la societe civile et l`assujettissement a l`impot sur les societes

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la societe civile et l`assujettissement a l`impot sur les societes
N°21– Octobre 2013
LA SOCIETE CIVILE ET L’ASSUJETTISSEMENT
A L’IMPOT SUR LES SOCIETES
SOMMAIRE
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CAS D’ASSUJETISSEMENT AUTOMATIQUE
La société civile, dotée de la personnalité morale n’est pas
D’UNE SOCIETE CIVILE A L’IS
considérée comme ayant un caractère commercial en raison de
CAS D’ASSUJETISSEMENT VOLONTAIRE sa forme ou de son objet. Son activité est civile. Sur le plan
fiscal, généralement et par application des dispositions des
D’UNE SOCIETE CIVILE A L’IS -Option
articles 8 et suivants du Code général des impôts (CGI), une
INCIDENCES
FISCALES
DE société civile de type patrimonial est « semi-transparente » et
relève du régime des sociétés de personnes.
L’ASSUJETISSEMENT A L’IS
•
TRAITEMENT FISCAL D’UNE VENTE DE Par contre une société civile peut entrer de plein droit, donc
PARTS
D’UNE
SOCIETE
CIVILE automatiquement, ou sur option, donc volontairement, dans le
champ d’application du régime fiscal des sociétés de capitaux
ASSUJETTIE A L’IS
•
PRESENCE EVENTUELLE DE COMPTES
COURANTS DEBITEURS DANS UNE
CAS D’ASSUJETISSEMENT AUTOMATIQUE D’UNE SOCIETE CIVILE A
SOCIETE CIVILE ASSUJETTIE A L’IS
L’IS
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(impôt sur les sociétés -IS).
INTERETS
DE
L’ASSUJETTISSEMENT Il est acquis que les sociétés civiles, mêmes celles « immobilières », qui
effectuent des opérations présentant le caractère de bénéfices industriels ou
D’UNE SOCIETE CIVILE A L’IS
commerciaux (BIC) répondant à la définition posée par les articles 34 et 35
du CGI sont passibles (automatiquement) de l’impôt sur les sociétés alors
même que leur forme reste civile.
1.
Les locations en meublé:
Le cas classique pourtant encore ignoré de quelques professionnels est la SCI
qui donne habituellement des locaux meublés en location : cette SCI doit
être soumise à l’IS.
En effet, en ce qui concerne les locations en meublé, la jurisprudence est
ancienne (CE Novembre 1980 ou CE juillet 1985). Le Conseil d’Etat dans un
arrêt du 28 décembre 2012 a encore une fois confirmé cette jurisprudence
et pourtant il s’agissait en l’espèce d’une SCI ayant loué en meublé des
locaux 30 jours sur 2 ans (2 semaines par an) et pendant un mois sur une
3eme année. Nous étions loin de penser que dans une telle hypothèse il
pouvait s’agir de location « habituelle », d’autant que la Cour administrative
d’Appel (Marseille 3 février 2011), avait relevé que la SCI avait conservé la
disposition des locaux en dehors des courtes périodes louées et qu’elle les
mettait gratuitement à la disposition de la famille du gérant durant le reste
de l’année, la location « en meublé » présentant donc en l’espèce un
caractère occasionnel et non habituel. Le Conseil d’Etat ne l’a pas entendu
de cette façon, précisant que la durée de location est sans incidence sur son
caractère habituel, lequel résulte de ce que les locaux meublés ont été loués
à plusieurs reprises au cours des années vérifiées.
La doctrine administrative est conforme à cette jurisprudence. Les SCI dont
la seule activité est de louer un local meublé durant la saison estivale ou
hivernale exercent une activité commerciale et sont donc passibles de l’IS
(Rep. Min Mauger JOAN 20 novembre 1989, n° 15286).
Bien entendu, les locations de locaux équipés relèvent des mêmes règles
fiscales.
Les activités de marchand de biens, profits de
construction-vente à titre habituel, opérations de
lotissement :
Les sociétés civiles qui se livrent à une activité de
marchand de biens, qui réalisent à titre habituel des
profits de construction-vente ou certaines opérations de
lotissement sont assujetties de plein droit à l’IS.
Exception : article 239 ter du CGI : l’imposition à l’IS ne
s’applique pas aux SCI de construction-vente qui restent
ainsi « semi-transparentes » fiscalement.
