L`épreuve de grammaire et de stylistique - Extrait
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L`épreuve de grammaire et de stylistique - Extrait
Présentation de l'épreuve Questions L'épreuve « de grammaire et de style » se présente sous la forme de trois ou quatre questions portant sur un texte postérieur à 1500. Intitulées respectivement « vocabulaire » (ou « lexique »), « grammaire » (ou « syntaxe ») et « commentaire stylistique » (ou « étude de style »), ces questions relèvent de la lexicologie, de la morpho-syntaxe et de la stylistique, ces trois disciplines formant l'essentiel du domaine de la linguistique française. À ces questions est ajoutée parfois une question qui porte sur la versification ou la « métrique » et qui peut être formulée ainsi : « étudiez le compte des syllabes du vers x ». Ou bien, c'est une question, un peu sibylline, qui est formulée ainsi : « faites les remarques que vous jugez pertinentes (ou qui vous paraissent nécessaires) sur la phrase de la ligne x (suit la phrase citée) ou sur le vers x (suit le vers cité) ». À chaque question, est attribué un nombre donné de points : de 2 à 4 (étude du lexique) ; de 6 à 8 (étude morpho-syntaxique) ; de 8 à 12 (étude de style). Programme Il n'y a pas de programme précis. Les questions portent sur tout ce qui, dans la langue française, fait l'objet d'un enseignement au collège et au lycée, de la 6e à la terminale, par exemple : la formation des adverbes, les mots composés, la dérivation nominale, la fonction sujet, la syntaxe des clitiques, « il » impersonnel, « on », le temps, le mode ou l'aspect des verbes, l'ironie, l'énonciation, le discours, la narration, les figures et les tropes, etc. Cela implique que vous connaissiez assez précisément les questions de vocabulaire, de grammaire ou de style qui ont été traitées dans l'enseignement secondaire. Si vous n'en avez aucun souvenir, il convient que vous relisiez d'urgence un manuel de grammaire française ou de langue française en usage dans les classes de collège et de lycée. 5 L'épreuve de grammaire et de stylistique Texte Le texte est de longueur variable – en moyenne de 15 à 20 lignes ou vers –, « littéraire » (d'un écrivain dont l'œuvre figure au programme des classes de collège et de lycée) et qui, obligatoirement, est postérieur à 1500. Il peut être en prose ou en vers ; il peut être extrait d'un roman, d'un récit, d'un recueil poétique, d'une correspondance, d'une pièce de théâtre, et relever donc de tout genre. De ce point de vue, les règles qui régissent le CAPES et celles de l'agrégation sont différentes. Au CAPES, le texte est extrait d'un auteur dont l'œuvre figure au programme des classes du collège au lycée. À l'agrégation, il existe un programme spécifique, publié chaque année au Bulletin Officiel de l'Éducation Nationale, à la fin du mois de mai ou au début du mois de juin, et composé de cinq œuvres : une par siècle, du XVIe au XXe siècle (inclus), lesquelles constituent une partie (à peu près, la moitié en nombre de pages ou de vers) du programme de littérature française. En 1997, les candidats au CAPES, ont eu à composer à partir de A***, un poème de René Char (25 vers), extrait de Recherche de la base et du sommet, 1948-1950, IV, « à une sérénité crispée » ; les agrégatifs, à partir d'un poème d'Apollinaire, extrait d'Alcools, de 17 vers. Les questions suivantes ont été posées. – Au CAPES : « étudiez « froidir » et « martelée » ; les déterminants du vers 8 au vers 21 et trois adjectifs : étranger (v. 6) ; comprimante (v. 11) ; solaire (v. 19) ; le style du texte. » – À l'agrégation : « étudiez les mots soulignés : « adorable », « innombrablement », « forlignent », « ardentes » ; l'adjectif qualificatif dans le texte et faites les remarques qui vous paraissent nécessaires sur « Et les serpents ne sont-ils que les cous des cygnes » ; étude stylistique du poème. » Coefficients Au CAPES de lettres modernes, la note de l'épreuve a un coefficient de 2. L'épreuve est notée sur 40. 