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© Stéphanie Rivoal
NOUS / SOIGNONS/
CEUX / QUE LE MONDE / OUBLIE /
PEU / À / PEU/
1
1988-2008
– Témoigner de la détresse des enfants isolés, souvent défavorisés
– Soigner les blessures qui ne se voient pas
– Participer à l’humanisation des hôpitaux, aux côtés des soignants
© Cyrille Girard
UN ENFANT
HOSPITALISÉ
NE PEUT PAS
ÊTRE SEULEMENT
UN OBJET
DE SOINS ”
Dr. Daniel Alagille
Chantal H. et Abdullah,
au centre des Côtes
Médecins du Monde est une association de solidarité internationale
qui a pour vocation de soigner les populations les plus vulnérables
dans des situations de crises et d’exclusion partout dans le monde
et en France.
UNE
RENCONTRE
N’DJAMENA
JANVIER 1982
Je me souviens très bien
de ce petit garçon frêle et
silencieux, immobile sur son
lit, dans une salle commune
de l’Hôpital de N’Djamena.
6
ques Lebas, qui réhabilite l’hôpital et la
interrogent pour que nous te disions ce
maternité détruits par la guerre civile. Je
que tu vas devenir. Mais ni moi ni per-
suis enceinte de 4 mois.
sonne ne peut te répondre et tu restes
Comme je ne suis ni médecin ni infir-
là, immobile, sans une larme.
mière, c’est auprès des enfants que je
Le diagnostic d’une papillomatose la-
trouve ma place.
ryngée est envisagé par les médecins.
Je croise pour la première fois la souf-
Il s’agit d’une maladie rare due à la pré-
france et la mort des enfants. Un choc
sence de polypes qui obstruent peu à
brutal, difficilement supportable.
peu le larynx et provoquent un étouffe-
Chaque jour, je vais à leur rencontre
ment que seule une trachéotomie peut
avec toute cette tendresse dont je dé-
soulager. Les soins à prodiguer sont
borde. Un sourire, une caresse, quel-
impossibles à N’Djamena.
ques mots à ceux qui les comprennent.
Un soir, Jacques Lebas envisage pour
Aucun jouet, ni livre pour les distraire…
toi une évacuation sanitaire sur Paris.
Ta grand-mère reste assise sur une nat-
Ton départ est rapidement organisé :
te près de ton lit, ombre discrète et ras-
une prise en charge de l’État tchadien
surante. Elle parle très peu, en arabe.
pour les frais d’hospitalisation, des
Mais elle est là.
passeports et des billets d’avion. Ton
Tu n’es pas seul devant la souffrance et
père t’accompagnera. Tu vas peut-être
la maladie.
pouvoir guérir...
Je croise pour
la première fois
la souffrance et la mort
des enfants. Un choc
brutal, difficilement
supportable.
Je m’approche souvent de ton lit avec
Tu poses autour de toi un regard triste
l’envie de t’aider, mais aussi un terrible
Je suis la première à rentrer en France.
et interrogateur. Une canule de métal re-
sentiment d’impuissance devant l’in-
Mais avec une belle mission ! Trouver
pose sur un carré de gaze noué autour
justice qui t’a conduit sur ce lit d’hôpi-
le chirurgien qui t’opérera pour que tu
de ton cou. Une canule qui a percé ta
tal. Quand je suis près de toi, ton regard
puisses survivre. Ce sera le professeur
gorge et te fait mal, qui te permet pour-
s’allume et tu esquisses un sourire timi-
Narcy, à l’hôpital Bretonneau, spécialis-
tant de respirer, après la trachéotomie
de. Tu ne peux pas parler... En m’éloi-
te de l’oto-rhino-laryngologie infantile.
d’urgence qui t’a sauvé la vie quand tu
gnant, je tente un petit signe d’amitié,
es arrivé à l’hôpital en état d’insuffisance
avec mon index droit. Le lendemain,
Tu quittes ton pays, ta maman, tes
respiratoire aiguë.
je recommence... Tu le fais aussi… La
frères et sœurs, ta grand-mère si
complicité vient de naître entre nous.
bienveillante, ta langue maternelle, ta
Médecins du Monde a 2 ans… C’est
Elle me réchauffe au milieu de tous ces
culture… tout… tu quittes tout.
l’époque de Bernard Kouchner et des
drames dont je suis témoin. Je sens, je
Tu es malade, tu souffres, tu ne peux
réunions fiévreuses du jeudi soir, rue du
sais qu’elle te réchauffe aussi. Tu m’ac-
plus parler. Tu t’envoles vers un pays
Fer à Moulin.
ceptes. Tu te laisses apprivoiser.
inconnu, vers un hôpital parisien…
J’accompagne au Tchad Éric, obstétri-
La canule crache en permanence les
Je sais que tu t’appelles Adoum.
cien en mission dans l’équipe de Jac-
mucosités de ta gorge. Tes yeux nous
Tu as 5 ans.
Tu arrives à Paris,
à l’aéroport Paris-CDG
le 23 février 1982,
en plein hiver parisien,
avec ton papa.
7
À l’hôpital, nous te confions aux soi-
Les explorations dans ta gorge se suc-
gnants. Sur ton lit, raide et immobile
cèdent. Le diagnostic de papillomato-
comme à N’Djamena, mais maintenant
se est confirmé. Il s’agit d’une maladie
dans une chambre inconnue, tu nous
évolutive, si rare qu’il est difficile de faire
fixes avec ce regard plein des mêmes
un pronostic et impossible de prévoir
questions. Pas un geste, pas un san-
une date de guérison.
glot. Seulement de grosses larmes qui
roulent doucement sur tes joues. Avec
Ton retour au Tchad n’est pas envisa-
une dignité qui ne te quittera désormais
geable. Des interventions chirurgicales
plus et qui sera ta force.
répétées et des contrôles réguliers sont
à prévoir. Un aérosol est installé près de
À sa demande, j’accompagne chaque
ton lit pour humidifier les sécrétions de
jour ton papa. Je prends le relais, sans
ta gorge. Le bruit de succion de l’aspi-
le savoir encore. Tu ne parles toujours
rateur électrique qui permet de nettoyer
pas, mais tu écoutes ton père t’ex-
régulièrement la nouvelle canule rythme
pliquer en arabe qu’il doit repartir au
désormais tes jours et tes nuits.
règles du jeu. Je viens pour toi.
tends pour la première fois ta voix, si
te soigner et guérir. Il me regarde sou-
J’apporte un pyjama, des jouets, des
Nous sommes en contact téléphoni-
sourde, prononcer les mots que tu as
vent. Et je devine qu’il t’explique aussi
livres… tout ce qui peut te rendre la vie
que régulier avec tes parents. Ils sont
préparés : « Au revoir Catherine ». Tou-
que je suis là et que je ne t’abandonne-
plus douce. La photo prise avec ton
confiants et rassurés.
tes mes craintes s’envolent enfin… Ton
rai pas. Il ne me le demande pas vrai-
papa est accrochée au-dessus de ton
ment, mais il sait que j’accepte et tu le
lit. Tu m’attends, tu m’accueilles avec
Mais les frais de séjour à l’hôpital sont
que le choc de l’intervention et la sé-
sais aussi. Tout entre nous est évident
un sourire à la fois timide et radieux qui
très lourds et les médecins envisagent
paration brutale d’avec tes parents ne
et implicite. Et cela nous rend graves,
me fait fondre. Nous communiquons
de te transférer dans une maison de
t’aient définitivement privé de langage.
très graves tous les trois.
par nos gestes, nos yeux, nos sourires.
la Croix-Rouge, dite de long séjour, à
Tu parles et tu parleras.
La tendresse et la complicité grandis-
Margency, près d’Enghien-les-Bains.
Tchad, mais que toi tu dois rester pour
HOPITAL
BRETONNEAU
FÉVRIER
À MAI 1982
L’avion d’Air Afrique vient de
te transporter d’un continent
à un autre, d’une vie à une
autre. Et pourtant tu nous
souris. Timidement.
Il me donne l’autorisation écrite de te
silence se prolongeait et je redoutais
C’est un bonheur fou pour nous deux.
sent entre nous chaque jour.
sortir de l’hôpital si ton état de santé le
La vie collective y est bien organisée et
Les choses vont désormais aller très
permet et celle de prendre toutes déci-
Je suis souvent tentée de m’occuper
tu reviendras en ambulance régulière-
vite. Tu comprends de mieux en mieux
sions concernant les éventuelles inter-
des autres enfants du service, qui sont
ment pour les interventions, qui s’an-
et tu commences à te faire compren-
ventions chirurgicales.
seuls eux aussi. Mais tu me fais bien
noncent nombreuses.
dre. Timidement toujours, avec un sou-
Dans la voiture qui nous emmène vers
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Nous communiquons par nos gestes,
nos yeux, nos sourires. La tendresse
et la complicité grandissent entre
nous chaque jour.
vite comprendre que je suis là pour toi
Un soir, tu me raccompagnes, comme
rire permanent.
l’hôpital Bretonneau, tu te blottis contre
Il te confie à moi. Après son départ,
seulement et tu me tires par la manche
d’habitude, jusqu’à la porte du ser-
Tu n’es pas bien épais, 1,17 mètre et
moi. Tu ne connais que la chaleur afri-
mes pas me portent toujours vers cet
pour que nous restions tous les deux
vice avec notre petit geste complice.
17 kilos seulement, mais tes joues sont
caine et je t’enveloppe soigneusement
hôpital où je sais que tu m’attends, au
dans ta chambre.
J’ai toujours le cœur serré quand je te
maintenant rebondies. Tu arbores une
dans une épaisse couverture. Tu as déjà
milieu d’autres enfants malades et éloi-
Et pourtant, eux aussi ont besoin…
laisse ainsi au bout du couloir. Mais ce
épaisse tignasse noire que tu ne veux
confiance.
gnés eux aussi de leurs parents.
Mais je te comprends et respecte tes
jour-là, après t’avoir embrassé, j’en-
pas faire couper. Tu t’affirmes…
9
Ton départ vers le centre de Margency
se précise. Et je commence à redouter
que le transfert ne se fasse au moment
de la naissance de mon bébé. Alors il
Je sais que je continuerai
à préserver ce lien essentiel avec
ta famille et ton pays,
pour que tu puisses un jour
y retrouver ta place.
devient évident pour moi que nous devons aller là-bas tous les deux « repérer les lieux » pour que tu n’arrives pas
seul dans ce nouvel univers. Et nous
découvrons donc ensemble ce centre
où tu passeras de longs mois, voire des
années.
Ton transfert est programmé le 3 mai.
MARGENCY
Tu rejoins de nombreux enfants qui,
MAI 1982
À MARS 1985
comme toi, sont malades, déracinés,
éloignés de leurs parents souvent très
défavorisés…
Stéphane vient au monde le 6 mai. Très
vite, nous allons te chercher pour que
À Margency, la vie devient
pour toi très différente.
tu partages ce bonheur avec nous.
peu ton histoire pour mieux t’adapter.
Les mois se succèdent… Mais combien
activités de l’école maternelle. Tes
Les autres enfants semblent réagir com-
de temps vas-tu devoir rester loin des
progrès sont rapides. « Esprit vif et
me toi à la séparation. Je comprends et
tiens ? Personne ne peut le dire…
Ému et intimidé devant ce bébé, tu pro-
Tu partages une chambre commune.
curieux » soulignent tes bulletins sco-
pourtant je sais que je continuerai à pré-
nonces son nom pour la première fois,
Tes journées sont rythmées par les acti-
laires. Nous recevons régulièrement
server ce lien essentiel avec ta famille et
dans un souffle rauque, avec ton sou-
vités scolaires, les jeux, les promenades
des nouvelles de tes parents qui écri-
rire désarmant.
et les soins, encore et toujours les soins.
vent par l’intermédiaire d’un proche,
Mais tu acceptes très vite ce nouveau
car ni l’un ni l’autre ne savent le faire.
J’accueille cet enfant tant
désiré avec, à mes côtés,
ce petit garçon africain que
la vie vient de me confier.
Je ne sais où cette
merveilleuse histoire va
nous mener…
10
À la rentrée, tu t’inities aux multiples
mode de vie, ces nouveaux visages,
Nous sommes en mars 1985.
ton pays, pour que tu puisses un jour y Il y a près de 3 ans que tu vis
à Margency.
retrouver ta place.
Nous partageons avec toi nos week- Tu as 8 ans et demi.
ends, que tu passes à la maison où tu
Trois ans plus tard,
en 1988, Médecins
du Monde déclenche
le premier parrainage
dans le service
d’immunologie du
professeur Griscelli,
à l’hôpital Necker.
Catherine Peterman
avec une étonnante faculté d’adap-
Tu accueilles avec plaisir les envelop-
as désormais ton lit et tes affaires « per-
tation. Autour des monitrices, vous
pes « avion » et écoutes la lecture de
sonnelles », comme tu aimes les appeler.
formez une grande famille. Maryse, si
ces lettres avec un plaisir que nous par-
douce, est ta « préférée ».
tageons avec toi. Nous devinons leur
Tout n’est pourtant pas si simple… Les
Jamais de larmes, ni de reproches.
confiance et leurs lettres sont de longs
frais d’hospitalisation ne sont toujours
Adoum est resté en France, sa santé né-
Tu acceptes silencieusement la situa-
remerciements à partager avec les équi-
pas pris en charge par l’État tchadien
cessitant des soins réguliers impossibles
tion qui t’est imposée, difficile, mais que
pes soignantes. Je réponds régulière-
et la menace administrative de te faire
à prodiguer au Tchad. Il est souvent re-
tu sais incontournable.
ment, pour les rassurer et leur envoyer
repartir au Tchad alors que tu n’es pas
tourné à N’Djamena où il a retrouvé, peu
Ta vie s’organise à Margency et la nôtre
des photos.
guéri me donne des ailes pour chercher
à peu, sa famille et sa place.
autour de la tienne. Ton père a renou-
Mais tu parles très peu du Tchad et tu
une solution que nous trouverons auprès
Il a maintenant 32 ans. Nous sommes
velé sa procuration sur toutes les déci-
sembles avoir oublié ta langue mater-
des Aides Légales. Tu vas pouvoir rester
tous les deux restés très proches.
sions te concernant.
nelle. Comme s’il te fallait occulter un
en France jusqu’à ta guérison.
Mais ceci est une autre histoire…
11
le
parrainage
Sophie B. et Rayan,
reparti en Guyane
UN BESOIN
Soulager la détresse des enfants hospitalisés et isolés
— 19
UNE MISSION D’URGENCE — 25
UNE MISSION DE PRÉVENTION — 33
UNE MISSION DE SOUTIEN — 43
LA SÉPARATION — 53
UN TRAVAIL D'ÉQUIPE — 63
L’ANTENNE EN GUYANE — 75
20 ANS DE MISSION — 80
© Sophie Brändström
UNE RÉPONSE
La mission Parrainage de Médecins du Monde
— 15
13
Abdullah,
décédé à Paris
UN
BESOIN
SOULAGER
LA DÉTRESSE DES
ENFANTS HOSPITALISÉS
ET ISOLÉS
L
es 20 ans de la mission Parrainage des enfants hospitalisés de Médecins du
Monde nous donnent l’occasion de la mettre en perspective avec l’histoire de
l’hospitalisation pédiatrique.
La médecine, dans la seconde moitié du XXe siècle, connaît
une évolution scientifique qui va favoriser les progrès considérables des soins auprès des enfants porteurs de maladies
graves, dites lourdes et ou chroniques.
Cette médecine moderne se pratique uniquement à l’hôpital,
© Cyrille Girard
qui dès 1958, va porter le titre de Centre Hospitalier Universitaire. Il se fait pivot d’attraction nationale et internationale pour
ce qui concerne l’AP-HP.
15
— DE L’ISOLEMENT DE L’ENFANT
CONTAGIEUX AUX UNITÉS « MÈRE-ENFANT »
Il faudra attendre 1973 pour voir la création des premières
Il s’agit d’aider l’enfant en lui offrant une mise à distance de
unités « mère-enfant » au CHU de Besançon, puis à l’hôpital
sa maladie et de l’hôpital tout en participant au maintien opti-
Ainsi si, à la fin du XIXe siècle, par crainte de la contagion,
Trousseau de Paris. Toutefois leur occupation reste excep-
mum du lien des parents avec leur enfant.
les médecins hospitaliers préconisent la séparation d’avec
tionnelle et relève d’une prescription médicale.
Même si en matière d’accompagnement, nous ne serons
la famille, certains d’entre eux prennent toutefois rapidement
Quelques progrès apparaîtront : suppression de la salle com-
jamais au bout des progrès…, il faut souligner l’importance
conscience des méfaits de cet isolement de l’enfant d’où
mune au profit de chambrettes aux parois de verre permet-
de l’apport des bénévoles et leur investissement auprès des
leurs réticences à demander au Directeur de l’administration
tant aux parents de voir leurs enfants.
enfants isolés.
de l’Assistance Publique d’abaisser l’âge d’admission, alors
Ces parois deviendront pourtant le symbole d’une frontière
de 2 ans, aux nourrissons.
hostile à la présence des parents.
Dominique Favier
© Cyrille Girard
Malgré tout, en 1884, l’âge d’entrée des enfants est abaissé
— DES ENFANTS DU BOUT DU MONDE SEULS
POUR VIVRE LA MIGRATION SANITAIRE
afin d’assurer l’enseignement de la pédiatrie depuis la nais-
— VERS UNE HUMANISATION DE LA PÉDIATRIE
sance. Des crèches sont créées très progressivement, où
Un nouveau pas sera franchi le 1er août 1983, grâce à une cir-
sont admises les mères et leur bébé de 0 à 2 ans. Toutefois
culaire qui institutionnalise les modalités d'humanisation de la
les mères n’y sont acceptées qu’au titre de nourrices.
Pédiatrie hospitalière en officialisant le droit de visite parental.
Cette période sera suivie de celle du développement du cou-
Parallèlement, la médecine en matière de lutte contre les in-
rant hygiéniste et de la naissance de la puériculture. Cette
fections connaît des progrès considérables qui vont favori-
dernière s’intéresse à l’éducation des mères avec une tech-
ser la mise en place des obligations de la loi. Des animations
nicité des gestes qui réduit voire supprime la dimension af-
sont proposées sous l’impulsion des associations de béné-
fective de l’allaitement. Les visites parentales ne sont autori-
voles : télévision, cinéma, musique, clowns, livres contribuent
sées que les jeudis et dimanches de 13 à 15 heures.
