Systèmes fragmentés - Canadian Chamber of Commerce

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Systèmes fragmentés - Canadian Chamber of Commerce
Systèmes fragmentés :
réussir l’arrimage des divers acteurs pour relever le
défi des compétences au Canada
Septembre 2015
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Nous sommes l’association de gens d’affaires la plus importante et influente du Canada et,
à ce titre, nous sommes le lien principal et essentiel entre les entreprises et le gouvernement
fédéral. Forte d’un réseau de plus de 450 chambres de commerce, qui représentent 200 000
entreprises de toutes les tailles, de tous les secteurs de l’économie et de toutes les régions,
nous démontrons continuellement que nous avons un impact sur les politiques publiques et
le processus décisionnel au profit des entreprises, des collectivités et des familles du Canada.
Faites-vous entendre.
La préparation de ce document a été rendue possible
grâce au soutien généreux de nos commanditaires
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Remerciements
Nous tenons à remercier en particulier John Allen, du cabinet-conseil Global Public Affairs, pour
ses efforts dans la réalisation de ce rapport. Nos commanditaires ont également fourni un soutien
inestimable. La personne-ressource à l’interne pour toute question au sujet de ce rapport est
Sarah Anson-Cartwright, directrice principale, Politiques des compétences.
TABLE DES MATIÈRES
POURQUOI IL S’AGIT D’UN ENJEU CRUCIAL POUR LE CANADA
3
LES OBSTACLES QUI SE DRESSENT ENTRE LES EMPLOYEURS ET LE
SYSTÈME D’ÉDUCATION
6
Les obstacles entre le secteur des études postsecondaires (EPS) et
les employeurs
6
Les obstacles entre les diverses administrations gouvernementales
9
Les obstacles au sein-même de l’écosystème des établissements
postsecondaires
14
Les obstacles à la transition de carrière des étudiants
16
LES MESURES QUI ONT ÉTÉ PRISES AFIN DE SURMONTER CES OBSTACLES
19
Établissement de comités consultatifs des programmes
19
Programmes d’apprentissage intégré au travail
20
Autres types de partenariats avec des entreprises
23
Conseils sectoriels et associations industrielles
24
CE QUE L’ON POURRAIT FAIRE DE PLUS POUR ARRIMER LES ÉTUDES
POSTSECONDAIRES AUX BESOINS EN MATIÈRE DE COMPÉTENCES
Évaluer les résultats d’apprentissage
Évaluer les résultats d’apprentissage : un moyen de démontrer que les
diplômés possèdent les compétences dont les employeurs ont besoin
25
26
28
Rendre l’information disponible
31
Partager une vision commune
32
Favoriser une approche systémique
33
Favoriser la mobilité et le choix
34
Promouvoir la collaboration
35
Facteurs favorisant la collaboration
36
RECOMMANDATIONS À L’INTENTION DU GOUVERNEMENT
37
POURQUOI IL S’AGIT D’UN ENJEU CRUCIAL POUR
LE CANADA
Une population éduquée et possédant des compétences
de haut niveau est un préalable essentiel à la réussite
d’une société et d’une économie avancées. Chaque
année, le Canada investit des milliards de dollars dans
le système d’études postsecondaires et atteint même
le taux de diplomation postsecondaire le plus élevé
parmi les pays de l’Organisation de coopération et
de développement économiques (OCDE)1. Pourtant,
selon un rapport du Conference Board du Canada,
« le taux réel d’acquisition de compétences est des
plus décevants2 ». Le présent rapport se penche en
particulier sur les moyens de combler l’écart entre
l’éducation et les compétences en examinant de plus
près la relation entre les besoins des employeurs et le
secteur des études postsecondaires.
Le Canada dispose de tous les ingrédients nécessaires
pour assurer le développement des compétences et
ainsi alimenter les employeurs en travailleurs qualifiés
et favoriser l’essor de l’économie : 53 % des adultes
de 25 à 64 ans détiennent un diplôme collégial ou
universitaire. Le taux d’emploi parmi ces titulaires
d’une attestation d’études collégiale ou universitaire
est de l’ordre de 82 %, soit également dans la moyenne
des pays de l’OCDE3. Le Forum économique mondial
accorde au Canada le 7e rang du monde quant à la
qualité de l’éducation donnée au Canada4, mais on
observe malgré tout une discordance entre ces données
et la réalité sur le terrain. Ainsi, selon une récente
étude réalisée par le cabinet McKinsey & Company
Canada, plus de la moitié des diplômés eux-mêmes et
au-delà des deux tiers des employeurs estimaient que
les diplômés étaient mal préparés à occuper un emploi.
À l’inverse, les établissements d’enseignement se
disaient en grande majorité d’avis — à hauteur de plus
de 83 % — que leurs diplômés étaient prêts à occuper
un emploi5.
Il en résulte en outre une pénurie de compétences dans
certains secteurs, ce qui se traduirait notamment par
une moins-value de l’ordre de 24,3 milliards de dollars
du PIB de l’Ontario6 et de 6 milliards en ColombieBritannique7, et ce, chaque année.
Parmi les secteurs dans lesquels une pénurie de
travailleurs qualifiés était observée par des employeurs
sondés à ce sujet, ceux le plus souvent cités sont
ceux du génie, des technologies de l’information, des
finances et des métiers spécialisés8. On notera toutefois
qu’il existe une forte demande pour les personnes
possédant des compétences générales. Par exemple,
en Colombie-Britannique, 73 % des employeurs
se disaient préoccupés du manque de travailleurs
possédant un esprit critique ou des aptitudes à
la résolution de problèmes, ainsi que d’autres
compétences notamment en matière de communication
verbale, de littératie et du travail en équipe9. De
nombreux professeurs d’université contestent ce point
1
http://www.oecd.org/edu/education-policy-outlook-2015-9789264225442-en.htm
2
Munro, Daniel, James Stuckey et Cameron MacLaine. Skills—Where Are We Today? The State of Skills and PSE in Canada. Ottawa, Le
Conference Board du Canada, Nov. 2014, p. ix.
3
http://www.oecd.org/canada/education-at-a-glance-2014-country-notes.htm
4
http://reports.weforum.org/global-competitiveness-report-2014-2015/economies/#indexId=GCI&economy=CAN
5
http://www.mckinsey.com/global_locations/north_america/canada/en/our_work
6
http://www.conferenceboard.ca/press/newsrelease/13-06-21/skills_shortages_cost_ontario_economy_billions_of_dollars_annually.aspx
7
http://www.conferenceboard.ca/press/newsrelease/15-02-05/british_columbia_economy_losing_billions_due_to_skills_shortage.aspx
8
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2014/03/Second-survey-report-skills-shortages-in-Canada-13-March-20141.pdf
9
http://www.conferenceboard.ca/press/newsrelease/15-02-05/british_columbia_economy_losing_billions_due_to_skills_shortage.aspx
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3
de vue. Ils soutiennent qu’il est irréaliste de la part
des employeurs de s’attendre à ce que les diplômés
soient déjà prêts à occuper un emploi et qu’il revient
plutôt aux employeurs eux-mêmes de renforcer
leurs programmes de formation afin de faciliter
l’adaptation des diplômés à leur milieu de travail10.
D’autres intervenants du secteur de l’enseignement
professionnel et technique affirment que leur modèle
d’apprentissage appliqué comporte également
l’enseignement des compétences générales.
Ceci étant, le parcours entre l’éducation et l’emploi
paraît plus fragmenté et complexe que jamais
auparavant. Au Canada, quelque 40 milliards de
dollars sont investis dans le secteur des études
postsecondaires (EPS), au sein duquel près de 250
établissements d’enseignement proposent plus de
18 000 programmes d’études11. L’on peut aisément
s’y perdre dans le nombre phénoménal d’options
proposées, la distinction entre les divers types
d’établissements d’enseignement postsecondaire est
souvent difficile à établir, et la transition des études à
l’emploi semble de plus en plus difficile à réaliser.
Le Conference Board recommande en outre un
meilleur arrimage entre les employeurs et les
établissements d’enseignement postsecondaire. Il n’est
pas le seul à militer en faveur d’une telle solution. Des
organismes représentant divers secteurs d’activité
conviennent de la nécessité d’une plus grande
coordination entre les employeurs et les établissements
d’enseignement, et ont d’ailleurs souvent exprimé
leurs doléances à cet égard.
Le secteur des EPS au Canada constitue un écosystème
à la fois vaste et complexe; il n’est pas facile pour
les étudiants ni les employeurs de s’y retrouver; il
est d’ailleurs tout aussi difficile de s’orienter dans
les méandres du marché du travail. Les études
postsecondaires sont aussi proposées dans le cadre
de systèmes disparates, sous la responsabilité de
divers gouvernements et offrant des programmes
et des diplômes d’études universitaires, collégiales,
techniques ou professionnelles. De surcroît, il faut
également distinguer entre :

les divers établissements d’études postsecondaires
(universités, écoles polytechniques, collèges
communautaires et cégeps du secteur public, et
collèges privés d’enseignement professionnel);

les différents types d’établissements (recherche,
formation générale, arts et lettres);

les divers types de programmes (formation
professionnelle, sciences appliquées et
technologies, sciences humaines, beaux-arts).
Afin de mieux saisir dans quelle mesure et dans
quelles circonstances les études postsecondaires,
toutes formes confondues, s’arriment aux besoins du
marché du travail, il faut tout d’abord distinguer ces
diverses formes puis recenser celles qui semblent les
plus pertinentes ou propices à la concertation avec
les employeurs. La réponse à la question de savoir
comment les employeurs pourraient être appelés
à participer à la conception du curriculum sera
différente dans chaque cas d’espèce. Par exemple,
s’agit-il de former des avocats ou des médecins ? des
mathématiciens ou des chimistes ? des économistes ou
des historiens ? des mécaniciens, des plombiers ou des
tuyauteurs ?
Il importe donc de reconnaître que la réflexion
au sujet de l’opportunité ou de la hauteur de la
participation de l’employeur et de l’adéquation entre
le curriculum et les besoins sera différente dans
chaque cas. Ce que l’on entend par « compétences
10
http://www.theglobeandmail.com/news/national/education/the-expectation-gap-students-and-universities-roles-in-preparing-for-lifeafter-grad/article21187004/page=all
11
http://www.educationau-incanada.ca/educationau-incanada/study-etudes/index.aspx?lang=fra
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d’employabilité » — et le rôle des employeurs dans
la définition de ces compétences — varie selon
qu’il s’agit d’une profession réglementée, de la
communauté des chercheurs, ou de diplômés d’une
école polytechnique ou d’un collège d’enseignement
professionnel.
Si l’on veut que le secteur des études postsecondaires
au Canada soit davantage en synchronisme avec
les débouchés qu’offre notre économie, il faudrait
que la participation des employeurs se traduise
concrètement dans la conception du curriculum
ou des acquis des apprentissages. La mise en place
de modalités claires, conviviales et efficientes
permettant de prendre en compte les besoins des
employeurs dans les systèmes d’éducation et de
formation favoriserait grandement la réussite des
diplômés dans le marché de l’emploi et la pratique
de la formation continue en tant que pierre d’assise
d’une main-d’œuvre fortement concurrentielle.
Il existe certainement diverses formes d’études
postsecondaires qui sont davantage pertinentes
ou propices à la concertation avec les employeurs.
D’ailleurs, les employeurs participent déjà à une
vaste gamme de programmes, principalement
dans le domaine des sciences appliquées et des
programmes de formation professionnelle. Par
contre, une foule d’autres programmes ne seraient
pas directement pertinents aux besoins d’un
employeur, par exemple les études médiévales
ou la philosophie, dans lesquels la participation
des employeurs ne serait pas opportune, mais qui
peuvent toutefois avoir une certaine pertinence sur le
plan des compétences générales.
En plus de contribuer à mieux préparer les étudiants
à occuper un emploi, les partenariats avec les
employeurs peuvent se révéler d’importants moteurs
d’innovation et de croissance économique. Certains
établissements d’enseignement et secteurs d’études
postsecondaires y excellent déjà, mais, étant donné
la cadence rapide des innovations technologiques,
la nouvelle dynamique des milieux de travail et
la forte concurrence internationale, nous devons
consolider et miser sur ces efforts si nous voulons
que davantage de nos gens talentueux réalisent leur
potentiel dans notre économie.
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5
LES OBSTACLES QUI SE DRESSENT ENTRE LES
EMPLOYEURS ET LE SYSTÈME D’ÉDUCATION
La variété est certes l’une des grandes forces du
système d’études postsecondaires canadien, mais elle
comporte également son lot de défis. Les étudiants,
les employeurs, voire même les établissements
postsecondaires eux-mêmes parfois, auraient besoin
des aptitudes de décryptage d’Alan Turing afin de bien
saisir les tenants et aboutissants du système, et ensuite
les compétences en navigation d’un Magellan pour
trouver le parcours le plus direct vers l’embauche, la
destination visée.
entre les employeurs et les établissements d’études
postsecondaires, cultiver de nouvelles compétences et
relations entre ces acteurs, et favoriser le partage des
idées.
