academie de paris

Transcription

academie de paris
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). ACADEMIE DE PARIS
Année 2014
MEMOIRE
Pour l’Obtention du Diplôme d’Etudes Spécialisées
d’Anesthésie-Réanimation
Coordonnateur : Monsieur le Professeur Didier Journois
COMPARAISON DE LA MESURE DU TRAIN-DE-QUATRE A
L’ADDUCTEUR DU POUCE EN ACCELEROMYOGRAPHIE AVEC
UN DISPOSITIF CALIBRE : le TOF WATCH SX® VERSUS UN
DISPOSITIF NON CALIBRE : le TOF SCAN®
Par
Nora Colegrave
Présenté et soutenu le 7 avril 2014
Directeur du mémoire : Madame la Docteur Valérie Billard
Relecture : Monsieur le Professeur Christophe Baillard
1
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). TABLE DES MATIERES
RESUME ............................................................................................................. 2
INTRODUCTION .................................................................................................. 4
MATERIELS ET METHODES ............................................................................... 14
RESULTATS ....................................................................................................... 19
A RESULTATS GENERAUX............................................................................. 19
B RESULTATS CONCERNANT LA CURARISATION .......................................... 21
1. L’intensité supra-maximale : ................................................................... 21
2. Phase de curarisation : ............................................................................ 22
3. Phase de décurarisation : ........................................................................ 24
DISCUSSION ..................................................................................................... 31
REFERENCES ..................................................................................................... 37
2
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). RESUME
Introduction :
La sous-utilisation des moniteurs de la curarisation lors des enquêtes réalisées ces dernières années
a amené une réflexion sur la simplification de leur utilisation. Le but de cette étude est de comparer
deux moniteurs de la curarisation, l’un dont l'intensité de stimulation est déterminée par une
calibration préalable, le TOF watch SX®, et l’autre récemment commercialisé dont l'intensité est fixée
arbitrairement, le TOF scan®.
Type d’étude : Pilote, prospective, observationnelle, monocentrique.
Matériels et Méthodes :
Les patients adultes, nécessitant une anesthésie générale avec intubation oro-trachéale et
curarisation entre juin et octobre 2013 à l’Institut Gustave Roussy étaient éligibles.
Les accéléromètres étaient installés sur les deux bras en abduction et délivraient une stimulation de
type train de quatre. Les données recueillies étaient :
-
L’intensité supra-maximale lors de la calibration du TOF watch SX®,
-
A l'installation de la curarisation : les délais respectifs des 2 appareils pour obtenir un rapport
T4/T1 à 70%, 50%, 10%, < 4 réponses et 0 réponse.
-
Lors de la décurarisation : le délai de réapparition de 1, 2, 3, 4 réponses puis d'un T4/T1 à
10%, 25%, 40%, 70%, 75% et 90%.
Ces délais étaient comparés par le test de Student, et présentés à l’aide de graphiques de Bland et
Altman.
Résultats :
Sur 32 patients étudiés, l’intensité supra-maximale de stimulation avec le TOF watch SX® est en
moyenne de 55 ± 8 mA (elle est fixe à 50 mA avec le TOF Scan).
Le délai pour obtenir une curarisation complète n’est pas significativement différent (p>0,05), mais
l’analyse selon Bland et Altman retrouve un biais à -26 secondes et des limites d’agrément entre -172
et +119 secondes ce qui montre une faible concordance entre les 2 appareils.
Pour obtenir une décurarisation complète (T4/T1 >90%), on ne retrouve pas non plus de différence
significative en minutes et le biais et les limites d’agrément sont étroites (biais à 0 min, limites [-4 ;
+4]) ce qui montre une bonne concordance entre les 2 mesures pour le réveil et l’extubation.
Conclusion :
La comparaison du TOF watch avec calibration de l’intensité et du TOF scan sans calibration retrouve
une bonne concordance pour la décurarisation complète et l’extubation mais une mauvaise
concordance pour le délai d’intubation, et les délais de réversion pharmacologique. Les deux
appareils ne sont donc pas interchangeables.
Mots clefs : Accéléromyographie, TOF watch SX®, TOF scan®, calibration.
3
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). INTRODUCTION
A INTERET DU MONITORAGE DE LA CURARISATION.
L’intérêt du monitorage de la curarisation a été mis en évidence depuis les années 19501,2.
