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PRÉPARATION
m Tenir compte de la question
• La question vous suggère déjà un plan de réponse, à travers ses motsclés : « instruire », « plaire ».
• Vos titres d’axes doivent tenir compte de ces mots.
• Mais il est plus logique de commencer par « plaire » (qui renvoie plutôt au
récit) et de continuer par « instruire » (qui renvoie à la morale et qui est donc
moins évident). On doit d’ordinaire ordonner les axes d’une explication du
plus évident au moins évident.
Pour bien réussir l’oral : voir guide méthodologique.
La fable : voir lexique des notions.
m Trouver les idées directrices
• Utilisez les pistes que vous ouvre la question, mais composez aussi la
« définition » du texte (voir guide méthodologique).
Fable (genre) classique (mouvement littéraire) qui raconte (type de texte)
un drame dans la forêt (thème), qui argumente sur (type de texte) l’attitude à avoir devant le malheur (thème), tragique et humoristique
(registres), parodique (adjectifs), pour plaire / amuser et instruire (but).
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m Première piste
• Cherchez ce qui rend le récit vivant : circonstances, péripéties, décor…
• Analysez les deux registres, en contraste, de la fable.
• Montrez en quoi les personnages sont vivants et contrastés. Étudiez leur
façon de parler.
m Deuxième piste
• Quelles leçons peut-on tirer de la fable ? Dans quels domaines ?
• Comment se marque l’implication de La Fontaine, son désir d’« instruire » ?
• S’agit-il d’une critique ? d’une leçon de vie ? d’une réflexion sur la vie ?
• Quelle vision des hommes La Fontaine propose-t-il ?
PRÉSENTATION (PLAN DÉTAILLÉ)
Introduction
Contexte et œuvre : genre de la fable jusqu’à La Fontaine considéré
comme mineur, par rapport à la tragédie ou à l’épopée. La Fontaine donne
à la fable un statut littéraire et en montre la valeur.
Ses fables : deux recueils dont le second est plus destiné aux adultes et
aborde des questions plus larges, politiques, philosophiques, littéraires…
Parfois, La Fontaine reprend des thèmes ou des situations des grands
genres comme point de départ de ses fables.
Le texte : livre X, La Lionne et l’Ourse : la Lionne, reine de la forêt, vient de
perdre son petit et exprime bruyamment son désespoir…
Annonce des axes : La Fontaine a pour principe dans ses Fables « d’instruire
et de plaire ». Comment, dans cette fable, réussit-il à intéresser son lecteur, à lui
« plaire », mais aussi à l’« instruire », à faire passer un message, une « leçon » ?
I. Pour « plaire » :
un récit vivant, entre tragédie et comédie
Récit vivant, qui ressemble à une scène de théâtre, entre tragédie et comédie…
1. Une intrigue dramatique
• Ouverture sur une sorte de scène d’exposition funèbre dans le premier
vers : atmosphère de deuil (« avait perdu »), dont le pathétique est souligné
par la désignation de la Lionne comme « Mère ».
• Champ lexical de la mort et de la douleur : « avait perdu », « mort », « j’ai
perdu » ; « douloureuse ».
2. Un décor sobre, digne de la tragédie
L’atmosphère est soulignée par le décor :
• Lieu sombre et profond : « la forêt », les « bois ».
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• Une sorte de « son et lumière » : accent mis de façon hyperbolique sur le
bruit :
– « poussait un tel rugissement », « vacarmes » (en fin de vers) ;
– le bruit se mesure à ses conséquences sur la forêt (amplification) : « Que
toute la forêt était importunée » (hyperbole + personnification de la forêt +
en fait métonymie : la « forêt » = tous les animaux de la forêt ») ; « Nul
animal du sommeil n’était visité » ; « têtes rompues ».
Cependant, le décor est sobrement décrit : peu de pittoresque → esthétique
classique (pas d’exotisme).
3. L’expression hyperbolique de sentiments tragiques
• Des sentiments exprimés de façon hyperbolique : interrogations et
exclamations : « Moi, me taire ? moi, malheureuse ! » (v. 17 : phrases elliptiques d’autant plus fortes) ; « Ah ! j’ai perdu mon fils ! » (v. 18).
• La mention de la fatalité et de la haine : « Hélas ! c’est le Destin qui me
hait ! » (v. 21 : personnification mythologique du Destin grâce à la majuscule).
4. Des personnages individualisés et en contraste
Des animaux humanisés qui dialoguent d’égal à égal, mais en fort contraste.
• Choix qui permet le dialogue d’égal à égal : « ma commère » (= mon amie).
