Item 37 Maltraitance - Facultés de Médecine de Toulouse

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Item 37 Maltraitance - Facultés de Médecine de Toulouse
ITEM N° 37 : MALTRAITANCE ET ENFANTS EN DANGER
PROTECTION MATERNELLE ET INFANTILE
OBJECTIFS :
- Repérer un risque ou une situation de maltraitance chez le nourrisson, l’enfant et
l’adolescent.
- Argumenter la démarche médicale et administrative nécessaire à la protection de la mère et
de l’enfant.
Auteurs : Pr Yves Chaix & Dr Danielle Leautier
Enseignant Référent : Pr. Yves Chaix ([email protected])
Version: 2008
POINTS ESSENTIELS :
- Les Enfants en danger sont constitués des enfants maltraités et des enfants à risque
- 18 000 Enfants sont signalés par an en France pour maltraitance
- La maltraitance a de multiples formes
- Le médecin qui doit protéger l’enfant a deux types de signalements à sa disposition :
judiciaire et administratif
- La prise en charge des enfants victimes passe également par la prévention et le repérage des
situations à risque
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PLAN :
1- Maltraitance et Enfance en Danger
1.1 DEFINITIONS
1.2 EPIDEMIOLOGIE
1.3 DIAGNOSTIC
1.3.1 Violences Physiques
1.3.2 Syndrome du Bébé Secoué
1.3.3 Abus sexuels
1.3.4 Négligences lourdes et maltraitances psychologiques
1.3.5 Tableaux particuliers
1.4 CONDUITE A TENIR
1.4.1 Les textes de loi
1.4.2 Le signalement
1.5 PREVENTION - FACTEURS DE RISQUES
1.5.1 FDR liés à l’enfant
1.5.2 FDR liés aux parents
1.5.3 Exemple de prévention
2- Protection Maternelle et Infantile
2.1 LEGISLATION
2.2 ORGANISATION
2.3 MISSIONS
2.3.1 En faveur des futurs parents
2.3.2 En faveur des Enfants de moins de 6 ans
2.3.3 Actions en faveur des Assistant(e)s Maternel(le)s et Etablissements d’Accueil
Collectif de la Petite Enfance
2.3.4 Activités de Planification et d’Education Familiale
2.3.5 Mission d’épidémiologie et de santé publique
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1- Maltraitance et Enfance en Danger (Pr Y CHaix)
1.1 DEFINITIONS
Selon l’Observatoire National de l’Action Sociale Décentralisée (O.D.A.S), parmi les
Enfants en Danger on doit distinguer :
- L’enfant maltraité défini par : tout enfant victime de violences physiques, d’abus sexuels,
de violences psychologiques, de négligences lourdes ayant des conséquences graves sur son
développement physique et psychologique
- L’enfant en risque défini par : tout enfant qui connaît des conditions d’existence qui
risquent de compromettre sa santé, sa sécurité, sa moralité, son éducation ou son entretien
mais n’est pas pour autant maltraité
1.2 EPIDEMIOLOGIE
Cet observatoire permet le suivi des signalements pour enfants en danger depuis plusieurs
années :
Enfants
Maltraités
Enfants en
Risque
Enfants en
Danger
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
17000
20000
21000
21000
19000
18500 18300
18000
18500 18000
41000
45000
53000
61000
64000
65000 65500
67500
67500 71000
58000
65000 74000
82000
83000
83500 83800
85500
88000 89000
De ces chiffres on doit retenir :
-une relative stabilité du nombre d’enfants maltraités et signalés : environ 18 000 enfants / an
-un meilleur repérage des enfants en risque avec un accroissement constant du chiffre des
enfants signalés pour situation à risque
Parmi les Enfants Maltraités en 2002 et 2003 la répartition était la suivante :
2002
2003
5600
5600
Violences
Physiques
5900
5000
Abus Sexuels
Négligences lourdes +
Violences
psychologiques
7000
7200
Il convient de préciser que le diagnostic de violences psychologiques reste un diagnostic
difficile.
1.3 DIAGNOSTIC
1.3.1 Violences Physiques
Les lésions traumatiques intéressent dans près de 80 % des cas des enfants de moins de 3 ans.
Le type des lésions est variable: il s’agit surtout de lésions tégumentaires dans 40 à 50 % des
cas (brûlures, ecchymoses, hématomes) ou de lésions squelettiques dans 30 à 40 % des cas
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(fractures); Les lésions viscérales sont plus rares (1 à 2 % des cas) mais représentent la
deuxième cause de décès dans la maltraitance.
