Item 93 Infections urinaires

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Item 93 Infections urinaires
Item 93 : LES INFECTIONS URINAIRES CHEZ L’ENFANT
(et l’adulte*). LEUCOCYTURIE°
Objectifs pédagogiques
-
:
diagnostiquer une infection urinaire chez le nourrisson, l’enfant et l’adulte*
Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
Auteur : Karine Brochard
Référent : Dr F. Bouissou ([email protected])
Version 2008
* Ce chapitre ne traite que ce qui concerne l’enfant
PLAN :
1 INTRODUCTION
2 DEFINITION
2-1 Pyélonéphrite aiguë
2-2 Cystite
3 GERMES RESPONSABLES
4 OUTILS DIAGNOSTICS
4-1 ECBU
4-1-1 Prélèvement d’urines
4-1-2 Examen direct
4-1-3 Interprétation de la culture de l’ECBU
4-2 Bandelettes réactives de dépistage
4-3 Biologie sanguine
5 TRAITEMENTS CURATIFS
5-1 Cystites
5-2 PNA
5-3 Cas particulier des PNA chez les enfants de moins de 3 mois
6 BILAN ETIOLOGIQUE AU DECOURS D’UNE PNA
7 ANTIBIOPROPHYLAXIE DANS LES IU RECIDIVANTES
8 POUR EN SAVOIR PLUS
1 INTRODUCTION
L’infection urinaire (IU) est une des infections bactériennes les plus fréquentes en pédiatrie.
La place des pyélonéphrites aiguës (PNA) parmi les causes de fièvre est importante : 10% des
nouveau-nés et des enfants de moins d’un an ayant une fièvre≥39°C ont une PNA. Elle est
associée dans 1/3 des cas à une anomalie des voies urinaires dont la plus fréquente est le
reflux vésico-urétéral (RVU).
2 DEFINITIONS
2-1 Cystite
La cystite ou IU basse est une infection localisée à la vessie, le plus souvent d’origine
bactérienne, bénigne, d’origine ascendante.
Les signes comportent : dysurie, pollakiurie, envies impérieuses, douleurs hypogastriques,
fuites urinaires, hématurie macroscopique. La fièvre est absente, il n’y a ni douleur lombaire
ni syndrome inflammatoire biologique.
2-2 Pyélonéphrite aiguë
La PNA ou IU haute est une infection urinaire bactérienne avec atteinte du parenchyme rénal;
il s’agit d’une néphrite interstitielle microbienne, potentiellement grave, atteignant le
parenchyme par voie ascendante, à partir de la vessie puis l’uretère, puis le bassinet.
Elle s’accompagne le plus souvent chez le grand enfant de signes urinaires d’une cystite,
d’une fièvre élevée (› 39°C), de douleurs lombaires et/ou abdominales. Chez le jeune enfant et
le nourrisson, les signes urinaires et les douleurs sont le plus souvent absents, il s’agit le plus
souvent d’une fièvre inexpliquée, voire de symptômes plus trompeurs tels que des troubles
digestifs ou une altération de l’état général.
Les marqueurs sanguins de l’inflammation (leucocytose, CRP, procalcitonine) ont une bonne
sensibilité et VPN pour exclure des lésions parenchymateuses en cas de valeur inférieure au
seuil (97.5% de VPN pour la PCT au seuil de 1ng/ml et 95% pour la CRP au seuil de 20mg/l),
mais ils ne sont pas suffisamment spécifiques du diagnostic de PNA.
Fièvre
> 38°5
Douleurs
lombaires
Signes
vésicaux
Syndrome
Inflammatoire
biologique
PNA
+
+
+/-
+
CYSTITE
0
0
+
0
3 GERMES RESPONSABLES
L’E.Coli est responsable de près de 70% des IU chez l’enfant. Enterococcus sp est en cause
dans 10% des cas, Proteus mirabilis, et Klebsiella pneumoniae dans 7-8% des cas. Les
infections à Pseudomonas aeruginosa et Staphylococcus aureus surviennent dans des
contextes particuliers, uropathie sous-jacente ou antibiothérapie préalable. Les infections à
Staphylocoque coagulase négative correspondent en règle à des cystites chez l’adolescente.