Il concerne à la fois l’induction anesthésique pour déterminer le délai de curarisation permettant de
faciliter l’intubation oro-trachéale, puis il peut être utile en peropératoire pour quantifier le degré de
relâchement neuromusculaire nécessaire à certaines chirurgies. Il permet aussi de guider les
réinjections éventuelles de curares en cas de levée partielle du bloc neuromusculaire ou de guider la
réversion pharmacologique en fin d’intervention.
Enfin la mise en évidence d’une curarisation résiduelle en fin d’intervention reste fréquente
actuellement3,4, pouvant avoir des conséquences importantes en terme de morbi-mortalité. Le rôle
d’un monitorage de curarisation permettant de diagnostiquer l’absence de paralysie résiduelle a été
largement démontré5–7.
B SOUS-UTILISATION DU MATERIEL DE MONITORAGE
Des enquêtes de pratique récentes montrent que malgré toutes les études scientifiques parues
depuis cinquante ans et particulièrement ces 1dix dernières années, le monitorage de la curarisation
reste sous-utilisé.
Une enquête française publiée en 2008 par Duvaldestin et al8 montrait chez 1230 anesthésistes
répondant à un questionnaire :
- Un taux d’utilisation d’un monitorage de la curarisation dans 52% et 74% des cas si l’injection de
curare était unique ou répétée respectivement,
- Une réversion pharmacologique systématique, fréquente, épisodique ou exclue dans 6%, 26%, 55%
ou 13% des cas respectivement.
Le même type d’enquête, à plus grande échelle et parue en 2010 sur l’anesthésie menée aux EtatsUnis et en Europe retrouvait les chiffres suivants 9 :
- 2636 anesthésistes participant,
- 64.1% des praticiens américains et 52.2% des européens estimaient l’incidence d’une faiblesse
neuromusculaire cliniquement perceptible inférieure à 1% (P<0.0001),
4
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). - La réversion pharmacologique était moins fréquente en Europe qu’aux Etats-Unis (18% vs 34.2%,
respectivement ; P <0.0001), et le monitorage objectif était moins souvent disponible aux Etats-Unis
qu’en Europe (22,7% versus 70,2% ; P<0,001),
- 19,3% des européens et 9,4% des américains n’avaient jamais utilisé d’appareil de monitorage
neuromusculaire,
- La plupart des anesthésistes ayant participé à l’enquête répondaient que les moniteurs de
curarisation à usage quantitatif (ratio T4/T1) ou qualitatif (nombre de réponse visuelle ou tactile
après neurostimulation) ne devraient pas faire partie d’un monitorage régulier.
On voit donc l’intérêt de simplifier les procédures de monitorage, si l’on estime que c’est une des
raisons pour lesquelles le monitorage de la curarisation ne se fait toujours pas assez en pratique.
C MONITORAGE DE LA CURARISATION
1. Principe10 :
Le monitorage de la curarisation consiste à stimuler un nerf électriquement et à observer la
contraction musculaire réponse du muscle correspondant afin d’évaluer l’état de la jonction
neuromusculaire.
Il existe plusieurs couples nerfs-muscles utilisables avec des sensibilités différentes aux curares et des
délais de curarisation-décurarisation différents. Le nerf ulnaire avec l’adducteur du pouce est le
couple le plus utilisé car c’est le plus pratique à mettre en œuvre et sa sensibilité à la curarisation est
corrélée à celle des muscles du pharynx, d’où son utilité pour le diagnostic de paralysie résiduelle.
2. Le train de quatre ou Td4 :
Introduit en 1970, le Td4 est un type de neurostimulation.
Il correspond à quatre stimulations d’intensité supra-maximale à 2Hz (soit toutes les 0,5 secondes). Il
est nécessaire de laisser au moins 10s entre chaque Td4 (cela pourrait modifier l’estimation de la
curarisation par un délai trop bref).
Ce mode de stimulation repose sur l’observation que l’augmentation de la fréquence de stimulation
s’accompagne de l’apparition d’une fatigue musculaire liée à la diminution de la libération
d’acétylcholine à chaque impulsion en cas de bloc non dépolarisant.
Le train de quatre correspond au nombre de réponses suivant ces quatre stimulations.
-
S’il n’y a pas de curarisation, on obtient quatre réponses.
5
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). -
La perte d’1 réponse correspond à un blocage neuromusculaire de 75-80%
-
La perte de 2 réponses correspond à un blocage neuromusculaire de 85 %.
