d’économie d’eau vise, pour ce qui est du secteur
touristique, à réduire la consommation spécifique moyenne à 300 l/j/lit occupé en 2030
contre 513 l/j/lit occupé actuellement. Pour y parvenir, des audits seront régulièrement
réalisés afin de constater les progrès ou écarts par rapport aux objectifs.
Les principales mesures sont la réhabilitation des tuyauteries vétustes, l’acquisition et
l’installation d’équipements économiseurs d’eau et la mise en place d’un programme
de sensibilisation par les différents opérateurs touristiques. Les professionnels du tourisme
ne semblent en effet pas suffisamment inquiétés par un éventuel manque d’eau. Bien
qu’ils trouvent la facture de plus en plus chère, le problème de la disponibilité ne
semble pas les effrayer.
Par ailleurs, le recours au dessalement des eaux saumâtres et des eaux de mer et le
traitement des eaux usées sont considérés comme les solutions d’avenir et déjà
largement utilisés pour répondre aux besoins croissants en eau potable. La stratégie à
2030 vise ainsi la mise à contribution d’eau provenant des ressources non
conventionnelles aux alentours de 7% :
•
Réutilisation des eaux usées traitées (EUT) : 76% des établissements touristiques ont
formulé une demande pour ce type de technique (régions de Hammamet-Sud, El
Kantaoui, Djerba) grâce auquel ils peuvent économiser environ 1,5 million de m3
d’eau soit l’équivalent de 2,7 millions DT. L’utilisation d’eau traitée permet
d’entretenir, les golfs et jardins tout au long de l’année. Les objectifs d’utilisation
des EUT concernent l’irrigation de 910 hectares de terrains de golf et 900 ha pour
les jardins d’hôtels. Des subventions octroyées par la Sonede existent pour soutenir
ce programme.
•
Dessalement de l’eau : il existe actuellement 60 stations de dessalement
fonctionnelles pour une capacité globale de l’ordre de 40 000 m3 par jour. D’ici
2010, l’objectif est d’installer 60 nouvelles stations pour un coût estimé à 40 millions
DT24. Notons le fait qu’en l’état actuel de la technologie, les solutions de
dessalement sont critiquables d’un point de vue de la consommation d’énergie
induite.
2.5.4.3 La politique de réduction des consommations d’énergie
Au fur et à mesure que la Tunisie poursuit son développement économique, ses besoins
énergétiques augmentent. Depuis 1990, sa consommation a cru de 50%25 environ. Si la
disponibilité des ressources n’est pas remise en cause à court ou à moyen terme, la
dépendance énergétique reste problématique, notamment face à des ressources
dont les prix sont relativement volatiles (pétrole).
La Tunisie a donc lancé un programme d’efficacité énergétique. Le plan quadriennal
de 2008-2011 se base sur 3 axes :
•
l’efficacité énergétique ;
•
le recours aux énergies renouvelables ;
GHEDIRI H., Economie de l’eau dans le tourisme : le dessalement de l’eau de mer et les eaux usées
traitées à la rescousse, Le Quotidien, http://www.tunisia-today.com/archives/13816
25 Sources : ANME.
24
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
la substitution énergétique.
Le secteur touristique est concerné à plusieurs niveaux avec des mesures comme :
•
la mise en place de contrats-programmes d’efficacité énergétique (390 tous
secteurs confondus) ;
•
l’installation d’équipements de cogénération (70 MW tous secteurs confondus);
•
l’amélioration de l’efficacité énergétique dans les bâtiments (1500 unités dans le
tertiaire) ;
•
le chauffage solaire de l’eau (programme Prosol) ;
•
le développement du photovoltaïque.
Néanmoins, ces mesures sont intersectorielles et restent assez générales, excepté pour
le secteur du transport pour lequel des mesures plus spécifiques existent.
2.5.4.4 L’écolabel tunisien
Le MEDD a récemment mis en place l’écolabel tunisien, basé sur les normes
européennes, qui a pour but de développer la responsabilité environnementale des
entrepreneurs. Sa gestion a été confiée au CITET (Centre International des Technologies
de l’Environnement de Tunis). Les secteurs de l’exportation sont particulièrement visés
dont l’industrie hôtelière. Promu par la FTH, la mise en œuvre de ce label a débuté en
mai 2009 et 3 établissements ont pour l’instant reçu cette distinction.
Le label est organisé autour de six axes :
− l’optimisation de la consommation d’énergie,
− l’optimisation de la consommation d’eau,
− la gestion des déchets,
− l’utilisation préférentielle d’énergies renouvelables,
− l’utilisation de produits d’entretiens écologiques, la sensibilisation aux questions
de protection de l’environnement.
Ce label constitue donc un bon outil pour encourager les hôteliers à agir et leur donner
des pistes d’action. Organisé autour de 40 critères obligatoires et environ 15 facultatifs,
il est pour l’heure facultatif, mais reste comme le souligne le MEDD, un signal
d’importance pour les partenaires européens.
Cependant, un tel outil génère surtout des actions ponctuelles et limitées, même si elles
sont intéressantes. Les hôteliers sont généralement très contraints par les bâtiments
maintenant anciens dont la construction n’est pas adaptée à la maîtrise de la
consommation d’énergie (pas d’isolation…) et pour lesquels les actions les plus
significatives peuvent impliquer des investissements trop importants. Aujourd’hui
encore, les normes de construction sont obsolètes par rapport aux nouveaux enjeux du
bâtiment (isolation, matériaux, aérations, gestion différenciée des espaces…).
L’écolabel parait particulièrement intéressant comme préfiguration de futures normes
obligatoires pour les hébergements touristiques. Dans ce but, il serait nécessaire de le
rendre suffisamment souple pour évoluer au gré de son expérimentation par les
professionnels et de l’amélioration des connaissances sur les effets du changement
climatique. Par la suite, il nous semble nécessaire de lui donner une exigence plus
affirmée dans les actions à entreprendre.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
2.5.5 L’aménagement des plages
Deux types de plages sont à analyser : les plages dans les zones touristiques et celles
hors des zones touristiques. Dans les zones touristiques, l'Agence de protection et
d'aménagement du littoral (APAL) a en charge l'aménagement de l'espace qui est
donné en concession aux hôteliers ; pour les autres zones, il a été créé en 2002 une
Société des loisirs touristiques (SLT) dont le but est l'aménagement de plages publiques
dans l'ensemble des gouvernorats de Tunisie.
2.5.5.1 Les plans d'occupation des plages
Les habitants des centres urbains, vont passer des journées à la plage dans des
campings spontanés. Il s’agit dans ce cas d’un tourisme de proximité, de plus en plus
développé grâce à la généralisation de la voiture individuelle. Ce type de tourisme a
un impact négatif sur l'environnement. C'est pourquoi des espaces littoraux ont été
affectés à l’usage de vacanciers nationaux.
A cet effet, des plans d'occupation des plages (POP) ont été programmés pour une
gestion de la plage en la dotant des équipements nécessaires et des commodités
requises (parasols, tables, chaises en plastique, sanitaires, douches, etc.) au bien-être
des estivants. Le but des plages aménagées est d’offrir aux familles tunisiennes des
espaces aménagés de loisirs, moyennant des prix préférentiels. Elles sont tenues à
accueillir les estivants de 9h à 23h.
Ces plages sont gérées par les communes (52) ou par la société des loisirs touristiques,
par le biais de concession aux privés (34). L’aménagement requiert que la plage en
question soit raccordée aux réseaux de la Société nationale d'exploitation et de
distribution des eaux (SONEDE), de la Société tunisienne d'électricité et de gaz (STEG) et
de l’Office national de l'assainissement (ONAS). L’exploitant doit, selon le cahier des
charges, veiller sur la protection de la sécurité et de la propreté de la plage, ainsi que
sur le maintien de l’ordre et de la sécurité. Il doit appliquer les tarifs en vigueur.
Depuis son démarrage en 2002, l’opération a débouché sur l’aménagement de plages
de Tabarka à Médenine, financé à raison de 50 % par le fonds de la protection de
l’environnement touristique et 50 % par le budget de l'État. En 2008, plus de 80 plages
ont été aménagées dans 13 gouvernorats et d’ici 2010/11, il devrait y en avoir une
centaine.
2.5.5.2 Le label Pavillon Bleu
Les plages aménagées suscitent un vif engouement des Tunisiens. L’affluence est
grande et se compte par milliers. Au point qu’on ne trouve pas une place de libre,
notamment pendant les week-ends. Il est envisagé de les labelliser pavillon bleu, un
système de certification écologique volontaire ciblant les plages et les ports de
plaisance.
En Europe, notamment en France, ce label est attribué aux plages communales sur la
base de critères liés à l’environnement, à la gestion des déchets, à la gestion de l’eau
et à la sensibilisation du public aux problématiques environnementales. Une plage
labellisée "Pavillon bleu", est dotée de plus d’équipements comme un parcours pour
handicapés, des plaquettes en bois pour ne pas marcher sur un sable brûlant… La
différence se retrouve au niveau du coût de l’aménagement : 20 à 30 mille dinars pour
une plage aménagée et 55 à 60 MD pour une plage "Pavillon bleu". Le pavillon bleu est
aussi décerné aux plages et aux marinas qui satisfont un ensemble de critères
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spécifiques concernant l'information et l'éducation environnementale, la qualité de
l'eau, la sécurité, les services et la gestion environnementale.
L'écolabel «le pavillon bleu », a été remis, le 15 juin 2009, à cinq plages tunisiennes. Il
s’agit de plages situées dans les régions Zarzis (sud-est), Korba, Hammamet Sud et
Hammamet Nord, ainsi qu'au port de plaisance de Hammamet-sud (Nord-est). Les
certifications ont été remises lors d'une journée d'information organisée par l'Association
Tunisienne Pour la Protection de la Nature et de l'Environnement (ATPNE), sur le thème
« les pavillons bleus, des outils de préservation du littoral et de promotion du tourisme
écologique durable ».
Des certificats d'adhésion à l’écolabel ont été décernés dans le cadre du programme
du pavillon bleu, aux plages de Tabarka, Bizerte, Kélibia, plage Mnirat (Mahdia) et la
plage « «Penelope Magic Life » à Djerba ainsi qu'au port de plaisance de Monastir.
L’objectif de ces certifications est d'adapter le tourisme tunisien aux normes
internationales de tourisme écologique et durable et d’inculquer aux estivants
(touristes, population locale, personnel des plages et des marinas), les bonnes pratiques
environnementales et aussi les principes de citoyenneté et de respect de
l'environnement.
Ce label, par la multiplicité de ses critères, constitue un très bon outil pour
l’aménagement des plages.
2.5.6 En synthèse
Les outils décrits ici constituent un arsenal assez complet pour accompagner le
développement d’un tourisme plus respectueux de l’environnement. Cependant,
plusieurs limites viennent nuancer ce constat, limites qui préfigurent un certain nombre
de pistes d’adaptation :
•
il reste difficile de faire réellement appliquer les lois et réglementations ;
•
la connaissance du changement climatique et de ses impacts est récente et
encore limitée. Ainsi les outils existants, qu’il s’agisse de normes réglementaires, de
labels ou autres, ne prennent pas toujours la mesure de cet enjeu majeur. Il est
nécessaire de mettre en place des mécanismes de souplesse qui permettront de
faire évoluer facilement tous ces outils au fur et à mesure de la connaissance ;
•
les moyens nécessaires à cette connaissance, à travers des observatoires
performants, des programmes de recherche et des outils informatiques pointus,
nécessitent des moyens importants que la Tunisie n’est pas toujours à même de
mobiliser.
•
plus encore d’autres enjeux environnementaux, ceux posés ou aggravés par le
changement climatique nécessitent une réflexion et surtout une action
transversale et globale. Ainsi, la réelle application des principes de transversalité
dans la planification et la réglementation liée au tourisme doit être renforcée.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3 Les impacts environnementaux et socioéconomiques potentiels du changement
climatique sur les activités touristiques
Ce chapitre donne tout d’abord quelques précisions pour permettre une meilleure
compréhension des limites des résultats climatiques exposés (3.1).
Sont rappelés ensuite les principaux résultats globaux sur le climat de la Tunisie et les
projections climatiques pour le futur (3.2). Il décrit ensuite les impacts potentiels de ces
évolutions climatiques sur le tourisme tunisien. Sont décrits dans ce chapitre deux
catégories d’impacts possibles du changement climatique sur le tourisme :
− les impacts directs des effets climatiques (3.3) avec la présentation de
projections climatiques spécifiques à l’activité touristique réalisées pour cette
étude et leurs conséquences possibles ;
− les impacts sur les ressources touristiques à travers l’environnement (3.4).
Le chapitre est conclu par une approche de la question des coûts induits par le
changement climatique et ses impacts (3.5).
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
L’attractivité d’une destination touristique est le résultat de nombreux facteurs.
Patrimoine, paysage, accessibilité, convivialité, ancienneté et qualité de l’offre
touristique dessinent la spécificité de chaque destination. Le climat est, directement ou
indirectement, lié à une partie de ces facteurs. C’est d’abord au soleil et à la pluie que
l’on pense mais, au-delà, le climat influe sur l’existence et la qualité des ressources sur
lequel le tourisme s’appuie : une ressource en eau de qualité pour la baignade et la
consommation, les types de production agricoles pour le tourisme de terroir, les
espèces et milieux naturels propices à un tourisme de nature, enfin l’aspect des
paysages dans les différentes saisons. Le tourisme est donc un secteur particulièrement
sensible aux effets du changement climatique.
3.1 Remarque préliminaire
Nous tenons ici à alerter le lecteur sur les limites des exercices de projections
climatiques et surtout sur les fortes incertitudes qui pèsent sur les résultats à l’échelle
d’un pays comme la Tunisie. Un développement détaillé et illustré de ces
considérations est proposé dans l’annexe 2 jointe à ce rapport.
La méthode d’approche dominante pour explorer l’avenir du changement climatique
est celle des scénarios qui ont pour ambition de fournir des images du futur qui
découlent d’ensembles d’hypothèses. Ils ne se prononcent pas sur la probabilité
respective de ces futurs. Les scénarios sans mesures politiques (scénarios RSSE), utilisés
ici, combinent :
•
des modèles physico-chimiques du climat, appelés Modèles de circulation
générale ;
•
des modèles socio-économiques, ces derniers fournissant les quantités de GES
émis en fonction d’hypothèses faites sur l’évolution des forces motrices :
démographie, croissance économique, ressources utilisées et technologie.
On a donc, dans ces scénarios, deux marges d’incertitude :
•
le principal facteur influençant le changement climatique – les émissions de GES –
n’est pas connu, et dépend d’hypothèses socio-économiques : quelles vont être
les croissances démographiques et économiques ? va-t-on aller vers plus ou moins
d’échanges commerciaux ?… Si les prospectivistes peuvent rassembler des
tendances passées et élaborer des visions de l’avenir cohérentes, ils ne peuvent
pas présager du futur, et la recherche ne permettra pas de combler cette
incertitude « intrinsèque » aux sociétés humaines ;
•
l’autre facteur d’incertitude, qui peut-être réduit progressivement, consiste dans
l’accord imparfait des modèles pour des hypothèses d’émission similaires. C’est ici
la limite de notre compréhension actuelle du fonctionnement du climat qui est en
cause.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Lorsqu’il s’agit de réaliser des recherches sur le changement climatique dans une
région, il s’agit de prendre la mesure d’une incertitude de taille. Si au niveau mondial
l’existence du réchauffement climatique fait l’objet d’un consensus quasi-unanime,
cette conclusion est d’une utilité pratique limitée au niveau régional, d’autant plus que
les effets locaux de ce réchauffement global sont nettement plus incertains.
Il est donc important d’aller au-delà des scénarios mondiaux et d’opérer des descentes
géographiques d’échelles donnant des résultats plus pertinents à l’échelle d’un pays
comme la Tunisie. Par ailleurs, à défaut de disposer d’un scénario de référence, vu la
multiplicité des modèles, et de prévoir « le temps qu’il fera à Tunis en 2050 », il faut
s’attacher à mettre en lumière des tendances climatiques (plus de canicules, moins de
pluie en été…) et évaluer la vulnérabilité plus que les impacts : même si on ne sait pas
exactement quelle sera l’élévation du niveau de la mer en 2050, on peut dire que le
tourisme balnéaire est très vulnérable à celle-ci.
Dans tous les cas de figure, il importe avant tout d’être transparent sur le scénario
socio-économique de référence (ex : A2), le(s) modèle(s) utilisé(s), et la plage de
résultats qu’auraient pu donner d’autres modèles.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.2 La mise en œuvre de l’approche des
changements climatiques en Tunisie
La présente étude n’a pas pour vocation à produire de nouvelles connaissances sur les
projections climatiques en Tunisie. Elle vise à s’appuyer sur des travaux déjà réalisés par
la communauté scientifique nationale et internationale sur ce sujet ainsi que les études
menées dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention Cadre des Nations Unies
sur le Changement Climatique (UNFCCC).
En particulier, cette étude se réfère aux projections climatiques sur la Tunisie du projet
ACC26 ainsi qu’aux travaux sur la stratégie d’adaptation du littoral tunisien27. Pour cela,
nous reprendrons dans ce rapport de synthèse uniquement les éléments de résultats
qui serviront directement à l’étude.
3.2.1 Les hypothèses de travail
3.2.1.1 Le choix du modèle
On rappelle que l’étude prospective des changements climatiques consiste à articuler
des scénarios socio-économiques avec des modèles physico chimiques de
l’atmosphère.
Dans l’étude de référence qui fourni l’information sur les projections climatiques en
Tunisie (projet ACC), c’est le modèle HadCM3 du Hadley Centre en Grande Bretagne
qui a été retenu. C’est également sur ce modèle que se basent les projections des
indices climato-touristiques afin d’assurer la cohérence des travaux.
Il utilise des mailles de 0,5°x 0,5°, soit pour la Tunisie un maillage de 55 km et un
ensemble de 56 mailles. L’output du modèle est une prévision des quantités mensuelles
des précipitations et des niveaux de températures pour chaque maille.
L’analyse conduite ici est donc une analyse fondée sur un seul modèle. Il faut rappeler
qu’il existe de nombreux modèles concurrents. On a évoqué plus haut les différences
dans les résultats, pour un même scénario socio-économique en fonction du modèle
utilisé. Le choix de ce modèle a été fondé sur une étude comparative des résultats de
quatre modèles : le modèle canadien (CGCM2), le modèle australien (CSIROmk2), le
modèle américain (DOEPCM) et le modèle britannique (HadCM3). C’est ce dernier qui
a donné les résultats les plus plausibles. Ces résultats ont été validés sur un échantillon
de données réelles s’étendant sur cinq ans.
Ceci ne doit en aucun cas faire oublier l’existence de l’incertitude forte qui pèse sur les
résultats d’une analyse mono-modèle.
«Stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements
climatiques» (MARH et GTZ 2007).
27 Etude de la vulnérabilité environnementale et socio-économique du littoral tunisien face à une élévation
accélérée des niveaux de la mer dues aux changements climatiques et identification d’une stratégie
d’adaptation (MEDD – IHEE – GEF/UNDP, 2008)
26
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
La question des incertitudes
Si les résultats obtenus avec les modèles de circulation générale (GCM) concordent
assez bien quant aux effets moyens mondiaux, les écarts peuvent être conséquents à
l’échelle régionale.
L’Europe et la Méditerranée sont concernées par deux zones définies par le GIEC : NEU
(Europe du Nord) et SEM (Sud de l’Europe et Méditerranée), (Figure 7).
Figure 7 : Anomalies de température des régions du Sud de l'Europe et de la
Méditerranée SEM
Anomalies de températures (référence 1901-1950)
− observées (de 1906 à 2005, ligne noire)
− simulées par un ensemble de modèles
avec les forçages28 connus (enveloppe
rouge)
− projetées
pour
2001-2100
par
un
ensemble de modèles ayant utilisé le
scénario A1B.
Les barres verticales indiquent la fourchette de
réchauffement pour le scénario B1 (bleu), A1B
(orange) et A2 (rouge). pour un ensemble de
Source : GIEC, 2007 modèles
Les différents travaux exposés par le GIEC estiment que, selon le scénario A1B, le Sud
de la Méditerranée expérimentera un réchauffement marqué et que les précipitations
sont en baisse en toute saison pour une majorité de modèles. Cette mais aux
modulations saisonnières différentes.
La dispersion sur le cumul annuel de précipitations à la fin du XXIème siècle est de 5 à 7
%, mais avec des contrastes saisonniers marqués. Ainsi les modèles montrent une forte
dispersion sur l’amplitude de la baisse des précipitations estivales sur le Sud de l’Europe
(dispersion de 21%). On s’en convainc avec le graphique qui suit (Figure 8) où apparaît
la zone de transition (en blanc : moyenne des tendances faibles ou modèles montrant
des évolutions de signes opposés) dont on s’aperçoit de sa variation saisonnière.
28
quantités de gaz à effet de serre émises
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Figure 8 : Evolution des précipitations selon les modèles
Evolution des précipitations : annuel à gauche, hiver au milieu et été à droite
En bas : nombre de modèles qui prévoient une augmentation des précipitations
Source : GIEC, 2007
Il apparaît sur cette dernière carte que la Tunisie se situe dans une zone où la quasitotalité des modèles étudiés envisagent plutôt une baisse des précipitations dans
l’avenir. En effet, si de fortes incertitudes subsistent sur les tendances d’évolution des
précipitations au nord du bassin méditerranée, la tendance à l’assèchement sur la rive
sud de la Méditerranée constitue aujourd’hui un certain consensus.
3.2.1.2 Le choix des échéances
Les horizons temporels des projections du projet ACC sont 2020 (2011-2040) et 2050
(2041-2070) ; les variations des températures et des précipitations sont déterminées par
rapport à la période de référence (1961- 1990). Les climats simulés pour ces échéances
se basent sur l’étude des moyennes sur 30 ans réalisées sur des périodes centrées sur
chacun des horizons.
Cependant, soulignons qu’actuellement, dans la plupart des travaux en cours sur les
projections climatiques, l’horizon 2020 est abandonné parce que trop proche pour que
les scénarios puissent fournir des tendances significatives et que l’image du futur puisse
se dégager de la variabilité naturelle du climat : d’ailleurs aucun exercice de scénario
en matière de changement climatique ne considère plus cet horizon là.
3.2.1.3 Le choix des scénarios
Comme nous l’avons vu sur la question des incertitudes, tout travail de projection
nécessite d’explorer plusieurs scénarios possibles afin de rendre compte de la variabilité
des avenirs possibles selon les hypothèses socio-économiques envisagées.
Quatre scénarios SRES ont été étudiés par le projet ACC :
− haut : A1F,
− bas : B1,
− moyens : A2 et B2.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Les résultats exposés par le projet ACC concernent essentiellement les scénarios dits
moyens (A2 et B2) considérés jusqu’ici comme les plus proches de la réalité climatique
actuelle, appréciation qui risque toutefois d’être remise en cause par les fortes
émissions du début de la décennie (Raupach, Marland et al. 2007) :
•
le scénario A2 suppose l’augmentation rapide de la population mondiale (taux
de fécondité élevé), le maintien sur le long terme des techniques fortement
émettrices de GES29 et le recours persistant aux énergies fossiles. Ce scénario
décrit un monde hétérogène caractérisé par la préservation des identités locales,
un développement inégal selon les régions. C’est un scénario assez pessimiste qui
prévoit en 2100 un réchauffement moyen de 3,4° C dans une fourchette allant de
2 à 5,4° C ;
•
le scénario B2 est plutôt assez optimiste. Il mise sur un monde où l’accent est
placé sur des solutions régionales et locales dans le but d’augmenter la durabilité
économique, sociale et environnementale. Il prévoie une augmentation
moyenne de la température 2,4°C en 2100 dans une fourchette allant de 1,4 à
3,8°.
D’une façon générale, mais plus particulièrement pour le secteur touristique, les
impacts les plus rapides du changement climatique risquent d’être liés aux politiques
d’atténuation menées à tous les niveaux (local, national, international)30 plutôt qu’aux
modifications de la météo. En particulier dans le cas du tourisme Tunisien, l’impact des
politiques internationales de lutte contre le changement climatique sur le transport
aérien est une donnée essentielle (diminution de la mobilité des touristes,
compensation financière des émissions liées aux vols touristiques, incitation à éviter les
séjours touristiques de courte durée, incitation au tourisme de qualité au détriment du
tourisme de masse, etc.)
C’est pourquoi nous estimons que :
•
le scénario A2, qui représente un changement climatique rapide, fournit la vision
la plus réaliste. Cependant, parmi les scénarios définis par le GIEC, c’est le
scénario A1F, plus pessimiste encore, qui est considéré aujourd’hui comme le plus
proche des tendances actuellement observées (scénario du type tendanciel,
« Business as usual ») ;
•
Le scénario B2, qui envisage un changement climatique nettement plus modeste,
est aujourd’hui largement dépassé.
Parmi les scénarios définis par le GIEC, le scénario B1A est considéré aujourd’hui
comme le plus proche d’un scénario de stabilisation des concentrations de gaz à
effet de serre (GES) autour de 550 ppm. Les concentrations actuelles sont proches de
386 ppm, augmentant d’environ 2 ppm par an. Limiter la hausse des températures à
+2°C pour éviter un « changement climatique dangereux » nécessiterait une
stabilisation à 450 ppm, ce qui semble désormais peu réaliste. Il s’agit d’un scénario
considéré comme équivalent à un scénario volontariste dans lequel on considère
que l’on cherche à limiter le réchauffement à 2°C, soit des réductions d’émissions très
fortes dans tous les domaines (hébergement, transport local international…). Dans le
cas d’une telle volonté internationale, on s’attachera à étudier l’impact de politiques
d’atténuation ambitieuses sur la conjoncture internationale (évolution du transport
29
30
GES : Gaz à Effet de Serre.
La question de la hausse probable des prix du pétrole est hors du champ de l’étude
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
aérien) sans forcément s’intéresser au détail des impacts physiques qui ne sont pas
trop marqués.
3.2.2 L’étude du climat et de ses évolutions en Tunisie
3.2.2.1 Caractéristiques générales du climat de la Tunisie
Le climat de la Tunisie est de type méditerranéen à tendance chaude, aride à semiaride, avec des saisons contrastées et des variations spatiales et interannuelles
importantes. Ces caractères s’expliquent par :
•
une large ouverture sur la Méditerranée (des côtes qui s’étendent sur plus de 1600
km) ;
•
une large ouverture sur le Sahara au sud ;
•
un relief peu élevé et très aéré ;
•
une situation de carrefour, qui fait que le pays est traversé par différents types de
masses d’air (tropicales, polaires, maritimes, continentales…) et des perturbations
atmosphériques d’origine différentes.
L’ensoleillement
La Tunisie bénéficie d’un ensoleillement généreux en toute saison. Il constitue l’une des
principales attractions touristiques du pays. La moyenne annuelle du nombre d’heures
d’ensoleillement est très élevée et elle augmente du nord au sud en passant de 2300
heures à 3200 heures. Les jours longs et peu nuageux de la saison chaude enregistrent
une durée d’ensoleillement proche de la durée théorique du jour. En hiver, malgré une
nébulosité plus forte, la moyenne mensuelle des heures d’ensoleillement dépassent les
120 h au Nord et les 200 h au Sud. La moyenne mensuelle des intersaisons varie entre
180 et 230 h au Nord et 230 et 300 h au Sud. Le centre du pays est dans une situation
intermédiaire, mais plus proche de celle du Sud.
La température
Les moyennes annuelles de la température sont relativement élevées. Elles augmentent
du nord au sud en passant de 18,4° à Tabarka à 21,5° à Elborma. A 1090m d’altitude
Thala a une moyenne moins élevée que celle de Tabarka (15,2°C), elle constitue un
pôle de fraîcheur immergé dans une région plus chaude. Dans le Sud, la température
augmente de la côte vers l’intérieur dominé par le Sahara, alors que dans le reste du
pays elle diminue de la côte vers l’intérieur montagneux.
La tendance chaude du climat apparaît à travers les valeurs des moyennes annuelles,
mais aussi à travers les températures extrêmes maximales et minimales (Figure 9 et
Figure 10). En effet, la moyenne des maximales du mois d’août est supérieure à 32°C sur
les côtes et dépassent 36° dans le Sud du pays. La moyenne des minima de janvier
dépasse 6°C sur la côte et reste positive même dans les régions montagneuses. Les
maxima absolus dépassent les 45° dans la plupart des régions alors que les minima
absolus tombent très rarement sous les -5° C
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 9 : Température maximale
moyenne du mois d’août
Figure 10 : Température minimale
moyenne de janvier
Source : HENIA L. dir. 2008 : « Atlas de l’eau en Tunisie », Université de Tunis
L’humidité atmosphérique
Elle joue un rôle important dans la sensation de la chaleur et du froid. Elle augmente du
Sud vers le Nord et de l’intérieur vers les régions côtières. La moyenne annuelle va de
moins de 50 % dans le Sud Ouest à plus de 70 % sur les côtes. Lorsqu’une forte humidité
s’associe à une forte chaleur, l’ambiance thermique est très inconfortable.
Les vents
Les vents sont très variables en force et en direction suivant les régions et les saisons. Les
plus importants sur le plan bioclimatique sont :
•
le sirocco (Chhili), venant du sud et du sud ouest, ramène des masses d’air
saharien chaud et sec qui s’étendent sur le centre et le Sud du pays et atteignent
parfois le Nord ;
•
les vents du nord sont plus humides et plus frais surtout en hiver. Ils sont assez
violents quand ils accompagnent des perturbations atmosphériques ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
les vents d’ouest assez froids et secs en hiver, sont adoucis sur la côte par l’effet
de la Méditerranée ;
•
la brise de mer soufflant pendant la période chaude a un effet rafraîchissant, mais
elle ne concerne souvent qu’une frange côtière étroite.
Les précipitations
Les précipitations sont globalement modestes. Elles diminuent du nord au sud : 1530
mm à Ain Draham au Nord, 320 mm à Sousse au centre, 97 mm à Tozeur au Sud. Le
nombre de jours de pluie est relativement faible à cause de la faiblesse des totaux
pluviométriques et de la concentration des précipitations dans le temps (114 jours de
pluie par an à Tabarka et 23 jours à Tozeur). Ces précipitations se concentrent en
dehors de la saison chaude.
Les saisons
L’année est divisée en 4 saisons dont les caractères et la longueur diffèrent légèrement
d’une région à une autre :
•
un été chaud et sec dans toutes les régions. Il l’est de plus en plus chaud en allant
du Nord vers le Sud. Sur la côte, en comparaison avec les régions intérieures, la
diminution de la température tend à améliorer le confort climatique mais
l’augmentation de l’humidité atmosphérique œuvre dans le sens contraire ;
•
un hiver doux et humide sur les côtes, plus rigoureux à l’intérieur et sur les reliefs
élevés. Dans la partie sud ouest, la douceur diurne s’oppose à un froid nocturne
intense, considéré comme difficilement supportable ;
•
les saisons intermédiaires constituent une transition plus ou moins rapide et plus ou
moins graduelle entre l’hiver et l’été. L’automne est plus chaud et plus court que
le printemps. Les moyennes des températures masquent souvent une grande
variabilité inter journalière. Au cours de ces deux saisons en effet, les masses d’air
d’origines et de caractères différents se relayaient sur le pays. Les perturbations
atmosphériques sont fréquentes aussi pendant cette période de l’année.
