Syndrome hépato-rénal – Hepatorenal syndrome
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Syndrome hépato-rénal – Hepatorenal syndrome
>>> Syndrome hépato-rénal Hepatorenal syndrome IP Arnaud Pauwels* Point forts Le syndrome hépato-rénal (SHR) est une insuffisance rénale fonctionnelle compliquant une cirrhose évoluée avec ascite. Son diagnostic repose sur des critères stricts, récemment actualisés. Le SHR de type 1 est d’installation rapide dans un contexte de défaillance multiviscérale, le plus souvent déclenché par une complication. Son pronostic spontané est catastrophique. L’administration combinée d’un vasoconstricteur splanchnique (terlipressine) et d’albumine permet d’obtenir un contrôle complet du SHR sans rechute à l’arrêt du traitement dans 25 à 30 % des cas. Le pronostic à distance reste néanmoins mauvais. Pour améliorer la survie à long terme des patients répondeurs, il est nécessaire de combiner ce traitement avec le TIPS ou la transplantation hépatique. La prévention du SHR de type 1 passe par la prévention et le traitement précoce de ses facteurs déclenchants (infections bactériennes, hémorragie digestive, hépatite alcoolique aiguë). Le SHR de type 2 correspond à une insuffisance rénale modérée, stable ou lentement progressive, dans un contexte d’ascite réfractaire. Lorsque la fonction hépatique le permet, la pose d’un TIPS s’accompagne d’une amélioration de la fonction rénale et d’un contrôle de l’ascite dans la majorité des cas. Mots-clés : Cirrhose – Syndrome hépato-rénal – Traitement – Terlipressine – Albumine. Keywords: Cirrhosis – Hepatorenal syndrome – Treatment – Terlipressin – Albumin. L e syndrome hépato-rénal (SHR) est une insuffisance rénale fonctionnelle compliquant une cirrhose évoluée avec ascite. Il résulte d’une vasoconstriction artériolaire rénale intense, responsable d’un effondrement de la perfusion * Service d’hépato-gastroentérologie, centre hospitalier, Gonesse. La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 1 - janvier-février 2008 rénale et du débit de filtration glomérulaire. L’histologie rénale ne montre que des lésions modérées, insuffisantes pour expliquer l’altération de la fonction rénale. Le SHR survient au stade ultime du syndrome de défaillance circulatoire de la cirrhose, caractérisé par une hypotension artérielle et une activation extrême des systèmes vasoconstricteurs endogènes. En fonction de son profil évolutif, on en distingue deux types : le SHR de type 1, qui correspond à une insuffisance rénale aiguë sévère, d’installation rapide dans un contexte de défaillance multiviscérale, le plus souvent déclenchée par une complication, principalement une infection bactérienne ; et le SHR de type 2, qui correspond à une insuffisance rénale modérée, stable ou lentement progressive, habituellement dans un contexte d’ascite réfractaire. En l’absence de marqueur spécifique, le diagnostic du SHR repose sur l’élimination des autres causes d’insuffisance rénale. Son pronostic spontané est catastrophique. Cependant, les progrès thérapeutiques réalisés ces dernières années laissent entrevoir des stratégies de prise en charge qui pourraient permettre d’améliorer la survie à long terme. Dossier thématique D ossier thématique Pathogénie Le SHR est la conséquence d’une hypoperfusion rénale sévère. Sa pathogénie est complexe, faisant intervenir plusieurs phénomènes. Vasodilatation artérielle splanchnique Le développement de l’hypertension portale au cours de la cirrhose est associé à une vasodilatation artérielle dans le territoire splanchnique par libération locale de substances vasodilatatrices, notamment de monoxyde d’azote (NO). Cette vasodilatation artérielle splanchnique évolue schématiquement en trois phases (figure). Dans un premier temps, la diminution des