LA NEVRALGIE D`ARNOLD OU NEVRALGIE

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LA NEVRALGIE D`ARNOLD OU NEVRALGIE
LA NEVRALGIE D’ARNOLD
OU
NEVRALGIE OCCIPITALE :
Diagnostic positif, étiologique et différentiel
OCCIPITAL NEURALGIA : DIAGNOSIS
F. Lisovoski
Centre du Rachis, Centre Médico-chirurgical Ambroise Paré, 92200 Neuilly sur Seine.
La palpation du nerf occipital s’avère sensible.
ifficile est la tâche que de tenter d’extraire un
consensus d’une symptomatologie aussi hétérogène que la névralgie d’Arnold.
D’existence parfois même controversée, semble-t-il
plus fréquente chez lz femme, une définition de la
névralgie occipitale d’Arnold a cependant été formulée par l’International Headache Society et correspond
à une douleur à caractère fulgurant dont la distribution
intéresse le grand ou le petit territoire du nerf occipital, accompagnée d’une hypoesthésie ou de dysesthésies dans le territoire sensitif correspondant. Une sensibilité à la pression du nerf sur son trajet s’associe fréquemment à la symptomatologie. Sinon pour la
connaître vraiment, plusieurs critères diagnostiques
ont été toutefois retenus pour reconnaître la névralgie
occipitale :
●
Une douleur perçue dans le territoire d’innervation
du grand ou du petit nerf occipital.
Trois types de situations douloureuses intéressant l’extrémité céphalique et la région cervicale peuvent schématiquement être classées en tant que névralgie occipitale.
La première est la plus commune. Il s’agit initialement
d’une céphalée tensive en rapport avec une contractu-
D
Un bloc anesthésique amène une amélioration transitoire de la symptomatologie.
●
Si l’on se conforme strictement à cette définition, plusieurs types de douleurs composant les éléments du
diagnostic différentiel doivent être distinguées.
Toutefois, cette distinction peut largement s’avérer
remise en question dans bon nombre de situations cliniques compte tenu de son cadre certainement trop
restrictif et, dans certains cas, de l’intervention simultanée de plusieurs systèmes.
Les douleurs suggérant une névralgie du petit territoire du nerf occipital :
●
Une douleur lancinante survenant par paroxysmes
bien qu’un fond douloureux puisse persister entre les
accès douloureux :
●
RACHIS - Vol. 15, n°2, Juin 2003.
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DOSSIER
Article original
F. Lisovoski
re de la musculature cervicale postérieure caractérisée
par une douleur continue, d’intensité modérée, de
topographie cervicale postérieure irradiant vers la
région occipitale. Cette douleur est a une répartition
souvent bilatérale mais peut se révéler unilatérale.
névralgie occipitale requière fréquemment le recours à
des investigations radiologiques incluant des clichés
en position neutre, dynamiques, bouche ouverte afin
de visualiser au mieux l’ondotoïde, voire une tomodensitométrie de la charnière cervico-occipitale.
Cette douleur peut s’associer à une raideur cervicale, à
une sensibilité à la pression des zones d’insertion des
muscles cervicaux, voire à une tendance à l’inclinaison de la tête. La peau et même la pression des tissus
sous-cutanés peut se révéler sensible. La douleur peut
être exacerbée par les mouvements de la tête et la
manipulation cervicale, elle peut diffuser vers la
région antérieure voire en situation rétro-oculaire.
Selon Dungan et al (1962), les sujets se présentant
avec ce type de douleurs sont fréquemment gauchers,
ont parfois une asymétrie somatique, un déséquilibre
musculaire, ou encore une histoire neurologique
ancienne datant de l’enfance. Sur ce terrain, un traumatisme cervical ou cranio-cervical mineur peut créer
le lit du développement de cette symptomatologie pour
plusieurs années.
Le second cas de figure comporte des relents de symptomatologie migraineuse. La douleur comprend alors
des accès algiques intenses d’une duré de 2 à 36 heures entrecoupés d’intervalles complètement libres.
Les douleurs oculaires de la névrite occipitale (la
névralgie du grand territoire du nerf occipital).