La variabilité du climat
La variabilité du climat est grande partout, mais elle est plus marquée dans le centre
du pays et elle affecte particulièrement les précipitations. Les cycles d’années sèches
sont séparés par de rares années très pluvieuses (à risque d’inondation). La variation
interannuelle de la température est plus faible comparativement à celle des
précipitations. Pendant une année chaude, l’augmentation de la température ne
concerne pas nécessairement toutes les saisons, elle peut même se traduire par une
évolution opposée entre l’hiver et l’été (à un hiver très froid succède un été très
chaud). La variation de la température et des précipitations entraîne aussi une
variation de la longueur des saisons et donc de leur début et de leur fin, précoces ou
tardifs. Cette variabilité est de nature à influencer la longueur des saisons touristiques.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Les régions climatiques
La variation des conditions climatiques du nord vers le sud et de la côte vers l’intérieur
nous permet de distinguer 6 régions climatiques (Figure 11 ci-dessous) :
•
le Nord-Ouest, montagneux et assez pluvieux (pluie > 600mm/an), se caractérise
par un hiver froid et nuageux mais les étés sont très chauds, voire même torrides
dans les vallées ;
•
le Nord-Est, moins élevé et moins humide (pluie entre 400 et 600mm/an), est plus
favorisé sur le plan de l’ensoleillement et de la température grâce à sa façade
maritime ;
•
le Centre-Ouest est dominé par un relief de plateaux de faible altitude. Son
appartenance au domaine semi-aride de la Tunisie centrale fait que les
précipitations sont comprises entre 200 et 400 mm/an. C’est une région bien
ensoleillée mais les amplitudes thermiques diurnes et annuelles sont élevées. Les
hivers y sont froids et inconfortables ;
•
le Centre-Est, comprenant le Sahel et les basses steppes, connaît un climat plus
tempéré sur le plan thermique grâce à l’influence maritime mais les étés restent
chauds et les jours torrides peuvent être enregistrés même sur la côte ;
•
le Sud-Ouest est dominé par les fortes chaleurs et l’aridité qui caractérisent le
domaine désertique (pluie <150 mm/an). Les vents de sable sont assez fréquents
et les amplitudes thermiques élevées ;
•
le Sud-Est, grâce à sa façade maritime, se caractérise par des amplitudes
thermiques plus faibles, les vents marins atténuent légèrement les chaleurs
estivales mais les vents sahariens englobent, quand ils soufflent, cette région dans
le domaine désertique.
Ces nuances régionales perceptibles au niveau des moyennes annuelles s’estompent
au cours de certains jours de l’été quant les vents chauds s’étendent sur l’ensemble du
pays. Ces variations spatio-temporelles constituent à la fois une richesse et une
contrainte avec au final un potentiel climato-touristique non négligeable pour la
diversification des activités touristiques.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 11 : Carte des régions climatiques
Source : HENIA L. dir. 2008 : « Atlas de l’eau en Tunisie » Université de Tunis
3.2.2.2 Evolution récente observée du climat de la Tunisie
Plusieurs chercheurs se sont intéressés à l’évolution du climat de la Tunisie au cours du
20ème siècle (voir, entre autres, LABEN et al. 1996, SAKISS 1994, HENIA et ALOUANE 2007
et 2008). La recherche du terme tendanciel appliquée à des séries de mesures de la
pluie et de la température fiables, couvrant le 20ème siècle, montre qu’il n’y a pas de
tendance dominante, statistiquement significative. En revanche, le climat de la Tunisie
présente, depuis quelques décennies, des signes de changement au niveau de la
température, de la pluie et de la variabilité. La température montre une tendance très
nette à la hausse à partir des années 1970 (Figure 12).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Figure 12 : Evolution de la température à Kairouan
Source : MARH et GTZ 2005
L’évolution des précipitations à partir du début du 20ème siècle ne laisse apparaître
aucune tendance significative, ni à la hausse, ni à la baisse. Par contre, si on considère
uniquement la deuxième moitié du 20ème siècle, la tendance à la baisse est très nette
(MEDD, 2007).
La variabilité du climat devient plus accentuée. La dernière décennie a été marquée,
en Tunisie, par une intensification du rythme des situations extrêmes aussi bien au
niveau de la température que celui de la pluie. Quatre années sèches successives ont
marqué la période allant de 1999 à 2002, suivies par quatre années humides de 2003 à
2006. Des inondations ont marqué l’année 2003 à deux reprises (en janvier et en
septembre) ainsi que l’année 2007. L’été 2003 a été parmi les plus chauds depuis le
début du 20ème siècle. La fréquence des canicules est en hausse (Figure 13).
Figure 13 : Evolution du nombre annuel des jours caniculaires
Nombre de jours
nombre annuel des jours caniculaires
80
60
40
20
0
1990
1992
1994
1996
Kairouan
Linéaire (Monastir)
1998
2000
2002
2004
Monastir
Linéaire (Kairouan)
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
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3.2.2.3 Les avenirs climatiques possibles pour la Tunisie
D’après le quatrième rapport du GIEC (GIEC/IPCC 2007), l’Afrique du Nord y compris la
Tunisie, ainsi qu’une bonne partie de la Méditerranée occidentale connaîtront une
augmentation de la température qui sera, selon les scénarios, de 1 à 2°C en 2030 et de
3 à 5°C en 2100 et ce par rapport à la période 1980-1990. Selon la même source, la
température dans cette aire géographique, a accusé déjà une nette augmentation
(de 1 à 2°C) entre 1970 et 2004.
Les résultats spécifiques à la Tunisie présentés ci-dessous proviennent de l’étude ACC
(MARH et GTZ 2007). Les deux paramètres observés par les modèles sont la
température moyenne et les précipitations.
La figure suivante montre l’évolution de cette température moyenne pour la Tunisie,
selon les 4 scénarios étudiés pour le siècle à venir.
Figure 14 : Evolution de la température moyenne en Tunisie selon les scénarios
Source : MARH et GTZ 2007,
Tableau 8 : Evolution prévue de la température et des précipitations en Tunisie
Evolution
Horizon 2030
Horizon 2050
Température
A la hausse
1,2 à 1,9°C
1,6 à 2,7°C
Précipitation
A la baisse
- 7,5 à – 15 %
-11 à 29 %
Source : MARH et GTZ 2007,
Selon les projections présentées, il fera donc plus chaud et plus sec en Tunisie mais
l’ampleur du changement varie selon les régions et les saisons :
•
le réchauffement sera plus marqué au Sud qu’au Nord et à l’intérieur du pays que
sur la côte ; à l’échelle saisonnière il sera plus marqué en été (Tableau 8 et Figure
15) ;
•
•
la baisse des précipitations sera plus marquée au Sud qu’au Nord et au niveau de
la Tunisie orientale plus qu’au niveau des hautes terres intérieures (Tableau 8 et
Source : MARH et GTZ 2007
Figure 16).
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Figure 15 : Projection de l’évolution de la température en °C selon le scénario A2
Source : MARH et GTZ 2007
Figure 16 : Projection de l’évolution des précipitations (en %) selon le scénario A2
Source : MARH et GTZ 2007
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3.2.3 Le niveau de la mer
L’interface terre-mer rend les zones côtières vulnérables aux variations de niveaux
d’eau, au régime des houles, aux tempêtes et à d’autres facteurs de nature
climatique. Le changement climatique aura des impacts sur tous ces paramètres.
3.2.3.1 Le niveau actuel de la mer en hausse en Tunisie
Il est démontré, dans plusieurs études (OUESLATI 2004, 2005, MEDD, 2000, 2007 …) que
l’évolution récente du niveau de la mer en Tunisie constitue un facteur de la
vulnérabilité de son littoral (MEDD 2000 et 2007). Les données de mesures et de
l’observation disponibles (pour la Tunisie et la Méditerranée), les images satellites et les
résultats d’un modèle de circulation des eaux près des côtes tunisiennes développé
par l’INSTM (MEDD. 2008) ont permis de conclure aux faits suivants :
•
le niveau de l’eau près des côtes tunisiennes est plus élevé que vers le large (10 à
20 cm) sous l’effet de la circulation induite par le vent et les effets thermohalins.
Cette surélévation est plus importante en hiver qu’en été ;
•
les différents indices disponibles permettent une bonne connaissance des
variations du niveau marin en Tunisie, notamment pour le quaternaire et la
période de l’antiquité ;
•
il existe de nombreux témoignages (vestiges archéologiques…) tout à fait
indubitables de ces oscillations.
Les observations faites dans les terrains tectoniquement stables, en particulier celles
menées par des géomorphologues et/ou des archéologues (notamment OUESLATI
2004), permettent de conclure que la valeur de l’élévation d’origine eustatique du
niveau marin depuis l’antiquité se situe entre 20 et 40 cm. Différentes publications ont
révélé des modifications parfois sensibles dans la position du trait de côte.
L’analyse des enregistrements marégraphiques confirme la continuation de la montée
marine au cours du 20ème siècle. Les valeurs obtenues sont souvent supérieures à la
moyenne mondiale et ce sous l’influence du comportement tectonique du sol côtier en
différents points et tout particulièrement sur l’ensemble des côtes méridionales soumises
à des phénomènes de subsidence.
3.2.3.2 La hausse accélérée du niveau de la mer dans la perspective du
changement climatique
Comme nous l’avons déjà vu dans les paragraphes précédents, aussi bien le rapport
du GIEC que les études qui focalisent sur la Méditerranée ou la Tunisie (4ème rapport du
GIEC 2007, MARH 2005, MEDD 2007…) mentionnent l’ampleur du changement
climatique prévu pour la marge sud de la Méditerranée et en l’occurrence pour la
Tunisie. Ce qui pourrait se traduire, entre autres, par une élévation importante de la
température des eaux marines près des côtes tunisiennes et par suite une élévation
importante et accélérée du niveau de la mer (EANM).
Le GIEC estime que durant le 20ème siècle le niveau de la mer a augmenté de 12 à 22
cm avec une accélération à la fin du siècle, dont on ne sait pour l’instant si elle est due
à une accélération du réchauffement climatique ou à des phénomènes de variabilité
de moyenne durée. Pour le 21ème siècle, selon les scénarios de réchauffement
climatique, l’élévation prévisible en fin de siècle est comprise entre 18 et 38 cm dans le
meilleur des cas et entre 26 et 59 cm pour le scénario de réchauffement le plus
important.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 17 : Elévation du niveau de la mer selon le RSSE
Source : GIEC
Tenant compte des résultats du 3ème rapport du GIEC, d’un certain nombre d’études
récentes sur la variation du niveau de la mer en Méditerranée et près des côtes
tunisiennes et d’un certain nombre d’hypothèses relatives à la politique du pays en
matière de l’environnement littoral, l’étude du MEDD (2007) a défini, trois scénarios :
Tableau 9 : Les scénarios de l’évolution de la température et du niveau de la mer en
Tunisie
Scénario
Echelle de temps
Elévation de la température Elévation du niveau de la mer
Scénario MR :
(maximum de
risque)
1990 – 2100
4,6°C
50 cm
1990 – 2050
2,2°C
18 cm
1990 – 2030
1,0°C
12 cm
Scénario R
1990 – 2100
2,9°C
38 cm
(de référence)
1990 – 2050
1,6°C
16 cm
1990 – 2030
0,8°C
10 cm
1990 – 2100
2,0°C
30 cm
1990 – 2050
0,9°C
15 cm
1990 – 2030
0,5°C
8 cm
Scénario mR
(minimum de
risque)
Source : MEDD, 2007
Seul le scénario maximum de risque à l’échéance de 2100 est retenu dans cette étude
pour l’évaluation des risques liés à l’EANM, c’est-à-dire une élévation du niveau de la
mer de 50 cm.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
L’approche par scénarios trouve ici sa justification du fait que la vulnérabilité du littoral
tunisien à l’élévation accélérée du niveau de la mer est fonction de plusieurs facteurs
dont certains sont entourés d’incertitudes comme l’évolution du climat global, la
réponse des eaux océaniques en général et celles de la Méditerranée en particulier
aux changements climatiques, l’évolution socio-économique et la politique nationale
relative au littoral.
Il faut cependant faire remarquer que les émissions du début du 21ème siècle nous
placent au dessus du scénario le plus pessimiste du GIEC et que des voix s’élèvent
actuellement pour se demander si les scénarios SRES, élaborés il y a une dizaine
d’années, sont encore d’actualité.
De plus, dans les prévisions du GIEC la contribution de la fonte des glaciers du
Groenland et le détachement des icebergs de l’Antarctique peuvent être sous estimés.
De fortes incertitudes (expliquant la réticence du GIEC à les prendre en compte)
pèsent sur les phénomènes de synergie, qui pourraient accélérer ces phénomènes..
Cependant une littérature récente et croissante les concerne et il ne paraît pas exclu
que ces phénomènes se traduisent par une élévation du niveau de la mer nettement
plus importante (Schlermeier 2004).
Ces considérations nous incitent à ne pas nous fonder uniquement sur les scénarios du
GIEC comme le font la plupart des études récemment publiées, lesquelles prennent en
compte comme hypothèse la hausse moyenne prévue par le GIEC c’est-à-dire de
l’ordre de 40 cm à la fin du siècle. Une version de ce choix qui nous paraît raisonnable
est celle de l’Association des assureurs britanniques qui envisage une élévation du
niveau de la mer de 40 cm dès 2040 (Association of British insurers 2006). Dès
maintenant, les nouveaux ouvrages à longue durée de vie sont dimensionnés en
fonction d’une élévation de un mètre aux Pays Bas, au Canada (digues,
ponts…)(Ressources Naturelles Canada 2008).
Cette projection ne remet pas en cause l’analyse approfondie des impacts possibles
d’une EANM de 50 cm réalisée pour la Tunisie en 2007. Il est juste nécessaire de
souligner que l’échéance à laquelle cette élévation est envisagée est sans doute sousévaluée et que les impacts décrits relèveront plutôt des décennies à venir que de la fin
du siècle.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3 Les impacts directs des effets climatiques sur le
tourisme
Le changement climatique engendrera, comme nous l’avons vu, une série de
modifications des paramètres climatiques. Ces évolutions auront un impact direct sur le
climat ressenti – « la météo » – dans les destinations touristiques et, par conséquent,
pourront influer sur la répartition spatiale et temporelle de l’activité touristique.
Une activité vulnérable mais des impacts incertains
Le haut degré d’incertitude qui se dégage des projections climatiques montre qu’il est
nécessaire de parler d’impacts potentiels et non pas d’impacts prévisibles, les scénarios
climatiques actuels ne procurant pas des résultats locaux assez fins (micro-climats) et
présentant une variabilité conséquente d’un scénario à l’autre. C’est donc avec ce
regard que l’on doit considérer les résultats présentés tant par l’étude ACC que par les
projections spécifiquement réalisées pour la présente étude.
Figure 18 : Quelques effets attendus du changement climatique sur les destinations
touristiques méditerranéennes
Source : G. Vereczi, OMT, 2007
Une étude française récente31 (MEIE-DIACT-MEEDDM, 2009) a cherché à améliorer la
connaissance des exigences climatiques des touristes français : quel est le poids du
climat dans la prise de décision touristique, à quels éléments les touristes sont-ils
sensibles ?
Bureau de la prospective et de l'évaluation économique-S/DP3E-Direction générale de la
compétitivité de l'industrie et des services (DGCIS) du Ministère de l’Economie de l’Industrie et de l’Emploi –
Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de la Mer (MEEDDM) – Délégation
interministérielle à l’Aménagement et à la Compétitivité des Territoires (DIACT), 2009, « Météorologie, climat
et déplacements touristiques 2009 », étude réalisée par TEC et le CREDOC.
31
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
81/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Les facteurs climatiques déclenchant les changements de comportement sont
difficilement prévisibles, même si certains viennent facilement à l’esprit : par exemple
une augmentation importante des cancers de la peau conjuguée avec un
matraquage médiatique. D’autres mécanismes pourraient être plus inattendus : les
européens du nord pourraient se désintéresser des résidences secondaires au sud de
l’Europe ou de la Méditerranée s’ils constatent qu’il y fait trop chaud. Les variations
quant à la fréquence et à la violence des précipitations entreront également en jeu.
Les résultats de cette étude remettent en cause l’idée jusqu’ici soutenue (Scott, D.,
Gössling et al. 2008) que les températures supportées par les touristes sont relativement
modérées : entre 25 et 29°C par exemple pour les séjours balnéaires. Ceci a pu laisser
penser à une forte vulnérabilité à une hausse des températures estivales moyennes ou
à des épisodes caniculaires. Cette nouvelle enquête (visant toutefois une nationalité
différente) semble montrer non seulement que la plage de tolérance est beaucoup
plus large, avec jusqu’à 33°C pour des séjours à la mer, ou 34°C pour les activités
balnéaires, mais également une faible répulsion pour la canicule. Attention cependant
car on peut raisonnablement penser que les touristes sous-estiment leur vulnérabilité à
la canicule : les températures qu’ils mentionnent comme « trop chaudes » le sont
vraiment trop et sont déjà au-delà de certains seuils considérés comme « alerte
canicule ».
Ces résultats nous invitent donc à relativiser le poids de la température, tout en le
maintenant, évidemment, dans les indices de confort touristique, et modérer les
affirmations de type « dans 30 ans les étés seront trop chauds en Méditerranée ».
Par ailleurs, le climat est un facteur de décision important, mais pas le premier facteur
dans les décisions des touristes. Il arrive en 3ème ou 4ème position, selon les études,
derrière le coût, la beauté des paysages et des sites et parfois la découverte de
nouveaux lieux. Il reste qu’une partie des voyageurs n’est absolument pas sensible au
climat ou à la météo : soit parce qu’il faut déjà beau chez eux, soit parce que leurs
vacances sont contraintes (visite famille et amis) ou leurs activités indépendantes du
climat (activités culturelles notamment).
Dans les paragraphes qui suivent, nous exposons d’abord la notion de potentiel
climato-touristique (3.3.1) et en quoi elle intéresse notre étude. Nous présentons ensuite
les travaux réalisés pour notre étude sur les évolutions de cet indicateur en Tunisie
(3.3.2). Enfin la dernière partie (3.3.3) tire de ces travaux les conséquences possibles sur
l’activité touristique en Tunisie.
3.3.1 Le potentiel climato-touristique
Sur la question du rapport entre climatologie et tourisme, il nous a semblé nécessaire
d’exposer dans ce rapport l’état de la réflexion et de la recherche internationale.
La compréhension des préférences climatiques des touristes, des climats plus ou moins
favorables au tourisme, n’est pas une préoccupation récente. Les travaux visant à
affiner ces connaissances reposent notamment sur la construction d’indices de
préférences climatiques des touristes.
A la fin des années quatre vingt, J.P. Besancenot a produit une analyse détaillée des
différents facteurs définissant les attentes des touristes (Besancenot 1989) et fourni des
plages d’acceptabilité en particulier dans les domaines :
− de l’ensoleillement (durée, régularité) ;
− des précipitations diurnes, qui sont acceptables et même souhaitables dans
certaines limites ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
82/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− du confort thermique qui résulte d’une combinaison de la température, de
l’humidité de l’air et du vent.
Ainsi, depuis plusieurs décennies, un certain nombre de travaux s’efforcent de relier le
climat au confort physique des touristes (le confort maximum étant supposé atteint
quand le corps au repos dépense une énergie minimum) et d’en déduire l’aptitude
des destinations à les accueillir, ainsi que leurs avantages comparatifs (Mieczkowski
1985; Besancenot 1989; Matzarakis and De Freitas 2001; Matzarakis, C.R. de Freitas et al.
2004). Des statisticiens et économètres se penchent sur les changements de
comportement des touristes en fonction des températures (Madison 2001 et Lise 2002)
et en déduisent des situations considérées comme optimales.
Lorsque la question du changement climatique est apparue dans le domaine des
études sur le tourisme, la tentation a été forte d’examiner comment ces aptitudes
pourraient évoluer dans le futur, selon les scénarios.
Les chiffres qui résultent de ces travaux peuvent paraître parfois discutables ; ils ont
toutefois l’intérêt de mettre en évidence l’existence des dépassements de seuils qui
pourraient résulter du changement climatique. Il faut néanmoins être très prudent quant
aux conclusions à tirer de ces indications pour les comportements futurs des touristes.
En effet on a pu constater que les exigences climatiques des touristes varient à la fois
selon les populations concernées et selon les époques. Les exigences climatiques des
habitants du nord de l’Europe ne sont évidemment pas les mêmes que celles d’un
Français ou d’un Espagnol : le climat (actuel) de la Bretagne sera plus attrayant pour
un Britannique que pour un Français, ce qui ne veut pas dire que le premier ne
privilégiera pas une destination plus ensoleillée. On sait également que la recherche du
soleil est un comportement assez récent (au XIXème on se baignait en hiver, mais surtout
pas en été). Les populations méditerranéennes recherchent l’ombre et la fraîcheur,
c’était aussi le cas des britanniques en Inde quand ils établissaient leurs villégiatures
d’été en altitude. En un siècle les bienfaits recherchés dans un séjour à la mer ont
totalement changé (du désir d’endurcir son corps au farniente…) et avec eux les
exigences en matière de température de l’eau.
3.3.2 L’indice de potentiel climato-touristique journalier (IPCTJ) pour
la Tunisie
A la lumière des réflexions qui précèdent, il est apparu indispensable de compléter les
travaux existants sur les projections climatiques de la Tunisie (focalisées sur température
et volume de précipitation), pour traiter le cas particulier du secteur touristique qui
nécessite des indicateurs spécifiques sur les évolutions du climat. Ainsi un travail de
projections climatique a été réalisé spécifiquement pour cette présenté sur le secteur
du tourisme32.
3.3.2.1 Cadrage méthodologique
Les ambiances climatiques les plus favorables au tourisme sont celles qui présentent
deux caractéristiques fondamentales :
− le confort thermique ;
32 Les travaux présentés sur l’IPCTJ ont été réalisés par le Pr. Latifa HENIA, docteur en climatologie des
Universités de Tunis et de Paris-La Sorbonne
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
83/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− l’absence de phénomènes atmosphériques qui risquent de gêner les activités
de plein air.
L’indice de potentiel climato touristique journalier (IPCTJ) combine la notion
d’ambiance thermique et les caractéristiques des phénomènes atmosphériques.
Pour caractériser les ambiances thermiques, nous nous référons aux indices de
bioclimatologie humaine. Certains de ces indices associent la température et
l’humidité de l’air, d’autres, la température et la vitesse du vent ou bien les trois
paramètres à la fois (Besancenot, 1990).
Chacun de ces indices a des avantages et des inconvénients et son intérêt change
d’un climat à un autre et même d’une saison climatique à une autre. Une analyse
critique de différents indices appliqués au climat de la Tunisie a été réalisée par P.
Escourrou (1996) et par T. Alouane (2002).
Les indices bioclimatiques les plus utilisés par les chercheurs sont :
•
l’indice de confort thermique THI (temperature-humidity index) de THOM, qui
intègre la température (T°C) et l’humidité relative (U%) ;
•
l’indice K de Sipple et de Passel (ou le cooling power) qui intègre la température
(T°C) et la vitesse du vent (Vm/s).
L’indice obtenu de cette combinaison est appelé l’Indice de l’Ambiance Thermique
(IAT)
Au niveau de la journée, l’IAT est la moyenne des huit valeurs de cet indice à l’échelle
tri-horaire. Cinq classes d'ambiances thermiques journalières (ATJ) sont définies selon la
valeur de cet indice qui va de 0 à 6 (Tableau 10).
Tableau 10 : Classes d'ambiances thermiques journalières (ATJ) selon les valeurs de
l'IAT
Classe ATJ
Très
inconfortable
Inconfortable
Modérée
Confortable
Très
confortable
Valeur de l'IAT
<1,2
1,2 – 2,3
2,4 - 3,6
3,7 – 4,8
> 4,8
Si l’ambiance thermique est un facteur essentiel du confort touristique, certains
phénomènes atmosphériques peuvent gêner les activités de plein air. Pour le cas de la
Tunisie, il s’agit essentiellement des précipitations, des vents forts et du vent de sable.
Ajoutons à ceci, la fraction d’insolation qui a une influence sur le degré du confort
physique et psychique de l’organisme humain.
Pour chacun de ces paramètres a été définit un code : code 1 dans le cas où il ne
constitue pas une contrainte pour les activités de plein air et 0 lorsqu’il est contraignant,
en passant par une valeur intermédiaire (0,5) lorsque l’empêchement n’est pas total.
L’IPCTJ combine à l’échelle de la journée les valeurs de l’IAT et les caractéristiques de
ces phénomènes. La journée est considérée différemment selon les saisons.
Chaque jour de l’année se voit accorder un indice de potentiel climato-touristique
(IPCTJ) égal à la somme des codes de l’indice de l’ambiance thermique (codé de 0 à
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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6) et de ceux relatifs aux phénomènes atmosphériques (dont de code peut être 0, 0.5
ou 1)
IPCTJ = IAT + IP + IV + IE
− IAT : indice d’ambiance thermique (codé de 0 à 6) ;
− IP : indice de précipitation ;
− IV : indice du vent (il regroupe les jours de vent de sable et de vent fort) ;
− IE: indice d'ensoleillement.
Cinq classes d’ambiances climato-touristiques (Tableau 11) sont ainsi définies de très
favorable à très défavorable.
Tableau 11 : Les classes de l’IPCTJ
Valeurs de IPTCJ
<2
2 à 3,9
4 à 5,9
Classes
Très défavorable*
Défavorable Modérée
6 à 7,9
>=8
Favorable
Très favorable**
Source : HENIA et ALOUANE 2008
* Au nombre des jours dont l’indice est <2, nous avons ajouté, pour la classe très défavorable, les jours, où
un phénomène atmosphérique constitue un empêchement (vent d’une vitesse >8m/s, vent de sable, pluie
>5 mm) et ce quelle que soit la valeur de l’IPCTJ.
** Les jours très favorables sont ceux qui se caractérisent par des ambiances thermiques très confortables
en absence de tout phénomène atmosphérique contraignant.
L’importance du tourisme balnéaire en Tunisie nécessite de définir les ambiances plus
ou moins favorables à cette activité spécifique en se basant sur les indices définis plus
haut. Cette activité nécessite 3 conditions météorologiques :
•
un temps peu venteux (V < 8m/s) ;
•
une journée très peu pluvieuse (pluie < 5mm /jour) ;
•
une température assez douce car l’air froid augmente la sensation d’inconfort, en
particulier pour la population locale et les touristes des pays. Le critère thermique
retenu n’est pas la température sous abri mais le refroidissement éolien car, en
début et en fin de saison balnéaire, les températures ressenties peu élevées sont
influencées par la vitesse du vent. Il est donc considéré qu’un refroidissement
inférieur à 250Kcal/m2/h au milieu de la journée est nécessaire pour l’activité
balnéaire pour l’ensemble des touristes.
Etant donné que les ambiances thermiques varient entre des ambiances douces et
confortables et des ambiances torrides du milieu de l’été nous avons distingué deux
types d’ambiances climatiques balnéaires :
•
les ambiances balnéaires favorables (THI < 26.5° au milieu de la journée) ;
•
les ambiances balnéaires difficiles ou « balnéaire refuge » (THI >= 26.5° au milieu
de la journée). Cette ambiance thermique inconfortable pousse souvent les gens
à chercher refuge dans les eaux fraîches de la Méditerranée. Le choix de l’indice
THI est du au fait que l’humidité atmosphérique a plus d’impact sur le confort en
présence de température élevée.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
85/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.2.2 Données et résultats spécifiques à la présente étude
L’étude des données observées
Nous utilisons les mesures et observations de différents paramètres météorologiques
composant l’ambiance climatique (température, vent, humidité de l’air, pluie,
phénomènes de sable, durée d’insolation) et ce à l’échelle tri-horaire.
Ces données concernent la dernière décennie (1991 – 2000) et 9 stations
représentatives aussi bien du littoral que de l’intérieur : les stations littorales Tabarka,
Nabeul, Monastir, Djerba, Houmet Souk ; Tozeur est une région de tourisme saharien ; Le
Kef, Thala et Seliana sont des stations intérieures et élévées.
Pour l’étude des ambiances climato-touristiques journalières favorables aux activités de
plein air, nous avons fait varier, selon les saisons, le nombre de relevés tri-horaires
adopté dans cette étude. Pour l’hiver (où le jour, période d’activité de plein air, est
court), nous retenons 5 groupes de relevés (ceux de 6h, 9h, 12h, 15h, 18h). Pour la
saison estivale, nous avons retenu 7 relevés sur 8 par jour (6h, 9h, 12h, 15h, 18h, 21h et
0h), vu que pendant cette saison, de nombreuses activités ont un caractère nocturne
et sont pratiquées en plein air profitant du répit thermique nocturne après la canicule
du jour. Pour les saisons intermédiaires, nous retenons les observations tri-horaires de 6h,
9h, 12h, 15h, 18h et 21h.
Les projections futures
La figure suivante reprend les projections présentées dans le 4ème rapport du GIEC pour
une sélection de scénarios.
Figure 19 : Quelques scénarios du GIEC
Source : d’après rapport du GIEC, 2007
La Figure 19 laisse apparaître que :
− pour l’échéance 2030, les différents scénarios donnent des résultats très
proches. Partant de ce graphique, nous avons retenu, pour 2030, une
augmentation moyenne de la température de 0,5°C par rapport à 1990 ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− pour l’échéance 2050 nous avons tablé sur une augmentation de la
température de 1°C pour le scénario B2 et de 2°C pour le scénario A2.
Pour étudier l’impact du réchauffement global sur le confort thermique et sur le
potentiel climato touristique de la Tunisie, nous avons ajouté ces valeurs aux données
climatiques tri-horaires de la période étudiée (1991-2000).
En suivant cette approche méthodologique nous essayons de dégager les impacts
probables du changement climatique sur le potentiel climatique de la Tunisie, en se
référant aux scénarios A2 et B2 pour les deux échéances 2030 et 2050.
3.3.2.3 Les conditions climato-touristiques actuelles
La prédominance des ambiances thermiques confortables
Les travaux ont tout d’abord consisté à étudier les ambiances thermiques actuelles
dans les régions touristiques.
Tableau 12 : Fréquence des types d'ambiances thermiques (% du nombre total des
jours de l'année)
Modérée
Confortable
16
47
Très
confortable
33
Tabarka
Inconfortable à très
inconfortable
4
Nabeul
1
18
39
42
Monastir
2
20
40
38
Djerba
2
22
35
41
Le Kef
4
31
44
21
Tozeur
16
21
36
27
Source : HENIA et ALOUANE 2007
La Tableau 12 laisse apparaître que :
•
les ambiances thermiques inconfortables à très inconfortables caractérisent moins
de 4 % des jours de l’année sur la côte. A l’intérieur, leur fréquence augmente
légèrement, sans atteindre, pour la plupart des stations, 10 % des jours, (4% au
Kef).
•
seule la station désertique de Tozeur enregistre 60 jours d’inconfort thermique (16%
du total des jours de l’année). Cet inconfort thermique est lié à la chaleur de l’été.
Dans les régions élevées à l’intérieur du pays (le Kef ou Thala), l’inconfort est lié
plus au froid hivernal.
•
Les ambiances confortables à très confortables occupent 75 à 81 % des jours de
l’année dans la plupart des stations. Même dans les stations continentales élevées
où l'hiver est relativement froid et dans les stations sahariennes où l'été est très
chaud, ces types d’ambiances restent dominants (65% des jours au Kef et 63 % à
Tozeur).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Tableau 13 : Fréquence (% des jours) saisonnière des ambiances thermiques
confortables à très confortables
Hiver
Printemps
Eté
Automne
Tabarka
74
90
66
87
Kef
39
85
48
86
Nabeul
83
96
52
90
Monastir
83
95
47
84
Djerba
87
96
41
78
Tozeur
83
88
9
71
Source : HENIA et ALOUANE 2007
•
les saisons intermédiaires sont les plus confortables sur le plan thermique (Tableau
13).
•
l'hiver vient généralement en troisième position, par la fréquence des ambiances
thermiques journalières confortables, après le printemps et l'automne. Il est à
signaler cependant que dans le Sud-Ouest du pays, à climat saharien, l'hiver est
plus confortable que le printemps. A Tozeur on y compte en moyenne, 20 jours de
température très confortable, 55 jours de température confortable et 16 jours
d'ambiance modérée. Les jours inconfortables sont presque totalement absents.