-
D’une manière générale, il existe une tolérance :
Les sociétés civiles qui réalisent des recettes fiscalement
considérées comme commerciales n’excédant pas 10% du
montant de leurs recettes totales hors taxes, ne sont pas
automatiquement soumises à l’IS.
CAS D’ASSUJETISSEMENT VOLONTAIRE
SOCIETE CIVILE A L’IS – Option
D’UNE
L’article 206, 3 du CGI permet cette option. Elle peut être
exercée lors de la constitution de la SCI ou en cours de vie
sociale. Dans ce dernier cas, l’option doit être notifiée
avant la fin du 3eme mois de l’exercice au cours duquel
elle est réalisée, un rescrit du 2 aout 2011 n° 2011/23 a
même précisé que rien n’interdisait de clôturer par
anticipation un exercice social et opter dans les trois mois
de cette clôture.
Conditions de l’option : (article 22 et 23 annexe IV
du CGI) :
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•
•
L’option doit être signée dans les conditions prévues
par les statuts, ou à défaut, par l’ensemble des
associés de la SCI. A défaut de disposition expresse
dans les statuts qui peuvent donc prévoir une majorité
spécifique autre, ce sera l’unanimité des associés qui
sera requise.
L’option est irrévocable (sauf pour certaines sociétés
qui ont opté avant le 01/01/1981).
Elle doit être notifiée au service des impôts du lieu du
principal établissement, et nous conseillons l’envoi en
recommandé avec demande d’accusé réception. Le
contenu de l’option doit indiquer la désignation de la
société et l’adresse du siège social, les noms prénoms
et adresses de chaque associé ainsi que la répartition
du capital social.
INCIDENCES FISCALES DE L’ASSUJETISSEMENT A
L’IS .
-
bis du CGI) et sauf cas particulier, les apports purs
et simples de toute nature réalisés par une société
soumise à l’IS, à une SCI soumise dès l’origine à l’IS
sont
également
exonérés
de
droits
d’enregistrement. Par contre les apports purs et
simples à une SCI soumise dès l’origine à l’IS par
des personnes non soumises à l’IS sont soumis aux
droit d’enregistrement si ces apports portent sur un
immeuble (ou assimilé), sur un droit immobilier ou
sur un droit au bail (droit de mutation de 5% sur la
valeur vénale au jour de l’apport).
Les apports à titre onéreux (par exemple par la
prise en charge par la SCI d’un passif incombant à
l’apporteur) présentent le caractère d’une vente et
génèrent des droits d’enregistrement.
Les apports « mixtes » sont traités selon les règles
ci-dessus.
Au regard des impôts directs :
Les bénéfices passibles à l’IS sont déterminés de la même
manière que les bénéfices industriels et commerciaux avec
les règles du régime réel et exclusion du régime micro.
Le taux d’imposition est de 33.33% avec un taux de 15% sur
les premiers 38120 € de bénéfice si le capital social est
intégralement libéré, si le capital social est détenu pour
75% au moins par des personnes physiques (directement ou
indirectement dans la limite d’un degré d’interposition) et
si ce seuil de détention est respecté de manière continue.
En cas de cession d’éléments d’actif (notamment les actifs
immobiliers), application du régime des plus values
professionnelles, dont le principe conduit à calculer la
différence entre le prix de cession et la valeur comptable
des éléments cédés, celle-ci correspondant à la valeur
d’origine du bien diminuée des amortissements pratiqués,
déduits fiscalement.
•
En cours de vie sociale :
Au regard des droits d’enregistrement :
L’assujettissement (de plein droit ou sur option) d’une
société civile à l’IS peut rendre exigible des droits
d’enregistrement lorsque la société a bénéficié depuis
le 1er aout 1965 de certains apports en nature par des
personnes physiques ou morales non soumises à l’IS.
(Article 809 du CGI). Il s’agit en fait d’apports portant
sur des immeubles (droits immobiliers, droits au
bail……..) ou des fonds de commerce ou clientèle
(hypothèse
rare
s’agissant
de
société
civile
patrimoniale).
Au regard des impôts directs :
Lors de la constitution :
•
Au regard des droits d’enregistrement :
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les apports purs et simples de numéraire sont
exonérés de droits d’enregistrement (article 810
Les conséquences sont différentes selon que la société
exerce ou non une activité professionnelle (BIC, BNC,
BA).