« Une partie du problème réside dans le fait que,
pour les enseignants, les avocats, les médecins,
les tuyauteurs, les électriciens, bref peu importe
la profession ou le métier, les établissements
d’enseignement proposent un parcours
d’apprentissage ou de formation clair, mais ce n’est pas
le cas pour tout le monde », déplore Robert Carlyle,
directeur, Gestion stratégique des effectifs, à RBC
Banque Royale.
Les obstacles entre le secteur
des études postsecondaires et les
employeurs
Pourtant, cela ne devrait pas être si compliqué. Il
devrait être facile de voir quels choix éducatifs sont
offerts et vers quels emplois ces choix mènent, et de
pouvoir les comparer les uns les autres d’un bout à
l’autre du pays. Le système devrait permettre aux
étudiants de changer de discipline et d’acquérir de
l’expérience dans différents domaines. Les apprenants
de tous âges et de toutes les disciplines devraient
pouvoir avoir un avant-goût de la destination
(l’emploi) en acquérant de l’expérience en milieu de
travail, avant de se retrouver des années plus tard
dans un endroit qui ne ressemble pas tout à fait à ce
qu’annonçait la brochure. Pour y arriver, il faut que
l’information pertinente soit aisément accessible et
facile à comparer, lever les obstacles systémiques
12
Nous commencerons par l’examen des obstacles entre
le secteur des études postsecondaires, les employeurs,
les étudiants et les administrations gouvernementales.
Dans une entrevue au quotidien The Globe and Mail,
Janet Lane, de la Canada West Foundation, a formulé
le constat suivant : « Il n’y a pas de diplômé dont on
pourrait dire qu’il ou elle est “prêt à l’emploi”. Tout
le monde a besoin de recevoir de la formation. » Par
ailleurs, les données présentées dans l’enquête du
cabinet McKinsey révèlent l’écart considérable entre
les attentes des employeurs et ceux des établissements
postsecondaires quant à savoir quel niveau de
compétences doit avoir été acquis par les étudiants au
moment où ils commencent à occuper un emploi. Alors
que 83 % des établissements d’études postsecondaires
étaient d’avis que leurs diplômés étaient suffisamment
prêts à occuper un emploi, seulement 34 % des
employeurs étaient de cet avis; le Canada affiche ainsi
la plus forte disparité à cet égard parmi les dix pays
visés par l’enquête12.
L’un des moyens pouvant contribuer à combler
cet écart serait de favoriser la clarté et ainsi le
rapprochement entre ces deux solitudes, en s’assurant
http://www.mckinsey.com/~/media/McKinsey%20Offices/Canada/Latest%20thinking/PDFs/Youth_in_transition_Bridging_Canadas_
path_from_education_to_employment.ashx
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6
notamment que l’information diffusée soit meilleure.
Le fait de ne pas savoir quelles professions sont
en demande empêche certains établissements de
s’adapter et de veiller à ce que les champs d’études
proposés s’ajustent à l’évolution de la demande, alors
que l’absence de données comparables au sujet des
établissements d’enseignement entrave les efforts
des employeurs sur le plan du recrutement et de la
conclusion de partenariats stratégiques. Les lacunes
et les contraintes de l’Enquête nationale auprès des
diplômés ainsi que l’ancienne Enquête sur le lieu de
travail et les employés ont suscité des critiques de
la part autant du secteur des affaires que de celui
de l’enseignement, déplorant notamment qu’on
y limitait l’information disponible pouvant aider
toutes les parties à faire des choix plus éclairés13. Le
bulletin dressé plus tôt cette année par la Chambre
de commerce du Canada portant sur la qualité de
l’information sur le marché du travail faisait état
d’éléments particuliers à améliorer14.
Par ailleurs, la transition de la situation d’étudiant à
celle d’employé est souvent perçue comme étant un
passage obligé difficile à vivre, en particulier lorsqu’il
s’agit d’un premier emploi. La stratégie actuelle en
vertu de laquelle le financement des établissements
est accordé uniquement en fonction des inscriptions
à un programme donné a été critiquée du fait qu’elle
ne tient pas suffisamment compte de ce que les
étudiants feront une fois qu’ils auront terminé leurs
études15. L’enquête McKinsey révèle que seulement
9 % des établissements d’enseignement canadiens
coordonnent fréquemment leurs activités avec les
employeurs, et que 20 % n’effectuaient aucune
coordination avec les employeurs16. En outre, selon la
même enquête, parmi une liste de diverses activités
prioritaires, les universités canadiennes classaient au
8e rang seulement (sur 10) l’activité consistant à aider
leurs étudiants à trouver un emploi, et au 9e celle de
conclure des partenariats avec des entreprises. À titre
de comparaison, les collèges et instituts de formation
professionnelle canadiens classaient au 5e rang l’aide
à trouver un emploi pour leurs diplômés puis la
conclusion de partenariats avec des entreprises, au
6e rang.
Comme l’a souligné Robert Hardt, président-directeur
général de Siemens Canada17,la cadence rapide des
changements dans le milieu de travail entraînent
des changements tout aussi rapides dans les besoins
en matière de compétences. Il existe diverses façons
par lesquelles les employeurs et les établissements
postsecondaires peuvent travailler en concertation,
mais il existe également de nombreux obstacles de
nature institutionnelle et culturelle à franchir pour
y arriver.
13
http://www.theglobeandmail.com/news/politics/cities-footing-the-bill-for-data-gap-after-long-form-census-scrapped/article22695286/
14
http://www.chamber.ca/download.aspx?t=0&pid=3703f4f6-25ff-e411-bafe-000c29c04ade
15
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2015/03/Career-Ready-Ken-Coates-final-March-251.pdf
16
http://www.mckinsey.com/~/media/McKinsey%20Offices/Canada/Latest%20thinking/PDFs/Youth_in_transition_Bridging_Canadas_
path_from_education_to_employment.ashx
17
https://www.siemens.ca/web/portal/en/NewsEvents/Siemens-Canada-News/Pages/PSE-Strategy-for-Canada.aspx
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7
Source : Sondage McKinsey sur la transition des études à l’emploi (sept.-oct. 2013)
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8
Principaux décalages entre les
perspectives des établissements
postsecondaires et les employeurs
« Les études postsecondaires doivent en
premier lieu — que ce soit dans le cadre
d’un programme de sciences humaines ou
d’un programme d’études polytechniques
— préparer les étudiants non pas à occuper
un emploi, mais plutôt à des carrières qui
évolueront tout au long de leur vie. »
1.
L’incompréhension ou l’absence de
visibilité de leurs forces respectives — en
raison de la piètre qualité des données.
2.
L’incertitude quant au rôle que les
employeurs peuvent assumer dans le
système d’éducation ainsi qu’en ce qui a
trait au cadre de collaboration et à la vision
commune nécessaires afin d’établir un
mode d’apprentissage intégré au travail.
3.
L’écart en matière d’attentes quant
au niveau de préparation à l’emploi à
atteindre par les diplômés.
Todd Hirsh, économiste principal, ATB Financial
Les obstacles entre les diverses
administrations gouvernementales
En avril 2014, la Colombie-Britannique a lancé
une stratégie de dix ans sur le développement des
compétences, axée sur la constitution d’un bassin
suffisant de travailleurs qualifiés dans la province afin
de tirer le meilleur parti de ses ressources naturelles
abondantes, ayant en outre à l’esprit l’essor imminent
du secteur du gaz naturel liquéfié et l’impératif
de construire de vastes infrastructures complexes
afin d’assurer la livraison de ce produit sur les
marchés18. Quelques mois plus tard, et des milliers
de kilomètres plus à l’est, à Kitchener en Ontario,
le Collège Conestoga signait une convention-cadre
stratégique avec le gouvernement ontarien portant
sur l’enseignement de compétences, notamment en
matière de procédés de fabrication de pointe, de
création de contenus numériques et de dispositifs de
sécurité et de renseignements. Il s’agit de domaines
ciblés qui devraient en principe intéresser bon
nombre d’entreprises technologiques présentes dans
la région, dont la société BlackBerry19.
Le Canada étant, de par sa superficie, le deuxième
du monde, et puisque les moteurs économiques
de chaque région diffèrent de l’une à l’autre, les
compétences techniques requises diffèrent également
fortement d’une région à une autre. L’éducation
est une compétence provinciale ou territoriale : le
18
http://www.theglobeandmail.com/news/british-columbia/bc-to-boost-skills-training-in-public-education/article18317352/#dashboard/
follows/
19
http://www.tcu.gov.on.ca/pepg/publications/vision/ConestogaSMA.pdf
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9
gouvernement fédéral n’a donc pas de ministère de
l’Éducation. Le rôle du gouvernement fédéral dans
les études postsecondaires se limite à fournir des
transferts fiscaux aux provinces et aux territoires,
destinés à procurer des fonds de recherche, de l’aide
aux étudiants et aux apprentis, et des services en
matière d’enseignement postsecondaire aux Premières
Nations. Plusieurs provinces ont délégué à quelque 500
organismes dans l’ensemble du pays la responsabilité
de réglementer et d’établir des normes régissant la
formation pour un grand nombre de professions20. Le
Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) (CMEC),
chargé d’assurer la coordination de ces activités, a été
constitué par les provinces et les territoires en 1967.
Toutefois, selon le constat dressé dans un rapport
préparé par Bernard Simon, ses réalisations jusqu’à
présent sont plutôt mitigées21.
En juillet 2014, les ministres responsables de
l’éducation et du marché du travail des 13 provinces
et territoires du Canada s’engageaient à « paver la
voie à une meilleure adéquation entre les systèmes
d’éducation et de formation, et l’évolution des besoins
des marchés du travail canadiens22 ». Énonçant les
trois principes guidant leurs actions futures, ils
soulignaient notamment que « les partenariats et le
rapprochement avec le secteur des affaires, le milieu
syndical et les fournisseurs de services d’éducation
et de formation sont essentiels à la synergie entre les
systèmes d’éducation et de formation, et les marchés
du travail du Canada ». Une année plus tard, dans le
compte rendu de sa réunion du 2 juillet 2015, le CMEC
indique que les participants ont abordé des thèmes
importants, notamment les résultats de l’apprentissage,
les parcours et les transitions, sans toutefois faire état
d’actions concrètes. Les ministres se sont toutefois
engagés à faire connaître à la population au cours
des prochains mois « une trousse pancanadienne de
pratiques porteuses pour mieux aligner les systèmes
d’éducation et de formation sur l’évolution des besoins
des marchés du travail », recensant notamment les
pratiques où les programmes postsecondaires sont
adaptés à la demande sur le marché du travail23.
Bien que la question de l’alignement et de l’adéquation
des programmes postsecondaires semble au cœur des
préoccupations de bon nombre de ministres, la prise
de mesures concrètes à l’échelle provinciale semble
se limiter aux provinces de la Colombie-Britannique
(laquelle poursuit l’adaptation de son système
d’éducation aux besoins du marché du travail), de
la Saskatchewan (laquelle a entrepris des mesures
similaires) et de l’Ontario (laquelle est à revoir le
modèle de financement de ses universités, en mettant
également l’accent sur l’imputabilité).
Le paysage fragmenté constitué de 13 systèmes
d’éducation postsecondaire différents ne comporte
pas non plus d’épreuves d’évaluation uniformes ou
normalisées, et ne reconnaît toujours pas certains
titres de compétences obtenus dans d’autres provinces
ou territoires. Il n’existe aucun organisme national
d’agrément des titres de compétences des programmes
d’études postsecondaires ni d’organe impartial chargé
d’entériner le transfert de crédits. La reconnaissance
des titres de compétences acquises au pays semble tout
aussi problématique que la reconnaissance des titres de
compétences étrangers24.
20
https://www.ppforum.ca/sites/default/files/collaborative-federalism.pdf
21
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2013/12/Bernard-Simon-December-2013.pdf
22
http://www.cmec.ca/278/Press-Releases/Ministers-and-Key-Partners-Chart-Path-Forward-for-Education-and-Skills-in-Canada.html?id_
article=831
23
http://www.cmec.ca/278/Press-Releases/Press-Releases-Detail/Ministers-of-education-host-pan-canadian-aboriginal-educatorssymposium.html?id_article=874
24
http://www.tcu.gov.on.ca/pepg/audiences/universities/uff/uff_ConsultationPaper.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
10
La situation semble également varier selon le type
d’établissement d’études postsecondaires. Le ministère
de l’Éducation de chaque province accorde un
financement aux secteurs universitaire et collégial
en fonction du nombre d’inscriptions. Il se réserve
toutefois le droit de leur donner des directives ou
d’exiger des établissements recevant ces fonds de
lui communiquer leur plan stratégique et leur plan
d’activités. Le gouvernement, à tous les ordres, exerce
habituellement son influence par le truchement du
financement; or, le niveau de financement varie d’une
province à une autre, et la répartition des enveloppes
de financement varie également d’une province à
une autre ainsi que selon le type d’établissement
postsecondaire25.