Dans les stations d'altitude à l'ouest, l'hiver est par contre la saison la plus
inconfortable. A Thala, on compte en moyenne, 52 jours inconfortables à très
inconfortables. Seuls 15 % des jours de l'hiver sont confortables dans cette station.
•
l'été est partout la saison la moins confortable à cause de la forte chaleur, sauf à
Thala et même au Kef, où la chaleur estivale est modérée par l'effet de l'altitude.
Dans la première station, les ambiances thermiques estivales sont plus
confortables que celles des autres saisons et des autres stations. La température
estivale est même plus confortable à Thala que dans les stations littorales, L'air y
est en effet, non seulement moins chaud, mais aussi moins humide que sur la côte.
A Tozeur, par contre, plus que 50 % des jours de l’été présentent des ambiances
stressantes à cause de la forte chaleur.
Une faible fréquence des phénomènes atmosphériques contraignants pour les activités
de plein air
Les activités touristiques de plein air peuvent être gênées, comme mentionné plus haut,
même si l'ambiance thermique est confortable, par certains phénomènes
atmosphériques. On considère généralement que la situation est non favorable dans
les cas suivants :
•
un vent dont la vitesse dépasse 8 m/s (Besancenot, 1987). Le vent agit en effet,
non seulement par son influence sur la sensation de la température effective
(indice K) mais aussi par son effet mécanique ;
•
une pluie journalière supérieure à 5 mm ;
•
une durée d'ensoleillement inférieure au 1/3 de la journée; la faiblesse de
l’ensoleillement n'entrave pas totalement les activités touristiques, mais à cause
de son effet psychique, nous considérons qu’un ensoleillement inférieur à 1/3 de
la journée est gênant pour les activités touristiques ;
•
un vent de sable qui persiste au moins pendant deux observations tri-horaires de
la journée.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
88/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 20 : fréquence des phénomènes climatiques contraignants pour les activités de
plein air (% des relevés tri horaires du vent et en % des jours pour l’ensoleillement et la pluie.)
30
25
Vent>8m/s+vent de sable
20
15
Ensoleillement < à1/3 du
jour
10
pluie quotidien >=5mm
5
T
oz
eu
r
K
ef
Le
Je
rb
a
M
on
as
tir
na
be
ul
T
ab
ar
ka
0
Source : HENIA et ALOUANE 2007
La Figure 20 résume ces caractères contraignants. Dans la plupart des stations, la
contrainte liée au vent (les vents forts dont la vitesse > 8 m/s) et au vent de sable
constituent un facteur de gêne pour les activités de plein air dans 1 à 6 % des jours de
l'année, sauf à Monastir (10% et à Tozeur 12.4%). A Monastir (situation de cap avancé
dans la mer), c'est surtout le vent fort qui constitue un facteur de gêne. A Tozeur c'est
plutôt le vent de sable qui est contraignant. Ce type de vent affecte autour de 30 jours
en moyenne par an dans les stations les plus touchées (celles du Sud-Ouest). Sa
fréquence diminue considérablement en Tunisie orientale (une dizaine de jours à
Djerba, moins de deux jours à Monastir). Le phénomène est rare dans le Nord, comme
si la Dorsale constitue une barrière à la propagation du vent de sable vers dans cette
direction.
L'ensoleillement faible caractérise entre 24 % (à Tabarka) et 12 % des jours (à Djerba et
Tozeur). Les pluies supérieures à 5 mm se produisent dans 12% des jours de l'année au
Kef, 1.3% des jours à Tozeur et entre 3 et 7 jours dans les autres stations.
En synthèse, le faible ensoleillement ne constitue pas un handicap dans les différentes
régions touristiques tunisiennes. Les nuisances liées au vent sont sensibles à Tozeur et à
Monastir et celles qui dépendent des précipitations concernent surtout Tabarka.
Le climat de la Tunisie présente donc des atouts météo importants pour le tourisme
avec, notamment, la dominance des ambiances confortables et l’existence des
nuances régionales et saisonnières qui offrent la possibilité de diversification des
activités touristiques.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
89/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.2.4 Les caractéristiques du potentiel climato-touristique actuel
Pour aller plus loin que l’ambiance thermique, l’étude s’intéresse à l’indice climatotouristique.
Figure 21 : Fréquence annuelle (% des jours de l’année) des types d’ambiances
climato-touristiques.
jours en %
60
50
40
30
20
10
0
Monastir Tabarka
Nabeul
Jerba
Très défavorable
Défavorable
Favorable
Très favorable
Tozeur
Le Kef
Moyen
Source : HENIA et ALOUANE 2007
A l’échelle annuelle (Figure 21), nous remarquons :
•
une très faible fréquence des jours défavorables. Cette catégorie représente
moins de 3% des jours dans les stations côtières et au Kef et 10,5% à Tozeur (les
contraintes sont ici d’ordre thermique essentiellement);
•
les ambiances très défavorables (liées essentiellement au vent fort/ vent de sable
et / aux précipitations) enregistrent des taux légèrement plus élevés 4 % des jours
de l’année à Djerba, 7% à Monastir, 10% au Kef et 10.6% à Tozeur. Au total, la
fréquence de ces deux types d’ambiances défavorables et très défavorables
reste limitée dans les stations côtières et au Kef (entre 4 et 12%) alors qu’elle
concerne les 20 % des années à Tozeur ;
•
les ambiances climato touristiques moyennement confortables caractérisent 25 %
des jours de l’année à Monastir, à Tozeur et au Kef et 20 % des jours dans les autres
stations ;
•
les ambiances favorables et très favorables sont largement dominantes partout.
La première catégorie vient en première position dans toutes les stations, elle
intéresse le 1/3 des jours de l’année à Tozeur et entre 44 % et 52 % dans les autres
stations. Les ambiances très favorables sont moins fréquentes que les
précédentes, elles concernent entre 19 et 28 % des jours dans les stations côtières,
17% des jours au Kef et 10 des jours à Tozeur. ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
60
50
40
30
20
10
0
Monastir
Tabarka
Nabeul
décembre
novembre
octobre
septembre
août
juillet
juin
mai
avril
mars
février
Jerba
janvier
jours en %
Figure 22 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques défavorables et très
défavorables
Tozeur
Le Kef
Source : HENIA et ALOUANE 2007
A l’échelle saisonnière (Figure 22) nous remarquons :
•
au niveau de la fréquence des ambiances inconfortables et très inconfortables,
une nette opposition entre Tozeur d’une part et les autres stations d’autre part.
Dans la première, ces 2 catégories culminent en été (49 % des jours en juillet)
reflétant ainsi l’impact des extrêmes thermiques chauds et des vents de sable.
Dans les autres stations, la fréquence de ces deux types d’ambiance est minimale
en été et maximale en hiver (Kef) ou en intersaison. L’écart entre les mois est
relativement modeste. La saison estivale est donc propice aux activités de plein
air, malgré son inconfort thermique, exception faite de Tozeur.
•
la fréquence des ambiances d’un confort moyen (Figure 23) culmine en été, mais
avec des taux différents d’une station à l’autre. (2/3 des jours du mois d’août à
Monastir, Djerba, Nabeul et 50 % des jours de ce mois dans les autres stations). Un
sommet secondaire apparaît en hiver alors que les taux les plus bas concernent
les saisons intermédiaires. Cela s’explique par l’accroissement des jours très
favorables au cours de cette période.
80
70
60
50
40
30
20
10
0
Monastir
Tabarka
Nabeul
Jerba
Tozeur
ao
ût
se
pt
em
br
e
oc
to
br
e
no
ve
m
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ju
in
m
ai
av
r il
m
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s
fé
v
vi
e
jan
rie
r
Le Kef
r
jours en %
Figure 23 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques d’un confort moyen
Source : HENIA et ALOUANE 2007
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
le régime mensuel des ambiances climato-touristiques favorables (Figure 24)
oppose Tozeur aux autres stations. A Tozeur, la fréquence du type favorable
culmine en Janvier avec 61% des jours de ce mois et tombe à seulement 3 % des
jours en juillet et à 1 % des jours au mois d’août. Dans les autres stations, la
variation inter mensuelle est assez irrégulière. Les taux les plus élevés concernent
les deux extrémités de la saison chaude. La différence entre l’hiver et les saisons
intermédiaires est assez réduite.
Figure 24 : Régime mensuel des ambiances climato-touristiques favorables
100
80
60
40
20
0
Monastir
Tabarka
Nabeul
Jerba
j an
vi
e
fé r
vr
ier
m
ar
s
av
r il
m
ai
ju
in
ju
i ll
et
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em
b
oc re
to
n o b re
ve
m
d é b re
ce
m
br
e
Tozeur
Le Kef
Source : HENIA et ALOUANE 2007
•
La saison chaude (Figure 25) enregistre des taux assez faibles des ambiances
climato-touristique très favorables qui tombent à 0 au milieu de l’été (). Cela
reflète la tendance chaude du pays surtout à Tozeur où la précocité de l’été fait
que le mois de mai n’enregistre que 7 % de jours favorables. Dans les autres
stations, la transition printemps été est plus tardive. De fait, à Monastir, on passe
de 40 % de jours favorables en mai à 3.3 % des jours le mois suivant. Les saisons
intermédiaires sont les plus favorables puisque la fréquence de cette ambiance
varie de 24 à 50 à Djerba, Monastir et Nabeul. Ces taux sont plus faibles à Tabarka
à cause du froid et des précipitations ainsi qu’à Tozeur, station très chaude et
venteuse.
•
le maximum des ambiances très favorables est enregistré pendant les saisons
intermédiaires (octobre- novembre et mars-avril).
Figure 25 : Régime mensuel des potentiels climato-touristique très favorables
70
60
Monastir
50
Tabarka
40
Nabeul
30
Jerba
20
Tozeur
10
Le Kef
se aoû
t
pt
em
br
e
oc
to
b
no re
ve
m
br
dé
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m
br
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et
m
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m
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ja
nv
ie
r
fé
vr
ie
r
0
Source : HENIA et ALOUANE 2007
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.2.5 Le potentiel climato-balnéaire
L’activité balnéaire s’étend sur un nombre assez élevé de jours (allant de 37% des jours
de l’année sur les côtes septentrionales à 42% des jours sur les côtes sud-est). Cette
progression du nord vers le sud est due à une augmentation des ambiances chaudes
dans le même sens.
Figure 26 : fréquence annuelle (en % des jours de l’année) des ambiances climatotouristiques balnéaires.
45
40
joursen%
35
30
Balnéaire refuge
Balnéaire favorable
25
20
15
10
5
0
Tabarka
Nabeul
Monastir
Jerba
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
Deux catégories de jours balnéaires peuvent être distinguées (Figure 26) :
•
les jours à ambiance balnéaire refuge : ils sont très inconfortables sur le plan
thermique à cause de la forte chaleur. De fait, la canicule constitue un danger
pour les personnes fragiles mais elle pousse en même temps les estivants, en
quête d’une certaine fraîcheur, vers la baignade. Cette catégorie est
relativement rare, elle est de 19 jours à Tabarka et Nabeul, 28 jours à Djerba et 32
jours à Monastir ;
•
les jours à ambiance balnéaire favorable : l’activité s’effectue dans des conditions
favorables sur le plan de la température, de l’ensoleillement et du vent. Le
balnéaire favorable domine dans les 4 stations et sa fréquence augmente de
Monastir à Djerba. Elle passe de 29,6 % des jours de l’année dans la première
station à 34,6 % des jours pour la dernière. Ce qui explique la renommée des
plages tunisiennes et surtout celles de Djerba.
Il va sans dire que l’activité balnéaire correspond à la saison chaude (Figure 27). Les
mois de mars et avril connaissent quelques jours favorables à l’activité balnéaire mais la
mer encore fraîche rebute souvent le touriste. Le mois de mai marque une transition
vers l’été (25% de ses jours sont balnéaires à Monastir, 29% à Tabarka, 35% à Djerba,
mais 13 % seulement à Nabeul). La pleine activité balnéaire débute en juin (les 2/3 des
jours de ce mois sont de type balnéaire), culmine en juillet-août (plus de 90 % des jours
de ces mois sont de type balnéaire) et recule légèrement en septembre (80% des jours
du mois sont de type balnéaire). Octobre constitue la transition vers la fin de la saison
balnéaire (la fréquence des jours balnéaires y est encore importante, 77 % des jours à
Djerba, 62 % à Monastir, 50 % Nabeul et 44 % à Tabarka). Au mois de novembre les
ambiances balnéaires n’occupent que 15 % des jours de ce mois à Djerba et 10 % des
jours dans les autres stations.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
93/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 27 : Régime mensuel (en % du nombre total des jours du mois) des ambiances
climato touristiques balnéaires
80
Balnéaire refuge
80
Balnéaire refuge
ve
m
br
e
dé
ce
m
br
e
no
e
br
e
oc
to
t
ao
û
se
pt
em
br
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n
Balnéaire favorable
br
e
dé
ce
m
br
e
ve
m
no
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br
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br
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br
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ju
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m
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0
vi
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20
0
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40
20
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ju
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60
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40
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60
fé
vr
jours en %
100
80
Balnéaire refuge
Nabeul
120
100
ja
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ril
Balnéaire favorable
Monastir
Balnéaire favorable
av
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vi
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0
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20
0
m
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40
20
Balnéaire favorable
jours en %
60
ier
40
m
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s
60
fé
vr
jours en %
100
80
fé
vr
jours en %
100
120
Jerba
120
ju
i
Tabarka
120
Balnéaire refuge
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
La longueur de la saison balnéaire dépasse donc quatre mois surtout à Djerba. Ce qui
donne à cette île un autre avantage climatique.
Le balnéaire refuge est enregistré au milieu de l’été et culmine en août avec 42 % des
jours de ce mois à Nabeul, 48 % à Monastir et Djerba et 35 % à Tabarka. En juin et
septembre le balnéaire refuge recule fortement pour rester autour de 15 % à Tabarka
et à moins de 20 % des jours dans les autres stations.
La variabilité inter annuelle des ambiances climato-touristiques est assez importante
dans toutes les stations, mais son ampleur varie selon les stations d’une part et selon la
fréquence de chaque catégorie d’ambiance d’autre part. Ainsi au Kef le nombre de
jours très favorables enregistre une différence entre les fréquences annuelles de 13
jours, alors que pour la même catégorie la différence atteint 35 jours à Tabarka et à
Nabeul et 50 jours à Djerba.
La variation inter annelle du nombre des jours balnéaires dépend surtout de celle des
ambiances thermiques. Les années fraîches enregistrent un repli des activités
balnéaires. A titre d’exemple, Monastir a enregistré 130 jours balnéaires en 1991 et 146
jours en 1993 (année plus chaude). Djerba a connu 22 jours de type “balnéaire refuge”
en 1992 et 36 jours en 1995.
3.3.2.6 Les tendances récentes
L’évolution récente du potentiel climato-touristique est relativement difficile à dégager
car les paramètres utilisés (température, humidité, ensoleillement....) évoluent parfois en
sens opposé et peuvent avoir de ce fait un effet contradictoire sur le potentiel
climatique. En outre, la variation interannuelle très élevée estompe en partie la
tendance générale.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
94/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Pour essayer de dégager cette tendance nous prenons l’exemple de deux stations
ayant presque la même latitude, l’une côtière (Monastir) et la deuxième située à 50 km
de la côte (Kairouan). La Figure 28 qui représente une série de 15 ans nous permet de
dégager les constatations suivantes :
•
dans les deux stations, la fréquence des ambiances thermiques froides présente
une tendance nette à la baisse entre 1990 et 2004. La fréquence des ambiances
chaudes présente une tendance à la hausse. L’évolution positive de la fréquence
de l’ambiance modérée est plus faible ;
•
la progression est plus sensible à Kairouan traduisant à la fois l’impact de la
continentalité et de l’îlot de chaleur urbain. En effet cette station c’est intégrée
dans le tissu urbain.
Figure 28 : L’évolution de la fréquence des ambiances thermiques.
Kairouan
Monastir
30
20
jours en %.
jours en %.
30
10
20
10
0
0
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
1990
1992
1994
Froide
très chaude
Linéaire (Froide)
1996
1998
2000
2002
2004
modéré
Linéaire (très chaude)
Linéaire (modéré)
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
Cette tendance observée dans l’évolution récente des ambiances thermiques risque
de s’accentuer avec les changements climatiques.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
95/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.3 Les effets possibles du changement climatique sur le potentiel
climato-touristique de la Tunisie
3.3.3.1 L’évolution du potentiel climato-touristique à l’échelle annuelle
L’évolution du potentiel climato touristique paraît modeste à l’échelle de l’année.
Cette situation est due au fait que le réchauffement estival qui tend à augmenter les
ambiances inconfortables chaudes est compensé par le recul en hiver des ambiances
inconfortables froides. Cet effet de compensation est de nature à estomper l’évolution
du potentiel climatique à l’échelle de l’année. Les échelles saisonnière et mensuelle
paraissent de ce fait mieux indiquées pour rendre compte de l’évolution du potentiel
climato-touristique dans le cadre du changement climatique.
Cependant, les Figure 29 et Figure 30 laissent apparaître l’existence, à l’échelle
annuelle, des nuances entre les stations. Le cas de Tozeur mérite attention. En effet,
dans cette station, la fréquence des jours à ambiance défavorable double en passant
de 10,5 % des jours actuellement à 19,2 % des jours en 2050 (scénario A2).
Figure 29 : Evolution des ambiances climato touristiques défavorables (% des jours de
l’année) par rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et
aux échéances 2030 et 2050.
Défavorable
jours en %
25
Monastir
20
15
Tabarka
Nabeul
10
Jerba
Tozeur
Le Kef
5
0
actuel
0,5°
1°
2°
température
actue l: moyenne 1991-2000. 0,5°: échéance 2030, scénario A2 et B2.
1°: échéance 2050, scénario B2. 2°: échéance 2050, scénrio A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Figure 30 : Evolution des ambiances climato touristiques très favorables (% des jours de
l’année) par rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et
aux échéances 2030 et 2050.
Très favorable
jours en %
30
Monastir
Tabarka
25
20
Nabeul
Jerba
Tozeur
15
10
Le Kef
5
actuel
0,5°
1°
2°
température
actue l: moyenne 1991-2000. 0,5°: échéance 2030, scénario A2 et B2.
1°: échéance 2050, scénario B2. 2°: échéance 2050, scénrio A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
jours en%
Figure 31 : Evolution des ambiances climato touristiques favorables (% des jours de
l’année) par rapport à la moyenne 1991-2000 et selon les scénarios B2, A2 du GIEC et
aux échéances 2030 et 2050.
Favorable
55
50
45
40
35
30
25
20
Monastir
Tabarka
Nabeul
Jerba
Tozeur
Le Kef
actuel
0,5°
1°
2°
température
actue l: moyenne 1991-2000. 0,5°: échéance 2030, scénario A2 et B2.
1°: échéance 2050, scénario B2. 2°: échéance 2050, scénrio A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
A l’échelle saisonnière et mensuelle, dans toutes les stations on remarque une
régression des ambiances défavorables en hiver (Figure 32) et une progression en été.
L’évolution hivernale reste modeste et ne concerne qu’autour de 2 % des jours de la
saison. En effet, à Tabarka, pour une augmentation de la température de 2°C, la
fréquence des ambiances défavorables passe de 5,8 % à 3,2 % des jours en janvier et
de 3,2% à 0,6% en décembre. Cette tendance s’inverse en été et connaît une plus
grande ampleur. Ainsi, en août, on passe de 2.6% des jours défavorables aujourd’hui à
12,3% des jours pour le scénario A2 à l’échéance 2050. La progression est encore plus
nette pour Monastir (de 7,7% à 33,5% des jours de la saison) et atteint son apogée à
Tozeur (38,8% des jours à73%).
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évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 32 : Evolution saisonnière de la fréquence des jours à ambiances climato
touristiques défavorables
80
Défavorable
70
janvier (tabarka)
décembre (Tabarka)
août (Tabarka)
août (Monastir)
août(Tozeur)
jours en %
60
50
40
30
20
10
0
actuel
0,5°
1°
température
2°
actuel: moyenne 1991-2000.
0,5°: échéance 2030, scénario
A2 et B2.
1°: échéance 2050, scénario
B2. 2°: échéance 2050, scénrio
A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
Au niveau des ambiances très favorables (Figure 32), l’année se divise en deux
périodes où la fréquence des ambiances évolue en sens inverse.
•
Une période de progression pendant laquelle la fréquence des jours très
favorables augmente parallèlement au réchauffement général. Elle s’étend de
décembre à avril à Tabarka, Monastir et Nabeul, de décembre à mars à Djerba
et de décembre à février à Tozeur. L’augmentation de la fréquence est plus
importante pour les mois les plus froids. Entre l’état actuel et le scénario A2 en
2050, à Djerba, la fréquence de ce type d ‘ambiance passe de 57.4 % à 64.57%
des jours en décembre et de 24 % à 49 % des jours en janvier.
•
Une période de régression plus longue correspondant aux mois chauds de
l’année. Les jours à ambiances très favorables, déjà très rares au milieu de l’été,
tendent à disparaître des mois d’août et septembre dés que la température
s’élève de 0,5°. Cette forte régression s’étend au mois de juillet et d’octobre pour
une augmentation de 2°C (échéance 2050). L’ambiance très favorable
n’intéresse au mois d’octobre que moins de 10 % des jours dans toutes les stations.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Figure 33 : Evolution de la fréquence des jours très favorables
Monastir
60
50
50
40
40
20
Actuel
10
0,5°
1°
2°
35
20
Série1
10
Série2
0
Série3
Série4
Le Kef
30
actuel: moyenne 1991-2000.
25
20
15
10
Série1
5
Série2
0
Série3
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30
jours en
jours en
60
0,5°: échéance 2030, scénario A2 et B2.
1°: échéance 2050, scénario B2
Série4
2°: échéance 2050, scénrio A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
En somme, la période froide de l’année enregistre une amélioration grâce à
l’augmentation de la fréquence des jours très favorables au dépend des types
défavorables liés au froid. Cette amélioration très importante au milieu de l’hiver
continue en mars et avril mais avec moins d’ampleur. La saison chaude tend à devenir
plus longue et plus inconfortable. Malgré l’empiétement de l’été sur les saisons
intermédiaires, ces dernières gardent un taux élevé de jours à ambiances climato
touristiques favorables et très favorables qui dépasse souvent les 2/3 des jours du mois.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
99/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.3.2 L’impact possible du changement climatique sur les activités balnéaires
La Figure 34 montre une progression du potentiel climato-balnéaire en fonction de
l’augmentation du réchauffement général.
Figure 34 : Evolution du potentiel climato-balnéaire (en % des jours de l’année).
Evolution du potentiel balnéaire
2volution du balnéaire favorable
60
40
jours en %
jours en %
50
30
20
10
0
Nabeul
TabarKa
Monastir
Jerba
40
35
30
25
20
15
10
5
0
Nabeul
TabarKa
Monastir
Jerba
2volution du balnéaire refuge
25
jours en %
20
actuel: moyenne 1991-2000.
15
0,5°: échéance 2030, scénario A2 et B2.
2 5
2 0
10
1 5
1 0
1°: échéance 2050, scénario B2.
5
5
0
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2°: échéance 2050, scénario A2
0
Nabeul
TabarKa
Monastir
Jerba
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
La saison balnéaire gagne une semaine pour un réchauffement annuel de 0,5°C, 2
semaines pour un réchauffement de 1°C et un mois pour un accroissement de la
température de 2°C (échéance 2050).
La fréquence du “balnéaire refuge” augmente de fréquence dans toutes les stations,
reflétant ainsi l’impact du réchauffement estival et l’accroissement des jours
caniculaires. Cette avancée se fait au dépend du “balnéaire favorable”. Entre l’état
actuel et à 2050, pour le scénario A2, la fréquence des jours à ambiance de type
“balnéaire refuge” passe de 5,2 % des jours à 17 % à Nabeul, de 8,8 à 21%des jours à
Monastir et de 7,6 à 19 % des jours à Djerba.
Le balnéaire favorable subit un léger fléchissement en passant à Djerba du 34,7%
actuellement à 31% des jours de l’année en 2050 (scénario A2). Ainsi on perd 10 jours
de “balnéaire favorable” par an à Djerba, 13 à Nabeul et 18 jours à Monastir. Alors que
la situation reste stable à Tabarka.
A l’échelle mensuelle, le changement climatique pourrait entraîner :
•
une augmentation de la fréquence des jours balnéaires pour tous les mois, en
dehors de l’hiver. Cette progression est faible pour l’été qui est déjà saturé, mais
plus importante pour les saisons intermédiaires. Pour un réchauffement de 2°C, la
fréquence des jours balnéaires à Tabarka passe, en septembre, de 26 à 28 jours,
de 9 à 15 jours en mai et de 14 à 23 jours en octobre.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
100/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Figure 35 : Evolution mensuelle de la fréquence des jours balnéaire (% des jours du
mois.)
Tabarka
jours en %
120
actuel: moyenne
1991-2000.
100
80
0,5°: échéance
2030, scénario A2
et B2.
60
40
1°: échéance
2050, scénario B2.
20
ja
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br
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0
2°: échéance
2050, scénario A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
La saison Balnéaire s’allonge allant de mai à octobre sur l’ensemble des côtes
tunisiennes.
•
la domination estivale du balnéaire refuge.
Figure 36 : Evolution saisonnière de la fréquence du “balnéaire refuge”
Jerba
joursen%
100
actuel: moyenne
1991-2000.
80
0,5°: échéance
2030, scénario A2
et B2.
60
40
1°: échéance
2050, scénario B2.
20
se
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2°: échéance
2050, scénario A2
ju
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ju
ill
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Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
La fréquence des jours à ambiance balnéaire refuge progresse en juillet et septembre
et culmine en août. Entre l’état actuel et l’échéance 2050 (scénario A2), le balnéaire
refuge passe à Tabarka de 5 à 14 jours en juillet, de 12 à 24 jours en août et de 2 à 10
jours en septembre. Dans les autres stations, le mois d’août sera entièrement dominé
par le “balnéaire refuge”. Pour le mois de juillet, les jours à ambiance balnéaire refuge
occupent 3 semaines à Monastir et à Djerba et deux semaines à Nabeul et seulement
10 jours à Tabarka.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Monastir
actuel: moyenne
1991-2000.
0,5°: échéance
2030, scénario A2
et B2.
1°: échéance
2050, scénario B2.
av
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ju
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80
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50
40
30
20
10
0
ja
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joursen%
Figure 37 : Evolution saisonnière de la fréquence du “balnéaire favorable”
2°: échéance
2050, scénario A2
Source : HENIA L. et ALOUANE T. 2009
La fréquence des jours à ambiance balnéaire favorable connaîtra un recul en juilletaoût et septembre et une progression au cours des autres mois des saisons
intermédiaires. A Monastir, un réchauffement de 2°C fera passer la fréquence de cette
catégorie de 76 % à 29% des jours en juillet, de 43 à 5% des jours en août et de 8 à 23%
des jours en novembre. La progression vers les saisons intermédiaires se fera aussi par le
balnéaire refuge qui migre du cœur de l’été vers les saisons douces.
En synthèse, le changement climatique pourrait faire progresser la saison balnéaire
vers les saisons intermédiaires. Le milieu de la saison balnéaire serait dominé par le
balnéaire refuge. Ces tendances s’accentuent de 2030 à 2050 et du scénario B2, au
scénario A2.
3.3.3.3 Les impacts potentiels sur l’activité touristique
Ces projections nous permettent ainsi de lister, au niveau de la Tunisie, un ensemble
d’impacts potentiels dont les plus marquants pourraient être les suivants :
•
La modification de la saisonnalité :
− l’allongement des intersaisons propices au tourisme : automne/printemps,
extension des conditions favorables vers le nord ;
− les perspectives sont différentes pour les régions Sud, déjà très chaudes en été
et qui pourraient souffrir d’un excès de chaleur et ainsi accueillir plutôt des
populations jeunes et bien portantes, aptes à supporter des conditions
caniculaires ;
− en termes de position concurrentielle de la destination, il est difficile de
conclure, car l’ensemble des destinations concurrentes connaîtra également
une amélioration des conditions climatiques au printemps et à l’automne :
•
la modification des régions touristiques en Tunisie :
− l’été, les régions de montagnes (Monts Tebessa ou la région des hautes
steppes) pourraient voir se développer un tourisme de fraîcheur et offrir des
conditions très favorables au tourisme de découverte (randonnée,
écotourisme…) sur une bonne partie de l’année ;
− les régions sahariennes pourraient voir diminuer l’activité touristique estivale,
même sous forme d’excursions depuis les côtes proches ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
102/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
la modification des motifs :
− l’hiver pourrait attirer une population de retraités d’Europe à la recherche de
douceur mais également de soins médicaux (cures…) ;
− le changement climatique pourrait modifier les conditions de concurrence
des destinations méditerranéennes entre elles : les destinations du sud du
pourtour méditerranéen seraient plus durement touchées par les excès de
chaleur que celle du Nord. L’amélioration des conditions climatiques du nord
de l’Europe pourrait conduire les clientèles d’Europe du nord à passer plus les
vacances d’été chez elles qu’elles ne le font actuellement et voir se renforcer
la concurrence de pays européens plus tempérés.
Témoignage de professionnels
Depuis ces 5 à 8 dernières années, les hôteliers de la côte orientale de la Tunisie constatent que
les touristes allemands fuient la période des grosses chaleurs.
Ce constat vaut également pour la clientèle senior dont la fréquentation diminue l’été (juin à
septembre) pour se reporter sur des saisons plus fraiches.
Un bouleversement des précipitations
Par ailleurs, le système des précipitations connaît également des modifications. Si la
moyenne de la pluviométrie est appelée à diminuer, la fréquence d’évènements
violents pourrait augmenter (inondations, crues). Au-delà des impacts sur le ressenti des
clients et sur les activités disponibles, les conséquences sur les infrastructures ou les
plages peuvent être importantes.
De coupures de courant en cas de forts orages, à la pollution des plages par les
oueds33, de l’engorgement des stations d’épuration, à la pollution de l’eau, les impacts
relevés par les professionnels du tourisme sont nombreux.
Tous ne sont pas forcément rédhibitoires – les tempêtes de sable dans le sud renforcent
l’expérience « extrême » des touristes – mais leur imprévisibilité rend ces évènements
contraignants et soulève un enjeu de sécurité.
Témoignage de professionnels
Les hôteliers interrogés soulignent des problèmes déjà rencontrés par leurs établissements dans
toutes les régions touristiques. Par exemple :
− dans la région du Cap Bon, la question de la gestion des oueds et des pollutions dont
ils sont à l’origine lors d’orages, est déjà une préoccupation ;
− le problème des coupures de courant et de l’insuffisance des générateurs
électriques a été mentionné dans la région d’Hammamet.
− sur la zone de Kairouan, il a été relevé des pluies de plus en plus violentes ;
− certains hôtels situés à proximité de Madhia ont des difficultés à exploiter des
bungalows même en été, en raison d’intempéries empêchant de garantir le confort
des touristes.
Lors de forts orages, les oueds charrient tous les déchets sur leur passage jusqu’à leur embouchure sur la
plage.
33
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
103/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.3.4 La sécurité sanitaire des touristes : risques et santé
Lorsque l’on s’intéresse aux effets climatiques directs, au delà du confort des touristes,
se pose la question des risques sanitaires. Il s’agit d’une préoccupation majeure des
voyageurs qui exigent un maximum de sécurité pendant leurs vacances et sont de plus
en plus alertés des risques encourus, à travers les médias en particulier. Si la question de
la santé dépasse largement les compétences des acteurs touristiques, l’offre d’une
destination sécurisée est indispensable au développement du secteur. Aujourd’hui, les
zones touristiques sont aménagées de telle manière que les infrastructures ne soient pas
dangereuses.