à rompre le désœuvrement de l’enfant. Elles restent limitées
C’est à ce titre qu’il admet des enfants gravement malades
et ne peuvent compenser l’absence des parents.
venus du bout du monde. Or, bien souvent, ces enfants sont
Jusqu’au milieu du siècle, l’enfant contagieux va connaître
seuls pour vivre la migration sanitaire.
une double séparation. Physique avec le cloisonnement de
Il faudra attendre la loi du 4 mars 2002 sur les droits du
Se posent alors, confrontées aux manques de l’institution
la salle commune et affective avec l’interdiction de visite fai-
malade pour que les parents soient enfin associés au
hospitalière dans ces domaines, les questions de la prise en
tes aux frères et sœurs.
fonctionnement du système de santé.
période cruciale de son développement.
À la même période, les travaux réalisés par René Spitz et
Les recommandations pour une meilleure intégration
Néanmoins, il faut se souvenir que la sensibilité actuelle de
John Bowlby mettent en lumière les troubles entraînés par
des associations renforce alors la place et le rôle des
certains milieux médicaux aux besoins de l’enfant est le fruit
la carence des soins maternels pendant l’hospitalisation, tant
bénévoles, et notamment ceux de la mission Parraina-
d’un long travail des pionniers.
pour le développement physique que psychique de l’enfant
ge des enfants hospitalisés.
Des ajustements progressifs nécessaires ont été réalisés. Ils
et en établissent le caractère quelquefois irréversible.
ont conduit à l’instauration des droits des parents et de l’en-
Ces travaux seront relayés par une circulaire et un décret mi-
Entré à l’hôpital en 1988 à l’initiative de l’association Méde-
fant à l’hôpital à partir de la reconnaissance de leurs besoins
nistériels de 1958 et de 1974; ils recommandent la présence
cins du Monde, ce parrainage contribue fortement au soula-
respectifs et des manques de l’institution. L’instauration du
d’un membre de la famille et une plus grande souplesse des
gement moral des enfants isolés et de leurs parents indispo-
parrainage fait partie intégrante de ces améliorations.
horaires mais ils ne seront guère suivis d’effet.
nibles ou à l’étranger.
charge culturelle, financière et affective de l’enfant dans une
16
Dotés d’une sensibilité
aux aguets vis-à-vis
des besoins des enfants
malades et de leurs
parents, d’un discret
© Stéphanie Rivoal
savoir-faire avec les
équipes de l’hôpital, les bénévoles
de Médecins du Monde mènent à nos
côtés et au quotidien un précieux travail
que les témoignages des équipes
hospitalières illustrent aujourd’hui,
à l’occasion du vingtième anniversaire
de la mission.”
DOMINIQUE FAVIER / ASSISTANTE SOCIALE
service de réanimation / hôpital Necker
17
Catherine P. et Amadou,
hospitalisé à Necker
UNE
RÉPONSE
LA MISSION
PARRAINAGE
DE MÉDECINS
DU MONDE
INTERVIEW DE CATHERINE PETERMAN,
FONDATRICE ET RESPONSABLE DE LA MISSION DEPUIS 1988
Propos recueillis par Marie-Françoise Colombani, éditorialiste à Elle.
— Marie-Françoise Colombani : Pourquoi et comment,
grâce à un petit garçon, Adoum, avez-vous créé la Mission Parrainage à Médecins du Monde ?
— Catherine Peterman : J’ai toujours été bouleversée par la
© Pascal Deloche
détresse des enfants du bout du monde, mais avec Adoum,
que j’ai accompagné avec beaucoup d'affection pendant ses
années d’hospitalisation, j’en ai découvert une autre : celle,
près de nous, des enfants malades et isolés.
19
sion France. Il a immédiatement accepté le projet qui s’inscri-
des récompenses. Pendant des années, nous avons travaillé
vait tout à fait dans les nouvelles initiatives de l’association. Et
dans l’ombre. Recrutement, formation, suivi, parrainages,
c’est devenu la première des missions Enfance de Médecins
secrétariat… Aujourd’hui encore, chacun apporte ses com-
du Monde. Une fois obtenu l’agrément de visite dans les hô-
pétences et surtout son temps, beaucoup de temps, pour
pitaux par l’Assistance Publique, le plus difficile restait à faire :
que tourne cette mission, très discrète et désormais ratta-
comment trouver des bénévoles ? Un appel à mille donateurs
chée à la Mission France.
a alors été lancé : « Pourquoi ne pas faire autre chose que
La Mission Parrainage a été la première des associations de
d’envoyer un chèque ? ». Et l’aventure a commencé : le mon-
bénévoles en milieu hospitalier à signer avec l’Assistance
tage passionnant d’une mission.
Publique-Hôpitaux de Paris une convention, comme le propose la loi du 4 mars 2002, sur les droits du malade et l’hu-
© Jacques Boulay
— MFC : Les premiers parrainages commencent en
manisation des hôpitaux.
La rencontre avec Adoum et tous ceux qui, comme lui,
1988, comment sont-ils accueillis dans les hôpitaux ?
C’est là une vraie reconnaissance de la qualité de nos
étaient séparés de leurs parents a été un vrai choc. Car rien
— CP : Le tout premier parrainage a été lancé à Necker dans
parrainages, qui accentue le partenariat avec les équipes
n’existait vraiment à l’hôpital pour les aider. Chaque petit ma-
le service d’immunologie du professeur Griscelli. Ensuite, et
hospitalières déjà bien convaincues et solidaires de nos
lade avait, bien sûr, une infirmière ou une éducatrice « préfé-
peu à peu, l’équipe s’est étoffée. Nous devions sans cesse
interventions.
rée », mais celle-ci s’occupait aussi de tous les autres. Alors,
expliquer, multiplier les contacts et les réunions d’information,
comment apporter à ces enfants déracinés la tendresse,
car les équipes soignantes se renouvellent souvent. Il fallait
— MFC : Pourquoi avoir créé, en 2005, une antenne à
mes et des hommes que je n’aurais jamais croisés autrement
l’attention, l’affection dont ils ont un besoin impérieux pour
aussi vaincre les réticences, convaincre, faire nos preuves,
Cayenne, en Guyane, et pas d’abord dans une région
et, surtout, 1 600 enfants parrainés.
grandir, guérir, vivre ? Comment les aider à garder le contact
mais les enfants étaient là, isolés, en demande d’une atten-
plus proche ?
avec leurs familles, ce lien précieux qui va leur permettre de
tion et d’une écoute personnalisées. Nul besoin d’être mé-
— CP : Nous sommes allés là-bas à la demande du service
— MFC : Combien de bénévoles à ce jour ?
mieux se réadapter quand ils rentreront guéris ? Ces ques-
decin ou infirmière pour « soigner » les blessures invisibles de
de pédiatrie de l’hôpital de Cayenne qui avait pu appré-
— CP : Environ 320 et davantage de femmes que d’hommes.
tions me taraudaient. C’est comme ça que j’ai eu l’envie de
ces enfants-là. Très rapidement, les médecins de Necker et
cier notre présence auprès des enfants guyanais évacués
Je tiens à insister sur le fait que la réussite de cette mission
créer un réseau de femmes et d’hommes qui apporteraient à
de Laennec, où nous parrainions beaucoup en cardiologie,
en métropole. Nous y avons fait un travail de formation.
est surtout celle de toute une équipe, animée par une géné-
des enfants isolés l’amour qui leur manque tant.
ont constaté que nous apportions aux enfants un équilibre
Aujourd’hui, l’antenne, qui ne compte là-bas que des marrai-
rosité et une discrétion exceptionnelles. Personne ne compte
affectif indispensable à leur guérison.
nes, est très autonome.
ni son temps ni son énergie. Si dans l’organisation, l’anticipa-
tivité passionnante, de très belles rencontres avec des fem-
— MFC : Mais entre l’envie et la réalisation, on imagine
tion et la communication, je suis le « chef d’orchestre », cha-
que la route a été longue ! Comment êtes-vous arrivée
— MFC : Comment s’est développée la mission ?
— MFC : Ce que la Mission Parrainage apporte aux en-
cun joue, avec beaucoup d’implication et d’enthousiasme,
à votre but ?
Et quelles ont été les réactions des familles ?
fants n’est plus à démontrer, mais qu'en est-il sur le
une partition qu’il connaît parfaitement.
— CP : C’est vrai que je me suis posé beaucoup de ques-
— CP : Les parents de « là-bas » se sont sentis tout de suite
plan personnel ?
Quant à l’équipe de coordination, elle est complètement
tions. Après un état des lieux dans les hôpitaux, je me suis
rassurés. Les portes des autres hôpitaux pédiatriques se
— CP : Je peux vous assurer que lorsqu’on s’engage dans
autonome et convaincue.
très vite aperçue que cette formule : « un parrain, une marrai-
sont ouvertes : Saint-Vincent-de-Paul, Armand-Trousseau,
le parrainage, il y a des questions sur le sens que l’on donne
ne, un enfant » n’existait pas. J’ai pensé alors à monter une
Robert-Debré…, et les parrainages se sont multipliés. Mais
à sa vie que l’on ne se pose plus… Même si l’on continue
— MFC : Est-on parrain ou marraine régulièrement ou
association, mais la tâche était très lourde. François Foussa-
si la plupart des enfants repartent guéris, d’autres meurent
à s’en poser bien d’autres ! La mission a changé la vie de
une seule fois dans sa vie ?
dier, un vieux copain, responsable aujourd’hui de l’Opération
dans les bras des bénévoles. Les histoires sont souvent lour-
la plupart d’entre nous. Car les enfants nous donnent cha-
— CP : Les histoires vécues sont quelquefois très longues et
Sourire, m’a alors suggéré d’en parler à Médecins du Monde
des et douloureuses, mais tous, soudés par nos convictions
que jour des leçons de vie et de courage qui nous ont toutes
souvent douloureuses. La relation avec un enfant malade et
qui avait organisé l’évacuation d’Adoum. Alain Deloche,
et notre engagement, nous ne baissons jamais les bras. Il
et tous tellement appris et enrichis. Personnellement, c’est,
inconnu n’est pas toujours facile à maîtriser et la séparation,
faut dire que le sourire des enfants est la plus merveilleuse
sans aucun doute, la plus belle aventure de ma vie. Une ac-
que ce soit au moment de son retour dans sa famille ou par-
alors président de l’association, venait juste de créer la Mis-
20
La réussite de cette
mission est celle de
toute une équipe…
Personne ne compte ni
son temps ni son énergie.”
Heures de bénévolat
en 2007: 16 560 heures
21
Annick F. et Jenifa,
hospitalisée à Margency
fois de son décès, reste un moment très difficile. De ce fait, le
impossible… Et quand les enfants repartent, nous n’avons
turnover des parrains et des marraines est assez important.
souvent plus de nouvelles.
Et c’est normal. En plus, pendant un parrainage, il est difficile
En revanche, les équipes hospitalières peuvent parler de ce
de se consacrer à autre chose. Le « noyau dur » de l’équipe de
qu’elles constatent chaque jour : l’éveil, les progrès des en-
coordination est en place depuis de longues années. Il anime,
fants, leur capacité à mieux se battre. À l’occasion de ces
écoute et conseille les bénévoles pour maintenir une qualité
20 ans, nous leur avons donné la parole et tous confirment,
de présence cohérente et efficace auprès des enfants isolés.
à travers leurs témoignages, les effets bénéfiques de notre
présence. Dominique Favier, assistante sociale à Necker, explique aussi que ni les institutions ni l’Assistance Publique ne
pourront jamais prendre le relais des bénévoles. Si ces petits
malades isolés bénéficient des plus hauts plateaux techni-
Lorsqu’on s’engage dans le
parrainage, il y a des questions
sur le sens que l’on donne à sa vie
que l’on ne se pose plus.”
ques en France, aucun accompagnement spécifique n’est
prévu pour eux. Les Maisons de Parents n’ont pas la capacité
d’accueillir toutes les familles qui le souhaiteraient. D’ailleurs,
la plupart d’entre elles n’ont pas les ressources nécessaires
pour assurer les frais de séjour en France.
— MFC: Comment évolue le nombre de parrainages?
— CP: Aujourd’hui, dans tous les établissements, nous consta-
— MFC : En dehors des bénévoles, avez-vous d’autres
tons que les demandes de parrainage sont moins nombreuses.
partenaires ?
Difficile de savoir exactement pourquoi. Les parents sont cer-
— CP : J’ai lancé et mené cet engagement en parallèle avec
tainement de plus en plus présents et nous nous en réjouis-
une vie professionnelle très diversifiée à Air France et les pas-
sons. D’ailleurs, l’idéal serait que notre mission cesse un jour
serelles entre ces deux vies ont été riches et nombreuses. La
d’exister ! Mais ne rêvons pas ! Les difficultés administratives
compagnie nous a d’abord soutenus financièrement dans
pour l’obtention des visas ou les prises en charge des enfants
nos programmes de formation et, aujourd’hui, elle propose
sont de plus en plus lourdes et ne facilitent ni l’accès aux soins
des billets pour réunir les familles et les enfants malades.
ni les voyages des parents.
Quant au partenariat avec les soignants, proposé par la loi
Raison de plus pour continuer et nous faire connaître davan-
de mars 2002, il se confirme chaque jour. Nous travaillons
tage afin qu’aucun des enfants qui a réussi à bénéficier d’une
dans la confiance et la complémentarité la plus totale avec
prise en charge de l’État ne reste isolé à l’hôpital. Comme en
les équipes hospitalières.
Guyane, une antenne de la Mission va être mise en place à
Même s’ils sont moins nombreux, nous devons toujours là
sence auprès des enfants malades ?
pour les aider à lutter, à s’en sortir et à se construire. Et pour
— CP : Ce n’est pas facile pour nous d’évaluer… Il faudrait
tenter aussi d’inscrire en eux l’expérience de la solidarité, qu’ils
faire des études comparatives sur le devenir des enfants par-
reproduiront, peut-être un jour, à leur tour et à leur façon.
rainés et de ceux qui ne le sont pas… C’est pratiquement
22
© Cyrille Girard
Lyon. Peut-être, ensuite, d’autres villes de province suivront.
— MFC : Comment évaluer les résultats de votre pré-
UNE
MISSION
D’URGENCE
Eliyes, reparti à l'hôpital
de Montpellier
UN ENFANT MALADE ARRIVE SANS SES PARENTS,
L’HÔPITAL APPELLE MÉDECINS DU MONDE.
I
l arrive que des bébés de quelques jours, des nourrissons ainsi que des enfants plus grands soient déposés à
l’hôpital par un accompagnateur qui repart aussitôt. Les
évacuations sanitaires des enfants du bout du monde sont
le plus souvent imprévues.
Très gravement malades, quelquefois arrachés à leur ma-
© Stéphanie Rivoal
man dès la naissance, ils sont « parachutés » brutalement
dans l’univers inconnu et hostile de l’hôpital.
25
très nombreuses : santé, famille, langue, climat,
DES ENFANTS DU
BOUT DU MONDE,
MAIS AUSSI
DES RÉGIONS
FRANÇAISES
culture, auxquelles s’ajoutent la douleur et de
De la naissance à 18 ans, ils viennent souvent
multiples peurs.
de loin d ’Afrique subsaharienne, du Maghreb
PR. ALAIN FISCHER
mais surtout des DOM et des COM (La Réu-
CHEF DE SERVICE
Ils y sont aussitôt confrontés à la maladie, la souffrance et la solitude malgré la
présence et le dévouement des équipes
hospitalières qui les accueillent sans avoir
toujours été informées de leur arrivée.
Le déracinement est profond et les ruptures
Je dirais, qu’à la limite,
déclencher un parrainage,
c’est une prescription médicale.”
Malgré les réels efforts d’humanisation des
nion, Guyane, Mayotte, Antilles).
hôpitaux, un séjour à l’hôpital est encore pour
Ils souffrent tous de graves pathologies
chacun un évènement difficile à vivre. Il l’est
qui ne peuvent être traitées dans les
On ne peut pas imaginer que la vie
d’un enfant à l’hôpital se résume au
contact avec le personnel soignant.
bien davantage pour les enfants séparés de
structures hospitalières de leur région ou
Même si les soignants essaient d’apporter
leurs parents. Malgré une bonne volonté in-
de leur pays d’origine, par manque de ma-
plus que les gestes techniques, ils n’ont pas
déniable et la conscience de l’importance
tériel ou de compétences spécifiques.
le temps… Je dirais, qu’à la limite,
particulière à porter aux enfants isolés, les soi-
Ils sont alors dirigés vers les différents servi-
déclencher un parrainage, c’est une
gnants restent débordés par leurs tâches dans
ces pédiatriques des hôpitaux de l’Assistance
prescription médicale. L’enfant a besoin
un contexte de restriction des budgets et du
Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ou dans
d’avoir des relations affectives qui le rassurent
personnel. Même s’ils tissent souvent avec
les centres de long séjour de la région pari-
eux des liens d’affection, leur rôle reste celui
sienne quand les soins doivent se prolonger.
du soin et ils ne peuvent apporter aux enfants
La plupart d’entre eux ne parlent pas le fran-
la présence structurante dont ils ont besoin.
çais même si quelquefois ils le comprennent.
de pointe des hôpitaux parisiens. Souvent re-
Lorsqu’une infirmière, un médecin, une assis-
Dans ces situations extrêmes, rares sont
tenus par des obligations professionnelles ou
tante sociale ou une éducatrice décèle la situa-
les parents qui peuvent accompagner
familiales, les parents ne peuvent venir que
tion d’un enfant seul ou celle de parents devant
leurs enfants. Certains, en situation irrégu-
par intermittence ou très rarement auprès de
repartir, une décision collective est prise pour
lière, ont déjà eu beaucoup de difficultés à ob-
leurs enfants.
solliciter Médecins du Monde, qui déclenche
tenir la décision d’évacuation, c’est le cas des
Peu nombreux certes, mais plus en détres-
un parrainage comme une mission d’urgence.
enfants des comoriens, surinamiens ou haï-
se encore que tous les autres, les bébés de
En dehors de toute connotation religieu-
tiens. D’autres parents, de milieux souvent dé-
l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), malades et
se, le parrainage est un soutien moral ap-
favorisés, ne peuvent quitter leur travail parfois
hospitalisés, sont privés de tout lien parental.
porté à un enfant en détresse physique et
précaire ou leur famille souvent nombreuse, et
À l’hôpital ou en institution, ils sont en attente
psychologique.
n’ont pas les ressources suffisantes pour as-
d’adoption ou de famille d’accueil.