2 sur 12 (total des coefficients de l'écrit), cela représente un sixième de la note globale. À l'agrégation de lettres modernes, le coefficient est 4, soit un dixième de la note globale de l'écrit. L'épreuve est notée sur 80. À l'oral, l'explication de texte portant sur un extrait d'une des œuvres au programme est suivie de l'ex6 L'épreuve de grammaire et de stylistique posé d'un point de grammaire : le coefficient est 12 (le total des coefficients de l'oral étant de 40). À l'agrégation interne de lettres modernes, il y aussi à l'oral un exposé de grammaire, consécutif à l'explication de texte : coefficient 8 (total des coefficients : 20). La note moyenne de l'épreuve, que ce soit au CAPES ou à l'agrégation, peut être jugée comme « basse » ou « faible », car elle oscille entre 5 et 7, autour de 6 sur 20. Au CAPES, l'admissibilité est proclamée en général à une moyenne de 7 sur 20. D'une année sur l'autre, la barre de l'admissibilité est placée ou plus bas ou plus haut. Obtenir à l'épreuve de grammaire et de stylistique une note de 10 sur 20 (ce qui est à la portée de tout candidat sérieux) assure une avance de 6 points. Durée de l'épreuve À l'écrit du CAPES et de l'agrégation, l'épreuve dure deux heures et demie. C'est relativement court dans la mesure où, aux questions de lexicologie et de grammaire dont il faut rédiger les réponses, s'ajoute l'étude de style, qui doit être organisée, précise et pertinente et, de préférence, rédigée. L'épreuve comportant plusieurs questions (dont certaines sont longues et complexes) à traiter dans une durée limitée (2h30, c'est très bref), il est nécessaire de s'y préparer. Bien que l'épreuve soit réputée difficile, il est aisé même à un candidat qui ne ressent aucune inclination pour la linguistique, mais bien préparé et qui s'y est entraîné pendant plusieurs mois, d'obtenir 10 sur 20. De plus, il faut bien gérer son temps. Si vous consacrez une heure et demie à l'étude de vocabulaire à laquelle sont attribués de 2 à 4 points sur 20, vous êtes certains de ne pas obtenir plus de 5 ou 6 à l'épreuve. Consacrez 10 minutes à lire attentivement le texte et 10 minutes à relire votre copie. Il vous reste donc 2 heures et 10 minutes pour rédiger vos réponses. Surtout, ne les rédigez pas au brouillon d'abord : vous n'auriez pas le temps de les recopier. Comme de 8 à 12 points sont attribués à l'étude de style, consacrez-y au moins une heure et jusqu'à une heure et 10 minutes. L'heure restante doit être répartie entre le lexique et la morpho-syntaxe dans une proportion 1/4-3/4 : 10 à 15 minutes consacrées au lexique ; de 40 à 50 minutes à la morphosyntaxe. 7 L'épreuve de grammaire et de stylistique Conseils Se présenter à l'épreuve sans l'avoir préparée méthodiquement, c'est s'exposer à de graves désillusions. Beaucoup de notes sont inférieures à 2. La date des épreuves écrites du CAPES est fixée en général dans le courant du premier trimestre de l'année civile, à la fin du mois de mars. Celles de l'agrégation sont plus tardives : en avril. Or, dix à douze mois de préparation intensive sont nécessaires pour réussir honorablement les épreuves écrites. Il faut donc préparer l'écrit tôt dans l'année, dès que possible, et surtout ne pas attendre la rentrée universitaire. Si vous êtes étudiant et non salarié, commencez à préparer cette épreuve dès la fin du mois de mai. Si vous vous présentez à l'agrégation, commencez à la préparer, dès que le programme est connu, à la fin du mois de mai. Lisez les textes, jusqu'à ce que vous en soyez imprégnés, une fois, deux fois, trois fois, une plume à la main. L'épreuve de grammaire et de stylistique n'est pas seulement une épreuve technique, c'est aussi une épreuve de culture générale. Portant sur un texte postérieur à 1500, cela suppose non seulement que vous connaissiez les principaux faits de langue du XVIe siècle à nos jours (par exemple, l'évolution du système des démonstratifs), et même les divers états de la langue française, telle qu'elle se manifeste dans les textes littéraires, mais encore que vous connaissiez les liens étroits qui existent entre la langue et la création littéraire. Par exemple, pour mener à bien l'étude du vocabulaire et du style d'un poème du XVIe siècle ou d'un extrait d'une œuvre classique, il convient que