La vulnérabilité de la Tunisie dépend fortement des aléas auxquels elle sera soumise (et
qu’on ne peut identifier clairement aujourd’hui) et donc des moyens de prise en
charge dont elle dispose. Plusieurs types d’aléas existent, climatiques mais aussi
infectieux.
Une préoccupation de santé
L’examen du potentiel climato-touristique d’une destination est non seulement
pertinent au regard de l’agrément mais aussi de la santé : le soleil peut être source de
cancers cutanés, les vents humides favorisent les accidents vasculaires cérébraux,
l’association de vents violents et de froid accroît les risques d’infarctus, etc. L’étude
menée par le Ministère de la Santé Publique en 2009 sur la santé34 permet de faire le
point sur d’éventuels risques induits par le changement climatique, risques mal connus
aujourd’hui.
L’un des risques principaux dans un contexte de changement climatique, nous semble
celui lié aux fortes chaleurs ainsi qu’aux maladies respiratoires et allergiques. L'élévation
de la température accroît le volume d’ozone au niveau du sol et précipite le
démarrage de la saison pollinique, ce qui contribue aux crises d’asthme. D’autre part,
les vagues de chaleur, notamment les «îlots de chaleur» urbains, augmentent
directement la morbidité et la mortalité, essentiellement chez les personnes âgées qui
souffrent de maladies cardio-vasculaires ou respiratoires.
C’est en premier lieu le rapport au soleil qui a évolué ces dernières années vers une
méfiance croissante et des mesures pour limiter une exposition dangereuse. D’autre
part, la question de la qualité de l’air est également liée en partie au changement
climatique. La hausse des températures, combinée à une augmentation du parc
automobile, ainsi qu’aux diverses pollutions industrielles entraîne une dégradation de la
qualité et des risques pour la santé : asthme, sensibilité pour les personnes âgées, et
même des conséquences plus importantes pour les personnes les plus exposées.
Les hôteliers tunisiens constatent déjà la préoccupation grandissante des touristes pour
les problèmes de santé et, en particulier, pour les effets néfastes du soleil. Cependant,
cela se traduit essentiellement par des mesures de protection individuelles (chapeau,
crème solaire…) en non par de réels changements de comportement en termes
d’activités. Les impacts sur la fréquentation touchent certaines catégories de clientèles
plus sensibles à la chaleur (voir plus haut).
34
Stratégie d’Adaptation du Secteur de la Santé au Changement Climatique, MSP et GTZ 2009
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
104/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
La question d’une éventuelle recrudescence de maladies nous semble moins pour
l’activité touristique. Le changement du régime des pluies et des températures, risque
de modifier la répartition géographique des insectes vecteurs qui propagent les
maladies infectieuses. Parmi les maladies à transmission vectorielle concernant la
Tunisie, le paludisme concentre souvent les inquiétudes des touristes et fait l’objet de
bien des projections fantaisistes. Cependant, l’étude montre que la réceptivité de la
Tunisie au paludisme, même dans le contexte du changement climatique, est faible. Si
la vigilance reste de mise, cette maladie emblématique ne semble pas constituer un
véritable risque pour le tourisme. Les autres maladies étudiées ne concernent pas
directement le tourisme car les modes de transmissions sont éloignés des pratiques
touristiques. Par ailleurs, la rareté de l’eau, tout comme l’excès d’eau dû à des pluies
torrentielles répétées, pourraient accroître le risque de maladies d’origine hydrique
(maladies diarrhéiques). Mais les touristes, généralement très sensibles à ce type de
maladie, nous semble déjà préparés pour limiter ce risque.
Finalement, le principal risque pour le tourisme semble celui d’une médiatisation
exagérée en cas d’apparition ou de recrudescence de certaines maladies
(paludisme…), qui pourrait jouer défavorablement sur l’attractivité de la Tunisie.
Finalement, il faut noter que des moyens existent déjà en Tunisie pour limiter ces risques
sanitaires : la présence d’équipements hospitaliers de qualité ainsi que la disponibilité
d’équipes de secours, une expérience des méthodes de désinsectisation...
Une sensibilité particulière aux évènements climatiques extrêmes
Les touristes recherchent la proximité de l’eau, utilisent souvent des habitats légers et se
livrent à des activités plus exposées que celles de la vie quotidienne aux aléas naturels
ou climatiques, dans des lieux où les possibilités de maîtrise des événements sont parfois
plus limitées. Ces facteurs confèrent au tourisme une vulnérabilité particulière par
rapport aux tempêtes, aux orages violents, aux inondations, mais aussi par rapport aux
feux de forêt et aux épisodes de sécheresse.
Du point de vue des évènements extrêmes, nous avons vu la sensibilité liée aux
modifications des régimes de précipitations et aux risques induits. En Tunisie, ce sont
surtout les pluies torrentielles et les inondations qui sont à craindre en matière
d’évènements extrêmes. Là encore, des moyens existent pour limiter ces risques : des
infrastructures pour canaliser les cours d’eau, ou à une échelle plus grande, des plans
d’évacuation en cas de sinistres.
Témoignage de professionnels
En septembre 2009, des pluies inhabituellement violentes, suivies d’inondations, ont fait 17 morts
dans le sud-ouest du pays. Les zones touristiques n’étaient pas concernées cette fois. Une
attention particulière doit néanmoins être portée quand au choix des zones de
développement touristique et une étude des vulnérabilités aux évènements climatiques
possibles serait judicieuse dans le but d’éviter des catastrophes.
A l’heure actuelle, on ne peut pas dire que les professionnels du tourisme semblent
particulièrement concernés par cet aspect du changement climatique. Et la Tunisie est
encore considérée comme une destination sûre du point de vue sanitaire.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
105/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
3.4 Les impacts sur les ressources touristiques
Au-delà des impacts directs de la météo sur les touristes eux-mêmes, le climat peut
influer directement sur un certain nombre d’aménités environnementales qui sont
autant de ressources sur lesquelles s’appuie l’activité touristique.
3.4.1 Le littoral et les plages
Le changement climatique aura de nombreux impacts sur les zones côtières, une
grande partie d’entre eux étant liés à la hausse du niveau de la mer. Il s’agit
généralement de phénomènes complexes, préexistants, qui seront aggravés par les
conséquences du changement climatique.
Parmi ces impacts, on peut citer :
•
une aggravation de l’érosion des plages, voire la disparition des moins pentues ;
on estime qu’en moyenne, pour une augmentation du niveau de la mer d’un
centimètre, une plage recule d’un mètre35 ;
•
le recul du trait de côte et la reprise par la mer de certaines portions du littoral ;
•
les risques d’inondation/ de submersion des zones côtières, notamment liés aux
évènements extrêmes (tempête etc.) ;
•
les intrusions d’eaux salines à l’intérieur des terres et dans les nappes phréatiques ;
•
les impacts sur la biodiversité à la fois sur les zones terrestres et dans la mer ellemême (voir partie « Biodiversité et écosystèmes ») ;
•
l’acidification des eaux marines susceptibles d’avoir des impacts sur des
organismes vivants tels que les mollusques.
Le tourisme étant largement balnéaire en Tunisie, le littoral constitue une ressource
touristique fondamentale. L’accélération de l’élévation du niveau de la mer constitue
donc une menace majeure pour ce secteur.
La première étude qui a traité la vulnérabilité du littoral tunisien au changement
climatique a été réalisée en 2000 par le MEAT. Une deuxième étude réalisée par le
MEDD en 2007 a permis d’actualiser l’approche et les résultats de la première.
Il ressort des études sur le littoral tunisien que les côtes tunisiennes montrent, par leur
évolution géomorphologique actuelle, différentes formes de faiblesse. En particulier, la
dynamique du trait de côte en Tunisie a fait l’objet de plusieurs études (MEAT 2000,
MEDD 2007, OUESLATI 2004, 2005…).
Cette fragilité morphologique de la côte tunisienne et plus particulièrement celle des
plages est accentuée par l’action anthropique :
− les barrages de retenue sur les cours d’eau sont de véritables pièges à
sédiments ;
− l’extraction de sédiments à l’embouchure des cours d’eau à partir des plages
ou avant-plages et surtout des dunes, constitue un facteur de déséquilibre.
Sablières et gravières exploitées dans le lit des cours d’eau participent au
35
Ordre de grandeur à considérer avec précaution tant est grande la variabilité des situations.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
106/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
déficit sédimentaire des plages puisque les matériaux enlevés ou piégés ne
parviennent plus au rivage ;
− l’arasement de dunes bordières déstabilise les plages. Ces dunes participent
à l’équilibre des plages parce qu’elles constituent une réserve de sable et ont
un rôle protecteur lors de tempête ;
− les aménagements de front de mer ont des effets néfastes lorsqu’ils sont
implantés trop près du rivage. ;
− les travaux portuaires ou les ouvrages de protection implantés sur une côte
affectée par un transit littoral prédominant, perturbent l’équilibre des
transports sédimentaires en bloquant les matériaux sur une face des ouvrages,
et ils provoquent une érosion sous l’autre face.
Le recul du trait de côte constaté sur une grande partie du littoral résulte d’une
conjonction de facteurs naturels et anthropiques qui ne peuvent qu’être aggravés par
le changement climatique et l’élévation du niveau de la mer qui en découle.
3.4.1.1 La vulnérabilité du littoral tunisien
La morphologie du littoral tunisien a fait l’objet de différentes études réalisées par des
chercheurs universitaires (dont notamment A. OUESLATI, R. PASKOFF…) ou par des
organismes étatiques compétents en la matière (MEDD, APAL…). Il ressort de ces
études que les caractéristiques de la morphologie du littoral tunisien constituent l’un
des facteurs de sa vulnérabilité à l’élévation du niveau de la mer. La Tunisie se
caractérise par une grande ouverture sur la mer avec un linéaire côtier total de deux
façades (septentrionale et orientale) de 167036 km où dominent les côtes basses.
Les côtes basses tous types confondus occupent plus des ¾ du linéaire côtier total
(Tableau 14).
Tableau 14 : Les types de côtes par secteur côtier (en % du total du pays)
Secteurs
Falaises
Côtes rocheuses
basses
Plages sans dunes Plages avec dunes
importantes
importantes
Façade Nord
43,5
-
21,97
19,24
Golfe de Tunis
27,17
0,38
21,97
23,01
Façade Orientale
Nord
9,23
11,40
36,26
37,65
Façade Orientale
Sud
12,8
39,54
12,45
8,36
Archipel
Kerkennien
5,64
24,71
1,83
1,67
Djerba
1,53
23,95
5,49
10,04
Total
100%
100%
100%
100%
Source : MEDD 2007
Une ancienne évaluation donnait 1360 km de côtes pour la Tunisie. Mais une évaluation récente de
l’APAL, tenant compte des côtes de l'ensemble des îles et des lagunes, portera le chiffre à plus de
1900 km. Le chiffre de 1670 km provient de l'évaluation du bureau d'étude IHE qui a réalisé le rapport
sur la vulnérabilité du littoral tunisien, rapport que nous citons en référence dans la présente étude.
36
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
107/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Près de 440 km de côtes, soit 26,6% du littoral tunisien, ont été évalués (MEDD 2007)
comme présentant une vulnérabilité très forte à l’élévation du niveau de la mer, vivant
déjà de nos jours une érosion marine forte et où les concentrations urbaines et
touristiques occupent une place très importante.
Les plages sableuses sont les formes les plus présentes sur le littoral tunisien et la
principale ressource de l’activité touristique du pays. Elles sont particulièrement
étendues sur la façade orientale et dans le golfe de Tunis. Mais elles restent bien
représentées également sur la façade septentrionale du pays.
Tableau 15 : Répartition des plages sur la côte tunisienne
Forme côtière
Linéaire total en km Répartition par tronçon littoral en km
- Façade nord
60
- Golfe de Tunis
60
- Façade orientale nord
99
Plage sableuse sans dunes
273
- Façade orientale sud
34
littorales importantes
- Archipel Kerkennien
5
- Djerba
15
- Façade nord
46
- Golfe de Tunis
55
- Façade orientale nord
90
Plages bordées par des
239
- Façade orientale sud
20
dunes littorales étendues
- Archipel Kerkennien
4
- Djerba
24
Total
512
Source : MEDD 2007
Tableau 16 : Linéaire des plages par zone touristique
Régions touristiques
Linéaire de plages en km
Tabarka
0,8
Bizerte
1,2
Tunis Nord
6,0
Tunis Sud
0,8
Hammamet nord et Nabeul
4,7
Hammamet Sud
7,3
Sousse Nord
10
Skanès Monastir
4,5
Mahdia
4
Djerba
19
Zarzis
2
Source : MEDD 2007
La morphologie et la dynamique de ces plages sont largement influencées par les
caractéristiques (surtout topographiques et hydrologiques) des espaces qui les bordent
tant du côté du continent que du côté de la mer. Elles portent aussi et de plus en plus,
les effets des interventions humaines directes et indirectes.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
La pression anthropique sur l’espace côtier
La pression anthropique sur l’espace côtier est un autre facteur de la vulnérabilité du
littoral tunisien au changement climatique. Plus de 2/3 de la population du pays se
concentre sur le littoral. C’est ici que se trouvent les plus fortes densités (2000 h / km2) et
les plus fortes concentrations urbaines. Ce poids démographique s’est traduit par des
concentrations d’équipements et d’activités (plus de 90% des industries se concentrent
sur la côte). Les plages ont constitué un facteur essentiel de la concentration des
équipements et des activités touristiques sur la côte qui s’est dotée d'une infrastructure
touristique très importante (plus de 700 hôtels, des terrains de golf, des marinas, des
casinos, des ports de plaisance et des équipements de loisirs de toute nature). Le
développement du tourisme de type balnéaire a entraîné le développement et la
concentration de plusieurs activités et diverses sources de revenus sur le littoral (entre
autres les activités artisanales). Cette pression anthropique fragilise le littoral et le rend
vulnérable à une élévation accélérée du niveau de la mer.
3.4.1.2 Un risque réel pour le tourisme tunisien
Des plages déjà touchées par l’érosion
Les plages ont une importance économique de premier ordre. Le tourisme étant
encore largement balnéaire, elles constituent la pièce de choix dans le produit offert
par les hôtels qui occupent une position de front de mer.
A l’international
Toutes les plages ne sont pas touchées de la même façon et la vulnérabilité de l’offre touristique
balnéaire varie en fonction notamment de sa dépendance au produit « plage et baignade ».
En France par exemple, la marée noire de l’Erika a montré que toutes les destinations touristiques
atlantiques, selon la diversité de leur produit et leur stratégie de gestion de crise, n’avaient pas
toutes été touchées de la même manière par le recul de la fréquentation. En particulier, les
destinations ne bénéficiant pas d’une offre diversifiée en retrait du littoral apparaissent
particulièrement vulnérables (Dubois G. and Ceron 2006).
L’érosion menace bon nombre de plages ; l’urbanisation en bord de mer interdit
souvent le recul (exemple type de Hammamet- Sousse-Monastir), contrairement à ce
qui peut être le cas dans le Nord où les plages reculent depuis l’époque romaine sans
pour autant disparaître (Carthage).
Aujourd’hui une grande partie des plages tunisiennes montre des signes de faiblesse.
Plusieurs (environ 8%) sont déjà en cours d’érosion. Les effets de cette dernière sont
visibles même sur des rivages encore à l’abri des aménagements. Ceci permet de dire
que cette érosion s’inscrit dans une conjoncture naturelle défavorable pour les plages,
toutefois ces signes d’érosion sont plus nombreux et plus manifestes sur les rivages
fortement anthropisés.
Le retrait du rivage se fait à des vitesses très souvent comprises entre 0,5 et 1,5 m/an.
Mais des valeurs voisines de 5 m/an ne sont pas rares. Elles ont généralement
caractérisé les premières années succédant à des aménagements venus perturber la
dynamique naturelle du rivage. Au contact des ouvrages qui dérèglent le transit
sédimentaire (les jetées des ports, les épis et même les brise-lames) le déplacement du
rivage s’est parfois fait à des rythmes supérieurs à 20 m/an (on a même observé un
recul de 33 m/an avant la construction d'ouvrages de protection dans certains sites).
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La vitesse du recul la plus importante a été signalée à Ghar El Melh, Foum El Oued et
Djerba Aghir et à moindre degré à Ezzahra et à Soliman (MEDD 2007).
Les côtes les plus précaires se situent dans les golfes de Hammamet (40% du total de
ses plages), de Tunis (30 % du total de ses plages) et à moindre degré au niveau des îles
de Djerba (24 %) et de Kerkenna (14%) par submersion ou par érosion. L’impact de
l’élévation du niveau de la mer dans ce cas sera une perte considérable des terres.
A l’international
Au niveau mondial, 70 % des plages sont en recul alors que 20 % restent stables et que 10 %
avancent.
Afin de proposer une approche détaillée des divers types de situation qui se présentent
selon les zones littorales, nous avons souhaité reprendre en synthèse les conclusions de
l’étude du MEDD sur le littoral tunisien (MEDD, 2008) :
•
des plages encore bien développées et sans signes nets d’érosion ou même avec
des signes d’engraissement ; elles sont les plus présentes sur la façade nord, entre
Tabarka et Bizerte. Ces plages se développent souvent au fond des baies
enserrées par des caps à falaises rocheuses soumises à une érosion intense. Si bien
qu’elles profitent d’une bonne alimentation en sédiments ce qui leur permet
d’être souvent épaisses et de montrer parfois même des signes d’engraissement.
Peuvent être également classées dans cette catégorie quelques plages de la
façade orientale. (plages relayées par des constructions dunaires du fond du
golfe de Hammamet, d’El Ghdabna, l’embouchure de l’oued Chaffar Ras Errmal
à Djerba…) A noter cependant que dans ces secteurs, la situation risque de se
renverser avec les aménagements hydrauliques qui commencent à se multiplier
sur les principaux oueds de ces secteurs (Bouterfess, Zouara, Ziatine, Errmel…)
•
des plages encore larges malgré l’existence d’aménagements importants ; elles
caractérisent notamment les zones touristiques et de résidences secondaires
créées au cours des dernières années (Raoued, Yasmine Hammamet, Korba,
secteur entre Salakta et Mnakaa, Chaffar…) En fait, si ces plages se maintiennent
encore, c’est surtout parce que les aménagements qui les bordent sont très
récents si bien que leur impact sur la plage n’est pas encore net. La situation
risque de changer dans les années à venir car, dans plusieurs cas, des
constructions en dur parfois denses et très rapprochées (comme à Yasmine
Hammamet) ont envahi la dune bordière et ont parfois même mordu la plage.
Les premiers indices de recul de la plage ont été reconnus dans certains secteurs
du golfe de Hammamet et à Chaffar.
•
des rivages montrant des signes d’une évolution régressive malgré l’absence
d’aménagement sur le rivage. Ce sont des plages qui bénéficiaient d’une
alimentation sédimentaire par des cours d’eau importants et qui ont vu cette
alimentation diminuer à cause d’importants aménagements hydrauliques. C’est
le cas en particulier de la frange du delta de l’oued Medjerda.
•
des plages en migration en direction du continent, ce type de plages se
rencontre sur certaines côtes basses bordées par des terres humides, surtout sur la
façade orientale du Cap Bon et entre Rass Eddimess et Mahdia. La plage ici a un
modelé de cordon littoral faiblement dunifié et barre des sebkhas inondées au
cours de la saison des pluies et à l’occasion des fortes tempêtes. La migration est
attestée à la fois par des données géomorphologiques et des données
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
archéologiques. Il n’est pas rare de trouver des vestiges archéologiques sous
l’eau.
•
des plages à évolution contrastée sur des courtes distances. Il s’agit surtout des
plages situées en contact des aménagements portuaires ou de digues
s’opposant à la circulation des sédiments le long du rivage. Il se produit alors un
développement parfois très important des plages situées du côté de la face des
ouvrages tournés vers le courant côtier dominant et de l’autre côté c’est l’érosion
qui prévaut, dans la mesure où les sédiments se trouvent bloqués sur l’autre face
de la digue.
•
des plages soumises à une érosion forte et ayant parfois nécessité le recours à
des travaux de protection. Il s’agit des plages des côtes les plus densément
aménagées. D’une façon générale, la situation est d’autant plus critique que
l’occupation est ancienne et que les aménagements s’étaient rapprochés de la
mer détruisant la dune bordière et empiétant sur la plage. Ces aménagements
correspondent le plus souvent à des constructions en dur (quartiers urbains,
résidences secondaires, hôtels…). Dans plusieurs secteurs, l’érosion a atteint des
stades très avancés et la plage a parfois même disparu. Certaines de ces plages
ont déjà fait l’objet de travaux de défense par des épis et par des enrochements
(banlieue nord de Tunis, Hammamet, Sousse, Djerba…) ou par des brises lames
(Soliman, Mahdia…).
Témoignage des professionnels
Les entretiens avec les hôteliers ont mis en lumière des cas déjà observés d’érosion des plages
tunisiennes :
•
dans la région d’Hammamet :
− construction de digues pour l’hôtel Lido à Nabeul ;
− Perte de plage pour l’hôtel Sultan à Hammamet. D’ailleurs sur un site de réservation en
ligne français37, on lit le commentaire suivant :
La plage du Sultan est agréable, mais très étroite : elle ne couvre pas plus de 50 m sur
5 m. De plus, on y accède par un escalier. Faute de place, les parasols et transats se
trouvent en quantité limitée. Une base nautique permet de pratiquer ski nautique,
pédalo, banane et planche à voile (avec supplément). Assortie d’une note de 13/20,
elle est citée comme point négatif par les journalistes.
les plus
les moins
ƒ
L'animation discrète
ƒ
La plage (minuscule)
ƒ
La piscine et ses espaces de détente
ƒ
ƒ
Le centre de thalassothérapie
Dans les chambres, on entend les
voisins du dessus marcher
l’hôtel bénéficie donc d’une extension de plage mais située à 80m de l’hôtel ce qui
indispose certains clients.
•
dans la région de Sousse :
− retrait partiel d’infrastructures pour l’hôtel Miramar à Monastir ;
− perte de plage : Orient Palace, Hôtel Salem ;
•
dans la région de Djerba :
− L’érosion est jugée forte, mais variable selon les zones : des opérations de
remblaiement, l’installation de digues, de piquets et de boudins gonflables font partie
des solutions mises en place par les hôteliers (cf. paragraphe ci-dessous). Certains
37
http://www.easyvoyage.com/pays/tunisie/hammamet/hotels/sultan-tunisie.html, 22/10/09
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hôtels ont même dû retirer certaines de leurs installations trop proches de la
mer (bungalows, piscine…);
− La salinisation de nappes phréatiques a également été évoquée ;
•
vers Tabarka également, on constate une érosion des plages. Les dunes de sable se
déplacent mais de manière variées : à certains endroits le trait de côte recule, alors qu’à
d’autres la plage se recharge naturellement ;
•
dans la région de Tunis, l’érosion est importante mais ce phénomène semble être intégré
et les constructions ne sont pas réalisées en bord de plage.
Les îles particulièrement vulnérables
L’élévation du niveau de la mer s’accompagnera d’une exacerbation du recul des
rivages en cours d’érosion et pourrait déclencher une érosion dans les autres secteurs.
Les îles basses (Chekli, Kuriates, Kerkenna, Kneiss et Djerba…) ressentiront le plus les
effets de ces changements.
•
L’archipel Kerkennien émerge à peine d’une plate forme continentale étendue
et très peu profonde. Le point le plus haut atteint à peine 13 m. La majeure partie
des terres se trouve à une altitude inférieure à 5 m. En plus, une grande partie est
occupée par des terres humides de type sebkhas, chotts et marais maritimes dont
la surface se trouve souvent à une altitude inférieure à 2 m. Les rivages de cet
archipel sont aujourd’hui le siège d’une érosion marine parfois rapide et sévère.
Cette érosion n’est que localement liée à une intervention humaine, le littoral de
l’archipel étant encore faiblement occupé. Elle s’explique surtout par des
conditions naturelles dont en particulier le caractère subsidient de l’archipel, la
remontée historique du niveau marin et l’absence de cours d’eau importants
susceptibles d’alimenter la côte en sédiments.
•
A Djerba, la côte montre déjà différents signes de faiblesse et elle subit sur
plusieurs segments une érosion inquiétante. L’érosion ne cesse de s’aggraver en
raison des aménagements de front de mer, notamment les constructions en dur
des hôtels qui ont occupé la dune bordière et se sont trop rapprochés de la mer.
Le rivage a localement reculé de plus d’une centaine de mètres. Les constructions
en dur s’opposeront à la migration du rivage qu’imposera l’élévation du niveau
de la mer et dans laquelle les plages auraient pu trouver des formes d’adaptation
à la nouvelle conjoncture. Dans l’impossibilité d’une telle migration et en
l’absence d’une fourniture sédimentaire suffisamment importante pour
contrecarrer l’avancée de la mer, l’érosion s’accentuera et les plages seront
menacées de disparition. Au total l’étude du MEDD estime qu’un linéaire côtier
de quelques 80 km à Djerba est fortement à très fortement vulnérable à une
EANM.
Témoignage de professionnels
A Djerba, l’hôtel Jazira a perdu sa plage depuis plusieurs années et l’hôtel les Sirènes a perdu
l’essentiel de sa plage et les vagues s’attaquent directement à sa terrasse donnant sur la mer.
Les infrastructures touristiques menacées
Au-delà des seules plages, c’est l’ensemble des aménagements en bord de mer qui
est menacé par le changement climatique et par la hausse du niveau de la mer qu’il
engendre. Erosion marine, submersion, recul du trait de côte sont autant de menaces
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
112/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
pour les bâtiments et équipements construits en bord de mer. Ces infrastructures
touristiques bâties dans des zones potentiellement reprises par la mer pourraient alors
disparaître ou représenter de réels risques (écroulement…), d’ici quelques décennies.
L’étude du MEDD sur l’adaptation du littoral a permis de projeter les conséquences
possibles d’une élévation du niveau de la mer d’une cinquantaine de centimètre. Le
tableau suivant résume l’effet de l’érosion côtière sur le trait de côte, calculée selon la
règle de Bruun (MEDD 2008).
Tableau 17 : Retrait de la côte avec une EANM de 50 cm.
Retrait estimé
(cm/an)
Linéaire côtier à vocation
touristique (km)
Banlieues de Tunis
50
6.5
Côtes nord du golfe de Hammamet – Korba
38
12
Fond du golfe de Hammamet
28
-
Côtes sud du golfe de Hammamet - Mahdia
80
4
Djerba zone El Mezraya – Hoummet Essouk
75
1
Côte Djerba – zone d’Aghir
135
10
Secteur côtier
Source : MEDD 2008
Il ressort de ce tableau que le risque de retrait de la côte est important et qu’il l’est
particulièrement au niveau des côtes des banlieues de Tunis (50 cm/an), des côtes du
sud du golfe de Hammamet jusqu’à Mahdia (80 cm/an) et à Djerba (75 à 135 cm/an).
Les risques liés à l’élévation du niveau de la mer (érosion, submersion, reprise par la
mer) menacent les infrastructures touristiques existantes. La plupart des hôtels sont
construits en bord de plage. Aujourd’hui, les plans d'aménagement touristique
imposent un retrait de 100 m par rapport au domaine public maritime (DPM) (lois n°94122 du 28 novembre 1994 (art. 25)), dont la délimitation actuelle est fixée par la loi n°9573 du 24 juillet 1995. Mais certaines constructions parmi les plus anciennes ne
respectent pas cette limite et, surtout, ce retrait est largement insuffisant dans les
perspectives du changement climatique. On peut aussi mentionner le cas des marinas
qui se développent pour accueillir un tourisme de plaisance. Si la navigation à la voile
peut sembler attractive en termes de dépense énergétique dans l’optique du
changement climatique, ces infrastructures restent les premières menacées et posent
par ailleurs d’autres problèmes environnementaux. L’avenir de ce type de pratiques
passe certainement par une nouvelle conception des marinas, plus légère et
susceptible de supporter une élévation conséquente du niveau de la mer.
Il semble notamment indispensable, en l’état actuel des connaissances, de se
préoccuper non seulement du retrait en termes de distance par rapport au trait de
côte mais également de la dimension verticale étant donné que les côtes seront
inégalement touchées selon leur altitude.
Aujourd’hui, grâce à l’étude de la vulnérabilité environnementale et socioéconomique du littoral tunisien face à une élévation accélérée des niveaux de la mer
dues aux changements climatiques et l’identification d’une stratégie d’adaptation
(MEDD, 2008), la problématique d’érosion et de recul du trait de côte est mieux
cernée. Les études d’impact environnementales menées pour l’implantation
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
d’infrastructures touristiques peuvent désormais prendre en compte l’élévation
accélérée du niveau de la mer.
3.4.2 La ressource en eau
La Tunisie, plus encore de d’autres destinations méditerranéennes, est caractérisée par
une activité touristique concentrée sur le littoral et durant l’été et connaît déjà des
déficits de ressource en eau potable. Les enjeux lié à cette précieuse ressource
s’appliquent donc tout particulièrement ici et la Tunisie apparaît comme
particulièrement vulnérable à la baisse de la ressource en eau liée aux effets du
changement climatique.
3.4.2.1 Un pays déjà pauvre en eau et une ressource amenée à diminuer
La Tunisie est considérée parmi les pays les moins dotés en ressources en eau dans le
bassin Méditerranéen. Le potentiel en eau mobilisable, de l’ordre de 4800 Mm3/an,
représente un quota inférieur à 500 m3/hab./an. Ce ratio sera de 360 m3 en 2030
lorsque la population atteindra les 13 millions d’habitants38. Par ailleurs, le coût de l'eau
distribuée par la SONEDE est de plus en plus élevé compte tenu en particulier des
transferts de plus en plus longs (Canal Medjerda – Cap Bon – Sfax) de la production aux
utilisateurs.
La Tunisie est un pays où les précipitations sont déjà généralement insuffisantes pour
l’agriculture pluviale. Vu l’aridité du climat et l’irrégularité des précipitations, l’irrigation
y est une activité agricole nécessaire. Le secteur touristique, bien qu’il ne soit pas le
principal consommateur d’eau, est affecté par la faiblesse de la capacité nationale.
En effet, la rareté relative des ressources en eau, notamment sur le littoral, leur fragilité,
leur inégale répartition et la forte pression anthropique exercée sur ces ressources,
créent une situation de concurrence entre les usagers sectoriels et une
marchandisation galopante de l’eau. Et ce malgré tous les efforts consentis par les
autorités pour améliorer la disponibilité de la ressource. Le défi de l’avenir pour la
Tunisie sera, inévitablement, le développement de ses capacités à préserver et à
valoriser ses faibles ressources beaucoup plus que de rechercher d’en créer de
nouvelles.
La ressource en eau douce risque encore de diminuer, pour plusieurs raisons, dont les
effets directs et indirects du changement climatique :
•
la diminution des précipitations ;
•
la hausse des températures entraînant une évaporation ;
•
la salinisation des nappes phréatiques, due à la montée du niveau de la mer,
associée à une pression sur la ressource hydrique ou à un manque de
précipitations.
L’étude concernant les impacts du changement climatique sur l’agriculture tunisienne
révèle qu’à l’horizon 2030, les ressources en eaux souterraines pourraient diminuer de
28% et les eaux de surface d’environ 5% au même horizon, si l’on se fie à un scénario
certes assez pessimiste mais qui semble aujourd’hui se confirmer (A2).
Dans cette perspective future de pénuries aggravées par le changement climatique et
l’apparition plus fréquente des épisodes de sécheresse, la gestion de l’eau devra
Stratégie méditerranéenne pour le développement durable, Efficience d’utilisation de l’eau, Etude
nationale de Tunisie, Plan Bleu, Sophia Antipolis, novembre 2008.
38
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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intégrer de plus en plus les aspects relatifs à l’amélioration du fonctionnement des
infrastructures hydrauliques et de maitriser les technologies adaptées afin d’optimiser
l’utilisation des ressources existantes.