résistances vasculaires qui en résulte est compensée par une augmentation de la fréquence et du débit cardiaque (syndrome hyperkinétique). Puis, avec la progression de la maladie et de la vasodilatation artérielle, ce mécanisme devient progressivement insuffisant pour compenser l’hypovolémie artérielle efficace, et la pression artérielle diminue. Cela a pour conséquence une activation réflexe des systèmes vasoconstricteurs endogènes. La circulation splanchnique étant résistante aux effets de l’angiotensine II, de la noradrénaline et de la vasopressine, le maintien de la pression artérielle se fait au prix d’une vasoconstriction dans les territoires extrasplanchniques, et notamment rénal. Il 11 Dossier thématique D ossier thématique Changements Volémie artérielle efficace normale Débit cardiaque Hypovolémie artérielle efficace Vasodilatation artérielle splanchnique Résistances vasculaires systémiques Vasoconstriction extrasplanchnique Degré d'activation des systèmes vasoconstricteurs endogènes Cirrhose compensée Temps Ascite Hyponatrémie SHR de type 2 Figure. Évolution des perturbations circulatoires au cours de la cirrhose (d’après Arroyo et al. [2]). rénale préalablement à l’infection, et à la sévérité de l’épisode infectieux (7-9). L’hémorragie digestive et l’hépatite alcoolique aiguë (HAA) sévère sont deux autres facteurs déclenchants du SHR de type 1. Au décours d’une hémorragie digestive, la survenue d’une insuffisance rénale aiguë pose le problème du diagnostic différentiel entre nécrose tubulaire aiguë et SHR, favorisé par l’hypovolémie aiguë, les phénomènes de translocation bactérienne intestinale et une éventuelle infection (14). Dans l’HAA sévère, la cholestase, souvent très marquée, et une réponse inflammatoire intense caractérisée par une hyperproduction de cytokines, notamment de TNF-α, contribuent à la détérioration de la fonction rénale et au développement du SHR. En revanche, si les ponctions évacuatrices de grand volume, certains médicaments (AINS, IEC, sartans, dérivés nitrés) ou un traitement diurétique excessif peuvent favoriser l’apparition d’une insuffisance rénale, il n’est pas démontré que ces différents traitements puissent se compliquer d’un SHR de type 1. Diagnostic en résulte la rétention de sel et d’eau, la constitution d’une ascite, et à un stade plus tardif, l’apparition d’une hyponatrémie de dilution (1). Le SHR survient à la dernière phase de la maladie, caractérisée par une hypotension artérielle sévère, une hyperactivation des systèmes vasocontricteurs endogènes, et une vasoconstriction rénale extrême, responsable d’une chute du débit de filtration glomérulaire (2). Réduction du débit cardiaque Alors que le SHR de type 2 est principalement la conséquence d’une vasodilatation artérielle sévère, la survenue du SHR de type 1 est également associée à une diminution marquée du débit cardiaque (3). Les mécanismes en sont mal compris. La réduction du débit cardiaque pourrait être fonctionnelle, en rapport avec une diminution du retour veineux, comme le suggère la baisse des pressions cardiopulmonaires (2, 3). Mais il existe également une altération des fonctions cardiaques chronotrope et inotrope, qui pourrait être en rapport avec la cardiomyopathie associée à la cirrhose (4). Facteurs déclenchants Un facteur déclenchant est identifié dans 50 à 70 % des SHR de type 1 (5, 6). Il s’agit le plus souvent d’une infection bactérienne. Le rôle de l’infection du liquide d’ascite a été particulièrement bien étudié (7-9), mais d’autres types d’infection peuvent également déclencher un SHR de type 1 (10, 11). La réponse inflammatoire à l’infection est caractérisée par la libération d’une multitude de médiateurs endogènes, notamment de cytokines (TNF-α, IL-6), de NO et d’autres substances vasodilatatrices (8, 