low-cost

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low-cost
I DOSSIER I
I
les nouveaux modèles économiques
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I
• ­Le low-cost au service
du consommateur
Le low-cost a aujourd’hui envahi de nombreux pans de la consommation des ménages,
du transport aérien à la distribution alimentaire, en passant par la banque, l’automobile,
l’immobilier, l’assurance, les salons de coiffure, la jardinerie, la téléphonie mobile ou les salles
de gym… Qui sont ses clients ? À qui profite-t-il ? À qui fait-il peur ? Et si le modèle
de production low-cost n’était que l’expression renouvelée de la concurrence ?
Auteur
Emmanuel Combe*
E
n dépit de son succès, le low-cost reste toujours l’objet de vives critiques, accusé notamment de sacrifier la qualité sur l’autel des prix
bas. Si le low-cost suscite encore la méfiance,
c’est sans doute parce qu’il s’agit d’un modèle
récent : la nouveauté génère toujours une certaine inquiétude, en bouleversant nos schémas
de pensée, nos certitudes les mieux établies.
Il est vrai que le terme « low-cost » n’incite
guère de prime abord à l’enthousiasme ; l’adjectif « low » présente en français une connotation
péjorative : ce qui est bas, c’est ce qui déprécié,
au rabais. Mais ne nous arrêtons pas à la surface
des mots. Allons voir ce qu’est vraiment le lowcost, au-delà des apparences et de l’imaginaire.
Sortons des discours convenus, des postures
d’opprobre et considérons le low-cost pour ce
qu’il est d’abord : un modèle de production original.
Le low-cost : à la recherche d’une
définition
Une première piste, qui se révèle en réalité
peu fructueuse, consiste à définir le low-cost
en partant des prix : le low-cost ne serait rien
d’autre qu’une pratique de prix bas. Mais il
s’agit, à vrai dire, d’une conséquence du modèle
et non de sa nature intrinsèque. D’ailleurs,
vendre à prix bas n’est pas une caractéristique
exclusive du low-cost, comme en témoignent
des pratiques telles que les rabais ou les soldes,
qui n’ont pourtant pas grand-chose à voir avec
le low-cost. Qui plus est, comme nous le verrons,
le low-cost n’est pas toujours synonyme de bas
prix, notamment dans le transport aérien.
Une seconde piste, plus pertinente, consiste
à partir de l’étymologie du mot : le low-cost ne
serait rien d’autre qu’un modèle de réduction
des coûts. À nouveau, cette approche n’est pas
suffisante pour cerner la nature du low-cost :
si le low-cost est un modèle qui fait baisser les
coûts, tout modèle de coût bas ne peut pas pour
autant se réclamer du low-cost. Par exemple,
une entreprise qui délocalise sa production de
vêtements en Chine ne devient pas
pour autant une entreprise low-cost ; Avec le modèle
pas plus qu’une entreprise qui introduit low-cost,
dans son processus de production des chaque produit
est dépouillé
méthodes de « lean production1 ».
À vrai dire, pour cerner la nature du de ses fonctions
low-cost, il faut partir du consomma- annexes
teur final. Le low-cost est d’abord et pour n’en retenir
surtout un modèle qui a su redéfinir les que sa fonction
besoins du consommateur, dans le sens essentielle
d’une simplification à l’extrême des
fonctionnalités des produits et services. Chaque
produit et service est en quelque sorte « mis à
nu », « découpé », « dépouillé » de ses fonctions
annexes pour n’en retenir que le cœur, c’est-àdire sa fonction essentielle, celle qui satisfait un
besoin minimal. Une expression revient souvent
dans le transport aérien pour caractériser cette
redéfinition des besoins : « no frills », c’est-à-dire
littéralement « sans chichis ». Le corollaire de la
simplification, du redécoupage du produit c’est
l’optionalisation de tous ses attributs secondaires : tout ce qui est ajouté, outre le besoin
de base, est payé en plus. Mais c’est au consommateur de choisir les attributs qu’il souhaite
ajouter. Le low-cost est en quelque sorte l’antimodèle de la gratuité : tout a un prix, donc tout
se paye.
Quelques exemples permettent d’illustrer ce
processus de simplification/d’optionalisation.
• Premier exemple : lorsque vous prenez
l’avion entre Paris et Nice, quel est votre besoin
* Professeur à l’université de Paris 1, membre du collège de
l’Autorité de la concurrence.
1. Méthode consistant à réorganiser le processus de production
afin de révéler des gisements de productivité cachés (simplification
des processus, minimisation des temps morts, etc.).
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• le low-cost au service du consommateur I
minimal ? D’abord, celui de vous rendre rapidement et en toute sécurité sur la côte d’Azur ;
accessoirement de prendre un petit-déjeuner
dans l’avion ou de lire le journal offert à bord,
surtout si cela se traduit par un prix du billet
trop élevé. Sur un vol low-cost, le besoin de
base – celui de se déplacer rapidement – est
satisfait sans aucun service additionnel. Toute
option supplémentaire devient payante et au
choix du client : le café à bord, le droit d’embarquer avant les autres, etc.