Cette situation risque également de s’aggraver avec l’intrusion d’eau marine dans les
nappes côtières suite à une EANM, ce qui ne peut être sans impacts sur le secteur du
tourisme. Il est démontré (MEDD 2008) que pratiquement toutes les nappes côtières
courent le risque de l’intrusion marine avec une EANM de 50 cm. Cependant les
proportions des zones submersibles varient d’une nappe à une autre en fonction des
caractéristiques de chaque nappe. Les nappes les plus vulnérables sont celles de
l’Ariana, de la plaine d’El Haouaria, de la côte orientale du Cap Bon, toutes les nappes
du Sahel ainsi que celles de Sfax et Gabès. Les pertes des ressources en eaux qui seront
occasionnée par l’intrusion marine sont estimées à 53% des eaux des nappes
phréatiques littorales, ce qui correspond à environ 152 Mm3.
3.4.2.2 Les conséquences potentielles pour le tourisme
En général, les risques pour le tourisme sont :
•
la défaillance de l’approvisionnement en eau potable dans les espaces
surfréquentés (littoral et îles en particulier) ;
•
la défaillance de l’approvisionnement en eau de certains équipements de loisirs
(piscines, golfs…) ;
•
la baisse du niveau naturel des rivières et plans d'eau aménagés, espaces d'accueil
d'activités de loisirs (nautisme, pêche...) ;
•
une dégradation des environnements aquatiques à la fois physique (baisse de
niveau des cours d’eau et des lacs) et qualitative (pollution…), avec des problèmes
croissants d’arbitrage entre usages (tourisme vs agriculture…).
La consommation d’eau du tourisme
Si la part du secteur touristique est relativement modeste dans la consommation
globale d’eau du pays par rapport à d’autres secteurs comme l’agriculture, cette
activité n’en pose pas moins des problèmes très spécifiques :
•
une concentration saisonnière, les pics coïncidant avec des périodes de faibles
ressources en eau (été) ;
•
une concentration spatiale sur le littoral, sur des sites caractérisés par la faiblesse
des ressources locales en eau (îles), et souvent dans des sites naturels sensibles ;
•
une activité touristique qui repose souvent sur des équipements qui représentent
une consommation d’eau excessive comme les parcours de golfs, les piscines ou
les centres aquatiques.
La saisonnalité touristique se traduit en Tunisie par un surplus de population en été, que
les départs des résidents sont très loin de compenser. D’où la nécessité de
surdimensionnement des équipements d’approvisionnement et de traitement qui
devront de surcroît suivre l’évolution de la pression démographique et touristique sur la
côte. Si l’approvisionnement en eau de la côte devait se faire en dépassant les
capacités de renouvellement de ses eaux souterraines on pourrait craindre des
intrusions salines comme c’est dès maintenant le cas pour les côtes méditerranéennes
où le tourisme est considéré comme une source majeure du problème.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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La consommation du secteur hôtelier représente environ 1% de la consommation totale
d’eau en Tunisie. Cependant, la question de la consommation d’eau du secteur
touristique se pose en d’autres termes : la consommation totale des hôtels est évaluée
en moyenne à 500 L/jour/ personne, tout usage compris, ce qui est très largement
supérieur à l’usage domestique moyen dans les pays d’origine des touristes. Par
exemple, en Allemagne (Mutschmann et al. 2002), la consommation moyenne des
ménages est évaluée à 130 l/personne/jour (47 m3/an), en France, elle est
généralement évaluée à 150 l/personne/jour.
La Société nationale d'exploitation et de distribution de l'eau (SONEDE) est le fournisseur
en eau des unités d'hébergement, mais les hôtels sont également alimentés par
d'autres ressources pas toujours « identifiables », puits, forages (Zones touristiques de
Hammamet et de Tozeur notamment), unités de dessalement des eaux saumâtres ou
d'eau de mer.
Témoignage des professionnels
La chaîne El Mouradi, qui compte 14 unités hôtelières pour 12000 lits, a entrepris d'équiper 8
établissements d'installations de dessalement d'eau saumâtre (2 hôtels) ou d'eau de mer (6
hôtels).
La consommation touristique représentée dans le graphique ci-dessous est celle
comptabilisée par la SONEDE, non comprises toutes les autres en provenance des
nappes souterraines ou des eaux non conventionnelles. Elle a oscillé entre 16 et 18
millions de m3 par an de 2002 à 2004.
Figure 38 : Volume d'eau consommé par le secteur touristique (Millions de m3)
20
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
1969
1979
1989
1999
2000
2001
2002 2003 2004
Source : SONEDE
La consommation des hôtels se décompose en :
•
une partie fixe, qui est indépendante du taux d'occupation de l'hôtel, à savoir
l'arrosage des pelouses, l'irrigation des espaces verts et éventuellement du golf, le
nettoyage ;
Certains équipements gros consommateurs d’eau sont aujourd’hui alimentés par
les Eaux Usées Traitées (EUT). C’est en particulier le cas de la plupart des golfs.
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L’irrigation des golfs tunisiens requiert de 30 à plus de 40 m3 d’eau par jour et par
ha de surface irrigable (SONEDE).
•
une partie variable, à savoir la consommation des résidents qui naturellement est
fonction du taux d'occupation de l'hôtel.
Figure 39 : Consommation spécifique (litre/jour/lit) et Taux d'occupation (%)
55,8
580
55,2
48,6
44
560
42
540
520
500
480
460
2000
2001
2002
2003
2004
Source : SONEDE
En toute logique, la consommation par nuitée augmente sensiblement lorsque le taux
d’occupation chute. On constate également sur ce graphique que la consommation
restituée ici par la SONEDE dépasse, au début des années 2000, le ratio de 500 L/jour/lit
considéré comme la moyenne actuelle.
Les activités aquatiques
En Tunisie, l’eau est également un cadre constitutif d’attractions touristiques avec, en
particulier, la baignade en mer, les piscines et la thalassothérapie. Les principaux
enjeux pour le secteur touristique tunisien, essentiellement balnéaire et estival, sont
donc :
•
le maintien d’un approvisionnement en eau suffisant pour remplir les piscines des
hôtels ;
•
le maintien d’une eau de baignade en mer de bonne qualité ;
•
le maintien de la ressource (quantité et qualité), support de l’activité de
thalassothérapie.
Dans une optique touristique, il importe de préserver l'accès à l'eau (mer, rivières, plans
d'eau, zones aménagées de marais), facteur primordial d’attractivité de destinations et
sites touristiques, ainsi que la qualité de la ressource (problématique de pollution et
d’assainissement).
En Tunisie, c’est surtout la qualité des eaux marines littorales, de par la diversité des
fonctions et des activités économiques qui lui sont liées, qui constitue un véritable
enjeu pour la destination touristique. En effet, cette qualité participe non seulement à
la préservation d'un patrimoine écologique mais elle conditionne également le
maintien des activités touristiques (baignade). Or le mélange eaux marines/eaux
continentales est déterminé, en volume, par le régime des marées et le débit des cours
d'eaux, et, en qualité, par celle des eaux douces. Ce sont donc des éléments essentiels
pour l'environnement de cet écosystème. L'évolution des eaux marines côtières dans le
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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temps, l'intensité des phénomènes et les processus sont donc différents de ceux du
milieu continental.
Par ailleurs, se pose aussi de plus en plus la question de la hausse de la température de
l’eau. Si l’évolution des températures de l’air est étudiée par les scientifiques, celle de
l’eau l’est beaucoup moins et il n’existe aujourd’hui, à notre connaissance, aucune
étude portant sur les eaux côtières en tant que ressource touristique pour la baignade.
On sait que les mers et océans ont une inertie thermique qui devrait atténuer la hausse
de température mais trop de paramètres complexes (courants marins, salinité…)
entrent en jeu pour permettre des hypothèses fiables actuellement. Cependant, on
peut imaginer qu’une hausse de la température de la mer à proximité du rivage aurait
sans doute des conséquences sur le confort de la baignade, en fonction des saisons
(en caricaturant : favorable en hiver, incertaine en été). Par ailleurs, une augmentation
de la température moyenne de la mer peut notamment entraîner une recrudescence
de bactéries et de virus aquatiques notamment fréquentant les habitats de zones
côtières. Cependant, nous manquons aujourd’hui de connaissances sur les effets
directs ou indirects d’une élévation de la température des écosystèmes aquatiques
d’eau douce ou d’eau de mer sur la survie et la viabilité des bactéries, virus et parasites
pathogènes (Etude « santé et changement climatique », MEDD 2009). Cette sensibilité
aux effets de changement climatique, qui mérite d’être davantage étudiée, incite
également à la vigilance grâce à l’amélioration du contrôle sanitaire des eaux de
baignade.
La qualité des eaux intérieures (lacs, rivières) ne constitue pas aujourd’hui un véritable
enjeu pour le tourisme tunisien dans la mesure où il n’existe quasiment aucun produit
(baignade, nautisme etc.) aujourd’hui autour de ce type d’aménités. Par contre, cette
considération ne devra pas être négligée dans la réflexion sur le développement de
produits touristiques dans l’intérieur du pays.
Une politique de maîtrise de consommation
Comme nous l’avons vu (chapitre 2), la Tunisie, du fait de ses faibles ressources en eau,
a déjà pris conscience de l’enjeu et pris un certain nombre de mesures qui devraient lui
permettre de mieux anticiper les conséquences du changement climatique : tarifs
spécifiques, stratégie nationale de maîtrise de l’eau dans les établissements touristiques,
réutilisation des eaux traitées pour l’irrigation des golfs... De telles mesurent permettent
de réduire la vulnérabilité de l’activité touristique mais nécessiteront à l’avenir d’être
renforcées.
3.4.3 L’approvisionnement alimentaire
Les tensions sur la ressource en eau, les modifications climatiques et le recul du trait de
côte sont autant de facteurs qui peuvent modifier les pratiques agricoles. Les
conséquences sur l’activité touristique peuvent être les suivantes :
•
le renchérissement de certaines denrées pour
restaurants (cultures maraichères par exemple) ;
l’approvisionnement
des
•
les difficultés d’approvisionnement pour certaines denrées qui deviendront rares ;
•
les conflits d’usage à la fois de l’espace (littoral) et de la ressource en eau (à
certaines périodes).
Une grande partie des denrées alimentaires destinées au secteur touristique est
produite dans les zones côtières et se trouve menacée par la hausse du niveau de la
mer. Le risque vient de la salinisation des sols, de la dégradation des ressources en eau
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
118/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
et de la désorganisation du système de drainage des eaux pluviales et d’irrigation. Par
ailleurs, les impacts physiques de cette évolution toucheront aussi les systèmes
écologiques côtiers et les ressources halieutiques.
Les modifications du climat en Tunisie auront de sérieuses conséquences sur les
agrosystèmes : production oléicole, arboriculture, et grandes cultures. L’étude
concernant les impacts du changement climatique sur l’agriculture tunisienne (MEDD,
2008) envisage, à l’horizon 2030, des conséquences qui pourraient impacter
l’approvisionnement du secteur touristique. Par exemple, dans le cas de plus en plus
probable d’une succession d’années de sécheresse le cheptel (bovins, ovins et
caprins) pourrait baisser jusqu’à 80% au Centre et au Sud et de quelque 20% au Nord.
Au Sud, les conséquences du changement climatique devraient notamment rendre la
situation des oasis plus critique. Ces répercussions sur l’approvisionnement et la sécurité
alimentaire pourraient peser sur le développement du tourisme saharien.
Témoignage des professionnels
Déjà actuellement, certains hôteliers constatent le renchérissement du prix du
poisson. Dans ce cas, ils ont le choix entre le maintien des prix habituels et donc la
baisse de la qualité (recours à des produits d’élevage, ou des produits moins nobles).
Afin de maintenir le niveau de la qualité, les restaurateurs peuvent choisir de
d’augmenter leur prix de vente.
3.4.4 La biodiversité, les écosystèmes et les paysages
L’augmentation des températures, la raréfaction de la ressource en eau ou les
modifications du trait de côte sont autant de facteurs influençant l’évolution de la
biodiversité et des écosystèmes.
Sachant qu’une modification d’un degré de la température moyenne implique un
déplacement d’environ 150km des conditions optimales pour un écosystème et que ce
n’est pas la température mais le stress hydrique et les phénomènes qui peuvent
l’accompagner (feux de forêt etc.) qui sont les plus susceptibles d’engendrer des
évolutions, on peut s’attendre à ce que la végétation et les paysages changent de
manière sensible, voire éventuellement chaotique.
3.4.4.1 La biodiversité
Le changement climatique devrait avoir des impacts significatifs sur les aires de
répartition des espèces animales et végétales avec, pour conséquence locale,
l’apparition ou la disparition de certaines espèces.
Les conséquences pour le secteur touristique peuvent être principalement de 2 ordres :
•
l’apparition ou la recrudescence d’espèces nocives ou, tout du moins, présentant
un risque sanitaire : moustiques, algues diverses, méduses…
•
la modification ou la disparition de certains écosystèmes spécifiques présentant un
intérêt pour le tourisme de découverte et d’observation : oiseaux nicheurs, fleurs
endémiques…
Pour la Tunisie, le tourisme de découverte et d’observation est actuellement encore très
marginal. L’impact du changement climatique ne représente pas réellement un enjeu
au niveau national. Localement, certains produits touristiques en développement
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
119/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
pourraient en subir les conséquences. Mais le rythme des changements devrait
permettre une adaptation des produits relativement « naturelle » : si certaines espèces
ou des écosystèmes disparaissent, ils pourront être remplacés par d’autres
caractéristiques qui pourront également faire l’objet de découvertes touristiques.
Concernant le second type d’impacts, lié aux questions sanitaires, les conséquences
pourraient être plus sensibles en Tunisie. Les impacts du changement climatique sur la
santé font l’objet d’une étude spécifique (MSP/MEDD/GTZ, en cours) aussi ce sujet ne
sera pas traité ici. Nous pouvons par contre citer certaines difficultés rencontrées de
façon récurrentes ou bien apparues récemment dans les stations touristiques de Tunisie,
qui pourraient être aggravées par les effets climatiques :
•
de nombreuses plages connaissent régulièrement des dépôts d’algues qui
constituent une gêne visuelle et olfactive pour les touristes. C’est le cas de l’hôtel
du Lido à Nabeul, qui a fait construire deux digues pour retenir les algues. Cette
opération a représenté un coût de 1,6 millions DT. Plus généralement de
nombreux secteurs sont touchés, de Nabeul à Hammamet, de Sousse à Monastir
ou encore à Djerba. Ce problème n’est pas lié actuellement au changement
climatique mais il est possible (bien qu’aucune étude ne le montre) que celui-ci
l’aggrave ;
•
la prolifération de méduses, dans les régions de Sousse et de Djerba a également
été mentionnée, la période variant selon les années et correspondant plus ou
moins à la haute saison ;
•
vers Tabarka, la population de goélands a tellement augmenté qu’elle déloge
petit à petit les autres espèces, modifiant l’équilibre de l’écosystème. Là encore,
ce phénomène mériterait une étude approfondie avant de pouvoir envisager un
quelconque lien avec le changement climatique ;
•
les moustiques constituent depuis longtemps une nuisance pour les touristes et
peuvent également constituer un risque sanitaire avec la recrudescence
envisagée de maladies à vecteurs. Le commissaire de Kerouan a signalé cet
inconvénient. D’autres zones sont également concernées. Sur ce point, nous
renvoyons le lecteur vers l’étude en cours sur le secteur de la santé.
3.4.4.2 Les paysages
On doit s’attendre à ce que les paysages changent, tant à cause des effets
climatiques directs (sècheresse…) que des impacts sur la biodiversité et les
écosystèmes.
Bien que les évolutions paysagères à anticiper soient notables, on peut noter que si la
beauté des paysages est toujours citée parmi les causes principales d’attractions
touristiques, ces paysages ont dans le passé évolué sans que la répartition des grandes
destinations touristiques ait été drastiquement modifiée. On peut d’ailleurs risquer
l’hypothèse que les touristes supportent mieux les changements que les autochtones :
à qui la disparition des cultures en terrasse de Provence a-t-elle fait le plus de peine ?
On peut aussi rappeler que de nombreux « monuments naturels » naguère pôles
d’attraction touristique sont aujourd’hui complètement tombés dans l’oubli. Certaines
ressources à la base d’un tourisme de terroir peuvent également voir leur qualité
modifiée avec le changement climatique.
Il semble que ce soit avant tout le maintien de la possibilité d’accomplir telle ou telle
activité dans de bonnes conditions (la baignade, la pêche) (McEvoy, Handley et al.
2006), ainsi que les autres « services » offerts par les écosystèmes (protection contre les
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
120/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
risques naturels…) qui soient déterminants, plus que la visibilité de la faune ou l’aspect
final du paysage.
Toutefois on peut penser que les événements climatiques extrêmes (tempête +
submersion) peuvent avoir des effets négatifs qui mettent un certain temps avant d’être
oubliés (par exemple sur les forêts).
Les impacts économiques peuvent être de deux types :
•
l’impact sur la fréquentation de lieux, pour lequel se pose la question du
changement des paysages et des ambiances naturelles ;
•
l’impact sur des activités touristiques spécifiques : certains tourismes de terroir
peuvent être touchés, la pêche de loisirs en eau douce…
L’attractivité touristique de la Tunisie ne repose pas, aujourd’hui, sur des paysages ou
écosystèmes spécifiques en dehors des plages. Cependant, les perspectives de
diversification de l’offre touristique tunisienne reposent sur ces richesses encore
insuffisamment valorisées. Si cette question des paysages et des terroirs ne constitue
pas un enjeu majeur pour le secteur touristique tunisien, il s’agit néanmoins d’une
question à prendre en compte dans les stratégies de développement futur.
Par exemple, certaines côtes basses bordées par des plaines alluviales très basses ou
par des terrains salés de type Sebkha, chott ou marais maritimes notamment peuvent
être menacées également par une accélération de l’érosion, voire par le risque de
submersion. On notera surtout le risque de perte de certaines ressources comme ces
écosystèmes spécifiques pour un tourisme de découverte ou surtout la destruction de
vestiges archéologiques dans certains secteurs touchés par un recul déjà attesté du
trait de côte (cas de Melloulèche).
3.5 Les coûts associés aux impacts du changement
climatique
3.5.1 Les sources potentiels de coûts du changement climatique
Les conséquences du changement climatique devraient générer des coûts pour le
secteur touristique dont les plus directs seront :
•
des coûts liés à la dégradation environnementale, en particulier sur le littoral :
recul des plages, érosion ou submersion des espaces bâtis ;
•
des coûts de production croissants pour les établissements touristiques :
renchérissement de l’énergie et de l’eau et conséquences en chaîne sur les
approvisionnements ;
•
des coûts liés à une modification de la demande et en particulier un manque à
gagner en cas de baisse de la fréquentation ;
•
des coûts liés à l’évolution du transport aérien : hausse du prix de l’aérien,
entraînant une pression supplémentaire sur les prix hôteliers ;
•
l’ensemble des surcoûts liés aux mesures d’adaptation comme par exemple dans
le domaine de la construction et de l’urbanisme.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
121/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Bien entendu, nous parlons ici de coûts de natures diverses, qui s’exprimeront tant
termes économiques (perte en capital et pertes de production) qu’en termes
d’emploi. Ils pourront peser à la fois sur les professionnels et les collectivités et l’Etat.
3.5.2 Les limites de l’étude des coûts
L’étude de ces coûts est cependant un exercice complexe qui se heurte à de
nombreuses limites :
•
l’incertitude sur le niveau futur des émissions de gaz à effet de serre, et donc sur le
niveau de réchauffement atteint ;
•
l’incertitude sur la déclinaison régionale et locale des évolutions climatiques ;
•
une méconnaissance des facultés d’adaptation des touristes – et du tourisme –
face à un climat changeant ;
•
le manque d’études d’impacts très détaillées locales sur les dégradations
environnementales potentielles ;
•
la difficulté à distinguer l’impact spécifique du changement climatique dans des
phénomènes complexes (vs évolution naturelle et autres impacts anthropiques) ;
•
l’incertitude sur la réponse internationale à la nécessité de limiter les GES ;
•
l’incertitude sur les choix futurs en matière d’adaptation : lutter ou laisser faire.
A l’international
Une étude nationale française en cours tente d’évaluer les coûts potentiels du
changement climatique. Grâce à une approche sectorielle, cette étude se penche plus
particulièrement sur le cas du tourisme. Les premiers résultats, en octobre 2009, ne
permettent pas de donner des réponses chiffrées à cette question des coûts.
Pour évaluer les coûts potentiels liés aux impacts du changement climatique, en l’état
actuel des connaissances, l’approche la plus réaliste consiste à se baser sur des études
de cas précises qui ont fait l’objet d’une recherche approfondie.
A ce stade, pour la Tunisie, une approche chiffrée complète est impossible. Il est par
contre possible d’approcher certains coûts liés à la dégradation environnementale
grâce aux effets déjà observés actuellement, notamment sur le recul des plages
(paragraphe 3.5.3.1). Certaines études proposent par ailleurs d’évaluer les impacts
socio-économiques de cette dégradation sur le secteur du tourisme (paragraphe
3.5.3.2).
3.5.3 Les coûts liés à la dégradation environnementale du littoral
3.5.3.1 Les coûts directs de la dégradation environnementale
Ces coûts sont liés à la réparation du capital naturel. Soulignons toutefois que :
•
ces coûts ne concernent pas directement le secteur touristique mais bien la
protection de l’environnement. Cependant, étant donnée la dépendance de
l’activité touristique à l’environnement sur le littoral, on peut imaginer que ce
secteur est directement intéressé par de telles mesures ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
122/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
le tourisme est un facteur (parmi d’autres) de la dégradation environnementale :
l'urbanisation, le développement insuffisamment contrôlé des hôtels et la
contamination des eaux marines contribuent à cette dégradation et on peut
imaginer que le secteur soit appelé à contribuer à la réparation ;
•
ces coûts ne sont pas directement ou intégralement imputables au changement
climatique : les phénomènes d’érosion marine et de hausse du niveau de la mer
ne sont qu’aggravés ou accélérés par le changement climatique. Il faudrait donc
évaluer le différentiel imputable au changement climatique, ce qui n’est pas
permis par l’état actuel des connaissances.
Certaines études menées localement nous permettent d’apporter quelques éléments
pour approcher l’ordre de grandeur de ces coûts :
•
Si l’on se place au niveau global de la Tunisie, les coûts relatifs à la protection du
littoral reposent sur le « programme national pour la protection du littoral contre
l’érosion marine » porté par l’Agence d’aménagement et de protection du
littoral. Selon ce programme, une centaine de kilomètres avaient été identifiés
comme prioritaires (sur 1,300 km de côtes). Finalement, seuls 40 km sont pour
l’instant concernés par un programme de réparation pour un coût total de 120
millions de dinars.
•
Si l’on se place au niveau d’un établissement hôtelier, la dégradation
environnementale entraîne aujourd’hui déjà de graves problèmes de disparition
des plages et de dépôts d’algues. Les solutions mises en œuvre par les hôteliers
varient de la recharge saisonnière de la plage (apport de sable chaque année
pour reconstituer la plage), à la construction d’ouvrages de protection.
− La société SeaBel Hotels, confrontée à un grave problème d’érosion de la
plage de l’Hôtel ALADIN à Djerba, estime le coût annuel de rechargement de
la plage à environ 60.000 DT. Une étude technique a été menée pour la mise
en œuvre d’une solution de protection (type digue) aboutissant à un budget
d’environ 600.000 DT.
− L’hôtel du Lido à Nabeul a fait construire deux digues pour retenir les algues
qui se déposent sur la plage. Cette opération a représenté un coût de 1,6
millions DT.
3.5.3.2 Les impacts sociaux et économiques sur le secteur touristique
L’étude portant sur la stratégie d’adaptation du littoral (MEDD, 2008) propose une
évaluation des coûts induits par les problématiques de recul du trait de côte. Le
tourisme est évidemment au premier plan des secteurs touchés par ce problème et il
est largement abordé dans cette étude. Par ailleurs, compte tenu du poids du tourisme
balnéaire dans l’industrie touristique tunisienne, nous estimons que cette approche
littorale constitue une bonne évaluation des coûts de dégradation environnementale
pour le tourisme. Nous présentons ici une synthèse des conclusions de cette étude,
synthèse centrée sur le secteur touristique, et rappelons que cette étude se base sur
l’hypothèse d’une élévation du niveau de la mer de 50 cm.
L’étude s’intéresse aux impacts sociaux et économiques générés par les impacts
physiques du changement climatique et, en particulier, par la hausse du niveau de la
mer. Ils sont de deux natures :
− la première est relative à la dégradation du capital productif en place ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− la deuxième se rapporte aux variations de la production et de l’emploi
consécutives à la dégradation du capital productif.
Le Tableau 18 résume l’approche suivie pour l’évaluation des coûts de ces impacts.
Tableau 18 : Méthode d’estimation des coûts des impacts socio-économiques
Effets
Méthode
Estimateur
Perte de la valeur du
capital naturel : sol, eau,
plage
Valeur d’un actif dégageant
une rente perpétuelle
Le loyer (ou la valorisation) est
supposé être égal à la rente
Variation des productivités
des activités
Différence de nuitées entre des
hôtels « pieds dans l’eau » et
intérieurs
Valorisation du revenu des
activités économiques
(agriculture, tourisme)
Différences de productivités
Différences de valorisation entre
des cas représentant des
situations avant et après CC
Infrastructure
Coût de remédiation
Dépenses nécessaires pour
renforcer l’infrastructure
Source : MEDD 2008
Les pertes en capital productif
Le capital productif se compose des ressources naturelles (plages, sols, eau…) et de
l’infrastructure (hôtelière, infrastructure de base). Les ressources naturelles n’ont pas de
prix de marché. Elles constituent des actifs dont la valeur est approchée dans l’étude
sur la vulnérabilité et l’adaptation du littoral aux CC (MEDD 2008) par les services
qu’elles rendent. En supposant que la valeur de ces services est constante dans le
temps, l’étude estime les pertes en capital productif suite à une élévation du niveau de
la mer de 50 cm à environ 3,6 milliards de DT soit presque 10 % du PIB de 2006.
Tableau 19 : La valeur du capital productif dégradé suite à une EANM.
Capital productif dégradé
Valeur en MDT
% des pertes totales
Sol agricole et végétation spontanée
30
0,8
Zones urbaines bâties
704
19,6
Ressources en eau et pertes des terres irriguées
290
8,1
Perte du capital eau
579
16,1
Tourisme
1935
53,9
Infrastructures
53
1,5
Total
3592
Source : MEDD 2008
Il ressort clairement de ce tableau que le capital productif qui sera le plus affecté est
celui du secteur touristique. Il représente plus de la moitié des pertes en capital dues à
l’élévation accélérée du niveau de la mer.
Les pôles touristiques de Sousse et des gouvernorats du Sud-Est (avec le pôle de
Djerba) seront les plus touchés (Tableau 20).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Tableau 20 : Perte du capital productif suite à l’EANM (en MDT et par gouvernorat
côtier)
Gouvernorat
Capital sol et
infrastructure
Capital eau
Capital touristique et
patrimoine culturel
Total
Bizerte
105
2
-
107
Tunis
190
114
-
304
Nabeul
29
429
444
903
Sousse
230
48
723
1001
Sfax
51
218
-
270
Gabès/Medenine
194
57
768
1018
Total
799
869
1935
3 603
Source : MEDD 2008
Les pertes annuelles de production
En tenant compte des pertes en capital productif, les pertes annuelles globales de
production liées à l’EANM pour les secteurs de l’agriculture, de la pêche et du tourisme
sont estimées à environ 181 MDT par an. Ce qui correspond à presque 0,5 % du PIB
(MEDD 2008).
Tableau 21 : Pertes de production occasionnées par une EANM de 50 cm
Activité économique
Valeur et nature de la variation de production (MDT / an)
Agriculture
81 (variation négative)
Pêche
1 (variation positive)
Tourisme
102 (variation négative)
Source : MEDD 2008
L’étude précise que l’essentiel des pertes de production est dû au déclassement des
hôtels inhérent au retrait des plages (baisse des recettes hôtelières, due à la
dépréciation de la valeur de la nuitée dans les hôtels qui n’ont plus de plages). Ces
pertes correspondent à environ 5 % de la valeur ajoutée du secteur touristique. L’enjeu
est d’autant plus important que ces pertes de recettes sont, dans leur majeure partie,
en devises.
Sur le plan régional, c’est l’île de Djerba qui sera la plus affectée, suivie par la zone de
Sousse Nord. La figure suivante donne les pertes de recettes estimées sur la base de la
différence de prix de nuitée entre un hôtel front mer et un hôtel intérieur.
Tableau 22 : Pertes des recettes touristiques (par zone), suite à une EANM de 50 cm
Zone touristique
Capacité
Différence de prix de
hôtelière en
nuitée entre hôtel front
nombre de lits mer et hôtel intérieur (DT)
Taux moyen
d’occupation
des hôtels
Pertes des
recettes en
MDT/an
Hammamet
Nord et Nabeul
5200
20
36 %
14
Hammamet Sud 3150
20
46 %
10
Sousse Nord
10000
20
52 %
38
Djerba
12000
20
46 %
40
Source : MEDD 2008
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Les pertes en emploi
Pour le secteur touristique, l’estimation des pertes directes d’emplois est fondée sur le
différentiel du ratio moyen de l’emploi dans les hôtels front de mer et des hôtels
intérieurs de standing supérieur ou égal à 4 étoiles. Le ratio actuel est de 1 emploi
permanent pour 10 lits dans un hôtel front mer et de 1 emploi permanent pour 15 lits
dans un hôtel intérieur. En appliquant cette approche, l’étude aboutit à une perte
totale de 1012 emplois directs dans le secteur touristique ce qui représente à peu près
1% de l’emploi touristique.
Ces pertes se repartissent comme suit entre les zones touristiques :
− Hammamet Nord et Nabeul : 173 emplois,
− Hammamet Sud : 105 emplois,
− Sousse Nord 333 emplois,
− Djerba : 400 emplois.
Djerba et Sousse Nord apparaissent comme les zones qui seront les plus affectées.
L’EANM aura en outre des effets socio-économiques indirects dans le secteur
touristique. Ces effets sont induits par les ajustements des acteurs économiques aux
effets directs du changement climatique et se réalisent par conséquent en second
temps. Ainsi la basse des activités touristiques dans les régions côtières
s’accompagnerait par un tassement du marché de différents services et de l’artisanat
(activité directement liée à l’effectif et à la qualité des touristes). Il s’en suit une baisse
de l’emploi dans ces secteurs.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
4 La conjoncture internationale et ses impacts
sur le tourisme tunisien
Ce chapitre vise à comprendre les éléments de conjoncture internationale qui
pourraient peser sur le tourisme et en déduire les impacts potentiels sur ce secteur en
Tunisie.
Une première partie éclaire le lien entre tourisme et changement climatique,
permettant de comprendre en quoi cette activité est aussi contributrice au
phénomène de réchauffement et donc visée par les politiques d’atténuation.
La seconde partie fait le point sur l’état de la contrainte carbone au niveau
international, décrivant les négociations en cours entre les états et les objectifs de
réduction des émissions.
La troisième partie tire les conséquences des éléments précédents en termes d’impacts
potentiels sur le tourisme tunisien.
Enfin, une dernière partie soulève la question, encore très peu explorée, des impacts
potentiels sur les sociétés.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Dans ce chapitre, nous éclaircirons d’abord la contribution du tourisme aux émissions
de gaz à effet de serre et la conjoncture internationale sur la prise en compte du
changement climatique. Nous étudierons en particulier les évolutions possibles du
contexte international sur l’atténuation des émissions de GES et les contraintes qui
pourraient en découler pour le secteur touristique.
