La vanilline : dualité synthétique
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La vanilline : dualité synthétique
T RAVAUX D ’I NITIATIVE P ERSONELLE E NCADRES BOUTHIN B ERTRAND - HIRTZLIN J EROME – SCHMITT E MMANUEL P ROFESSEUR ACCOMPAGNATEUR : M . TRAORE A NNEE 2005/2006 L A V ANILLINE DUALITE SYNTHETIQUE-NATUREL I. INTRODUCTION En 1520, lors de la conquête du Mexique, les espagnols découvrent un arôme nouveau extrait de la gousse de vanille. La découverte du mode de pollinisation permet en 1841 d’en intensifier la culture à la Réunion. La vanille doit sa flaveur caractéristique à la molécule de vanilline. Actuellement, l’arôme de vanille est le plus utilisé dans l’industrie alimentaire. 75% de la quantité mondiale est d’origine synthétique. Néanmoins, les associations de consommateurs demandent plus de « naturel » aux industries alimentaires par peur de la chimie de synthèse. Selon l’opinion publique, la vanille naturelle serait ainsi « meilleure » que la synthétique. Pour donner une réponse scientifique à cette question, il faut tout d’abord déterminer quels critères seront utilisés pour confronter les deux molécules. Ensuite l’étude des deux voies d’obtention des molécules naturelles et synthétique, ainsi que la comparaison des produits finaux nous permettront de tirer nos conclusions. II. PRESENTATIONS I.1. LA MOLECULE DE VANILLINE • • • • • • • Formule : C8H8O3 -1 Masse moléculaire : 152,15 g.mol Noms : o 3-Methoxy-4-hydroxybenzaldéhyde o 2-Methoxy-4-Formylphenol o 4-Formyl-2-Methoxyphenol Propriétés : cristaux blancs sensibles à l'humidité et la lumière Précautions : Conserver dans un endroit sec et sombre. Point de fusion : 81-83 ° C . Son point d'ébullition est à 285 ° C . Solubilité : o dans l'eau : faible (1g/100ml) o soluble dans l'éthoxyéthane (acétate d'éthyle), dans l'éthanol I.2. L’AROME DE VANILLE I.2.a. Différenciation odeur-arôme, perception La vanilline est un composé très volatile, sa pression de vapeur saturante est élevée. Quand nous flairons un produit alimentaire qui contient l’arôme de vanille, nous aspirons une portion d’air qui environne le produit. Celle-ci est chargée en composés odorants. La perception recueillie par l’épithélium est l’odeur. Quand nous ingérons un produit, la perception sur l’épithélium est différente, c’est l’arôme. Cette différence est due à la distinction de composition de la phase gazeuse dans la cavité buccale et celle de l’air environnant. I.2.b. Caractéristique : pouvoir odorant L’arôme de vanille n’a aucun pouvoir nutritif, sa seule fonction caractéristique est son pouvoir odorant. III. COMMENT OBTENIR DE LA VANILLINE ? III.1. EXTRACTION III.1.a. Obtention de la gousse de vanille La vanille est naturellement stérile, il faut la fertiliser manuellement : c’est la pollinisation. Au moment de la récolte, les gousses de vanille n’ont aucun parfum. Plusieurs étapes sont nécessaires avant d’obtenir l’arôme : - L’échaudage : les gousses sont plongées dans un bain d’eau à 65° pendant 3 minutes. Le but est de stopper l’activité cellulaire pour éviter le pourrissement des gousses. Néanmoins cette méthode ne détruits pas les substances enzymatiques qui vont assurer la production de vanilline. - L’étuvage, le séchage : le but est de faire perdre l’humidité des gousses, égoutées dans des caissons en bois puis disposées au soleil. - L’affinage : les gousses sont stockées dans des malles de bois où le parfum de la vanille s’affirme et devient de plus en plus subtil. Toutes ces étapes ont des conséquences sur les cellules œufs contenues dans les gousses. Dans ces cellules la vanilline est liée à du glucose. C’est pour cela qu’une gousse verte n’a pas d’odeur. Ces étapes permettent la libération d’une enzyme qui va séparer