Les lésions seront évocatrices de violences physiques du fait :
- D’un mécanisme particulier :
o Ex : plaies linaires, symétriques, au niveau des poignets évoquant une
contention par liens
o Ex : la brûlure accidentelle en éclaboussure, mal limitée, de profondeur
variable qui se distingue de la brûlure volontaire, plus circonscrite, de
profondeur uniforme, ayant la forme de l’objet appliqué
- De la coexistence d’éléments d’âges différents:
o Ex : l’existence de fractures anciennes avec cal osseux et de fractures plus
récentes
o Ex : l’existence d’ecchymoses, multiples, de couleurs différentes car d’âge
différent (récentes : bleu ou rouge si < 5 jours ; plus anciennes : jaune à
verte si 5 à 10 jours)
- Du siège de la lésion:
o Ex : les fractures de côtes, chez l’enfant de moins de deux ans, siégeant au
niveau de l’arc postérieur, sont évocatrices de sévices
o Ex : les ecchymoses à la face antérieure des tibias banales lors de
l’apprentissage de la marche
- De la forme de la lésion :
o Ex : arrondie du diamètre d’une cigarette dans les brûlures par cigarette ou
hématomes évoquant des traces de doigts
Le diagnostic sera également évoqué car les explications apportées par les parents
apparaissent:
- invraisemblables sur les circonstances de l’accident
- variables dans le temps ou selon l’interlocuteur
- absentes
- incompatibles avec l’autonomie ou le niveau de développement de l’enfant
(hématomes chez un nourrisson ou fracture diaphysaire chez un enfant qui ne
marche pas)
- ne justifiant pas le retard de recours aux soins
Les données de l’examen clinique devront être consignées par écrit et des photos couleurs
réalisées dans les lésions cutanées qui se modifient avec le temps.
Une démarche diagnostique rigoureuse sera entreprise pour éliminer un certain nombre de
diagnostics différentiels potentiels :
- il convient de distinguer les lésions cutanées dans le cadre de sévices
o d’hématomes secondaires à une pathologie de la coagulation (bilan
d’hémostase systématique à réaliser)
o de tâches cutanées constitutionnelles, comme la tâche bleue mongoloïde
observée au niveau de la région lombo-sacrée et du dos
o de lésions secondaires à des pratiques ethniques particulières : frictions
avec pièce de monnaies chauffées au niveau de la région dorsale dans le
cadre de pratique thérapeutiques rituelles dans les populations asiatiques
-
il convient de distinguer les fractures dans le cadre de sévices
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o de fractures multiples dans le cadre d’une pathologie osseuse d’origine
génétique appelée ostéogenèse imparfaite
o de fractures dans le cadre d’une pathologie de la minéralisation osseuse par
la réalisation d’un bilan phosphocalcique systématique
Un bilan radiologique de l’ensemble du squelette (holosquelette) systématique est réalisé
chez les enfants suspects de sévices physiques. En cas de doute, une scintigraphie osseuse
peut-être utile pour la mise en évidence de fractures récentes (hyperfixation) dans certains cas
difficiles à visualiser sur les radiographies standards. Le syndrome de Silverman désigne
spécifiquement les enfants victimes de sévices présentant sur le plan radiologique
l’association de fractures anciennes consolidées (cal), d’arrachements métaphysaires et de
décollements périostés (fractures diaphysaires non immobilisées).
1.3.2 Syndrome du Bébé Secoué
Il s’agit de la cause la plus fréquente des TC graves enfants < 1an (Ou Shaken Baby
Syndrome = (SBS). Il constitue une problématique spécifique au sein de la maltraitance
d’enfant. Il est définit par l’association chez un nourrisson < 2 ans (avec une moyenne d’âge
entre 3 et 6 mois) :
– hémorragie péricérébrale
– saignement oculaire
– et parfois de lésions fracturaires des membres
– sans signe extérieur de violence
Des études récentes retrouve une incidence de 21 à 24.6/100 000 enfants < 1an
La personne responsable des secousses est majoritairement un homme (père biologique ou
compagnon de la mère) mais parfois une femme (baby-sitter ou la mère).