4.1 La contribution de la Tunisie au changement
climatique
4.1.1 L’évaluation des émissions tunisiennes
Lorsque l’on souhaite étudier la contribution du secteur touristique tunisien, on se heurte
à la difficulté à distinguer les émissions de GES directement imputables aux touristes
parmi l’ensemble des émissions du pays. Par ailleurs, le transport international, dont on
a vu qu’il est le contributeur principal, n’est pas comptabilisé. Cependant, à partir des
points précédents, on sait que l’on peut répartir les postes d’émissions comme suit :
transport international en premier lieu, mais aussi interne ; hébergement et activités
touristiques. L’inventaire des émissions de GES39, réalisé par l’Agence Nationale de
Maîtrise de l’Energie, ne nous permet pas dresser le bilan des émissions du secteur
touristique tunisien, car on ne peut faire la part des déplacements dus au transport
touristique ou des hébergements utilisés à des fins touristiques. Néanmoins, on peut déjà
en déduire des ordres de grandeur des émissions par secteur.
En 2003, les émissions de GES tunisiennes totales atteignent 22,8 Mt eq-CO240, soit 62%
de plus qu’en 1990 (soit + 3,8% par an). Cette hausse des émissions de GES a
accompagné une croissance économique de 4,6% par an.
Cet inventaire nous permet de calculer l’indice d’intensité en carbone41. Celui-ci est
ainsi passé de 1,303 t eq-CO2/1000 DT à 1,176 t eq-CO2/1000 DT de valeur ajoutée. On
voit ainsi que l’intensité carbone de l’économie tunisienne a diminué de 10% environ,
en 13 ans. A l’inverse, par habitant, le montant d’émissions de GES moyen est passé de
1,72 à 2,30 t eq-CO2. Malgré la hausse, ce résultat reste largement inférieur à celui des
pays industrialisés. Pour comparaison, un Français émet en moyenne 8,5 t eq-CO2 par
an.
La répartition des GES par secteur nous montre que les industries énergétiques
représentent la première source d’émissions (30%), suivies par le transport national
(28%)42, l’industrie manufacturière (22%), les bâtiments (14%) et enfin l’agriculture (6%).
Au sein de la catégorie Bâtiments, la part actuelle de l’hôtellerie est estimée à environ
30%. Cependant, pour appréhender l’ensemble des émissions du secteur touristique, il
faudrait également inclure la part du transport des touristes sur place (et à
l’international), ainsi que leurs consommations intermédiaires.
Evolution des émissions de GES dues à l’énergie en Tunisie 1990-2003, ANME, Ministère de l’Industrie, de
l’Energie et des Petites et moyennes Entreprises, PNUD, 2005. Une nouvelle version pour la période 20042008 est en cours de réalisation.
40 MTE-CO2 : million de tonnes équivalent dioxyde de carbone.
41 Emissions de GES produites/unité de PIB.
42 Dont 75 % pour le transport routier.
39
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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D’après les prévisions actuelles, les émissions totales devraient connaître un
accroissement important de 22,8 Mt eq-CO2en 2003 à 31,6 Mt eq-CO2en 2010 et 49 Mt
eq-CO2 en 2020.
Figure 40 : Evolution des émissions de GES par secteur
100%
90%
9
5
80%
70%
21
3
4
15
17
16
20
22
23
Emissions fugitives
Agriculture
13
Industries manufacturières
Résidentiel/tertiaire
25
Transport (nat.)
20%
10%
18
16
40%
30%
4
5
27
60%
50%
6
6
23
26
1990
2000
35
41
Industries énergétiques
0%
2010
2020
Source : ANME
4.1.2 La politique de réduction des émissions
Afin de limiter ses émissions de GES43, la Tunisie a mis en place un programme de
maîtrise de l’énergie. Celui-ci vise une utilisation plus rationnelle de l’énergie, la
promotion des énergies renouvelables et le développement des énergies propres de
substitution. Pour 2008-2011, les objectifs du plan44 sont :
•
une réduction de l’intensité énergétique de 3% par an ;
•
un maintien de la croissance de la demande d’énergie à 2,8% par an ;
•
une part de 4% de la consommation d’énergie primaire pour les énergies
renouvelables en 2011.
Pour parvenir à ces résultats, plusieurs mesures ont été mises en place, dont quelques
unes concernent plus particulièrement le secteur touristique :
•
Des mesures et actions au niveau national et multi-secteurs :
− les contrats-programmes d’efficacité énergétique ;
− la mise en place d’équipement de cogénération ;
− le programme Prosol tertiaire, développant le chauffage solaire de l’eau.
Programme ne résultant pas d’engagement politique formel.
Programme Quadriennal de Maîtrise de l’Energie 2008-2011, Ministère de l’Industrie, de l’Energie et des
Petites et moyennes Entreprises, ANME, avril 2009.
43
44
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Après 4 années de mise en œuvre, on estime à 8 Mt eq-CO2 les émissions de GES
évitées, la part imputable aux établissements hôteliers restant cependant
minime.
•
Par ailleurs, une convention a été mise en place avec Tunisair, afin de respecter la
réglementation aérienne européenne. Celle-ci a permis de diminuer la
consommation de kérosène de 4,5% par passager, induisant automatiquement
une baisse des émissions par passager. L’objectif est maintenant d’atteindre -7%
dans les deux prochaines années.
•
La mise en place de l’écolabel tunisien45 dans les établissements hôteliers vise
également la réduction de la consommation d’énergie dans l’hôtellerie et au
respect de l’environnement. Pour l’instant peu répandu (lancement en mai 2009,
3 hôtels sont déjà labellisés), il est encore difficile de mesurer son impact. La FTH,
avec l’appui des administrations, promeut ce label auprès de ses adhérents et
relaie sa mise en œuvre.
Cette réflexion sur l’atténuation des émissions de GES, menée actuellement par la
Tunisie, s’inscrit dans une dynamique internationale. En vue de limiter le changement
climatique, une réglementation sur les émissions de GES se met en place. Encore
faiblement contraignante, celle-ci risque de le devenir dans les années à venir.
4.2 La conjoncture internationale : le futur de la
contrainte carbone
4.2.1 Des objectifs de réduction des émissions
Les objectifs initiaux de réduction des émissions
Le changement climatique est inévitable et la question est donc la limite de ce que
l’humanité peut accepter sans être excessivement mise en danger.
L’objectif de ne pas dépasser +2°C par rapport à l’ère pré industrielle a été fixé par
l’Union Européenne il y a quelques années, ce qui revient à ne pas aller au delà de
1,4°C par rapport à la situation actuelle eu égard aux hausses de températures déjà
enregistrées (International Scientific Steering Committee 2005). L’application du
principe de « responsabilités communes mais différenciées » entre les différentes
catégories de pays (développés, émergents, sous développés) formulé dans le rapport
Bruntland a d’abord conduit à fixer un objectif de réduction de 50% au niveau mondial
et de 75% des émissions pour un pays comme la France en 2050 par rapport à 1990.
Ce premier niveau d’objectif était fixé, vu l’état de la science d’alors (troisième rapport
du GIEC), en fonction d’informations sur les dommages qui pouvaient paraître plus
« anecdotiques que systématiques » (Parry, Palutikof et al. 2008). Les connaissances
actuelles sont plus précises.
Lancé en mai 2009 par le MEDD, l’écolabel est une norme environnementale plus exigeante que la
norme 14001. D’origine européenne, la Tunisie incite ses entrepreneurs, en particulier dans les domaines de
l’exportation, à s’y conformer afin de rester compétitifs auprès des marchés européens. Ce programme est
porté grâce à un cofinancement de la Commission européenne et grâce à l’assistance de la GTZ.
L’écolabel est décerné par l'Institut national de la normalisation et de la propriété intellectuelle(INNORPI).
45
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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L’évolution des objectifs internationaux de réduction des émissions
En fonction de l’état de la science, les objectifs et, à la suite, les positions des
gouvernements évoluent. La réévaluation de l’objectif de stabilisation auquel aboutit le
quatrième rapport du GIEC, revient à diminuer de 80% des émissions au niveau
mondial et ceci dès 2050, ce qui correspond à une stabilisation des émissions de GES
dans une fourchette de 400 à 470 ppm de CO2 équivalent contre les 450-550 ppm qui
étaient associés à une réduction de 50%.
A la conférence de Bali (décembre 2007), 200 gouvernements se sont alignés sur
l’objectif de 50%, alors que quelques uns dont l’Allemagne plaident pour un objectif
mondial de 80%.
Avec le niveau de l’objectif et la prise en compte de l’inertie, la date à laquelle les
émissions commencent à diminuer constitue un autre point crucial. Nous avons en effet
constaté à la conférence de Copenhague (décembre 2009), que l’engagement des
Etats n’est pas encore effectif. La modélisation des possibilités d’atteindre les +2°C en
2050 et de maintenir cette limite ultérieurement, montre que seul un plafonnement en
2015 (et non au-delà) associé à un taux moyen de réduction de 4 à 6% entre 2015 et
2050 permet d’atteindre l’objectif.
Des objectifs à décliner selon les pays et les secteurs d’activité ?
Si l’on entreprend maintenant de tirer les conclusions d’un taux moyen de réduction
des émissions de 80% pour les pays développés avec l’objectif de préserver des
marges de manœuvre pour les autres pays, comme cela avait été le cas dans le cadre
d’un objectif de 50%, c’est quasiment à une neutralité carbone (-100%) qu’il faudrait
arriver en 2050 pour un pays européen. On voit d’ailleurs commencer des exercices de
scénarisation sur ces bases tels que celui de l’Institut de Wuppertal pour le climat,
l’environnement et l’énergie sur l’ensemble géographique des Alpes, pour le compte
du gouvernement allemand et de la Convention Alpine.
Atteindre cet objectif nécessiterait un considérable effort pour les pays développés
émetteurs de flux touristiques, allégé par le recours à des mécanismes d’achat de
droits d’émissions ou des mécanismes de compensation (MDP) auprès des pays moins
développés.
Il est ensuite logique, à partir de l’objectif de niveau national, de fixer des sous-objectifs
pour chacun des secteurs de l’économie : production d’énergie, logement et
construction, transports, agriculture etc. Un certain nombre de travaux avaient été
menés en France pour examiner les possibilités d’atteindre le facteur 4, compatible
avec les objectifs envisagés naguère (Conseil Général des Ponts et Chaussées 2006; De
Boissieu 2006). Schématiquement ils concluaient à la possibilité d’envisager une
diminution par un facteur compris entre 2 et 3 ; l’atteinte d’un facteur 4 leur paraissant
impossible dans le cadre d’hypothèses réalistes. Si l’on peut aisément comprendre la
volonté de refuser des hypothèses technologiques futuristes, en revanche on peut
pousser, à une échéance de 2050, les hypothèses sur les changements de modes de
vie plus loin que ce qu’ils ont considéré. D’ailleurs, si l’on se fixe maintenant l’objectif
d’une neutralité carbone, ce seront bien les modes de vie qui serviront de variable
d’ajustement. Il ne faut donc pas se faire d’illusions : tous les secteurs économiques et
toutes les pratiques sociales (dont le tourisme) seront touchés et aucun ne pourra
s’exonérer d’un effort considérable. Face à la contrainte, les mécanismes de
compensation ou de souplesse (achat de permis d’émissions, MDP) ne pourront que
jouer à la marge, dans un contexte de concurrence exacerbée qui ne pourra que faire
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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monter les prix à un niveau qui n’aura rien à voir avec le prix actuel de la tonne de
carbone.
4.2.2 Les conséquences pour le secteur de l’aérien
4.2.2.1 Vers une régulation internationale des émissions de l’aérien
Actuellement les acteurs du secteur aérien sont très réticents à admettre les
perspectives décrites qu’ils jugent catastrophiques pour leur activité.
Les possibilités de réduire les émissions sont limitées du fait que les modes de propulsion
sont des technologies mures (Peeters, Middel et al. 2005) et qu’il n’existe pas de
perspectives de substitution du kérosène sérieuses et à la hauteur de la demande
(Akerman 2005).
L’aviation internationale (contrairement au transport aérien interne) n’a pas été prise en
compte dans le protocole de Kyoto. La question de l’attribution des émissions (à
l’origine, à la destination ou aux deux, ou au pays de la compagnie aérienne) ainsi que
la complexité du processus de remise en cause des innombrables accords bilatéraux
régissant le trafic ont été invoqués pour justifier cette exclusion. Néanmoins, certains
groupes de pays, dont l’Union Européenne, ont déjà décidé de mesures économiques
visant à réduire les émissions (permis négociables) dans la mesure de leurs possibilités
d’action au plan international.
Les développements pour l’avenir sont incertains et, à proximité du rendez-vous de
Copenhague, on peut s’attendre à des modifications des positions chez les acteurs.
La position des représentants de cette activité, après une attitude de déni, a évolué :
on compte maintenant sur les mécanismes de souplesse et de compensation pour
maintenir les perspectives de croissance (UNWTO 2009). Les compagnies aériennes
admettent le principe de leur inclusion dans le marché du carbone. Elles pourraient
donc acheter des droits d’émissions aux autres secteurs, accéder aux mécanismes de
compensation des émissions prévus au protocole de Kyoto (Mécanisme de
développement propre) et, sur la base du principe de « responsabilités communes mais
différenciées », voir appliquer aux liaisons des régimes différents (exemptions ou
mesures transitoires) si elles concernent des pays en voie de développement, voire
émergents. Elles escomptent que de tels mécanismes ne les empêcheraient pas de se
développer, vu la latitude qu’elles ont de transférer le coût au consommateur (élasticité
faible). En revanche elles sont fermement opposées à un système de quotas et à un
marché des droits internes à l’aviation (UNWTO 2009).
Une telle perspective n’est cependant pas réaliste car, bien que l’aviation ait, plus que
d’autres secteurs, la possibilité d’acheter des permis négociables et d’en répercuter le
coût sur les consommateur, des achats massifs priveraient les autres secteurs d’accès
aux mécanismes de souplesse, or nos sociétés ont également besoin de ciment,
d’acier , de se chauffer etc. (Godard 2006).
Une crise du transport aérien paraît donc inéluctable : même en tenant compte de
l’amélioration de l’efficacité énergétique (60% d’ici 2050 …) des vols, de la substitution
partielle du kérosène par des biocarburants (Ceron and Dubois 2006), de la mise en
œuvre de mécanismes de souplesse et de compensation (Ceron and Dubois 2008) ce
sont bien des perspectives catastrophiques qui attendent l’aviation.
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4.2.2.2 La sensibilité du transport aérien à la hausse du prix du carburant et à
l’instauration d’un prix du carbone
Le prix du baril était en 2002 de 25 USD, il est actuellement (septembre 2009) de l’ordre
de 65 USD, soit son prix de l’été 2005, et la moitié du pic de 2008. Le prix du baril de
kérosène suit celui du pétrole, tout en étant plus élevé (74 dollars pour la période de
mai à juillet 2009).
Le carburant pèse actuellement 30% dans les comptes de compagnies aériennes. On
estime qu’une augmentation de 10 USD se traduit par une augmentation de 2 points
de cette part (Source : Direction Générale de l’Aviation Civile, France).
Les compagnies aériennes avaient instauré des surtaxes carburant pour faire face à la
flambée des prix de 2007-2008. Certaines ne les ont pas supprimées et intégrées dans le
prix du billet. Par exemple Japan Air Lines, qui avait supprimé les surtaxes, vient de les
réintroduire à hauteur de 53 EUR par trajet, soit 106 EUR aller-retour pour les vols à
destination de l’Europe. Un tel vol aller-retour émet, selon le calculateur d’Air France,
1787 kg de CO2 ce qui, avec différentes hypothèses de coût de la tonne de CO2,
donne le tableau comparatif suivant.
Tableau 23 : Incidence du prix de la tonne de CO2
Vol Paris Tokyo AR
Surcharge carburant JAL
Septembre 2009
Prix t CO2 : 17 EUR/25 USD
Taxe carbone France
Prix t CO2 : 32 EUR/ 47USD
Niveau suggéré par l’UE
Prix t CO2 : 150 USD
Taxe carbone Suède47
Coût de 1787 kg Hausse équivalente sur un baril
de pétrole du prix du CO246
de CO2
106 USD
45 USD
10 USD
84 USD
18.7 USD
268 USD
60 USD
Source : TEC
On voit donc que, dans sa version la plus élevée, l’incidence de la valorisation de la
tonne de CO2 est équivalente à l’impact qu’aurait un retour aux prix du pic pétrolier
précédant la crise financière et économique. On notera également que le prix du
pétrole élevé, partiellement traduit en surcharges carburant, n’avait pas empêché en
2007-2008 le trafic aérien de progresser.
L’incidence serait naturellement moindre sur un vol Paris Tunis AR qui émet 325 kg de
CO2, de moins de 10 à près de 60 USD. Si on ajoute au prix de la tonne de carbone des
surcharges momentanées ou une hausse du prix du billet pour tenir compte de la
hausse du pétrole (dans la mesure où cela reste dans l’ordre de grandeur de ce qui
s’est fait en 2008), le tourisme au sud de la Méditerranée serait certes renchéri mais pas
radicalement menacé. Toutefois il faut faire remarquer :
•
que l’on ne sait pas à quel point le pétrole peut dépasser les niveaux de prix
atteints en 2008 ;
Calcul : 1t de pétrole émet 3t CO2 ; 1t de pétrole = en moyenne 7,6 barils. D’où 25 USD la tonne de CO2
conduit à +10 USD le baril
47 http://www.taxecarbone.info/taxation.html
46
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
que les prix du carbone évoqués plus haut ne sont pas suffisants pour réorienter le
fonctionnement de nos sociétés au point qui paraît nécessaire pour ne pas
dépasser une augmentation de température de 2°C.
On sait par ailleurs qu’il n’est pas besoin d’augmentations de coûts très importantes
pour mettre en danger la pérennité des entreprises. Et cela est sans doute plus vrai pour
le transport aérien que pour les activités du réceptif qui seraient sans doute plus
sensibles à un fléchissement de la fréquentation. La santé des compagnies aériennes
ne passe pas pour être florissante (en moyenne) et la crise finit par toucher celles qui
ont le mieux résisté. Dans un contexte d’augmentation des carburants, les compagnies
low cost seraient sans doute plus rudement touchées : même si elles possèdent des
flottes d’appareils récents et avec de bonnes performances énergétiques, cela
n’efface pas le fait que le carburant pèse plus dans leur équilibre financier que pour les
compagnies classiques ; à plus ou moins long terme leur schéma de fonctionnement
devrait se modifier.
4.2.3 Une préparation à l’adaptation au changement climatique est
incontournable
Face à une telle exigence, il est clair qu’aucun secteur d’activité et aucun pays ne sera
à l’abri d’efforts considérables : on peut considérer que l’hypothèse selon laquelle le
tourisme pourrait bénéficier d’un traitement de faveur devient de plus en plus fragile au
fil des avancées de la science. La question de savoir comment et à quel prix les
touristes internationaux se rendront en Tunisie est donc posée, et clairement à
l’échéance envisagée par l’étude. Nous pensons d’ailleurs que c’est à la fois la
condition sine qua non du maintien de l’activité touristique (du moins pour le tourisme
international) et le problème qui semble le plus difficile à résoudre (on peut toujours
reculer face à l’avancée de la mer, gérer les fortes chaleurs dans l’hébergement, etc.).
L’analyse qui vient d’être développée est de nature sectorielle et fait la part belle aux
logiques des pays dont les touristes sont originaires. Si l’on admet que la contrainte
carbone doit modifier fortement nos modes de vie et qu’à tous les niveaux, du pays à
l’individu en passant par les organisations, tous devront être à terme comptables de
leurs émissions, faire des choix sera inéluctable. Au niveau des pays du sud de la
Méditerranée, il est ainsi clair qu’en dépit d’un traitement plus favorable qu’au nord, les
émissions seront limitées et il faudra réfléchir aux meilleures façons d’utiliser le budget
carbone. Le tourisme ne disposera évidemment pas d’un budget illimité car iI faut bien
également se nourrir, se loger, se déplacer pour d’autres motifs. En matière de
tourisme, préférera-t-on utiliser le carbone pour favoriser l’accueil des étrangers, pour
permettre aux Tunisiens de voyager (tourisme interne ou à l’étranger), pour faciliter le
retour des émigrés pour les vacances, et dans quelles proportions ? En matière
d’aviation, sacrifiera-t-on le fret, en plein essor, au tourisme ?
Ceci montre à quel point le tourisme tunisien est sensible à la conjoncture
internationale et aux politiques globales d’atténuation des émissions à venir.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
4.3 Les impacts indirects des politiques d’atténuation
sur le tourisme tunisien
Les impacts décrits dans le chapitre précédent, qui sont essentiellement des impacts
physiques du changement climatique sur l’activité touristique et ses ressources, ne
devraient pas induire d’impacts sur la demande touristique globale (i.e. mondiale) mais
plutôt sur une redistribution de cette demande, en termes spatial et temporel ainsi
qu’une évolution des pratiques. Cependant, il faut maintenant prendre en compte une
autre catégorie d’impacts qui pourraient cette fois toucher non seulement la
répartition mais également les volumes de flux touristiques et affecter le niveau global
de la demande.
Parmi les impacts indirects du changement climatique, le plus important nous semble
celui de la conjoncture internationale sur les politiques de réduction des émissions que
nous venons de décrire. Il est fort probable qu’il affecte les mobilités touristiques à
travers le coût du voyage d’une part et la conscience environnementale des touristes
d’autre part. Sont particulièrement en jeu ici la longue distance et la desserte aérienne.
4.3.1 Le transport aérien
Un tourisme « tout aérien »
Le tourisme tunisien repose aujourd’hui majoritairement sur le transport aérien. Plus de
60% des arrivées de touristes se font par voie aérienne et 35% par voie terrestre.
Néanmoins, il y a lieu d'affiner des résultats. La voie aérienne représente en effet plus
de 95% pour les entrées des européens ; la voie terrestre représente 93% des entrées
des visiteurs de proximité (Algérie et Libye notamment).
Le tourisme tunisien se développe encore aujourd’hui sur le principe « 1 touriste = 1 lit
d’hôtel = 1 siège d’avion ». Le développement du transport aérien a donc été pour
beaucoup dans l’essor de la destination Tunisie. C’est surtout un trafic de vols affrétés
non réguliers (charters) qui s’est développé.
La desserte aérienne est privilégiée dans toutes les régions touristiques avec un
maillage total du pays. La Tunisie compte 8 aéroports internationaux dont 5, ceux de
Tunis Carthage, Monastir, Djerba, Tozeur et Tabarka assurent actuellement des vols
internationaux charters pour le tourisme. Un 9ème aéroport est en cours de construction
à Enfidha, situé à proximité des principales régions touristiques, et son ouverture est
prévue fin 2009. Cette nouvelle infrastructure est dotée d’une capacité initiale de 5
millions de voyageurs avec des extensions successives prévues qui lui permettront
d’atteindre une capacité de 22 millions de voyageurs en 2020. Cet aéroport doit
devenir un hub pour le continent africain.
Par ailleurs, le trafic aérien est majoritairement dédié au tourisme. En 2007, le trafic de
touristes a représenté plus de 95% du trafic passagers total (sauf dans les aéroports de
Gafsa, où le trafic de résidents représente 95% du trafic total, et de Sfax, où il
représente 69%). A Monastir, le trafic des résidents est de 33%, à Djerba de 7%, à Tunis
de 5,5%. Monastir est le 1er aéroport charter d'Afrique.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Des perspectives de croissance du trafic
Aujourd’hui, le ciel tunisien n’est pas encore totalement ouvert. Sur le marché français,
Tunisair détient 58% du trafic régulier, Air France et Transavia, sa filiale, 40,5%. Le trafic
charter est détenu à 75% par les compagnies tunisiennes.
Cependant, l’Open Sky (libéralisation des routes aériennes) est en route. Le système est
déjà opérationnel avec le Maroc et la Libye, dont les touristes arrivaient jusqu’ici surtout
en voiture. D'ici 2010, un accord ciel ouvert avec Bruxelles devrait être signé. La Tunisie
s’apprête ainsi à rejoindre le Maroc qui a ouvert son ciel en 2006, par la signature avec
l’Union européenne d’un accord de libéralisation du transport aérien, ce qui lui a
permis d’augmenter son trafic aérien de 18 %. L'OMT48 attribue les bonnes
performances du Maroc à la libéralisation du ciel marocain. Le choix de la Tunisie
d’arrimer ses airs à l’espace européen n’est pas fortuit puisque la majeure partie de son
trafic, à peu près 80 %, se fait avec les capitales et les principales métropoles
européennes.
Enfin, l’arrivée du trafic low-cost, potentiellement menaçant pour les compagnies
tunisiennes, s’organise. La compagnie Tunisair devient le groupe Tunisair et les autres
compagnies passent également des alliances et se restructurent (Karthago Airlines et
Nouvelle Air sont en partenariat stratégique par exemple).
Actuellement, le trafic aérien est encore dans une phase de croissance, avec des prix
de plus en plus attractifs.
Go Voyages, le spécialiste des vols secs a analysé l’évolution des tarifs aériens au cours du
premier semestre 2008 par rapport à 2007. Les prix "tous frais compris" (billet + taxes d'aéroport
+ surcharges carburant + frais de dossier) ont diminué sur son top 10 des destinations, dont :
− -9,7% sur le Maroc,
− -9,1% sur l'Espagne,
− -9,5% sur la France,
− -14,5% sur la Tunisie.
Menace ou opportunité ?
La politique du tout aérien est donc en train de se développer en Tunisie. Les
perspectives internationales de réduction des émissions de GES pourraient donc
constituer une véritable menace pour ce tourisme tunisien devenu très dépendant. En
effet, l’intégration du secteur aérien dans le marché du carbone, et donc sa
comptabilisation dans les inventaires nationaux, risque d’entraîner des limitations sur les
modes de consommation des pays du Nord. A moyen terme, une baisse de la mobilité
est à prévoir, avec dans un premier temps une hausse des coûts du transport, et dans
un second temps une réduction du volume de vols.
Mais il faut envisager cette situation dans le cadre de la concurrence internationale. En
effet, la Tunisie (comme les autres destinations méditerranéennes) est finalement
proches de ses principaux marchés émetteurs en comparaison de l’Asie du Sud-Est ou
de la Caraïbe. Ce qui pourrait finalement constituer un atout relatif dans une
perspective de réduction du trafic aérien. On pourrait imaginer un report des clientèles
des caraïbes, de l’ile Maurice et autres destinations exotiques vers le sud de la
Méditerranée. A contrario, un produit balnéaire, sans plus de spécificités, pourrait être
boudé pour des destinations locales : on pense au Nord de la Méditerranée qui aura
48
Organisation Mondiale du Tourisme.
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alors également bénéficié d’une amélioration de ses conditions climatiques et qui sera
accessible par le train par exemple.
C’est pourquoi, la tendance actuelle et les investissements lourds réalisés récemment,
ne laissent que peu de place à la réflexion sur le développement d’alternatives à
l’aérien, peut constituer une vulnérabilité en cas de diminution de la mobilité aérienne.
La voie maritime quant à elle ne représente pratiquement rien dans les arrivées aux
frontières. 43% des entrées sont le fait des marchés français et italiens ce, généralement
en provenance de Marseille ou Gènes. Parmi eux, on retrouve surtout des Algériens qui
résident en Europe arrivent par voie maritime de Marseille, soit pour retrouver leur
famille vivant en Algérie et venant passer leurs vacances en Tunisie, soit pour rejoindre
l’Algérie avec des tarifs beaucoup plus attractifs. De plus, les émissions du trajet
maritime, moins bien étudiées que celles de l’aviation, paraissent toutefois importantes,
au point que ‘on peut se demander si la voie maritime constitue vraiment une
alternative intéressante à l’avion en l’état actuel des technologies (Becken 2002;
Peeters, van Egmond et al. 2004).
Jusque-là, la très forte dépendance du tourisme tunisien aux tour-opérateurs européens
et aux forfaits a limité les possibilités de développer le tourisme individuel et des produits
alternatifs, les touristes étant massivement acheminés par des vols charters avec, à
l’arrivé, des produits forfaitisés. L’ouverture du ciel tunisien constitue donc une
opportunité pour le renforcement du secteur touristique et son enrichissement. Le
développement de liaisons low-cost devrait encourager les séjours individuels.
Cependant, il est important de noter que cette stratégie relève d’une vision courtterme et risque de ne pas perdurer, l’introduction du transport aérien dans le système
de permis de carbone comportant des risques particulièrement importants pour le
secteur low-cost. La remarque précédente, sur le développement de moyens de
transport alternatifs en est donc renforcée.
4.3.2 Les transports internes
Comme pour les sujets précédents, transports aériens et hébergements touristiques, les
transports touristiques internes aux destinations pourraient être affectés par les
conséquences du changement climatique (régulation internationales et conscience
environnementale) ainsi que par la hausse du prix du pétrole. Les impacts et les enjeux
semblent cependant moindres que pour le transport aérien.
En Tunisie, zones touristiques sont aujourd’hui correctement desservies. Les stations
internationales sont quasi exclusivement desservies par autocar depuis les aéroports,
avec des infrastructures routières adaptées.
Le réseau autoroutier, enjeu vital pour l’économie de tout le pays, est en cours de
développement passant de 50 km d’autoroutes en 1986 à 360 km à fin 2007.Le
développement de l’autoroute du Maghreb, reliant la Lybie, la Tunisie, l’Algérie et le
Maroc, est en cours, visant la desserte pour le tourisme régional. Là encore, ce sont
surtout les stations touristiques qui sont concernées.
Le réseau routier intérieur, en dehors de ces zones, est considéré comme faible (tant en
qualité qu’en termes de maillage). Il constitue aujourd’hui un frein au développement
du tourisme dans les régions intérieures et les différents points d’intérêt touristiques pour
l’écotourisme, la randonnée ou le tourisme culturel (hors principaux sites) ne sont pas
ou peu desservis.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Les limites de cette desserte routière pour le tourisme résident aussi dans :
• la qualité des autocars qui devront rapidement faire face à des normes plus
contraignantes en termes d’émissions de CO2, induisant potentiellement des coûts
important pour les sociétés de transport tunisiennes ;
•
le coût des voitures de location pour ce qui concerne le tourisme individuel. Une
voiture de location type A coûte 43% plus cher en Tunisie qu'à Chypre.
Le réseau ferroviaire n’est pas très développé et pas utilisé pour la desserte touristique.
On constate donc que les déplacements internes en Tunisie constituent un point faible
face au défi du changement climatique car, en l’état actuel, ils ne permettent pas
d’attirer des touristes « non aériens » et de développer des produits touristiques
alternatifs dans les régions intérieures.
4.3.3 La consommation d’énergie des hébergements touristiques
Pour le secteur touristique, les politiques internationales sur les émissions de gaz à effet
de serre devraient affecter prioritairement le transport aérien. Cependant,
l’hébergement touristique compte aussi pour environ 20% des émissions de GES du
tourisme49 et ce secteur ne sera pas épargné par les politiques d’atténuation. Il faudra
prendre en compte également la hausse du prix de l’énergie. Au final, c’est sans doute
au niveau national que devraient se mettre en place des politiques de plus en plus
contraignantes d’économies d’énergie et d’efficacité énergétique.
Par ailleurs, les clientèles touristiques sont à la fois de plus en plus consciente des enjeux
environnementaux et de plus en plus informées. Leurs exigences devraient croître pour
une utilisation plus rationnelle des ressources et, en particulier, de l’énergie et de l’eau.
Au final, pour les hébergements touristiques, les conséquences de ces évolutions vont
concerner la maîtrise des consommations d’eau et d’énergie, tant à travers des
investissements (mesures technique) qu’avec une évolution des pratiques et une
sensibilisation des clients (mesures comportementales). Or cette problématique est
souvent déjà prise en compte avec le mouvement général vers une gestion plus
environnementale des établissements, d’autant plus que ces pistes d’amélioration vont
aussi dans le sens d’une maîtrise des coûts de production.
Aujourd’hui en Tunisie, la prise de conscience sur cette question est assez généralisée.
