PATHOLOGIE ENDOCERVICALE A L`HYSTEROSALPINGOGRAPHIE
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PATHOLOGIE ENDOCERVICALE A L`HYSTEROSALPINGOGRAPHIE
PATHOLOGIE ENDOCERVICALE A L’HYSTEROSALPINGOGRAPHIE N’GOAN A.M. * ; KEITA K. **** ; N’GBESSO R.D. ** ; OUATTARA D.N. *** RESUME MATÉRIEL ET MÉTHODES A partir d’une étude prospective portant sur 11 mois, nous analysons 238 cas de pathologie endocervicale observés au service de Radiologie du CHU de Yopougon. Elle représente 47% de l’ensemble des hystérosalpingographies réalisées. L’ a ffection est fréquente chez la femme jeune en période d’activité génitale, entre 20-40 ans ayant dans ses antécédents une notion d’agression mécanique de l’utérus. Au terme de cette analyse, il convient de souligner la nécessité d’une information et d’une éducation des femmes. Mots-clés : Pathologie endocervicale, stérilité secondaire, technique de la traction-injection Il s’agit d’une étude prospective portant sur 11 mois qui s’est appuyée sur l’analyse de dossiers de patientes adressées au service de Radiologie du CHU de Yopougon de mars 1990 à février 1991 pour hystérosalpingographie. INTRODUCTION Malgré l’apparition des nouvelles méthodes, en particulier l’échographie et la coelioscopie, les indications de l’hystérosalpingographie restent larges dans l’exploration de la pathologie utérine muqueuse et tubaire, et sont à intégrer dans une démarche diagnostique logique. Elle reste l’examen de choix dans l’étude morphologique de la cavité utérine et des trompes en raison de la finesse des images obtenues. Confrontés à la pratique pluriquotidienne de l’hystérosalpingographie, nous avons été frappés à l’analyse des clichés par l’importance de la pathologie cervicale mise en évidence par la technique de la traction. La stérilité représente la principale indication de l’hystérosalpingographie ; ceci certainement en raison des croyances et de la structure de la société africaine qui rejette la femme stérile. Cette étude a pour but de faire le point de cette imagerie cervicale pathologique et de voir son importance. - d’analyser ses conséquences sur l’avenir obstétrical. * Interne ; Service de Radiologie CHU de Yopougon - 21 B.P. 632 Abidjan 21 ** Assistant Chef de Clinique : Service de Radiologie CHU de Yopougon Cette étude prend en compte : - les motifs de demande de l’hystérosalpingographie, - les antécédents gynécologiques et obstétricaux de la patiente, - technique de réalisation de l’examen, - les résultats de l’hystérosalpingographie. 1 - L’interrogatoire Minutieux, il fait préciser les antécédents de chaque patiente si possible. Il s’agit de : - la gestité - la parité - les interventions sur l’utérus : * césariennes, * interruption de grossesse volontaire ou non, * intervention pour fibrome - les grossesses extra-utérines (GEU). 2 - Les aspects radiographiques La technique de réalisation * le produit de contraste Parmi les divers hydro-solubles iodés proposés, le meilleur choix actuel est le Télébrix Hystéro. Il donne des images fines, contrastées, aussi bien du canal cervico-isthmique et de la cavité utérine que des trompes. * la préparation Il faudra s’abstenir de la prise de médicaments ou de pro*** Assistant Chef de Clinique : Service de Radiologie du CHU Treichville **** Professeur Agrégé, Chef de Service de Radiologie CHU Yopougon Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (6) 366 duits radio-opaques. Une antibiothérapie de couverture est instituée deux jours avant l’examen et trois jours après celui-ci. La veille de l’examen, au soir, un antispasmodique est pris sous forme de suppositoire. * la conduite de l’examen De façon