D’un point de vue physiopathologique :
Le mécanisme à l’origine de l’hémorragie est celui de secousses chez un nourrisson
particulièrement fragilisé du fait :
- d’un rapport poids tête/poids corps élevé
- de l’hypotonie de la musculature axiale
- d’un cerveau encore immature avec une myélinisation en cours
- de l’existence éventuelle d’une hydrocéphalie externe qui augmente la mobilité du
cerveau dans la boite crânienne
Les conséquences des secousses seront triples avec :
- la rupture de veines ponts étirées par les mouvements antéro-postérieurs de la tête
constituant l’hémorragie péri cérébrale (sous durale et sous arachnoïdienne)
- la survenue de contusions bi-polaires (frontales et occipitales) par le traumatisme
cérébral sur la boite crânienne en avant et en arrière
- la survenue de lésions de cisaillement avec lésions axonales diffuses consécutives
au phénomène accélération/décélération induit par les secousses
L’œdème cérébral secondaire aux lésions sus décrites sera à son tour responsable de lésions
d’anoxo-ischémie aggravant le pronostic neurologique.
Sur la plan clinique :
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Il s’agit le plus souvent d’un nourrisson amené par les parents aux urgences avec un motif de
consultation non spécifique :
- signes respiratoires (apnée..)
- troubles digestifs (vomissements, anorexie…)
- neurologiques (irritabilité, convulsions, somnolence, coma)
- parfois; pâleur, bombement fontanelle, chute mineure
Le Fond d’Oeil (FO) retrouve dans la majorité des cas mais de façon non pathognomonique
(possibles dans les traumatismes accidentels mais moins fréquentes), des hémorragies
rétiniennes.
Les hémorragies en nappe profuses, ou les hémorragies du vitré associées sont fortement
évocatrices de sévices.
Ces hémorragies sont la conséquence de l’augmentation de la pression veineuse et/ou de
lésions directe des vaisseaux rétiniens secondaires aux secousses.
Les hémorragies rétiniennes peuvent être retrouvées après un accouchement par voie basse,
mais disparaissent en règle en trois semaines. Elles peuvent être observés après un massage
cardiaque externe.
Le Scanner Cérébral (TDM) en urgence confirme l’hémorragie péri-cérébrale sous durale
volontiers inter hémisphérique postérieure associée à des contusions parenchymateuses
polaires de topographie frontale et/ou occipitales. L’IRM cérébrale est particulièrement utile
pour la mise en évidence des lésions de cisaillement consécutives au phénomène
d’accélération décélération. Des lésions du tronc cérébral et de la moelle sont également
possibles lors de secousses violentes.
L’holosquelette est également indiqué dans cette situation à la recherche de fractures
associées en sachant que les fractures du crâne sont souvent absentes dans cette situation de
SBS.
Le pronostic de ce syndrome est particulièrement sévère :
La mortalité immédiate intéresse environ 8 % des enfants. Le pronostic développemental dans
cette situation est plus sombre que dans les traumatismes accidentels. La majorité présente des
séquelles surtout si l’on s’intéresse aux difficultés d’apprentissages évaluables qu’à partir de
l’âge de 6 ans :
- Baisse de l’acuité visuelle ou cécité : 34%
- Epilepsie : 33%
- Atteinte motrice (hémiparésie, tétraparésie) : 40%
- Microcéphalie acquise (atrophie cérébrale) : 33%
- Retard mental : 92 %
- Troubles du comportement : 50%
1.3.3 Abus sexuels
L’abus sexuel est définit comme la participation d’un enfant ou d’un adolescent mineur à des
activités sexuelles qu’il n’est pas en mesure de comprendre, qui sont inappropriées à son
développement psycho sexuel, qu’il subit sous la contrainte, la violence ou séduction , ou qui
transgressent les tabous sociaux. Il inclut toutes les formes d’attouchements ou de pénétration
sexuelle ainsi que des actes ne comportant pas de contact physique avec le corps de l’enfant :
voyeurisme, exhibitionnisme, utilisation d’enfants à des fins pornographiques …
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Les abus sexuels sont le plus souvent intrafamiliaux :
- soit inceste (acte : pénétration ou attouchement) mais également «climat
incestueux»
- le plus souvent révélation de l’enfant
- la constatation de lésion est rare
- concernent tous les milieux socioculturels
- les victimes sont majoritairement des filles
- les auteurs presque exclusivement de sexe masculin
La fréquence des abus sexuels atteints dans certaines études: 25 % de filles et 12 % de
garçons < 16 ans. On assiste ces dernières années à une augmentation des plaintes mais
pas nécessairement du nombre avec une visibilité qui augmente (médiatisation
importante) et une augmentation des faux positifs.
Les signes physiques sont rarement révélateurs :
- saignement vaginal ou rectal
- infection génito-urinaires ou maladies sexuellement transmissibles
- grossesse
Le plus souvent les signes sont non spécifiques :
- troubles de la personnalité (syndrome dépressif...)