-
La perte de 3 réponses correspond à un blocage neuromusculaire de 90 %
-
La perte de 4 réponses correspond à un blocage neuromusculaire de 98-100 %
Le rapport T4/T1 est obtenu en divisant l’amplitude de la 4e réponse sur l’amplitude de la 1e réponse
et permet ainsi la mesure du bloc neuromusculaire après l’utilisation d’un agent curarisant non
dépolarisant.
Pour évaluer les réponses au Td4, il existe des méthodes discrètes (visuelle, tactile) ou quantitatives
basées sur la mesure de différents types de réponse (force, accélération, EMG…).
TOF ou train de quatre
3. L’accéléromyographie (AMG) :
La méchanomyographie (MMG) a été considérée de nombreuses années comme étant le gold
standard pour la quantification d’un bloc neuromusculaire11.
L’accéléromyographie est une technique qui a été pour la première fois décrite en 198812.
L’accéléromyographie mesure l’accélération isotonique du muscle ainsi stimulé.
Ce dispositif est basé sur la 2e loi de Newton :
Soit Force = Masse* Accélération
En considérant la masse constante, la force du muscle peut être calculée si l’accélération est
mesurée. Le mouvement du muscle génère un courant dans le matériau piézoélectrique corrélé à
l’accélération.
Depuis, son usage s’est imposé en pratique de par sa simplicité d’utilisation et de par son faible coût
comparé à la méchanomyographie.
6
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). L’accéléromyographie permet de diminuer l’incidence de la curarisation résiduelle, en étant
supérieure à un monitorage subjectif (tactile ou visuel) ou à l’absence de monitorage5,13,14.
Il existe une bonne concordance entre l’AMG et la MMG, même si les résultats ne sont pas
interchangeables15–17.
4. Critères de qualité d’un monitorage neuromusculaire :
a. Préparation de la peau :
Propre et nettoyée avec de l’alcool pour diminuer l’impédance cutanée.
b. Préparation des électrodes :
De chaque côté le long du nerf à stimuler, d’une distance de 3-6 cm entre elles, avec une taille
d’électrode entre 7 et 11 mm pour éviter une diminution de l’intensité de la stimulation, et enfin
avec le pôle négatif en distalité.
c. Température :
Les variations de température centrale modifient la pharmacodynamie et pharmacocinétique des
curares. De plus une température cutanée trop basse entraîne une augmentation de l’impédance
cutanée et peut faire varier l’intensité du courant, c’est pourquoi il est important de monitorer la
température cutanée et la température centrale.
d. Stabilisation du signal18,19 :
Il est théoriquement souhaitable d’avoir une valeur contrôle initiale stable pendant au moins 2 à 5
minutes avant l’injection du curare. Cette stabilisation peut être obtenue en stimulant par des
simples twitch ou des Td4 (période de stabilisation d’environ 20 minutes) mais peut être réduite à 25 minutes en réalisant initialement une stimulation tétanique de 50 Hz pendant 5 secondes. En
l’absence de stabilité obtenue, cela peut entraîner des variations de hauteur de twitch par la suite.
e. Immobilisation :
Le but est d’éviter tout mouvement du bras et de l’avant-bras stimulés car les moniteurs de
curarisation y sont très sensibles.
f. Précharge17,20 :
Le fait d’utiliser une précharge de 75-150 g permet d’augmenter la précision des mesures. Elle
permet d’éviter que le pouce ne touche la paume durant la simulation et fausse ainsi la mesure.
g. Normalisation15,21:
L’AMG surestime la récupération neuromusculaire comparée à la MMG. Les valeurs de base de
l’AMG sont souvent proches ou supérieures à 1. Elles sont globalement supérieures à celles obtenues
en MMG.
7
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Un plus haut chiffre de rapport T4/T1 de base, avant curarisation, implique qu’un plus haut rapport
T4/T1 est nécessaire lors de la décurarisation pour exclure une paralysie résiduelle. Si un rapport
T4/T1 >90% est nécessaire en MMG pour exclure cette paralysie résiduelle, en AMG cette valeur est
probablement supérieure et tend vers 1.
Il est donc recommandé de normaliser (de rapporter les valeurs au rapport T4/T1 de base : en
divisant la valeur obtenue lors de la décurarisation par la valeur de base) pour augmenter la précision
du résultat11,17.