12, 13). Il en résulte une baisse du débit cardiaque et une augmentation de l’activité des systèmes vasoconstricteurs endogènes (3, 9). Le risque de survenue d’un SHR de type 1 est lié au degré d’altération des fonctions hépatique, circulatoire et 12 Le diagnostic de SHR est confronté à deux difficultés. La première est la difficulté d’évaluer la fonction rénale chez les malades cirrhotiques. Les tests standard (urée sanguine, créatininémie) et l’estimation de la clairance de la créatinine par la formule de Cockcroft surestiment le taux de filtration glomérulaire de ces patients qui ont une production d’urée et de créatinine diminuée du fait de l’insuffisance hépatocellulaire et de la réduction de la masse musculaire. La mesure de la clairance de la créatinine est plus précise, sous réserve d’un recueil complet des urines de 24 heures. L’International Ascites Club retient actuellement comme critère de réduction significative du taux de filtration glomérulaire chez les malades cirrhotiques une créatininémie supérieure à 133 µmol/l ou une clairance de la créatinine inférieure à 40 ml/mn (15). Ces critères sont très spécifiques, mais probablement peu sensibles. La deuxième difficulté est l’absence de marqueur diagnostique spécifique du SHR. En particulier, les critères classiques d’insuffisance rénale fonctionnelle (oligurie, natriurèse effondrée, osmolarité urinaire supérieure à l’osmolarité plasmatique) ne permettent pas de différencier le SHR d’une hypovolémie secondaire à une réduction du volume plasmatique (diurétiques) ou d’une nécrose tubulaire aiguë, qui sont les deux principaux diagnostics différentiels. De ce fait, le diagnostic de SHR ne peut être retenu qu’après avoir éliminé toutes les autres causes d’insuffisance rénale chez le malade cirrhotique. Les critères diagnostiques du SHR de l’International Ascites Club, établis en 1996 (15) et actualisés en 2005 (2), sont présentés dans le tableau I. Il faut : éliminer une néphropathie sous-jacente en vérifiant systématiquement la normalité du sédiment urinaire et l’absence d’anomalies rénales (obstacle, petits reins) en échographie ; s’assurer de l’absence de prise récente de médicaments néphro toxiques (aminosides, AINS, IEC, sartans, prazosine, dérivés nitrés) ; La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 1 - janvier-février 2008 Tableau I. Critères diagnostiques du SHR de l’International Ascites Club (2, 15). Les critères majeurs doivent être présents pour retenir le diagnostic de SHR. Les critères mineurs ne sont pas nécessaires mais apportent des arguments supplémentaires. vasoconstricteur et albumine (cf. infra) [2]. Ce traitement doit être administré chez les patients dont la fonction rénale ne s’améliore pas malgré une nette régression des signes d’infection. Critères majeurs Hépatopathie aiguë ou chronique avec insuffisance hépatocellulaire et hypertension portale évoluées. Diminution de la filtration glomérulaire, avec créatininémie > 133 µmol/l ou clairance de la créatinine < 40 mm/mn. Absence d’autres causes d’insuffisance rénale : • choc, • infection bactérienne non contrôlée, • prise de médicaments néphrotoxiques, • hypovolémie par pertes liquidiennes rénales (diurétiques) ou extra-rénales, • néphropathie organique (protéinurie < 500 mg/j, échographie rénale normale). Absence d’amélioration durable de la fonction rénale après arrêt des diurétiques et remplissage vasculaire par albumine intraveineuse (1 g/kg, jusqu’à un maximum de 100 g). Critères mineurs Diurèse < 500 ml/24 h Natriurèse < 10 mmol/l Osmolarité urinaire > osmolarité plasmatique Hématurie < 50 cell/champ Natrémie < 130 mmol/l éliminer une hypovolémie par pertes liquidiennes rénales ou extrarénales. En cas de traitement diurétique, celui-ci doit être interrompu quelle que soit