- troubles du comportement (avidité affective non sélective, syndrome
hyperkinétique, conduites hypersexualisation)
- troubles des conduites (échecs scolaires, tentative d’autolyse, fugues, conduites
alimentaires, sommeil....)
- troubles psycho-somatiques (douleurs abdominales, énurésie et/ou encroprésie…)
Dans toutes ces situations l’examen génito-anal se réalisé par un médecin expérimenté, non
traumatisant en évitant de soumettre l’enfant à des examens répétés. En dehors des situations
d’agression sexuelles caractérisées (viol), l’examen pourra être différé pour être réalisé dans
les meilleures conditions possibles. En se rappelant qu’un examen négatif n’élimine pas la
réalité de l’abus.
1.3.4 Négligences lourdes et maltraitances psychologiques
La négligence ou carences sont définies par la non satisfaction des besoins
physiologiques et/ou affectifs de l’enfant.
La maltraitance psychologique ou cruauté mentale est définie par l’exposition répétée
d’un enfant à des situations dont l’impact émotionnel dépasse ses capacités d’intégration
psychologiques (humiliations, menaces répétées, dévalorisation ou marginalisation
systématique, exigence disproportionnée par rapport à l’âge de l’enfant , consignes éducatives
contradictoires…)
Il s’agit de deux formes de maltraitance de diagnostic particulièrement difficiles.
L’évaluation psychosociale et l’observation prolongée de l’enfant en milieu neutre
(hospitalisation) sont fondamentales dans ces cas. Dans ces formes de maltraitances sont
décrit des retards psycho intellectuel avec troubles du comportement et le nanisme psychosocial. Il s’agit d’un retard statural et parfois pondéral. L’hospitalisation enfant seul permet
souvent en quelques jours une amélioration de certains signes (« hospitalisme à rebours »).
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1.3.5 Tableaux particuliers
Le syndrome de Kramer contre Kramer
• Allégations de mauvais traitement de la part d’un des parents dans un contexte de
conflit
• Souvent sévices sexuels allégués
• Expose à la répétition des examens de l’enfant
• Fausses allégations 6 fois plus fréquentes contexte de divorce
• Forme de maltraitance psychologique
Le syndrome de Munchhausen
• Forme rare et grave de mauvais traitement
• Soit allégations de symptômes inexistants (forme passive) ou soit pathologie induite
(forme active)
• Le corps médical est utilisé comme acteur de la maltraitance avec demande instante du
ou des parents pour soigner l’enfant
• Souvent mère, formation médicale ou paramédicale
• Terrain psychologique particulier
• Diagnostic difficile
La Mort Subite Inattendue chez les Nourrissons (MSIN)
• Mortalité plus élevée dans la maltraitance chez les enfants de moins de 1 an : 1.5 /
100 000 (pour 0.4 à 0.2 / 100 000 chez les enfants plus âgés)
• Incidence infanticide parmi les « mort subites inexpliquées du nourrisson »: 1 à 5 %
dans les études anglo-saxonnes.
• Sous déclaration des morts suspectes chez les nourrissons de moins de 1 an (enquête
INSERM)
• Nouvelles recommandations de l’Haute Autorité de Santé dans MSIN (2007) avec
nécessité d’une autopsie systématique dans ces situations.
1.4 CONDUITE A TENIR
On peut définir 4 missions au médecin :
– Repérer
– Alerter
– Protéger
– Prévenir
Dans tous les cas, il devra travailler
– En collaboration
– Sans précipitation
– Dans le calme
Pour protéger l’enfant le médecin le plus souvent hospitalisera l’enfant. Une évaluation
psychosociale de la situation est toujours nécessaire. Il existe dans la plupart des
hôpitaux des unités d’accueil et de prise en charge des enfants victimes.