L’article 202 ter II du CGI dispose que l’impôt sur le
revenu est établi au titre de la période d’imposition
précédant immédiatement le changement de régime à
raison des revenus et des plus values non encore
imposés à la date du changement de régime, y compris
ceux qui proviennent des produits acquis et non encore
perçus ainsi que des plus values latentes incluses dans
l’actif social.
Le traitement pratique des produits acquis non encore
perçus (et des dépenses engagées non encore payées)
doit se faire selon les règles de BIC. Il s’agit donc de
mettre en place une comptabilité d’engagements
(comptabilité commerciale) et non plus une
comptabilité de règlement.
En ce qui concerne les plus ou moins values latentes
constatées, la société a le choix entre la réévaluation
comptable de la valeur de ses éléments d’actifs dans
le bilan d’ouverture de sa première période IS, ce qui
entrainera une imposition immédiate des plus ou moins
values latentes selon les règles habituelles ou
l’inscription au bilan d’ouverture de la valeur
d’origine des biens et des amortissements et
provisions qui auraient pu être déduits si cette
société civile avait été soumise à l’IS depuis leur
acquisition, ce qui n’entrainera pas la taxation
immédiate des plus ou moins values. Attention ce
choix est global et non pas élément d’actif par
élément d’actif.
Les modalités déclaratives prévoient le dépôt dans les
60 jours de la date d’assujettissement à l’IS des
déclarations et documents fiscaux habituels. La société
doit donc déposer, pour ses revenus fonciers, une
déclaration n° 2072 et les associés reporteront le
moment voulu les résultats « fonciers » ainsi dégagés
et pour leurs revenus de capitaux une déclaration IFU
(2561 ter) avec traitement habituel au niveau des
associés.
L’assujettissement à l’IS entraine également les
conséquences suivantes :
Etablissement d’un bilan d’ouverture :
(Dans les 60 jours suivant son assujettissement), ce qui
matérialisera selon le choix exposé ci avant le
traitement fiscal des plus ou moins values latentes.
Calcul de l’assiette de bénéfice taxable à l’IS :
Les amortissements des biens amortissables devront
être constatés, sur la base de la valeur vénale si c’est
l’option choisie lors de l’établissement du bilan
d’ouverture
sur
une
durée
d’amortissement
commençant à la date du changement de régime fiscal
ou sur la base de la valeur historique si c’est l’autre
option choisie, le total des amortissements déductibles
étant limité à la valeur résiduelle des biens avec une
durée d’amortissement appréciée à la date
d’acquisition des biens.
Calcul des plus ou moins values en cas de
cession ultérieure par la société :
Si la société a choisi l’option « réévaluation comptable
de la valeur de ses éléments d’actifs » lors du passage à
l’IS, les plus ou moins values sont déterminées pour
chaque bien cédé par différence entre le prix de vente
et la valeur nette comptable. Dans le cas contraire, les
plus ou moins values sont déterminées pour chaque bien
cédé par différence entre le prix de cession et le prix
d’acquisition
diminué
des
amortissements
effectivement
déduits
et
des
amortissements
« reconstitués » depuis l’acquisition du bien (ceux qui
auraient fait l’objet d’une déduction en cas
d’assujettissement de la société à l’IS depuis l’origine).
Il est, bien entendu, rappelé que les capitaux résultant
de la cession d’actifs appartiennent à la société et non
aux associés. Pour en appréhender les montants, il
faudra appliquer les règles prévues et notamment celles
des distributions de dividendes en supportant
l’imposition personnelle correspondante.
TRAITEMENT FISCAL D’UNE VENTE DE PARTS D’UNE
SOCIETE CIVILE ASSUJETTIE A L’IS
Les règles applicables depuis le 1er janvier 2013 peuvent
être modifiées par les Lois de finances actuellement en
préparation. Il conviendra donc de vérifier les éventuelles
nouvelles dispositions avant d’appliquer celles rappelées ci
après.
Les plus values de cessions de parts sociales de sociétés
civiles soumises à l’IS et réalisées par une personne
physique agissant dans le cadre de la gestion de son
patrimoine privé entrent dans le champ d’application des
plus values de cessions de valeurs mobilières (article 150-0
A du CGI). Ce n’est pas le régime des plus values
immobilières qui est applicable sur ce point. Il est inutile de
rechercher si la société est ou non à prépondérance
immobilière.