Exemple, si le taux contrôle est de 1,20 alors on doit attendre 1,08 rapport T4/T1 pour éviter une
curarisation résiduelle (90% de 1,20).
h. Calibration et recherche de l’intensité supra-maximale :
La hauteur du twitch de contrôle (T1) correspond à la hauteur du twitch lorsque le patient n’est pas
curarisé. Pendant la calibration, sa hauteur est normalement fixée à 100% et va servir de
comparaison pour des stimulations ultérieures. La hauteur du twitch peut être influencée par
l’importance du signal du capteur d’accélération ainsi que par l’intensité du courant de stimulation.
La calibration permet de contrôler ces deux facteurs.
En effet, l’intensité du signal fourni par le capteur d’accélération peut varier d’un patient à l’autre.
Afin d’établir une valeur de référence avant d’injecter le myorelaxant, la sensibilité du gain du
capteur est réglée pour obtenir un twitch de référence égal à 100%.
-
Pour obtenir cette valeur de référence, le courant est progressivement augmenté jusqu’à
obtenir une réponse musculaire et donc une hauteur du twitch maximale et stable à plus ou
moins 10%. A ce moment là, toutes les fibres musculaires innervées par ce nerf se
contractent. C’est seulement quand ce seuil et la hauteur du twitch ne sont plus influencés
par l’intensité du courant de stimulation, que l’on considère avoir obtenu la stimulation
supramaximale.
Intensité supra-maximale
Cette intensité dépend aussi de la fréquence de stimulation. Le courant maximal délivré par
les neurostimulateurs est de 60-80 mA. La durée de stimulation recommandée est de 200
micro sec, et doit rester inférieure à 300 micro sec car elle pourrait alors diminuer l’intensité
de la stimulation.
8
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Dans les recommandations de bonnes pratiques cliniques pour la réalisation d’études
pharmacologiques sur les curares non dépolarisants parues en 200711, il est recommandé de
calibrer l’accéléromyographe lors de l’induction anesthésique et d’expliquer dans l’étude la
façon dont est faite cette calibration.
Deux études mettent en évidence une différence de résultats en présence ou en absence d’une
calibration :
a- Capron et al en 200415 étudient les premiers comment utiliser l’AMG pour améliorer la
détection d’une curarisation résiduelle en pratique clinique régulière.
Ils mesurent la récupération neuromusculaire en comparant l’AMG et le MMG sur chaque bras.
L’AMG est soit calibré, soit non calibré ; et la récupération en cas d’AMG non calibré est exprimée
sous forme normalisée ou non normalisée. Au total 3 groupes de résultats sont comparés.
-
Groupe A non calibré non normalisé
-
Groupe B calibré non normalisé
-
Groupe B calibré normalisé
Il est calculé la valeur prédictive négative de valeurs de rapport T4/T1 avec l’AMG de 0,9 puis 0,95 et
1,0 pour détecter une curarisation résiduelle (correspondant à une valeur de MMG de 0,9)
Il est retrouvé une amélioration de cette valeur prédictive lorsqu’il y a calibration et normalisation et
ce quel que soit la valeur du rapport T4/T1 en AMG (0,9 0,95 ou 1,0).
Néanmoins, cette valeur prédictive négative ne devient acceptable que pour un rapport T4/T1 en
AMG au moins égal à 1,0 (avec des VPN devenant supérieure à 90%, calibré ou non calibré).
Rapport T4/T1 à l’AMG
0,9
0,95
1,0
Valeur prédictive négative
Calibré
Non calibré
Non normalisé
37[20-56]%
40[23-59]%
70[51-85]%
60[41-77]%
97[83-100]%
77[58-90]%
Non calibré
Normalisé
89[70-98]%
92[75-99]%
96[80-100]%
Tableau 1, VPN des différents TOF ratio avec AMG pour exclure une paralysie résiduelle (diagnostiquée avec un MMG).
b- La deuxième étude à étudier l’intérêt de calibrer ou non l’AMG est une étude publiée par
Schreiber22 en 2011.
Sont comparés chez 96 patients la dernière mesure faite en fin d’intervention avec un
accéléromyographe calibré à une mesure faite immédiatement après avec le même
accéléromyographe mais non calibré.
L’étude retrouve une discordance entre les deux mesures chez 88 des 96 patients. Le T4/T1 moyen
est de 1,03±0,12 (mesure calibrée) versus 1,01±0,19 (mesure non calibrée).