- Circulaire du 16 juin 1992 encourage création de cellules d’accueil spécialisées
- Circulaire du 27 mai 1997 demande la création Pôle de Référence Régionaux pour
la prise en charge des victimes de violences sexuelles
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-
Circulaire du 13 juillet 2000 étend les missions des Pôles de Référence aux
mineurs victimes de violences autres que sexuelles
1.4.1 Les textes de loi :
Le médecin dans ces situations doit avoir une bonne connaissance des textes de loi :
Le Code Pénal précise l’obligation de signaler :
« Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de mauvais traitement ou privations
infligées à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger
en raison de son âge, d’une maladie, d’un infirmité, d’une déficience physique ou psychique
ou d’un état de grossesse, de ne pas informer les autorités judiciaires ou administratives est
puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 Euros d’amende » (Article 434.3)
Le médecin est soumis au secret médical comme les autres acteurs de la santé :
« Le secret s’impose à tout professionnel de santé ainsi qu’à tous les professionnels
intervenants dans le système de santé » (Loi 4 mars 2002)
Mais la loi autorise aussi la levée du secret médical dans les situations de maltraitance :
Selon le code de Déontologie Médicale :
- Le médecin doit « être le défenseur de l’enfant malade lorsqu’il estime que
l’intérêt de la santé de celui-ci est mal compris ou mal servi par l’entourage »
- Le médecin « doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour protéger
l’enfant victime en faisant preuve de circonspection mais en n’hésitant pas si cela
est nécessaire, à alerter les autorités compétentes s’il s’agit d’un mineur de 15
ans ». (Art 43 & 44 Code de Déontologie médicale)
Selon le code de Procédure Pénale :
- « l’article 226-13 (qui régit le secret professionnel) n’est pas applicable à celui
qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de sévices ou de
punitions dont il a eu connaissance et qui ont été infligés à un mineur de moins de
15ans »
1.4.2 Le signalement :
Ainsi dans les situations de maltraitance le médecin pourra faire un signalement pour protéger
l’enfant. Deux types de signalement existent :
* Signalement judiciaire :
- en cas de maltraitance avérée
- en absence de collaboration des parents
- adressé au Procureur de la République au tribunal de grande instance ou à son
substitut
Le Procureur peut en fonction de la gravité :
- demander un ordre de placement provisoire (OPP) ou d’urgence (OPU)
- demander une enquête de police
- saisir un juge des enfants
- saisir un juge d’instruction
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Dans les suites de l’enquête, l’enfant peut :
- être rendu à ses parents avec ou sans mesure de protection (Aide Educative en
Milieu Ouvert = AEMO)
- placer au foyer de l’enfance, en foyer mère enfant, en famille d’accueil
* Signalement administratif :
- en cas d’enfant en risque
- avec la collaboration des parents
- à l’Inspecteur de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE)
Le signalement « porte à la connaissance » des autorités administratives ou judiciaires, la
situation de l’enfant (nom prénom date de naissance) domicilié à (adresse). Il devra contenir :
- le motif du signalement
- l’examen de l’enfant avec une description précise des lésions
- le comportement de l’enfant lors de l’examen
- les résultats des examens complémentaires
- les propos de l’enfant qui devront être rapportés entre guillemets sans
interprétation.
Les parents seront informés du signalement
1.5 PREVENTION - FACTEURS DE RISQUES
La prévention passe par la connaissance des facteurs de risque (FDR):
1.5.1 FDR liés à l’enfant
- au moment de la grossesse: grossesse non désirée ou pathologique, grossesse
multiple, mère isolée...
- au moment de la naissance: prématurité, handicap, séparation mère-enfant .
- après la naissance : les pleurs du nourrisson, les troubles du sommeil ou alimentation,
hyperactivité…..
1.5.2 FDR liés aux parents
- Carence affective, Troubles psychiatriques
- Alcoolisme et toxicomanie
- ATCD maltraitance (30%)
- Dysfonctionnement couple
- Parents jeunes, famille monoparentale et milieu socio économique défavorisé
- Isolement familial et social
1.5.3 Exemple de prévention
- Lien entre pleurs des enfants et secousses : 5.6 % des parents de 3259 enfants de
moins de 6 mois reconnaissent des gestes inappropriés en cas de pleurs (étude du Lancet en
2006)
- Plusieurs actions possibles dans la prévention du SBS :
* Plaquettes d’information concernant la conduite à tenir à adopter en cas de
pleurs distribués aux parents sortant de la maternité
* Sensibilisation des médecins pour ne pas banaliser les pleurs du nourrisson
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* Actions d’information sur les dangers des secousses et conduite à tenir en cas
de malaise destinées aux parents, assistantes maternelles et personnel de crèche.
2- Protection Maternelle et Infantile (Dr D Leautier)
2.1 LEGISLATION
− L’ordonnance du 2 novembre 1945 qui crée le service de Protection Maternelle et
Infantile avait pour objectif principal la réduction de la mortalité infantile : taux
dramatique de 110 pour 1000 en 1945 (3,7 pour 1000 en 2006).
− En 1982/ 1983, les lois de décentralisation confient aux départements les services de PMI.
− La loi du 18 décembre 1989 relative à "la protection et à la promotion de la santé de la
famille et de l’enfance" prévoit que l’Etat, les collectivités territoriales et les organismes
de sécurité sociale participent à la protection et à la promotion de la santé maternelle et
infantile. Toutes ces dispositions sont inscrites dans le Code de Santé Publique.