Cette entité clinique a été suggérée par plusieurs
auteurs dés 1954. Les patients concernés se plaignent
d’une douleur oculaire dont le point de départ initial
était localisé à la région occipitale, atteignant la région
oculaire après avoir diffusé vers le scalp. Certains
patients peuvent décrire une douleur de la région oculaire provoquée par la pression de la tubérosité occipitale. Le mécanisme présumé de cette douleur serait
une inflammation localisée du nerf dans sa portion traversant l’insertion tendineuse du splénius à la base du
crâne. Cette inflammation focalisée serait due à une
contraction chronique du muscle entraînant une ischémie partielle du tronc du nerf. Dans ce cas, le nerf peut
également être soumis à une contrainte mécanique liée
aux mouvements de rotation cervicale. S’ajoutant aux
effets de la contraction du splénius, le sterno-cléidomastoïdien et le trapèze peuvent intervenir dans la
genèse des symptômes entraînant la céphalée postérieure voire la douleur envahissant la région oculaire
par le biais d’un phénomène de douleurs projetées. La
douleur oculaire observée dans ce syndrome relèverait
alors de l’intervention du nerf occipital et du nerf trijumeau. Une controverse a vu le jour concernant l’origine véritablement organique de ce syndrome. Elle
pose en fait l’éternelle question de la part de l’intervention psychologique dans la pérennité de la symptomatologie au cours d’une douleur chronique. Dans son
expérience de 164 patients diagnostiqués, Lieppman
(1980) a vu survenir une très forte proportion d’amélioration après infiltration locale de lidocaïne. Ce
résultat a été contrebalancé par un autre concernant
50% de patients améliorés par une infiltration locale
Habituellement unilatérale, elle peut diffuser vers le
côté opposé. Cette douleur aux caractéristiques parfois
pulsatiles, est exacerbée par le clinostatisme mais persiste rarement au-delà de quelques jours. Des signes
d’accompagnement peuvent faire errer le diagnostic et
faire confondre ce type de céphalées avec une authentique migraine : anorexie, nausées, vomissements, parfois des paresthésies des extrémités. Cette symptomatologie s’avère sensible au tartrate d’ergotamine IV
administré peu après le début des symptômes. La
durée des intervalles libres et l’intensité des accès douloureux dépendent d’une adaptation de l’hygiène de
vie et d’une réduction des facteurs de stress. Ce type
de névralgie occipitale est le résultat d’une vasodilatation artérielle occipitale voire auriculaire postérieure,
éventuellement des artères durales. Compte tenu de
ses caractéristiques et de sa réponse aux vasoconstricteurs, cette symptomatologie peut bien évidemment
être rapprochée des céphalées vasculaires avec lesquelles elle est le plus souvent confondue.
Une troisième situation est représentée par la pathologie de la charnière cranio-cervicale. Ce cadre nosologique inclut les céphalées occipitales ou sous-occipitales, des douleurs du scalp, des paresthésies ou dysesthésies intéressant le second dermatome cervical, et
peut s’accompagner d’une perte de la lordose cervicale physiologique. Des douleurs systématisées à la
seconde racine cervicale accompagnent parfois le
tableau clinique. Le diagnostic positif de ce type de
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La névralgie d’Arnold ou névralgie occipitale : diagnostic positif, étiologique et différentiel
de sérum physiologique. Le grand nerf occipital est en
fait un prolongement du rameau dorsal de la racine C2
et parvient sur le scalp au-dessus d’un entrelacement
musculaire créé par le sterno-cléido-mastoidien et le
trapèze. Le nerf n’est pas soumis à un phénomène
compressif lié à une contraction du muscle trapèze
mais il existe néanmoins une zone de contrainte lorsqu’il pénètre dans le muscle semi-spinal. La douleur
peut-elle être expliquée par une contrainte mécanique
d’un rameau sensitif dans la mesure où nombre de
résultats expérimentaux ont montré qu’une compression entraînait typiquement une paresthésie ou une
dysesthésie ? Dans ce contexte, il paraît difficile de se
forger une idée précise du mécanisme physiopathologique de ce syndrome douloureux qui fait très vraisemblablement intervenir plusieurs paramètres d’origines différentes.
Causes générales :
Diabète.
● Goutte.
● Vascularites.
●
Causes d’algies pouvant simuler une névralgie
d’Arnold :
Céphalées tensives.
● Migraine.
● Algie vasculaire de la face.
● Syndrome articulaire postérieur cervical haut.
● Lésion osseuse tumorale primitive ou secondaire
sans envahissement tronculaire.
● Lésion infectieuse cervicale postérieure.
●
Les critères trop restrictifs de l’IHS ne peuvent permettre d’appréhender une pathologie aux contours
aussi peu précis. Si à partir d’une situation clinique
caractéristique, le diagnostic positif s’avère relativement simple, les tableaux cliniques associés sont susceptibles d’égarer le diagnostic et de méconnaître une
lésion évolutive locale. Inversement, le diagnostic
positif posé ne doit pas faire surseoir aux explorations
radiologiques minimales permettant le diagnostic
■
d’une cause locale et son traitement.
Causes de la névralgie occipitale :
Elles peuvent être distinguées en causes locales (les
plus fréquentes) et causes générales :
Causes locales :
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Traumatiques : impact direct ou indirect (whiplash)
●
Compression tronculaire :
- Lésion osseuse tumorale de la base du crâne.
- Granulome inflammatoire de la région occipitale.
- Lésion infectieuse locale (abcès..).
- Contracture de la musculature cervicale
postérieure.
- Dystonie cervicale.
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Références
J. Hildebrant, J. Jansen. Cephalagia 1984 ; 4 :
163.
Compression radiculaire :
- Cervicarthrose évoluée.
- Polyarthrite rhumatoïde.
- Spondylathrite ankylosante.
- Tumeur vertébrale (primaire ou secondaire) de C1
ou C2 (De Praeter et al, 1999).
- Dislocation de la jonction cranio-cervicale.
- Fracture de C2 (Clavel et Clavel, 1996).
- Compression de C2 ou C3 d’origine vasculaire
(Hildebrant et Jansen, 1984 ; Sharma et al, 1993).
RACHIS - Vol. 15, n°2, Juin 2003.
R.R Sharma et al. J Neurosurg 1993 ; 78 : 669672.
M.P. De Praeter et al. Spine 1999 ; 24 : 912-914.
M. Clavel, P. Clavel. J Neurosurg 1996 ; 85 : 11701171.
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