(JNRDM) 2001
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Dégradation de la mobilité dans les transistors FDSOI à canal court Défauts neutres/chargés ou régime quasi-balistique Sébastien GUARNAY1,2, Marie-Anne JAUD1, François TRIOZON1, Olivier ROZEAU1, Sébastien MARTINIE1 1 CEA LETI 17, rue des Martyrs 38054 Grenoble Cedex 9 - France Arnaud BOURNEL2 2 IEF Université Paris-Sud - UMR 8622 Bât. 220 91405 Orsay Cedex - France Email : [email protected] Résumé L’augmentation des performances des transistors MOSFET par la diminution de la longueur de canal se heurte à une dégradation de la mobilité, du moins apparente. Celleci est expliquée par plusieurs facteurs, liés à une limitation physique qui n’est pas visible de façon quantitative par les méthodes de caractérisation. Les principaux facteurs possibles de dégradation additionnelle retenus pour les dispositifs à canal complètement déserté sur isolant (FDSOI) sont les défauts neutres/chargés et le régime quasi-balistique. 1. Introduction La forte intégration des composants MOSFET se traduit par une réduction agressive des dimensions géométriques des dispositifs. Par exemple, la Figure 1 représente une image TEM (microscope électronique à transmission) d’un transistor FDSOI de 14 nm de longueur de grille réalisé au LETI [1]. En microélectronique, l’un des concepts fondamentaux est celui de la mobilité, issu d’une analyse des phénomènes d’interaction qui limitent la vitesse des porteurs. Cette mobilité est très largement utilisée pour prédire les performances des dispositifs. Récemment de nombreuses expériences ont mis en évidence de manière quantitative une forte diminution de la mobilité extraite à partir de caractéristiques électriques pour des longueurs de canal inférieures à 100 nm. les conditions. En effet, elle est observée sur toutes les architectures pour inférieure à 100 nm : bulk [2], FDSOI [3], nanofil gate all around [2], FinFET [4]. De même, on l’observe indépendamment des matériaux choisis : grille poly-Si ou métal [5], oxyde high- ou SiO2 [3], NMOS ou PMOS [6], [2], [7], canal contraint ou non [6], [5], canal dopé ou non [2], [3]. Enfin, elle apparaît quelle que soit la méthode d’extraction utilisée pour la mesurer [8] : fonction Y [9], split CV [4], magnétorésistance [10]. Afin d’optimiser les dispositifs et de prédire leurs performances, il est nécessaire de comprendre et de modéliser les phénomènes pouvant être à l’origine de la diminution apparente de la mobilité avec la longueur de grille. Dans ce papier nous présenterons un état de l’art de la mobilité dans les transistors ultimes. La section 2 présentera les mécanismes de dégradation de la mobilité et la position de notre travail, la section 3 sa modélisation dans l’hypothèse de défauts neutres, tandis que la section 4 se basera sur l’hypothèse du régime quasi-balistique. Enfin la conclusion en section 5 sera l’occasion d’exposer nos perspectives de travail pour comprendre, expliquer et modéliser la dégradation de mobilité. Notations utilisées : ( ) Figure 1. Image TEM d'un FDSOI [1] La longueur effective du canal a toujours été diminuée entre autres pour augmenter le gain du transistor. Mais on observe une dégradation de la mobilité, quelles que soient Mobilité canal long Mobilité de Shur/balistique Champ effectif Température Potentiel de déformation Concentration de défauts neutres Largeur du transistor Longueur de canal du transistor Vitesse thermique Charge d’inversion Polarisation drain source Coefficient de rétrodiffusion Masse effective Permittivité électrique Constante de Planck Constante de Boltzmann 2. Modélisation des effets de dégradation Le courant dans un MOSFET est limité par les interactions dans le canal entre les électrons et leur environnement, décrites globalement par un paramètre macroscopique : la mobilité qui représente la capacité des électrons à se mouvoir dans la couche d’inversion. Les autres facteurs limitatifs sont dépendants du type d’architecture ou du matériau utilisé comme les fuites de grille ou encore les fuites de jonction. Usuellement la mobilité est en première approximation décrite par une loi de Matthiessen (à champ électrique source drain faible). Cette loi suppose des mécanismes indépendants pour pouvoir sommer les probabilités d’occurrence des collisions avec les centres coulombiens, la rugosité de surface et les phonons : (1) Expérimentalement, il a été démontré que cette mobilité chutait de façon inattendue avec la réduction de la longueur du canal. Comme décrit schématiquement sur la Figure 2, cette dégradation limite fortement les transistors sub 100 nm. Il devient essentiel de comprendre et de modéliser cette chute de mobilité. Plusieurs explications sont fournies pour décrire cette forte diminution : défauts neutres, régime quasi-balistique… La