L’enfant est souvent en grande détresse affec-
surer les frais incompressibles d’un héberge-
Enfin, les enfants guyanais venus des « pro-
tive. Le parrainage, mis en place au plus vite,
ment et d’un long séjour à Paris.
vinces » bénéficient aussi des parrainages.
devient un facteur essentiel de la lutte contre
Certains petits malades vivant dans les ré-
Une antenne de la Mission a été mise en pla-
la maladie.
gions françaises sont dirigés vers les services
ce, à leur attention, à l’hôpital de Cayenne.
et l’aident à « tenir le coup ».”
© Stéphanie Rivoal
Pr Alain Fischer / chef du service immunologie /
hôpital Necker / 2008
© Stéphanie Rivoal
26
27
Sophie B. et Rayan,
reparti en Guyane
DES PATHOLOGIES
TRÈS LOURDES…
DES SÉJOURS
QUI SE PROLONGENT
En 1988, lors des premiers parrainages dans
les services de cardiologie des hôpitaux Necker et Laennec, le nombre d’enfants étrangers
accueillis était beaucoup plus élevé qu’actuel-
L’enfant est souvent en grande
détresse affective. Le parrainage,
mis en place au plus vite, devient
un facteur essentiel de la lutte
contre la maladie.”
lement. Pour la plupart d’entre eux, le séjour
n’excédait guère 3 mois et les parrainages,
© Cyrille Girard
courts et intenses, aidaient les enfants à repartir guéris vers leurs familles.
Aujourd’hui, les médecins et chirurgiens français sont de plus en plus nombreux à se déplacer pour enseigner et opérer à l’étranger
M. LOU PLANÇON
dans les structures hospitalières existantes où
CADRE DE SANTÉ
locales, la majorité des enfants qui, au fil des
Nous faisons des demandes
de parrainage pour des enfants
lourdement sédatés, intubés, ventilés,
ans, pourront bénéficier des soins et des inter-
dont le pronostic est souvent réservé.
ventions dans leur pays d’origine.
Une information de l’état clinique et des risques encourus est donnée dès la demande
les compétences ne sont pas encore suffisantes. Ils soignent sur place, avec les équipes
de parrainage, ce qui est très important pour le choix de la marraine.”
Les enfants actuellement évacués vers
Marie-Lou Plançon / cadre de santé /
les établissements de la région parisien-
service de réanimation pédiatrique / hôpital Necker / 2004
ne présentent donc des pathologies très
techniques que certains hôpitaux pari-
Une autorisation est toujours sollicitée auprès
siens sont seuls à proposer. Le pronostic
des parents pour la mise en place du parraina-
vital est souvent engagé et la durée d’hospi-
ge. Quand les parents ne sont pas joignables
talisation, difficile à évaluer à l’arrivée, peut se
et que l’état de l’enfant nécessite la présence
prolonger des mois, voire des années, dans
d’un bénévole, c’est le chef de service lui-mê-
les cas par exemple d’attente de greffe ou de
me qui en fait la demande.
lourdes interventions orthopédiques.
28
© Sophie Brändström
lourdes nécessitant les hauts plateaux
29
© Stéphanie Rivoal
RANYA
© Stéphanie Rivoal
F. COCQUIN
ÉDUCATRICE
Elle donne son numéro de téléphone afin
Bonjour à toute la famille,
que nous puissions la prévenir en cas de
Je voulais simplement savoir si Ranya était
changement de service ou d’un transfert
bien arrivée. J’espère que tout va pour le
vers un autre établissement. Tous ces
mieux et qu’elle est enfin chez vous avec ses
renseignements sont notés dans le dossier
deux sœurs. Cela va vous faire du bien de
médical de Ranya. Le nom de Sophie est
vous retrouver enfin tous les cinq.
inscrit sur le tableau d’information
Bien cordialement.”
dans la chambre.
Anne E. / coordinatrice Médecins du Monde
La maman repart confiante et rassurée.
à l’hôpital Necker.
Pendant 3 mois, Sophie viendra trois fois
Le 25 août, Ranya arrive en urgence
du Maroc dans notre service pour
une malformation cardiaque et des
difficultés respiratoires. Elle a 15 mois
par semaine retrouver et soutenir Ranya.”
Effectivement, Ranya est bien arrivée.
Florence Cocquin / éducatrice /
Elle va bien, entourée de ses sœurs.
service de cardiologie / hôpital Necker
Comme d’habitude le sourire ne la quitte pas
et elle le distribue généreusement. Nous vous
et la chance d’être accompagnée de sa
remercions encore de votre aide morale qui a
maman qui ne pourra pourtant pas rester
changé la vie de notre petite famille. Vous êtes
pendant toute la durée de l’hospitalisation.
« nos inoubliables ». Vous êtes les bienvenus
Il lui faut repartir s’occuper des deux autres
au Maroc. Passez le bonjour à tous ceux qui
enfants restés à Rabat, la sœur jumelle
ont participé et aidé Ranya à rentrer chez elle.
de Ranya et l’aînée de 7 ans. Dès que
plus adaptée pour prendre le relais. Sophie B.
Chez elle, c’est chez vous.
nous sommes informés de la date de son
vient dès le lendemain avec la coordinatrice
Bien cordialement.
départ, nous lui proposons le parrainage
rencontrer Ranya et sa maman. Auprès de
À bientôt.” La famille B.
Médecins du Monde en lui expliquant
l’équipe paramédicale, Sophie va trouver
combien c’est important pour Ranya et
des informations sur le comportement et les
C’était un parrainage très agréable,
sécurisant pour elle. Elle donne volontiers
habitudes de vie de Ranya qui vont l’aider à
avec une fin heureuse comme on les aime.
son autorisation et nous prenons contact
adapter ses heures et durées de visite à l’état
Je serai à Médecins du Monde samedi
avec la coordinatrice de Médecins du
de cette jolie poupée qui, malgré sa maladie,
prochain pour la conférence.
Monde qui recherche aussitôt la marraine la
garde le sourire.
Amitiés.” Sophie B.
© Stéphanie Rivoal
30
Youva,
hospitalisé à Margency
UNE
MISSION DE
PRÉVENTION
POUR ATTÉNUER LES TROUBLES PSYCHOLOGIQUES
DUS À LA SÉPARATION.
L’
hospitalisation ainsi que la rupture brutale et prolongée des liens parentaux risque d’entraîner chez
les enfants des troubles du comportement et
laisser des séquelles qui altéreront la réadaptation dans la
vie sociale et familiale. Les études cliniques montrent que
l’attachement à une figure de substitution peut préserver
© Cyrille Girard
© Cyrille Girard
l’équilibre psychologique indispensable à la guérison et éviter des carences affectives graves.
33
sorte de mécanisme de défense, comme une
Les études cliniques sur les nouveau-nés
étape ultime pour faire face à la souffrance.
montrent pourtant que l’attachement à
une figure de substitution peut produire
En 1952, le docteur John Bowlby, médecin
les mêmes effets et éviter des carences
psychiatre, démontre que les troubles sont
affectives graves.
réparables si l’enfant retrouve sa mère avant
5 mois de séparation. Sans présence d’un
40 % des enfants parrainés sont des bébés de
substitut parental, les effets de la sépara-
moins d’1 an. Certains arrivent à l’hôpital âgés
tion ne disparaissent pas immédiatement
de quelques jours seulement.
et peuvent même se révéler irréversibles
RENÉ SPITZ
DE LA NAISSANCE
À LA PAROLE
Dans son ouvrage De la naissance à la
manifeste une certaine crainte vis-à-vis
parole, René Spitz a repéré les moments
d’un inconnu. C’est ce que l’on appelle
(altération de la pensée, difficulté à entrer en
S’il y a traumatisme, dépression ou hospita-
essentiels du développement de l’enfant
communément « l’angoisse du 8e mois »
relation avec autrui et à mémoriser, altération
lisme, ce « fracas », comme le nomme Boris
qu’il est important de connaître quand
et donc le deuxième organisateur de la
de la notion de temps et d’espace, voire retard
Cyrulnik, l’enfant ne pourra rebondir que s’il
on accompagne les enfants isolés : dès
vie psychique. L’enfant est capable de
CHEZ
LES ENFANTS
EN BAS ÂGE
mental sévère). Ils peuvent être responsables
rencontre un tiers avec qui il « tricotera » une
les deux premières semaines, le nourris-
juger et de contrôler son environnement,
d’inadaptations sociales et familiales futures.
relation privilégiée et qui l’aidera à puiser dans
son ne reconnaît la tétine ou le sein que
il peut communiquer et comprendre des
ses ressources internes pour lutter et survivre.
s’il a faim. Dans le premier mois de sa
situations plus complexes. C’est cette
En milieu hospitalier, à la détresse affective
Les bénévoles proposent à l’enfant malade
vie, il perçoit le visage humain et associe
étape qui soutient le développement du
Pendant longtemps, les parents et même les
s’ajoutent le ressenti et les manifestations
isolé une « offre » de tuteurs de résilience, qu’il
son apparition avec la satisfaction d’un
langage.
médecins ont considéré que les bébés ne res-
de la douleur, même si les soignants mettent
choisira ou non d’investir, pour s’épanouir et
de ses besoins.
— Ensuite, l’enfant se met à marcher.
sentaient guère la douleur, qu'elle soit physi-
aujourd’hui tout en œuvre pour l’atténuer.
surmonter l’indicible.
Au cours des six premières semaines,
Il devient actif, ce qui transforme ses
que ou psychologique.
Dans le cas de carences affectives graves, les
il garde dans sa mémoire une trace du
échanges avec son entourage : on doit
organisateurs de la vie psychique peuvent dis-
visage et reconnaît la voix qui lui parle.
alors réfréner ses initiatives et créer des
Dans les années 40, les travaux du psy-
paraître, entraînant une détérioration du som-
Il explore sa cavité buccale avec ses
interdits auxquels il s’oppose à son tour
chologue René Spitz mettent pourtant en
meil et de l’alimentation. Cette dégradation
doigts, passant ainsi d’un effort de per-
par l’emploi du « non », étape essentielle
évidence que l’isolement et la privation
dans les premières phases est réversible.
ception à un effort d’incorporation.
de son jugement. C’est le début des
brutale et temporaire des soins maternels
échanges verbaux qui lui permettent de
compromettent le développement physi-
Nos récents contacts avec le neuropsychiatre
que et psychique de l’enfant et peuvent
Boris Cyrulnik viennent de nous conforter dans
susciter une dépression dite anaclitique
nos pratiques d’intervention et leurs effets bé-
(sans objet) dont les troubles cliniques sont le
néfiques auprès des enfants hospitalisés et
refus de tout contact, l’insomnie, la perte de
isolés. Il y a toujours un risque de « traumatis-
poids, la rigidité motrice et la perte de relation.
me » quand les petits malades sont confrontés
Dans ces conditions, l’enfant malade peut
à la séparation et à la solitude. Pour des pré-
développer ce que l’on nomme le syndrome
maturés ou des nourrissons, l’attachement à
de « l’hospitalisme ». La séparation est vécue
la mère dans les premiers jours et mois de la
comme une véritable menace et touche le sen-
vie est totalement décisif dans le développe-
timent d’identité. La dépression est alors une
ment psychique de l’enfant.
Mis en place au plus vite et
étayé par une connaissance
précise des besoins et
comportements des enfants,
le parrainage, soutien affectif
personnalisé, va s’efforcer
de soulager, d’apaiser
cette souffrance polymorphe
du tout-petit et tenter d’éviter
l’apparition du processus
de dégradation.”
Quelques moments sont fondateurs
manifester certains sentiments.
dans la structuration de la person-
Le « non » est donc le troisième organi-
nalité du petit enfant :
— Vers le 3e mois, le sourire du bébé à
sateur de la vie psychique grâce à l’affirmation de la parole.
la présence de l’autre, s’il lui fait face, se
montre assez mobile. Cette communication par le sourire est le premier organisateur de la vie psychique, indispensable pour passer à l’étape suivante.
— Entre 6 mois et 1 an, le sourire est
réservé à l’entourage proche et le bébé
© Stéphanie Rivoal
34
35
DR. ROSSET
PÉDOPSYCHIATRE
Quelques rares bébés,
juridiquement adoptables et très
malades sont confiés à des
pouponnières en attente d’un
accueil familial ou d’une adoption.
Pour ces bébés extrêmement malades,
LES BÉBÉS
EN POUPONNIÈRE
CONFIÉS À
L’AIDE SOCIALE
À L’ENFANCE (ASE)
DE PARIS
ce temps d’attente est bien sûr vertigineux et mortifère. Quand nous avons
La maladie s’ajoute à la détresse immen-
rencontré la Mission Parrainage, nous avons pensé aux marraines de Médecins
se de l’abandon. À la pouponnière Paul-Par-
du Monde pour certains de ces bébés. Tous les enfants ont besoin que l’on se
quet de Neuilly, à l’hôpital d’enfants de Mar-
préoccupe réellement d’eux, c’est-à-dire qu’ils ont besoin d’être « portés » par
gency ou au centre des Côtes, les marraines
la pensée et par la rêverie, tout autant que par les bras. On sait que les enfants
sont quelquefois sollicitées pour le parrainage
non portés, psychiquement seuls, deviennent très vite inaccessibles pour les
de bébés confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance,
MADELEINE P.
soignants : la relation devient rapidement confuse, fusionnelle, dangereuse.
abandonnés ou séparés d’une famille dé-
BÉNÉVOLE
La place de chacun doit être repérée, définie pour éviter la confusion, le chaos.
faillante par le juge des enfants.
© Stéphanie Rivoal
Madeleine P. et Mohammed,
hospitalisé à la pouponnière Paul-Parquet
Par moments, il détourne son regard, il semble triste,
ne participe pas, ne répond pas à mes sollicitations. Il osait frapper
La marraine doit savoir ce qu’elle engage avec l’enfant. Le cadre juridique et le
projet qui en découle doivent permettre à la marraine de savoir pourquoi l’enfant
La maladie et la souffrance s’ajoutent à la dé-
les touches d’un xylophone, il ne le fait plus… Et pourtant, il touche
est dans l’institution et jusqu’à quand. Quel est le projet de vie pour ce bébé ?
tresse de l’abandon et aggravent les troubles
très doucement mon visage, joue avec mes cheveux, mon collier,
Ainsi apparaît la notion de temps. La marraine va pouvoir s’attacher, car elle sait
dépressifs fréquents chez ces tout petits en-
me regarde dans les yeux longuement… Je crois aux bienfaits que
que l’enfant a un devenir. Elle peut se situer, se repérer, investir l’enfant
fants, pourtant très entourés par un personnel
lui apportent mes câlins, les chansons, même si je ne perçois plus
et avoir une relation avec lui. Porté réellement par elle, le bébé devient sujet.
compétent et attentif.
d’évolution dans ses gestes. Mais c’est difficile…”
Il a son identité, son histoire propre : un passé, un avenir…, donc un quotidien
que l’on partage, que l’on peut raconter et transmettre. La marraine doit pouvoir
Les marraines deviennent le seul repère affectif
partager cette connaissance de l’enfant avec l’équipe. Nous savons combien
stable de ces enfants privés de tout lien paren-
il est nécessaire que les marraines soient soutenues, aidées, étayées et
tal et dont la pouponnière est le seul lieu de vie,
regardées dans leur relation à l’enfant. Nous devons aider ceux qui aident.
souvent dès leur naissance. Elles s’engagent
chez les autres jeunes enfants et l’échange
Ce regard permet à la relation d’être et à chacun de se reconnaître et de se
avec une conviction profonde, souvent pour
quelquefois frustrant. Dans les cas les plus dif-
différencier, de s’autonomiser et de s’individualiser. Autour du bébé,
plusieurs années.
ficiles, il arrive que les progrès soient minimes.
© Cyrille Girard
DIRECTRICE
Et alors l’enfant reste vivant. Il y a des enfants qui n’ont survécu
Ces parrainages sont particulièrement délicats
psychiquement que grâce aux marraines, hommage à elles…”
et difficiles. Très meurtris par la séparation
La marraine devient la figure d’attachement
L’équipe de Médecins du Monde
s’intègre parfaitement à notre projet
institutionnel, en assurant une réelle
Docteur Dominique Jeanne Rosset / pédopsychiatre /
initiale, les enfants sont souvent en situation
indispensable à la construction de la person-
continuité affective, précieuse pour les
Aide Sociale à l’Enfance de Paris
d’évitement de toute relation affective pour se
nalité future et propose une offre de « tuteur de
enfants… et également pour nos équipes.”
protéger. La phase d’apprivoisement est lon-
résilience » que l’enfant choisira ou non d’in-
Joëlle De Roux /
gue, les relations encore plus nécessaires que
vestir, pour s’épanouir.
directrice de la pouponnière Paul-Parquet
Il faut être convaincu pour persévérer.
comme des poupées qui s’encastrent, les chaînes d’identification s’entrelacent.
Il y a des enfants qui n’ont
survécu psychiquement
que grâce aux marraines,
hommage à elles.”
JOËLLE DE ROUX
37
© Cyrille Girard
par cette maladie qui m’affaiblit et met ma vie en suspens. Je ne sais
QUAND
LES ENFANTS
SONT
PLUS GRANDS
quel crime j’ai commis pour être condamné ainsi. Mes parents me
Il faut ensuite prendre le temps d’évaluer au
manquent et je n’ose penser à leur tristesse de m’abandonner à mon
mieux la nécéssité du parrainage, après ana-
sort par manque de moyens. Malgré tout, par instinct de survie sans
lyse de la situation familiale, en tenant compte
doute, j’arrive à puiser au fond de moi-même une force, une énergie
du désir de l’enfant. La parole permet de met-
inconnues. Pourtant, je reste soumis à cette contradiction permanente
tre des mots sur les souffrances et d’atténuer
qui fait de moi un enfant avec des préoccupations d’adulte.
les troubles. L’enfant a besoin d’être valorisé,
Alors je m’accroche avec détermination à cet espoir de vie mais
écouté, entendu et soutenu. En un mot, d’être
je donne en échange ma naïveté, mon insouciance, mon enfance.
aimé. Mais les risques de réadaptation dans le
ADOUM D.
