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dossier Les défis de la fonction publique La rénovation de la politique de l’encadrement dirigeant de l’État : un premier bilan L’ Par Isabelle Roux-Trescases Fernand Braudel 1987 Déléguée pour la rénovation de l’encadrement dirigeant de l’État La gestion de l’encadrement dirigeant de l’État et la modernisation de l’action publique sont intimement liées. La place essentielle des cadres dirigeants de l’État, nommés pour la plupart en conseil des ministres, sur des emplois à la décision du gouvernement, et le rôle déterminant qu’ils jouent dans le pilotage et la mise en œuvre des politiques publiques, conduisent à porter une attention toute particulière à leur parcours, et à leur préparation à l’exercice des fonctions stratégiques. 26 / novembre 2013 / n°436 efficacité de l’action publique et la réussite du processus de modernisation engagé par le gouvernement reposent en effet largement sur les cadres dirigeants de l’État, à qui il revient d’assurer la conception, la conduite de projets à dimen sion transversale, l’accompagnement des transformations, l’intégration des pro blématiques de gestion des ressources, humaines et financières. Dès lors, une gestion active du vivier des hauts potentiels et des cadres dirigeants de l’État revêt une réelle importance pour la mobilisation des compétences et des talents nécessaires au succès. L’État s’est engagé à l’exemplarité dans la gestion de ses plus hauts cadres. Une société qui évolue vite se traduit par des attentes sans cesse renouvelées de la part de ses membres, et appelle, également, l’adaptation des managers et des agents publics. Les enjeux ne manquent pas, et nos cadres supérieurs, nos cadres dirigeants, sont appelés à relever et à accompagner tous ces défis. Placés au cœur de l’action publique, ils sont les moteurs de son adaptation. L’État doit pouvoir s’appuyer sur les meilleurs talents pour piloter ces projets et ces évolutions de grande ampleur. La détection des potentiels, et la mise en place d’un vivier interministériel de futurs cadres dirigeants, coordonnée par le secrétariat général du gouvernement : un dispositif récent, clef de voûte du dispositif Les actions, engagées récemment, visent à professionnaliser, décloisonner et féminiser la gestion de l’encadrement dirigeant de l’État. Afin d’en assurer le pilotage et l’animation, une administration de mission, très légère, sous la direction depuis décembre 2012 d’une déléguée interministérielle pour la rénovation de l’en cadrement dirigeant de l’État, est rattachée au Secrétaire général du gouvernement : la mission cadres dirigeants. Garantir un plus large accès aux postes à la décision du gouvernement, développer et diversifier les carrières, préparer, former les hauts potentiels aux fonctions de direction, et accompagner les cadres dirigeants dans l’exercice de leurs responsabilités, sont les missions qui lui sont confiées, dans le cadre, à vocation interministérielle, du secrétariat général du gouvernement. La responsabilité première de la mission cadres dirigeants est de préparer les nominations sur les emplois de cadres dirigeants en conseil des ministres. La nomination des directeurs d’administration centrale, des ambassadeurs, des préfets et autres cadres dirigeants, à la décision du gouvernement, n’exonère pas pour autant les autorités de proposition et de nomination d’une réflexion préalable sur l’adaptation, au profil de poste, des compétences, du parcours et du profil des candidats pres sentis ; d’où la nécessité de constituer un vivier interministériel. En complément de la gestion statutaire des corps issus de l’Ena et des corps techniques, notamment, il s’agit bien de professionnaliser la gestion des cadres dirigeants de l’État. Plusieurs fonctions découlent de cet objectif, que la mission cadres dirigeants assure en lien étroit avec les ministères : fonctions d’harmonisation et de coordination des pratiques pour la détection des potentiels ; fonctions de vigilance quant à l’objectivité des critères de sélection et au respect de la parité et de la diversité des profils ; fonctions de conseil et de soutien par la mise à dossier disposition des autorités de nomination d’un vivier de candidats susceptibles d’accéder aux emplois de cadres dirigeants ; fonctions de pilotage des processus interministé riels permettant l’accompagnement des carrières, fonctions d’évaluation de la mise en œuvre de ces dispositifs en proposant des axes d’amélioration concertés avec les ministères. De nouvelles méthodes pour veiller à la détection des talents Plusieurs avancées significatives ont été effectuées dans le domaine de la gestion de l’encadrement dirigeant, en lien avec la direction générale de l’administration de la fonction publique (DGAFP) et les ministères. Le dialogue interministériel peut désormais s’appuyer sur plusieurs référentiels de travail partagés qui permettent des convergences d’approche, d’outils, de pratiques, et des regards croisés : – les revues annuelles des carrières consti tuent le point d’appui de l’identification des cadres à potentiel au sein de chaque administration, de constitution, et de suivi du vivier interministériel ; – u n vivier des cadres dirigeants est, depuis deux ans, mis à la disposition des autorités de nomination, regroupant près de 1000 profils de cadres dirigeants en poste et en potentiel ; – le « profil commun des compétences managériales », grille d’évaluation des compétences requises des cadres diri geants, liées à l’action, à la relation, à l’intelligence des situations, constitue la référence pour l’inscription dans le vivier, l’évaluation et le développe ment des cadres dirigeants : c’est en effet en objectivant les compétences (savoir, savoir-faire, savoir-être) que nous pouvons positionner des profils sur des trajectoires de hauts potentiels et des postes stratégiques ; – un accompagnement spécifique est mis en œuvre pour les futurs cadres dirigeants inscrits dans le vivier, avec la possibilité de disposer d’un cycle de développe ment individuel et collectif, un bilan managérial personnalisé et un module de développement de la performance