systématique, l’examen doit être précédé par un bilan clinique soigneux visant à détecter ses contreindications essentielles qui sont : - d’ordre général * état fébrile, * allergie à l’iode - d’ordre local * grossesse : l’examen effectué en début de cycle (entre le huitième et le douzième jour) évite toute irradiation foetale intempestive. * l’infection génitale, * l’hydrosalpinx Une fois les contre-indications recherchées, on met en place le matériel d’injection. Celle-ci est précédée par l’évacuation vésicale et la prise du cliché sans préparation. Le cliché sans préparation est effectué afin de mettre précisément au point les contrastes radiologiques avant l’injection opaque. Il détecte les éventuelles affections osseuses du pelvis et les corps étrangers métalliques. La prise des clichés Chaque film est enregistré sous contrôle radioscopique télévisé. Ce contrôle scopique doit être aussi bref que possible. Notre protocole comporte presque toujours sept clichés N’GOAN A.M. ; KEITA K. ; N’GBESSO R.D. ; OUATTARA D.N. - le cliché en réplétion Le remplissage est effectué suffisamment lentement pour éviter une distension pariétale très vivement douloureuse. - le cliché de profil Il est indispensable. Il faut obtenir un profil vrai de l’utérus plutôt que le profil du bassin. Il renseigne sur l’état de l’isthme et du col ; sur la position spontanée de l’utérus en l’absence de traction. Il permet d’apprécier l’axe utérin et ses angles. Il objective les anomalies des faces utérines. Il précise le trajet et la position des trompes et la topographie des calcifications pelviennes éventuelles par rapport à l’utérus. Le cliché d’évacuation précoce Dès que les passages péritonéaux du produit de contraste sont suffisants, on retire le matériel d’injection. Ce cliché donne une deuxième image “en couche mince” de la cavité utérine et assure une excellente analyse du canal endocervical. Sur ce même cliché, les trompes sont particulièrement bien visibles. On apprécie leur souplesse et les variations de leur trajet. Le cliché tardif Permet d’étudier : - le brassage péritonéal de l’hydrosoluble iodé, - de détecter les stases utérines et tubaires, - et d’analyser les adhérences péritonéales. Il est pris 10 à 15 minutes après l’ablation du matériel d’injection en incidence de face. Dans certains cas, on a recours à des clichés complémentaires en oblique. II - RESULTATS - le cliché de remplissage “couche mince” : il permet d’obtenir une image en demi-teinte de la cavité utérine. La quantité du produit de contraste injecté est faible, fonction des dimensions de l’utérus, suffisante pour l’imprégner en totalité sans noyer son relief muqueux et sans masquer les anomalies éventuelles de l’endomètre. Ce film donne les informations les plus fines sur les lésions qui ne modifient pas la morphologie générale utérine (polypes, hyperplasie). - le cliché en demi-réplétion Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (6) 1 - Epidémiologie * Fréquence En 11 mois de pratique hystérosalpingographique, 268 patientes ont présenté une pathologie cervicale. L’ensemble des hystérosalpingographies réalisées sur cette même période est de 570. La pathologie cervicale représente 47% des résultats observés après hystérosalpingographie. PATHOLOGIE ENDOCERVICALE… 367 * Age Les âges extrêmes sont 18 et 64 ans. La tranche d’âge la plus touchée est celle comprise entre 25 et 35 ans. Tableau 1 : Répartition par tranche d’âge Tranche d’âge Nb % 15-25 25-35 48 156 17,91 58,20 35-45 45-55 36 1 13,43 0,37 Pathologie Nb % Synéchie + aspect cicatriciel du col 156 58,20 55-65 1 0,37 Endométriose 37 13,80 Polypes 15 5,59 Fibrome cervico-isthmique 