9
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Selon Bland et Altman, il existe un biais (moyen) à 0,01 +/- 0,07 et des limites d’agrément comprises
entre 0,15 et -0,15.
Graphique de Bland et Altman comparant les mesures calibrées et non calibrées,
Ligne noire épaisse=biais, Lignes noires fines=limites d’agrément
Dans cette étude, le degré de discordance augmente entre les deux types de mesures (calibrée ou
non) lorsque que la limite choisie du rapport T4/T1 passe de 1 à 0,9, ce qui va dans le sens des autres
études actuellement montrant que le seuil du rapport T4/T1 en AMG pour éliminer une curarisation
résiduelle, qu’il soit calibré ou non calibré, doit être égal ou supérieur à 1.
Dans ce cas il existe une bonne concordance entre les mesures calibrées et non calibrées.
D LES DEUX MATERIELS UTILISES DANS L’ETUDE
1. Le TOF watch® :
Le TOF watch SX® est un accéléromyographe. Il existe trois moniteurs dans la gamme TOF-watch
(modèles TOF watch®, TOF watch S®, TOF watch SX®).
10
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Alors que les modèles TOF-watch® et TOF-watch S® ont été développés pour l’utilisation clinique, le
modèle TOF-watch SX® a été plus spécifiquement conçu pour la recherche.
Ces trois modèles varient selon leur mode de calibration et aussi selon l’algorithme du rapport T4/T1.
Les deux modes de calibration suivants existent dans ces appareils.
1) Après quelques stimulations simples, le gain du capteur d’accélération est automatiquement
ajusté pour obtenir une hauteur du twitch de contrôle de 100%. Le courant de stimulation est
préréglé à 50 mA, mais il peut être modifié manuellement. La valeur par défaut d’intensité de
stimulation peut être ajustée dans le menu d’installation à des valeurs entre 0 et 60 mA. Avec ce
programme, l’accéléromyographe est calibré et prêt à l’utilisation en moins de 10 secondes.
2) Ce programme de calibration permet de déterminer pour chaque patient individuellement le
gain du capteur et le seuil de stimulation supra-maximal. Le moniteur détermine d’abord le
courant nécessaire pour obtenir une stimulation supra-maximale : L'intensité initiale est
automatiquement de 60 mA, la valeur affichée est alors de 100%. L'intensité est ensuite
diminuée par paliers de 5 mA jusqu'à obtenir une valeur de 90%. L'intensité obtenue est alors
majorée de 10% pour obtenir une stimulation supramaximale. La valeur de 100% est ensuite
affichée pour cette intensité.
Il stimule par la suite avec cette intensité supra-maximale (et ajuste automatiquement le gain du
capteur pour obtenir un twitch de contrôle de 100%). L’avantage par rapport au programme de
calibration 1 est sa plus grande précision dans la détermination du seuil de stimulation supramaximal. En contrepartie, la calibration prend un peu plus de temps ; environ 30 secondes sont
nécessaires avec ce programme de calibration
Le TOF watch® et le TOF watch S® ont un algorithme du rapport T4/T1 spécifique :
- Si avant l’injection du curare la deuxième réponse du train-de-quatre est plus importante que la
première, le moniteur fait automatiquement le calcul du rapport T4/T2 à la place du rapport T4/T1
habituellement effectué.
- Si malgré cette modification le quotient dépasse les 100%, il affiche seulement une valeur de
100%.
Le TOF watch SX®, utilisé dans cette étude

calibre en recherchant l’intensité supra-maximale ;

ne change pas le T4/T1, qui peut alors donner des valeurs supérieures à 100%.
Le mode d’installation est celui décrit plus haut pour tous les accélérographes.

Capteur piézo-électrique sur le pouce, maintenu par une bague en caoutchouc fournie ;

Deux électrodes le long du nerf ulnaire après nettoyage de la peau avec de l’alcool ;
11
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). 
Le capteur de température cutanée sur la peau du poignet ;

L’avant-bras et les doigts fixés, rendant le pouce mobile de manière isolée ;

Après l’induction, réalisation d’une calibration à la recherche de l’intensité supramaximale avant la mise en route d’une mesure répétée à intervalles réguliers (au moins
10 secondes entre chaque mesure).
2. Le TOF scan® :
Le TOF scan® est produit par Idmed.