la perte de poids. Un remplissage vasculaire doit être systématiquement réalisé. C’est un élément essentiel du diagnostic. Si l’insuffisance rénale est secondaire à une réduction du volume plasmatique, la fonction rénale s’améliore rapidement après expansion volémique, alors qu’aucune amélioration n’est observée en cas de SHR. Les modalités du remplissage vasculaire ont été récemment modifiées. Alors qu’il était initialement recommandé de perfuser 1,5 litre de sérum salé isotonique, on préfère maintenant recourir à l’albumine intraveineuse (1 g/kg, jusqu’à un maximum de 100 g) [2] ; éliminer une nécrose tubulaire aiguë, qui ne répond pas non plus au remplissage vasculaire. Ce diagnostic est suggéré par la survenue de l’insuffisance rénale au décours d’un choc hémorragique ou septique. Dans les cas difficiles, la réponse aux vasoconstricteurs peut aider à différencier le SHR de la nécrose tubulaire aiguë ; l’infection bactérienne, qui se complique souvent d’insuffisance rénale, pose des problèmes particuliers. Le plus souvent, cette insuffisance rénale est transitoire et régresse avec la guérison de l’infection. Mais il est maintenant bien établi qu’elle peut parfois évoluer vers un SHR de type 1. De ce fait, la résolution complète de l’infection n’est plus requise pour retenir le diagnostic de SHR, car cela pourrait retarder la mise en route du traitement par La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 1 - janvier-février 2008 Types cliniques de SHR On distingue deux types de SHR. Le SHR de type 1 est caractérisé par une insuffisance rénale aiguë rapidement progressive, avec un doublement de la créatininémie, qui dépasse 220 µmol/l, ou une diminution de moitié de la clairance de la créatinine, qui devient inférieure à 20 ml/mn en moins de 2 semaines (15). Son incidence chez les malades cirrhotiques avec ascite a été estimée à 18 % à 1 an et à 39 % à 5 ans (5). Il peut survenir spontanément, mais le plus souvent il existe un facteur déclenchant. Il s’intègre habituellement dans un tableau de défaillance multiviscérale, caractérisé par une détérioration rapide et sévère des fonctions rénale, hépatique (ictère, coagulopathie), cardiocirculatoire (hypotension artérielle), cérébrale (encéphalopathie) et surrénale. En l’absence de traitement, la médiane de survie est de 15 jours (5). À l’opposé, le SHR de type 2 est caractérisé par une insuffisance rénale stable ou lentement progressive, avec une créatininémie restant inférieure à 220 µmol/l, dans un contexte d’ascite réfractaire. Il représente la forme extrême de la dysfonction circulatoire de la cirrhose et peut évoluer vers un SHR de type 1 sous l’effet d’un facteur précipitant, notamment une infection bactérienne. Sa médiane de survie est de 4 à 6 mois. Dossier thématique D ossier thématique Traitement du SHR de type 1 Vasoconstricteurs et albumine L’administration combinée d’un médicament vasoconstricteur et d’albumine par voie intraveineuse est le traitement actuellement recommandé pour le SHR de type 1 (2, 16). Les analogues de la vasopressine (ornipressine, terlipressine) induisent une vasoconstriction splanchnique et systémique responsable d’une augmentation de la volémie artérielle efficace. Il en résulte, d’une part, une augmentation de la pression artérielle et de la pression de perfusion rénale et, d’autre part, une diminution de l’activité des systèmes vasoconstricteurs endogènes et de la vasoconstriction rénale (17). La terlipressine a l’avantage d’une meilleure tolérance. Son efficacité dans le SHR de type 1, suggérée par de nombreuses observations et études pilotes, a été récemment confirmée par trois études contrôlées randomisées (18-20). Les agonistes alpha-adrénergiques (midodrine, noradrénaline) ont également donné des résultats encourageants (21, 22), mais l’expérience reste encore limitée avec ces produits. L’albumine potentialise l’action des vasoconstricteurs (23). Elle améliore la fonction cardiaque et diminue la vasodilatation artérielle périphérique (9, 24, 25). Ces effets sont dus à son pouvoir d’expansion volémique, mais probablement aussi à sa capacité à fixer de nombreuses substances, notamment les acides biliaires, les cytokines et le NO. 13 Dossier thématique D ossier thématique La plupart des études thérapeutiques réalisées dans le SHR de type 1 ont utilisé la terlipressine en association avec l’albumine. Dans l’étude rétrospective multicentrique française ayant inclus 99 patients, une amélioration de la fonction rénale était observée dans 58 % des cas, avec une survie de 40 % à 1 mois et de 22 % à 3 mois (6). La méta-analyse de dix essais cliniques, permettant de regrouper un total de 154 patients, montrait un taux de réversibilité du SHR de 52 % et un taux de rechute à l’arrêt du traitement de 55 % (26). Dans l’essai contrôlé randomisé en double aveugle américain, ayant inclus 112 patients, une correction complète du SHR (créatinine < 133 µmol/l) sans rechute ultérieure était obtenue chez 27 % des patients du groupe terlipressine, contre 16 % dans le groupe contrôle (19). Enfin, dans l’essai contrôlé espagnol, ayant inclus 45 patients, une correction complète du SHR était obtenue dans 34 % des cas, versus 4,5 % dans le groupe contrôle (18). L’amélioration de la fonction rénale s’accompagnait d’un allongement de la survie (médiane de 70 jours contre 13 jours en l’absence d’amélioration). La terlipressine peut être administrée à la dose de 0,5 mg/4 h par voie intraveineuse (tableau II). Si la diminution de la créatinine est inférieure à 30 % après 3 jours, cette dose doit être doublée (2). L’albumine doit être systématiquement associée à la dose de 1 g/kg le premier jour, puis 20 à 40 g/j les jours suivants (2). Chez les patients répondeurs, ce traitement doit être poursuivi jusqu’à normalisation de la créatinine. On peut estimer que ce traitement permet d’obtenir un contrôle complet du SHR sans rechute à l’arrêt du traitement chez un quart à un tiers des patients. Le pronostic à distance reste néanmoins mauvais. Chez les patients répondeurs, il est donc nécessaire d’envisager des approches séquentielles, combinant le traitement vasoconstricteur-albumine avec le TIPS ou la transplantation hépatique, pour améliorer la survie à long terme. TIPS La pose d’un TIPS, en abaissant la pression portale et en augmentant le retour veineux, réduit l’hyperactivation des systèmes vasoconstricteurs endogènes et améliore la filtration glomérulaire (27). À la phase aiguë du SHR de type 1, ce traitement est souvent contre-indiqué en raison de la sévérité de l’insuffisance hépatocellulaire. Sa place se situe davantage en deuxième intention chez les patients répondeurs à l’association vasoconstricteur-albumine. Dans une étude canadienne portant sur 14 patients, le traitement médical permettait un contrôle complet du SHR chez 10 d’entre eux. Un TIPS était secondairement posé chez les 5 patients répondeurs dont la fonction hépatocellulaire n’était pas trop altérée (bilirubine < 85 µmol/l, Tableau II. Traitement recommandé dans le SHR de type 1 (2). Associer : Terlipressine 0,5 mg i.v. toutes les 4 heures, si diminution de la créatinine < 30 % à J4, doubler la dose Albumine 1 g/kg le premier jour, puis 20 à 40 g/j les jours suivants Chez les patients répondeurs, le traitement doit être poursuivi jusqu’à normalisation de la créatinine. 