2 0,74 Béance cervicale 24 8,95 Diverticule 1 0,37 Envahissement néoplasique 1 0,37 Répartition des lésions observées 26 patientes n’ont pas précisé leur âge soit, 9,7%. Les motifs de la demande de l’examen Indications Nb % Stérilité secondaire 225 83,95 Stérilité primaire Aménorrhée ou hypménorrhée Post IVG 13 4,85 7 2,61 Douleurs pelviennes 4 1,49 Contrôle après césarienne Contrôle après salpingectomie 3 6 1,11 2,23 Bilan préopératoire de fibrome Masse pelvienne 6 1 2,23 0,37 Métrorragie Bilan contraception 1 1 0,37 0,37 Polyménorrhée 1 0,37 Des associations pathologiques ont été retrouvées La stérilité secondaire représente un motif fréquent de demande d’hystérosalpingographie. Histogramme de la répartition des âges Pathologies Nb % Synéchie + adénomyose 17 6,33 Synéchie + Béance cervicale 10 3,72 Synéchie + Polype 2 0,74 Endométriose + Béance 3 1,11 Les lésions cervicales isolées Représentent 112 cas soit 42,1 de l’ensemble des patientes présentant une pathologie endocervicale. Pathologie Nb % Synéchie 64 55,65 Endométriose 15 13,04 Béance 10 9,69 Polype 7 6,08 Envahissement néoplasique 1 0,86 Synéchie + Endométriose 9 7,82 Synéchie + Béance 2 1,73 Béance + Endométriose 4 3,47 156 160 140 120 100 80 60 48 36 40 20 1 1 0 15 25 35 45 55 65 Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (6) N’GOAN A.M. ; KEITA K. ; N’GBESSO R.D. ; OUATTARA D.N. 368 Corrélation entre les lésions observées et les antécédents Gynéco-Obstétricaux Stérilité secondaire Contrôle Post-Opératoire Stérilité primaire Après IVG Curetage Après accouchement Nl Fibrome Césarienne Synéchies 49 1 5 1 Adénomyose + Synéchie 8 Adénomyose 13 1 Béance 3 1 2 2 Synéchie + Béance 3 Polype 1 Adénomyose + Béance 2 Envahissement néoplasique du col COMMENTAIRES Masse pelvienne Douleurs pelviennes 1 1 4 1 Au plan épidémiologique Il s’agit d’une pathologie de la femme jeune entre 20 et 40 ans avec un pic entre 20 et 30 ans. Dans les antécédents de celle-ci, on retrouve la notion d’agression mécanique de l’utérus. a) La lésion endocervicale la plus retrouvée est la synéchie et les aspects cicatriciels du canal cervical que nous avons assimilé aux synéchies. Il s’agit radiologiquement d’une image lacunaire centrale non modifiée par la réplétion progression de la cavité. Ailleurs le col apparaît effilé, rétréci par endroits, asymétrique. Dans notre étude, elle est presque toujours secondaire à un curetage : 85,9% des cas de synéchies de femmes ayant précisé leurs antécédents. Dans la littérature (9-10) l’origine de ces synéchies est le plus souvent traumatique post abortum parfois post partum (curetage post partum), les synéchies tuberculeuses étant de plus en plus rares (9). Au plan radiographique Sur la technique de réalisation de l’hystérosalpingographie Il s’agit de la technique de la traction injection qui permet : - d’apprécier la souplesse de la cavité utérine, - de mieux préciser l’aspect de la région cervicale sur les clichés en réplétion, alors que classiquement c’est le cliché d’évacuation qui permettait une meilleure analyse de l’endocol. Les synéchies traumatiques sont dues, dans la grande majorité des cas, à l’évacuation du contenu utérin (œuf ou débris ovulaires) par un instrument traumatisant : curette (9). Les synéchies faisant suite aux curetages biopsiques, aux césariennes, aux biopsies d’endomètre sont beaucoup plus rares (9). Des synéchies survenant après myomectomie ont été décrites. Sur les résultats de l’HSG La pathologie cervicale apparaît variée. Les synéchies sont donc principalement la complication d’un accouchement ou d’un avortement. La pathologie du col est riche et comprend : - les