PARRAINÉ DE 82 À 85
Je me souviens de mon sentiment d’isolement, de solitude
dans ce lieu terrifiant qu’est l’hôpital. Enfermé, emprisonné
Dans ce brouillard, je perçois une main qui m’agrippe.
milieu et la culture d’origine restent encore bien
Au début, je crois à un mirage. À force de persévérance et de
réels et importants.
conviction, et malgré mes doutes, elle m’aide à y croire. Cette main
L’accompagnement personnalisé, la création
est différente des autres, car elle n’est pas là pour soigner ou guérir le
de liens avec l’extérieur et d’éventuelles sorties
mal visible qui m’a conduit en ces lieux. Cette main ne fait pas appel à
la science pour agir. Elle est simplement là parce j’en ai besoin.
prennent alors toute leur importance.
Cette main n’est pas présente par obligation, par devoir ou par bonne conscience. Elle est tout simplement là parce qu’elle en a ressenti
handicap ? Et elle est là, comme promis, pour partager un nouvel instant de complicité. Elle me lit avec beaucoup d’émotion les lettres envoyées
LES
PARRAINAGES
D’ADOLESCENTS
par mes parents. Elle comprend ma tristesse et la partage avec moi.
Ces accompagnements sont sans aucun dou-
S’il est vrai que certains d’entre nous ne s’en sont pas sortis, nous avons tous saisi cette « main », ce fil d’Ariane, qui nous offrait un brin de répit,
te les plus difficiles.
un peu de sérénité et beaucoup de réconfort et qui a, dans tous les cas, allégé ce lourd fardeau qu’un enfant ne peut porter tout seul.
Dans cette période si délicate de leur dévelop-
Souhaiter qu’un enfant ne connaisse pas l’hôpital reste irréalisable. Faire qu’un enfant ne soit plus isolé à l’hôpital, les marraines et parrains
pement, la maladie et l’hospitalisation s’ajou-
de Médecins du Monde s’y emploient aujourd’hui… Je réalise que nous avons eu une chance inouïe d’avoir pu compter sur toutes ces
tent au mal-être psychologique et risquent de
personnes qui ont mis volontairement toute leur énergie à nous aider.
briser leur élan vers l’autonomie. La relation
Miraculés de ce triste sort, nous attestons que la vie est parfois dure, injuste, voire cruelle, mais nous attestons aussi
avec les adolescents, quelquefois difficile à
qu’elle peut être pleine d’heureuses surprises et de belles rencontres. Les contraintes, l’énergie, le temps donné pour nous permettre
établir, est pourtant structurante et rassurante.
le besoin. Elle me cajole, elle me console, elle m’encourage. Elle me rend tout ce que cette maladie m’a pris, à savoir ma naïveté,
mon insouciance, mon enfance. Je me dis que j’ai eu de la chance de la rencontrer. Elle se dit qu’elle a eu de la chance de me rencontrer.
J’attends ses visites avec beaucoup d’impatience, j’ai tellement de choses à lui raconter. Viendra-t-elle ? M’aimera-t-elle toujours malgré mon
d’obtenir un sursis nous obligent à respecter ce présent et à nous en sortir totalement. Et on s’y accroche fermement pour affronter la maladie,
notre ennemi intérieur. Je me souviens… Je me souviens…”
Adoum D. / 32 ans / 2008
38
Jean-Claude M. et Stéphane,
hospitalisé à Margency
© Cyrille Girard
Les bénévoles peuvent
être de réels partenaires
e travail avec les équipes.
Ils perçoivent l’enfant
différemment. Mettre en
commun les points de vue,
vécus ou ressentis, permet
de mieux comprendre
l'enfant et de s’ajuster
davantage à ses besoins.”
© Cyrille Girard
ANNE FERRET / PSYCHOLOGUE
centre des Côtes
UNE
MISSION DE
SOUTIEN
Édith T. et Maroua,
hospitalisée à Margency
UN PARRAIN… UNE MARRAINE… UN ENFANT…
UNE RELATION PRIVILÉGIÉE ... UN REPÈRE...
T
rois visites par semaine, dont une pendant le weekend, sont indispensables pour construire une relation de proximité et de confiance entre le bénévole
et l’enfant malade. Le moment choisi pour ces visites est
discuté et décidé avec l’équipe en fonction de la pathologie, des soins, mais aussi de l’âge de l’enfant et de son
état de santé. Les obstacles à la communication sont nombreux : langage, matériel médical, peurs, douleur… Il est
42
© Cyrille Girard
nécessaire de bien les cerner et de les prendre en compte.
43
En préambule, toutes les relations et inte-
du tout-petit. Pour les plus grands, les vertus
La relation de parrainage est un véritable enga-
V. HOREAU
ractions créées avec l’enfant s’établissent
thérapeutiques du jeu prennent ici toute leur
gement sur la durée.
ÉDUCATRICE
et se déroulent dans le respect total de son
importance. Jouer est une activité vitale.
Maîtriser cette relation et éviter le surinvestisse-
identité, de sa culture, de ses croyances.
Un enfant malade est d’abord et avant tout
ment, néfaste à l’enfant qui doit repartir, sup-
un enfant.
pose une vigilance de tous les instants. Dans
Je me suis souvent émerveillée d’entendre une marraine me parler, les yeux
pétillants de bonheur, de l’infime évolution de l’enfant dont elle avait la charge, de voir
qu’une autre donne à un bébé la bonne place pour qu’il puisse se lover tout contre elle
La rencontre avec un enfant inconnu et ma-
À travers le jeu, l’enfant se développe, rencon-
cette aventure humaine à chaque fois différen-
et trouver réconfort et sécurité. J’ai trouvé remarquable la persévérance de ceux qui vivaient
lade, souvent craintif et silencieux, est un
tre les autres et construit son imaginaire. Le
te, le bénévole est soutenu par la coordinatrice,
une situation d’indifférence ou de rejet, l’imagination déployée par d’autres pour sortir
moment décisif dans le parrainage. Il faut en
bénévole devient l’initiateur et le complice des
qui, avec une disponibilité sans faille, suit de
un enfant de son isolement.”
quelque sorte l’« apprivoiser », ce qui ne peut
jeux, et le plaisir, si rare dans l’univers hospita-
très près l’évolution du parrainage, en liaison
Véronique Horeau / éducatrice / hôpital Laennec
se faire que par étapes.
lier, est alors partagé.
permanente avec l’équipe hospitalière et Mé-
La régularité des visites, aussi importante
© Stéphanie Rivoal
© Cyrille Girard
decins du Monde.
que leur durée, va favoriser la connaissance
Les projets élaborés ensemble vont briser la
de l’autre et l’échange structurant. Adaptée à
solitude et consolider l’espoir. Il faut faire rê-
Il s’agit d’une véritable transfusion d’éner-
l’âge, à la culture et à la pathologie, la rela-
ver les enfants malheureux. Grâce aux images,
gie qui aide l’enfant à puiser dans ses res-
tion est surtout une réponse aux besoins des
aux livres, à la musique, le bénévole se mobi-
sources personnelles pour se battre et
petits malades, identifiés avec eux et avec
lise pour que, pendant toute la durée du parrai-
quelquefois survivre.
l’équipe soignante.
nage, l’enfant reste en contact avec sa culture.
Petit à petit, le bénévole va créer entre l’hôpital
Il veille également à éviter les excès dans les
Rien de tout cela n’est anodin et aucun béné-
et le monde extérieur des passerelles qui per-
cadeaux ou les manifestations de tendresse
vole n’en sort parfaitement indemne.
mettront d’atténuer le sentiment d’exclusion.
que l’enfant ne connaît pas toujours, qu’il peut
En revanche, les leçons de vie que donnent le
même vivre comme une agression et ne re-
courage et la joie de vivre des enfants mala-
trouvera peut-être pas dans sa famille.
des sont pour chacun d’entre eux un cadeau
UN SOUTIEN
AFFECTIF
PERSONNALISÉ
Une transfusion d’énergie
JEAN LUC G.
Les bébés ont un nécessaire besoin de souri-
BÉNÉVOLE
res, de regards, de caresses, de chansons…
inestimable.
Quand la douleur envahit… la seule présence
peut être aussi silencieuse et rassurante.
Quand le bénévole devient l’exutoire des douleurs physiques et morales, signe manifeste
que la relation « fonctionne » bien, c’est sou-
Nicole D. et Aïssa,
reparti dans sa famille
vent difficile mais provisoire.
« Io sono col moi padrino ! » En français : « Je suis avec mon parrain ! ». Cette phrase,
Les moments du biberon, du repas ou du bain
Être à l’écoute des besoins de l’enfant et non
prononcée d’un ton péremptoire par mon petit filleul italien de 13 ans, Léonardo, « dérangé »
sont des instants privilégiés qui favorisent la
de ses propres désirs, être à l'écoute de ses
par un appel téléphonique pendant ma visite à Necker m’a interpellé et vraiment ému. Un
communication et l’échange, qui structurent
ressentis devant les situations douloureuses,
long silence venait de s’installer et j’envisageais d’abréger ma visite. Peut-être avait-il envie
d’être seul ? « Je suis avec mon parrain. », ce qui signifiait aussi « Ne me dérangez pas ! », a été
le jeune enfant. Un avenant à la convention si-
trouver sa « juste place », savoir jusqu’où s’in-
gnée avec l’AP-HP autorise les bénévoles de
vestir, se préparer à la séparation…, demande
ce jour-là pour moi un cadeau fabuleux. J’étais pour Léonardo un repère important auquel il
Médecins du Monde à ces gestes essentiels
une grande solidité psychologique, mature et
tenait, et il voulait que je le sache ! Oui, on reçoit plein de cadeaux quand on est parrain…”
pour le développement physique et psychique
responsable.
© Stéphanie Rivoal
44
45
UNE CONTINUITÉ
DANS LES RUPTURES
Un fil rouge
Il arrive fréquemment qu’un enfant change de
pectivement quand il se déplace d’un hôpital
au groupe familial. Sans même attendre de ré-
à l’autre, repères sécurisants et toujours affec-
ponse, les bénévoles s’emploient à donner des
tueux. Quand leur état de santé le permet, des
nouvelles pour que les enfants continuent à vi-
sorties sont organisées : elles leur donnent une
vre par la pensée avec leurs familles éloignées,
« bouffée d’oxygène » et une vision bien diffé-
respectant toujours le fait que les informations
rente du monde de l’hôpital.
médicales ne peuvent être transmises que par
service à l’intérieur d’un même hôpital (cinq ou
les médecins à leurs correspondants dans le
six fois en cardiologie, par exemple).
pays d’origine. Pour les parents, le parrainage
Il doit alors s’adapter à une nouvelle chambre
et à un personnel différent. Le bénévole, toujours présent auprès de l’enfant déplacé, déroule un « fil rouge » qui le guide tout au long de
son hospitalisation, un repère indispensable,
rassurant et sécurisant.
LE MAINTIEN
DES LIENS
AVEC LA FAMILLE
Dans le respect de l’identité et
de la culture de l’enfant
ABDOULAYE F.
PAPA D’AMADOU
suivi long et régulier, pendant des mois,
— LES PARENTS SONT ABSENTS
voire des années, les enfants sont dirigés
Les enfants isolés sont souvent plongés dans
vers des centres de long séjour en région
des situations familiales ou sociales délicates,
Entre Médecins du Monde et
les familles dans le cadre d’un
parrainage, il y a un lien très
fort qui se crée, d’assistance, de
parisienne (centres de Bullion, Margency
compliquées, voire inextricables : familles sans
communion, de partage, de solidarité.
et des Côtes) où la vie est moins rude qu’à
papiers, monoparentales, sans ressources…
Les marraines pénètrent de manière assez
l’hôpital. De nombreuses activités y sont orga-
Ces enfants, plus que tous les autres vulnéra-
progressive l’environnement de la famille
nisées dans un cadre un peu moins médica-
bles devant la maladie, repartiront un jour près
et y apportent bonheur, sécurité, réconfort
lisé. Certains enfants sont scolarisés.
des leurs, dans un contexte souvent difficile.
moral et psychologique, et permettent
Pour faciliter la réadaptation et la réin-
d’atténuer la douleur, l’anxiété et les angoisses. Elles ne sont guidées que par un seul souci :
Le parrainage vise alors à accompagner l’en-
sertion dans la famille, il est essentiel de
l’intérêt de l’enfant avec ce que cela comporte de labeur, coût, engagement et renoncement.
fant pendant une véritable « tranche de vie »,
maintenir le lien et, quand il existe, de
Une personne qui, à des milliers de kilomètres, s’occupe avec amour et désintéressement de
jalonnée par des alternances de soins lourds
l’entretenir. Il s’agit d’encourager l’enfant à
son enfant devient assurément plus qu’un parent, une partie de soi-même dont on ne peut à
et de convalescence. Il n’est pas rare que cer-
communiquer avec ses parents, ses frères et
jamais se détacher. La toile créée par Médecins du Monde, où se développent des rapports
tains enfants retournent régulièrement pour
ses sœurs, d'évoquer avec lui ses origines,
profonds et sincères d’amitié, de soutien moral, d’assistance multiforme tant sur le plan de la
des interventions ou des soins dans les ser-
son pays, ses habitudes de vie afin d’éviter une
mobilité géographique que du partage pur, est tout simplement magnifique.”
vices de l’hôpital parisien où ils ont été opérés
rupture trop grande.
Abdoulaye F. / Dakar / 2008
Quand les pathologies nécessitent un
© Sophie Brändström
devient alors un réconfort inestimable.
ou soignés à leur arrivée.
Le bénévole qui a assuré le parrainage
Lettres, appels téléphoniques, mails, même
dans l’hôpital d’origine reste en contact
si la barrière de la langue est un obstacle (les
avec celui qui prend le relais dans le cen-
photos parleront), sont autant de moyens pour
tre de long séjour. L’enfant les retrouve res-
maintenir un lien de sécurité et l’appartenance
47
Mimi V. et le papa de Cédric,
reparti à Lyon
Quelquefois, il s’agit de restaurer un lien qui n’a
Les contacts établis avec l’association des En-
pas pu être créé, dans le cas de bébés arra-
fants de l’île aux parfums facilitent les échanges
chés dès les premiers jours aux bras maternels.
entre les enfants de La Réunion et de Mayotte
La maman n’a pas eu le temps d’investir son
et leurs familles.
enfant. Il faudra alors tenter de désamorcer le
rejet ou l’oubli qu’une trop longue absence, un
lourd handicap ou un pronostic réservé peu-
— LES PARENTS PEUVENT VENIR
vent provoquer chez certains parents.
Quand les parents peuvent venir, par leurs pro-
Il arrive enfin que les parents ne soient pas
pres moyens où grâce aux billets qu’Air France
joignables, car trop isolés dans un pays loin-
met à la disposition de la Mission pour rappro-
tain. L’assistante sociale cherchera alors à les
cher la famille d’un enfant très gravement ma-
retrouver, par l’intermédiaire de celle du pays
lade ou en fin de vie, le bénévole prépare l’en-
d’origine, pour tenter de donner ou prendre
fant à leur arrivée. Il se met ensuite à distance,
des nouvelles.
sans pour autant disparaître, pendant le séjour
des parents. Il reprendra sa place au moment
du départ, pour adoucir cette nouvelle rupture
et continuer à apporter son soutien.
Lorsqu’il s’agit d’un « parrainage-relais » et que
les parents ne sont là que par intermittence,
les échanges sont différents, quelquefois plus
faciles. Le bénévole peut devenir un véritable
soutien à la parentalité.
— LES PARENTS SONT LÀ
D. FAVIER
ASSISTANTE SOCIALE
Même si ce n’est pas exactement l’objectif de
la mission, les bénévoles sont quelquefois sol-
Le parrainage ne doit pas déresponsabiliser les parents. La marraine n’est
licités par l’équipe hospitalière pour permettre
pas un substitut parental, même si elle vient suppléer un temps la famille empêchée
à des parents démunis devant une situation
de jouer son rôle. Ses objectifs, tout au contraire, sont de maintenir l’investissement familial,
difficile de prendre le recul nécessaire et de se
de soutenir leurs compétences faites de patience, de confiance à distance, de tenter de
ressourcer. Il s’agit alors de prendre en comp-
diminuer la part de culpabilité si fréquente des parents au départ de leur enfant,
te le « mieux-être de l’enfant » qui peut souffrir
qu’ils peuvent vivre comme un abandon.”
d’une situation anxiogène. Il ne peut s’agir en
Dominique Favier / assistante sociale / service de réanimation / hôpital Necker
aucun cas d’une prise en charge morale ou
matérielle des parents.
48
KUBRA
Angeline R. et Kubra,
décédée à Paris
Angéline R. est marraine Médecins du Monde depuis
4 ans. En janvier 2007, elle a pris en charge la petite
Kubra, alors âgée de 3 mois, et ce à la demande du service d’immunologie de l’hôpital Necker où elle est hospitalisée sous bulle. Ses parents, d’origine turque, habitent la
région de Bordeaux. Kubra a déjà subi une chimiothérapie
et une greffe de moelle épinière.
© Stéphanie Rivoal
Quand Kubra est venue pour sa greffe,
elle n’était vraiment pas bien.
Je lui parlais beaucoup, je la massais,
la caressais. Il a fallu l’apprivoiser doucement
pendant plusieurs jours. Elle réagit aujourd’hui
au son de ma voix, je capte son regard,
elle y répond. Quand enfin elle me sourit,
© Stéphanie Rivoal
MR K.
LES
ENFANTS
BULLE
PAPA D'AÏSSA
Le parrainage a été pour nous un véritable soulagement.
Notre moral est passé par des hauts et des bas. Mais nous savions qu’en
notre absence, Aïssa était bien stimulé par une marraine, toujours la même,
et nous nous sommes sentis vraiment bien épaulés.”
cela me bouleverse totalement. Je ne trouve
rien de plus beau. Il est pourtant difficile,
de ne pas pouvoir la toucher autrement
qu’à travers cette bulle qui la protège,
mais aussi l’isole. Je la stimule, je l’assois,
© Stéphanie Rivoal
CHEF DE SERVICE
auprès d’elle presque tous les jours pendant
Beaucoup de nourrissons ou de tout-petits qui ont des maladies rares du système
immunitaire nécessitent des greffes de moelle osseuse et donc un séjour prolongé en « bulle ».
plusieurs heures. Les parrainages nous
Je ne suis pas certain que le parrainage des « enfants bulle » soit vraiment plus difficile. C’est différent.
enrichissent énormément. Ces enfants qui
Le premier contact peut choquer, mais la bulle est une barrière à laquelle il faut s’habituer. Il y a une
endurent tant de souffrances nous donnent
phase d’appréhension, dans les deux sens du terme, pour apprendre à s’en servir, avec les mains dans
de vraies leçons de courage. Pour être
les gants. Dans les discussions que j’ai avec les marraines, il semble que lorsqu’elles maîtrisent la bulle,
marraine, je pense qu’il faut avoir de l’amour
elles s’adaptent facilement et peuvent prendre l’enfant dans leurs bras, malgré cette contrainte.”
