Culture Hip hop, Gare aux clichés

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Culture Hip hop, Gare aux clichés
Culture Hip hop,
Gare aux clichés
12 - Actu
actu
Bling bling, argent, vulgarité, sous culture,
casquette, banlieue... sont souvent les
mots qui reviennent au sujet de la culture
hip hop. Souvent incomprise par le public
et stigmatisée par les médias, cette culture
souffre d'idées reçues et de clichés.
Rédaction : S. Ouvrard
Crédit Photos : EmsemStock, assocaition Otam, Patrice
Perleaud
L
e hip-hop est une sorte de maison
avec quatre chambres : le rap, la
danse, le graff et le Djing. Pour chacune, il existe plusieurs courants et
styles. Nicolas Gouasdoue, sociologue rennais
suivant la culture hip hop depuis 1988, précise,
« on peut être hip hop sans pratiquer l'une de ces
activités. On se revendique alors de cette culture
pour son mode de vie, de pensée : l'échange. On
parle DES cultures hip hop, leur diversité est phénoménale, elles ne touchent pas seulement les
jeunes de banlieues, il faut s'enlever ce cliché de
la tête ».
Une histoire de préjugés
« Lorsque nous nous sommes lancés, nous craignions les préjugés. Des idées préconçues sur
la violence et la délinquance bloquent certaines
personnes qui peuvent se cantonner à l'image
d'une racaille avec du shit. Le rap souffre d'un
jugement hâtif », analyse Menza. Papyrusse,
rappeur et slameur pictavien membre des associations Jokebox et L'Astre en moi, ajoute, « il y a
tout un phénomène américain autour des joutes
verbales entre rappeurs. Ça crée le buzz et fait
vendre. Mais l'authenticité du rap se perd et
dégrade l'image qu'en ont les gens. Les grosses
radios commerciales ont imposé leur format, une
ligne de pensée. Il y a toujours une récupération
la plus commerciale possible ». Lucien estime que
« les méfaits du "populaire" sont importants et font
perdre au hip hop de son âme et son côté originel.
C'est aux citoyens d'aller chercher ailleurs, d'être
curieux pour découvrir autre chose, une diversité
musicale ».
En fonction des disciplines, les préjugés sont à
nuancer. Le graffiti est par exemple entré dans
les mœurs très tardivement alors que l'Homme a
Actu - 13
actu
Jordan Birault lors d'un battle hip hop ▲
Pour aller plus
loin, sur le net :
fredcalmets.com
lespetitsdebrouillardspc.org
Twitter : @recidiv-1
Otam sur facebook :
asso otam
Jokebox :
www.joke-box.fr
L'Astre en moi :
astreenmoi.e-monsite.com
Historique :
1999 :
Création de la Fédération Nationale de la
Culture Urbaine (FNCU). Elle est remplacée
en 2009 par l'Observatoire National des
Cultures Urbaines (ONCU).
2009 :
Création de la Ligue Française des sports
urbains (LFSU), s’inscrivant dans une
politique ministérielle d’encouragement à
la pratique sportive et plus particulièrement
de reconnaissance, de développement,
d'accompagnement et d'encadrement des
sports urbains, afin de les valoriser eux et
leurs participants
14 - Actu
toujours marqué les murs. C'est une branche qui
semble néanmoins peu mise en valeur comparée
à la danse. Nakklan estime « qu'au sujet de cette
discipline, beaucoup ont conscience de la quantité de travail en amont de la performance qu'ils
observent ». Jordan Birault, danseur et membre de
Jokebox et Otam, infirme ce point de vue, « parfois,
dans le regard des gens, un danseur hip hop ne
fait que se mettre sur la tête en faisant la toupie.
Pourtant, je peux vous assurer que la danse
hip hop est parmi les plus complexes ». Il existe
en effet de nombreuses branches : le break, le
locking, le new style... avec chacune leurs termes
spécifiques, leur identité.
De son côté, Nicolas Gaousdoue se désole, « les clichés d'amateurisme et d'illégitimité sont repris par
des campagnes de groupes politiques d'extrême
droite qui établissent un portrait extrêmement
violent de ce type de culture, qui rebuterait n'importe qui. Les préjugés viennent des personnes
réactionnaires ayant mal vécu l'émergence d'une
culture qu'ils ne comprennent ni ne maîtrisent.
Ces légitimistes culturels s'en sont préalablement
pris à des disciplines telles que la BD et la photographie, le terme même de culture urbaine induit
des préjugés ». Djamalarafal rebondit, « j'observe
un effet générationnel. Avant c'était le rock qui
était décrié, affublé d'idées reçues. Maintenant
les mentalités ont évolué, ce sera la même chose
pour le rap ».
Diversité et travail
« L'écriture est profonde dans le rap français,
qui est très technique. C'est la nouvelle poésie
française. Il s'inspire de pléthore de références,
avec des codes gothiques, le chant d'Aznavour et
le funk de James Brown », détaillent les membres
de Récidiv1. « la maîtrise de la langue française
est essentielle au rap. Par exemple, notre association est nommée 16UR, elle fait référence à
la fois à notre département et la césure, figure
de style, employée en poésie », détaille Menza.
« Notre association a été créée en 2009, nous
mettons en place des ateliers d'écriture pour les
jeunes et nous nous sommes également engagés
à verser des fonds pour les enfants handicapés,
lorsque nous aurons des gains. Notre objectif est
de maintenir le plaisir, de rigoler, de se défouler
Resto - Bistro - Expo
LA S E R RU R ER IE
et de faire ressortir ce que l'on est à travers
tout cela. Cela forge des amitiés », sourient les
membres. Jordan Birault confirme, « l'essentiel
c'est le partage, l'énergie, l'échange, même lors
des battles où c'est la guerre ! »
Dans le parcours de certains, ces disciplines
sont aussi une voie d'accès à l'excellence. « DJ
Oksy, décédé en janvier 2013, pionnier des Djs
scratcheurs, a eu pour élève un champion du
monde en sa discipline. Fred Calmets, auteur
des crânes géants tagués à Poitiers, a été
médiateur auprès de la Mairie de Poitiers pour
l'utilisation des murs d'expression libre. Il est
maintenant un artiste contemporain reconnu »,
rappelle Nicolas Gouasdoue.
« La culture urbaine est bien moins sous les
projecteurs que d'autres disciplines », affirme
Jordan alors que Menza nuance, « bien que peu
médiatisée, la vision de cette culture évolue.
Les personnes sont plus ouvertes ». « Lorsque
les graffitis ne sont pas effacés, j'en déduis
qu'ils plaisent, c'est une reconnaissance .»
Jordan, en service civique au sein de l'association Les Petits Débrouillards, conclut à propos
de la diversité, « grâce au Café des Sciences
consacré à la culture hip hop que nous avons
organisé au Plan B le 15 mai dernier, nous
avons pu regrouper toutes les disciplines du
genre. Toutes ont une énergie et une origine
communes mais il est rare de les croiser toutes
lors d'une même soirée ». ■
Ouvert 7 j / 7 jusqu’à 2h00
Nombreux cocktails
Formule du midi
Brunch le week-end
Cuisine traditionnelle & du monde
28 rue des Grandes écoles - Poitiers
www.laserrurerie.com - [email protected]
Papyrusse sur scène ▲
05 49 41 05 41
© [email protected]
Vers une évolution des moeurs

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