synéchies et les aspects cicatriciels du col * les endométrioses * les polypes * les fibromes cervico-isthmiques * les béances Médecine d'Afrique Noire : 1993, 40 (6) PATHOLOGIE ENDOCERVICALE 369 b) La béance cervicale Evoquée devant l’aspect élargi du canal cervical par la mesure du diamètre transversal du col. Dans notre étude, elle représente 8,16% des lésions purement cervicales. Mais la prudence s’impose dans la conclusion d’une béance cervicale. En effet, la découverte d’un élargissement du canal cervical à l’HSG pose le problème de la suspicion de béance cervicale, mais la confirmation est basée sur l’examen gynécologique avec le calibrage du col par les bougies de Hegar. c) L’endométriose Il s’agit d’images d’addition au niveau de la région cervicale. L’étiologie de l’endométriose reste inconnue. Son caractère cervical isolé n’est pas spécifique (3) et ne peut être tenu pour responsable d’une stérilité. Dans notre étude, elle représente une pathologie fréquente 13,26% des cas de façon isolée, cependant, elle s’associe aux synéchies, 8,16% des cas, et à la béance, 2,04%. d) Polype et fibrome cervico-isthmique L’image du polype est une encoche marginale ou une lacune intracavitaire bien limitée, unique ou multiple (6). L’aspect du fibrome est variable suivant sa situation (6). Sous-séreux, il peut donner un aspect allongé, étiré du canal cervico-isthmique. Mais les fibromes sous-séreux peuvent être associés à une HSG normale. Sous muqueux, il s’agit d’un polype fibreux et donne une lacune endocavitaire. Des associations pathologiques peuvent se voir étant donné l’intrication des causes. A l’analyse, nous constatons que le motif le plus fréquent de demande de l’examen est la stérilité. En cela notre étude rejoint d’autres études (10). Quelle est la place de cette pathologie du col dans la stérilité ? Si la béance et le fibrome cervico-isthmique apparaissent comme des facteurs favorisant de stérilité secondaire en provoquant des avortements spontanés, le rôle de l’endométriose, des synéchies et des polypes apparaît moins évident dans la stérilité. L’étude de l’état du col peut apparaître important pour établir le pronostic de l’accouchement. Si le col n’intervient pas directement dans le processus de la nidation, son aspect peut préjuger de la qualité de la muqueuse utérine sus-jacente. CONCLUSION La première analyse de dossiers de femmes présentant une pathologie endocervicale à l’hystérosalpingographie, note la fréquence de ces lésions chez la femme jeune en période d’activité génitale et plus particulièrement dans la tranche d’âge de 20 à 30 ans. Notre étude nous permet : - de mettre un accent particulier sur la place de la pathologie endocervicale dans les problèmes de stérilité surtout secondaire, - de souligner l’importance des synéchies traumatiques dans ces lésions endocervicales, - d’insister sur l’impérieuse nécessité de l’information et l’éducation des femmes, les interventions volontaires de grossesse et leurs conséquences tant au plan individuel que collectif. BIBLIOGRAPHIE 1 -J. BARBO, B. PARENT, J.B. DUBUISSON, H. GUEDJ Hystéroscopie Encycl. Méd. Chir. (Paris, France) Gynécologie 72 ; A10 ; 12 - 1984, 16 2 -J. BELAISCH-ALLARI, J. BELAISCH Endométriose et stérilité Rev. Prat. (Paris), 1990, 40, 12 3 -M. CANIS, E. GLOWCZOWER, M.A. BRUHAT Traitement de l’Endométriose Encycl. Méd. Chir. (Paris, France), Gynécologie 150 A 30, 3 - 1989, 10 4 -D. DARGENT Polype du col : que faire ? Cah. Méd. Lyonnais, 1975, 51, 209-212 5 -M. DESRENTES Hystérosalpingographie pour stérilité en milieu africain à propos de 729 examens Méd. 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