• La Lionne, une héroïne tragique :
– une lionne (rugissement, dévore avec « ses dents ») ;
– une mère ;
– une héroïne tragique : désignée par une périphrase du registre tragique :
« la pauvre infortunée » ;
– mais aussi une reine : désignée par une périphrase qui lui donne un statut
majestueux et politique : « la Reine des bois » (v. 7). Son indifférence à
l’égard de ceux qui apparaissent comme ses sujets, sa cruauté (« tous les
enfants qui sont passés entre vos dents », v. 10-11) sont soulignées.
• L’Ourse, un personnage de comédie ?
– presque un personnage de comédie : interpellation familière : « ma commère » ;
– une bourgeoise ou une courtisane douée de bon sens, au franc parler, qui
va droit au but : « Un mot sans plus » (phrase elliptique) ;
– des expressions imagées : « têtes rompues » ; des apostrophes, des
prises à partie (« Dites-moi ») ;
– mais aussi un ton didactique : questions rhétoriques (v. 10-12 ; 15-16) ; raisonnements appuyés sur une démarche logique (« S’il est ainsi » ; « Si… Que
ne… »), sur le principe de l’analogie (« Si tant de mères… vous … aussi »).
5. Une parodie de tragédie ?
Ce contraste amusant fait de la fable une sorte de parodie de tragédie :
– l’adjectif dépréciatif : « plaintes frivoles » ;
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– le terme péjoratif « vacarmes » qui minimise le discours tragique et, par là,
la situation même.
II. Pour instruire :
la vision du monde d’un moraliste sévère
1. L’implication de La Fontaine
• Une prise de parole, une réaction immédiate. Pas de pause entre récit et
morale, mais un enjambement, marque de l’implication toute particulière de
La Fontaine dans sa fable.
• Des échos et des liens forts entre le récit et la « morale » explicite :
– « misérables humains » = « pauvre infortunée » ;
– le bruit, les plaintes des humains // les rugissements et les plaintes de la
Lionne (v. 17-19), comme un écho (tout cela préparé justement par
l’ambiance créée au début de la fable) ;
– « le destin qui me hait » = « se croit haï des Cieux » ;
– un discours sévère, une vive critique des hommes qui rappelle la sévérité
du ton de l’Ourse à l’égard de la Lionne : « Misérables » (dignes de pitié) et
« plaintes frivoles » résonnent comme une critique, apostrophe qui insiste :
« ceci s’adresse à vous » ;
– « Hécube » : exemple bien choisi pour « raisonner » la Lionne, car il y a identité de sort : c’est une reine, une mère qui elle aussi a perdu des enfants.
2. Quelle leçon ? La teneur de « l’enseignement »
Multiplicité des « leçons » à tirer de cette fable.
a. Une critique sociale et politique ?
Possibilité d’y voir une critique sociale (« la Reine des bois »).
• La reine abuse de son pouvoir, elle est cruelle.
• Elle se soucie peu des gens de rang inférieur (« tous les enfants / Qui sont
passés entre vos dents ») qui sont réduits au silence :
– devant ses cruautés passées (« tant de mères se sont tues ») ;
– mais aussi devant la gêne présente que les rugissements de la Lionne leur
occasionne (« Nul animal n’était du sommeil visité ») : seule l’Ourse a le
courage de protester, au nom des autres.
b. Un jugement sévère sur l’homme : l’erreur commune
Plutôt une philosophie abstraite qu’une morale pratique : vocabulaire
« philosophique » (« humains », « Cieux », « dieux »), une vision de la vie plus
qu’une façon de se comporter face au destin (attitude des classiques).
• L’insistance sur la généralisation (« Lionne » → généralisée en « tous »,
« tout temps ») : « je n’entends que » (hyperbole), « de tout temps », « la
bouche de tous », « quiconque » ; futur de certitude (« il rendra ») :
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– est la marque de la morale d’un apologue ;
– mais témoigne aussi de l’agacement et de la réprobation : ici, ne correspond pas vraiment à celui qu’on appelle parfois « le bonhomme La Fontaine ».
• L’erreur commune constatée :
– constatation que l’homme a tendance à ne « considérer » que son propre
malheur ;
– responsabilité de l’homme dans son malheur : la vie ne lui paraît tragique
que par le regard qu’il porte sur elle : « qui vous force à vous y condamner ? »
(v. 20) ; verbe pronominal : « se croit haï des Cieux » (v. 25) → erreur de
jugement ;
– l’homme ne sait pas prendre de recul ;
– l’homme est égoïste : fréquence du pronom personnel de la 1 re personne :
« je », « me », « moi » (v. 16-17).
c. La voix de la sagesse
À travers le contraste entre « haï des Cieux » et « rendra grâce aux dieux »
(qui riment), La Fontaine récuse une attitude caricaturale et conseille la
modération.
• Une morale stoïcienne :
– résignation, acceptation devant les épreuves ;
– nécessité de garder sa dignité dans le malheur ;
– ne pas « importuner » autrui par ses « plaintes » (« taisez-vous »).