« Les systèmes de données nationales se
rapportant à l’enseignement supérieur, la pierre
d’assise sur laquelle reposent l’élaboration des
politiques publiques s’appuyant sur des faits, la
recherche ainsi que les débats publics éclairés
au sujet des problématiques avec lesquelles sont
aux prises nos universités et nos collèges, sont
malheureusement des plus pitoyables. »
Glen Jones, titulaire de la Chaire de recherche de l’Ontario
en politiques et mesure de l’éducation postsecondaire26
L’on peut comprendre que les gouvernements
provinciaux souhaitent que leurs établissements
postsecondaires répondent aux besoins de leur
région respective afin de préparer à tout le moins
les étudiants en vue d’occuper un emploi dans
leur région. Idéalement, ils peuvent souhaiter voir
des établissements d’enseignement au cœur de
pôles d’expertise afin de susciter le développement
économique de la région et éventuellement bénéficier
à l’ensemble de la province, à l’instar de l’initiative
avec le Collège Conestoga dans la région KitchenerWaterloo, en Ontario.
25
http://www.conferenceboard.ca/Libraries/EDUC_PUBLIC/spse_nov2013_summitpaper_economic.sflb
26
http://forum.academica.ca/forum/data-in-decline-the-gradual-demise-of-canadas-national-data-systems-for-higher-education
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
11
Principales problématiques communes
à l’ensemble des administrations
gouvernementales
3.
Un trop grand nombre d’organismes
établissant des normes en matière
d’éducation et l’absence d’un système de
reconnaissance des titres de compétences.
1.
L’absence de données relatives à l’« offre »,
c’est-à-dire au sujet des diplômés,
désagrégées par titre de compétence et par
résultat.
4.
2.
Les lacunes des données relatives à la
« demande » disponibles à l’échelle locale,
régionale, provinciale ou territoriale et
nationale.
L’absence d’un leadership dynamique
propice à l’avènement d’une reconnaissance
mutuelle entre les provinces et les
territoires d’une part et les établissements
d’enseignement d’autre part.
5.
Les modèles de financement établis
uniquement en fonction du nombre
d’inscriptions, au lieu de tenir compte des
résultats.
Le portrait de l’éducation postsecondaire au Canada
Titres de compétences académiques
Certificat — programme d’une année ou moins
Certificat de compétence (programmes d’apprentissage) — le candidat doit établir avoir satisfait toutes
les exigences de la formation et réussi l’examen d’agrément
Diplôme — programme plus long que celui du certificat; la plupart des programmes collégiaux nécessitent deux années d’études
Grade d’associé — programme de deux ans, offert uniquement en Colombie-Britannique aux étudiants
ayant commencé des études postsecondaires au collège avant de poursuivre leurs études à l’université
Diplôme d’études appliquées — en règle générale, les baccalauréats sont offerts auprès de certains instituts et écoles polytechniques
Diplôme d’études supérieures — programme d’un ou deux ans, selon le cas, nécessitant généralement
comme préalable un baccalauréat
Baccalauréat — programme de trois ou quatre ans, selon le cas
Premier grade professionnel — nécessite comme préalable un baccalauréat mais considéré comme étant
un grade de premier cycle
Maîtrise — diplôme d’études supérieures qui suit normalement un diplôme de premier cycle et qui
nécessite une à deux années d’études; ce diplôme peut être décerné à la suite de la présentation d’un
mémoire ou d’une thèse (requise pour le grade de Ph.D.), ou de la formation magistrale (surtout dans le
cas de maîtrises menant à une attestation professionnelle (MBA, M.Ing., etc.)
Doctorat — grade le plus élevé
Sources : La Chambre de commerce du Canada; Centre d’information canadien sur les diplômes internationaux (CICDI), service du CMEC 27
27
http://cicic.ca/871/Read-more-information-about-the-Directory-of-Educational-Institutions-in-Canada/index.canada
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12
Source : Centre d’information canadien sur les diplômes internationaux (CICDI), service du CMEC
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13
Les obstacles au sein même de
l’écosystème des établissements
postsecondaires
Chris Williams, lauréat récipiendaire d’un Oscar, a
étudié à l’Université de Waterloo avant de poursuivre
ses études en animation cinématographique au
Collège Sheridan; son parcours est loin d’être
unique en son genre. L’approche des études menant
à un emploi dorénavant adoptée par bon nombre
d’étudiants afin de se dénicher un emploi intéressant
ou de se rendre incontournables et attrayants aux yeux
d’un employeur procure certes aux établissements
postsecondaires comme aux employeurs une souplesse
accrue afin de trouver des moyens de se concerter
et de conclure des partenariats novateurs. Selon
Statistique Canada, 49 % des titulaires d’un diplôme
universitaire de premier cycle ont continué à parfaire
leur éducation soit dans une université, soit dans un
collège communautaire, comparativement à seulement
35 % des titulaires d’un diplôme collégial28.
L’idée de former des coentreprises dans le domaine de
l’éducation entre des établissements postsecondaires
peut s’assimiler à la formation de coentreprises dans
le monde des affaires. Cependant, alors que selon
diverses évaluations la proportion de coentreprises
commerciales ayant échoué oscille entre 50 et 70 %
— sans même prendre en compte les coentreprises
potentielles qui ne se sont jamais concrétisées —, il
convient d’adopter une approche rigoureuse lorsqu’il
est envisagé de former un partenariat. Parmi les pierres
d’achoppement généralement citées, signalons les
problématiques liées au manque d’information sur
les objectifs et les capacités de chacun des partenaires
éventuels; l’incertitude et l’impossibilité de mesurer
la qualité ou le rendement des activités réalisées; le
caractère irréversible de certaines initiatives; l’absence
de consensus sur les points de convergence; et le
rôle des organismes de réglementation29. En dernière
analyse, il se pourrait bien que la mise en place d’un
système pancanadien de transfert de crédits et de
reconnaissance de titres de compétences pourrait
s’avérer la solution, pourtant insaisissable jusqu’à
présent.
Les lignes de démarcation entre les divers types
d’établissements postsecondaires à l’extérieur du
Québec sont de plus en plus brouillées : 34 collèges,
instituts et écoles polytechniques proposent
maintenant quelque 209 programmes menant
à l’obtention d’un baccalauréat alors que les
universités offrent de plus en plus de programmes
assortis de stages en entreprise. Les établissements
postsecondaires se voient trop souvent comme étant en
concurrence les uns contre les autres afin de s’attirer la
clientèle étudiante, résultant en un dédoublement de
ressources qui se raréfient. Cette situation s’explique
entre autres par le modèle d’entreprise privilégié
par bon nombre d’établissements postsecondaires
visant à inciter les étudiants à rester au sein de leur
établissement jusqu’à la fin de leur programme
d’études30. L’on voit poindre toutefois les signes
d’une collaboration accrue entre divers types
d’établissements postsecondaires. Le site internet
ONTransfer.ca, fourni par le Conseil sur l’articulation
et le transfert de l’Ontario, contient près d’une centaine
de programmes collaboratifs établis entre des collèges
et des universités.
Une autre initiative positive, le lancement en
septembre 2014, par les organismes Universités
Canada et Collèges et instituts Canada, d’un cadre
de collaboration conjoint vise à favoriser l’atteinte
des objectifs qu’ils partagent, soit le renforcement
de la qualité au sein du secteur dans son ensemble,
l’échange de pratiques novatrices et la poursuite du
parcours approprié pour les étudiants tout au long de
leurs apprentissages.
28
http://www.statcan.gc.ca/daily-quotidien/141114/dq141114b-eng.htm
29
http://www.heqco.ca/SiteCollectionDocuments/Making%20College-University%20Cooperation%20Work.pdf
30
http://www.conferenceboard.ca/Libraries/EDUC_PUBLIC/spse_nov2013_summitpaper_economic.sflb
31
http://www.macleans.ca/work/jobs/the-myths-about-canadas-skills-gap/
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14
Les gouvernements ont pris acte d’un obstacle à la
mobilité des étudiants, soit celui de la reconnaissance
entre les divers établissements postsecondaires des
crédits, de l’expérience et des compétences acquises
par les étudiants. Le CMEC a fait de l’amélioration
des modalités de transfert des crédits entre les divers
établissements l’une de ses priorités. Ceci étant, les
étudiants sont laissés à eux seuls dans l’éventualité
d’un traitement incohérent de leurs crédits par les
divers établissements une fois leur transfert effectué.
Enfin, il est ardu de comparer les divers établissements
et le marché du travail d’une région à une autre en
raison de l’absence de données nationales. L’Ontario,
l’Alberta et la Colombie-Britannique réalisent des
enquêtes sur le marché de l’emploi, mais les autres
provinces doivent se contenter des données résultant
d’enquêtes nationales dont la fréquence laisse à désirer
sinon tenter de récupérer des informations à ce sujet
en consultant des études effectuées par des tiers31. Les
établissements d’éducation font certes la promotion
de la réussite scolaire, mais ils mesurent la réussite de
manière plutôt inégale. Dans un tel contexte, il devient
très difficile de prendre des décisions éclairées au sujet
de la carrière que l’on veut poursuivre et du meilleur
chemin pour y arriver.
31
32
« Malgré le fait qu’il arrive souvent que les
étudiants modifient leur principal choix d’option
et changent même complètement de programme
d’études, le système postsecondaire s’avère
généralement peu souple, et il est difficile de
s’y retrouver. La présence d’obstacles artificiels
et culturels entravent la mobilité des étudiants
entre les divers établissements et compliquent
la tâche de ceux qui voudraient suivre une
formation assortie d’un stage en milieu de
travail avec le parrainage d’un employeur ou un
programme d’apprentissage en milieu de travail. »
Ken Coates, professeur et titulaire de la Chaire de
recherche du Canada sur l’innovation régionale à la
Johnson-Shoyama Graduate School of Public Policy à
l’Université de la Saskatchewan32
Principales problématiques
1.
L’absence d’un cadre objectif et national
permettant de comparer le rendement
des divers établissements à l’aide
de paramètres de mesure évaluant
l’embauche.
2.
Le manque d’information sur le marché
du travail permettant d’évaluer les
emplois émergents et l’évolution des
métiers et des professions en demande.
http://www.macleans.ca/work/jobs/the-myths-about-canadas-skills-gap/
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2015/03/Career-Ready-Ken-Coates-final-March-251.pdf
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15
Les obstacles à la transition de carrière
des étudiants
Les étudiants sont assurément les pièces les plus
importantes de ce casse-tête, étant à la fois les clients
et les produits du système des études postsecondaires.
Entre 41 et 50 % des diplômés se retrouvent à la fin
de leurs études avec un endettement pouvant varier
de 15 000 $ à 41 000 $ selon le titre ou le diplôme
convoité33. La plupart des étudiants s’attendent à
ce qu’une bonne éducation devrait mener à un bon
emploi dans le domaine qu’ils ont choisi.
Or, une fois leurs études achevées, les diplômés sont
souvent confrontés à une pénurie d’emplois dans leur
domaine de prédilection, ou on exige d’eux qu’ils
acquièrent davantage d’expérience34. Il se pourrait
qu’en conséquence plusieurs poursuivent leurs
études afin d’acquérir des compétences plus pointues
dans leur domaine, ou pour acquérir de l’expérience
pratique dans leur domaine en s’inscrivant à des
programmes offrant une option travail-études ou des
stages en milieu de travail. Les employeurs s’attendent
à ce que les diplômés arrivent avec des compétences
générales en plus de connaissances et d’une formation
technique, de manière à mieux tirer profit de la
formation en milieu de travail et ainsi réussir dans
leurs nouvelles fonctions une fois embauchés35. (Les
rôles, responsabilités et motivations des employeurs
dans la formation de leurs nouveaux employés ou
de leurs employés actuels font l’objet d’un rapport
produit par la Chambre de commerce du Canada
intitulé Relèvement des compétences de la main-d’œuvre :
formation parrainée par l’employeur et correction des
pénuries de compétences.)
L’absence de données comparables sur le marché
du travail ainsi que sur la performance des divers
établissements postsecondaires rend plus ardue la prise
de décisions éclairées relativement au parcours ou à la
carrière à choisir. Le professeur Lyons, de l’Université
de Guelph, a publié un article dans lequel il conseillait
aux étudiants d’ajuster leurs attentes initiales quant
à la carrière qu’ils souhaitaient entreprendre36. Il
souligne en outre que plusieurs étudiants choisissent
leurs cours de manière à retarder leur décision quant
à la carrière qu’ils choisiront d’entreprendre, un choix
auquel plusieurs ne réfléchiront qu’à l’approche de la
fin de leurs études. Cela signifie qu’un grand nombre
d’étudiants n’ont pas vraiment pris le temps de
réfléchir à la possibilité d’acquérir de l’expérience de
travail pendant leurs études afin de les aider à choisir
un cheminement de carrière précis, ou du moins
écarter certains d’entre eux.
33
http://www.statcan.gc.ca/daily-quotidien/141114/dq141114b-eng.htm and http://www.cbc.ca/news/canada/average-student-debtdifficult-to-pay-off-delays-life-milestones-1.2534974
34
http://www.heqco.ca/en-ca/Research/ResPub/Pages/The-Great-Skills-Divide-Bridging-the-Divide.aspx
35
Ibid.
