Du latin « fabula » qui signifie « parole », une fable est un récit

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Du latin « fabula » qui signifie « parole », une fable est un récit
Fiche de lecture
La Fable
1. Définition :
Du latin « fabula » qui signifie « parole », une fable est un récit imaginaire dont le but
est d’illustrer une leçon de morale. C’est un texte bref – écrit en vers ou en prose –
conté de façon narrative et dont les principaux personnages sont le plus souvent des
animaux ou des éléments de la nature auxquels l’être humain s’identifie pour interpréter
la leçon de morale racontée.
2. Genre littéraire :
La fable est une forme d’apologue (récit littéraire à portée moraliste). Souvent associée
à la parabole – qui est présente dans le christianisme notamment – la fable se distingue
de cette dernière en mettant en scène des animaux symboliques ou de simples
éléments naturels et non des êtres humains.
3. Origine et évolution :
Les Grecs attribuent la paternité de la fable à l’écrivain Esope. A l’époque classique de
la Grèce antique,
plusieurs autres fabulistes s’inspirèrent du travail d’Esope, et
plusieurs d’entre eux consacrèrent le reste de leur vie à mettre en vers ses écrits.
Au IVème siècle av. J.C (avant Jésus Christ), un écrivain grec du nom de Démétrios de
Phalère publia le tout premier recueil de fables qui était totalement inspiré des fables
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primitives d’Esope. Néanmoins, la malheureuse perte de ce livret donna lieu à la
création d’innombrables autres versions et duplicatas, parmi lesquels Augustana, qui
est la version à laquelle l’on fait désormais référence lorsqu’on parle des fables
d’Esope. Augustana contient plus de 500 fables, parmi lesquelles les plus populaires :
Le Corbeau et le Renard, Le Lièvre et la Tortue, Le Vent et le Soleil, etc.
De la Grèce, la fable progressa vers Rome, ou plusieurs auteurs (tels que Horace) firent
une adaptation personnalisée des écrits d’Esope. Après Horace vint Phèdre qui, non
seulement reprit et traduit le travail d’Esope en latin, mais écrivit également ses propres
fables et, de ce fait, créa un répertoire personnel moins similaire à celui d’Esope, c’està-dire avec une valeur ajoutée plus importante.
La fable continua à évoluer tout au long du Moyen-Age, mais dès lors tout recueil de
fable est publié sous forme de « Ysopets » ou déformations d’Esope. En effet, bien que
plusieurs fabulistes tels que Marie de France (1154-1189) développèrent leur propre
style de fables, celles-ci demeurent toujours inspirées d’Esope.
Inspiré des fabulistes qui le précédèrent et de l’évolution de ce genre, Jean de la
Fontaine (1621-1695) est celui qui au XVIIème siècle, donnera à la fable ses lettres de
noblesse, élevant ce genre littéraire au niveau de la poésie française.
4. Caractéristiques de la fable :
 Le récit est court, bref, en vers ou en prose ;
 Les personnages sont le plus souvent des animaux à valeur symbolique dont le
comportement (ou le rôle dans l’histoire racontée) évoque celui des humains en
un certain sens ;
 Le but de l’histoire est de donner une leçon de morale.
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5. Le but de la fable :
« Le mérite de la fable est double: elle suscite le rire et donne une leçon de prudence »,
nous dit Phèdre, fabuliste latin. Les thèmes abordés par les fables sont très divers. Ils
visent à décrire certains aspects de la vie sociale, politique ou familiale ; mais mettent
également en exergue les traits de caractères des êtres humains.
La fable a donc une visée didactique, et bien que très souvent contée de manière
amusante ou apparemment ridicule, le lecteur finit toujours par en tirer une leçon de
sagesse.
6. Quelques exemples de fables :
a. Le Roseau et l’Olivier, Esope
Le roseau et l’olivier disputaient de leur endurance, de leur force, de leur fermeté.
L’olivier reprochait au roseau son impuissance et sa facilité à céder à tous les vents. Le
roseau garda le silence et ne répondit mot. Or le vent ne tarda pas à souffler avec
violence. Le roseau, secoué et courbé par les vents, s’en tira facilement ; mais l’olivier,
résistant aux vents, fut cassé par leur violence.
Cette fable montre que ceux qui cèdent aux circonstances et à la force ont l’avantage
sur ceux qui rivalisent avec de plus puissants.
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b. Fable, Jean de La Fontaine, Le Chêne et le Roseau, Livre II
Le Chêne un jour dit au Roseau :
« Vous avez bien sujet d'accuser la Nature ;
Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
Le moindre vent qui d'aventure
Fait rider la face de l'eau,
Vous oblige à baisser la tête :
Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d'arrêter les rayons du Soleil,
Brave l'effort de la tempête.
Tout vous est Aquilon, tout me semble Zéphir.
Encor si vous naissiez à l'abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage,
Vous n'auriez pas tant à souffrir :
Je vous défendrais de l'orage ;
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Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La Nature envers vous me semble bien injuste.
- Votre compassion, lui répondit l'Arbuste,
Part d'un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu'à vous redoutables.
Je plie et ne romps pas. Vous avez jusqu'ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos ;
Mais attendons la fin. Comme il disait ces mots
Du bout de l'horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs.
L'Arbre tient bon ; le Roseau plie.
Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu'il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine,
Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts
c. « Le chêne et le roseau », Fables, (1962), Jean Anouilh
Le chêne un jour dit au roseau :
« N'êtes-vous pas lassé d'écouter cette fable ?
La morale en est détestable ;
Les hommes bien légers de l'apprendre aux marmots.
Plier, plier toujours, n'est-ce pas déjà trop,
Le pli de l'humaine nature ? »
« Voire, dit le roseau, il ne fait pas trop beau ;
Le vent qui secoue vos ramures
(Si je puis en juger à niveau de roseau)
Pourrait vous prouver, d'aventure,
Que nous autres, petites gens,
Si faibles, si chétifs, si humbles, si prudents,
Dont la petite vie est le souci constant,
Résistons pourtant mieux aux tempêtes du monde
Que certains orgueilleux qui s'imaginent grands. »
Le vent se lève sur ses mots, l'orage gronde.
Et le souffle profond qui dévaste les bois,
Tout comme la première fois,
Jette le chêne fier qui le narguait par terre.
« Hé bien, dit le roseau, le cyclone passé 4
Il se tenait courbé par un reste de vent Qu'en dites-vous donc mon compère ?
(Il ne se fût jamais permis ce mot avant)
Ce que j'avais prédit n'est-il pas arrivé ? »
On sentait dans sa voix sa haine
Satisfaite. Son morne regard allumé.
Le géant, qui souffrait, blessé,
De mille morts, de mille peines,
Eut un sourire triste et beau ;
Et, avant de mourir, regardant le roseau,
Lui dit : « Je suis encore un chêne. ».
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