14 INR < 2, score de Child-Pugh < 12). Tous ces patients étaient en vie 6 à 30 mois après le TIPS, avec une fonction rénale normale (22). Transplantation hépatique La transplantation hépatique est le traitement de choix du SHR, mais elle se heurte à un double problème, de faisabilité d’une part et de morbidité d’autre part. En effet, lorsqu’elle peut être réalisée en urgence, les suites opératoires sont souvent difficiles, avec une aggravation initiale de l’insuffisance rénale (nécessitant le recours à la dialyse dans 35 % des cas), des complications plus fréquentes et une durée d’hospitalisation plus longue. Ultérieurement, il persiste une insuffisance rénale modérée, probablement en rapport avec la plus grande toxicité de la ciclosporine et du tacrolimus chez les patients dont la fonction rénale est altérée avant la transplantation. D’où l’intérêt d’un traitement par vasoconstricteur et albumine avant la transplantation, qui permet de prolonger la survie le temps nécessaire à son organisation et de diminuer sa morbi-mortalité immédiate (28). Traitement du SHR de type 2 On dispose de très peu de données concernant le traitement du SHR de type 2, qui se confond avec celui de l’ascite réfractaire. L’administration de terlipressine améliore la fonction rénale dans 70 à 80 % des cas, mais la récidive du SHR est constante à l’arrêt du traitement (29). Lorsque la fonction hépatocellulaire permet la pose d’un TIPS, celle-ci s’accompagne d’une amélioration de la fonction rénale et d’un contrôle de l’ascite dans la majorité des cas, avec une survie à 1 an de l’ordre de 70 % (29, 30). La réponse à la terlipressine permettrait de prédire l’efficacité du TIPS (29). Prévention du SHR La prévention du SHR de type 1 repose sur la prévention et le traitement précoce de ses facteurs déclenchants. Au cours de l’infection du liquide d’ascite, l’administration d’albumine (1,5 g/kg à J1, puis 1 g/kg à J3) permet de réduire l’incidence de l’insuffisance rénale et la mortalité à 3 mois chez les patients à haut risque (créatininémie > 90 µmol/l et/ou bilirubinémie > 70 µmol/l au moment du diagnostic) [31]. Il paraîtrait raisonnable d’étendre cette mesure thérapeutique aux autres infections bactériennes sévères, caractérisées par la présence d’un syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS), mais cela demande confirmation. La prophylaxie de l’infection du liquide d’ascite par la norfloxacine administrée au long cours chez les patients ascitiques à haut risque (existence d’une insuffisance rénale, d’une hyponatrémie et/ou d’une insuffisance hépatocellulaire sévère) diminue l’incidence de l’infection du liquide d’ascite et du SHR et améliore la survie (32). De même, chez les patients cirrhotiques hospitalisés pour hémorragie digestive, l’antibioprophylaxie diminue la fréquence des infections La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 1 - janvier-février 2008 bactériennes et pourrait donc réduire le risque de survenue d’un SHR. Au cours de l’HAA sévère, la pentoxifylline (400 mg x 3/j) diminue l’incidence du SHR (9 % contre 39 % dans un groupe placebo) et réduit la mortalité hospitalière (33). Le bénéfice de son association à la corticothérapie, qui est le traitement de référence de l’HAA sévère, mériterait d’être évalué. n Références bibliographiques 1. Schrier RW, Arroyo V, Bernardi M et al. Peripheral arterial vasodilation hypothesis - a proposal for the initiation of renal sodium and water-retention in cirrhosis. Hepatology 1988;8:1151-7. 2. Arroyo V, Terra C, Ginès P. Advances in the pathogenesis and treatment of type-1 and type-2 hepatorenal syndrome. J Hepatol 2007;46:935-46. 3. Ruiz-del-Arbol L, Monescillo A, Arocena C et al. Circulatory function and hepatorenal syndrome in cirrhosis. Hepatology 2005;42:439-47. 4. Lee SS. Cardiac dysfunction in spontaneous bacterial peritonitis: a manifestation of cirrhotic cardiomyopathy? Hepatology 2003;42:1089-91. 5. Ginès A, Escorcell A, Ginès P et al. 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