36
http://www.uoguelph.ca/news/2014/06/young_people_need_change_goals_for_employment_prof.html
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16
PARCOURS VERS L’EMPLOI
Écoles primaires et secondaires
Programmes
d’apprentissage (métiers)
Apprentissage en milieu
de travail (avec un ouvrier
Collèges, instituts, cégeps, collèges
universitaires et écoles polytechniques
Rattrapage scolaire
(au besoin)
qualifié, un compagnon)
CERTIFICAT
(1 an)
Composante de cours
magistraux, offerts au
collège ou dans un centre
de formation syndical
Universités
Programme de
transfert vers
l’université (1re et 2e
années)
DIPLÔME – Technicien,
technicienne (2 ans)
DIPLÔME
OU TITRE
CONJOINT
BACCALAURÉAT
(3 ou 4 ans)
1re année
2e année
DIPLÔME –
Technologue (3 ans)
3e année
BACCALAURÉAT
(4 ans)
4e année
CERTIFICAT OU DIPLÔME DE CYCLES
SUPÉRIEURS (1 an)
MAÎTRISE
(1 ou 2 ans)
DOCTORAT
(2 à 5 ans)
MARCHÉ DU TRAVAIL
Source: Polytechnics Canada
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17
Plusieurs étudiants n’ont pas accès à des conseils sur
les choix de carrière qui s’offrent à eux, en particulier
lorsqu’ils sont jeunes, à un moment pourtant où
cela serait le plus opportun. Lorsqu’ils songent à la
carrière qu’ils pourraient entreprendre, ils s’adressent
le plus souvent à leurs parents ou leurs amis pour
obtenir conseils et informations37, ce qui n’est pas
nécessairement idéal. Un article paru dans le Toronto
Star soulignait les trois principales problématiques
avec lesquelles doivent composer les étudiants à la
recherche de conseils au sujet des diverses carrières
qu’ils pourraient envisager : leurs parents peuvent
leur donner des conseils mal fondés ou sans euxmêmes être suffisamment renseignés; l’orientation
professionnelle à l’intention des étudiants est souvent
de qualité inégale et doit être améliorée; et, enfin, les
jeunes ne réfléchissent pas suffisamment aux carrières
qu’ils pourraient entreprendre plus tard38.
Malgré la panoplie de parcours d’études et de
diplômes proposés, des attestations décernées par
divers secteurs industriels aux diplômes délivrés
après deux ou quatre années d’études, « les étudiants
ne savent pas vraiment quel diplôme choisir, et les
employeurs ne savent pas vraiment comment évaluer
la multitude de diplômes proposés39 ».
Principales problématiques
1.
L’impossibilité de comparer directement
les divers programmes d’études proposés
et la performance de chacun des
établissements.
2.
La méconnaissance des divers services
d’orientation professionnelle offerts.
3.
L’inégalité des normes des services
d’orientation professionnelle proposés et
les lacunes en ce qui touche le soutien.
4.
La difficulté d’acquérir de l’expérience
dans le domaine professionnel de
prédilection de l’étudiant.
5.
Le manque de priorisation des étudiants
de l’importance de réfléchir aux
possibilités de carrière qu’ils pourraient
entreprendre.
6.
Les obstacles à la mobilité en ce
qui concerne autant les études
postsecondaires que l’emploi.
7.
La méconnaissance de la pertinence
du titre ou du diplôme obtenu par
l’étudiant en lien avec le marché du
travail, et comment ces titres ou diplômes
s’arriment aux besoins des divers
secteurs d’activité.
37
http://ceric.ca/national-survey-accessing-career-and-employment-counselling-services/
38
http://www.thestar.com/news/insight/2012/12/01/atkinson_series_career_education_lacking_in_canada.html
39
http://www.huffingtonpost.com/jim-gibbons/what-credentials-mean-in_b_7595784.html
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
18
Les mesures qui ont été prises afin de surmonter
ces obstacles
Il existe une collaboration entre les établissements
postsecondaires et les employeurs à divers niveaux
— plusieurs établissements mettent de l’avant
l’existence de cette collaboration à titre d’élément
fondamental de l’offre de services de qualité qu’ils
proposent aux étudiants songeant à s’y inscrire. Le
professeur Stephen Toope établit un parallèle entre
les défis auxquels sont confrontés les fournisseurs
de services éducatifs et les autres secteurs d’activité
offrant du contenu. Il affirme que les établissements
d’enseignement, en raison de la somme considérable
d’information accessible dans Internet, devront soit se
fier à l’avantage concurrentiel que leur procure leur
renommée, soit proposer une expérience étudiante
vraiment distinctive comprenant notamment l’accès à
des stages en entreprise, s’ils veulent se démarquer40.
On observe d’ailleurs l’émergence de telles initiatives
partout au pays, selon diverses modalités. La
collaboration peut prendre la forme de bourses offertes
par des entreprises ou de l’acceptation ponctuelle de
stagiaires, ou encore de partenariats plus structurés en
matière de formation ou de recherche. Dans certaines
régions du pays, ces partenariats sont particulièrement
axés sur l’innovation et stimulent le développement
économique dans des secteurs de première importance.
Nous examinerons ici le type de collaborations qui
contribuent à intégrer les besoins en compétences
des employeurs au sein même du système des études
postsecondaires.
40
1. Établissement de comités consultatifs
des programmes
La cadence effrénée du changement bouscule la
quiétude de plusieurs grandes entreprises pourtant
dotées d’importantes ressources; entre autres, des
géants comme Kodak et Blockbuster peinent à
s’adapter à l’innovation perturbant leurs activités
traditionnelles. Des secteurs d’activité ont été
complètement transformés par les changements
technologiques, notamment le secteur des médias
et celui du commerce de détail. Alors que ces
changements se produisent à une cadence aussi
rapide et que peu de secteurs seront épargnés par
des changements aussi profonds, il sera assurément
avantageux qu’il y ait des interactions de plus en plus
systématiques entre employeurs et établissements
d’enseignement, en particulier dans les programmes
comportant des études à caractère plus technique.
Dans plusieurs provinces, les collèges
communautaires, écoles polytechniques, instituts
de technologie ou cégeps sont requis ou choisissent
d’établir un comité consultatif des programmes pour
chacun des programmes ou secteurs d’études qu’ils
offrent. Ces comités sont composés d’experts du
domaine visé et d’employeurs de la région desservie
par l’établissement d’enseignement, et sont chargés
de veiller à la pertinence et à l’actualisation des
programmes en fonction des tendances observées
dans le secteur d’activité concerné. Lorsqu’ils sont
obligatoires, le gouvernement exige que les comités
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2014/09/Toope-CCCE-Paper-FINAL.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
19
consultatifs des programmes passent en revue les
programmes de manière périodique et présentent
un rapport de leurs activités à l’organe directeur de
l’établissement responsable de l’assurance de la qualité
des services offerts. Ces comités peuvent notamment
être chargés de recenser les ressources pertinentes et
les occasions de stages en entreprise ou de placement
des diplômés à la fin de leur programme d’études41.
Ces partenariats bénéficient à chacun des partenaires,
les établissements d’enseignement ayant accès à des
renseignements stratégiques qu’il leur serait difficile
d’obtenir autrement et les employeurs ayant accès à
des diplômés mieux préparés en plus d’être exposés
à des idées et de rencontrer des candidats talentueux
issus de ces établissements.
Les écoles polytechniques sont certes les précurseurs
de la collaboration avec les employeurs. Leur mission
étant axée sur la prestation d’un enseignement et
d’une formation pratiques de manière à combler les
besoins spécifiques des employeurs en travailleurs
compétents, ils doivent demeurer constamment à
l’écoute des besoins du marché du travail. À titre
d’illustration, l’école SAIT Polytechnic de Calgary s’est
dotée de 65 comités consultatifs auxquels participent
quelque 1000 représentants d’entreprises et de divers
secteurs d’activité afin de conseiller l’école au sujet
des programmes, des stages en entreprise et des
apprentissages à acquérir42.
« La composition des comités consultatifs diffère
d’un programme à l’autre; mais, si des programmes
se recoupent, on peut regrouper les comités
sous un seul », explique Laura Jo Gunter, viceprésidente principale, Affaires académiques, au
George Brown College, un établissement assurant un
suivi constant des activités de leurs divers comités
consultatifs. « Nos comités consultatifs nous aident
à rester au courant du fonctionnement des divers
secteurs d’activité. Ils ne nous fournissent pas
seulement des conseils de nature technique, mais aussi
de précieux conseils sur le mode de fonctionnement
des divers secteurs d’activité. »
Ceci étant, ces comités sont composés de représentants
des employeurs visés, et il convient donc de noter
que ceux-ci ne sont pas nécessairement membres de
l’association professionnelle nationale de leur secteur
d’activité ou du conseil sectoriel de leur industrie.
Le succès des comités consultatifs a suscité leur
émulation dans d’autres établissements et des
universités qui ne sont pas tenus de se doter de
tels comités. Leurs retombées concrètes se font
toutefois davantage sentir dans les programmes de
formation professionnelle, observe Elizabeth Cannon,
précédemment doyenne de la Faculté de génie de
l’Université de Calgary et présentement à la tête
de l’université : « Nous offrons un programme en
génie, et les entreprises viennent ici pour recruter des
ingénieurs — il y a un lien direct entre le programme et
la profession. »
« Lorsque l’université a une faculté des arts, proposant
par exemple un programme d’histoire, quels sont
les employeurs potentiels pour les diplômés ? »
s’interroge-t-elle. « Les employeurs recrutant de tels
diplômés ne sont pas faciles à repérer. La Faculté des
arts s’est dotée d’un comité consultatif chargé de nous
fournir de l’information pertinente, notamment à
l’échelle macro. »
2. Programmes d’apprentissage intégré
au travail
Les programmes d’apprentissage intégré au travail,
ou apprentissage par l’expérience, sont l’une des
modalités de collaboration les plus couramment
utilisées par les employeurs et les établissements
d’enseignement. Ces initiatives se déclinent de diverses
façons, soit des programmes travail-études, des stages
en entreprise, des stages pratiques, des projets de
recherche appliquée ou d’apprentissage du service
communautaire (voir la définition de chaque type
de programme à la page suivante). Les programmes
travail-études sont particulièrement prisés par
certaines des plus grandes entreprises canadiennes,
41
http://www.senecacollege.ca/about/advisory/
42
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2013/12/Bernard-Simon-December-2013.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
20
dont RBC et IBM. L’enquête McKinsey révèle
notamment que les étudiants estimaient apprendre
davantage au cours de la formation en milieu de travail
et en acquérant de l’expérience pratique en milieu
de travail. Par ailleurs, selon une étude réalisée par
Gallup, les étudiants ayant participé à un programme
d’apprentissage par l’expérience avaient deux fois plus
de chances d’être motivés à travailler. Selon la même
étude, les étudiants ayant participé à un programme
travail-études, de service communautaire, d’échange
international ou de recherche fondamentale dans un
laboratoire possédaient davantage de compétences
générales, un atout prisé par les employeurs43.
L’apprentissage intégré au travail est également
un important outil d’enseignement à la disposition
des établissements postsecondaires. L’Université
de Waterloo compte le plus important programme
travail-études, avec environ 19 000 étudiants inscrits
à cette modalité offerte en partenariat avec quelque
5 200 employeurs44. Ceci dit, les établissements
d’enseignement ne devraient pas songer à élargir
leur programme travail-études sans tout d’abord
réfléchir aux façons dont ils composeraient avec des
contraintes éventuelles chez les employeurs lors d’un
ralentissement économique comme celui survenu
en 2008-2009, souligne Richard Wiggers, directeur
général, Recherche et programmes, HEQCO. Il
signale que la demande de stages en milieu de travail
dépasse souvent l’offre de places, et les étudiants
pourraient alors devoir mettre en pause leur carrière
professionnelle s’ils n’arrivent pas à compléter leur
Sept types de programmes d’apprentissage intégré au travail
L’apprentissage intégré au travail est une
expression servant à désigner « le processus par
lequel les étudiants apprennent par l’expérience
dans un milieu didactique ainsi que dans
un milieu de travail. » Le Conseil ontarien
de la qualité de l’enseignement supérieur
(HEQCO) a recensé sept types de programmes
d’apprentissage intégré au travail :
•
Travail-études : alternance entre une période
de cours didactiques et d’acquisition
d’expérience en exerçant un travail
rémunéré, dans le cadre d’un programme
conçu ou approuvé par un collège ou une
université
•
Stage en milieu de travail : formation
combinant un apprentissage pratique
en milieu de travail et un apprentissage
didactique, menant à un certificat de
compétence
Stage : expérience de travail en lien avec
le programme d’études, acquise dans un
milieu de travail professionnel
•
Projet de recherche appliquée : projet
réalisé par l’étudiant et visant à résoudre
une problématique donnée de nature
commerciale ou sectorielle
•
Stage pratique : expérience concrète dans un
milieu de travail
•
•
Stage professionnel obligatoire :
accomplissement du nombre d’heures de
travail exigées pour obtenir un permis
d’exercice ou un titre professionnel, ou pour
être inscrit auprès d’un collège ou d’un
ordre professionnel
Apprentissage du service communautaire :
projet réalisé par l’étudiant et visant à
répondre à des besoins précis au sein d’une
collectivité ou un enjeu mondial
•
Source : Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement
supérieur
43
http://www.theglobeandmail.com/news/national/education/the-expectation-gap-students-and-universities-roles-in-preparing-for-lifeafter-grad/article21187004/?page=all
44
http://www.theglobeandmail.com/report-on-business/rob-commentary/for-students-and-employers-co-op-education-is-a-bridge-to-awider-world/article24316976/
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
21
stage en milieu de travail durant leur programme
d’études. Il souligne également que l’apprentissage
intégré au travail n’est pas le seul moyen par lequel
les étudiants peuvent acquérir de l’expérience de
travail. En effet, plusieurs étudiants acquièrent des
compétences en lien avec leur carrière dans le cadre
d’un emploi à temps partiel, d’un emploi d’été ou
d’activités parallèles au programme. « L’accent mis sur
l’apprentissage intégré au travail pourrait bien imposer
aux établissements postsecondaires le fardeau d’offrir
de l’expérience de travail à leurs étudiants alors que
plusieurs d’entre eux trouvaient eux-mêmes du travail
auparavant », précise M. Wiggers.