• Deuxième exemple : lorsque vous achetez
une voiture, quel est votre besoin premier :
montrer votre statut social ou simplement
vous déplacer d’un point à un autre en toute
sécurité ? Le low-cost fait le pari que certains
consommateurs considèrent la voiture comme
un simple moyen de locomotion. Dans une
voiture low-cost, le strict nécessaire y est. Rien
de plus. Si vous voulez l’autoradio CD ou la
climatisation, il faudra payer en plus.
• Troisième exemple : lorsque vous achetez
un paquet de lessive, quel est votre besoin
principal ? Laver vos vêtements ou acheter
une lessive de marque dans un magasin bien
agencé, quitte à payer plus cher ? Si vous
estimez que le packaging, la marque, l’agencement des produits dans le rayon ne sont pas
primordiaux pour de la lessive, alors vous irez
dans un « hard-discount » où vous trouverez
des produits sans marque, rangés de manière
sommaire sur un rayonnage.
La source et la cohérence du modèle lowcost résident précisément dans cette simplification des besoins, qui permet en retour de faire
baisser les coûts de production et, par effet de
translation, les prix :
Simplification des produits/optionalisation des attributs
Baisse des coûts de production
Baisse des prix
Grâce à cette redéfinition des contours du
produit, le low-cost parvient à réaliser de spectaculaires baisses de coûts. Ainsi, dans l’aérien,
les gains de productivité opérés sur toute la
chaîne de valeur, de la réservation du billet
jusqu’au vol de l’avion, permettent aux grandes
compagnies low-cost d’afficher des coûts d’exploitation en moyenne de 30 à 60 % inférieurs
à ceux d’un opérateur historique (graphique 1).
Une mesure usuelle de la performance d’un
transporteur aérien est le coût par siège-kilomètre offert (SKO) : par exemple, ce coût se
révèle pour easyJet 40 % inférieur à celui d’un
opérateur établi, et dans le cas de Ryanair la
diminution atteint même 67 % en 2004.
Graphique 1. Écart de coût par SKO
14
Intra-EU markets, 800 km segment
Cost per ASK (Euro cents)
12
10
− 38 %
− 52 %
− 42 %
8
− 67 %
6
4
2
0
1997
Network Airlines
easyJet
1998
2000
1999
Virgin Express
Ryanair
2001
2002
2003
2004
Source : Airline cost performance (2006) IATA.
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Graphique 2. Écart de prix en fonction de la date de départ
ORLY/NICE
500
Euros
400
300
200
100
0
dans 1 semaine
dans 1 mois
dans 2 mois
dans 3 mois
dans 5 mois
dans 4 mois
Date de départ
easyJet
Tableau 1. La relation entre le prix,
les coûts et la demande
Demande par rapport aux capacités
FAIBLE
FAIBLE
Une autre caractéristique spectaculaire du lowcost – sans doute la plus visible pour le consommateur – est qu’il permet de très fortes baisses
de prix par rapport aux produits existants sur le
marché. Dans la téléphonie mobile, les opérateurs low-cost (appelés aussi MVNO) affichent
des tarifs jusqu’à 40 % moins chers à ceux des
opérateurs installés, pour des prestations identiques (forfaits d’heures). Même scénario dans
le maxi-discount alimentaire : UFC-que-choisir
a comparé en 2007 les prix dans plus de 1 200
magasins appartenant à différentes enseignes.
Le résultat est sans appel : l’écart de prix entre
une enseigne premier prix et un pur low-cost
peut atteindre jusqu’à 20 %. Dans la banque,
l’UFC-que-choisir a également estimé le prix d’un
panier de services : le même panier est facturé
20 à 30 % moins cher dans une banque low-cost.
C’est sans doute dans l’aérien que les baisses
de prix sont les plus marquées. Dans une étude
sur 370 cas d’entrées de compagnies low-cost sur
le marché américain au cours de la période 19912002, Ito & Lee [2003] montrent que les prix des
billets low-cost sont en moyenne 49,5 % inférieurs à ceux des compagnies installées, avec
une variance assez forte : entre 66,5 % pour la
low-cost Vanguard et 15 % seulement pour la
low-cost Carnival. Dans le cas de la France, le
rapport Beigbeder [2007] fournit également
des éléments de comparaison, en prenant un
échantillon de sept lignes au départ de Paris
et sur lesquelles opèrent à la fois un low-cost
et la compagnie historique. La conclusion de
l’étude est univoque : si le prix du low-cost tout
comme celui de la compagnie historique varie
selon les dates de réservation, il existe toujours
un différentiel de prix à l’avantage du low-cost,
de l’ordre de 30 %. Le différentiel est d’autant
plus important que la date de départ est éloignée dans le temps. Le graphique 2 illustre le
cas de la ligne Orly/Nice : si l’écart de prix est
seulement de 10 % pour un départ dans une
semaine, il atteint jusqu’à 60 % pour un départ
dans quatre mois.