à donner, mais aussi des nerfs solides.”
Professeur Alain Fischer / chef du service immunologie / hôpital Necker / 2008
elle adore… Je joue avec elle. Je viens
50
PR. ALAIN FISCHER
51
Marianne P. et Malik,
décédé à Paris
LA
SÉPARATION
DÉNOUER LE LIEN CRÉÉ AVEC LES ENFANTS PARRAINÉS
EST UNE ÉTAPE INCONTOURNABLE DU PARRAINAGE.
L
a séparation, même si les bénévoles l’anticipent et
s’y préparent est l’un des moments les plus difficiles
du parrainage. La mission se termine à la fin de l’hos-
pitalisation. Le départ d’un enfant guéri, heureux de retrouver sa famille est la meilleure issue d’un parrainage. Mais le
lien se brise quelquefois brutalement ou douloureusement.
Il est inévitable que l'on s'attache aux enfants que l’on accompagne. Un travail personnel, soutenu par l’équipe, est
© Cyrille Girard
52
© photographie
alors nécessaire.
53
QUAND
LES ENFANTS
REPARTENT…
AGATHE F.
ISABELLE D-S.
BÉNÉVOLE
BÉNÉVOLE
Quand l’enfant repart, c’est souvent aussi bru-
Le bénévole n’est pas toujours prévenu, ce qui
Je pense que le fait que Yasser retrouve sa famille, sa maison, sa vie, a pris
Le départ bien sûr a été dur, mais moins que je ne l’aurais cru.
talement qu’il est arrivé. Après des semaines ou
provoque un chagrin et une frustration bien lé-
le pas sur le reste. Le fait d’imaginer sa maman le serrer dans ses bras après
Je ne suis plus marraine, mais c’est
avec beaucoup de bonheur que
je repense aux quatre dernières années
des mois d’hospitalisation et de soins adaptés,
gitimes. Le moment de la séparation, celui du
des mois de séparation m’a rendu le sourire. Mon petit rayon de soleil
pendant lesquelles j’ai accompagné Nicoletta
le moment du départ est souvent dépendant
bilan des bons et des mauvais souvenirs, du
me manquera, mais il a retrouvé sa place.”
sur son chemin de la guérison, plein de
du billet d’avion et de l’accompagnateur.
temps passé ensemble à garder l’espoir, de la
rebondissements. Autant de moments
de bonheur que de moments de tristesse,
Le parrainage est « réussi » quand l’enfant repart serein
sans souffrir de la rupture d’avec le parrain ou la marraine,
qui se réjouit de son retour en famille. ”
DR. AUBIER
de larmes, d’angoisses, de prières… sans
MÉDECIN-CHEF
jamais perdre l’espoir. La greffe de Nicoletta
Bien souvent, nous sollicitons les marraines pour accompagner
l’enfant lors de son retour dans son pays d’origine et c’est aussi grâce
a réussi ! À surveiller constamment… Elle est
à elles, aux liens qu’elles ont quelquefois conservés avec les enfants, que nous
et de volonté pour continuer à se battre.”
rentrée chez elle, en Guyane, pleine de vie
arrivons à avoir des nouvelles de nos petits patients.”
Docteur Françoise Aubier / médecin-chef / hôpital de Margency
joie du retour en famille, de l’« au-revoir » en est
essentiel pour le bénévole comme pour l’enfant. Une tranche de vie se referme pour l’un
comme pour l’autre. Ne pas pouvoir le vivre
ARLETTE A.
est une déchirure. Le parrainage est « réussi »
MAMAN D'INNES
quand l’enfant repart serein, sans souffrir de la
Après une longue hospitalisation à Necker, Clarissa a pu repartir en Guyane.
Elle doit revenir régulièrement à Paris pour des examens et des soins.
Elle y retrouve à chaque fois Danielle H. qui l’a soutenue et vu grandir depuis des années.
QUAND
LES ENFANTS
REVIENNENT…
Chère Nathalie,
Je suis la mère d’Innes (Martinique)
que vous avez parrainée lors de son
séjour à l’hôpital Necker. Je viens
rupture d’avec le parrain ou la marraine, qui se
vous donner des nouvelles d’Innes. Elle se
quand l’enfant est confié à ses parents par ce-
Des examens ou une autre intervention néces-
porte très bien et n’a connu aucun souci
lui ou celle qui l’a accompagné pendant son
sitent parfois un ou plusieurs retours à l’hôpital
depuis son retour en Martinique.
C’est aujourd’hui une jolie fille, coquine et malicieuse comme vous pourrez le constater sur les
séjour à l’hôpital et qui peut raconter comment
dans les mois qui suivent le premier séjour.
se sont passés ces longs mois d’absence.
L’équipe signale à Médecins du Monde la date
photos jointes. Pouvez-vous les transmettre au docteur Chaloui ? Je vous remercie de tout
Si la relation se poursuit au-delà du parrainage,
prévue de l’arrivée de l’enfant qui sera de nou-
mon cœur pour l’aide et le support que vous nous avez accordés. À notre prochain voyage
par du courrier ou même des voyages, pour
veau confié, dans la mesure de sa disponibilité,
en France nous aimerions vous rendre visite. Si vous désirez venir passer des vacances dans
le bonheur de tous, c’est ensuite l’histoire de
au bénévole qui a assuré le parrainage.
notre belle île, nous sommes à votre disposition pour vous assister sur place et vous aider
chacun… et non plus celle de la Mission Par-
Il est évident que les enfants, tout comme leurs
dans votre séjour. Nous restons en contact avec vous et vous donnerons régulièrement des
rainage qui reste un accompagnement du dé-
parents, sont aussitôt rassurés et plus sereins
nouvelles de notre petite fille. Merci. Que dieu vous garde.”
but à la fin de l’hospitalisation.
pour aborder une nouvelle hospitalisation.
réjouit de son retour. Il arrive que les hôpitaux
proposent de raccompagner les enfants parrainés. Les histoires se terminent alors au mieux
© Stéphanie Rivoal
54
55
QUAND
LES ENFANTS (ASE)
SONT ACCUEILLIS
OU ADOPTÉS…
Quand vient le moment de la décision de pla-
ÉVELYNE S.
BÉNÉVOLE
Pour l’anecdote, la puéricultrice m’a raconté que le pédiatre, étonné de l’amélioration de
l’état général de Mohammed, avait décidé d’arrêter les neuroleptiques. Il lui avait demandé
à quoi on pouvait l’attribuer. Elle a répondu en riant “ faites venir un car de marraines de
Médecins du Monde à la pouponnière et la Sécurité sociale fera des économies…”
cement en famille d’accueil ou d’adoption des
enfants de l’Aide Sociale à l’Enfance, souvent
DANIÈLE R.
après de longs mois ou années de parrainage,
MADELEINE P.
BÉNÉVOLE
la marraine participe avec l’équipe à l’élabo-
COORDINATRICE
Khélia avait 3 mois quand je l’ai rencontrée, elle a aujourd’hui 11 ans.
Pupille de l’état, elle était polyhandicapée, avec un immense besoin d’amour
et de chaleur humaine. Khélia a alterné des séjours hospitaliers à Saint-Vincent-de-Paul
Quelle bonne nouvelle pour
Mohammed et pour toi que son
insertion dans une famille se profile
aujourd’hui clairement. C’est un
ration du projet de placement. Le parrainage
aura favorisé l’intégration de l’enfant dans la vie
sociale et son accès à l’autonomie.
et des séjours en pouponnière spécialisée. À l’âge de 4 ans, elle a été placée dans une
famille en province. S’est posé alors le problème crucial du lien étroit que nous avions
Quand les familles d’accueil ou d’adoption
moment qu’il faut vivre avec beaucoup
créé presque à sa naissance. Les assistantes sociales de l’Aide Sociale à l’Enfance ont
sont trouvées, les équipes de l’Aide Sociale à
d’attention pour chacun. La séparation
fait alors preuve d’une grande humanité. Considérant que notre relation ne pouvait être
l’Enfance leur proposent de préserver ce lien
nécessaire est une épreuve difficile pour
interrompue et en accord avec la famille d’accueil, elles m’ont accordé un droit de visite
créé avec la marraine. La plupart d’entre elles
vous deux. Il faut prendre conscience que
et la possibilité de passer une partie des vacances avec Khélia. Aujourd’hui, mon mari et
acceptent volontiers, très conscientes du be-
pour Mohammed ce sera un arrachement
moi faisons partie de son cadre de vie. Nous avons tous les trois un rapport très privilégié,
soin de l’enfant accueilli et des ruptures à ne
à son milieu de vie. Tu l’y as préparé en lui
comme un oncle et une tante…”
pas reproduire. Les marraines de Médecins du
permettant de s’attacher à toi qui venais
Monde deviennent alors les « vraies marraines »
de l’extérieur et en lui faisant connaître les
de ces enfants. Naissent alors de très belles
sorties, la piscine, le coiffeur… L’extérieur
n’est plus un danger pour lui.”
histoires de vie…
Madeleine P. /
KAËL L.
coordinatrice à la pouponnière Paul-Parquet
PARRAINÉE DE 89 À 93
Mireille B. et Alice
© Stéphanie Rivoal
J’ai 19 ans. Ma marraine de Médecins du Monde s’appelle Marie-Paule.
DR. ROSSET
Elle est restée près de moi de mes 8 mois à 4 ans et demi, c’est une personne formidable
PÉDOPSYCHIATRE
qui m’a apporté beaucoup de joie et d’amour. Elle a su me donner le sourire.
Vous savez, quand vous êtes une petite fille sans parents à vos côtés pour vous soutenir,
Lorsque nous rencontrons enfin une famille qui va accueillir cet enfant, nous
comprendre ce que vous ressentez, ce n’est pas facile. Elle a compris quand je n’avais
sommes alors très attentifs à ce que les liens antérieurs soient bien évidemment conservés.
pas le moral et quand je souffrais. Elle avait toujours les mots justes et apaisants.
Ces liens créés ont été reconnus par nous comme essentiels et vitaux pour le bébé.
À 4 ans et demi, j’ai été adoptée et j’ai enfin eu des parents, des frères et une sœur.
Nos équipes ont été à l’origine de ce lien, nous en sommes responsables et nous devons
Et Marie-Paule est devenue ma marraine de baptême. Je suis fière de ce qu’elle a fait
le respecter et protéger les enfants de la discontinuité inhérente à nos institutions. Il est
pour moi et d’autres enfants. C’est un cadeau du ciel. Quand je la vois, on discute,
impossible de l’interrompre... Alors, en équipe, nous essayons de maintenir ce tissage…
on déjeune ensemble, on va au cinéma, on s’aime toujours beaucoup.”
Docteur Dominique Jeanne Rosset / pédopsychiatre / Aide Sociale à l’Enfance de Paris
Marie-Paul P. et Kaël
56
© Stéphanie Rivoal
57
QUAND
LES ENFANTS NE
GUÉRISSENT PAS…
ANNE E.
----- Original Message -----
Voilà ensuite un extrait du texte écrit
BÉNÉVOLE
From: Morts de la Rue
par Anne-Marie, une des bénévoles
To: [email protected]
du collectif, et lu à l’enterrement de
Sent: Friday, September 08, 2006
Sergelin.
nière chance… Malgré tous les efforts des
Dès le début du parrainage de
Sergelin, j'ai compris que les
soins allaient être palliatifs et non
curatifs. Je l’ai vu décliner tous les jours.
médecins, il n’y a quelquefois plus d’espoir de
Je ressens la mort presque comme une
guérison et les enfants ne parviennent pas à
délivrance pour ce petit bonhomme,
surmonter la maladie. Certains enfants repar-
sans grandes chances de survie, quasi
Bonjour,
Tes parents sont des gens du voyage,
tent alors passer dans leur famille les derniers
abandonné de ses parents et qui souffrait
Suite à notre échange téléphonique, voici
Des gens qui se déplacent…,
moments de leur courte vie.
plus qu’il n’est possible de l’imaginer.
ce qu’il en est des funérailles de Sergelin.
À Cayenne où tu es né,
Mais ici, personne ne les oublie… D’autres
Mais je reste toujours admirative de la
Le mercredi 13 septembre à 10 h 45, son
C’est tout autrement
décèdent à l’hôpital, quelquefois dans les bras
manière dont les médecins et tout le
cercueil sera emmené depuis l’hôpital
Que l’on se parle,
des marraines, parfois très brutalement, sou-
personnel médical font tout leur possible
Necker. Souvent quelqu’un du service est
C’est tout autrement que l’on pense l’un à
vent après de longues souffrances.
pour « sauver » ces tout petits enfants,
présent avec beaucoup d’attention. Nous
l’autre.
même quasi condamnés. Je suis triste
savons qu’à Necker, ils habillent avec soin
C’est en regardant les nuages,
Étant donné les situations extrêmes dans les-
de penser qu’il risque d’être enterré en
les enfants, et mettent un jouet dans le
C’est en écoutant le vent
quelles arrivent les enfants aujourd’hui, le taux
France et que personne de sa famille ne
cercueil.
Que l’on sent ceux que l’on aime.
des décès a considérablement augmenté ces
pourra lui faire une dernière visite.”
Pathologies très lourdes, voyages de la der-
3:01 PM
Subject: enfant: Sergelin
Sergelin,
À Cayenne, où tu es né,
Anne-Marie et Pierre, bénévoles du
Pour t’aider à faire cet immense voyage
derniers mois, où il a été d’environ 20 %. Les
collectif, seront présents lors du voyage et
De Cayenne à Paris,
parrainages sont devenus longs, lourds et
au cimetière.
Médecins du Monde ont été tes parrains,
douloureux. Le décès des enfants est vécu,
Ils accompagneront Sergelin vers sa
Ici, une marraine,
avec les équipes soignantes, dans une pro-
tombe, dans l’espace des enfants.
Ta marraine, a veillé sur toi,
Il y a eu l’amputation qui n’a malheureusement pu être évitée, le courage et
fonde tristesse, mais avec beaucoup de di-
Les bénévoles du collectif évoqueront
Le temps de tes deux hospitalisations.
l’acceptation d’Ahmed. Une seconde opération aux poumons. Les séances de chimio qui
gnité. C’est une épreuve très difficile pour les
les parents de Cayenne, la marraine
Tu étais si heureux quand elle venait.
le rendent malade. Le combat incessant de l’équipe médicale et de moi-même pour le faire
bénévoles.
de Médecins du Monde, liront un texte
De tes grands yeux, tu la regardais.
manger. Il pleure dans mes bras quand il a compris qu’on allait l’amputer, parce qu’il a fait
Le corps de certains enfants ne peut être ra-
poétique, planteront une petite plante
Avec tes mains tu la touchais.
un cauchemar, parce que ses parents lui manquent, parce qu’il a mal, parce qu’il en a marre
patrié, faute de ressources nécessaires, et les
fleurie dans la terre. Dans quelque temps,
Tu étais si heureux quand elle venait.
tout simplement. Ahmed repart vers Alger le 6 janvier « parce qu’il n’y a plus rien à faire »…
bénévoles les accompagnent encore, avec
la mairie devrait inscrire son nom.
Puis, les sédatifs t’ont tellement fatigué,
Il est heureux de retrouver sa famille, mais je crois qu’Ahmed sait pourquoi on le renvoie.
tendresse, jusqu’au Carré des Enfants du ci-
Nous n’en parlerons jamais, il ne me posera pas la question que je redoute (…). Depuis son
metière de Thiais où les conduisent avec un
Bien cordialement.
retour, je l’ai souvent au téléphone et je comprends que son état se détériore. Il a une petite
grand respect les membres du collectif les
Cécile Rocca
voix et, comme souvent, tente de faire bonne figure. Il me dit d’embrasser tout le monde
Morts de la Rue.
ISABELLE R.
Jacqueline P. et Isabelle R. avec Ahmed,
décédé chez lui en Algérie
BÉNÉVOLE
en France. Alors je vais conclure comme ça. Je vous embrasse tous de la part d’Ahmed.”
58
Que tu ne pouvais plus,
Eva non plus n'a pas surmonté la maladie,
elle est décédée chez elle, à son retour au Cameroun
Lui montrer cette joie qui était en toi…
Sergelin avait 8 mois quand il est décédé
Bonjour à l’équipe du parrainage.
loin de ses parents.
59
Si les bénévoles
de Médecins du Monde
n’existaient pas,
il faudrait les inventer…”
© Cyrille Girard
DOCTEUR FRANÇOISE AUBIER / MÉDECIN-CHEF
hôpital de Margency
60
61
© David Delaporte
UN
TRAVAIL
D'ÉQUIPE
DEPUIS 20 ANS, BÉNÉVOLES ET ÉQUIPES HOSPITALIÈRES
ONT RÉUSSI À CRÉER AUTOUR DES ENFANTS ISOLÉS
UN RÉSEAU DE COMPÉTENCES, DE PRÉSENCES ATTENTIVES.
En haut, de gauche à droite
Mimi Vega, Catherine Bourdeau, Laurence Pioche (psychologue), Danielle Romual — chargées du recrutement UÊ
Saâdia Messaoudia — secrétaire salariée U Catherine Peterman — responsable de mission UÊ
Michèle Abidi — secrétaire bénévole U
Coordinatrices bénévoles dans les hôpitaux, de gauche à droite
Lucette Arnould et Chantal Heller — centre des Côtes U
Sylvie Guillaume et Jocelyne Sanson — hôpital Saint Louis, centre Édouard Rist, hôpital Robert-Debré U
Anne Etchegoyen — hôpital Necker et Fanny Alliez — hôpital Necker et hôpital Trousseau U
Simone Bonhomme et Annick Ferrand — Margency U
Madeleine Pottier — pouponnière Paul-Parquet U
63
UN PARTENARIAT
AVEC L’HÔPITAL
Confiance et communication
De nombreuses associations apportent pré-
sonne accompagnée, le respect de sa dignité
dispositions matérielles nécessaires à l’inter-
sence, soutien et animation dans ces lieux de
et de son intimité, la discrétion, la confidentia-
vention des bénévoles de l’association au sein
soins, de solitude et de douleur. Le bénévolat a
lité, l’absence d’interférence dans les soins. »
des services médicaux et d’organiser à cet
trouvé sa place à l’hôpital.