Il n’y a pas de données nationales sur les programmes
d’apprentissage intégré au travail; l’accès à de telles
données, en plus de témoignages de participants à ces
programmes, pourrait certes contribuer à inciter un
plus grand nombre d’employeurs à y participer.
Les projets de recherche appliquée permettent aux
entreprises de présenter des problèmes ou des défis
aux étudiants postsecondaires afin qu’ils trouvent
des solutions. Les résultats peuvent donner à ces
45
entreprises des occasions de commercialisation,
ainsi qu’une augmentation de la productivité et
une amélioration des capacités technologiques. Les
étudiants y trouvent aussi des avantages puisqu’en
aidant l’industrie à augmenter l’innovation et la
productivité, ils acquièrent des compétences en
innovation, ce qui fait d’eux des candidats intéressants.
D’autres approches novatrices destinées à favoriser
l’acquisition d’expérience par les étudiants sont
en train de voir le jour. Ainsi, la ludification
s’inscrit parmi ces tendances; cette méthode aide à
l’apprentissage de la résolution de problèmes et à
évaluer les compétences acquises par l’étudiant en
l’appelant à résoudre des cas simulés de situations
concrètes. Ces approches procurent également aux
établissements et aux employeurs autant d’occasions
de collaborer ensemble à la conception de ces épreuves.
L’organisme TalentEgg.ca, une ressource en ligne de
recherche d’emplois à l’intention des étudiants, a lancé
une plateforme permettant notamment aux entreprises
de téléverser des épreuves afin que les étudiants qui le
désirent tentent de les résoudre45.
http://academica.ca/top-ten/%E2%80%9Ctalentegg-challenges%E2%80%9D-help-students-gain-career-experience
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
22
3. Autres types de partenariats avec
des entreprises
Dans le cas de l’Université de Calgary, l’un de ses
atouts consiste en sa situation à proximité d’un vaste
bassin d’employeurs potentiels. « Nous avons intérêt
à les consulter afin d’obtenir de l’information de
leur part au sujet des tendances du marché et leur
avis au sujet de leurs attentes envers les étudiants
inscrits à nos programmes et dans nos facultés »,
signale Elizabeth Cannon, doyenne de l’Université.
« Nous nous attendons à ce que nos cadres supérieurs
et les professeurs de l’université interpellent leur
communauté professionnelle respective, y faisant la
promotion de leurs programmes et de leurs étudiants
comme étant des employés en devenir. »
Prenant acte de l’importance de favoriser la synergie
des compétences en les regroupant dans un même
lieu, l’Université de Toronto a annoncé la construction
de son nouveau Centre for Engineering Innovation &
Entrepreneurship (Centre d’études en innovation et
en entrepreneuriat en génie). Ce nouveau bâtiment
traduira l’esprit de l’avenir dans ce domaine et a été
conçu en intégrant les concepts de la technologie et
de la collaboration46. Cette même logique inspirera
les contacts entre les employeurs, les étudiants et le
personnel enseignant.
Les employeurs peuvent tisser des liens avec les
établissements postsecondaires de diverses façons.
Par exemple, IBM a lancé à l’interne le programme
Transition to Teaching à l’intention de ses employés
à la veille de la retraite afin de leur donner l’occasion
d’acquérir des compétences en enseignement de
manière à compenser le manque de personnel
enseignant des matières en lien avec le programme
STEM et afin d’établir ainsi des partenariats avec des
collèges et des universités47. Il s’agit d’une initiative
parmi d’autres par l’entremise desquelles IBM a établi
des collaborations directement avec le secteur de
l’éducation afin de contribuer au développement des
compétences.
Outre les matières de base qui leur sont enseignées,
les étudiants ont également soif d’acquérir des
compétences complémentaires, notamment en ce qui
a trait aux technologies, nouvelles et émergentes, et
à la gestion d’entreprises — les entreprises peuvent
certainement contribuer à ces initiatives48. Cela
passe souvent par l’établissement de partenariats
et de nouveaux modes de collaboration en vue de
la conception des programmes didactiques requis.
Plusieurs programmes intègrent dorénavant des
éléments à caractère commercial; c’est notamment le
cas à l’Université McGill, alors que celle-ci a introduit
un cours sur les aspects commerciaux en musique
afin d’aider les musiciens qu’elle forme à tirer une
meilleure subsistance de leur expertise unique49.
L’Université de Windsor propose un cours présentant
aux étudiants de quelle manière l’entrepreneuriat a
une incidence dans toutes les disciplines50.
Les programmes de certificat d’études supérieures
sont une façon relativement nouvelle pour les
établissements postsecondaires de répondre aux
demandes des employeurs qui cherchent des diplômés
prêts à l’emploi. L’exigence minimale demandée
pour ces programmes d’un ou deux ans est un
diplôme postsecondaire, généralement un
baccalauréat. Polytechnics Canada rapporte que
75 % des programmes de certificat d’études
supérieures de ses membres comprennent une
composante d’apprentissage intégré au travail.
On observe également l’émergence d’autres initiatives
prometteuses alors que des départements de divers
établissements postsecondaires ont établi des
collaborations entre eux. Ainsi, l’École de gestion
John-Molson de l’Université Concordia, à Montréal, a
récemment établi un projet-pilote axé sur l’innovation
en matière d’interventions chirurgicales. Le projet
a arrimé l’expertise de deux étudiants au MBA de
l’Université Concordia, de deux étudiants en chirurgie
de l’Université McGill et de deux étudiants en génie de
l’École de technologie supérieure (ETS) de Montréal.
Non seulement ce projet a-t-il permis de produire un
appareil donnant une rétroaction en temps réel durant
46
http://news.engineering.utoronto.ca/ceie_groundbreaking/
47
http://www.ibm.com/ibm/responsibility/teaching.shtml
48
http://www.palgrave-journals.com/articles/palcomms20151
49
http://www.macleans.ca/education/taking-care-of-business/
50
http://www.theglobeandmail.com/news/national/education/the-expectation-gap-students-and-universities-roles-in-preparing-for-lifeafter-grad/article21187004/?page=all
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
23
la pratique de la RCR, mais il a aussi donné l’occasion
aux étudiants de se familiariser avec des compétences
diversifiées et complémentaires51. En 2014, la
société Siemens a fondé l’Académie d’ingénierie
et de technologie de Siemens Canada. Celle-ci
collabore directement avec cinq instituts canadiens
d’enseignement supérieur afin d’offrir l’occasion
d’acquérir de l’expérience concrète en milieu de travail
à une trentaine d’étudiants par année bien avant la fin
de leurs études52.
4. Conseils sectoriels et associations
industrielles
Les conseils sectoriels, établis à l’origine grâce à
une dotation de fonds fédéraux, ont été constitués
en fonction des divers domaines professionnels ou
sectoriels afin d’effectuer de la recherche sur divers
enjeux liés au marché du travail et de mettre au point
des outils destinés à combler les lacunes observées.
Les conseils sectoriels sont aujourd’hui chargés de
faire connaître les compétences généralement requises
dans leur secteur respectif en plus de repérer les
tendances émergentes pouvant avoir une incidence
sur les besoins à venir en main-d’œuvre spécialisée.
Les associations industrielles constituent également de
bons forums pour discuter des enjeux et faire valoir
leurs propositions relativement aux enjeux en matière
de développement des compétences.
Dans le budget de 2015, le gouvernement fédéral a
annoncé qu’il effectuerait un investissement de 65
millions de dollars à l’intention d’associations de
gens d’affaires et de l’industrie pour leur permettre
de travailler avec les établissements d’enseignement
postsecondaire qui le souhaitent pour mieux
faire concorder les programmes de cours avec les
besoins des employeurs53. La formulation finale des
programmes demeurerait du ressort des établissements
d’enseignement, mais les employeurs sont invités
à partager avec eux leur savoir, leur savoir-faire
et les outils qu’ils proposent afin d’enrichir les
apprentissages de leurs étudiants. Pour certains
programmes, notamment dans le domaine des
technologies de l’information et des communications,
leurs conseils sur la rédaction des programmes de
cours sont essentiels.
Les associations peuvent également avoir une
place de premier plan dans la conception d’outils
destinés à appuyer les étudiants, les employeurs et
les établissements d’enseignement. En Ontario, le
gouvernement provincial a investi un montant de
1,2 million de dollars dans la mise à niveau de la
plateforme de réseautage en carrières Magnet, mise au
point à l’Université Ryerson à Toronto avec le concours
de la Chambre de commerce de l’Ontario. Cet outil
fournit de l’information pertinente sur le marché de
l’emploi et des liens avec quelque 60 000 entreprises
ontariennes, en collaboration avec 17 collèges et
universités de la province54.
Afin de répondre à des besoins de même nature au
Royaume-Uni, la Confederation of British Industries a
travaillé de concert avec la National Union of Students
à la préparation d’un guide décrivant l’employabilité,
sa valeur intrinsèque et les moyens de l’améliorer55.
Aux États-Unis, le National Network of Business and
Industry Associations collabore avec divers partenaires
au lancement du projet Connecting Credentials, un
document-cadre utilisant une terminologie commune
afin de définir les divers titres de compétences et leur
utilité pour leurs titulaires, qu’il s’agisse de diplômes
ou de certificats, de permis ou d’accréditations,
d’insignes ou de micro-titres.
51
http://business.financialpost.com/executive/business-education/a-new-way-of-mba-thinking-pulls-on-outside-disciplines
52
https://www.siemens.ca/web/portal/en/NewsEvents/Siemens-Canada-News/Pages/PSE-Strategy-for-Canada.aspx
53
http://www.budget.gc.ca/2015/docs/plan/ch3-3-eng.html
54
http://academica.ca/top-ten/institutions-partner-magnet-career-networking-platform
55
http://educationandskills.cbi.org.uk/reports
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
24
Ce que l’on pourrait faire de plus pour arrimer
les études postsecondaires aux besoins en
matière de compétences
Le système de développement des compétences
est déjà beaucoup plus souple qu’il ne l’était jadis,
et les employeurs et les éducateurs travaillent en
collaboration plus que jamais auparavant. Certaines
des principales problématiques à cet égard découlent
de la nature fragmentée de l’ensemble du système
qui s’est développé au Canada dans ce domaine.
Le régime gouvernemental fédéré établi au Canada
comporte certains inconvénients, dont celui d’instaurer
une panoplie de règles et de normes bigarrées dans
l’ensemble du pays, ce qui complique la tâche des
employeurs souhaitant établir des collaborations
avec des établissements d’enseignement au-delà de
partenariats d’envergure ciblés à l’échelle locale.
Par contre, la diversité du système d’éducation
au Canada, qui s’étend sur plusieurs régions
géographiques et secteurs postsecondaires, constitue
une force à plusieurs égards. Toute réforme de ce
système doit veiller à maintenir la gamme inestimable
des approches en matière de développement des
compétences que l’on observe d’un bout à l’autre du
pays. Un système qui serait trop rigide ne pourrait
peut-être pas laisser suffisamment de souplesse à une
histoire de réussite comme celle du Collège Sheridan
pour évoluer en misant sur ce qui fait sa force, mais
il faut aussi que le système ne constitue pas en soi un
obstacle au développement des compétences.
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
25
Afin de surmonter les obstacles, il faut une plus
grande compréhension mutuelle et un plus grand
degré d’ouverture et de transparence entre les divers
acteurs afin que l’on puisse notamment établir des
comparaisons justes entre les divers programmes.
Cela exige une réforme du système de manière à
élaguer les mesures ou les restrictions superflues
bénéficiant à seulement quelques-uns, et afin
d’atténuer l’incertitude ambiante. Cela requiert
également du leadership en vue d’ouvrir la voie au
changement. Il faudra aussi consacrer des ressources
et prévoir des mesures incitatives pour favoriser la
réalisation des changements requis. Enfin, cela exige
que des organismes et des personnes issues d’horizons
différents travaillent effectivement ensemble, en
concertation, et sur le long terme.
Il existe plusieurs exemples dans le monde illustrant
les mesures que l’on peut envisager pour renforcer
le développement des compétences des étudiants
au Canada. Afin de nous assurer de disposer des
compétences requises pour combler les postes sur le
marché du travail actuel et en constante évolution, il
y a lieu de considérer certains facteurs fondamentaux
comme ceux que nous abordons ci-dessous.