Pour autant, il serait erroné de conclure que
les billets low-cost sont toujours bon marché.
En premier lieu, pour un même intervalle
de réservation (par exemple, un mois avant le
départ), il est généralement plus coûteux de
partir en Corse en low-cost durant l’été que
durant l’hiver. La microéconomie permet d’expliquer ces différences de prix : la fixation d’un
prix dépend non seulement du coût unitaire de
production mais aussi du niveau de la demande.
En été, la clientèle qui souhaite se rendre
en Corse pour y passer ses vacances est très
nombreuse, alors qu’en hiver la demande est
plutôt faible. Bref, le low-cost n’a pas aboli la
Fort
Le low-cost, un vecteur de baisse
des prix
Air France
Coût
Source : rapport Beigbeder [2007].
Prix élevé
low-cost
Prix faible
low-cost
(ex. achat la veille de départ ;
achat pour la période
de vacances)
Prix moyen
opérateur historique
Prix élevé
opérateur historique
(ex. prix pour un départ en
heures creuses)
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Forte
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• le low-cost au service du consommateur I
Graphique 3. Évolution du prix en fonction de la date de réservation
ORLY/NICE
600
500
Euros
400
300
200
100
28/11/2007
26/11/2007
24/11/2007
22/11/2007
20/11/2007
18/11/2007
16/11/2007
14/11/2007
12/11/2007
10/11/2007
08/11/2007
06/11/2007
04/11/2007
02/11/2007
31/10/2007
29/10/2007
0
Jour
easyJet
Source : rapport Beigbeder [2007].
vieille loi de l’offre et de la demande ! Même
avec des coûts d’exploitation faibles, une
compagnie aérienne low-cost vendra son billet
à un prix élevé lorsque la demande est forte
(tableau 1) : voilà pourquoi le low-cost peut
parfois se révéler « high fare2 ».
En second lieu, le prix d’un billet low-cost
varie sur un même vol : deux clients voyageant
dans le même avion et la même classe n’auront
sans doute pas payé le même prix ! Comme
toutes les compagnies aériennes, les low-cost
pratiquent une tarification dynamique
Grâce au low-cost, et appliquent, comme toutes les autres
le consommateur compagnies, les méthodes du « revenue
fixe lui-même management »3. Le graphique 3 fournit
le niveau de qualité un exemple d’évolution du prix du
qu’il souhaite billet d’easyJet et d’Air France sur la
ligne Paris-Nice pour une même date
de départ et de retour, en fonction de la date
de réservation. Nous pouvons constater que
plus l’on se rapproche de la date de départ,
toutes choses égales par ailleurs, plus le prix
d’Air France et celui d’easyJet tendent à
augmenter tendanciellement.
En dernier lieu, le prix du billet varie en
fonction des options que le client choisit. Les
low-cost misent beaucoup sur ces « revenus
auxiliaires » pour rentabiliser leur modèle
économique : contrats d’assurance de voyage,
taxation des bagages excédentaires, ventes
à bord de repas, embarquement prioritaire,
commissions sur les réservations d’hôtel ou de
location de voitures, etc. Dans le cas de Ryanair
et d’easyJet, ces revenus annexes représentent
aujourd’hui plus de 25 % des revenus et contribuent significativement aux bénéfices.
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Air France
Le low-cost, ennemi de la qualité ou
révélateur d’une surqualité inutile ?
Si le low-cost est souvent synonyme de bas
prix (low price), ses détracteurs affirment qu’il
s’agit en réalité d’une baisse en trompe-l’œil :
au fond, ce que les consommateurs gagneraient
en baisse de prix, ils le perdraient en termes de
qualité et de choix.
À vrai dire, le débat sur la qualité souffre
d’une double ambiguïté.
D’abord, la qualité est une notion multiforme. Par exemple, dans le transport aérien,
elle regroupe des caractéristiques aussi différentes que la sécurité des vols, leur ponctualité,
la variété des options proposées par le billet
(annulation, changement d’horaire, etc.), la
clarté de l’information délivrée lors de l’achat
du billet, la disponibilité du service après vente,
etc. Par exemple, lorsqu’on stigmatise la qualité
insuffisante dans le low-cost aérien, de quelle
caractéristique parle-t-on ? Si l’on pense à l’information délivrée sur les sites Internet de réservation, certaines compagnies low-cost ont en
effet posé problème, en affichant par exemple
des prix hors taxes. La situation a toutefois
beaucoup évolué depuis 2007, sous l’impulsion de la Commission européenne, notamment
dans le cadre de la directive 2005/29 relative aux
pratiques commerciales déloyales : par exemple,
le prix affiché inclut désormais toutes les taxes
aéroportuaires. En revanche, si l’on considère
2.Tarif élevé.
3. Cf. article « Le “low-cost” aérien bat-il de l’aile ? » dans ce
même numéro.