vous ayez une idée assez précise de la conception que se faisaient les poètes de la Pléiade de l'enrichissement de la langue ou les auteurs du XVIIe siècle de la théorie des trois styles et de la langue noble. Le CAPES et l'agrégation sont des concours dont l'objet est de recruter des professeurs qui enseigneront la langue française dans les collèges et les lycées. Il est attendu des professeurs de mathématiques qu'ils sachent les mathématiques. De même, il est attendu des candidats au CAPES et à l'agrégation de lettres modernes non seulement qu'ils maîtrisent des savoirs et une méthode et qu'ils soient capables de comprendre une question, de l'exposer, de la « résoudre », mais aussi (ce que beaucoup oublient ou ignorent) qu'ils respectent les normes qui régissent le français écrit « standard », que ces normes relèvent de l'orthographe, de la syntaxe ou de l'emploi des mots, et qu'ils rédigent avec des « bonheurs » d'écriture (fermeté, précision, justesse, aisance). Les réponses relèvent aussi du discours didactique. Comme dans tout 8 L'épreuve de grammaire et de stylistique discours didactique, toutes les analyses doivent être explicites. Efforcez-vous de rendre claires et compréhensibles par autrui vos intuitions ; ne restez jamais dans le vague ; évitez l'implicite, le nondit, l'approximatif. Bien que le terme « linguistique » n'apparaisse pas dans l'intitulé officiel de l'épreuve, il s'agit bien d'une épreuve de linguistique française. Précisons : de linguistique française, non de linguistique générale, ni exactement une épreuve de linguistique appliquée au français. La linguistique française a un objet particulier (la langue, telle qu'elle se réalise dans des textes littéraires) et des méthodes propres. Une bonne culture générale en matière de « linguistique française » et une vraie maîtrise des méthodes qui sont les siennes sont nécessaires. Par exemple, savoir identifier les formes à étudier ; en relever toutes les occurrences, sans en oublier aucune (ce serait considéré comme une piètre ruse pour éluder une difficulté) ; les rapporter à une classe morpho-syntaxique (reconnaître un pronom, le distinguer d'un adjectif) ; avoir assimilé les savoirs enseignés dans les classes primaires, celles du collège et du lycée, et à l'Université ; maîtriser le métalangage de « base » : énonciation, mode, modalité, aspect, clitique, déterminant, nominal, représentant, trope, embrayeur, etc. Ce que certains linguistes ou grammairiens nomment « intuition linguistique », dite aussi intuition de la langue ou sens de la langue, et qui permet à un candidat de construire une vraie analyse linguistique, n'est pas une qualité « naturelle », innée ou donnée, en dépit du nom « intuition » qui la désigne (fort mal, à mon sens) : elle s'acquiert, se perfectionne et se travaille. Des exercices permettent de l'acquérir : par exemple, consultez sans cesse un dictionnaire et votre manuel de grammaire dès que vous vous posez un problème de langue ou que vous vous heurtez à une difficulté. Pourquoi « quelque » dans « à quelque trois cents mètres » ne porte-t-il pas la marque « s » de pluriel, alors que « cents » en porte une ? Efforcez-vous de comprendre les raisons d'être des prescriptions normatives, qui ne sont pas aussi stupides, ni arbitraires qu'on le laisse accroire. Le néologisme sémantique « réaliser que », ou la construction « de par le monde », la locution adverbiale « par contre », la confusion entre les paronymes « continuité et continuation » sont condamnés. Pourquoi ? Interrogez-vous sans cesse sur les raisons qui justifient les normes. Demandez-vous aussi pourquoi, dans Madame Bovary, le discours prononcé par le sous-préfet lors des comices agricoles est ridicule. Dites-vous aussi que si vous n'aimez pas la langue que vous parlez, écrivez et étudiez, il est vain de vous 9 L'épreuve de grammaire et de stylistique présenter à cette épreuve. Sans cet « amour de la langue », vous ne réussirez pas. Surtout ne faites jamais preuve d'arrogance, ni de dogmatisme. Il faut être humble face à la langue. La langue française est étrange (à certains de nous, elle peut même sembler