Les banlieues françaises, sensibles aux valeurs de la droite mais

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Les banlieues françaises, sensibles aux valeurs de la droite mais
Les banlieues françaises, sensibles aux valeurs de la droite mais hermétiques à Sarkozy.
L’importance accordée à la famille, respect des traditions, goût pour l'entreprise: la banlieue,
traditionnellement ancrée à gauche, n'est pas insensible aux valeurs de la droite, même si cette
dernière peine à s'implanter, estiment experts et élus.
« Les habitants de banlieue ont longtemps été encadrés politiquement et socialement par le
PC ou le PS », rappelle Jérémy Robine, chercheur à Paris-VIII et auteur de « Les ghettos de
la nation »
.
Les habitants des cités ont majoritairement voté Ségolène Royal à la présidentielle de 2007. « Chez les descendants d'immigrés africains ou maghrébins, le taux s'est même élevé à 80% »
, note Vincent Tiberj, chercheur à Sciences-Po et spécialiste du vote des banlieues.
Un score record qui masque une autre réalité: l'érosion du vote de gauche dans les quartiers
populaires, au-delà des rendez-vous électoraux à forte charge symbolique.
« Il y a une forme de lassitude, liée au fait que les grands discours sur la solidarité produisent
peu de résultats », note Jérémy Robine. « Les gens ne sont pas dupes dans les quartiers
populaires, ils voient que la gauche n'a rien fait pour eux »
, renchérit Lucien Kemkeng, conseiller municipal à Sèvres et président du Cercle de la
Diversité, mouvement affilié à l'UMP.
Dans un rapport publié au printemps 2011, intitulé « Gauche, quelle majorité électorale pour
2012? »
, le cercle de réflexion Terra Nova,
proche du PS, avait constaté cette
« rupture »
.
« La classe ouvrière n'est plus le cœur de la gauche, elle n'est plus en phase avec l'ensemble
de ses valeurs »
, notaient les auteurs.
Parmi ces « valeurs »: l'importance accordée à la famille et aux traditions. « En banlieue,
l'autorité des parents est incontournable »
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Les banlieues françaises, sensibles aux valeurs de la droite mais hermétiques à Sarkozy.
, souligne Camille Bedin, secrétaire nationale UMP à l'égalité des chances et auteur de
« Pourquoi les banlieues sont de droite »
.
Un discours trop centré sur l’immigration a fait fuir les votes des habitants
de banlieue.
« Les jeunes ne souhaitent pas faire table rase du passé. Ils respectent beaucoup les
traditions, notamment religieuses », poursuit la militante.
Au-delà des valeurs morales, c'est le rapport à l'économie qui est en jeu. « Dans les quartiers,
il y a un taux de création d'entreprise deux fois plus élevés qu'ailleurs »
, complète Camille Bedin.
« Les jeunes des quartiers rêvent de travailler dans la finance et le commerce... L'argent ne
leur fait pas peur. »
Paradoxalement, cette sensibilité aux idées libérales et conservatrices ne bénéficie pas à la
droite, du moins pas à Nicolas Sarkozy.
« Il y a eu des malentendus »
, reconnaît Kamel Hamza, élu UMP à la Courneuve et président de l'Association nationale des
élus locaux de la diversité (Aneld).
En cause? Un discours présidentiel centré sur la lutte contre l'immigration et la défense de
l'identité nationale, mal perçu. « Ce qui détermine le vote, c'est avant tout les discriminations
raciales. Et sur ce terrain, c'est la gauche qui est en pointe »
,
résume Vincent Tiberj.
D'où l'intérêt des challengers de droite pour cet électorat. A commencer par Dominique de
Villepin, venu le 3 février à Argenteuil (Val-d'Oise), là où Nicolas Sarkozy avait promis, en 2005,
de « débarrasser » le quartier des « racailles ».
« Au final, c'est l'abstention qui progresse: les électeurs se détournent de la politique »,
déplore Kamel Hamza. Une analyse partagée par l'ancien ministre Azouz Begag, proche de
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Les banlieues françaises, sensibles aux valeurs de la droite mais hermétiques à Sarkozy.
Dominique de Villepin, pour qui
« Nicolas Sarkozy s'est complètement grillé dans les quartiers »
.
« La gauche a perdu du terrain dans les quartiers mais la droite n'a pas réussi à s'y
implanter », résume Jérémy Robine, qui regrette le peu d'intérêt des hommes politiques pour
les cités qui "accueillent 8 millions d'habitants, soit 12% de la population française".
Photo principale: des immeubles à Clichy-sous-Bois en banlieue parisienne© AFP Bertrand
Guay.
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