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que la ponctualité des vols est une caractéristique essentielle de qualité, les études empiriques montrent que, sur des trajets de même
distance et sur des aéroports identiques, les
vols low-cost sont en moyenne plus ponctuels
que ceux des compagnies historiques (voir par
exemple, Rupp & Sayanak 2008).
En second lieu, il est souvent supposé que
plus de qualité est toujours désirable pour le
consommateur. C’est oublier que l’utilité du
consommateur ne dépend pas du niveau absolu
de qualité mais du rapport entre le niveau
de qualité offert… et le prix payé : si le petitdéjeuner dans le prix du billet d’avion se traduit
par un surcroît de prix marqué, le consommateur ne souhaite pas forcément disposer de
ce service. Le low-cost permet ainsi à chaque
consommateur d’exercer sa liberté de choix et
de fixer lui-même le niveau de variété et de
qualité qu’il souhaite. En ce sens, le low-cost
repose sur une démarche contre la surqualité
imposée : pourquoi payer plus cher pour des
options que je ne souhaite pas ? En proposant
des produits toujours plus sophistiqués, les
producteurs ont peut-être oublié que la qualité
n’est pas une fin en soi.
La lutte contre la surqualité, contre l’excès
d’options et de variété est un exercice très
délicat : si le producteur low-cost simplifie
trop ou renonce à des attributs de qualité non
négociables pour le consommateur, ce dernier
ne suivra plus. Imaginons qu’une compagnie
aérienne low-cost propose un billet d’avion bon
marché mais en rognant explicitement sur… la
sécurité des vols. Quel client, dès lors qu’il est
informé des risques, serait prêt à acheter un tel
produit ? On peut considérer qu’il existe une
sorte « d’optimum » de qualité (graphique 4) :
trop de qualité, trop d’options inutiles déplaisent aux consommateurs, qui ne sont plus prêts
à payer pour cette « surqualité » ; a contrario,
si un minimum de qualité n’est pas offert, les
consommateurs ne sont pas non plus disposés à
payer.
Le débat sur la qualité s’est souvent focalisé sur la sécurité des vols dans le transport
aérien. En réalité, les low-cost ne sont pas moins
sûres que les grandes compagnies traditionnelles. Quels sont les critères d’une compagnie fiable ? D’abord, des avions récents. Les
low-cost utilisent des modèles de la dernière
génération, avec un âge moyen de leur flotte
de 3 ans, contre plus de 7 ans pour une compagnie traditionnelle. Ensuite, une bonne santé
financière de l’entreprise, afin que les avions
soient bien entretenus. Les grandes low-cost
comme Southwest, easyJet ou Ryanair sont les
plus rentables du secteur aérien.
Les statistiques sont d’ailleurs formelles : les
classements des compagnies aériennes en fonction du taux d’accident font apparaître les lowcost en bonne place.
• le low-cost au service du consommateur I
Graphique 4
Disposition
à payer
Niveau optimal
de services
Services
insuffisants
−
0
Services
inutiles
+
Niveau
de service
Une mesure de la sécurité d’une compagnie
consiste à calculer le Full Loss Equivalent (FLE),
en additionnant le pourcentage de passagers
tués lors de chaque accident fatal4, afin de tenir
compte à la fois du nombre d’accidents et de
leur gravité. Le FLE d’une compagnie est alors
comparé à celui d’un échantillon de compagnies
aériennes (FLE*), en pondérant par le nombre
de vols effectués par la compagnie (A) relativement au nombre total de vols de l’échantillon
(C). La pondération évite le biais en faveur des
compagnies « jeunes » ou de petite taille, ayant
réalisé peu de vols sans aucun accident fatal, à
l’image des low-cost européennes.
L’indicateur de taux relatif d’accident s’écrit :
FLE - [FLE* x (A/C)]. Si cet indicateur est négatif,
cela signifie que la compagnie a un taux d’accident plus faible que la moyenne de l’échantillon et réciproquement. Le tableau 2 fournit
une estimation du taux d’accident relatif pour
24 compagnies aériennes sur un échantillon
de 88 au cours de la période 1989-2008. Sur
les 7 compagnies low-cost de l’échantillon,
5 n’ont connu aucun accident fatal au cours de
la période et affichent des performances supérieures à la moyenne. Il n’est pas possible de
mettre au jour une « dangerosité » plus grande
des low-cost par rapport aux autres compagnies
aériennes.
Au-delà du secteur aérien, il convient de
rappeler que la sécurité des produits et des
services fait l’objet d’une normalisation très
stricte au niveau communautaire et national,
qui échappe en grande partie au bon vouloir
des opérateurs. En effet, sauf dans de rares
cas de biens contrefaits ou importés dans des
conditions douteuses, la marge de manœuvre
d’un opérateur low-cost sur la sécurité reste
4. Supposons qu’une compagnie ait connu deux crashs aériens.
Lors du premier, 50 passagers sur 100 ont été tués ; lors du
second, 1 passager sur 100 est décédé. Le FLE de la compagnie
sera donc égal à : 0,5 + 0,01 = 0,51.