− La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance inscrit le service de PMI au
Code de l’Action Sociale et des Familles, précise la responsabilité du Président du Conseil
Général et élargit les missions de la PMI en renforçant la dimension de prévention
médico-sociale de son intervention.
− Les services départementaux de PMI constituent ainsi un vaste réseau reposant sur des
centres répartis sur l’ensemble du territoire national et regroupant plus de 10 000
intervenants. Leur rôle est axé sur la prévention précoce, l’éducation pour la santé, la
protection, l’accompagnement et le conseil aux familles dans une offre de service public
auprès des futurs parents et des enfants de 0 à 6 ans.
− Le service de PMI représente ainsi :
- un service clé d’une politique sociale départementale
- un maillon d’une politique de santé publique
- un maillon d’une politique de prévention en matière d’action médico-sociale
- un maillon d’une politique familiale
2.2 ORGANISATION
(art. L 2111 - 1 et L 2112 - 1 du Code de Santé Publique)
Le service de PMI assure :
− des mesures de prévention médicales, psychologiques, sociales et d’éducation pour la
santé en faveur des futurs parents et des enfants ;
− des actions d’accompagnement psychologique et social des femmes enceintes et des
jeunes mères de famille, particulièrement les plus démunies ;
− des actions de prévention et de dépistage des handicaps des enfants de moins de 6 ans
ainsi que de conseil aux familles pour la prise en charge de ces handicaps ;
− la surveillance et le contrôle des établissements et services d’accueil des enfants de moins
de 6 ans ainsi que le contrôle, la surveillance et l’accompagnement des assistants
maternels.
Ces compétences sont exercées sous l’autorité et la responsabilité du Président du Conseil
Général.
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Les personnels du service de PMI
Le service de PMI est dirigé par un médecin et comprend une équipe pluridisciplinaire
composée de personnels qualifiés, notamment dans les domaines médical, paramédical, social
et psychologique.
Les médecins recrutés comme titulaires doivent être spécialistes ou compétents qualifiés en
pédiatrie, ou gynécologie, ou obstétrique, ou psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, ou
santé publique, ou santé communautaire et médecine sociale, ou santé publique et médecine
sociale, ou peuvent être médecins généralistes par dérogation préfectorale exceptionnelle.
L’équipe médico-sociale est composée de médecins, sages-femmes, infirmières puéricultrices, psychologues, assistantes sociales, éducateurs… Ces personnels ont le statut de
fonctionnaires territoriaux.
Toute personne appelée à collaborer au service de PMI est tenue au secret professionnel. Cela
concerne les personnes qui y travaillent habituellement, mais également toutes celles qui
participent de façon temporaire à son action.
2.3 MISSIONS
2.3.1 En faveur des futurs parents :
Le service de PMI a pour mission d’organiser (art. L 2112-2 du Code de Santé Publique) :
− des consultations prénuptiales, prénatales et postnatales, et des actions de prévention
médico-sociale en faveur des femmes enceintes ;
− des actions médico-sociales préventives à domicile pour les femmes enceintes,
notamment des actions d’accompagnement si celles-ci apparaissent nécessaires lors d’un
entretien systématique psychosocial réalisé au cours du quatrième mois de grossesse ;
− des actions médico-sociales préventives et de suivi pour les parents en période postnatale, à la maternité, à domicile, notamment dans les jours qui suivent le retour à
domicile ou lors de consultations ;
Ces actions sont assurées à la demande ou avec l’accord des intéressées, en liaison avec le
médecin traitant et les services hospitaliers concernés.
En période prénatale :
− Examen médical prénuptial : supprimé par la loi du 20 décembre 2007
− Examens de prévention durant la grossesse :
La surveillance minimale obligatoire comporte 7 consultations médicales prénatales, une
consultation anesthésique, 3 échographies et un entretien psychosocial, individuel ou en
couple.
La première consultation prénatale a lieu avant la fin du troisième mois de grossesse et
donne lieu à la rédaction d’un certificat de déclaration de grossesse adressé à la Caisse
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d’Allocations Familiales. Les six consultations
mensuellement jusqu’au terme de la grossesse.
suivantes
sont programmées
Chaque consultation comporte un examen clinique, une recherche de l’albuminurie et
de la glycosurie. La détermination du groupe sanguin et le dépistage de la rubéole et de
la toxoplasmose sont systématiques lors du premier examen. Au 6ème mois de grossesse,
un dépistage de l’Hépatite B et une numération globulaire sont systématiques.