mobilité à champ faible est alors décrite de la façon suivante : (2) Le problème réside dans la description physique de ce dernier terme : . D’autres hypothèses ont été explorées et peuvent aussi expliquer cette réduction de mobilité comme la théorie des plasmons, une mauvaise maîtrise des profils de diffusion, les contraintes mécaniques dues au procédé de fabrication ou encore l’erreur induite par les méthodes d’extraction de cette mobilité. localisation est mal connue [9], [5]. Quand la longueur de canal diminue, l’influence des défauts proches du profil de jonction et générés par l’implantation des dopants risque de devenir critique, comme illustré par la Figure 3. Par ailleurs, en faisant des essais sur un matériau simple, il a été montré [12] que l’interface avant avec l’oxyde de grille présentait une dégradation de la mobilité plus importante avec la réduction de que celle contre l’oxyde enterré (BOx), laissant entendre que les défauts en face arrière se recombinent avec le BOx. Néanmoins, les défauts neutres ont une caractéristique spécifique : leur impact doit a priori être indépendant de la température. Comme on le voit sur l’insert de la Figure 2, les mesures de mobilité en fonction du champ effectif transverse et de la température peuvent aider à discriminer les phénomènes de dégradation de la mobilité. La Table 1 résume la dépendance des mécanismes d’interaction en fonction de la température. Mobilité Interaction coulombienne rugosité de surface phonons défauts neutres Table 1. Dépendance des mécanismes d’interaction en fonction de la température. Du point de vue modélisation, les défauts neutres et chargés sont traités dans la littérature de façon assez similaire d’un point de vue théorique [13], [14]. Le potentiel dû à un défaut neutre vu par un porteur de charge vaut ( ) (3) ( ) (4) contrairement au cas des impuretés ionisées1. On peut déduire de (3) le temps de relaxation (5) où ∫ 3. Mécanisme d’interaction avec des défauts neutres Les défauts neutres peuvent apparaître lors des étapes de fabrication. Il en existe une multitude de types. Leur ⏟ De façon surprenante, les défauts neutres sont traités comme des défauts avec une charge artificielle. La différence avec les défauts chargés étant leur caractère plus local, modélisé par le facteur de décroissance exponentielle plus important devant la norme du vecteur d’onde de la charge incidente, que dans le cas des défauts chargés. On peut en déduire la section efficace différentielle ) caractérisant la probabilité qu’une de diffusion ( particule se trouve après collision à l’intérieur d’un angle solide déterminé par l’angle de déviation et l’angle de rotation autour de la direction initiale du transport. En observant son expression calculée en première approximation, on constate qu’elle est isotrope : ( ) Figure 2. Évolution typique de la mobilité en fonction de (insert : représentation schématique des dépendances aux mécanismes d’interaction en fonction du champ effectif Eeff). Dépendance en température 1 ( ) ∫ ( )( ( ) ) pour les impuretés ionisées. (6) est la section efficace de conduction , qui est l’intégrale de pondérée par ( ), terme lié à la déviation par rapport au sens de transport. Enfin on en déduit la mobilité dépendant des défauts neutres : (7) En réalité, plusieurs hypothèses ont été utilisées ici pour permettre le calcul de cette mobilité. En effet, la diffusion devient plus anisotrope pour des porteurs de forte énergie, à la manière des interactions avec les défauts chargés. De plus, à plus longue distance, l’effet d’un potentiel de polarisation prend le relai sur le potentiel local, bien qu’il soit généralement négligé. L’hypothèse principale proposée est celle d’une localisation des défauts proche des jonctions [2], dus aux implantations de dopants, ce qui expliquerait la dépendance de la dégradation avec la longueur de canal (comme illustré sur la Figure 3). (9) 2 et par la méthode des flux : ( ) (10) Avec ( ) le coefficient de rétrodiffusion en régime linéaire. En égalisant ces deux équations basées sur les hypothèses de l’équation de transport de Boltzmann semi-classique, il est possible de déterminer l’expression de la mobilité de Shur. ( ) (11) En posant les quantités suivantes nous retrouvons l’expression (8) : (12) Cependant de récents travaux de Zilli et al. [17] basés sur des calculs Monte-Carlo démontrent que cette approche n’explique pas totalement la dégradation observée expérimentalement. 5. Conclusion et perspectives de travail Figure 3. Localisation proche des interfaces canal/source et canal/drain. Augmentation de la densité moyenne globale de défauts avec la réduction de la longueur de canal. 