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• le low-cost au service du consommateur I
Tableau 2. Classement des compagnies par taux d’accident
Compagnie
(*=low-cost)
Nombre
de vols
(en millions)
Delta Airlines
Southwest Airlines*
Northwest Airlines
Lufthansa
British Airways
Japan Airlines
American Airlines
Ryanair*
easyJet*
United Airlines
JetBlue*
Virgin Blue*
Alitalia
nombre
d’accidents
fatals
FLE
Taux
d’accidents
relatifs
Classement
16,5
15,78
10,91
7,88
5,49
2,63
17
1,96
1,63
13,66
0,92
0,73
3,78
1
0
1
1
0
0
5
0
0
6
0
0
1
0,02
0
0,18
0,02
0
0
4,04
0
0
3,42
0
0
1
− 4,42
− 4,25
− 2,76
− 2,1
− 1,48
− 0,71
− 0,53
− 0,53
− 0,44
− 0,26
− 0,25
− 0,20
− 0,02
1
2
3
5
6
10
15
18
19
32
33
39
58
2,49
6,15
1,84
1,34
2,41
0,94
0,62
2,06
0,76
0,24
0,76
1
3
1
2
3
1
1
2
3
7
5
0,77
1,96
1
1,5
1,3
1
1
2
2,2
4,23
4,72
+ 0,10
+ 0,31
+ 0,50
+ 1,14
+ 0,65
+ 0,75
+ 0,83
+ 1,45
+2
+ 4,16
+ 4,52
59
65
67
78
71
72
74
81
85
87
88
Air China
Air France
Air Tran*
Singapore Airlines
Korean Air
GOL*
Royal Air Maroc
Aeroflot
Iran Air
Cubana
China Airlines
Source : Planecrashinfo 2008.
extrêmement faible. Ainsi, dans le cas de la
voiture low-cost, Renault doit se soumettre aux
normes européennes qui sont en la matière
très strictes.
De surcroît, n’oublions pas que le low-cost
est souvent lancé par des entreprises de renom,
qui ne prendront pas le risque de mettre sur
le marché de mauvais produits, par crainte
de perdre leur réputation. Derrière les hôtels
Formule 1 se trouve la chaîne Accor, qui possède
aussi les hôtels de luxe Sofitel. Tout le monde
sait que la Logan, dont la marque officielle est
Dacia, est en réalité fabriquée par Renault et
non par un constructeur automobile inconnu.
Transavia est la filiale low-cost de la compagnie
nationale Air France. La banque low-cost Boursorama appartient à la Société Générale. Ed est
le hard-discounter de Carrefour, Leaderprice
celui de Casino.
Graphique 5. Part du low-cost alimentaire
et niveau des revenus
Qui sont les clients du low-cost ?
Si le low-cost permet de substantielles baisses
de prix, il reste à appréhender les motivations
profondes qui guident le comportement de ses
adeptes. Qui sont-ils exactement ?
Une étude récente de l’Insee [2007] vient
apporter un début de réponse, dans le cas du
Source : Insee, 2007.
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les nouveaux modèles économiques
maxidiscompte alimentaire. Une corrélation
positive apparaît en effet entre le niveau de vie
d’un ménage, mesuré en déciles, et la part des
dépenses qu’il réalise dans le low-cost alimentaire (graphique 5). Bref, le low-cost alimentaire
constitue à l’évidence un moyen de desserrer
une contrainte budgétaire forte, pour les
ménages à faible revenus.
Pour autant, il serait erroné de réduire le lowcost au « marché du pauvre ». En la matière, il
faut se garder de toute généralisation hâtive,
dans la mesure où la consommation de produits
low-cost apparaît très polarisée selon les
secteurs. Par exemple, dans le cas du logement
à bas coût, le low-cost s’adresse d’abord à des
ménages modestes, alors que dans le voyage
aérien à bas coût, ce sont plutôt les catégories
aisées qui y recourent.
Comment expliquer que les catégories aisées
se tournent également vers le low-cost, alors
même que leur contrainte de revenu est moins
forte ? Il faut sans doute y voir un changement
radical de la relation des consommateurs au
prix et une dissociation entre statut social et
recherche des « meilleures » affaires, encouragée par Internet et les comparateurs de prix.