managériale : le cycle interministériel de management de l’État (Cime), qui en est à sa deuxième promotion et dont la mise en œuvre est confiée à l’Ena ; – un processus d’évaluation de la per formance et de modulation indemnitaire permet, au regard des résultats obtenus dans l’emploi, d’articuler l’évaluation annuelle de chaque cadre dirigeant et son indemnité de performance. Ces orientations sont discutées, validées par le comité des secrétaires généraux qui se réunit sous la présidence du secrétaire général du gouvernement, et déclinées par le réseau des délégués ministériels aux cadres dirigeants des ministères, sur lesquels repose largement la démarche. L’attention particulière à la détection des talents féminins pour faciliter un meilleur équilibre des nominations aux emplois supérieurs et d’encadrement dirigeant de l’État Transformer les administrations publiques, c’est aussi veiller à leur donner un visage plus équilibré, plus paritaire. L’État se veut exemplaire en la matière. Le gouvernement s’est engagé à atteindre, dès 2017, un objectif d’au moins 40 % de cadres féminins dans le flux des nominations aux emplois d’encadrement supérieur et dirigeant de l’État, en anticipant l’objectif fixé par le législateur pour 2018. La rénovation de la politique de gestion de l’encadrement dirigeant est aussi un levier de progrès pour la parité : la mixité dans l’accès aux fonctions de responsabilité prend appui sur les actions engagées à ce titre : anticiper les nominations, identifier les potentiels et les meilleurs talents, et constituer un vivier diversifié et décloisonné. Pour progresser encore, un nouveau dispositif a été mis en œuvre depuis le mois de mai 2013 : pour chaque nomination en conseil des ministres sur des emplois à la décision du gouverne ment, la proposition systématique de trois profils, dont un candidat de chaque sexe et au moins un candidat figurant dans le vivier interministériel. La promotion des femmes aux emplois de cadres dirigeants prend également appui sur trois types d’actions : – un suivi statistique, qui fait l’objet d’une veille auprès des ministères, et d’un compte rendu régulier en conseil des ministres ; – un dispositif d’écoute et d’échanges ; – une incitation des différents acteurs concernés à intégrer, le plus en amont possible, un meilleur équilibre, en portant une attention à la féminisation des viviers ; un colloque de sensibilisation sur les parcours au féminin – « Comment surmonter le plafond de verre dans la fonction publique ? » – a été organisé dans ce cadre le 15 octobre dernier, en coopération avec l’Ena. Les progrès sont réels : la féminisation concerne 31 % des nominations de cadres dirigeants et supérieurs de l’État depuis le 1er janvier 2013, en nette progression par rapport au taux de 24 % constaté pour l’année 2012. Pour les seules primonominations (premières nominations dans l’emploi), le taux de féminisation est de 33 %, en progrès par rapport à l’année 2012 (27 %). Il reste à concevoir de nouvelles méthodes, de nouveaux outils, pour développer encore le repérage des talents et des hauts potentiels féminins, et mieux les accompagner. Les programmes d’accompagnement pour accroître les compétences de cadres dirigeants et assurer leur développement L’offre de formations destinée aux cadres dirigeants de l’État et aux membres du vivier est adaptée aux enjeux de modernisation de l’action publique et au développement d’une culture managériale fondée sur les valeurs de service public, l’efficacité de l’action, l’évaluation, l’accompagnement du changement, le dialogue. Nous essayons aussi de développer une approche par parcours et par compétences, en complémentarité d’actions d’accom pagnement individuel et collectif. La mise en œuvre d’un programme de développement spécifique accompagne de manière ciblée et personnalisée l’ensemble des dirigeants suivis, notamment les femmes : accompagnement managérial à la prise de poste, coaching individuel, mentorat, accompagnement d’équipe de direction, bilan stratégique de carrière, cohortes de dirigeants… La mission cadres dirigeants veille, en lien avec le SGMAP et l’Ena en particulier, à ce que l’offre de formation soit adaptée aux attentes des ministères, aux besoins des / novembre 2013 / n°436 27 dossier Les défis de la fonction publique cadres ou futurs cadres dirigeants euxmêmes. Elle pilote et évalue à cette fin le programme interministériel de formation et de développement des cadres dirigeants de l’État et des membres du vivier en formulant les propositions d’évolution, notamment pour mieux coordonner ou mutualiser les actions, ouvrir les formations en tant que de besoin à d’autres cibles, adapter les modules proposés aux enjeux de l’action publique. De nouveaux défis et des objectifs concrets pour 2013-2014 Il faut saluer la dynamique collective qui s’est engagée autour de la gestion des cadres dirigeants. Tous les ministères, le Conseil d’État, la Cour des comptes, les 28 / novembre 2013 / n°436 inspections interministérielles, sont parties prenantes à la réflexion, aux propositions et aux actions développées dans le cadre des orientations fixées par le gouvernement en faveur d’une professionnalisation de la gestion et d’une plus grande diversité et mixité sur les emplois de cadres dirigeants. Bien sûr, le dispositif est de construction récente et nécessite la mobilisation durable, de tous, pour que l’évolution en cours porte pleinement ses fruits. Pour résumer en quelques mots les fac teurs – clés de succès et les priorités de demain, nous devons : mieux anticiper – notamment les mouvements, les nominations à venir –, améliorer – la prise en compte du vivier dans le processus de nomination –, équilibrer – la proportion de femmes nommées à des fonctions de cadre dirigeant –, poursuivre – la diffusion d’une culture partagée du management public – l’appropriation du profil commun de compétences managériales et son articulation avec les dispositifs d’évaluation –, adapter – l’offre de formation du vivier (Cime) et d’accompagnement des cadres dirigeants –, développer – la cohérence des parcours des cadres supérieurs et dirigeants. Autant de défis à relever… ■