Évaluer les résultats d’apprentissage
Une large part des doléances formulées par les
employeurs à l’égard du système d’éducation actuel
est attribuable au fait que bon nombre de nouveaux
employés issus du système d’éducation ne possèdent
pas certaines compétences cognitives de base comme
la littératie et la numératie56. S’ils disent vrai, alors cela
constitue un problème de taille, car les employeurs
sont peu disposés à devoir investir des ressources
dans l’acquisition de compétences dont ils estiment
qu’elles auraient dû avoir été acquises dans le cadre du
système d’études secondaires ou postsecondaires. Sans
connaître l’ampleur de la problématique à laquelle
nous sommes confrontés il devient très difficile
d’avancer des pistes de solution. Cette frustration a
été mise au jour par Harvey Weingarten notamment,
qui fait état du consensus international en la matière
et des tests déjà disponibles permettant de mesurer ces
compétences et de l’absence de volonté politique pour
les mettre en pratique57.
Un cadre d’évaluation des compétences servant
à mesurer et à comparer les établissements
d’enseignement et les programmes de cours dans
l’ensemble du pays aiderait grandement les étudiants
de même que les employeurs envisageant d’établir des
partenariats avec des établissements postsecondaires.
Tel que l’a souligné Stephen Toope, nous devons croire
que les étudiants prendront des décisions judicieuses si
nous mettons à leur disposition des informations utiles
et pertinentes58.
Au Canada à l’heure actuelle, chaque établissement
d’enseignement postsecondaire présente les résultats
de ses activités comme bon lui semble. Ceux œuvrant
au niveau collégial sont obligés de compiler des
données au sujet des indicateurs de rendement
clés (IRC), plusieurs d’entre eux compilant des
données au-delà de celles qui sont publiées par
l’administration provinciale ou territoriale dont ils
relèvent. L’absence de concordance ou d’uniformité
56
http://blog-en.heqco.ca/2014/02/harvey-p-weingarten-managing-for-quality-classifying-learning-outcomes/?_ga=1.9388213.1246365087.1
395430662
57
http://blog-en.heqco.ca/2014/02/harvey-p-weingarten-managing-for-quality-classifying-learning-outcomes/?_ga=1.9388213.1246365087.1
395430662
58
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2014/09/Toope-CCCE-Paper-FINAL.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
26
des données disponibles dans l’ensemble des
provinces et des territoires résulte en des lacunes en
ce qui a trait aux données nationales portant sur les
établissements postsecondaires pouvant servir afin de
les comparer les uns aux autres. L’Enquête nationale
auprès des diplômés doit être améliorée, administrée
régulièrement et ses résultats diffusés au public de
manière diligente. L’intégration d’un paramètre
de mesure de la satisfaction des employeurs serait
également un ajout souhaitable.
Parmi les pratiques exemplaires en ce qui concerne les
données disponibles au niveau provincial, signalons
la publication annuelle par Collèges Ontario des
indicateurs de rendement clés de ses établissements
postsecondaires, comprenant notamment les taux
de satisfaction, de diplomation et d’emploi, en plus
de l’évaluation de la qualité des programmes59; en
Colombie-Britannique et en Alberta, on publie une
enquête annuelle sur les résultats d’emploi des
étudiants portant sur la situation des diplômés deux
années après avoir obtenu leur diplôme60.
Pour ce qui touche les établissements, le
Data Dashboard instauré au Northern Alberta
Institute of Technology (NAIT) offre un exemple de la
publication de paramètres de mesure de rendement
illustrant le degré de satisfaction des promesses faites
aux étudiants et aux entreprises, notamment. Parmi
les autres paramètres publiés, on trouve le taux de
satisfaction des employeurs au regard des diplômés
qu’ils ont embauchés; le taux de satisfaction des
diplômés au regard de la pertinence des cours suivis; et
les résultats d’emploi des diplômés61.
D’autres obstacles, comme la mobilité des diplômés
et de la main-d’œuvre, nécessitent également des
outils permettant de mesurer les résultats. Le Bologna
Process, une initiative visant à instaurer une meilleure
reconnaissance des titres de compétences des divers
pays au sein du territoire beaucoup plus diversifié de
l’Union européenne, est fondé sur des investissements
importants consentis à l’établissement de systèmes
de mesure et d’information62. Il paraît ainsi incongru
de ne pas chercher à mettre en place un mécanisme
unique permettant de mesurer l’information servant
de fondement à une initiative similaire visant à
instaurer un régime de reconnaissance mutuelle des
compétences pour l’ensemble du Canada. Idéalement,
il y aurait un robuste système national d’information
sur le marché du travail, un régime pancanadien
de reconnaissance des compétences et un régime
pancanadien de transfert des crédits.
59
http://www.collegesontario.org/outcomes/key-performance-indicators/2015_KPI_English.pdf
60
https://news.gov.bc.ca/factsheets/factsheet-bc-post-secondary-education-facts
61
http://www.nait.ca/datadashboard/
62
http://forum.academica.ca/forum/data-in-decline-the-gradual-demise-of-canadas-national-data-systems-for-higher-education
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
27
L’évaluation des résultats d’apprentissage :
un moyen de démontrer que les diplômés
possèdent les compétences dont les
employeurs ont besoin
À son avis, les employeurs ont réussi assez bien
à formuler un ensemble de compétences ou
d’aptitudes pour un emploi donné, et il existe une
bonne convergence entre eux.
« Est-ce que les diplômés ayant terminé leurs études
possèdent les compétences, les connaissances et
les aptitudes leur permettant de réussir dans leur
vie personnelle et professionnelle ? » demande
Harvey Weingarten. « Lorsque vous obtenez
votre diplôme, on vous remet un relevé de notes
énumérant les cours que vous avez suivis et les notes
que vous avez obtenues. Quelle information ce bout
de papier vous donne-t-il précisément ? Au-delà
des cours et des notes obtenues, il ne dit rien au
sujet des connaissances, des compétences et des
aptitudes que vous avez acquises. »
« Or, les universités ne parlent pas le même
langage — elles parlent plutôt de disciplines, de
programmes menant à un diplôme et de titres de
compétences », poursuit le chercheur. « Lorsqu’ils
parlent (de diplômes), implicitement ils pensent aux
compétences et aux aptitudes que ces diplômes
recèlent. »
« Cela entraîne beaucoup de désagréments chez
les employeurs autant au Canada qu’à l’étranger »,
affirme le Dr Weingarten, président du Conseil
ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur
(COQES), un organisme gouvernemental autonome
qui effectue de la recherche sur le système
d’enseignement postsecondaire.
C’est notamment la raison pour laquelle le
Dr Weingarten et ses collègues du COQUES
s’intéressent autant à la question de l’évaluation
des résultats d’apprentissage, qui devrait à leur avis
contribuer à résoudre le problème de l’adéquation
entre les études postsecondaires et l’emploi. (Le
résultat de l’apprentissage est ce que l’étudiant
devrait savoir ou être capable de faire après avoir
terminé un cours ou un programme d’études.)
Le problème de l’adéquation est attribuable
en partie à la discordance entre le vocabulaire
employé par les employeurs et celui employé par les
établissements d’enseignement.
« Les employeurs formulent plutôt bien leurs besoins
en compétences, que ce soit en fonction d’un
emploi en particulier ou en fonction d’une gamme
de compétences qu’ils recherchent, par exemple
des compétences en technologie numérique ou en
résolution de problèmes », affirme le Dr Weingarten.
« Il faudrait que les établissements postsecondaires
parlent des compétences et des aptitudes, et non
pas tenir pour acquis que, parce qu’un étudiant
a réussi le cours, il possède nécessairement les
compétences et les aptitudes résultant de cet
apprentissage », d’ajouter le Dr Weingarten. « Nous
avons besoin d’en avoir la démonstration. »
Le parcours vers l’adéquation dans l’ensemble du
système commence par l’emploi d’une terminologie
commune et par l’évaluation des résultats
d’apprentissage, conclut le Dr Weingarten. Pensons,
par exemple, à la compétence que constitue
la pensée critique. Comment mesurer cette
compétence de manière raisonnable ? Comment
s’assurer qu’un individu est capable de poser des
questions pertinentes quand ce même individu ne
comprend pas la tâche qu’il est censé accomplir ?
Le COQES travaille en collaboration avec sept
autres établissements d’enseignement sur la question
de l’évaluation des résultats d’apprentissage,
soit l’Université de Toronto, l’Université Queen’s,
le Collège Durham, le Collège George Brown,
l’Université Guelph et le Collège Humber, avec
la Fondation Aga Khan à titre d’observateur. Les
résultats d’apprentissage requis afin de réussir
dans la vie personnelle et professionnelle sont
sommairement décrits dans une taxonomie portant
sur quatre types de compétences et d’aptitudes : les
compétences cognitives de base; les compétences
propres à une discipline; les compétences
transférables; et les compétences cognitives
supérieures (voir l’illustration à la page suivante).
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
28
Source : Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur
L’objectif consiste à mesurer ces compétences et à
délivrer aux étudiants des titres de compétences
dûment vérifiés.
Cependant, l’approche axée sur les résultats
d’apprentissage a son lot de détracteurs. Certains
font valoir que l’on ne peut pas tout évaluer, et
qu’on ne peut pas évaluer tout ce qui compte. Ces
préoccupations sous-entendent les deux corollaires
suivants : si on ne peut pas évaluer quelque chose,
peut-être qu’on ne l’a pas enseigné; et parfois on
met peut-être trop l’accent sur les choses qui sont
évaluées. Comme l’a fait remarquer un enseignant,
« les compétences générales ne sont pas comme
les mathématiques — il n’y a pas une seule bonne
réponse. »
Le Dr Weingarten est d’avis que l’on ne peut pas
gérer ce que l’on ne peut pas évaluer, et l’on
accomplit ce qui est évalué, pour paraphraser
Peter Drucker.
« Les programmes d’études axés sur les
compétences et l’accréditation sont fortement
prisés aujourd’hui aux États-Unis », souligne-t-il.
63
« Plusieurs établissements sont en voie d’adopter ces
modalités. » Le groupe à la tête de cette évolution
aux États-Unis est le National Institute of Learning
Outcomes Assessment. L’outil mis au point par
celui-ci, le Collegiate Learning Assessment Tool, est
dorénavant l’épreuve administrée à tous les diplômés
postulant un emploi au cabinet McKinsey aux ÉtatsUnis, par exemple.
Le Canada n’a pas encore adopté la pratique des
résultats d’apprentissage, des programmes axés
sur les compétences et l’accréditation comme
l’ont fait d’autres pays, bien qu’on trouve des
exemples isolés de telles pratiques, surtout dans
les programmes professionnels. Cela est dommage,
déplore le Dr Weingarten. Le Canada devrait
accélérer l’adoption des mécanismes axés sur les
compétences afin de soutenir le développement
d’une main-d’œuvre spécialisée, selon un rapport de
la Canada West Foundation63.
« Le hic, c’est que la relation entre l’éducation et les
résultats sur le marché du travail est tributaire de
l’adoption d’une perspective axée sur les résultats
d’apprentissage. »
http://cwf.ca/publications-1/competence-is-the-best-credential
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
29
Les employeurs doivent toutefois admettre que
certaines compétences ne peuvent s’acquérir qu’avec
l’expérience, affirme Robert Carlyle, de RBC. « Aucun
éducateur ne peut fournir l’expérience pratique
formant la base d’un bon jugement, un élément
fondamental pour l’application des compétences et des
connaissances acquises. »
Au Collège George Brown, Mme Gunter observe que
« les compétences générales se développent tout le
temps par le travail concret; ces étudiants ont déjà
travaillé avec cette pièce d’équipement : ils seront prêts
à être productifs dès leur embauche ».
La Dre Cannon souligne que le relevé de notes ne fait
aucunement état de ce que l’étudiant a accompli en
dehors de la salle cours. L’Université de Calgary a
fait partie des précurseurs il y a plusieurs années
en lançant un relevé des activités cocurriculaires.
Ce relevé indique toutes les activités admissibles de
bénévolat et de leadership réalisées sur le campus
par l’étudiant, en plus des compétences clés acquises.
Le relevé est authentifié et agréé par l’université.
« Cela témoigne de l’importance de la participation de
l’étudiant à l’extérieur de la salle de cours dans le cadre
de son expérience globale », renchérit la Dre Cannon.
Ce relevé (en plus des autres initiatives servant à
mesurer les atouts des étudiants) est fort apprécié des
employeurs, mais les étudiants peinent à y voir une
valeur quelconque. « Le défi, c’est de faire en sorte
que tous les étudiants en apprécient les mérites; mais
ce ne sont pas tous les étudiants qui ont la maturité
ou la perspicacité requises », précise la Dre Cannon.
Elle précise que les employeurs et des philanthropes
appuient ces initiatives en guise de moyens concrets
permettant de faire valoir les résultats et les atouts des
étudiants qui y participent.