La recherche du bas prix devient une attitude
revendiquée, notamment chez les jeunes : pourquoi payer plus lorsqu’on peut trouver moins
cher ailleurs ?5
Le low-cost renvoie en réalité à une tendance
de fond en matière de consommation : la polarisation des comportements. Le même consommateur qui achète un produit basique peut vouloir
s’offrir en même temps un produit de marque,
à forte image. Par exemple, s’il décide de partir
une semaine en vacances à l’étranger, il sera prêt
à voyager en low-cost plutôt que sur une compagnie traditionnelle plus chère mais plus confortable. Par contre, il voudra absolument se loger
dans un hôtel de standing. Le low-cost lui permet
de mieux répartir son budget en fonction de
ses priorités : les économies réalisées sur le billet
d’avion permettront de financer en partie l’hôtel
de qualité. Le même ménage qui possède une
belle berline pour le week-end achètera comme
seconde voiture une low-cost pour aller au travail
tous les jours. Ce « mélange des genres », ces
comportements paradoxaux sont très fréquents
de nos jours. Ils témoignent en réalité d’une
grande maturité des consommateurs, qui ne
veulent plus que l’on choisisse pour eux : chaque
consommateur désire être l’acteur de sa consommation, l’assembleur de ses propres besoins.
Face à la variété des clients du low-cost, il est
tentant de dresser une typologie des comportements, en distinguant trois types de demande
de low-cost :
– la demande de substitution : elle consiste
typiquement pour un consommateur à reporter
son choix d’un bien ou service traditionnel vers
le produit low-cost. Par exemple, une personne
• le low-cost au service du consommateur I
qui achetait une voiture d’occasion avant la
sortie de la Logan décidera pour son prochain
achat d’acheter cette voiture. De même, en
matière alimentaire, un consommateur qui avait
l’habitude d’aller au supermarché, substituera
un panier hard-discount au panier de son supermarché, en particulier sur les produits de base
(graphique 6).
Graphique 6. Le low-cost de substitution
Produit
Produit
low-cost
habituel
CONSOMMATEUR
– la demande d’induction : le consommateur
s’oriente vers le produit low-cost alors même
qu’il ne consommait pas de bien équivalent
auparavant (graphique 7). Cet effet est particulièrement fort dans le transport aérien : la baisse
du prix révèle une demande latente, notamment provenant d’une clientèle dite « loisir ».
Graphique 7. Le low-cost d’induction
Produit
Produit existant
low-cost
(non consommé)
CONSOMMATEUR
5. À cet égard, il est symptomatique de relever à quel point le
terme de radin a changé de connotation sémantique : alors que
cet adjectif a longtemps désigné un défaut rédhibitoire, il est
aujourd’hui considéré plutôt comme une qualité et immédiatement
associé à l’adjectif malin. On en vient même à parler aujourd’hui
des fameux « radins-malins » et les entreprises n’ont pas manqué
de reprendre à leur compte cette expression culte.
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– la demande de complémentarité : le consommateur qui achète le produit traditionnel va
également s’approvisionner en complément
avec le produit low-cost. Tel est le cas dans
l’automobile : l’apparition d’une offre lowcost, notamment de petite taille, pourrait
conduire les ménages disposant déjà d’un véhicule à acheter une voiture low-cost comme
voiture de complément (graphique 8). L’enquête Cetelem 2006 vient conforter l’idée d’une
demande de complément dans le cas français :
en effet, 74 % des Français qui se déclarent
prêts à acheter une voiture low-cost l’utiliseraient comme « deuxième voiture ».
Graphique 8. Le low-cost de complémentarité
Produit
Produit
low-cost
traditionnel
CONSOMMATEUR
Mais qui a vraiment peur du low-cost ?
Si le low-cost profite à l’évidence au consommateur, n’y-a-t-il pas une « victime collatérale »
de cette baisse de prix ? Le débat s’est souvent
focalisé sur les salariés : low-cost rimerait avec
bas salaires. En réalité, les économies de coût
que réalise le low-cost se trouvent essentiellement dans les dépenses de marketing, de
distribution (grâce à Internet), de conception
des produits et non au niveau des coûts salariaux. Si l’on prend l’exemple du transport
aérien, les niveaux de rémunération sont assez
comparables entre low-cost et grandes compagnies. Un constat similaire peut être fait dans la
grande distribution : le salaire des caissières est
certes faible, mais il n’est pas différent de celui
pratiqué dans les grandes enseignes. S’il y a bien
une différence dans la politique salariale entre
low-cost et compagnies traditionnelles, elle est
plutôt à rechercher dans les modalités de rémunération : la part variable, en fonction de la
performance, occupe une place i­mportante.
En réalité, les vraies victimes potentielles
du low-cost, sont… les opérateurs installés : le
low-cost vient les bousculer, en les obligeant à
s’adapter. Cela s’appelle la concurrence.
Face à l’entrée d’un low-cost, les compagnies
installées réagissent souvent en baissant leur
prix. Ainsi, dans le transport aérien, l’entrée de
Southswest Airlines sur une ligne conduit systématiquement les concurrents à ajuster leur prix
à la baisse, de l’ordre de 41 % selon Dresner
& alii [1996], de 46 % selon Morisson [2001].