L’entretien systématique psychosocial est réalisé par une sage-femme ou un médecin, au
cours du 4ème mois de grossesse, dans l’objectif de mieux prendre en compte le contexte
socio-économique et le vécu psychologique de la grossesse.
Suite à cet entretien, des actions d’accompagnement à domicile sont proposées en cas de
difficulté, et assurées par la sage-femme, la puéricultrice ou la psychologue du service
de PMI. L’environnement psychologique de la grossesse est ainsi précocement pris en
compte (prévention de la maltraitance, repérage des souffrances psychiques…)
Carnet de Maternité :
Le service de PMI a pour mission d’organiser l’édition et la diffusion du carnet de
maternité (art. L 2112 – 2 du Code de Santé Publique).
Ce carnet est adressé gratuitement à toute femme enceinte, suite au premier examen
prénatal. Il est strictement confidentiel et couvert par le secret médical.
En période postnatale :
− Un examen clinique postnatal est obligatoire dans les huit semaines qui suivent
l’accouchement
− Une intervention précoce des professionnels de PMI auprès des parents est prévue au
cours du séjour à la maternité, en lien avec l’équipe hospitalière pluridisciplinaire, et à
domicile dans les jours qui suivent le retour.
2.3.2 En faveur des Enfants de moins de 6 ans :
Le rôle de la PMI s’inscrit dans le cadre de mesures générales relatives à la protection de la
santé des enfants ; la santé est ici envisagée sous un angle global (définitions OMS et Charte
d’Ottawa). Durant l’année 2000, plus de 520 000 enfants de moins de 6 ans ont été vus par les
services de PMI.
Le service de PMI a pour mission d’organiser (art. L 2112 – 2 du Code de Santé Publique) :
− Des consultations et des actions de prévention médico-sociale en faveur des enfants de
moins de 6 ans ainsi que l’établissement d’un bilan de santé pour les enfants âgés de trois
à quatre ans, notamment en école maternelle ;
− Des actions médico-sociales préventives à domicile pour les enfants de moins de six ans
requérant une attention particulière, assurées à la demande ou avec l’accord des intéressés,
en liaison avec le médecin traitant et les services hospitaliers concernés ;
− L’édition et la diffusion de documents : carnet de santé et certificats de santé.
NB : le carnet de santé est délivré gratuitement (item 33)
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Le service contribue également, à l’occasion des consultations et actions de prévention
médico-sociales, aux actions de prévention et de dépistage des troubles d’ordre physique,
psychologique, sensoriel et de l’apprentissage. Il oriente, le cas échéant, l’enfant vers les
professionnels de santé et les structures spécialisées.
En outre, le conseil général doit participer aux actions de prévention et de prise en charge des
mineurs en danger ou qui risquent de l’être (…).
Par ailleurs, la loi du 05 mars 2007 souligne la notion d’intérêt de l’enfant (art. L 112 – 4 du
Code de l’Action Sociale et des Familles) :
« L’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques,
intellectuels, sociaux et affectifs, ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes
décisions le concernant ».
Consultations:
Vingt examens médicaux à visée préventive sont à effectuer avant l’âge de 6 ans : 9 examens
au cours de la première année, 3 examens au cours de la deuxième année, 2 examens par an
pour les quatre années suivantes.
Les examens réalisés dans les huit jours qui suivent la naissance, au cours du 9ème et du 24ème
mois (item 33) donnent lieu à l’établissement de certificats de santé.
Ces examens peuvent être pratiqués par un médecin de PMI, lors d’une consultation, ou par
un médecin libéral au choix des parents.
Les consultations de PMI sont d’accès gratuit, ouvertes à tous sans conditions de ressources et
s’adressent aux enfants de 0 à 6 ans. Elles sont assurées par un médecin et une puéricultrice.
Elles ont pour objet d’assurer la surveillance de la croissance staturo-pondérale, du
développement physique, psychomoteur et affectif de l’enfant, ainsi que le dépistage précoce
des anomalies ou déficiences, la pratique des vaccinations. Des conseils de puériculture sont
donnés. L’enfant peut être orienté le cas échéant vers le médecin traitant, les services
hospitaliers, les structures spécialisées…
Les missions de PMI étant axées sur la prévention, les médecins ne sont pas autorisés à faire
de prescriptions thérapeutiques. Toutefois, selon la circulaire du 08 janvier 1988, les médecins
des structures de prévention peuvent prescrire dans certaines conditions particulières
(urgence…)
Bilans de santé en école maternelle :
Ils concernent les enfants de 3 – 4 ans et sont réalisés par un médecin de PMI et une
puéricultrice en présence des parents. Le bilan comprend un examen clinique, le dépistage des
troubles de la vision, de l’audition et du langage, le contrôle des vaccinations, l’appréciation
des rythmes de l’enfant, son adaptation scolaire…
Une liaison entre le service de PMI et le service de promotion de la santé en faveur des élèves
est ensuite établie en vue de transmettre au médecin de santé scolaire le dossier médical de
l’enfant, dans le respect du secret professionnel (art. L 2112 – 5 du CSP).