le glucose de la vanilline et enfin donner son pouvoir odorant à la gousse. III.1.b. Extraction par solvant On extrait les molécules aromatiques à l’aide d’un solvant tel l’éthoxyéthane où l’éthanol. Les gousses sont coupées finement et dispersées dans le solvant. Les composés alors obtenus sont appelés oléorésines. La molécule de vanilline, étant solubles dans ces solvants, se retrouve dans la phase organique. On se débarrasse ensuite du solvant par évaporation. III.1.c. Bilan Au total, il aura fallu 1 kilo de vanille verte pour faire 250 grammes de vanille sèche ainsi que 19 mois entre la fécondation et la vente. De plus il n’y a à la fin, dans une gousse, que 1,5 à 2,5% de vanilline. Les besoins mondiaux en vanilline s’élève à 8 000 tonnes par an alors que la production de la vanilline par extraction n’en fournit que 2 000 tonnes, d’où la nécessité d’un autre moyen de production. III.2. SYNTHESE DE LA VANILLINE III.2.a. Synthèse historique à partir de l’eugénol La vanilline, identifiée en 1816 par Bucholtz et dont la structure a été déterminée en 1874 par Tiemann et Haarman., a été synthétisée pour la première fois par Erlenmeyer en 1876 à partir de l’eugénol (extrait de clous de girofles) et par Reimer à partir de gaïacol (extrait de goudrons de hêtres). Il s’agit donc d’hémisynthèses (synthèses réalisées à partir de composés naturels possédant déjà une partie de la molécule visée). L’extraction naturelle de l’eugénol étant plus rentable que l’extraction du gaïacol, les premières synthèses ne furent réalisées qu’à partir d’eugénol et ceci pendant plus de 50 ans. III.2.b. Synthèse industrielle à partir du gaïacol Le développement de la synthèse industrielle du gaïacol va remettre la synthèse de Reimer sur le devant de la scène. C’est cette synthèse qui est actuellement utilisée dans l’industrie et notamment à Rhodia où nous avons effectué une visite. Synthèse du gaïacol 1 et 2 : substitution du cycle aromatique 3 : Synthèse de Williamson Synthèse à partir du gaïacol (Rhodia) Sous-produits de la synthèse de Reimer Ainsi que restes de réactifs, de solvants, de produits non oxydés… III.2.c. Nouvelle voie de synthèse à partir de la lignine En 1932, les premiers procédés industriels à partir de la lignine (déchet de manufacture de pâte à papier) ont commencé à être exploités. La lignine, polymère complexe présent dans le bois, est traitée par des micro-organismes, pour la décomposer en monomères, notamment en acide férulique, luimême oxydé en vanilline. IV. ETUDE DES PRODUITS FINAUX IV.1. SYNTHETIQUE OU NATURELLE, LA MOLECULE DE VANILLINE EST LA MEME Quelque soit le procédé pour l’obtenir, la molécule de vanilline reste identique. Les spectres IR et RMN permettent de le confirmer. Spectre IR de la vanilline Spectre RMN de la vanilline IV.2. LA NOTION DE TOXICITE Aux doses d'utilisation habituelles, les arômes ne présentent aucun danger pour la santé des consommateurs. On se doit plutôt de s’intéresser aux sous produits de la synthèse et aux solvants utilisés pour l’extraction. En effet, il s’agit de montrer quelle est la voie d’obtention la plus « saine » en analysant la toxicité des éléments utilisés. Ainsi, on remarque que le solvant organique utilisé peut être considéré comme nocif à grande dose. IV.3. COMPARAISON DES « POUVOIRS » ODORANTS Les molécules de vanilline obtenues naturellement ou synthétiquement sont identiques, elles possèdent le même pouvoir odorant. La dualité réside dans le faite que la molécule naturelle est associée à d’autres molécules aromatiques qui influent sur son odeur. En synthèse, on exploite uniquement la molécule de vanilline. Cependant, on peut également synthétiser la molécule d’éthylvanilline qui possède un pouvoir odorant 5 fois plus