étrangère), surtout celle des textes littéraires. Des faits expliquent cela : l'ancienneté de la langue, sa longue (et parfois tumultueuse) histoire, la littérature très riche, la fécondité des discours littéraires aux significations multiples, la pluralité des usages et des normes, le fait que, dans les textes littéraires, une grande latitude est laissée à la création verbale. La langue de ces textes ne correspond pas toujours à l'idée que l'on s'en fait à travers l'enseignement de la grammaire ou les modèles de phrase recueillis dans les grammaires. Observez les emplois et les constructions : il est attendu de vous que vous construisiez un raisonnement. N'assénez jamais des vérités que vous n'auriez pas démontrées. Les arguments d'autorité n'ont aucune validité, d'autant plus que les examinateurs sont souvent très astucieux et difficiles à impressionner : observez, réfléchissez, raisonnez, démontrez, rédigez avec soin et précision... Bibliographie (succincte) Chaque année, à l'automne, la revue L'Information grammaticale publie une bibliographie portant sur les auteurs au programme d'agrégation pour ce qui est des questions de langue et de style. Les rapports de jury Consultez les rapports de jury du CAPES et de l'agrégation qui sont publiés chaque année. Lisez-les attentivement. Vous y trouverez reproduits tous les sujets et vous y lirez des conseils et les corrigés. Ces corrigés sont parfaits et admirables par la rigueur de la méthode qui est mise en œuvre, par la culture générale du correcteur et par la qualité de l'expression. Ne soyez pas impressionnés par ces corrigés, longs, précis, exhaustifs, au point de vous dire « jamais je n'arriverai à faire aussi bien ». Le corrigé est un modèle, presque « idéal », qui est proposé à la fois aux candidats, afin qu'ils prennent conscience de ce que les examinateurs attendent d'eux, et aux professeurs qui, dans les universités, préparent les étudiants à cette épreuve, afin qu'ils sachent 10 L'épreuve de grammaire et de stylistique ce que, en théorie, on est en droit d'exiger des candidats. Personne (sauf peut-être le membre du jury qui a proposé le sujet) n'est capable, en deux heures et demie et sans documentation, de rédiger des réponses aussi longues, aussi précises, aussi complètes, et sur des questions aussi variées. Notez les conseils qui vous sont donnés. Ces rapports de jury sont disponibles dans toutes les bibliothèques universitaires et dans les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres et autres Centres Régionaux de Documentation Pédagogique. Lexicologie Les instruments de travail sont les dictionnaires. Pour étudier la langue française du XVIe siècle : • HUGUET, Dictionnaire de la langue française du XVIe siècle. Pour étudier la langue du XVIIe et XVIIIe siècle : • LITTRÉ Émile, Dictionnaire de la Langue Française, Gallimard, 1956-58. • Gaston CAYROU, Le Français classique, Didier, 1948. Pour étudier la langue des XIXe et XXe siècles : • le Trésor de la Langue française, CNRS et Gallimard, 1971-1994. • Le Grand Larousse de la Langue française, 1971-1978. Si vous avez à étudier un problème relatif à l'histoire de la langue, consultez : • REY Alain (éd.), Dictionnaire historique de la Langue française, Le Robert, 1992. Pour ce qui est de l'épreuve elle-même, lisez : • LEDUC J.-P., « la question de vocabulaire aux concours », L'Information grammaticale, 1993, n° 57. Grammaire et morpho-syntaxe • ARRIVÉ et alii, La Grammaire d'aujourd'hui, Flammarion, 1986. • RIEGEL M. et alii, Grammaire méthodique de la Langue Française, PUF, 1994. • MAINGUENEAU D., Précis de grammaire pour les concours, Dunod, 1991. 11 L'épreuve de grammaire et de stylistique Versification • MAZALEYRAT, Éléments de métrique française, A. Colin, 1974. Stylistique et poétique • HERSCHBERG A., Stylistique de la Prose, Belin, 1993. • MAINGUENEAU D., Éléments de linguistique pour le texte littéraire, Dunod, 1993. • SANCIER A. et FROMILHAGUE, Introduction à l'analyse stylistique, Dunod, 1991. • MAZALEYRAT et MOLINIÉ, Vocabulaire de la stylistique, PUF, 1989. • MORIER H., Dictionnaire de poétique et de rhétorique, PUF, 1961. 12