De plus, ces bilans donnent lieu à une analyse statistique départementale annuelle.
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Des actions médico-sociales préventives à domicile sont assurées par les puéricultrices et
proposées à tout parent précocement après la naissance de l’enfant.
Cet accompagnement représente pour les parents un soutien du processus de parentalité, une
aide en cas de difficulté (grossesses gémellaires, mères primipares, mères vulnérables, etc.). Il
vise aussi à surveiller le développement harmonieux de l’enfant et la qualité de la relation
précoce mère-enfant, à promouvoir l’allaitement maternel...
Le service de PMI a un rôle de prévention et de dépistage en matière de handicap, pour les
enfants de moins de 6 ans, ainsi que d’orientation vers les structures spécialisées type CAMSP
(Centre d’Action Médicosociale Précoce) en vue de prévenir ou de réduire l’aggravation du
handicap.
Il exerce aussi un rôle de conseil auprès des familles.
Rappel : création des MDPH (Maisons Départementales des Personnes Handicapées) par la
loi du 11 février 2005, sous tutelle des Conseils Généraux.
Enfin, les professionnels de PMI exercent un rôle fondamental et transversal au cours de
l’ensemble de leurs missions dans la prévention des maltraitances, ils interviennent dans les
situations de mineurs en danger ou qui risquent de l’être, en lien étroit et régulier avec le
service de l’Aide Sociale à l’Enfance.
2.3.3 Actions en faveur des Assistant(e)s Maternel(le)s et Etablissements d’Accueil
Collectif de la Petite Enfance
L’agrément, le contrôle, la surveillance et l’accompagnement des Assistant(e)s Maternel(le)s,
ainsi que leur formation, relèvent du service de PMI.
Le service est chargé d’organiser des actions d’information sur la profession d’assistant
maternel et des actions de formation initiale destinées à aider les assistants maternels dans
leurs tâches éducatives.
En ce qui concerne les Etablissements ou services d’Accueil des enfants de moins de 6 ans, le
service de PMI par délégation du Président du Conseil Général assure l’accompagnement des
promoteurs et procède à l’étude des dossiers de demandes d’ouvertures ou d’avis
conformément à la règlementation. Il assure le contrôle des conditions sanitaires et d’accueil
des enfants au sein de ces établissements ou services.
Centres de Loisirs et de Vacances :
En lien avec la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports, l’avis du médecin de
PMI est requis sur l’adaptation des locaux aux besoins et rythmes de vie des enfants de moins
de six ans, ainsi que sur les modalités d’organisation et de fonctionnement de ces centres.
2.3.4 Activités de Planification et d’Education Familiale :
Les Centres Départementaux de Planification et d’Education Familiale (CDPEF) assurent :
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− Des consultations médicales relatives à la maîtrise de la fécondité (contraception)
− La diffusion d’informations et des actions individuelles et collectives de prévention auprès
des jeunes portant sur la sexualité et l’éducation familiale
− Des entretiens de conseil conjugal et familial (préparation à la vie de couple et à la
fonction parentale)
− Les entretiens avant et après IVG.
De plus, ils peuvent, sous la responsabilité d’un médecin, assurer le dépistage et le traitement
de maladies transmises par voie sexuelle.
2.4.5 Mission d’épidémiologie et de santé publique :
Le service de PMI a pour mission d’organiser le recueil d’informations en épidémiologie et en
santé publique, ainsi que leur traitement, notamment à partir des certificats de santé.
Il est également chargé d’établir des états statistiques concernant les activités de son service et
la situation sanitaire du département.
QUELQUES REFERENCES UTILES :
(1) Dans la collection Progrès en Pédiatrie (Doin Editeurs) Pédiatrie sociale ou l’enfant dans
son environnement. Ouvrage collectif coordonnée par M. Roussey et O. Kremp.
(2) Dans la collection Conduites (Doin Editeurs) Maltraitance à Enfants et Adolescents. C.
Rey, B. Bader-Meunier et C. Epelbaum.
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