4 OUTILS DIAGNOSTICS
4-1 Scintigraphie rénale au DMSA
La scintigraphie rénale au DMSA (acide dimercaptosuccinique marqué au 99mtechnétium)
précoce est une méthode fiable pour la détection d’atteintes parenchymateuses au décours
d’une IU. Du fait de son coût et des difficultés pratiques, elle n’est pas utilisée en routine
exceptée en cas de doute diagnostic. C’est un examen qui permet de mesurer la fonction
rénale séparée et d’étudier le type et le nombre de cicatrices rénales à distance de l’épisode
infectieux. Elle est alors préférentiellement demandée en cas d’uropathies malformatives
sévères et/ou PNA à répétition.
4-2 Examen cytobactériologique urinaire
4-1-1 Prélèvement d’urines
Le recueil, quelque soit les techniques de recueil utilisées, doit être précédé d’une désinfection
soigneuse de la région périnéale au savon et avec un antiseptique (Dakin dilué, chlorexidine)
suivie d’un rinçage à l’eau. Un fois les urines recueillies dans un récipient stérile, il est
impératif de le faire parvenir le plus rapidement possible au laboratoire, au mieux en moins
d’une heure.
- La ponction sus-pubienne est la technique la plus fiable mais il est invasif et exige du temps.
Sa réalisation sous échographie permet d’en améliorer le rendement.
- Le prélèvement par cathétérisme aller-retour avec une sonde souple, prélubrifiée est fiable,
facile chez la fille, plus difficile chez le garçon avec de faibles risques d’IU iatrogène et de
lésions urétrales.
-Le prélèvement d’urines en milieu de jet (per-mictionnel) est une technique non invasive et
c’est la technique à utiliser chez les enfants ayant des mictions volontaires.
- Le prélèvement utilisant un collecteur d’urines (poche à urines) est la technique la plus
utilisée chez les enfants de moins de 2-3 ans. Il expose à une contamination par la flore
commensale du tube digestif présente de façon habituelle sur la vulve et le prépuce. La poche
adhésive ne doit pas rester en place plus de 30 minutes.
4-1-2 Examen direct
Il peut être obtenu en moins d’une heure. L’absence de leucocyturie et de bactériurie à
l’examen direct des urines a une excellente valeur prédictive négative, proche de 100%, pour
exclure une IU. En revanche, la valeur prédictive positive est médiocre. La présence de
germes à la coloration de gram permet de guider l’antibiothérapie de première intention avant
les résultats de la culture et de l’antibiogramme :
- BGN : E.Coli, Klebsiella sp, ou de pseudomonas aeruginosa si le contexte est à risque
- Cocci gram positif en chaînette : enterococcus sp.
- Cocci gram + en amas : staphylocoques
4-1-3 Interprétation de la culture de l’ECBU
Les IU authentiques sont liées à la présence d’un seul germe dans les urines (culture
monomicrobienne).
Méthode de prélèvement
Ponction sus-pubienne
UFC/ml
BGN : pas de seuil
Cocci gram positif : › 103
Cathétérisme
› 103
Recueil par poche
≥ 105
Prélèvement per-mictionnel ≥ 105
4-3 Bandelettes réactives
Il s’agit d’un test de dépistage. Le test aux nitrites est positif s’il y a dans les urines des
entérobactéries produisant la nitrate-réductase ; les entérocoques, les pyocyaniques et les
staphylocoques ne produisent pas de nitrate-réductase. Le test aux leucocytes (présence de
leucocyte estérase) est positif s’il y a plus de 104 /ml leucocytes dans les urines. A condition
que le recueil urinaire soit effectué dans les mêmes conditions que l’ECBU, une BU négative
en leucocytes et nitrates permet d’exclure avec une VPN de 97% une IU.