En application de cette loi, Médecins du Mon-
effet des réunions de concertation et d’évalua-
de est la première des associations à signer
tion appropriées ».
Pendant toute la durée du parrainage, pour un
La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des
avec l’AP-HP, en juillet 2002, une convention
enfant sans référent parental, le bénévole fait le
malades et à la qualité du système de santé
qui précise les modalités de ses interventions
lien avec les soignants dont il devient alors un
modifie le code de la santé publique et régit
dans les établissements.
interlocuteur privilégié.
les droits et les devoirs de l’hôpital et des as-
Le temps où le bénévole n’était accepté
sociations pour une meilleure intégration des
L’article 2 élargit les possibilités de parrainage
qu’avec réticence dans les services hospita-
bénévoles à l’hôpital.
« aux enfants dont les parents ou la famille ne
liers est aujourd’hui révolu. Depuis 20 ans, sa
peuvent être contactés. Le parrainage est or-
présence au sein de l’hôpital est devenue né-
Ainsi, l’article 17 de cette loi modifie l’article
ganisé et les sorties autorisées avec l’accord
cessaire pour créer des liens entre le malade et
L. 1112-5 du code de santé publique :
du chef de service. »
le monde extérieur.
« Les établissements de santé facilitent l’inter-
Le partenariat doit être basé
sur la reconnaissance
et la confiance mutuelle.”
MARIE-LOU PLANÇON / CADRE DE SANTÉ /
service de réanimation pédiatrique / hôpital Necker / 2004
vention des associations de bénévoles qui peu-
L’article 4 précise que « l’AP-HP s’engage à
vent apporter un soutien à toute personne ac-
préparer son personnel, par des actions de
M. GUILLOUX
cueillie dans l’établissement, à sa demande ou
sensibilisation, à l’intervention des bénévoles ».
De son côté, Médecins du Monde s’engage à
ASSISTANTE SOCIALE
avec son accord, ou développer des activités
L’article 7 propose « aux hôpitaux et équipes
« assurer la formation, l’accompagnement et
Un jour, une marraine s’est aperçue que l’enfant ne répondait pas à son prénom.
au sein de l’établissement, dans le respect des
médicales concernés de prendre toutes les
le soutien continu de ses membres bénévoles
Une longue conversation téléphonique avec les parents lui a permis de découvrir que le
règles de fonctionnement de l’établissement
prénom du passeport, employé à l’hôpital, n’était pas le prénom d’usage. Le lendemain, le
et des activités médicales et paramédicales et
visage de l’enfant s’éclairait… Une infirmière n’est pas toujours suffisamment disponible pour
sous réserves des dispositions prévues à l’ar-
faire ce travail d’observation et d’investigation.”
ticle L. 1110-11. Les associations qui organi-
Myriam Guilloux / assistante sociale / hôpital Necker
sent l’intervention des bénévoles dans des établissements de santé publics ou privés doivent
conclure avec les établissements concernés
une convention qui détermine les modalités de
cette intervention. »
A. LE GUENNEC
ASSISTANTE SOCIALE
Le code de santé publique, dans l’article
Dans un souci de coordination, le service organise deux réunions
annuelles avec l’ensemble des associations de bénévoles intervenant en
L. 1110-11, précise : « Les associations qui or-
cardiologie pédiatrique et notamment Médecins du Monde. Ce temps de réunion
d’une charte qui définit les principes qu’ils doi-
est l’occasion d’échanger sur les pratiques de chacun et de les réajuster.”
vent respecter dans leur action. Ces principes
Anne Le Guennec / assistante sociale / service de cardiologie / hôpital Necker
comportent notamment le respect des opi-
ganisent l’intervention des bénévoles se dotent
nions philosophiques et religieuses de la per© Stéphanie Rivoal
64
65
et à transmettre chaque année un rapport re-
PR. HUBERT
traçant ces activités au sein des hôpitaux de
CHEF DE SERVICE
l’AP-HP ».
La collaboration entre le service de réanimation pédiatrique
et Médecins du Monde a d’abord dû surmonter des réticences
et des doutes de la part de plusieurs d’entre nous. Quel chemin parcouru
L’avenant à cette convention, signé en 2007,
depuis et quel bel exemple de chaîne de solidarité. Aujourd’hui, l’équipe du service
les gestes de la vie quotidiennes (repas, bains,
a constitué un réseau de complicité très efficace avec les différents intervenants
habillage…) dans le respect des consignes de
de Médecins du Monde. Ensemble, nous partageons des moments forts de joie,
l’équipe soignante. »
autorise aujourd’hui « les bénévoles Médecins
du Monde à accompagner les enfants dans
mais aussi de peine et parfois de deuil. Que cet anniversaire soit l’occasion
d’exprimer à l’ensemble des parrains et marraines de Médecins du Monde notre
Quand les bénévoles agissent dans les servi-
admiration et nos remerciements pour tout ce qu’ils apportent aux enfants,
ces avec réserve et discrétion, sans se subs-
pour leur immense disponibilité et aussi pour tout ce qu’ils voient et taisent
tituer aux parents, en en assumant les devoirs
de nos petites (et parfois grosses) imperfections.”
même s’ils n’en ont pas les droits, la commu-
Professeur Philippe Hubert / chef du service réanimation pédiatrique / hôpital Necker
nication s’établit dans la confiance et la transparence avec les soignants.
C’est un véritable partenariat qui a réussi à se
© Stéphanie Rivoal
Anne E., Florence Cocquin et Kevin, reparti en Guyane
mettre en place entre les équipes hospitalières
et celles de Médecins du Monde.
Il peut arriver aussi que la relation engagée avec
nécessaire : se séparer du bénévole, provisoi-
l’enfant ou l’équipe ne respecte pas les règles
rement ou définitivement.
ANNE FERRET
PSYCHOLOGUE
Dès l’arrivée de l’enfant, tout au long de
éthiques de la mission : surinvestissement af-
l’hospitalisation, au moment de son départ
fectif, intrusions dans le domaine médical ou
Au-delà des liens tissés avec les enfants, la
ou de son décès, les échanges confirment
administratif… Cette situation fait alors l’objet
Mission Parrainage participe aujourd’hui ac-
Il peut arriver qu’un parrainage ne
fonctionne pas ou dérape en cours
de route, l’enfant et la marraine n’y
la complémentarité des équipes pour le
d’une réflexion commune qui peut amener à
tivement aux côtés des soignants au projet
trouvant pas leur compte. C’est alors le
« mieux-être de l’enfant ».
une décision quelquefois difficile, mais toujours
d’humanisation de l’hôpital.
moment d’engager une importante réflexion
commune, d’essayer d’en comprendre les
fonctionnements et les dysfonctionnements.
Lors d’entretiens réguliers avec le service (médecins, infirmières, assistantes sociales, édu-
PR. ALAIN FISCHER
catrices et psychologues), la connaissance et
CHEF DE SERVICE
66
poursuivre le parrainage ou le stopper ?
Il est parfois possible de retrouver un
tent les observations faites par l’équipe hospi-
Il y a un contact permanent et essentiellement informel entre nos équipes
et les marraines. Elles sont tenues au courant de l’état de l’enfant et des perspectives
talière. Son témoignage sur l’humeur, la douleur
d’évolution. De par leur présence qui n’implique aucun geste technique, les marraines sont
Dans le cas contraire, il est préférable
de l’enfant, comme ses suggestions, contri-
en situation de détecter une modification du comportement de l’enfant, de s’apercevoir
d’interrompre le parrainage et
buent à une prise en charge plus complète des
qu’il va moins bien que la veille, qu’il est déprimé. Le dialogue est dans les deux sens,
d’éventuellement confier l’enfant à une
difficultés de l’enfant et permettent la mise en
au bénéfice de l’enfant.”
autre marraine.”
place de solutions encore mieux adaptées.
Professeur Alain Fischer / chef du service immunologie / hôpital Necker / 2008
Anne Ferret / psychologue / centre des Côtes
l’écoute très particulière du bénévole complè-
Marie-Lou Plançon et Nathalie L
Quel est l’intérêt de l’enfant ? Doit-on
équilibre satisfaisant pour tous les acteurs.
© Stéphanie Rivoal
67
— LA FORMATION INITIALE
À l’issue des trois journées de formation, une
Élaborée spécifiquement pour les bénévoles et
charte est signée entre le bénévole et Méde-
dispensée à Médecins du Monde par des pro-
cins du Monde.
de sa démarche. Elle a su s’interroger sur sa capacité à s’occuper d’enfants,
UNE ÉQUIPE
MÉDECINS
DU MONDE
SOLIDAIRE
ET ENGAGÉE
elle qui n’en avait jamais eu. Saurait-elle trouver les mots, les gestes adaptés
Les réunions mensuelles de coordination et
dans les conflits ou les situations difficiles ? Qu’évoquait pour elle cette démarche
les retours d'activités ont, depuis 20 ans, fait
- réfléchir sur les motivations et les attentes
les soignants…, sont régulièrement organisées
d’aide et de désir de bénévolat ? Ayant subi à l’adolescence une longue hospitalisation
naturellement évoluer le dispositif de recrute-
liées à ce bénévolat ;
pour améliorer la qualité des connaissances,
où la solitude se faisait pesante, à une époque où l’hôpital était exclusivement un lieu
ment, de formation et d'accompagnement des
de soin, Danielle a vécu l’ennui et a ressenti un fort besoin de présence chaleureuse
bénévoles.
A. COURTADE
PSYCHOLOGUE
Danielle R., marraine depuis de longues années, est un exemple réussi
d’utilisation positive de son expérience passée. Avant de s’engager,
Danielle s’est posé une multitude de questions pour comprendre les motivations
fessionnels, la formation assure la qualité et la
cohérence des interventions des bénévoles en
— LA FORMATION CONTINUE
mettant au centre les besoins des enfants.
Des conférences sur des thèmes généraux :
Elle propose de :
séparation, psychologie de l’enfant, vertu thérapeutique du jeu, douleur, deuil, relation avec
de la présence et de l’écoute.
© Stéphanie Rivoal
- appréhender la mission comme prévention
des carences affectives et des troubles psychi-
et humaine. Sa démarche était donc une démarche gratuite visant à donner aux enfants
hospitalisés ce qu’elle-même n’avait pu recevoir pour redonner du courage et de l’appétit
Chacun apporte ses expériences et compé-
pour la vie. Son offre ne venait pas compenser une détresse personnelle, mais partager
tences pour améliorer sans cesse la qualité
une expérience dépassée et transcendée devenue très riche et motrice.”
de présence et d’écoute auprès des enfants
- trouver la « juste place » auprès de l’enfant
isolés et apporter une réponse optimale aux
malade et isolé, des soignants et de la famille
exigences de la convention.
de l’enfant ;
Chère Catherine,
Je quitte le parrainage, non par lassitude, mais par nécessité. Il faut savoir
ques inhérents à la séparation ;
GABY L.
BÉNÉVOLE
- connaître le rôle, les limites de la mission
se résigner. J’ai peur de ne plus être à la hauteur, de manquer parfois
— LE RECRUTEMENT
dans le respect de la culture et de l’identité de
un rendez-vous. Ces enfants nous attendent avec tant d’impatience…
Les bénévoles chargés de l’entretien de recru-
l’enfant ;
Je suis triste de penser que tout cela est fini, qu’une période heureuse de ma vie
tement (psychologue et marraines expérimen-
s’achève, après 13 ans dans votre équipe. Que faire de toute cette tendresse ?
tées) tentent d’apprécier si la motivation et le
- développer l’écoute aux besoins des enfants
Et « mes » Catherine (lorsque j’aime, j’annexe…), toujours là, fortes et douces
projet du candidat peuvent correspondre aux
en s’appuyant sur des connaissances de psy-
à la fois, efficaces. Pour elles, chaque problème a sa solution. Ou plutôt il n’y a
besoins de la mission.
chologie des enfants ;
jamais de problème… J’ai aussi aimé l’ambiance de nos réunions. J’ai apprécié
Elles sont particulièrement attentives à déce-
- préparer à la séparation et au deuil ;
les contacts intéressants avec les infirmières et les assistantes sociales et surtout
ler chez le candidat ses attentes, sa capacité
mes relations avec certains parents. Bon, tout cela est du passé. J’ai aimé,
j’ai beaucoup appris, j’ai dû aussi m’améliorer.
d’écoute, sa disponibilité, mais aussi ses fra-
- donner une cohérence à l’action des béné-
Attention ! Pas d’attendrissement !
gilités (trop grande détresse, non-respect de
voles pour la crédibilité de la mission dans les
PS : je viens d’avoir 80 ans…”
l’autre), sachant que la générosité est néces-
hôpitaux ;
saire, mais non suffisante. Dans le cas d’un
68
refus, elles essaient d’orienter le candidat vers
- créer un groupe et réfléchir sur l’engagement
un autre projet.
associatif.
69
— LE SUIVI DES PARRAINAGES
— LES GROUPES DE PAROLE
DES BÉNÉVOLES
Dans un cadre bien structuré, les bénévoles
Les coordinatrices bénévoles, pivots essentiels de la Mission et marraines expérimentées,
Animés par une psychologue, ils favorisent
ayant beaucoup de souplesse dans leurs inter-
sont en relation permanente avec les équipes
les rencontres nécessaires dans cette activité
ventions à l’hôpital. La communication trans-
hospitalières qui demandent les parrainages.
solitaire et parfois douloureuse. Les échanges,
parente et la confiance réciproque au sein de
Elles accompagnent et soutiennent les béné-
le partage des expériences heureuses ou mal-
l’équipe de coordination permettent d’assurer
voles tout au long de leur mission, en les aidant
heureuses les aident à surmonter leurs difficul-
la cohérence des comportements et la cohé-
à maîtriser la relation avec l’enfant. Leur grande
tés, à trouver les réponses adaptées. Le dépôt
sion des bénévoles.
disponibilité et leur écoute attentive font d’elles
des souffrances est essentiel au moment des
Les réunions régulières (groupe de paroles,
les garantes de l’éthique de la mission.
deuils. Mettre des mots pour parvenir à sup-
conférences) ou les rencontres plus convivia-
porter l’insupportable que représente toujours
les sont indispensables à la fidélisation des
le décès d’un enfant…
équipes et au sentiment d’appartenance à la
très engagés se sentent soutenus, tout en
Mission et à Médecins du Monde.
Après ces trois deuils successifs,
ce fut très dur pour moi de prendre
la parole devant les autres, mais ça
m’a fait un bien fou…”
OLIVIA G. / BÉNÉVOLE
— LA SUPERVISION
DES COORDINATRICES
Les coordinatrices se réunissent en moyenne
une fois par mois avec une psychologue pour
ANNIE MAGGIOLI
partager leurs expériences. Il s’agit de mieux
FORMATRICE
comprendre certaines situations complexes
La bonne volonté ne suffit pas… et il n’y a pas de « recettes »
génératrices de perplexité ou d’angoisse, qu’il
pour réussir un parrainage. Il faut avoir longuement réfléchi à cet engagement
s’agisse d’un enfant parrainé ou des réactions
important, qui nécessite beaucoup d’écoute et de disponibilité pour éviter
des marraines qu’elles encadrent, des conflits
les pièges… Je suis très optimiste, car nous avons le luxe et le bonheur
qu’elles ont à arbitrer, des limites qu’elles ont
de faire un vrai travail d’équipe.»
à donner. Savoir que d’autres rencontrent les
MICHÈLE B.
BÉNÉVOLE
mêmes difficultés qu’elles, écouter leurs avis
bienveillants permet de se sentir soutenu.
Quelle expérience le parrainage… ! Une multitude d’instants,
de rencontres, et Steve, cette boule de tendresse qui ne sait que sourire...
— LE SECRÉTARIAT
Première récompense ce sourire, moi qui croyais ne rien attendre. Mais autour
Une secrétaire à mi-temps et une secrétaire
de lui il y a tant d’enfants qui ne sourient pas. La souffrance que je vois me
bénévole assurent le suivi des dossiers et des
déchire… Mais je ne retiens que ses sourires qui sont des « pieds de nez
contacts avec tous les acteurs et partenaires
à la souffrance » et qui me donnent envie de continuer à donner une particule
de la mission.
de lumière, même si cela paraît infiniment petit. Merci à toute l’équipe,
La totalité des documents (dossiers et comp-
c’est bon d’être parmi vous.”
tes-rendus des parrainages, chiffres, courriers
divers) a été conservée depuis 1988, en partie informatisée, constituant ainsi une véritable
« mémoire » de la mission.
© Stéphanie Rivoal
70
© Stéphanie Rivoal
71
MARIANNE S.
Marianne S. et Elyes,
reparti à l'hôpital de Montpellier
Je ne lâcherai
pas de sitôt!
Tout cela a
changé la vie
et m’a beaucoup
apporté, je veux
continuer.”
AMADOU
Douze ans de parrainages, 34 enfants
Amadou est né à Paris en 1993.
Il vient de revenir à l’hôpital Necker pour une
qu’elle a suivis, qu’elle a vu mourir ou re-
Opéré deux heures après sa naissance
grave intervention. Il attend de nouveau une
vivre… C’est avec des yeux remplis, de ten-
d’une grave malformation intestinale dé-
greffe. Autour de lui, un réseau d’amitiés so-
dresse et de force que Marianne S. se souvient
celée à Dakar quelques semaines aupa-
lides, tissées tout au long de ces années, à
de chaque enfant, qu’elle raconte leur histoire
ravant, il se retrouve seul dans le service de
Paris comme à Dakar, devrait lui permettre
et la sienne.
gastro-entérologie. Ses parents doivent repar-
d’affronter cette nouvelle épreuve sans avoir
tir quand il n’a que 10 jours, leurs visas étant
besoin d’un parrainage.
Son engagement commence par un décès.
arrivés à expiration.