L’effet sur le prix ne se limite pas aux lignes
directement concurrentes et peut être beaucoup
plus puissant, pour se diffuser à l’ensemble du
marché aérien : c’est ce que l’on a parfois appelé
« l’effet Southwest ». Plusieurs études (voir par
exemple, Goolsbee & Syverson [2008]) montrent
en effet que l’arrivée de la low-cost américaine
exerce un effet concurrentiel très large, qui
touche également :
– les lignes adjacentes : il s’agit de lignes qui
sont substituables à celles desservies par les
compagnies traditionnelles, bien que la compagnie low-cost opère à partir d’un autre aéroport de départ ou/et d’arrivée. Selon Morisson,
lorsqu’un des deux aéroports (de départ ou
d’arrivée de la low-cost) est le même que
celui de la compagnie installée, la baisse de
prix atteint 26 %, alors que la baisse de prix
est seulement de 15 %, lorsque les deux aéroports (de départ et d’arrivée) sont différents
(tableau 3) ;
Tableau 3. Réaction tarifaire des firmes installées
Type de concurrence
Effet sur le prix des billets des
compagnies installées
Concurrence effective
– même aéroport de départ et d’arrivée
– même aéroport de départ/aéroport d’arrivée substituable
– aéroports de départ et d’arrivée substituables
− 46,2 %
− 26,4 %
− 15,4 %
Concurrence potentielle
– même aéroport de départ et d’arrivée
– même aéroport de départ/aéroport d’arrivée substituable
− 33 %
− 13,1 %
Source : à partir de Morisson [2001].
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– les lignes où existe une concurrence potentielle : même lorsque Southwest Airlines n’est
pas présente sur une ligne entre deux points
A et B, elle incite les opérateurs installés à
baisser leur prix, afin de prévenir toute entrée.
Cet effet est conforme à ce que prédit la théorie
des « marchés contestables6 » : la seule possibilité d’entrée d’une nouvelle firme sur le marché
oblige les firmes installées à tenir compte de
cette « concurrence potentielle » et à baisser
leur prix.
La stratégie de baisse des prix des opérateurs
installés, si elle est imposée par l’intensification
de la concurrence, se heurte vite à une limite
objective : comme leurs coûts d’exploitation sont
en général plus élevés que ceux des low-cost, la
réduction du prix se traduit nécessairement
par une compression des marges. La stratégie
de mimétisme tarifaire n’est donc durable
et crédible que si elle prend appui parallèlement sur un programme massif de réduction
des coûts… conduisant les acteurs traditionnels à s’approprier certaines caractéristiques du
modèle low-cost.
Dans l’aérien, un exemple en est le recours de
plus en plus fréquent à Internet pour les réservations de billet, l’enregistrement et la carte
d’embarquement : grâce à de tels e-services, une
compagnie comme Air France/KLM prévoit des
économies à hauteur de 680 millions d’euros
de 2007 à 2010. De même, Air France/KLM a
densifié le nombre de siège sur les vols moyen
courrier pour faire jeu égal avec les low-cost.
Autre source de baisse des coûts : les compagnies historiques réduisent le niveau de services
à bord, en particulier au niveau de la classe
économique, ou les diversifient pour les transformer en option payante, au niveau de la classe
affaire (tableau 4).
Tableau 4
Services inclus
dans le billet
Services en
option payante
Service
minimaliste
Réduction du niveau
de service
Modèle low-cost
Service
complet
Compagnie classique
Optionalisation du
service
Pour autant, le mimétisme par les coûts
atteint aussi sa propre limite : le low-cost étant
un modèle à part entière, il est difficile pour
une firme installée d’en emprunter toutes les
caractéristiques, sauf à se transformer ellemême… en low-cost. Par exemple, dans l’aérien,
la standardisation de la flotte n’est pas une
option possible pour les compagnies historiques, dans la mesure où elles opèrent à la fois
• le low-cost au service du consommateur I
sur le court, le moyen et le long courrier, ce qui
nécessite des appareils différents. De même, la
réduction des temps d’attente au sol entre deux
vols se heurte à la logique du hub, qui impose
des plages horaires de correspondances suffisamment larges.
À l’opposé de la stratégie de mimétisme, les
firmes installées peuvent contrer l’offensive des
low-cost en misant sur la différenciation de leur
produit. Il s’agit là d’une stratégie classique en
microéconomie : plus les produits sont différenciés entre eux, moins la concurrence par les prix
joue. Dans le cas de l’aérien, la différenciation
porte essentiellement sur la clientèle affaires,
qui est le segment le moins sensible au prix et le
plus demandeur de variété de services.
Le « revenue management »
Le « revenue management » consiste à élaborer des
grilles tarifaires qui définissent l’évolution du prix du
billet en fonction du taux de remplissage de l’avion
et de la date de réservation par rapport à la date
de départ. Chaque grille se compose donc de paliers
tarifaires (appelés « classes tarifaires »), auxquels
est associée une proportion de sièges de l’avion. Par
exemple, le premier palier proposera un billet à 30 euros
mais ne concernera que les 20 premiers sièges vendus.