5 TRAITEMENTS CURATIFS
5-1 Cystites aiguës
Il est recommandé d’utiliser le cotrimoxazole (CI avant l’âge d’1 mois) : 30mg/kg/j de
sulfaméthoxazole et 6mg/kg/j de triméthoprime en 2 prises quotidiennes ou le céfixime
8mg/kg/j en 2 prises quotidiennes pendant 3 à 5jours.
5-2 Pyélonéphrites aiguës
Le traitement doit être immédiat en cas de certitude diagnostique, de syndrome septique,
d’uropathie connue, d’immunodépression, et chez le nourrisson de moins de 3 mois.
Le traitement d’attaque s’appuie sur les C3G injectables pour une durée de 2 à 4 jours
(ceftriaxone 50mg/kg/j ou céfotaxime 100mg/kg/j) en association pendant 2 jours avec les
aminosides (gentamicine 3mg/kg/j). Ce traitement d’attaque sera suivi d’une antibiothérapie
orale par Bactrim® ou Oroken® en fonction des résultats de l’antibiogramme.
Attention :
- PNA à entérocoques : amoxicilline (100mg/kg/j) IV 2-4jours + aminoside 2j IV puis relais
po par amoxicilline
- PNA à pseudomonas aeruginosa : ceftazidime (50mg/kg/j) IV +aminoside IV
La durée totale du traitement est de 10 à 14 jours.
L’hospitalisation initiale est recommandée chez l’enfant de moins de 3 mois et les enfants
présentant des signes d’infection sévère. Les autres enfants peuvent être traités de la même
façon en ambulatoire.
5-3 Cas particulier des PNA chez les enfants de moins de 3 mois
Les PNA chez les enfants de moins de 3 mois exposent à un risque d’infection systémique. La
fièvre est inconstante. La PNA est souvent révélée par des troubles digestifs, un ictère, et des
signes neurologiques (irritabilité, hypotonie). Plusieurs études ont montré que pendant le
premier mois de vie, 20 à 30% des PNA sont associées à une bactériémie (3% entre 2 et 24
mois, et moins de 1% après cet âge), et 5% à une méningite. Des hémocultures sont
recommandées avant antibiothérapie, la ponction lombaire doit être systématique chez
l’enfant de moins de 1 mois et réalisée dès le moindre doute les 2 -3ème mois de vie. La durée
du traitement IV est prolongée en cas de bactériémie ou de méningite et les doses
d’antibiotiques sont adaptées.
6 BILAN ETIOLOGIQUE AU DECOURS D’UNE PNA
Toute enfant présentant une première PNA doit bénéficier d’une échographie rénale à la
recherche de signes en faveur d’une uropathie sous-jacente refluante (signes évoquant un
reflux vésico-urétéral) ou obstructive (ex : syndrome de la jonction pyélo-urétérale), de
lithiases.
La cystographie rétrograde à la recherche d’un RVU est de moins en moins réalisée de façon
systématique en cas de premier épisode de PNA sauf s’il existe des anomalies
échographiques. Elle est conseillée en cas de deuxième épisode.
7 ANTIBIOPROPHYLAXIE DANS LES IU RECIDIVANTES
L’antibioprophylaxie réduit la fréquence des épisodes de cystite à répétition en complément
du traitement des facteurs de risque de l’nfection : réplétion rectale (encoprésie, constipation),
troubles mictionnels (instabilité vésicale, dyssynergie vésico-sphinctérienne).
Aucune efficacité n’a été démontrée chez les enfants présentant un RVU.
Les molécules utilisées sont :
- le Bactrim® à la posologie de 1-2mg/kg/j pour le triméthoprime et 5-10mg/kg/j pour
le sulfaméthoxazole, CI chez l’enfant de moins d’1 mois.
- La Furadoine 1-2 mg/kg/j, CI avant 6 ans du fait de sa forme galénique
- Le Céfaclor (Alfatil®) à la dose de 10mg/kg/j en particulier en période néonatale
8 POUR EN SAVOIR PLUS
Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires nourrisson
et de l’enfant. AFSSAPS février 2007.

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