Le but est la simplification de la procédure avec :

Un capteur piézoélectrique tridimensionnel, inclus dans un dispositif en caoutchouc
s’insérant sur la pince pouce-index ;
Capteur tridimensionnel

Une seule molette pour les réglages ;

Le choix de calibrer ou ne pas calibrer et de stimuler à une intensité suffisamment forte
pour être à priori supérieure à l’intensité supramaximale dans l’ensemble de la
population.
12
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). E RATIONNEL DE L’ETUDE
Les buts de l’étude sont donc :
a. D’étudier la dispersion de la valeur de l’intensité supra-maximale dans la population étudiée ;
b. De comparer deux appareils de monitorage de la curarisation :
- un accéléromyographe servant de référence et déjà utilisé par le passé dans de nombreuses
études le TOF watch SX®, qui sera calibré.
- versus un nouvel appareil disponible sur le marché, le TOF scan®, non calibré et dont
l’intensité de stimulation sera fixe à 50 mA.
Pour la curarisation et en particulier le délai d’intubation ainsi que pour la décurarisation et les
réinjections de curares ou la réversion de la curarisation puis pour l’extubation.
13
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). MATERIELS ET METHODES
L’étude s’est déroulée entre le 1er juin 2013 et le 1er novembre 2013, au bloc opératoire de l’Institut
Gustave Roussy, Cancer Campus Grand Paris, après accord de la commission scientifique des essais
thérapeutiques (CSET). Cette étude n’impliquait aucune modification des pratiques cliniques tant au
niveau des procédures que des agents anesthésiques utilisés.
A INCLUSION ET EXCLUSION
Etaient éligibles à l’inclusion tous les patients ayant une anesthésie générale en décubitus dorsal avec
utilisation de curares en vue d’une intubation orotrachéale et chez qui les deux bras restaient en
abduction avec possibilité d’installer des curamètres de manière bilatérale et de les utiliser pendant
la période per opératoire.
L’inclusion était réalisée à l’arrivée du patient au bloc opératoire.
Les chirurgies concernées étaient la chirurgie carcinologique digestive, gynécologique, ORL ainsi que
la chirurgie d’exérèse du sarcome.
Etaient exclus :
-
les patients nécessitant une induction en séquence rapide,
-
les chirurgies où un des bras n’était pas accessible à un monitorage de la curarisation,
-
les mineurs ou incapables majeurs,
-
les femmes enceintes,
-
les patients allergiques aux curares,
-
les patients ayant des critères d’intubation difficile.
B MATERIELS COMPARES DANS L’ETUDE
Les deux appareils utilisés étaient le TOF scan® (IDmed) un nouvel accéléromètre, versus un
accéléromètre de référence le TOF watch SX® (Alsevia pharma) validé en pratique clinique ; tous
deux ayant l’appellation CE.
14
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). C INSTALLATION DU PATIENT
Le patient était installé réveillé, avec les deux bras en abduction, deux mains en supination, avec
installation au choix d’un des deux appareils de monitorage de curarisation sur chaque avant-bras.
Le bras dominant était recueilli par interrogatoire auprès du patient à ce moment là.
La durée d’installation des deux appareils était notée, avec une approximation d’environ 5 secondes.
Le TOF watch SX® était installé selon les règles de bonne pratique clinique, comme indiqué sur la
photo suivante :
Le poignet et les doigts étaient fixés à l’appui-bras pour limiter les artéfacts de mesure liés à leur
mouvement éventuel. Les deux électrodes étaient placées sur le trajet du nerf ulnaire et le capteur
d’accélérométrie sur le pouce avec une bague permettant son maintien. On disposait par ailleurs un
capteur de température cutanée sur la peau.
Le TOF scan® était placé comme indiqué sur la photo suivante :
Les deux électrodes sur le trajet du nerf ulnaire et le capteur d’accélérométrie qui est disposé dans
une résine au niveau de la pince pouce-index.
15
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). D DEROULEMENT DE L’ANESTHESIE
Après préoxygénation et obtention d’une fraction expirée en O2>90%, l’induction était réalisée avec
du rémifentanil en AIVOC (objectif de concentration au site effet à 2-3 ng/ml), associé à du propofol
à 2-3mg/kg en bolus.
Le curare était ensuite administré : soit du rocuronium à 0,6 mg/kg ou de l’atracurium à 0,5 mg/kg.
Si la ventilation au masque s’avérait difficile ou impossible, le patient était d’emblée exclu de l’étude,
ainsi qu’en cas d’intubation difficile non prévue.