4. Régime quasi-balistique L’établissement d’un régime balistique ou quasibalistique dans les transistors MOSFETs ultracourts est de plus en plus considéré comme une des raisons expliquant la chute de la mobilité lorsque longueur de canal diminue. En calculant théoriquement le taux de porteurs balistiques, Arora et al. [15] ont suggéré que le régime balistique était à moitié atteint dès 50 nm ; ou en d’autres termes que seulement 50 % des porteurs injectés par la source subiront une interaction lors de la traversée d’un canal d’une telle longueur. La modélisation de ce phénomène physique ne peut a priori se faire de façon usuelle, puisque la mobilité est une notion macroscopique du transport supposant un grand nombre d’interactions. Néanmoins, M. S. Shur [16] a été l’un des premiers à introduire une notion de mobilité balistique basée sur la méthode des flux. L’expression de la mobilité devient alors : (8) Ainsi pour des longueurs de canal grandes devant le libre parcours moyen des porteurs la valeur de la mobilité balistique est trop élevée pour influer sur la mobilité effective. A contrario, lorsque la longueur diminue, ce terme devient prédominant dans le calcul, ce qui a pour effet de faire décroître la mobilité totale. Il est possible de redémontrer simplement cette expression. L’expression du courant en régime linéaire dans le cas dérive-diffusion est : Nous avons exposé un état de l’art des modèles de dégradation de la mobilité avec la réduction de la longueur de canal. Nous nous sommes focalisés sur deux mécanismes : l’interaction avec les défauts neutres et le concept de mobilité « balistique ». Notre travail aura pour but de : - Mettre en place une modélisation précise des mécanismes de dégradation de la mobilité dans un environnement Monte-Carlo MONACO [11], [18]. - Coupler une simulation de process pour prendre en compte par exemple la cinétique des défauts chargés ou neutres. - Mettre en place une validation expérimentale (mesure de magnétorésistance) des hypothèses ou modèle théorique que nous aurons développé durant cette thèse. - D’introduire l’influence de la température lors du process pour évaluer quantitativement la cinétique des défauts dus à l’implantation de dopants. Références [1] S. Morvan, to be published at VLSI (2012). [2] A. Cros et al., "Unexpected mobility degradation for very short devices: A new challenge for CMOS scaling", IEDM (2006). [3] L. Pham-Nguyen et al., "Direct comparison of Si/High-K and Si/SiO2 channels in advanced FD SOI MOSFETs", SOI conf. (2008). [4] J. Ramos et al., "Effective Mobility Extraction Based on a Split RF C-V Method for Short-Channel FinFETs", ESSDERC (2006) pp. 363 -366. 2 dénote le courant de drain en régime quasi-balistique. [5] G. Bidal, D. Fleury, G. Ghibaudo, F. Boeuf, and T. Skotnicki, "Guidelines for MOSFET Device Optimization accounting for L-dependent Mobility Degradation", SNW (2009). [6] F. Andrieu et al., "Experimental and comparative investigation of low and high field transport in substrate- and process-induced strained nanoscaled MOSFETs", VLSI (2005), pp. 176 - 177. [7] O. Weber et al., "Work-function Engineering in Gate First Technology for Multi-VT Dual-Gate FDSOI CMOS on UTBOX", IEDM (2010). [8] M. Cassé et al., "Mobility of strained and unstrained short channel FD-SOI MOSFETs: New insight by magnetoresistance", VLSI (2008). [9] G. Ghibaudo et al., "Electrical transport characterization of nano CMOS devices with ultra-thin silicon film", IWJT (2009), pp. 58 - 63. [10] M. W. Chaisantikulwat et al., "Differential magnetoresistance technique for mobility extraction", Solid States Electronics (2006). [11] K. Huet, J. Saint-Martin, A. Bournel, S. Galdin-Retailleau, and P. Dollfus, "Monte Carlo Study of Apparent Mobility Reduction in Nano-MOSFETs", ESSDERC (2007). [12] L. Pham-Nguyen, C. Fenouillet-Beranger, A. Vandooren, and T. Skotnicki, "In Situ Comparison of Si/High-k and Si/SiO2 Channel Properties in SOI MOSFETs", IEEE Electron Device Letters (2009). [13] P. Kiréev, "La Physique des Semiconducteurs", Éditions de Moscou (1975). [14] C. Erginsoy, "Neutral Impurity Scattering in Semiconductors", Physical Review (1950), vol. 79, no. 6, pp. 1013-1014. [15] V. K. Arora, M. S. Zainal Abidin, S. Tembhurne, and M. A. Riyadi, "Concentration dependence of drift and magnetoresistance ballistic mobility in a scaled-down metaloxide semiconductor field-effect transistor", Applied Physics Letters (2011), vol. 99, p. 063106,. [16] M. S. Shur, "Low ballistic mobility in submicron HEMTs", IEEE Electron Device Letters (2002), vol. 23, pp. 511 -513. [17] M. Zilli, D. Esseni, P. Palestri, and L. Selmi, "On the Apparent Mobility in Nanometric n-MOSFETs", IEEE Electron Device Letters (2007). [18] J. Saint-Martin, "Étude par simulation Monte Carlo d'architectures de MOSFET ultracourts à grille multiple sur SOI", Thèse de doctorat de l'Université Paris-Sud (2005).