64
La présentation claire des résultats des étudiants
les aide à être des plus compétitifs sur le marché
du travail. Dans son rôle institutionnel, l’Université
de Calgary réfléchit également aux atouts que ses
diplômés devraient posséder afin qu’ils soient prêts à
entreprendre leur vie personnelle et professionnelle
dans un monde complexe, des atouts comme le
leadership, la pensée critique et l’engagement envers
la durabilité. Une fois que les instances supérieures
auront convenu des atouts en question, on en fera
une large diffusion auprès des employeurs et des
chefs de file dans la collectivité. Ces atouts seront
ensuite disséminés dans le contenu de l’ensemble des
programmes. « Nous chargerons alors les facultés et les
programmes de former des diplômés qui sont aptes à
manifester résolument les atouts auxquels nous nous
attendons », précise la Dre Cannon.
Outre le relevé des activités cocurriculaires, le recours
à la remise d’insignes est une autre façon pour les
établissements de souligner des réalisations ou des
compétences acquises par l’étudiant au-delà de ce
qui figure dans son relevé de notes officiel. Bien que
cela soit une pratique nouvelle au Canada, il y aurait
au moins deux établissements postsecondaires qui
envisagent de décerner des insignes en guise de
microtitre. Au moment de rédiger le présent rapport,
l’insigne soulignant l’Excellence en recherche et en
innovation décerné par le Collège George Brown
est le seul en son genre au Canada64. Instauré par
Robert Luke, vice-président, Recherche appliquée
et Innovation, l’insigne souligne l’acquisition
d’expérience concrète à l’extérieur de la salle de cours
par la participation de l’étudiant à des projets de
recherche appliquée.
Ces insignes ou microtitres attestent qu’un étudiant a
acquis une compétence donnée, par exemple l’aptitude
à résoudre des problèmes, la communication avec les
http://forum.academica.ca/forum/data-in-decline-the-gradual-demise-of-canadas-national-data-systems-for-higher-education
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
30
membres de l’équipe ou la production de solutions
novatrices à une problématique industrielle. L’étudiant
peut afficher l’insigne à son profil LinkedIn ou à
n’importe quel endroit susceptible d’être vu par un
employeur éventuel.
L’Université de la Colombie-Britannique a lancé
un projet-pilote sur l’utilisation d’insignes en guise
d’attestation dans trois programmes, affirmant que
l’insigne « constitue un élément vital dans le cadre
d’un régime d’apprentissage ouvert et souple » et « un
moyen d’attester l’atteinte d’un niveau de participation
et l’acquisition de compétences ou de connaissances65 ».
Rendre l’information disponible
La collecte de données au Canada, la pierre d’assise
sur laquelle repose tout projet de recherche, a été
critiquée comme étant la pire parmi les pays de
l’OCDE66. En raison des coupures dans les budgets
de Statistique Canada, il a fallu mettre fin à certains
travaux, et les données portant sur l’enseignement
supérieur ont été amputées. Le manque de données
en la matière a souvent été relevé comme étant le
principal obstacle à la réalisation de progrès dans le
développement des compétences et la collaboration.
En Australie, les étudiants ont accès au site
MyUniversity, dans lequel on trouve tous les
programmes de cours offerts dans l’ensemble du
pays et leur taux d’emploi respectif; il n’existe
présentement aucune ressource aussi complète au
Canada. (The new Career Tool on Canada’s Job Bank
website provides information by program but it does
not present outcomes by post-secondary institution
since the federal government cannot access data
from all institutions directly.) Un rapport produit
par Ken Coates recommande que tous les collèges,
écoles polytechniques et universités soient tenus
de rendre aisément accessibles en ligne les revenus
et les expériences de travail des diplômés de leurs
divers programmes67. Suivant cette même logique,
cela suppose que les établissements doivent mettre
davantage l’accent sur la préparation des étudiants à
occuper un emploi. Cela devrait également les inciter
à intégrer l’orientation professionnelle plus tôt dans le
processus et aider les étudiants dans la transition vers
un emploi après l’obtention de leur diplôme.
65
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2015/03/Career-Ready-Ken-Coates-final-March-251.pdf
66
http://news.gc.ca/web/article-en.do?nid=998209
67
http://www.ceocouncil.ca/news-item/business-leaders-and-post-secondary-presidents-launch-businesshigher-education-roundtable-toimprove-school-to-work-transitions
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
31
Initiative porteuse
Au cours de la réunion de juillet 2015 du
Forum des ministres du marché du travail,
les participants ont reconnu l’importance
de l’information sur le marché du travail
(IMT) et entériné la création d’un Comité
consultatif pancanadien d’intervenants
chargé de veiller à ce que la population ait
accès à l’information objective dont elle a
besoin68. Aucun engagement gouvernemental
n’y est cependant formulé quant à des
investissements à venir pour améliorer les
enquêtes existantes ou en ajouter d’autres, ni
à l’exigence que le public puisse avoir accès
aux données existantes compilées par les
établissements postsecondaires financés par
des fonds publics.
Partager une vision commune
Les mandats des établissements d’enseignement
et des employeurs sont souvent fort différents,
mais leurs intérêts convergent en ce qui a trait aux
compétences des diplômés. Les éducateurs veulent
que leurs étudiants obtiennent des bons emplois, et
les employeurs veulent que leurs employés soient
capables d’accomplir les tâches liées à ces emplois.
La Table ronde de l’enseignement supérieur sur le
commerce a été lancée en avril 2015 afin de tenir
lieu de forum favorisant le dialogue entre une
brochette de grandes entreprises et les établissements
postsecondaires69. La Table ronde se consacrera
sur l’atteinte d’une meilleure coordination entre
l’éducation et les besoins des employeurs, à aider les
jeunes dans leur transition des études au marché du
travail, et sur l’atteinte d’une plus grande synergie
entre les activités de recherche et d’enseignement70.
68
Les provinces ont également leurs propres priorités,
la situation économique étant différente d’une région
du Canada à une autre. La plupart des provinces ont
établi des priorités sociales et économiques qui leur
sont propres et mettent de œuvre des politiques et
des mécanismes servant à assurer la disponibilité des
ressources compétentes leur permettant de satisfaire
ces priorités. À titre d’illustration de ce phénomène, la
Colombie-Britannique a récemment entrepris un vaste
chantier favorisant l’essor du secteur du gaz naturel
et l’agrandissement de terminaux de gaz naturel
liquéfié, un volet considéré dorénavant névralgique
pour l’économie de cette province. Par conséquent,
le gouvernement provincial a mis de l’avant un plan
de développement des compétences, le Skills for
Jobs Blueprint, réaffectant des fonds du budget du
ministère de l’Éducation de la province aux activités
d’apprentissage en lien avec le développement
industriel anticipé. (Cette approche a toutefois été
accueillie de manière plutôt tiède par le secteur
universitaire71 et par au moins un économiste qui remet
en question les prévisions gouvernementales quant au
type et au nombre d’emplois créés72.)
Les visions des uns et des autres concordent
toutefois davantage à l’échelle locale. Ainsi, l’on
observe l’émergence de partenariats régionaux un
peu partout au pays, lesquels s’avèrent des pôles
d’innovation et de développement économique
porteurs. Les établissements postsecondaires sont
l’un des principaux rouages de l’économie du savoir
et du savoir-faire au Canada. La concertation avec
les employeurs est très importante, non seulement
aux fins de la recherche mais également aux fins
du développement des compétences et de la
commercialisation des innovations. Les établissements
d’enseignement ayant tissé des liens forts à long
terme avec des employeurs sont les mieux outillés
pour préparer leurs étudiants à occuper un emploi,
et les établissements qui réussissent le mieux sont
pertinemment au fait des besoins des économies
locales qui gravitent dans leur giron73.
http://news.gc.ca/web/article-en.do?nid=998209
69
http://www.ceocouncil.ca/news-item/business-leaders-and-post-secondary-presidents-launch-businesshigher-education-roundtable-toimprove-school-to-work-transitions
70
http://www.ceocouncil.ca/news-item/business-leaders-and-post-secondary-presidents-launch-businesshigher-education-roundtable-toimprove-school-to-work-transitions
71
http://academica.ca/top-ten/bc-risks-trusting-labour-market-forecasts-too-much
72
https://www.policyalternatives.ca/BC-LNG-jobs
73
https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/306968/A_New_Conversation.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
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Initiative porteuse
Reconnaissant que le dynamisme de l’île
de Vancouver était à l’avantage de tous, le
Collège Camosun, le North Island College,
l’Université Royal Roads, l’Université de
Victoria et l’Université de la Vancouver
Island ont fondé la Vancouver Island PostSecondary Alliance. Ces établissements
ont concrétisé la vision commune qu’ils
partagent, soit d’enrichir le parcours
professionnel des étudiants et de contribuer
à satisfaire les besoins en compétences des
employeurs dans la région74.
Favoriser une approche systémique
L’OCDE a lancé un projet consistant à analyser en
profondeur l’adéquation des études supérieures
aux besoins du marché du travail et les résultats
d’emploi des diplômés dans plusieurs pays. L’analyse
portera sur l’ensemble des composantes du système
d’éducation, témoignant de la reconnaissance du fait
qu’il ne serait pas opportun d’examiner seulement
un élément d’un système très complexe. L’analyse
recensera les stratégies et les mesures incitatives
adoptées par les divers pays destinées à optimiser la
pertinence et les résultats d’apprentissage des études
postsecondaires. Le Canada compte parmi les sept
pays visés par cette initiative.
En outre, l’OCDE est en voie de mettre au point des
paramètres de mesure pluridimensionnels pour
évaluer le rendement des systèmes d’enseignement
supérieur, l’employabilité étant l’une des dimensions
potentiellement prises en compte dans l’évaluation
du rendement. Il se pourrait également que la
concertation avec les employeurs soit aussi l’une
des dimensions évaluées dans le cadre de ce projet,
selon Shane Samuelson, analyste principal des
politiques auprès de la Direction de l’éducation et des
compétences de l’OCDE75.
Alors que le système d’éducation du Canada compte
une multitude de volets et d’intervenants, il souffre
malgré tout de certaines déficiences. Déjà en 2006,
un rapport faisait état du fait que notre système
d’éducation n’avait pas fait l’objet d’un examen
attentif au cours des cinq années précédentes, n’était
pas doté de buts et d’objectifs communs à l’ensemble
des intervenants du système, ne disposait d’aucun
financement en lien avec les priorités nationales,
d’aucun organisme chargé de l’assurance de la qualité
des prestations des établissements, d’aucun mécanisme
de planification fédéral-provincial-territorial, et qu’il
n’existait pas de ministère fédéral de l’Éducation76. La
situation a peu évolué depuis ces constats.
L’étape la plus difficile pour les étudiants est celle
durant laquelle ils doivent faire la transition entre
leur situation d’étudiant et celle d’occuper un emploi.
C’est à cette étape qu’ils auraient besoin du plus grand
soutien, mais là encore on constate des lacunes dans le
système. En moyenne, quatre étudiants sur dix mettent
plus de trois mois à se dénicher un emploi une fois leur
diplôme en poche, et ce délai passe à plus d’une année
pour un étudiant sur dix, selon l’enquête réalisée par le
cabinet McKinsey auprès de 1 500 jeunes au Canada en
201377.
Les employeurs devraient assumer un rôle plus
important auprès de leurs recrues. Tel que mentionné
précédemment, il serait irréaliste de s’attendre à ce que
les diplômés entreprennent un nouvel emploi et soient
totalement prêts à accomplir les tâches liées à leur
fonction. Une étude réalisée par la société Accenture
a signalé la nécessité d’établir des modèles détaillés
des compétences requises afin d’établir la hauteur des
attentes et guider le développement des compétences,
en plus de souligner l’importance des programmes
travail-études dans le dépistage des employés
talentueux et la facilitation de la transition des
diplômés78. Dans les situations plus problématiques,
les gouvernements se sont montrés enclins à offrir des
incitatifs fiscaux aux employeurs disposés à prendre la
chance d’embaucher de nouveaux employés.
74
http://www.timescolonist.com/search-results/vancouver-island-colleges-universities-form-alliance-1.877890
75
Les projets de l’OCDE sont intitulés : In-depth analysis of higher education systems’ labour market relevance and outcomes et
Benchmarking higher education system performance. Au moment d’écrire ces lignes, on ne trouvait aucun renseignement supplémentaire
dans le site de l’organisme.
76
http://www.cclcca.ca/pdfs/PSE/2006/PSEReport2006EN.pdf
77
http://www.mckinsey.com/~/media/McKinsey%20Offices/Canada/Latest%20thinking/PDFs/Youth_in_transition_Bridging_Canadas_
path_from_education_to_employment.ashx
78
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2015/04/accenture-increasing-return-talent-development-canadian-companies.pdf
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
33
Initiative porteuse
En février 2015, la Nouvelle-Écosse a lancé le
programme Graduate to Opportunity, dont
l’objectif est d’aider les diplômés durant
leur transition avant d’occuper un emploi
à temps plein. En vertu de ce programme,
les employeurs admissibles toucheront une
contribution de 25 % de la première année
de salaire du nouvel employé, puis 12,5 % la
deuxième année79.
Favoriser la mobilité et le choix
La population canadienne n’est pas très nombreuse
par rapport à celle du monde entier, ce qui a jusqu’à
présent considérablement nui à sa compétitivité en
entravant le mouvement de ses travailleurs qualifiés à
l’intérieur-même du pays. Les obstacles artificiels à la
mobilité de la main-d’œuvre contribuent également à
une forte réticence des travailleurs à déménager dans
une autre région pour trouver du travail. Il y a un
nombre effarant de compétences et de professions qui
ne sont pas reconnues au-delà de la frontière de chaque
province, encore moins au-delà de la frontière du pays,
et ce pour diverses raisons, essentiellement de nature
bureaucratique80.