L’entretien de l’anesthésie était réalisé par un agent halogéné (desflurane ou sévoflurane) à objectif
de BIS entre 40 et 60, associé à du rémifentanil en AIVOC à objectif de pression artérielle entre 70%
et 130% de la valeur en préinduction.
Les patients avaient un monitorage standard de la fréquence cardiaque, pression artérielle, SpO2,
etCO2 maintenu entre 32 et 36 mmHg, BIS, associé à un monitorage de la température centrale et à
un réchauffement actif par une couverture chauffante à air pulsé (type Bair Hugger).
L’entretien de la curarisation était réalisé selon le type et la durée de la chirurgie par des bolus ou
une administration continue IVSE d’atracurium ou de rocuronium avec pour objectif un rapport
T4/T1 < 2 réponses.
E CRITERES DE JUGEMENT
1. Principal :
- Comparaison des délais du TOF scan® et du TOF watch® pour obtenir T4/T1> 90% en fin
d’intervention.
2.
Secondaires :
- Etudier la dispersion de l’intensité supra-maximale obtenue avec le TOF watch® au moment de la
calibration.
- Comparaison des délais du TOF scan et du TOF watch pour obtenir T4/T1 = 0 lors de la curarisation
initiale.
- Comparaison des délais du TOF scan et du TOF watch pour obtenir T4/T1 = 2, 3 ou 4 réponses
correspondant au moment d’une réinjection éventuelle ou d’une réversion pharmacologique.
- Comparaison des délais d’installation entre les deux matériels.
16
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). F RECUEIL DE DONNEES
A l’induction, la ventilation au masque était débutée après la perte de conscience. Pendant ce temps
là, on réalisait une calibration sur le TOF watch®, puis débutait une mesure toutes les 15 secondes.
Le TOF scan® n’était pas calibré, et après vérification de la bonne installation de l’appareil et
ajustement de l’intensité de stimulation à 50 mA une mesure était directement débutée toutes les 15
secondes.
En prenant comme T0 la fin du bolus de curare, les délais correspondant à la curarisation tels que :
rapport T4/T1<70%, <50%, <10%, nombre de réponses <4, T1= 0 (autorisant l'intubation) étaient
recueillies au niveau des deux appareils en parallèle. Les données à l’induction étaient recueillies en
secondes.
Pendant l'entretien de l'anesthésie, aucun comparatif n'était réalisé. La curarisation était guidée par
une mesure toutes les 5 minutes réalisée avec le TOF watch®.
Le recueil reprenait en fin d’intervention, avec décurarisation soit spontanée, soit obtenue à l’aide de
néostigmine à la posologie de 40 microg/kg associé à de l’atropine 20 microg/kg ou de sugammadex
à la dose de 2 ou 4 mg/kg en fonction de la profondeur de la curarisation. La réversion pouvait être
réalisée dès l’obtention de 2 réponses aux deux moniteurs de curarisation.
Le patient était réveillé après obtention d’au moins 90% au ratio T4/T1 sur les deux moniteurs de
curarisation. L’extubation se faisait quant à elle après arrêt de l’hypnotique et du morphinique relayé
au préalable par l’analgésie conventionnelle postopératoire, et obtention d’une réponse aux ordres
simples.
Les délais de décurarisation suivants étaient recueillies : T4/T1=1, T4/T1=2, T4/T1=3, T4/T1=4,
T4/T1>10%, 25%, 40%, 70%, 75%, 90%. Les mesures étaient toujours prises toutes les 15 secondes
avec les deux appareils. Les valeurs étaient exprimées en minutes.
Le T0 de récupération était l’heure d’obtention de 1 réponse au Td4 avec le TOF watch®.
Etait considérée vraie une mesure lorsqu’elle apparaissait à plus de 2 reprises sur un même appareil.
En même temps que les paramètres de décurarisation indiqués sur les deux appareils étaient
recueillis les facteurs d’influence potentiels : le type d’agent hypnotique utilisé ainsi que la valeur de
température centrale concomitante. Ces valeurs n’étaient relevées qu’une fois pour un couple de
réponse, lors de la survenue de la première réponse du couple.
G ANALYSE STATISTIQUE
Les données ont été exprimées en moyennes et écart-types.
Un test de Student a été réalisé pour comparer les délais obtenus entre les deux appareils. Un
résultat était considéré comme significatif si p<0,05.