Comme on l’a vu (chapitre 2), des mesures sont déjà en place aujourd’hui pour
accompagner les professionnels dans leurs efforts. Elles concernent en particulier la
politique d’efficacité énergétique qui accompagne les professionnels dans leur
engagement, ainsi que l’écolabel, récemment mis en place. Ce dernier outil doit
permettre d’encourager les hôtelier à prendre en compte les contraintes
environnementales (et notamment énergétiques) en valorisant cet engagement
auprès des clientèles.
49
Au niveau mondial… la situation en Tunisie n’a pas fait l’objet d’une évaluation précise.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
4.4 Les impacts généraux du changement
climatique sur les sociétés
Le changement climatique peut entraîner des risques pour l’économie et la stabilité
politique, comme l’ont montré le rapport Stern ou les travaux du GIEC. Le rapport Stern
a par exemple montré que si 1°C de plus en moyenne pourrait bénéficier à l’économie
mondiale, un changement climatique non contrôlé pourrait diminuer le revenu par tête
de 20% d’ici à la fin du siècle. Dans ce contexte, le budget « vacances » des ménages
risque évidemment de souffrir et la demande de globalement diminuer.
Pour la Tunisie comme pour toute autre destination, cet impact est le plus difficile à
évaluer. Les connaissances et les projections manquent pour affiner cet exercice. Par
ailleurs, on insiste fréquemment sur la perspective que le changement climatique nuise
plus aux pays du sud qu’à ceux du nord et à l’intérieur des premiers aux couches
défavorisées de la société avec des conséquences en termes de sécurité et de
stabilité politique : c’est d’ailleurs cette considération qui explique l’attribution du Prix
Nobel de la paix au GIEC.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
5 Expériences internationales sur la
vulnérabilité et l’adaptation du secteur
touristique
Ce chapitre propose un tour d’horizon des expériences internationales en lien avec
l’adaptation du tourisme au changement climatique.
La première partie montre sous quels angles ce thème est abordé dans les travaux
internationaux. La seconde partie décrit les expériences concrètes menées par
différentes destinations touristiques.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
5.1 L’adaptation, quelle approche internationale ?
Dans la littérature sur le changement climatique, il est devenu un lieu commun de dire
que la limitation des émissions de gaz à effet de serre sur laquelle l’intérêt des
chercheurs et des politiques s’était d’abord focalisé, ne suffit pas à éviter le
changement et donc que le recours à l’adaptation sera nécessaire.
Les impacts du changement climatique sur le secteur du tourisme ont fait l’objet
d’études internationales et ont donné lieu à de nombreuses publications (voir
bibliographie). La question de l’adaptation en revanche, est encore peu traitée. En
Méditerranée notamment, les travaux sur l’adaptation du tourisme sont encore aux
mains des chercheurs et les destinations ne se sont pas encore emparées du sujet. Au
niveau international, les territoires les plus avancés sur cette question sont les plus
vulnérables : les petites îles.
D’une façon générale, les expériences aujourd’hui répertoriées sur la question de
l’adaptation au changement climatique concernent surtout les écosystèmes et
l’agriculture.
En ce qui concerne le tourisme (mais sans doute est-ce le cas pour d’autres activités), à
la lecture de la littérature, la notion d’adaptation paraît recouvrir des actions de nature
très différente et qui peuvent être considérées comme des adaptations réussies ou non
selon le point de vue. En ce qui concerne une station de sports d’hiver de moyenne
altitude touchée par un manque de neige, les touristes s’adapteront en allant ailleurs ;
la station elle ne se sera pas adaptée : ainsi un acteur peut s’adapter alors que le
système s’écroule.
Pour y voir plus clair on peut d’abord rappeler la définition de l’adaptation fournie par
Suzanne Becken et John Hay dans leur livre « Tourism and climate change». (Becken
and Hay 2007 p. 223). « L’adaptation peut être définie comme l’ensemble des actions
et activités que les individus entreprennent, individuellement ou collectivement, pour
traiter, s’accommoder ou bénéficier des effets du changement climatique, y compris
les changements dans la variabilité du climat et les phénomènes extrêmes (allant au
delà de la variabilité naturelle du climat global) ». On notera que cette approche
traduit une vision plus centrée sur les acteurs que sur l’état du système. Il est donc assez
logique que les typologies des formes d’adaptation soient-elles aussi centrées sur les
acteurs. La littérature distingue ainsi (Ceron and Scott 2007; Scott, Amelung et al. 2007;
Wilbanks, Romero Lankao et al. 2007) différents types d’adaptation :
− technique (neige artificielle, etc.) ;
− gestionnaire (assurance) ;
− par les politiques publiques ;
− par la recherche ;
− par l’éducation ;
− comportementale (compensation des émissions de gaz à effet de serre etc.).
Ce genre de typologie permet de mettre en lumière les inclinations des acteurs à
recourir à certains types d’adaptation plutôt qu’à d’autres. Par exemple les
gestionnaires de stations de sports d’hiver ou les acteurs du transport aérien
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
(voyagistes, compagnies aériennes) tenteront d’abord d’optimiser leur gestion
(remplissage maximum des avions pour des compagnies aériennes, achat d’avions
neufs) et de recourir à des adaptations techniques (amélioration de l’efficacité
énergétique des avions, recours à la neige artificielle etc.). En revanche l’appel à des
modifications comportementales leur sera plus étranger (désir de ne pas contrarier le
client en lui imposant des contraintes), surtout bien entendu si cela remet en cause leur
activité même (prendre des vacances plus près de chez soi en évitant le recours aux
transports aériens par exemple). La littérature différencie les capacités d’adaptation
selon les lieux, les acteurs et les contextes.
On peut ainsi mettre en évidence des oppositions entre les acteurs et les contextes
dont la capacité d’adaptation est forte ou faible (Becken and Hay 2007; Scott,
Amelung et al. 2007; Wilbanks, Romero Lankao et al. 2007). On opposera ainsi :
•
les touristes et les organisateurs de voyages dont la capacité d’adaptation est
forte (les premiers peuvent se rendre dans d’autres destinations, les seconds ne
possèdent pas les installations et négocient avec une offre excédentaire) et les
acteurs du réceptif (hôteliers etc.) dont la capacité d’adaptation est plus faible :
ils sont liés à des lieux et leur offre est excédentaire .
•
les acteurs de grande taille, en particulier d’envergure multinationale, plus
adaptés à une planification stratégique et à long terme, aux PME.
•
Les destinations du Nord, à proximité des marchés émetteurs, moins vulnérables à
une hausse des coûts du voyage, disposant de capacités financières supérieures
à celles du Sud.
•
Les touristes riches aux touristes pauvres.
Les approches de ce type concernent en fait des potentialités d’adaptation, elles ont
avant tout un statut d’hypothèses , certes raisonnées et raisonnables, mais qui dans la
plupart des cas n’ont pas fait l’objet d’une véritable vérification sur le terrain, parce
que le changement climatique commence à peine à faire sentir ses effets (qui sont
d’ailleurs difficiles à discerner de ceux reliés à la variabilité naturelle du climat : exemple
des chutes de neige), et que les mesures d’adaptation existantes réellement
déclenchées par le changement climatique sont bien peu nombreuses, à la mesure
d’une prise de conscience qui, elle, étudiée sur le terrain est aussi faible que les
capacités d’anticipation des acteurs (Becken 2005).
Comme le réseau d’organisations gouvernementale et intergouvernementale, les
chercheurs etc. sont toutefois incités ou pratiquement sommés, pour être en phase
avec les codes et conventions des scènes scientifiques traitant du changement
climatique, de produire un discours sur l’adaptation du tourisme au changement
climatique, cela a les conséquences suivantes.
Dans le domaine de l’environnement, le discours semi opérationnel (c’est à dire
l’élaboration de conseils à destination des bureaucraties publiques locales et des
responsables de projets) des cercles onusiens articule classiquement :
•
une liste de principes, un pense bête de ce qui est à prendre en compte et une
liste type d’actions à mener (dont le lecteur sélectionnera celles qui sont
pertinentes pour le terrain qui le concerne) ;
•
une liste d’expériences exemplaires et de bonnes pratiques ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
142/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
des méthodologies « générales » de mise en œuvre ;
•
des suggestions d’évaluation (basées en particulier sur l’usage d’indicateurs).
Les discours actuels sur l’adaptation du tourisme au changement climatique s’inscrivent
dans ce cadre en se limitant toutefois aux deux premiers items, les deux derniers
n’ayant guère de sens vu l’absence d’actions déjà mentionnée.
En raison de la faiblesse des expériences réellement pertinentes en matière
d’adaptation du tourisme au changement climatique, les auteurs sont conduits à
puiser dans et à adapter les matériaux mis au point dans des domaines contigus
(démarches généralistes d’adaptation au changement climatique, gestion du risque,
démarches de développement durable) en les traduisant de manière aussi pertinente
que possible dans le domaine du tourisme.
5.2 Les principales expériences internationales
Un premier exemple est fourni par la citation dans l’étude de OMT (Scott, Amelung et
al. 2007) (chapitre 3 page 30) du cadre élaboré par la Banque Asiatique de
Développement pour aider à la mise en place des politiques d’adaptation dans les
pays en développement, au motif que si ces mesures ne sont pas spécifiquement
conçues pour le tourisme elles n’en sont pas moins pertinentes.
Dans le même ordre d’idées Suzanne Becken fournit page 230 de son livre un encadré
sur l’adaptation pour le tourisme côtier (Becken and Hay 2007). Les items sont les
suivants :
•
accroissement de la robustesse des infrastructures du tourisme et d’autres
investissements à long terme, par exemple en étendant la plage des facteurs
climatiques qu’un système peut supporter sans défaillir (par exemple coups de
vent extrêmes) et/ou en renforçant la tolérance du système par rapport aux
pertes ou aux défaillances (par exemple en augmentant les réserves financières
ou l’assurance) ;
•
accroissement
touristique… ;
•
renforcement des capacités d’adaptation des systèmes naturels vulnérables sur
lesquels le tourisme se fonde, par exemple en réduisant les stress non climatiques
(ex : en diminuant la production de déchets) ou en éliminant les barrières aux
migrations (par exemple en s’abstenant de construire des routes le long des forets
de mangroves côtières) ;
•
lutte contre les tendances à la maladaptation : par exemple pour les zones
vulnérables à des inondations répétées, interdiction de la reconstruction après un
événement majeur ;
•
amélioration de la conscience et de la préparation des populations, par exemple
en informant les opérateurs touristiques sur les risques et les conséquences
possibles du changement climatique et/ou en s’assurant que tous les opérateurs
touristiques ont des plans pour répondre aux évènements catastrophiques ainsi
que des systèmes d’alerte.
de
la
flexibilité
des
composants
vulnérables
du
système
On peut également citer dans le même ouvrage (Becken and Hay 2007) (p. 244-245)
un recensement du portefeuille des adaptations au changement climatique pour les
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
gestionnaires d’espaces protégés, aux motifs que ceux-ci sont le support d’activités
touristiques.
Les travaux récents de synthèse évoquant l’adaptation du tourisme au changement
climatique (Becken and Hay 2007; Scott, Amelung et al. 2007) font état de stratégies
d’adaptation localisées (îles Fidji, île Maurice, Canada etc.) ; les auteurs tirent alors des
conclusions, pour le tourisme, d’études portant sur l’adaptation aux différentes sortes
d’impact du changement climatique, dont la typologie a été fournie plus haut
(impacts directs, indirects sur les ressources environnementales du tourisme….).
On note ainsi par exemple :
•
concernant les impacts directs du changement climatique : une étude sur
l’adaptation aux évènements climatiques extrêmes dans les îles Fidji (Scott,
Amelung et al. 2007) (p. 48), mentionnant des modifications des normes de
constructions et des règlements d’urbanisme.
Expérience internationale
Dans les îles Fidji, pour se prémunir des dommages causés par les cyclones et la montée du
niveau de la mer, les hôtels sont maintenant construits au moins à 2,6 m au dessus du niveau de
la mer et à 30 m en retrait du niveau atteint par les plus grandes marées. Les normes de
construction sont en cours de révision. Chaque resort (au moins les plus grands) a un plan
d’évacuation, des assurances, des formations spéciales pour le personnel, des stocks d’eau et
de nourriture, des kits de secours et une ligne directe avec les services météo. L’ensemble de
ces mesures a été mis en place en coopération entre différentes administrations et les
professionnels du tourisme.
•
En ce qui concerne l’adaptation aux impacts indirects du changement
climatique, en particulier sur les ressources environnementales du tourisme, on
peut citer :
− un travail sur l’île Maurice (Scott, Amelung et al. 2007) (p. 38) où les coraux
sont menacés par l’augmentation du nombre et de la violence des cyclones ;
les mesures d’adaptation proposées ne sont pas spécifiques au tourisme et
relèvent essentiellement de la gestion intégrée des zones côtières.
− Deux études sur la Thaïlande et sur l’île de Majorque (Scott, Amelung et al.
2007) (p. 50) focalisées sur le manque de ressources en eau douce mais
proposant des mesures d’adaptation qui n’ont rien de spécifique au tourisme,
les spécificités de celui-ci en matière de consommation d’eau n’étant
d’ailleurs pas mentionnées alors que c’est le cas pour une autre étude
concernant l’île de Tobago (Scott, Amelung et al. 2007) (p. 51).
Expérience internationale
A Majorque (Espagne), pour anticiper les pénuries d’eau, le gouvernement espagnol a
implanté deux grandes unités de dessalement d’eau de mer ainsi que des conduites d’eau
supplémentaires en provenance des la région montagneuse du nord.
A Tobago, ce sont les professionnels eux-mêmes, parfois aidés par les tour-operators, qui ont mis
en œuvre des mesures individuelles pour prévenir les pénuries d’eau : récupération des eaux
de pluie, augmentation des capacités des réservoirs, alimentation des toilettes par l’eau de
mer… Ils ont également mis en place des actions de sensibilisation pour les employés et pour
les touristes, fait évoluer les concepts d’aménagement paysager et limité l’usage des piscines.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
− Sont également citées dans ce travail de synthèse trois études concernant le
Canada qui montrent bien que selon les cas la spécificité du tourisme et la
pertinence d’adaptations dirigées spécifiquement à son encontre peuvent
varier (Scott, Amelung et al. 2007) (p. 46).
Expérience internationale
Au Canada, un festival d’hiver est confronté à des températures plus élevées et à un manque
de neige. Sont envisagés pour faire face à ces évolutions :
− de déplacer les attractions et la programmation, des lacs gelés vers des localisations
sur la terre ferme ;
− une utilisation de camions réfrigérés pour le concours de sculpture sur glace ;
− l’expansion de la longueur du festival de 10 jours à 3 semaines pour profiter d’une
probabilité plus grande d’un temps convenable ;
− l’utilisation de la neige artificielle ;
− le remodelage du tracé de ski de fond en le situant dans des zones à l’ombre ;
− une contractualisation avec les musées locaux pour mettre au point des produits
comprenant des attractions ne nécessitant pas de neige.
On voit sur cet exemple que la dimension touristique est relativement importante, ce
qui n’est pas vraiment le cas pour les deux manifestations qui suivent :
•
le festival des tulipes où il s’agit de prendre en compte la modification des dates
de floraison en raison d’hivers plus doux : plantation dans des zones d’ombre, etc.
•
la fête nationale (juillet) où il s’agit de s’adapter à des températures plus chaudes
(éducation du public, mise en place de tentes pour fournir de l’ombre, sécurité
médicale, etc.)
Aujourd’hui, les petites îles, territoires particulièrement vulnérables, notamment Fidji et
les Maldives, font figure de territoires pilotes au niveau international pour l’élaboration
de stratégies globales d’adaptation du secteur touristique. Des travaux sont en cours
pour mettre en place de telles stratégies avec l’aide de plusieurs institutions
internationales (PNUE, OMT, FEM…). Il est certains que ces destinations cumulent des
facteurs de vulnérabilité extrême (zones de cyclones, dépendance quasi-totale au
tourisme et à la desserte aérienne, éloignement des marchés émetteurs, faible altitude)
qui rendent la menace du changement climatique d’autant plus préoccupante. A
travers les cas présentés, on constate que l’adaptation est aujourd’hui traitée à
différents niveaux, selon le degré d’urgence des problèmes et les possibilités
d’adaptation.
Tourisme et adaptation en France
La France a élaboré une stratégie nationale d’adaptation au changement climatique
en 2006, qui établi surtout des principes directeurs pour aborder cette question et des
recommandations aux territoires pour mettre en œuvre des déclinaisons locales plus
opérationnelles. C’est l’Observatoire national sur les effets du réchauffement
climatique (ONERC) qui porte ces travaux. En 2009, un groupe de travail s’est penché
sur les coûts de l’adaptation et leurs travaux sont toujours en cours.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Toutes ces réflexions sont multisectorielles et transversales et n’abordent pas
spécifiquement la question du tourisme. Une seule étude a été menée sur le sujet : une
étude exploratoire « adaptation au changement climatique et développement
durable du tourisme », menée par le cabinet TEC en 2006 pour la Direction du Tourisme.
Cette étude présente un état des lieux des relations entre le tourisme et le changement
climatique, envisagées sous l’angle des impacts du second sur le premier, afin de
dégager des orientations en vue d’un éventuel programme de recherche de la
Direction du Tourisme. Nous n’avons pas connaissance, aujourd’hui, d’expériences
locales concernant le secteur touristique.
Tourisme et adaptation en Méditerranée
En Méditerranée, on ne recense pas encore de stratégies nationales d’adaptation du
secteur touristique. Des études et des travaux assez détaillés existent sur les
vulnérabilités, et la question de l’adaptation est à l’ordre du jour des chercheurs et des
institutions internationales (Plan Bleu et Programme des Nations Unies pour
l’Environnement notamment).
Cependant, il est important de noter que c’est à Djerba que l’utilisation de la notion
d’éco-efficacité dans le domaine du tourisme et de ses émissions de gaz à effet de
serre trouve sa source, lors de la première Conférence mondiale sur le tourisme et le
changement climatique organisée par l’OMT en 2003. Le choix de ce lieu n’est pas
anodin. En 1979 déjà, Miossec et Paskoff établissaient un lien entre l’évolution des
plages et les aménagements touristiques à Djerba50. Par la suite, Djerba a également
fait l’objet de plusieurs études, notamment sur des questions d’élévation du niveau de
la mer, son cas en méditerranée s’étant révélé préoccupant de manière très précoce.
La Tunisie se trouve donc à l’avant-garde sur les questions particulières de l’élévation
du niveau de la mer et de la gestion des infrastructures touristiques. Si le cas particulier
des îles a été l’objet de plusieurs études sur les questions d’érosion et de recul du trait
de côte, ces études ne sont pas spécifiquement reliées aux problématiques du
tourisme ni aux impacts plus généraux du changement climatique. La Tunisie fait
aujourd’hui figure de précurseur sur l’adaptation du secteur touristique au changement
climatique.
Miossec, J.-M., Paskoff, R. (1979). "Évolution des plages et aménagements touristiques à Jerba (Tunisie) : le
cas du littoral nord-est de l’île", Méditerranée, 1-2, 99-106.
50
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
6 Synthèse : vulnérabilité, impacts potentiels et
impératif d’adaptation du secteur touristique
au changement climatique
Ce chapitre conclusif vise à tirer les principaux enseignements de cette première phase
d’étude.
Une première partie rappelle en synthèse la vulnérabilité du tourisme tunisien face au
changement climatique et les principaux impacts potentiels à envisager.
Une seconde partie permet de sonder l’état de sensibilisation de la profession
touristique en Tunisie, sur la base des entretiens menés lors de cette première phase.
Une troisième partie introduit la suite des travaux en exposant les raisons qui rendent
l’adaptation au changement climatique nécessaires.
Enfin, la dernière partie propose une analyse SWOT du tourisme tunisien dans un
contexte de changement climatique afin d’identifier les priorités d’adaptation du
secteur et de poser les bases des axes stratégiques qui devront être définis dans la
phase suivante de cette étude.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
6.1 Vulnérabilité et impacts potentiels : synthèse
6.1.1 Les caractéristiques du tourisme tunisien
En 2007, 6,7 millions de touristes étrangers ont visité la Tunisie, soit 3,2 % de plus par
rapport à 2006, engendrant 37,4 millions de nuitées. Le nombre de touristes en Tunisie
représente 2,5 % du flux touristiques des destinations méditerranéennes. Ce secteur joue
un rôle majeur dans l’économie tunisienne puisque ses recettes couvrent 60 % du
déficit de la balance commerciale et qu’il emploie 12 % de la population active du
pays. En 2008, il représentait environ 7% du PIB.
Un tourisme dépendant du climat estival et des évolutions du littoral
En réaction à la création d’un nombre de lits bien supérieure à la programmation
établie au début des années 1960, le gouvernement tunisien a mis en place, dans les
années 1970, une stratégie de développement touristique essentiellement balnéaire.
Au début des années 1990, la stratégie gouvernementale s’est orientée vers l’ouverture
de l’activité touristique à d’autres types de tourisme afin de passer d’une offre
quantitative à une offre plus qualitative (golf, casinos, thalasso mais aussi tourisme
saharien, culturel…). La mise en œuvre de cette vision a cependant pris du retard. La
volonté de changement semble s’affirmer actuellement pour aller vers un équilibre
entre les différentes régions (littorales et intérieures) et donc vers une diversification du
produit touristique tunisien. Si l’évolution des mentalités, tant des développeurs que des
touristes, demande du temps, le poids de l’image balnéaire du tourisme tunisien
contraint encore les démarches d’ouverture. Par ailleurs, cette dépendance au
balnéaire signifie une sensibilité particulière du tourisme tunisien au climat estival d’une
part, et à la montée du niveau de la mer et à l’érosion côtière d’autre part.
Et largement lié à l’accessibilité par le transport aérien
La relation du tourisme avec le secteur des transports nous paraît particulièrement
déterminante. Il a été amplement démontré que le transport de l’origine à la
destination est responsable de l’ordre de 75% de la contribution du tourisme au
réchauffement climatique. Des calculs spécifiques à la Tunisie montreraient sans aucun
doute une contribution plus forte en raison de la part de l’avion dans l’arrivée des
touristes internationaux, même si ces derniers en l’occurrence viennent de pays
européens qui ne sont pas si éloignés. On sait également que le transport est non
seulement le noyau dur de la dépendance au pétrole, mais également le secteur où
les perspectives de diminution des émissions sont les moins favorables à la fois en raison
de l’accroissement de la mobilité et de perspectives technologiques qui ne sont pas à
la hauteur des enjeux (en particulier pour l’aviation).
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
6.1.2 Les impacts potentiels du changement climatique
Les impacts du changement climatique sur le tourisme sont généralement classés en
quatre grandes catégories (Scott et al., 2007).
Les deux premières catégories sont les plus connues. Ce sont les impacts climatiques
directs et les impacts dits « indirects », via l’environnement, sur les ressources touristiques.
On s’attend à ce qu’elles modifient les distributions spatiales et temporelles des flux
touristiques au niveau régional et international, mais sans impacter le volume global de
ces flux.
Les deux catégories suivantes, dépendant de la conjoncture internationale, pourraient
avoir un impact plus marquant sur le volume de la demande. Il s’agit des impacts des
politiques d’atténuation sur les déplacements touristiques et des impacts généraux du
changement climatique sur les sociétés.
6.1.2.1 Les impacts climatiques directs
à travers par exemple les températures ou les précipitations, qui pourraient modifier les
conditions d’attractivité des destinations. A ce niveau on s’attend à un déplacement
des conditions optimales vers des latitudes et des altitudes plus élevées. Certaines
destinations pourraient voire leur position compétitive entamée, alors que d’autres (le
Sud de l’Angleterre par exemple) en bénéficieraient. Il n’est cependant pas évident de
prévoir la redistribution possible des flux, en raison d’un cumul d’incertitudes (niveau du
réchauffement global, modalités régionales et locales, exigences climatiques des
touristes). Globalement les facteurs climatiques directs ont plus un impact sur la
localisation des flux que sur leur volume global.
Aujourd’hui, la Tunisie présente un potentiel plutôt élevé pour le tourisme d’un point de
vue purement météorologique, avec des conditions favorables à très favorables sur
plus de 50% des jours de l’année, quelle que soit la région. Les conclusions tendraient à
montrer que le potentiel climato-touristique de la Tunisie n’est pas exploité aujourd’hui
à son maximum pour des formes de tourisme alternatives au balnéaire.
Pour la Tunisie, les impacts climatiques directs seront surtout marqués par une hausse
des températures et une diminution des précipitations. Les conséquences sur le
tourisme devraient entraîner une modification des saisons les plus propices avec des
étés devenus trop chauds dans la moitié sud et des intersaisons plus favorables. Les
régions du nord et les régions montagneuses devraient voir leurs conditions climatiques
s’améliorer pour le tourisme alors que les zones sahariennes seront moins praticables.
Dans une perspective de changement climatique, le réchauffement des températures
ainsi que la diminution du nombre de jours de pluie devraient avoir un impact
significatif sur le potentiel climato touristique de la Tunisie et notamment sur le tourisme
balnéaire. Ces impacts pourront être contrastés selon les saisons et les régions. Ces
évolutions semblent tendre vers une distribution saisonnière moins contrastée, plus
plate, du potentiel climato-touristique et balnéaire ainsi que vers une certaine
convergence des conditions pour les 6 régions touristiques vers la fin de siècle,
gommant sensiblement les disparités régionales.
•
La saison estivale devrait connaître une aggravation de l’inconfort du aux fortes
chaleurs et aux canicules, la dégradation du répit nocturne, avec
l’accroissement des risques de coup de soleil et de coup de chaleur. Les
conditions du tourisme balnéaire restent très favorables par contre pour cette
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
saison. Ce type d’ambiance déborde même sur les saisons intermédiaires.
Comme nous l’avons vu, ces résultats sont sans doute à moduler compte tenu des
toutes dernières études disponibles.
•
Les saisons intermédiaires connaîtront plutôt une amélioration de leur potentiel,
qu’il s’agisse du potentiel touristique en général ou balnéaire, avec une
augmentation du nombre des jours « balnéaires » et surtout du type d’ambiances
favorables aux corps fragiles (avril, mai, novembre) ;
− Aujourd’hui, en automne, la mer est encore tiède est attirante, mais la baisse
de la température de l’air, accentuée parfois par le refroidissement éolien,
rend l’ambiance sur la plage peu confortable. Le réchauffement climatique
peut améliorer cette ambiance rendant la plage et la nage attractives. Les
conditions de septembre à novembre devraient s’améliorer surtout pour le
tourisme balnéaire car les scénarios les plus pessimistes envisagent une légère
dégradation du confort thermique au-delà de 2050 du fait des températures
qui deviendraient trop élevées (avec un potentiel qui reste bon malgré tout) ;
− Au printemps, la mer est encore fraîche (surtout au mois de mars). Le
réchauffement rapide de l’air peut rendre la plage plus attractive. Elle le
devient encore plus au mois d’avril et surtout de mai ;
•
En hiver, les conditions climatiques s’améliorent sensiblement sur l’ensemble du
pays. Cela est particulièrement marqué dans le nord-ouest du pays et les régions
montagneuses où l’hiver est aujourd’hui une saison défavorable au tourisme ;
•
On constate également que les conditions pour les différentes régions touristiques
ont tendance à converger vers la fin de siècle, gommant les disparités
régionales ;
− les régions du sud subissent plus la dégradation des conditions estivales avec
des côtes qui conservent un potentiel balnéaire dit « refuge » (on se baigne
pour supporter la chaleur) ;
− ce sont les régions montagneuses et la côte nord qui ont le plus à gagner
avec les évolutions climatiques en termes d’allongement de saison et de
potentiel, notamment pour des formes de tourisme alternatives.
6.1.2.2 Les impacts indirects sur les ressources via l’environnement
Le tourisme est très dépendant des ressources environnementales locales. Par
conséquent, une grande diversité de changements environnementaux consécutifs au
changement climatique pourrait avoir des effets marquants sur le tourisme : pertes de
biodiversité, baisse de la ressources en eau, perte de valeur esthétique des paysages,
changements dans les productions agricoles, élévation du niveau de la mer, érosion du
littoral et disparition des plages, risques naturels, impacts sanitaires sont autant
d’exemples. Ici encore les impacts pourraient être profonds et entraîner une
redistribution des flux, sans toutefois changer le niveau de la demande globale au
niveau international.
Pour la Tunisie, les impacts indirects les plus importants seront incontestablement liés au
recul – voire la disparition – des plages, « matière première » incontournable du produit
balnéaire dominant. Le recul du trait de côte et le risque de submersion menaceront
également toutes les infrastructures touristiques construites à proximité du littoral. Mais
les tensions croissantes sur la ressource en eau devraient également poser problème
pour la consommation des hôtels, notamment à travers les équipements les plus
demandeurs et la qualité des eaux de baignade. Les évolutions de la biodiversité et
des paysages ne constituent qu’un enjeu secondaire pour le tourisme tunisien.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
6.1.2.3 Les impacts des politiques d’atténuation sur les déplacements
touristiques.
Face aux conséquences du changement climatique, l’adaptation d’un secteur
d’activité ne peut être envisagée sans traiter également la question de l’atténuation
de ses émissions de gaz à effet de serre.
Le tourisme contribue à hauteur d’environ 5% aux émissions globales de CO2 dans le
monde, notamment par le transport aérien qu’il implique, et cette part est amenée à
croître. Cette tendance est confirmée en Tunisie où 64% des touristes arrivent en avion
et la voie aérienne représente plus de 95% pour les entrées des européens.
L’atteinte d’objectifs de réduction des émissions de 50% à 80% au niveau mondial en
2050 par rapport à 1990 nécessiterait un considérable effort pour les pays développés
émetteurs de flux touristiques. Tous les secteurs économiques et toutes les pratiques
sociales (dont le tourisme) seront touchés et aucun ne pourra s’exonérer d’un effort
considérable. L’aviation internationale (contrairement au transport aérien interne) n’a
pas été prise en compte dans le protocole de Kyoto mais un processus destiné à
prendre la suite du protocole de Kyoto est engagé qui pourrait à terme concerner
l’aérien.
Or, face à la contrainte, les mécanismes de compensation ou de souplesse (achat de
permis d’émissions, MDP, exemptions ou mesures transitoires pour des pays en voie de
développement) ne pourront que jouer à la marge, dans un contexte de concurrence
exacerbée qui ne pourra que faire monter les prix à un niveau qui n’aura rien à voir
avec le prix actuel de la tonne de carbone. Une crise du transport aérien paraît donc
inéluctable.
Pour la Tunisie, où la quasi-totalité des arrivées internationales (hors proximité) se font
par avion et où ce mode de transport fait l’objet d’investissements lourds, cet impact
est, à terme, une réelle menace. Cependant, la proximité des marchés émetteurs laisse
entrevoir des alternatives qui permettraient, mieux que d’autres destinations exotiques
lointaines, de maintenir la possibilité d’attirer les clientèles européennes. Par ailleurs, le
développement du tourisme domestique laisse également une marge de manœuvre
importante pour le secteur. La Tunisie a déjà pris conscience de la nécessité d’atténuer
ses émissions de CO2 et lancer des programmes d’économie d’énergie et un écolabel
qui s’applique notamment à l’hôtellerie. Mais la question centrale reste aujourd’hui liée
au poids de l’aérien et des perspectives liées à la contrainte carbone sur cette activité.
6.1.2.4 Les impacts généraux du changement climatique sur les sociétés.
Le changement climatique peut entraîner des risques pour l’économie et la stabilité
politique, comme l’ont montré le rapport Stern ou les travaux du GIEC. Dans ce
contexte le budget « vacances » des ménages risque évidemment de souffrir et la
demande de globalement diminuer. Pour la Tunisie comme pour toute autre
destination, cet impact est le plus difficile à évaluer. Les connaissances et les
projections manquent pour affiner cet exercice. Par ailleurs, on insiste fréquemment sur
la perspective que le changement climatique nuise plus aux pays du sud qu’à ceux du
nord et à l’intérieur des premiers aux couches défavorisées de la société avec des
conséquences en termes de sécurité et de stabilité politique.