Certains efforts ont été consacrés à la résolution
de ces problématiques par divers gouvernements
provinciaux et associations professionnelles, le
CMEC faisant régulièrement état des progrès
réalisés, mais le processus s’avère long et la
problématique du transfert des crédits demeure
nébuleuse pour quiconque chercherait à s’aventurer
dans les méandres du système. Par ailleurs, pour
les établissements postsecondaires, cette nouvelle
approche à l’apprentissage des compétences dans
le cadre de laquelle les étudiants pourraient passer
d’un type de programme à un autre et changer
d’établissement d’enseignement au besoin pose
d’importantes problématiques administratives. Cela a
engendré notamment des coûts accrus, lesquels sont
essentiellement facturés aux étudiants qui peuvent
devoir reprendre des cours afin de satisfaire les
exigences en matière de préalables81.
79
http://novascotia.ca/news/release/?id=20150206002
80
http://www.ceocouncil.ca/wp-content/uploads/2014/07/Paul-Cappon-Think-nationally-act-locally-July-4.pdf
81
http://www.conferenceboard.ca/Libraries/EDUC_PUBLIC/spse_nov2013_summitpaper_economic.sflb
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34
Promouvoir la collaboration
Le financement peut servir de vecteur de changement
et favoriser l’adoption des comportements souhaités.
À l’heure actuelle, la majorité des établissements
postsecondaires comptent principalement sur des
enveloppes budgétaires établies en fonction du nombre
d’inscriptions; toutefois, les formules de financement
font présentement l’objet d’un examen minutieux dans
certaines administrations gouvernementales. Certaines
administrations, notamment l’État du Tennessee,
ont recours à divers paramètres, notamment le taux
d’emploi des diplômés, la satisfaction des diplômés
à l’égard de leur emploi et les revenus tirés de leur
emploi par les diplômés, afin d’établir le montant
du financement accordé à leurs établissements
postsecondaires82. L’État a constaté que les
établissements d’enseignement mettaient dorénavant
un plus grand accent sur la réussite de leurs étudiants,
prévoyant également des enveloppes budgétaires
d’appoint destinées à les inciter à accueillir des
étudiants issus de milieux défavorisés83.
Les modèles de financement sont des facteurs de
collaboration particulièrement puissants. Dans
l’éventualité où le financement devenait davantage
tributaire de l’obtention d’un emploi par les diplômés,
par exemple, cela devrait pousser les établissements
à investir davantage de ressources dans les services
d’orientation professionnelle et les stratégies visant à
aider les étudiants dans leur transition vers un emploi.
Dans certains cas, des départements réussissent
admirablement bien à obtenir du financement
provenant de sources externes, ce qui leur a permis
d’obtenir une plus grande liberté d’action dans
les approches qu’ils privilégient sur le plan de
l’enseignement et de la recherche84. Le Québec,
l’Ontario et le Manitoba offrent des crédits d’impôt
aux entreprises pour les inciter à embaucher des
stagiaires ou des étudiants inscrits dans un programme
travail-études. Les grandes entreprises disposent
généralement de plus de ressources et d’expérience
afin de rendre l’expérience d’un stage professionnel
ou d’un stage en entreprise plus enrichissante tant
pour l’étudiant que pour l’employeur, ce qui n’est
généralement pas le cas des entreprises de plus petite
taille — le fait de prendre en charge un stagiaire
peut leur sembler une responsabilité plus onéreuse.
Aussi, sur le plan administratif, cela peut être plus
exigeant pour une entreprise de petite taille de trouver
le partenaire qui leur conviendrait le mieux. À cet
égard, les organismes comme MITACS, travaillant
de concert avec les universités, les gouvernements et
les entreprises afin de favoriser la collaboration au
moyen de stages ou de projets de recherche, occupent
une place de premier plan en faisant le pont entre des
organismes et des entreprises, peu importe leur taille,
et les diplômés universitaires85.
Initiative porteuse
MITACS est un organisme à but non
lucratif. Il a aidé au financement de plus
de 10 000 stages de recherche et contribué
à la formation et au développement des
compétences de plus de 19 000 étudiants et
postdoctorants issus du milieu universitaire
au cours des 15 dernières années86.
82
http://www.state.tn.us/thec/Divisions/Fiscal/funding_formula/1-Outcomes%20Based%20Formula%20Narrative%20-%20for%20
website.pdf
83
http://www.theglobeandmail.com/news/national/education/some-ideas-to-reform-higher-education/article15361901/
84
http://www.conferenceboard.ca/Libraries/EDUC_PUBLIC/spse_nov2013_summitpaper_economic.sflb
85
https://www.mitacs.ca/en/about-mitacs
86
http://www.mitacs.ca/en/programs/accelerate
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
35
Facteurs favorisant la collaboration
En l’absence d’un ministère fédéral de l’Éducation,
il incombe au Conseil des ministres de l’Éducation
(Canada) d’assurer la coordination des activités à
l’échelle nationale. Le CMEC s’est donné comme
mandat d’agir à titre de forum de discussion, de
mécanisme de collaboration, de moyen de mener
des consultations et de coopérer, et d’être un
instrument pour représenter les intérêts des provinces
et territoires sur la scène internationale87. Ce qui
manque cruellement toutefois, c’est le leadership.
Plusieurs intervenants pressent le gouvernement
fédéral de proposer une stratégie nationale en matière
d’éducation88.
Que ce soit du côté des établissements d’enseignement
ou de celui des employeurs, il faudrait un organisme
ou un groupe de personnes qui serait chargé
d’assurer un rôle directeur sinon la coordination
des partenariats. Au Royaume-Uni, certaines
des principales grandes entreprises, notamment
Rolls Royce et GSK, ont désigné des personnes
chargées spécifiquement d’assurer la bonne marche
des relations avec les universités. Cela assure entre
autres aux établissements d’enseignement un point de
contact auquel ils peuvent s’adresser s’ils cherchent
à établir un partenariat, et procure potentiellement
à ces entreprises un avantage par rapport à leurs
concurrents89.
Les personnes-ressources qui seraient logiquement les
plus aptes à assurer la coordination de ces activités
au sein des établissements d’enseignement sont sans
doute les responsables des services d’orientation
professionnelle, mais le principal point de contact
est souvent plus difficile à définir que cela le serait
pour une entreprise90. Aussi, ces services sont souvent
isolés des services didactiques et sous-financés
ou inutilisés par les étudiants. Ceci dit, ce groupe
paraît le choix le plus logique aux fins d’assumer un
rôle de coordination, étant donné son engagement
dans la transition des étudiants vers un emploi. Il
arrive également que les divers départements ou
professeurs titulaires aient eux-mêmes constitué un
réseau professionnel, en plus de la haute direction
de l’établissement qui pourrait déjà avoir établi
des partenariats dynamiques en ce qui concerne le
financement comme les projets de recherche. Un
coordonnateur pourrait certes conseiller les diverses
instances de l’établissement d’enseignement au
sujet des moyens les plus judicieux de tirer profit
des maillages qui sont déjà établis par les divers
intervenants.
Initiative porteuse
L’Université de Windsor a annoncé
l’établissement d’un centre de stages travailemploi, d’orientation professionnelle et
de placement étudiant. Le centre sera
chapeauté par un professeur titulaire qui
agira également à titre de conseiller spécial
auprès du vice-recteur à l’enseignement et à
la recherche, et qui a enseigné des matières
dans le domaine des ressources humaines
et du leadership à l’École de gestion de
l’université91.
87
http://www.cmec.ca/11/About/index.html
88
http://business.financialpost.com/executive/should-canada-have-a-national-education-and-training-strategy?__lsa=21c1-6c0e
89
https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/32383/12-610-wilson-review-business-universitycollaboration.pdf
90
https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/32383/12-610-wilson-review-business-universitycollaboration.pdf
91
http://blogs.windsorstar.com/news/university-of-windsor-to-launch-co-op-careers-and-employment-centre
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Recommandations
Dans l’ensemble des administrations
gouvernementales au Canada comme à l’étranger, un
important dialogue est en cours au sujet du rôle de
l’éducation dans le développement des compétences
en adéquation avec les besoins du marché du travail.
Par ailleurs, les établissements postsecondaires du
pays doivent relever les défis qui se dressent devant
eux s’ils veulent demeurer concurrentiels et démontrer
leur valeur et leur pertinence. Une collaboration
dynamique entre les établissements postsecondaires
et les entreprises sera un catalyseur incontournable
afin de soutenir une économie axée sur le savoir et les
compétences.
La collaboration avec divers employeurs est
déjà pratique courante dans un grand nombre
d’établissements d’enseignement. Il faut toutefois
une approche plus ouverte favorisant le partage
de l’information d’une manière plus intelligible et
comparable, une approche plus systématique afin
de corriger les lacunes et lever les obstacles, des
mesures incitatives favorisant une concertation plus
étroite entre les employeurs et les établissements
d’enseignement dans les domaines où cela est
pertinent, et travailler résolument à la mise au point
des outils nécessaires à la réalisation de tout cela.
92
Voici les recommandations formulées à
l’intention du gouvernement fédéral :
Pertinence et résultats des études
postsecondaires en lien avec le marché du travail
Exiger que les administrations provinciales et
territoriales, à titre de bénéficiaires de fonds destinés
aux études postsecondaires qui leur sont octroyés
dans le cadre du Transfert social canadien et d’autres
mesures de soutien par l’entremise de programmes
de formation, produisent des comptes rendus au
sujet des inscriptions, des résultats d’apprentissages
ou des compétences acquises92 ainsi que des résultats
d’emploi des diplômés d’études postsecondaires.
(Cette initiative fédérale s’inscrirait dans le contexte de
l’amélioration de la qualité et de l’accès à l’information
sur le marché du travail de la part du gouvernement.)
Information sur le marché du travail
Veiller à ce que l’information sur le marché du
travail au Canada soit exhaustive et représente
rigoureusement les données se rapportant à l’ensemble
des titres de compétences offerts dans le cadre de
tous les programmes d’études postsecondaires et de
formation en apprentissage au pays, le nombre de
diplômés issus des divers programmes, des rapports
en temps utile sur les résultats d’emploi des diplômés
et des prévisions officielles sur la demande future des
divers métiers.
Les resultats d’apprentissages sont ce que les étudiants devraient savoir ou être capables de faire au terme de leur cours ou programme.
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Orientation professionnelle
Stages coopératifs
Consacrer des fonds pour la conception de
communications et d’outils pertinents à l’intention
des conseillers d’orientation au niveau de l’école
secondaire afin de s’assurer qu’ils soient au courant
de la gamme des programmes offerts dans le cadre
des études postsecondaires et de la formation
professionnelle ainsi que de leur pertinence en lien
avec le marché du travail. (Cette initiative fédérale
s’inscrirait dans le contexte de l’amélioration de la
dissémination de l’information sur le marché du travail
par le gouvernement fédéral.)
Offrir des mesures incitatives financières aux
employeurs pour qu’ils offrent des stages coopératifs
aux étudiants en ciblant particulièrement les PME et
les entreprises n’ayant pas participé auparavant à ces
programmes.
Apprentissage intégré au travail
Établir un répertoire national de la gamme de
programmes d’apprentissage intégré au travail
auxquels peuvent participer les employeurs canadiens,
comprenant une description des meilleures pratiques
et des histoires de réussite. Investir dans la collecte
de données et d’informations sur le bilan des divers
programmes d’apprentissage intégré au travail afin
de fournir aux employeurs les renseignements requis
pour prendre des décisions d’investissement dans
ce type de programmes fondées sur des données
probantes, et évaluer la relation entre la participation à
des programmes d’apprentissage intégré au travail et
les résultats scolaires ou en matière d’apprentissage.
93
Développement des compétences
Investir des fonds dans le développement de
compétences en fonction de secteurs spécifiques par
l’entremise du Programme d’appui aux initiatives
sectorielles (conformément à la pratique antérieure).
Promouvoir l’adhésion pancanadienne d’un cadre
de compétences, de concert avec le Conseil de la
fédération, le Conseil des ministres de l’Éducation
(Canada) et, selon le cas, le Forum des ministres du
marché du travail93.
Ces recommandations sont tirées du rapport de Janet Lane et Naomi Christensen, Competence Is the Best Credential, Canada West
Foundation, Avril 2015.
Pour plus de renseignements, communiquer avec :
Sarah Anson-Cartwright | Directrice principale, Politiques des compétences | 613.238.4000 (236) | [email protected]
Systèmes fragmentés | La Chambre de commerce du Canada
38
OTTAWA
420 - 360 rue Albert
Ottawa, ON
K1R 7X7
613.238.4000
613.238.7643
TORONTO
901 - 55 avenue University
Toronto, ON
M5J 2H7
416.868.6415
416.868.0189
MONTRÉAL
560-999 boulevard de
Maisonneuve ouest
Montréal, QC
H3A 3L4
514.866.4334
514.866.7296
CALGARY
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Calgary, AB
T3K 5G9
403.271.0595
403.226.6930
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