Une fois ces vingt premiers sièges vendus, le second
palier tarifaire à 40 euros s’enclenchera, etc. La date
de réservation par rapport à la date de départ entre
également en ligne de compte : même si les places d’un
palier tarifaire ne sont pas toutes vendues, le palier
sera fermé automatiquement à une certaine date (par
exemple J-15 avant le départ) et le tarif passera au
palier suivant. Cette fermeture de palier vise à éviter
les comportements d’attentisme de la clientèle, qui
seraient sinon tentés de différer l’achat de leur billet
jusqu’au dernier moment. De plus, il est logique de
faire payer plus cher les billets achetés peu de temps
avant le départ : les clients sont souvent des hommes
d’affaires qui n’ont pas pu programmer à l’avance leur
vol ou des personnes dans l’obligation de se rendre à un
événement imprévu.
Tout l’art du « revenue management » consiste, à partir
de données historiques et de modèles de prévision,
à bien analyser le comportement de la demande sur
une ligne aérienne, afin de définir le profil de grille
tarifaire qui maximisera la recette. Si une grille tarifaire
est trop basse, l’avion se remplira certes très vite mais
générera une recette totale faible. À l’inverse, si le
prix de départ est trop élevé, l’effet positif du prix sur
la recette totale sera compensé par un faible taux de
remplissage de l’avion.
6. Marché contestable : marché sur lequel les barrières à l’entrée
et à la sortie sont faibles. Sur un tel marché, il est difficile
d’augmenter les prix au-dessus des prix de concurrence sans
susciter aussitôt l’entrée de nouveaux producteurs.
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En dernier lieu, certaines compagnies historiques, à défaut de se muer elles-mêmes en
­opérateur low-cost, tentent de lancer leur propre
filiale à bas coûts. Cette stratégie de dédoublement est classique et se retrouve dans d’autres
industries, menacées par une nouvelle concurrence. Ainsi, face à l’arrivée des génériques, les
leaders de la pharmacie ont réagi en lançant leur
propre filiale dédiée à cette a
­ ctivité.
Cette stratégie permet de capter les deux
types de clientèle à la fois, sans avoir à baisser
le prix du produit premium. Une baisse du prix
du produit « premium » peut en effet s’avérer
néfaste pour l’entreprise : elle exerce non seulement un effet direct sur la recette totale, mais
également un effet de réputation négatif
auprès des clients. En effet, comment justifier a
posteriori les prix élevés pratiqués dans le passé,
pour une prestation identique ?
La stratégie de dédoublement n’est toutefois
pas sans risques :
– il n’est pas sûr que les deux produits soient
toujours perçus par les consommateurs comme
différents. Dans ce cas, l’entreprise se heurte à
un phénomène de cannibalisation de ses ventes :
les produits vendus dans la filiale low-cost sont
autant de ventes perdues pour la maison mère.
Voilà sans doute pourquoi les compagnies
aériennes prennent soin de cantonner leur filiale
low-cost sur des destinations qu’elles ne desservent pas elles-mêmes, à l’image de Transavia, la
filiale low-cost d’Air France-KLM ;
– il est socialement difficile de faire coexister
les deux modèles simultanément : les personnels
de la filiale historique considéreront la filiale
low-cost comme une remise en cause implicite
de leur statut. •
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Pour en savoir plus
Anguis M., Les Structures de consommation des ménages à
bas revenus, document de travail DREES, 153 p., 2006.
B eigbeder C., Le Low-cost, un levier pour le pouvoir
d’achat, rapport pour le ministère de l’Économie et des
Finances, 183 p., 2007 (téléchargeable gratuitement
sur : www.ladocumentationfrancaise.fr/rapportspublics/074000746/).
Cahuc P., Kramarz F., « Les ennemis de la concurrence et
de l’emploi », Commentaire, n° 114, p. 389 à 405, 2006.
Cetelem, Low-cost : le low-cost à la française, l’Observateur,
35 p., 2006.
Dresner M., Lin J.-S. C. et Windle R., “The Impact of LowCost Carriers on Airport and Route Competition”, Journal of
Transport Economics and Policy, n° 30, p. 309 à 328, 1996.
Goolsbee A., Syverson C., “How do Incumbents Respond
to the Threat of Entry ? Evidence from the Major
Airlines”, Quarterly Journal of Economics, MIT Press,
vol. 123, n° 4, p. 1611 à 1633, 2008.
Ito H., Lee D., Incumbent Responses to Lower Cost Entry:
Evidence from the U.S. Airline Industry, Brown University
Department of Economics, Paper n° 2003-22, 27 p., 2003.
Morrison S., “Actual, Adjacent and Potential Competition:
Estimating the Full Effect of Southwest Airlines”, Journal
of Transport Economics and Policy, n° 35, p. 239 à 256,
2001.
P erri P., Toujours moins cher, Karthala éditions,
190 p., 2006.
Rupp & Sayanak, “Do Low-cost Carriers Provide Low Quality
Service?” Revista de Análisis Económico, vol. 23, n° 1, p. 3
à 20, 2008.
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