6.1.2.5 Les coûts associés aux impacts du changement climatique
Les conséquences du changement climatique devraient générer des coûts liés à la
dégradation environnementale, à l’exploitation des établissements touristiques
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(énergie, eau, approvisionnements), aux évolutions de la demande, à l’évolution du
transport aérien et à l’ensemble des surcoûts liés aux mesures d’adaptation.
Cependant, l’étude de ces coûts est cependant un exercice complexe qui se heurte à
de trop nombreuses incertitudes pour proposer une approche chiffrée fiable. Pour
approcher certains coûts, la démarche la plus réaliste consiste à se baser sur des
études de cas précises qui ont fait l’objet d’études spécifiques, en particulier dans le
domaine des coûts liés à la dégradation environnementale. Sur le littoral, une hausse
du niveau de la mer de 50 cm, pourrait générer des coûts s’exprimant à la fois en
termes de perte de capital productif (potentiellement 1935 MDT pour le tourisme), en
pertes annuelles de production (-102 MDT/an) et en pertes d’emploi (1% de l’emploi
touristique). Par ailleurs, selon les situations déjà observées aujourd’hui, les coûts liés au
recul des plages peuvent être de l’ordre de 60 000 DT par ans pour un hôtel à Djerba
(apport de sable chaque année).
6.2 La prise de conscience des acteurs tunisiens
Si la Tunisie apparaît en avance dans ses politiques de lutte contre le changement
climatique avec de nombreuses études engagées pour mieux appréhender le
phénomène, les travaux de cette étude nous ont permis d’aller à la rencontre des
acteurs pour sonder leur compréhension du problème.
Cette première phase du projet s’est appuyée sur des rencontres avec un échantillon
diversifié d’acteurs tunisiens concernés par le tourisme. Ils représentaient à la fois
l’administration et le secteur privé, les acteurs du tourisme et les acteurs d’autres
secteurs directement liés à la problématique, des acteurs nationaux et des
représentants régionaux.
Ces rencontres ont pris plusieurs formes différentes :
•
des entretiens en tête à tête pour certains ;
•
des réunions dans les différentes régions touristiques avec les commissaires
régionaux au tourisme et des représentants du secteur privé à travers leur
fédération et certains opérateurs locaux.
Dans tous les cas, l’un des objectifs de ces rencontres était bien de sentir le niveau de
sensibilité des acteurs à la problématique du changement climatique et leur
perception de cet enjeu.
Plusieurs constats ont pu être tirés de ces discussions.
La conscience de l’enjeu posé par le changement climatique est bien réelle. La
participation aux réunions et l’intérêt manifesté par tous les acteurs montre une réelle
préoccupation pour les questions environnementales d’une façon générale et pour les
conséquences du changement climatique en particulier.
Cette préoccupation se manifeste à travers des constats déjà formulés par les
professionnels du tourisme sur des évolutions constatées : recul des plages et nécessité
de les engraisser chaque année, prolifération des algues, des goélands ou des
méduses en fonction des secteurs, modification de comportement sensible de
certaines clientèles qui préfèrent les intersaisons moins chaudes… Mais ce sont surtout
les inquiétudes concernant les coûts d’exploitation de leurs établissements qui
mobilisent les professionnels. Les coûts de l’énergie et de l’eau constituent déjà de réels
sujets pour eux, et ils pressentent leur augmentation, entraînant celle des coûts
d’approvisionnement plus largement.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Les discussions laissent finalement ressortir une connaissance assez limitée des impacts
réels du changement climatique, sujet très complexe. Il est difficile pour les acteurs du
tourisme de distinguer les considérations environnementales en général des impacts
réellement attribuables au changement climatique. Par exemple, l’érosion côtière n’est
pas un phénomène causé par le changement climatique mais uniquement aggravé
par celui-ci. Ils ont également du mal à accepter la possibilité de conséquences
dramatiques dont la probabilité reste significative : hausse de plus de 50 cm du niveau
de la mer avant 2050, Sahara impraticable en été…
On peut donc tirer un bilan plutôt positif avec un réel effort du secteur sur la prise en
compte environnementale mais avec des limites importantes qu’il faudra lever
rapidement :
•
la peur d’accepter la possibilité de conséquences dramatiques qui pourraient
subvenir à court terme, peur qui risque d’empêcher des évolutions profondes et
des choix stratégiques forts (exemple : annuler tout nouveau projet de station
littorale) ;
•
une appréhension du phénomène limitée aux impacts déjà observés, ce qui pose
le problème de la variabilité annuelle du climat : une excellent année (chaleur
modérée, pluies suffisantes pour verdir les jardins et remplir les piscines, absences
d’algues…) efface la conscience des problèmes à venir et coupe les efforts
engagés.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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6.3 La nécessité de s’adapter au changement
climatique
L’Organisation Mondiale du Tourisme, à l’occasion de la conférence de Davos (PNUE,
2007) affirme qu’il est aujourd’hui absolument nécessaire de se préoccuper de
l’adaptation du secteur touristique aux conséquences du changement climatique. Si
l’on a pu constater par le passé (SRAS, attentats terroristes…) une capacité
d’adaptation du tourisme relativement meilleure que pour d’autres secteurs, on ne
peut néanmoins pas se passer d’une mobilisation de l’ensemble des acteurs et d’une
stratégie cohérente permettant à chacun de se projeter à long terme. Il ne s’agit pas
ici d’envisager des mesures ponctuelles et très localisées mais bien d’apporter une
vision de long terme des enjeux globaux et des incidences locales.
Il est en particulier recommandé de se préoccuper d’adaptation au changement
climatique dans les cas pour lesquels le changement climatique est susceptible
d’aggraver les problèmes qui se manifestent déjà comme (ONERC, 2006) :
•
présence sur le territoire d’un littoral maritime ;
•
économie du territoire reposant sur une activité touristique ;
•
existence de contraintes sur les ressources en eau ou de problèmes de qualité de
l’eau ;
•
périodes récurrentes de chaleur considérée comme excessive (santé) et/ou
induisant un recours massif à la climatisation ;
•
existence de bâtiments et d’infrastructures qui seront encore debout dans 50 ans ;
•
existence de projets de nouveaux bâtiments ou d’infrastructures qui seront encore
en place dans 50 ans ;
•
crues récentes ou débordement de collecteurs.
On voit donc que la Tunisie est directement concernée par la question de
l’adaptation.
Au delà de l’aggravation des problèmes actuels, le changement climatique peut en
poser de nouveaux.
Cependant, les risques encourus peuvent être réduits par une planification prudente et
soigneuse et en prenant les devants. C’est pourquoi les territoires sont encouragés par
les instances internationales à réfléchir dès à présent aux possibles stratégies
d’adaptation et à bâtir des plans d’actions opérationnels à court terme.
On mesure, à partir des chapitres précédents, la complexité des travaux de
prospective des impacts du changement climatique sur le tourisme : celui-ci est lié à
de nombreux paramètres, dépend de données très localisées dans l’espace et dans le
temps… Pour avoir une vision complète, il faudrait, en plus des indices de confort
climatiques, développer des modèles d’érosion des plages, de coût de transport… qui
prendraient à chaque fois en compte les différents segments de la demande.
Ceci dit, bien que la connaissance parfaite n’existe pas, il semble rester aujourd’hui de
la place pour un exercice, mené à l’échelle méditerranéenne ou mondiale, alternant
modélisation, consultation d’acteurs et jugements d’experts, afin d’évaluer le potentiel
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de redistribution des flux touristiques entre grandes régions du monde et à l’intérieur de
ces régions. Les synthèses bibliographiques de cas locaux qui existent aujourd’hui
(comme le rapport de la conférence de Davos, PNUE 2007) semblent incapables de le
réaliser. Plus récemment, une étude a été lancée par le Plan Bleu destinée à modéliser
les flux touristiques en Méditerranée pour analyser leur dépendance à l’aérien et les
impacts potentiels des évolutions de ce secteur.
Enfin, avant d’être une question scientifique, la question des impacts du changement
climatique sur le tourisme est d’abord une question politique. L’incertitude essentielle
est l’imprévisibilité des émissions futures de GES, qui conditionnement largement
l’intensité du réchauffement. Plus que des modèles climatiques, le niveau futur des
impacts dépendra de notre sagesse collective dans l’atténuation des émissions. Avant
d’anticiper des impacts, il importe de les éviter : le principe de précaution et
l’atténuation rapide des émissions du tourisme doivent être des impératifs absolus.
Pour répondre à ces enjeux, le secteur doit dès maintenant se doter d’une stratégie
d’adaptation, cadre global pour l’ensemble des acteurs du tourisme, des
administrations au secteur privé.
6.4 Les priorités pour l’adaptation du tourisme
tunisien
Comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents, les impacts potentiels du
changement climatique sur le secteur touristique sont nombreux et variés. Cependant,
ils ne s’appliquent pas de la même façon en Tunisie et certains apparaissent plus
prioritaires dans l’optique d’une stratégie d’adaptation.
C’est pourquoi il est important de hiérarchiser ces impacts afin d’en tirer des priorités
pour l’adaptation du secteur.
6.4.1 L’analyse FFOM
L’analyse FFOM consiste à présenter de façon synthétique l’analyse du tourisme
tunisien face au changement climatique. Elle consiste à identifier les principales Forces
et Faiblesses du tourisme tunisien dans un contexte de changement climatique ainsi
que les principales Opportunités et Menaces qui pourraient se présenter.
Le tableau suivant présente cette analyse.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
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Forces
Un climat propice au tourisme d’avril à octobre sur une large partie du territoire
Le patrimoine culturel est très important (sites romains, puniques, influence française, sites classés
Unesco, traditions orales et artisanat, etc.) et encore peu valorisé en dehors des grands sites
Un tourisme de santé et de bien-être qui se développe et s’appuie sur un système de santé de
qualité qui correspond à une demande croissante (vieillissement) et à l'exigence de sécurité des
clientèles
Un parc hôtelier d’une qualité plutôt supérieure à la moyenne méditerranéenne
Une réglementation récemment mise en place sur l’hébergement chez l’habitant qui pourrait
permettre le développement d’une offre alternative
La proximité de marchés émetteurs (Europe) avec des liaisons existantes en ferry, par rapport à des
régions touristiques concurrentes (Asie du sud-est, Caraïbe), qui limite la dépendance à l'aérien
Le tourisme de proximité (Algérie, Libye) déjà développé permet la diversification des modes de
transports
Un plan de mise à niveau des hébergements
Sécurité et stabilité intérieure
L'implication importante de l’Etat durant la période de développement du tourisme a permis de
maîtriser ce développement et limiter les zones artificialisées
Des dispositifs permettant de contrôler le développement touristique : un Plan d’aménagement
des Zones touristiques qui impose notamment des études d’impact environnementales
Faiblesses
Une saisonnalité très marquée qui pèse sur la rentabilité des établissements et se concentre à la
saison la plus chaude (risque pour la santé) et la plus sèche (tension sur la ressource en eau)
Un tourisme quasi-exclusivement sur le produit balnéaire, très concentré sur le littoral. Cela induit
des régions touristiques avec un littoral totalement artificialisé, extrêmement vulnérable à l’érosion
côtière et des infrastructures menacées par la hausse du niveau de la mer
Une image de destination balnéaire « bon marché », sans trait distinctif par rapport aux autres
destinations méditerranéennes
Un parc hôtelier relativement ancien, sur des modèles qui ne sont pas toujours compatibles avec
les principes de développement durable (construction, énergie…)
Un manque d’infrastructures (routes, hébergement, restauration) en dehors du littoral qui ne permet
pas le développement d’une réelle activité touristique dans les régions intérieures
La desserte est quasi uniquement aérienne pour les clientèles européennes, avec des perspectives
de renforcement de ce mode de transport (open-sky, low-cost, nouvel aéroport international et
l'ouverture de lignes avec les pays dont les clientèles arrivent aujourd'hui par la route)
Le réseau ferré n'est pas prévu pour l'usage touristique
Le tourisme domestique, bien qu'en forte croissance, est peu pris en compte, avec une offre
marchande focalisée sur le tourisme international, peu adaptée aux locaux
La commercialisation faite quasi uniquement au forfait et trop axée sur le all-inclusive, renforce la
dépendance aux TO et au produit balnéaire. Cela limite la capacité des professionnels tunisiens à
innover et faire évoluer l'offre
L'utilisation d'internet et des NTIC est très limitée, avec un manque d'information et de
commercialisation directe par les hôtels ou régions
Une difficulté à financer le développement d’offres alternatives avec un Etat engagé seulement
sur les "zones touristiques" et des investisseurs toujours focalisés sur le modèle de stations littorales
intégrées et le produit hôtelier
Le code de l’urbanisme et de l’aménagement ne prend pas en compte la montée du niveau de
la mer liée au changement climatique
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Opportunités
Des conditions climatiques qui vont s’améliorer pour les intersaisons et l’hiver à court terme
Le développement du résidentiel touristique, pour encourager des séjours longs, voire très longs,
notamment pour la clientèle senior
Le renforcement du tourisme de santé à forte valeur ajouté, avec le développement de longs
séjours pour la clientèle sénior
Le développement du tourisme de découverte naturelle et culturelle, valorisant les richesses du
pays, diffus sur tout le territoire
Le développement du tourisme de thalassothérapie déjà bien positionné, avec une augmentation
de la valeur ajoutée
Le développement du tourisme golfique sous réserve de l'adaptation du produit aux enjeux de
limitation de la ressource en eau et aux exigences de qualité de la clientèle
La hausse de la rentabilité des produits avec une montée en gamme de l’offre et une mise à
niveau des produits : hôtellerie, circuits, combinés plages/culture, thalasso/culture, Sahara/plages,
incentives…
L'introduction de normes type Ecolabel, Pavillon Bleu, offrant des garanties pour les distributeurs et
consommateurs européens
Le vieillissement de la population européenne et de la demande pour un tourisme moyen courrier
et proposant une offre de santé - bien-être
Le développement du marché de proximité (Libyen et Algérien notamment)
Le développement du tourisme domestique avec des offres diversifiées et réparties sur le territoire
pour maintenir une activité touristique moins dépendante des marchés émetteurs et de la
conjoncture internationale
Le développement du transport interne par le rail comme alternative à l'automobile, l'autocar et
l'avion
Menaces
Une politique de prix des TO qui ne va pas s'adapter aux évolutions des saisons propices au
tourisme
La stagnation de la fréquentation et des effets de concurrence de plus en plus vifs remettant en
question le produit tunisien
Une augmentation sensible des températures estivales induisant des risques pour la santé et un
confort d'été dégradé pour des clientèles européennes notamment, jusqu'à l'impossibilité de
fréquenter les régions les plus au sud
Des problèmes environnementaux de plus en plus importants et incontrôlables (érosion des plages,
modification des écosystèmes, qualité de la ressource en eau…)
Une perte rapide des ressources touristiques principales que sont les plages, ainsi que divers
problèmes liés à la qualité de ces plages (algues notamment)
L'aggravation des tensions sur la ressource en eau limitant les usages récréatifs (piscines,
arrosages…)
Une augmentation sensible du prix de l'énergie et de l'eau induisant des coûts d'exploitation à la
hausse pour les établissements touristiques
La dégradation de la qualité des eaux de baignade et augmentation des risques sanitaires
L'évolution des modes de vie et de consommation des pays émetteurs face à une contrainte
carbone pourrait modifier sensiblement les modes voyage (destinations, produits, modes de
transport)
La détérioration de certains sites archéologiques secondaires du fait des intempéries et
dégradations environnementales (inondations, crues, érosion côtière…)
Une tension croissante sur les denrées alimentaires produites en Tunisie avec potentiellement des
difficultés d'approvisionnement et des coûts de production en augmentation pour la restauration
La modification des paysages avec globalement un assèchement
Une augmentation sensible du prix de l'aérien via les marchés du carbone avec des répercutions
sur les tarifs à la commercialisation
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
L’analyse croisée des différentes sections de ce tableau nous amène à identifier des
enjeux prioritaires qui semblent émerger pour le tourisme tunisien. Sans préjuger des
moyens à mettre en œuvre et en se plaçant du seul point de vue des impacts du
changement climatique, il nous semble pouvoir dégager un certain nombre de
menaces et d’opportunités qui pourront guider la construction d’une stratégie
d’adaptation.
En préalable, il faut garder à l’esprit que l’une des conséquences du changement
climatique les moins aisées à cerner mais les plus probables, concerne, en Tunisie
comme
ailleurs,
la
stabilité
sociopolitique
des
pays.
Les
problèmes
d’approvisionnement alimentaire et d’accès à l’eau potable pèseront de plus en plus
fortement sur les populations et les structures sociales. Or les tensions sociales
découragent le tourisme. La Tunisie, où la stabilité rassure actuellement les touristes,
n’échappe pas à cette menace.
Par ailleurs, les menaces les plus préoccupantes sont liées :
•
au recul du trait de côte, aggravé par la hausse accélérée du niveau de la mer
avec :
− la perte ou la dégradation des plages, principale ressource touristique d’une
destination aujourd’hui essentiellement balnéaire ;
− la menace des infrastructures touristiques (hôtels, marinas, golfs) avec la
reprise par la mer des zones basses ;
− mais surtout le risque croissant, pour les bien et les personnes, de submersion
marine liée à des évènements extrêmes (fortes marées, tempêtes). Ces
phénomènes soudains et incontrôlables ne laissent pas la place à une
adaptation progressive mais nécessitent une anticipation dès maintenant
pour limiter le risque ;
•
à l’élévation sensible des températures estivales et à l’augmentation des
phénomènes de « super canicule » avec :
− un risque de santé, en particulier pour les clientèles européennes moins
habituées à la chaleur ;
− une inadaptation de l’urbanisme des stations et des hébergements
touristiques. Les normes actuelles ne prennent pas suffisamment en compte
les très fortes chaleurs et la notion de construction ou d’urbanisme bioclimatique ;
− une offre d’activité inadaptée en termes d’horaires, d’aménagement des
sites, etc.
− une focalisation sur le tourisme estival qui pourrait devenir impraticable,
notamment dans la zone saharienne ;
•
à la baisse de la ressource en eau avec :
− des conséquences sur l’approvisionnement des hébergements et activités
touristiques ;
− une question sur le comportement des touristes et leur sensibilisation ;
− le risque de baisse de la qualité de l’eau, support des activités touristiques
(baignade, thalasso…) ;
•
aux impératifs d’économies d’énergie avec notamment une hausse des coûts
d’exploitation des entreprises touristiques et, là encore, une question sur la
sensibilisation des touristes sur les comportements responsables ;
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
•
à plus long terme, l’infléchissement de la demande des clientèles européennes
(diminution de la capacité à voyager et climat plus agréable sur le lieu de
résidence).
Les opportunités qui semblent les plus intéressantes reposent sur :
•
le développement d’une véritable offre à la fois alternative et complémentaire
au balnéaire, en particulier sur les thématiques Santé et Culture en dehors du
littoral. La Tunisie possède déjà des atouts certains pour mieux développer ces
thématiques qui sont moins sensibles aux paramètres climatiques, peuvent
permettre à la destination de se différencier dans un contexte de concurrence
méditerranéenne et peuvent générer une valeur ajoutée supérieure au tourisme
balnéaire banalisé ;
•
une organisation du secteur touristique permettant plus de souplesse dans la
structuration de l’offre et une plus grande autonomie dans la commercialisation,
avec une diminution de la dépendance aux TO étrangers, des modes de
coopération permettant de favoriser l’innovation et le développement d’offres
nouvelles ;
•
le développement d’une offre adaptée à la clientèle tunisienne et à la clientèle
maghrébine en termes de promotion et commercialisation, de tarification et de
produit ;
•
une nouvelle conception des hébergements touristiques et de l’urbanisme des
stations touristiques, plus proche des concepts et modes de vie méditerranéens
traditionnels. Cette idée permettrait à la fois de répondre de façon plus adaptée
aux impératifs climatiques tout en proposant aux clientèles étrangères un produit
plus spécifique à la Tunisie.
Enfin, la réflexion sur la question des transports, à la fois internes et externes, est
également cruciale mais dépasse le cadre du tourisme. Il s’agit d’un enjeu à
considérer dans un cadre très global, dans la perspective du réseautage des transports
autours de la Méditerranée (train) et de l’articulation avec les politiques de transport
de l’Europe. Dans une optique touristique et tunisienne, il semblerait néanmoins
intéressant d’inscrire à l’agenda des réflexions la valorisation du rail sur le territoire
national et la desserte par ferry depuis l’Europe.
6.4.2 Vers une stratégie d’adaptation
La première phase de l’élaboration d’une stratégie nationale d’adaptation du secteur
touristique tunisien a permis de dresser un bilan des vulnérabilités de cette activité et
des impacts potentiels du changement climatique auxquels elle devra d’adapter.
Il a été montré que plusieurs menaces pèsent sur le tourisme tunisien, notamment sur le
tourisme balnéaire, menaces qui nécessitent une prise de conscience forte du secteur
et des évolutions en profondeurs. Il a également souligné que le tourisme tunisien
possède des atouts qui devraient lui permettre de tirer parti des évolutions moyennant
une réaction adaptée et concertée de tous les acteurs.
Ces premiers travaux ont également contribué à la sensibiliser d’un grand nombre
d’acteurs, des administrations au secteur privé, sur ce sujet qui dépasse largement les
limites du secteur touristique.
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Dans les phases suivantes, ces travaux devront être exploités afin :
•
de proposer une stratégie d’adaptation du secteur touristique au changement
climatique, construite à travers une série d’ateliers de travail régionalisés avec les
acteurs du tourisme et des territoires d’accueil (phase 2) ;
•
d’élaborer un plan d’actions qui permettra de préciser les orientations
stratégiques, notamment à travers des horizons temporels et des interactions entre
acteurs (phase 3) ;
•
de construire ensemble deux projets prioritaires, qui auront une vocation
exemplaire pour tester de nouveaux modes de travail et une nouvelle conception
du tourisme tunisien. Ces projets permettront de projeter les acteurs dans une
planification plus concrète et de court terme (phase 3).
Dans la perspective des phases suivantes, on peut des pistes de réflexion des travaux
qui précèdent. L’analyse nous amène à identifier des grands dossiers prioritaires et
transversaux qui constitueront la trame de la future stratégie du tourisme tunisien :
− la gestion de la chaleur, notamment estivale ;
− la gestion de l’offre littorale face à l’élévation du niveau de la mer ;
− la gestion de l’eau douce ;
− la question des transports et de la mobilité.
Au-delà d’axes spécifiquement liés aux impacts du changement climatique, il s’agit
également de mettre à profit certaines évolutions indépendantes, comme les
évolutions de la demande avec le vieillissement des clientèles européennes ou
l’amélioration du pouvoir d’achat des clientèles domestiques.
Plus généralement, deux champs doivent être explorés en parallèle : il s’agit d’une part
d’adapter au mieux l’existant et d’autre part d’explorer des champs moins vulnérables
du tourisme afin de les développer en priorité, plutôt que de reproduire des modèles
dont on a montré la fragilité.
Ces dossiers devront être formulés pour proposer des axes stratégiques plus parlants
pour les acteurs du tourisme tunisien :
− faire évoluer les composantes de l’offre pour prendre en compte les
modifications météorologiques ;
− réduire la dépendance au tourisme balnéaire ;
− réinventer un tourisme plus économe ;
− réduire la dépendance aérienne.
Pour chacun des grands axes identifiés, différents types de stratégie d’adaptation
possibles seront analysés et évalués afin de proposer les orientations pour le secteur.
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Bibliographie
Sur le changement climatique (international)
Région Poitou-Charentes (2009). Stratégie régionale d’adaptation au changement climatique,
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Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Annexe 1 : Les personnes rencontrées dans le cadre de l’étude
Date
28/09/2009
Réunion de
coordination
MEDD
29/09/2009
29/09/2009
30/09/2009
30/09/2009
01/10/2009
01/10/2009
01/10/2009
02/10/2009
03/10/2009
Nom
Dali NAJEH
Mohamed ZMERLI
Mustapha LAROUI
Ali ABAAB
Mustapha AISSAOUI
Chaker BEN MARZOUK
Ghazi BEN SALAH
Elechi Mohamed LAZHAR
Ahmed FREH
Aroussia KHAMASSI
Sawsen ELLOUMI
Sihem SLIM
Emma DHOUIOUI
Ridha SFAXI
Mohamed Moez BELHASSINE
Taïeb HACHAICHI
Aroussia KHAMASSI
Nebiha BOUSSETTA AMRI
Sawsen ELLOUMI
Hamed MRABTI
Ahmed FREH
Zakaria ZEGOULLI
Sihem SLIM
Mohamed Ali TORKI
Ghazi Ali KHADHRI
Mustapha AISSAOUI
Latifa HENIA
Zouhaier JALLOULI
Salha Mezgheni
Lazhar El Echi
Organisme
MEDD/DGEQV
MEDD/DGEQV
MEDD/DGEQV
GTZ
MEHAT/DGAT
AFT
MT
MARH/DGEDA
FTH
ONTT
ONTT
APAL
ONTT
MT/BMNT
MT/BMNT
ONTT
ONTT
ONTT
ONTT
ANPE
FTH
FTH
APAL
APAL
MEHAT/DGAT
MEHAT/DGAT
IHE
AFT
MARH/DGEDA
MARH/DGEDA
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
Fonction
Directeur Général
Président Commission Environnement
Direction des Etudes
Directeur Général
Conseiller des services publics. Chef de service
Directeur des études
Urbaniste en chef, Chef de service
Division Statistiques
Direction Etudes
Directeur des Etudes et de la Coopération Internationale
Président Commission Environnement
Secrétaire Général
Direction études
Chef de Service Protection Littoral
Directeur général
Directeur des marchés
167/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Date
03/10/2009
06/10/2009
07/10/2009
07/10/2009
07/10/2009
07/10/2009
08/10/2009
08/10/2009
08/10/2009
08/10/2009
09/10/2009
09/10/2009
09/10/2009
07/10/09
Réunion
régionale Nabeul
08/10/09
Réunion
régionale Sousse
Nom
Yadh LABBENE
Jamel BOURAOUI
Sahar CHOUIKH
Lofti LAATIRI
Hichem FEHRI
Célia LE RAVALLEC
Nouri SOUSSI
Inès HOUARBI BEN SALAH
Rym BELAJOUZA BEN FADHEL
Noureddine FOURATI
Tahar SAÏHI
Mohamed MAÂROUFI
Tahar AYACHI
Cyrille BELLIER
Fathi ISSIOUM
Ahmed KALBOUSSI
Brahim HASNAOUI
Tarek NEFZI
Wahid Ben YOUSSEF
Raouf Ben SALEM
Abdelkader KHALIL
Moshen Ben SLIMENE
Mohamed KHECHINE
Ahmed BETTEIEB
Hichem MAHOUACHI
Béchir ben MAHMOUD
Donia BASSOUMI
Jihene ZARROUK
Hechi HICHRI
Foued ELOUED
Ahmed FREH
Béchir BOUNEB
Ilyes M'SALLEM
Mohamed BOUJDARIA
Hamoudia BELHAMA
Raouf MAAROUF
Organisme
INM
INM
INM
INM
INM
AFD
OTEDD
OTEDD
Seabel Hotels
Hôtel Belvébère Fourati
FTAV
AFT
La Presse Tunisienne
AFD
Bizerte
Tabarka / Ain Draham
Institut sylvo-pastoral de Tabarka
Cabinet Conseil Becasse
CRT Yasmine Hammamet
CRT Nabeul Hammamet
FRAV
APAL Nabeul
FRH
FRAV
CRT Yasmine Hammamet
CRT Yasmine Hammamet
CRT Yasmine Hammamet
CRT Yasmine Hammamet
CRT Yasmine Hammamet
CRT Sousse
Neptunia
CRT Monastir
CRT Kaihouan
CRT Madhia
FRAV
Royal Kenj
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
168/170
Fonction
Chargé changement climatique
Sous-directeur d'exploitation
Ingénieur prévisionniste
Ingénieur Chef de service
Directeur
Chargée de projets
Directeur
Directrice
Directeur Général Adjoint
Président
Directeur de l'Aménagement
Journaliste
Directeur Adjoint
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
Manager
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
Gérant Tunisie Direct
Inspecteur
Inspecteur hôtellerie
Inspecteur Hygiène
Inspecteur Hygiène
Inspecteur technique
Commissaire régional au tourisme
Directeur
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
PDG
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
07/10/09
Réunion
régionale Sfax
08/10/09Réunion
régionale Djerba
09/10/09
Réunion
régionale Tozeur
10/10/2009
Réunion
régionale Tunis
Nord et Sud
12/10/2009
13/10/09
Réunion de
synthèse MEDD
13/10/2009
Skander El KATEB
Ahmed SLAHEDDINE
Mohamed LABIDI
Hichem DRISS
Habib BOUSLAMA
Zouheir MAKNI
Mohamed ESSAYEM
Tahar KHIARI
Skander Ben Ali KACEM
Abdelaziz JERBI
Tarek BENJEMAA
Lofti ZARAM
Ben HASSINE Safouène
Sami ben HADJ FRADJ
Yassine DAGHARI
Ali BOUHMICHE
Abdelkader CHAABANE
Wahid Ben FREDJ
Salah KASSEM
Ridha HAMBLI
Faouzi MASMOUDI
A. CHAFI
Besma ben HAMIDA
Selim Ben MILED
Noureddine FOURATI
Mohamed JERBI
Nejib OSMAN
Aroussia KHAMASSI
Louise de TORCY
Norbert TREHOUX
Jean Mehdi CHAPOUTOT
Mustapha LAROUI
Alexis GARDY, Jérémy MAMAN,
Xavier BONNEL
KANTA
Hôtel Karsis
FRH
FRH
FRH
CRT Sfax
MEDD
APAL
CRT Djerba
Tunisise Voyages (TUI)
FRH
FRH Djerb Zarzis
VINCCI Alkantara
Calypso Voyages FRAV
Sidi Slim
Menzel
ONTT
APAL
CRT Djerba
CRT Tozeur
CRT Kébili
CRT Centre Ouest (Sbeitla)
Désert Evasion (Tozeur)
Hôtel Bel Horizon (Nefta)
CRT Tunis Sud / Zaghouan
FTH
Hôtel Belvédère
CRT Tunis Nord
ANME
ONTT
TEC
TEC
TEC
MEDD/DGEQV
Roland Berger Strategy
Consultants
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
DG
DG
directeur FRH Sousse
Président FRH Sousse
Secrétaire Général FRH Sousse
Commissaire régional au tourisme
Directeur environnement
Commissaire Régional au Tourisme
Directeur régional
DG Royal first hotels - Hôtel Haroun Djerba
Directeur
DG
Gérant Tunisie Direct
DG
Directeur El Mouradi
Inspecteur ONTT
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
Commissaire Régional au Tourisme
Directeur
Directeur
Commissaire Régional au Tourisme
Hôtelier - Medisea Hotel
hôtelier
Commissaire Régional au Tourisme
Directeur Etudes et Planification
Equipe projet
169/170
Tourisme et changement climatique en Tunisie :
évaluation des impacts et élaboration de la stratégie nationale d’adaptation du secteur – Phase 1
Annexe 2 : Etude du changement climatique et le potentiel climatotouristique de la Tunisie
Cette annexe technique détaille deux études réalisées spécifiquement pour ce projet sur
les indices climato-touristiques en Tunisie et leurs projections futures.
Voir document joint.
TEC, 01/2010 – Stratégie nationale d’adaptation du secteur touristique en Tunisie
170/170
Deutsche Gesellschaft für
Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH
Dag-Hammarskjöld-Weg 1-5
65760 Eschborn/Germany
T +49619679-0
F +49 61 96 79-11 15
E [email protected]
I www.giz.de

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