important. IV.4. L’AROME SYNTHETIQUE: LA PEUR DE L’INCONNU La vanilline de synthèse est une nécessité pour parer aux demandes. Elle est omniprésente dans nos produits du quotidien, et pourtant il persiste une peur associée à la chimie. Cette peur peut s’expliquer par un manque d’information du consommateur sur l’artificiel. De plus, les appellations liées à l’utilisation de vanilline sont très nombreuses et peu explicites. Ainsi, on inscrira « arôme naturel vanille » sur un produit contenant de la vanilline issue de produits naturels divers comme les enveloppes de grains de riz par exemple. Ainsi, bien que "tout" soit chimique, il est courant de constater que "l'artificiel" est assimilé à "produit chimique" (avec une connotation négative) alors que le naturel, et bien, est ... naturel. Un exemple frappant est celui de l’éthylvanilline qui, bien que possédant un pouvoir odorant bien supérieur, n’est pas utilisé comme arôme à cause de la crainte qu’il engendre du fait qu’il n’existe pas à l’état naturel. IV.5. LA VANILLINE : DES INTERETS ECONOMIQUES La vanilline est l’arôme le plus consommé, c’est donc fort logiquement que les industries essaient de tirer de plus de profits de ce produit a forte valeur ajoutée. L’intitulé arôme naturel est un gage de vente. Cependant, le coût de production de l’arôme naturel est beaucoup plus élevé. Certains industriels jouent alors sur l’incompréhensibilité des termes utilisés pour faire augmenter leurs ventes ; d’autres écoulent leur produits sous l’appellation « arôme naturel » alors qu’ils ont ajouté des molécules synthétiques aux molécules naturelles : c’est une fraude. IV.6. LE NATUREL : UN GAGE DE QUALITE ? Les intérêts économiques sont tels que les fraudes existent. Cependant, il est possible de les contrer en contrôlant les isotopes des carbones 12 et 13 présents dans les arômes. L’autre souci réside dans la toxicité du solvant utilisé. En effet, les étapes de synthèse de la vanilline sont toutes contrôlées et les sous produits sont bien identifiés. Au contraire, l’extraction naturelle utilise des solvants dont on est pas toujours bien informé. La synthèse naturelle à partir des micro-organismes présente de nombreuses incertitudes quant à la faible maîtrise des rejets dus à cette réaction. V. CONCLUSION La vanilline n’ayant pas de pouvoir nutritif, les seuls caractéristiques qui nous intéressent alors pour déterminer laquelle des molécules synthétique ou naturelle est la meilleure sont l’innocuité sur l’organisme et le pouvoir odorant. Selon l’opinion publique, la voie synthétique fait peur. Or l’étude des différentes voies d’obtention nous montre que les produits finaux sont exactement les mêmes. De plus l’extraction utilise aussi des produits chimique : les solvants. Si la chimie présente un danger, il n’est pas plus important pour la voie synthétique que pour l’extraction. Ainsi, si la synthèse de la vanilline ne présente pas de danger, celle de l’éthylvanilline n’en présente pas non plus. La peur des consommateurs concernant son utilisation semble bien dépourvue de sens. De manière générale, c’est cette peur du consommateur qui empêche les industries d’utiliser des procédés satisfaisants en tout point. VI. BIBLIOGRAPHIE Arômes Alimentaires, cours d’Hubert RICHARD, professeur à l’ENSIA Livres: J. chem Educ 74, 1055-1059 (1997) Kirk-Othmer, Encyclopedia of Chem Technology vol 24, 1997, p 812-825 Sites internet : http://www.eufic.org/fr/food/pag/food39/food394.htm http://home.scarlet.be/at_home/vanille.htm http://www.reptox.csst.qc.ca/Produit.asp?no_produit=135871&nom=%C9thylvanilline http://fr.wikipedia.org/wiki/Vanilline www.forums.futura-sciences.com www.cesu.ouvaton.org www.lesaromes.free.fr http://valhalla.chem.udel.edu/vanillin.html