Steven meurt peu de temps après le début
Une greffe de l’intestin grêle est prévue, mais
du parrainage. Marianne le vivra mal. « Je ne
l’attente risque d’être extrêmement longue…
pouvais pas en parler. » raconte-t-elle. Il faudra
Dès le départ des parents, un parrainage est
du temps et le parrainage de Léa, Jean-Félix
mis en place. Marie-Paule accompagnera
et bien d’autres, pour accepter l’injustice de la
Amadou pendant 7 longues années de l’hôpi-
mort d’un enfant.
tal Necker au centre de Bullion où il séjourne
C’est aussi l’ambiance et les liens créés dans
entre les soins intensifs dont il a régulièrement
FAMA F.
l’équipe qui permettront à Marianne d’assu-
besoin. 7 ans pendant lesquels Marie-Paule
MAMAN D’AMADOU
mer les souffrances rencontrées. « L’encadre-
apporte avec détermination et régularité à
ment est formidable. J’ai des amies marraines
Amadou sa présence rassurante et attentive,
Nous tenons à exprimer notre
profonde gratitude à Marie-Paule S.,
qui ne sont pas de ma génération. On se voit
l’éveille à la connaissance de son pays et
Catherine P., Catherine B.
souvent, on dîne, on discute », explique-t-elle
de son continent, continue à lui rendre visite
et Nicole S. pour leu r générosité,
avec émotion.
quand il est au centre plus éloigné de Bullion,
leur disponibilité, elles qui ont toutes été
fait le lien avec les parents qui peuvent venir de
si proches d’Amadou et de nous ses
À près de 70 ans, Marianne reste pleine
temps en temps, grâce aux billets Air France.
parents… À aucun moment nous ne
d’énergie et surtout d’espoir. C’est avec force
Après la greffe réalisée par le pr. Goulet, Marie-
nous sommes sentis seuls durant
L’engagement des bénévoles est
un engagement au long cours fondé
et passion qu’elle parle du futur : « Je ne lâche-
Paule a ramené Amadou à Dakar où il a retrou-
ces moments d’angoisse. Merci aussi
sur la fidélité, l’investissement dans la
rai pas de sitôt ! Tout cela a changé la vie et
vé ses sœurs. Elle fait désormais un peu partie
à tous les bénévoles de cette Mission
durée, l’abnégation et une générosité
m’a beaucoup apporté, je veux continuer. » Et
de la famille… Ensuite même si cela n’a pas
qui réussissent des miracles au-delà des
sans calcul.”
on la croit.
été toujours facile, Amadou s’est bien adapté
frontières et des couleurs de peau.”
Professeur Olivier Goulet / chef du service
à sa vie au Sénégal.
Fama F. / Dakar / 2002
gastro-entérologie / hôpital Necker
© Stéphanie Rivoal
MARIANNE S. / BÉNÉVOLE
72
© Pascal Deloche
PR. GOULET
CHEF DE SERVICE
73
L’ANTENNE
EN GUYANE
Karina G. et Leaderson,
actuellement en famille d'accueil
LÀ-BAS AUSSI, DES ENFANTS HOSPITALISÉS ONT
BESOIN DE MARRAINES QUAND LES PARENTS, SOUVENT
DÉFAVORISÉS, NE PEUVENT SÉJOURNER À CAYENNE.
E
n septembre 2005, une antenne de la mission est
crée en Guyane sur la demande du docteur Delattre,
chef du service de pédiatrie à l’hôpital de Cayenne,
qui avait apprécié l’expérience très positive des 185 enfants
guyanais parrainés à Paris.
Le parrainage des bébés prématurés dans le service de
néonatalité est la spécificité de la mission à l’hôpital de
Cayenne. C’est un plus inestimable pour ces bébés qui démarrent si difficilement dans la vie.
74
75
Quelques indicateurs épidémiologiques
Seule la maternité de Cayenne est de niveau III,
DR. ANNE FAVRE
KARIMA G.
précisent la situation de la Guyane :
disposant d’un service de réanimation néona-
CHEF DE SERVICE
BÉNÉVOLE
du département et de la région en situation de
Les mères ne peuvent rester que
quelques jours en maternité, puis
rentrent dans leur commune d’origine.
Dylan est né beaucoup trop tôt…
au sixième mois de grossesse…
Il pèse 800 grammes. Sa maman est
détresse.
La séparation d’avec leur enfant durera
repartie aussitôt en forêt où elle vit avec
plusieurs semaines ou mois. Pendant cette
ses autres enfants. Il attend, à l’hôpital
tale. Y sont donc référées toutes les naissan- le taux de mortalité périnatale est de 18,1 ‰
ces à risque et accueillis tous les nouveau-nés
contre 7 ‰ en France métropolitaine
- le taux de prématurité est pratiquement le
double de celui de la métropole ( respectivement 12 % et 7,2 % )
Les soins dispensés sont ceux habituellement
période, les parents ne peuvent recevoir que
de Cayenne, d’atteindre le poids
- le taux de mortalité infantile est plus du
pratiqués en métropole. Les prématurés sont
des nouvelles par téléphone, éventuellement
minimum pour partir retrouver ses
double de celui de la métropole ( 10,4 ‰
pris en charge à partir de 25 à 26 semaines
relayées par l’équipe du centre de santé
parents, très défavorisés. Chaque jour,
contre 4,1 ‰ )
d’aménorrhée, soit des poids de naissance
ainsi que des photos par Internet.
depuis son arrivée, j’enfile blouse et
autour de 600 grammes. Les durées d’hospi-
L’équipe soignante s’est inquiétée depuis
talisation de tels enfants peuvent aller jusqu’à
longtemps des conséquences pour l’enfant
masque et viens passer un long moment
près de lui. Sorti de la couveuse il se blottit contre moi. Je lui parle doucement et le caresse.
3 mois.
d’une telle rupture. C’est dans ce contexte
Dylan se détend, ses mains se déplient, son visage s’apaise. Il respire tranquillement et
159 enfants ont été parrainés par les 27 bé-
que la mise en place d’un accompagnement
entrouvre les yeux. Nourri de cette affection et de cette attention quotidienne, il va mieux
névoles qui sont intervenus depuis décembre
personnalisé de ces petits patients a trouvé
lutter pour vivre, prendre du poids et quitter l’hôpital. ”
2005.
toute sa justification. Ainsi, dès qu’un enfant
Karima G. / coordinatrice bénévole de la Mission à Cayenne
© Marie Bourdeau
originaire des « communes » (comme on
Le fonctionnement de l’antenne est identique
dit ici) est admis, il est proposé à la maman un accompagnement par une marraine de Médecins du Monde. Nous avions déjà
à celle de l’Île-de-France : recrutement, forma-
eu l’expérience très positive des parrainages des enfants envoyés pour soins à Paris. Ici, il s’agit d’accompagner des enfants
tion, suivi et groupe de paroles. Les parraina-
parfois très petits ou extrêmement immatures alors même qu’ils ne sont pas encore sortis du service de réanimation néonatale
ges sont souvent relativement courts (d’une
et que leur survie n’est pas « garantie ». Nous expliquons aux marraines nos réserves et surtout l’importance de leur rôle : être
durée d’1 à 2 mois) puisque la majorité des
une personne stable pour dispenser à l’enfant des soins uniquement maternants, jamais agressifs ni douloureux contrairement
enfants parrainés sont des prématurés. La
à ceux que nous, soignants, nous prodiguons. Cet espace de relâchement nous paraît un moment de réconfort dans la vie et
proximité de l’hôpital favorise les visites quasi
l’environnement de ces petits qui se prolonge bien au-delà de la durée des visites. Les marraines ont trouvé très simplement
quotidiennes nécessaires à ces tout-petits et
une place attentive et discrète au sein de l’équipe, entourant leur protégé de caresses, de paroles, de regards, de chansons. Le
la convivialité d’une équipe qui intervient dans
bénéfice de ces relations maternantes, même s’il est difficile de la quantifier objectivement en termes de procédure qualité (!), est
un seul et même établissement.
perçu comme évident pour les équipes soignantes. Nous n’observons plus de comportement de retrait, de fuite du regard face
à nous ; l’apprentissage de la succion se fait avec envie et plaisir pour le bébé. Il est parfois arrivé que des situations inattendues
Cependant, la Mission répond aussi aux de-
de pronostic réservé, voire très sombre, soient identifiées. La présence de la marraine, toujours informée, a permis de maintenir
mandes de tous les autres services de l’hôpital
autour de l’enfant un rempart d’affection contre le stress d’une telle découverte, lien humain de soutien, là où la médecine avait
et certains parrainages se sont prolongés pen-
atteint ses limites. Aujourd’hui, nous n’imaginerions plus fonctionner sans les marraines auprès des enfants
et souhaitons leur donner plus de place au sein de l’équipe. Ce sont elles qui, connaissant si bien leur tout-petit,
dant plusieurs mois.
sont les mieux placées pour témoigner de ces moments de vie à des parents trop éloignés. »
Docteur Anne Favre / chef du service médecine et réanimation néonatale / centre hospitalier Andrée Rosemon / Cayenne
Josette L. et Kenzo, reparti dans sa famille
76
© Marie Bourdeau
77
Nous souhaitons
longue vie à cette
belle mission qui panse
les bleus du cœur.”
© Cyrille Girard
ANNE FERRET / PSYCHOLOGUE
centre des Côtes
78
79
QUELQUES
DATES
20 ANS
DE MISSION
>
>
>
>
>
>
>
Quelques dates — 81
Les hôpitaux et établissements partenaires — 82
Carte des migrations sanitaires — 84
Quelques chiffres — 86
Le soutien d’Air France — 88
Les intervenants de la formation — 90
Les bénévoles depuis 1988 — 92
1987
L’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP)
donne à Médecins du Monde l’agrément de visite dans les hôpitaux
1988
CHARTE DE L’ENFANT HOSPITALISÉ
CRÉATION DE LA MISSION PARRAINAGE DES ENFANTS HOSPITALISÉS
Première mission Enfance de Médecins du monde. L’hôpital Necker et le service
de cardiologie de l’hôpital Laennec sont désignés comme des établissements pilotes.
1989
CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L’ENFANT
« Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui,
dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection » (article 20).
« Les états parties reconnaissent le droit de l’enfant de jouir du meilleur état
de santé possible » (article 24).
1991
CHARTE DES ASSOCIATIONS DE BÉNÉVOLES À L’HÔPITAL
2002
LOI DU 4 MARS SUR LES DROITS DU MALADE ET LA QUALITÉ
DU SYSTÈME DE SANTÉ
Elle donne l’obligation de fixer par voie de conventions les relations et engagements
des hôpitaux avec les associations de bénévoles actives dans leurs établissements.
CONVENTION ENTRE MDM ET L’ AP-HP
Elle précise les engagements respectifs de l’association et des établissements hospitaliers.
2006
MDM adhère à l’Alliance Nationale des Associations en Milieu de Santé (ANAMS)
MDM rejoint l’Union Nationale des Associations de Parrainage de Proximité (UNAPP)
MISE EN PLACE DE LA MISSION À CAYENNE EN GUYANE
2008
SIGNATURE D’UN AVENANT À LA CONVENTION ENTRE MÉDECINS DU MONDE
ET L’HÔPITAL NECKER
Il précise le rôle et la limite des interventions des bénévoles dans le processus de soins auprès
des enfants hospitalisés.
80
81
U
—
LES
HÔPITAUX
ET ÉTABLISSEMENTS
PARTENAIRES
U
—
Signataires d’une convention avec Médecins du Monde
Hôpital Saint-Louis AP-HP / Paris 10e /
— Hôpital Armand-Trousseau AP-HP / Paris 12e /
— Hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP / Paris 15e /
— Clinique Médicale et Pédagogique Édouard-Rist / Paris 16e /
— Hôpital Robert-Debré AP-HP / Paris 19e /
— Centre des Côtes / Les-Loges-en-Josas (78) /
— Hôpital de Pédiatrie et de Rééducation de Bullion / (78) /
— Fondation Paul-Parquet / Neuilly-sur-Seine (92) /
— Hôpital d’Enfants Margency Croix-Rouge Française / (95) /
— Centre Hospitalier Andrée Rosemon / Cayenne (97) /
82
NOMBRE
D’ENFANTS
PARRAINÉS
33
106
699
15
77
56
2
12
45
159
Autres établissements
Hôtel-Dieu AP-HP / Paris 4e /
— Centre Médico Universitaire Claude Albert Colliard / Paris 5e /
— Hôpital de l’Institut Curie / Paris 5e /
— Hôpital Laennec AP-HP / Paris 7e (fermé en 1999) /
— Hôpital Rothschild AP-HP / Paris 12e /
— Hôpital Pitié-Salpêtrière AP-HP / Paris 13e /
— Hôpital Broussais AP-HP / Paris 14e /
— Hôpital Saint-Vincent-de-Paul AP-HP / Paris 14e /
— Institut de Puériculture et de Périnatalogie / Paris 14e /
— Hôpital Bichat-Claude Bernard AP-HP / Paris 18e /
— Centre Médical et Pédagogique Varennes-Jarcy / (91) /
— Centre Élisabeth de la Panouse-Debré / Antony (92) /
— Hôpital Foch / Suresnes (92) /
— Hôpital Raymond-Poincaré AP-HP / Garches (92) /
— Centre Médical pour Jeunes Enfants / Montreuil (93) /
— Centre de Rééducation Fonctionnelle de Villiers-sur-Marne / (94) /
— CHU Henri Mondor AP-HP / Créteil (94) /
— Hôpital Bicêtre AP-HP / Le Kremlin-Bicêtre (94) /
— Hôpital National de Saint-Maurice / (94) /
— Institut de cancérologie Gustave-Roussy / Villejuif (94) /
1
1
12
307
1
1
3
26
3
1
1
1
3
1
2
15
1
1
9
20
83
CARTE
DES
MIGRATIONS
SANITAIRES
80
27
23
53
357
167
96
225
10
PROVENANCE DES ENFANTS PARRAINÉS
EN ÎLE DE FRANCE DEPUIS 1988
GUYANE (225)
MAYOTTE (179)
LA RÉUNION (132)
ANTILLES (96)
COMORES (84)
FRANCE (80)
TAHITI (09)
NOUVELLE CALÉDONIE (02)
SURINAM (10)
ALGÉRIE (357)
MAROC (53)
TUNISIE (23)
MADAGASCAR (02)
EUROPE (27)
BRÉSIL (04)
AFRIQUE SUBSAHARIENNE (167)
84
84
4
179
2
9
132
159
2
ENFANTS PARRAINÉS
EN GUYANE DEPUIS 2006
85
QUELQUES
CHIFFRES
— DE 1988 À SEPTEMBRE 2008 EN ÎLE-DE-FRANCE
1450
ENFANTS
PARRAINÉS
DE 1988 À SEPTEMBRE 2008
395
BÉNÉVOLES
DEPUIS 1988
96
BÉNÉVOLES
AU 1ER SEPTEMBRE 2008
— DE 2006 À SEPTEMBRE 2008 EN GUYANE
ÂGE DES ENFANTS À LEUR ARRIVÉE À L'HÔPITAL
37,4% moins de 1 an
27,8% de 1 à 4 ans
17,2% de 5 à 9 ans
11,4% de 10 à 14 ans
159
ENFANTS
PARRAINÉS
DE 2006 À SEPTEMBRE 2008
AU DELÀ DE 30 MOIS
20 À 30 MOIS
10 À 20 MOIS
3 À 10 MOIS
3 MOIS
ÂGE DES ENFANTS À LEUR ARRIVÉE À L'HÔPITAL
73,6% moins de 1 an
BÉNÉVOLES
DEPUIS 2006
13
BÉNÉVOLES
AU 1ER SEPTEMBRE 2008
6,2% de 15 à 18 ans
PARRAINAGES LONGS
25
18,2% de 1 à 4 ans
2,5% de 5 à 9 ans
4,4% de 10 à 14 ans
1,3% de 15 à 18 ans
DURÉE DU SÉJOUR À L'HÔPITAL
2,4% moins de 10 jours
44,3% de 10 à 49 jours
PARRAINAGES LONGS
PLUS DE 300 JOURS
100 À 299 JOURS
50 À 99 JOURS
DURÉE DU SÉJOUR À L'HÔPITAL
21,1% moins de 10 jours
58,2% de 10 à 49 jours
20,8% de 50 à 99 jours
21,2% de 100 à 299 jours
PARRAINAGES COURTS
15,7% de 50 à 99 jours
essentiellement des bébés prématurés
PARRAINAGES COURTS
essentiellement des pathologies
cardiaques à l'hôpital Laennec
(fermé en 1999) et à l'hôpital Necker
6,6% de 300 à 599 jours
MOINS DE 10 JOURS
2,3% de 600 à 999 jours
2,4% 1000 jours et plus
4,4% de 100 à 299 jours
DE 10 À 49 JOURS
0,6% de 300 à 599 jours
MOINS DE 10 JOURS
DE 10 À 49 JOURS
86
87
LE SOUTIEN
D’AIR FRANCE
UN GRAND « PLUS »
POUR LA MISSION
PARRAINAGE
La direction de la communication
d’Air France attache une importance toute
particulière à ce partenariat logistique
pour soutenir le remarquable travail des
marraines-tendresse de cette mission
pas tout à fait comme les autres,
créée au sein de Médecins du Monde.”
F. AUBIER
EULALIE A.
Depuis 1999, le service du Partenariat Huma-
MÉDECIN CHEF
MAMAN DE THOMAS
nitaire favorise le rapprochement des familles
Grâce au partenariat avec Air France,
nous obtenons des billets d’avion pour
Je tiens à remercier la compagnie
Air France de m’avoir offert un aller-retour
éclatées par la maladie des enfants quand
que les parents éloignés puissent passer
La Réunion/Paris afin de pouvoir venir voir
ciale. Avec une disponibilité et une réactivité
des moments privilégiés avec leurs enfants,
mon petit Thomas, hospitalisé en gastro-
sans faille, l’équipe du Partenariat Humani-
même lorsqu’il est nécessaire de les solliciter
entérologie à l’hôpital Robert-Debré, et de
taire accorde des billets gratuits, généralement
dans l’urgence quand la santé de l’enfant se
passer de merveilleux moments avec lui.
programmés mais souvent demandés dans
dégrade.” Docteur Françoise Aubier /
Avec toute ma gratitude.”
l’urgence par Médecins du Monde, en parti-
médecin chef / hôpital de Margency / 2008
Eulalie A. / 2000
culier lorsque le cas de l’enfant est considéré
elles ne peuvent bénéficier d’aucune aide so-
comme désespéré.