Depuis le 1er janvier 2013, ces plus values sont soumises au
barème progressif de l’impôt sur le revenu
après
abattement de 20% sur la plus value pour une détention de
2 à 4 ans, de 30% pour une détention de 4 à 6 ans et de 40%
pour une détention de plus de 6 ans.
Attention, la vente de parts d’une société civile soumise à
l’IS par des associés personnes morales à l’IS entraine
également la taxation des plus ou moins values et si un
dispositif (article 2319-I-a quinquiès du CGI) prévoit bien
une quasi exonération d’IS lors de la cession de titres de
participation, ce dispositif n’est normalement pas
applicable lors de la cession de parts de société civile à
prépondérance immobilière. La notion de prépondérance
immobilière reste donc dans cette hypothèse un
inconvénient certain en matière de plus value. D’ailleurs,
cette notion entraine aussi l’application des droits
d’enregistrement (pour le cessionnaire) à hauteur de 5%
sans abattement.
qu’ils sont taxés à un taux fixe avec
réinvestissement possible et charge fiscale réduite.
PRESENCE EVENTUELLE DE COMPTES COURANTS
DEBITEURS DANS UNE SOCIETE CIVILE ASSUJETTIE A
L’IS
Problématique juridique : (rappels)
Inconvénients :
-
Dans une société civile, l’existence de comptes courants
« associés » débiteurs n’est pas expressément interdite
par les textes, mais il n’est pas possible pour les associés
de s’attribuer des actifs sociaux hors différentes
possibilités habituelles de type distribution du résultat, de
réserves ou réduction du capital et il n’est de toute façon
pas « dans l’intérêt d’une société civile » de consentir des
prêts à ses associés. Le risque civil existe donc, ainsi
d’ailleurs que le risque pénal d’abus de confiance (314-1
du code pénal).
-
Problématique fiscale supplémentaire du fait de
l’assujettissement à l’IS :
Ces sommes (comptes courants débiteurs) sont présumées
constituer des revenus distribués en application des
dispositions de l’article 111 du CGI. C’est une présomption
susceptible de preuve contraire. L’administration fiscale
doit, préalablement à toute imposition, démontrer que les
sommes ont bien été mises à la disposition de l’associé.
Dans ce cas, l’associé sera taxé sur le montant de ces
sommes comme s’il s’agissait d’une distribution de
dividendes, sans abattement de 40% et avec application
des prélèvements sociaux.
Certes il s’agit d’une présomption « simple », mais pour
échapper à la taxation, il faudra établir qu’il ne s’agit pas
de distributions de produits sociaux et en cette matière
rien ne sera simple. En cas de remboursement ultérieur
des « avances » ayant été taxées en tant que revenus
distribués, l’impôt pourra être révisé (article 49 bis annexe
III du CGI).
INTERETS DE L’ASSUJETTISSEMENT D’UNE SOCIETE
CIVILE A L’IS.
Avantages :
-
-
Eviter que les associés soient imposés sur la
fraction de bénéfices correspondant à leurs droits
tant qu’il n’y a pas répartition « volontaire » des
bénéfices en leur faveur. Cela évite aux associés
de supporter une charge fiscale personnelle
notamment dans le cas où la société ne peut pas
leur verser financièrement leur quote part de
résultat (cas du remboursement des emprunts par
exemple).
Si l’associé n’a pas de besoins immédiats en
revenu, la capitalisation des bénéfices est
« optimisée » d’une part parce qu’ils sont calculés
selon les règles commerciales plus proches de
l’économie générale et en bénéficiant des
éventuels amortissements et d’autre part parce
-
Si l’associé souhaite la perception de revenus
complémentaires (par exemple pour la retraite),
l’assujettissement à l’IS conduit nécessairement à
la distribution de dividendes et double imposition
du bénéfice : d’une part IS à 33.33% dans la société
et d’autre part IR et prélèvements sociaux pour les
dividendes.
La cession des actifs de la société civile génère une
charge fiscale pour la société (impôt sur les sociétés
calculé sur une plus value sans abattement et en
retenant la valeur comptable résiduelle….), et une
charge fiscale pour les associés lors de la « sortie »
des fonds de la société. La charge fiscale globale
est généralement plus onéreuse que celle constatée
si l’investissement est réalisé par une société civile
non assujettie à l’IS.
L’option est irrévocable ce qui ne permet donc pas
de revenir au régime fiscal classique.
La gestion et la comptabilité sont plus complexes et
peuvent entrainer un surcout d’exploitation.
Parlons-en ensemble !