• Il faut relativiser : comparaison avec « Hécube » → si l’on est malheureux,
il faut regarder autour de soi.
• Pour relativiser la dureté de l’épreuve et de la règle de vie proposée, ne
pas oublier le contexte historique du XVIIe siècle : mort des enfants en bas
âge → réalité quotidienne, inéluctable, dont il fallait s’accommoder.
3. Au-delà, un plaidoyer pour la fable
Au-delà de la lecture « morale », une sorte d’art poétique, un parti pris
littéraire.
• La Lionne, personnage tragique, symbole de la tragédie :
– attitude et expression tragiques devant la vie, hyperbolisées ;
– sourde à tout le reste du monde ;
– solitaire.
• L’Ourse, personnage de fable, a des traits de caractère qui peuvent faire
penser aux caractéristiques de la fable :
– son parler familier ;
– sa sobriété de moyens stylistiques ;
– son ouverture à tous : elle parle pour tous, s’adresse aussi à la reine →
leçon universelle.
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Or, c’est l’Ourse qui est dans le vrai et qui a l’approbation de La Fontaine →
à travers elle, c’est la fable qu’approuve l’auteur.
• La Fontaine plaide ainsi pour la fable et l’humour :
– la Lionne ne fait pas vraiment pitié (ce n’est donc pas une vraie tragédie…)
et elle est dans l’erreur ;
– le fabuliste tourne en dérision les grands genres : parodie de tragédie (portrait et discours de la Lionne / ton de la morale : « Misérables humains »,
« haï des Cieux »), allusion à l’épopée (« Hécube ») ;
– une certaine gaieté, même dans les situations les plus sombres.
→ Le lecteur comprend que c’est la fable (et plus spécialement cette fable)
qui énonce le mieux la vérité, la sagesse, très classique → une leçon de philosophie mais aussi d’écriture.
Conclusion
• Synthèse : ce n’est pas une des fables les plus connues, peut-être à
cause du ton un peu sévère, des circonstances du récit (perte d’un enfant,
plaintes d’une mère).
Mais l’intérêt de la fable tient à ce qu’elle est, en plus d’une histoire, une
critique politique et morale, mais aussi et surtout un moment de la réflexion
de La Fontaine sur le thème central de ses fables : le bonheur qu’il faut
« apprendre » à se forger.
• Ouverture : d’autres voies vers le bonheur proposées dans les Fables :
l’amitié, la nature, la modération des désirs, une vie bien réglée et de travail, la
connaissance de ses limites… → principes essentiellement classiques.
ENTRETIEN
Question
L’examinateur pourrait débuter l’entretien par la question suivante.
m Quels sont les avantages d’argumenter par l’intermédiaire
d’un récit ?
Il s’agit d’une question de cours. Mais il ne faut pas le « réciter » purement
et simplement. Vous devez expliquer et alimenter chaque remarque d’exemples personnels qui l’illustrent.
Pour réussir l’entretien : voir guide méthodologique.
L’apologue, la fable, le conte philosophique : voir lexique des notions.
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L’entretien pourra se poursuivre dans diverses directions, par
exemple :
m Quels autres fables connaissez-vous ?
m Connaissez-vous des fables contemporaines ?
m Quelle différence faites-vous entre la fable et le conte philosophique ?
Lequel vous paraît le plus efficace ?
m Pensez-vous que l’on puisse rire de tout, même de sujets très sérieux ?
Pistes pour répondre à la première question
Argumenter à travers un récit :
– les diverses formes de l’apologue (fable, conte philosophique, utopie…) ;
– ses composantes : une « histoire », une « leçon » (explicite ou implicite).
1. La vivacité d’un récit
• Fait appel au goût pour les histoires : on s’intéresse aux personnages, aux
rebondissements, à l’action.
• Permet l’évasion dans d’autres mondes.
• Admet le merveilleux.
• Permet de recourir à toutes sortes de registres : humour, pathétique…
• Évite le discours théorique ou le limite au minimum ; pas de ton didactique
apparent.
2. Le type de « raisonnement » que le récit implique :
la démarche inductive
De l’exemple à la généralisation, du concret à l’abstrait : la vertu de
l’exemple.
• Le récit parle à l’imagination avant de parler à l’esprit.
• Le lecteur suit l’histoire sans penser à la morale : il se laisse entraîner et…
surprendre par la logique du raisonnement (inductif).
• Le récit oblige le lecteur à un effort d’interprétation : il doit réfléchir pour
« traduire » le récit (exemples).
• Lorsque le récit est critique, on admet aisément la critique dans un autre
monde : la transposition dans son propre monde est imposée au lecteur.
• Le récit fictif sert de masque pour se défendre contre la censure.
Ouverture : on peut aussi argumenter à travers une « histoire », non pas
racontée (récit) mais jouée : le théâtre offre aussi de grandes ressources
pour convaincre et persuader.
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