MIREILLE QUEILLÉ / RESPONSABLE DU SERVICE
DU PARTENARIAT HUMANITAIRE D’AIR FRANCE
Catherine B. raccompagne
Amadou à Dakar
sur un vol Air France.
Des parents défavorisés peuvent ainsi se rapprocher de leur enfant malade quand l’hospitalisation se prolonge et qu’un état dépressif
s’installe ou pour partager les derniers moments d’une trop courte vie. La chaîne de soli-
La Fondation Air France, créée en novembre 1992 en faveur de l’enfance défavorisée, a pour
darité qui s’installe entre Médecins du Monde,
vocation de « relier, réunir les hommes, favoriser le contact entre eux ». Mais sa priorité est de
H. TAMBOUR
le service du Partenariat Humanitaire, l’escale
soutenir les actions en faveur de l’enfance
ASSISTANTE SOCIALE
Air France et les parents permet à des familles
Dès 1992 Catherine Peterman et Catherine
Nous vous exprimons toute notre
gratitude pour la solidarité et la
générosité dont vous avez fait preuve
Bourdeau, coordinatrice dans les hôpitaux
envers la famille A. Vous avez permis à cette
émanant des personnels du groupe.
Le grand-père
de Clarissa,
originaire de Guyane,
est venu à plusieurs
reprises au chevet
de Clarissa qui,
depuis, a pu repartir
dans sa famille et
revient régulièrement
pour des soins.
séparées de se retrouver pour des moments
d’une rare intensité. Un « plus » inestimable
pour l’enfant hospitalisé.
DOURATI A.
famille, séparée depuis 8 ans en raison de la
Quand leur état de santé et les médecins
MAMAN DE ALMA
maladie des petites jumelles, de se retrouver
l’autorisent, certains petits malades peuvent
en Bolivie pour une période de vacances.
aller séjourner et se ressourcer quelques jours
Merci pour ce temps passé dans
dans leur famille.
nir dès 1993 un quota de billets gratuits pour
Je voulais vous remercier de votre
aide grandiose en nous offrant des
billets d’avion pour mon mari et la sœur
faire venir les parents éloignés auprès des en-
jumelle d’Alma. Ma fille Alma est ici depuis
d’autant plus que nos demandes ont évolué
Enfin, grâce aux billets Air France, l’équipe de
fants malades.
le 18 avril 2005, en attente d’une greffe de
au cours de vos démarches. ”
la Mission de Paris se rend régulièrement à
Laennec et Necker, sont toutes les deux navigantes à Air France.
Elles sollicitent aussitôt le soutien de la Fondation, qui permet à Médecins du Monde d’obte-
la recherche des vols les plus appropriés,
foie et nous ne savons pas combien de
Cayenne pour former et soutenir les bénévoles
En juin 1995, La Fondation finance également
temps cela va durer... Cela a été une grande joie de nous retrouver tous pendant un mois.
de l’antenne en Guyane.
la formation des bénévoles de la Mission. Son
Ces retrouvailles vont nous permettre de mieux supporter l’attente de greffe. Avec notre plus
aide ponctuelle se termine en 1998.
sincère reconnaissance et nos remerciements.” Dourati A. / 2005
© Stéphanie Rivoal
88
89
LES
INTERVENANTS
DE LA
FORMATION
UÊAnna Elli-Pardo — psychologue :
UÊMadeleine Pottier — membre de l’association ARPLE
UÊMarie-Odile de Vaugrigneuse — présidente
« Le décès des enfants loin de leur famille » / 1996
(Association de Recherche et de Pratique sur le Livre
de l’association JALMALV (Jusqu’à La Mort Accompagner
— les animatrices de la formation initiale
UÊAnnie Maggioli — formatrice : « Parrainages-relais
pour Enfants) : « L’album comme outil utilisable auprès
La Vie), et Hélène Juvigne — responsable formation
UÊAnnie Maggioli — formatrice
avec les parents et décès des enfants » / 1997
des enfants malades » / 2003
de l’association JALMALV :
LA MISSION PARRAINAGE REMERCIE :
90
UÊMurielle Blachere-Battaglia — psychologue
UÊAnnie Maggioli — formatrice :
UÊAnnie Maggioli — formatrice :
« La fin de vie, réactions et comportements » / 2007
psychanalyste
« Évolution des parrainages : les parrainages longs » / 1998
« Relations avec les parents » / 2003
UÊMurielle Blachère-Battaglia
UÊAleth Naquet — formatrice en relations humaines
UÊMonsieur Vila — service de pédopsychiatrie
UÊMarie-Lou Plançon — cadre infirmier, service de
— psychologue psychanalyste :
de l’hôpital Necker : « Les carences affectives de l’enfant
réanimation du professeur Hubert à l’hôpital Necker :
« Réflexions autour des conséquences pathologiques
— les intervenants de la formation continue
isolé à l’hôpital » / 1999
« Organisation d’un hôpital et d’un service » / 2003
des effets de la séparation chez le jeune enfant » / 2007
UÊBarbara Brouillard — formatrice en relations humaines
UÊChristine Mannoni — ethnopsychologue
UÊAnnick Ernoult — centre de formation
UÊPauline Kunstmann — infirmière, et Cécile Chaudot
service de cardiologie du professeur Cachaner à l’hôpital
à l’hôpital Robert-Debré : « Les chemins du deuil :
François-Xavier Bagnoud : « Accompagnement des
— auxiliaire de puériculture à l’hôpital d’enfants Margency
Necker : « Déclenchement des parrainages » / 1989
souffrance, angoisse, révolte, séparation » / 2000
enfants en fin de vie éloignés de leurs familles » / 2004
Croix-Rouge Française : « Partenariat avec les soignants
UÊChristine Ollivier — psychologue :
UÊChristine Mannoni — ethnopsychologue
U Christine Mannoni — ethnopsychologue à l’hôpital
et limite de nos interventions auprès des enfants » / 2008
« La douleur chez l’enfant » / 1992
à l’hôpital Robert-Debré : « Développement psychoaffectif
Robert-Debré : « La souffrance morale de l’enfant malade
UÊFrançoise Galland — cofondatrice et directrice
UÊViviane Romana — assistante du Dr. Tobie Nathan,
des enfants et des adolescents » / 2001
et ses conséquences : tristesse, rejet… » / 2006
de l’association SPARADRAP : « La douleur chez l’enfant :
ethnopsychiatre : « Les liens familiaux au Maghreb
UÊAnnie Maggioli — formatrice :
UÊMarie-Christine Rateau — responsable de la Maison
les actions de l’association SPARADRAP » / 2008
et en Afrique subsaharienne » / 1993
« Relations avec l’équipe soignante » / 2001
de l’Enfant à l’hôpital Robert-Debré : « Les vertus
UÊJoyce Loe-Mie — animatrice des groupes de parole
UÊAnnyvonne Donnelly — psychologue :
UÊCécile Talbotec — assistance du professeur Goulet,
thérapeutiques du jeu chez l’enfant malade » / 2006
à Cayenne / 2007-2008
« Une présence de qualité auprès des enfants » / 1994
chef du service gastro-entérologie à l’hôpital Necker :
UÊHélène Deltombe — psychanalyste :
UÊMurielle Blachere-Battaglia — psychologue
UÊAnnick Ernoult — fondatrice de l’association
« Relations avec l’équipe soignante », 2002
« Rencontre avec l’enfant : évolution psychologique,
psychanalyste : « autour du décès de l'enfant » / 2008
Choisir l’Espoir :
UÊAnnie Maggioli — formatrice :
les étapes décisives de son développement,
« La séparation avec les enfants que l’on parraine » / 1995
« Isolement du parrain et de la marraine » / 2002
l’attachement » / 2007
91
LES
BÉNÉVOLES
DEPUIS
1988
A
U
Abidi Michèle
Adam Jean
Adnin Pascale
Agoune Zélikha
Alliez Fanny
Alluno-Bruscia
Sophie
Alonso Geneviève
André Nicole
Andreu AnneMarguerite
Anglade Ghislaine
Annede Françoise
Arnould Lucette
Arthuis Benoît
Aubonnet Marc
Auclaire Christiane
Aucuit Hélène
B
U
Bachelard Nicole
Baillou Virginie
Barbance Josette
Barberger Maurice
Bargin Françoise
Bartschi Monique
Baudonnière
Catherine
Bauer Jean-Louis
Bauza Jean-Luc
Bavay Laurence
Beaumont Françoise
92
Beaumont Hania
Beaussart
Catherine
Belgrave Mary
Benmohamed Nora
Benouaich Éva
Berdah-Diagne
Maryse
Bernard Laurence
Berrard Claude
Berrard Guilaine
Berson Anne
Bertrand AnneLaurence
Beugnot Christa
Beugnot Gérard
Bezombes Cécile
Bideault Christine
Bigio Marianne
Billaud Laurence
Billet Catherine
Bilquez Gisèle
Bloomfield Wafaa
Bolnet Marie-José
Bonhomme Simone
Bonin Claire-Marine
Bonnet Brigitte
Bonnet Marie-Claire
Bonnet Monique
Bonneton Véronique
Bonnichon
Anne-Marie
BordenaveLabarbère Sophie
Bour Dominique
Bourcier Mireille
Bourdeau Catherine
Bourgeaux Nicole
Bourgin Nathalie
Bousquet Michelle
Bout Violaine
Bouton Jeannie
Bretaudeau
Marianyc
Broust Claudine
Bruas Japick
Buchwald Josette
Bufkens Régine
C
U
Cadot Myriam
Caignon Odile
Cakin Lise-Marie
Cambus Gabrielle
Camps Marie-Hélène
Carel Mariette
Carme Jacqueline
Castege Arlette
Césaire Michèle
Chabasson Guta
Chalier Sophie
Chambard Lucette
Chanal Christiane
Charlopin Thérèse
Chebah Dalila
Cheraillier Florence
Chesneau MarieChristine
Chevant Claude
Chomette Danièle
Cibiel-Lavalle
Françoise
Claverie Annie
Cloiseau Hilde
Colonna Teresa
Commaret Denise
Conérardy Philippe
Corbineau Dominique
Coste Jane
Coudron Nadia
Couettoux Denise
Courtade Angélique
D
U
D’Erm Castel Annick
D’Evry Gilles
D’Hérouville Isabelle
Dahl Laurence
Dahmane Christine
Daunis Danièle
De Beauvais Nadine
De Bernede
Annabelle
De Carville
Florence
De FigueiredoFerraz Lia
De la Debuterie
Michèle
De Léotard Laurent
De Matteis Janine
De Miscault Isabelle
De Necker Anaïs
De Riberolles
Catherine
De Tastes Géraldine
De Villamil Marie
Debard Pierrette
Decaix Monique
Degrenelle Xavier
Delavilatte MariePascale
Delgado Noëlle
Delorme Julie
Delpech Pierre
Desa Marie-José
Desandre Francette
Dessombz MarieSophie
Detournière Nicole
Devos Irène
Dô Éliane
Donatien Lydie
Doncoeur Sophie
Dos Santos Andrée
Drocourt Colette
Duborgel Michèle
Dufaure Danielle
Dumez Jean-Claude
Dupontanice
Françoise
Dupont-Duvialard
Jacqueline
Durand Agnès
Duret Josine
E
U
Emmanuel Chiara
Erramouspe Malika
Esbelin Tatiana
Etchegoyen Anne
Even Janine
F
U
Fabie Marie-Andrée
Fabre Christine
Fais Simona
Falgère Liliane
Fassier-Ramonet
Corinne
Faubert Josiane
Fauvel Caroline
Fayard Colette
Ferrand Annick
Finkelstein Isabelle
Fischer Claire
Fontana Agathe
Foubert Caroline
Fredrick Colette
G
U
Gallesio Karima
Gallier Sylvie
Galliot Christelle
Gambard Chloé
Garrier Françoise
Garzuel Nathalie
Gaston Chantal
Gateiller Jeaninne
Gauthier MarieLouise
Gauthier Martine
Gautier Anne
Gautier Gigi
Geiger Francis
Genestie Irène
Genet Michèle
Georgeron Martine
Georges Dominique
Giraudeau Yveline
Godet Mireille
Gollety Jean-Luc
Gollety Sixtine
Golub Françoise
Gonzalez-Guibert
Charlie
Goussault Perrine
Grandidier Valérie
Gravereaux Florence
Grifaton Thérèse
Grimberg Olivia
Guigues MarieCatherine
Guilhot Brigitte
Guillaume Sylvie
Guillebert Annie
Guillemin Savine
Guyader Alain
H
U
Hanemian Françoise
Hartenstein
Laurence
Hascoët de
Gennaro Danièle
Heller Chantal
Helou Muriel
Hirsch-Marie Lisn
Ho-Can-Sung
Sandra
Hoch Lise
Hogan Marie-Claire
Horth Aveline
Humbert Régine
IIdirUYasmina
Igoulen Claudine
Imbert Emilienne
J
U
Jamain Anne
JanssensWynsberghe Andrea
Jersier Joëlle
Joachimowicz Claire
Jourdain Maryse
K
U
Kaba Naré
Kiener Nathalie
Kovacs Gabrielle
Krys Sophie
L
U
L’Inconnu
M
U
Mabille Monique
P
U
Paindavoine-
S
U
Sallard Danièle
V
U
Vaccari Elisabetta
Rose-Aimée
Lacaille Marie
Lacq Bénédicte
Lacq Geneviève
Lafont Anne-Marie
Lahaye Martine
Lair Claude
Lallemand Claire
Lama Corinne
Lamolinerie
Christine
Lantuas Sandrine
Laristan Thierry
Lasota Lydia
Laurent Catherine
Le Sache Bernadette
Le Saint Nathalie
Le Sausse Florence
Leboeuf Françoise
Legerton AnneMarie
Legoff-Sciacca
Nadine
Legoueix Martine
Legros Christophe
Lemaire Anca
Lemaire Nathalie
Lemesle Jacqueline
Lenaerts-Dequidt
Mieke
Lepoutre Marie
Leroy Gabrielle
Leveille Frédérique
Leveille Sophie
Liber Anaïs
Lilaz-Polletaz
Christiane
Linchet Aline
Lipski Serge
Locquin Elizabeth
Lombard Karen
Lopes Paul
Loriot Rolande
Louvrier-St-Mary
Josette
Maes Corinne
Maggioli Annie
Malonda Annette
Malvoisin MarieThérèse
Mane Marie-Thérèse
Mangou JeanClaude
Manil Christiane
Marchand Annie
Marchetti Patricia
Margules Sylvie
Martin Annie
Martin Sylvie
Martinetti Denyse
Martinez Anik
Masse Évelyne
Massel Alexia
Massel André
Maupetit Monique
Mayer Jessica
Medjoubi-Ter Gilda
Megard Kouki
Mendes Araceli
Meyer Chantal
Mezouar Leïla
Mimouni Claire
Mirabaud Guy
Moine Nicole
Monnier Christiane
Montanana ClaudeLise
Morize Danièle
Mouton Lou
Cassiet Nelly
Pallas Eleni
Panico Jean-Pierre
Parent Catherine
Pascaud-Becane
Geneviève
Pauchard Joëlle
Pehmler Erika
Pelletier Béatrice
Pépin Sylvie
Perquis Jeanne
Perrignon Justine
Peterman Catherine
Peyres Jacqueline
Philibert Pierrette
Pinot Catherine
Pioche Laurence
Piou Christine
Pittau Claudette
Pollin Marianne
Pottier Madeleine
Presson Agnès
Provoost-Riffault
Charlotte
Samama Dominique
Sanson Jocelyne
Santos-Da Silva
Isabel
Savoye Marie-Paule
Savy Gilberte
Schaftlein Sylvie
Scholten Christine
Scotto Francine
Seban Évelyne
Sebbag Patricia
Sebrie Michelle
Seigneur Bernard-Éric
Sénéchal Catherine
Shehata Madiha
Simonnot Marianne
Sinet-Régnault
Brigitte
Sinizergues Marie
Sirot Fabienne
Souhami Angélique
Szirak Nicole
Valencia Luc
Vanrell Françoise
Vaslier Chantal
Vega-Pons Mimi
Velten Annie
Venin-Baron Thierry
Verchere Laure
Vervelle Marie-Josée
Vesanes Petit-Paul
Jeanne
Vigier Christine
Vilatte Anne-Claire
Vincentelli JoséMarc
Von PlatenTillement Claudia
N
U
Naem Jean
Naudin Martine
Ng Kon Tia Viviane
Nsonga Hanako
O
U
Ollivier Christine
R
U
Radenez Françoise
Ramirez Bozica
Rebours Éliane
Reffas Isabelle
Renaudineau Jeanine
Richomme Annick
Riley Susan
Ringelstein Violette
Rivera-Sézille Balbina
Robert Catherine
Robinson Mandine
Rogé Anne
Roger Angéline
Roger Philippe
Romual Danielle
Roulet Karine
Roussel Martine
Rozes Françoise
W
U
Wallich Simone
Wolff-Rinaldi Annie
Y
U
T
Yvansky Anne
U
Tachdjian Simone
Taïbi Nourdine
Tarras Yvonne
Z
U
Tesseraud Édith
Zeggai Fatima
Theveniau Christine
Thierry-Mieg Édith
Tibourtine MarieChristine
Tirard Monique
Tirouche-Meunier
Chantal
Toin Jacqueline
Touchard Nathalie
Tourreau Nicole
Tragin Danièle
Traoré Maïmouna
Travers Monique
Trochesset Luce
Troncy Hélène
Tyan Joseph
Réalisation et
montage du film
« Mission Parrainage,
une mission pas
comme les autres » :
Cyrille Renaux
et Bruno Maruani
Journalistes
Camille Biet
et Dorothée Frénot
93
UÊles bénévoles, les équipes hospitalières et les parents — pour leurs témoignages
UÊtous ceux qui ont contribué à la réalisation de cet ouvrage
UÊStéphanie Rivoal, Cyrille Girard, Sophie Brändström, Pascal Deloche, Marie Bourdeau,
David Delaporte et Jacques Boulay — photographes
UÊMarie-Françoise Colombani — journaliste
Frédérique Chavance et Hélène Valls— pour la relecture
UÊla compagnie Air France — pour son précieux soutien
UÊCatherine Peterman pÊVœ˜Vi«Ìˆœ˜Êj`ˆÌœÀˆ>iÊiÌÊÀj`>V̈œ˜ÊUÊLaure Thonier — design graphique
achevé d'imprimer sur les presses de STIPA
94
—
octobre 2008
95
96

Documents pareils