17
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Par ailleurs, pour comparer les deux méthodes d'estimation du rapport T4/Tl (avec le TOF scan® ou
avec le TOF watch®) une analyse de Bland et Altman23 a aussi été utilisée.
C’est une méthode d’évaluation graphique qui permet de comparer deux méthodes de mesure
différentes d’une même grandeur24.
Cette analyse vise à calculer le biais et les limites d’agrément. Le biais est défini par la différence de
délai pour obtenir le même degré de curarisation avec les deux appareils. Les limites d’agrément sont
égales au biais plus ou moins deux écarts-type des différences calculées et représentent l’intervalle
de confiance à 95% de ce biais.
Biais et limites d’agréments étaient représentés graphiquement en fonction de la moyenne des deux
mesures pour chaque couple de mesure, lors des différentes étapes de disparition et de réapparition
des réponses au train-de-quatre lors de la curarisation puis de la décurarisation.
Calcul du nombre de sujets à inclure
Il s'agit d'une étude pilote, ayant pour but de comparer un accéléromyographe calibré le TOF watch®
versus un accéléromyographe non calibré le TOF scan®. Aucune étude similaire n’ayant été faite par
le passé, aucune donnée fiable sur la variabilité entre les patients n'était disponible pour permettre
de calculer un nombre de patients à inclure. Nous avons choisi d'inclure au moins 30 patients afin de
nous approcher d'une distribution normale des résultats.
Compte tenu des difficultés pratiques pour mettre au point la méthodologie de mesure et inclure les
patients, il n'a pas été possible de dépasser de beaucoup cet objectif pendant la durée d'un semestre
d'internat.
18
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). RESULTATS
A RESULTATS GENERAUX
1. Inclusion :
43 patients étaient éligibles à une inclusion, et parmi eux 6 ont été exclus durant le recueil, soit à
l’induction soit en peropératoire, suite à diverses raisons : changement de la position du patient dans
3 cas, message d’erreur délivré par l’appareil TOF watch® non corrigeable immédiatement dans 1
cas, intubation difficile dans 1 cas, hypotension sévère et prolongée à l’induction dans 1 cas.
Par ailleurs 5 patients ont été exclus pour recueil incomplet (partie sur la décurarisation non
complétée), lié à une déviation du protocole, ou lié au déplacement du capteur
d’accéléromyographie sur le pouce dans 1 des 5 cas.
Au final l’analyse statistique porte sur 32 patients.
Graphique 1, diagramme des flux
19
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). 2. Données manquantes :
Il existe des données manquantes pour lesquelles une extrapolation a du être faite : en effet, lors de
la curarisation ou de la décurarisation les deux moniteurs peuvent passer directement d’1 réponse
captée à 3 réponses par exemple ce qui fait que la récupération d’une 2e réponse n’a pas pu être
mise en évidence.
Par la suite, l’heure de l’apparition de la 2e réponse a été déduite rétrospectivement comme étant
celle de la plus proche réponse mise en évidence ultérieurement (la 3e, 4e,…). Le même procédé a
été appliqué pour toutes les données manquantes.
Le pourcentage de données extrapolées est de 28% (271 extrapolations sur un total de 960 mesures
recueillies lors de la curarisation et de la décurarisation, dont 121 pour le TOF watch® et 150 pour le
TOF scan®).
3. Caractéristiques démographiques :
32 patients ont été inclus dans l’étude, dont 16 femmes et 16 hommes, 29 ASA 1 ou 2 et 3 ASA 3.
L’âge moyen était de 72 ans (72 ± 7 ans). Le BMI moyen était de 25 kg/m² (25 ± 4) avec 17 patients
sur 32 au dessus de 25 kg/m² et 3/32 au dessus de 30 kg/m2.
Tous les patients inclus étaient droitiers.
4 patients ont été opérés de chirurgie ORL, 17 de chirurgie digestive, 6 de chirurgie gynécologique, 5
patients opérés pour l’exérèse d’un sarcome (de membre, pelvien ou rétropéritonéal).
La durée moyenne de la chirurgie était de 179 minutes (179 ± 113 minutes, minimum 20 minutes,
maximum 388 minutes).
4. Délai d’installation des 2 appareils :
Délai moyen de 84 ± 22 secondes pour le TOF watch® significativement supérieur à 37±12 secondes
pour le TOF scan® (p<0,001).
5. Cofacteurs pouvant influer sur la curarisation :
a. Curare utilisé
L’atracurium a été utilisé 27 fois tandis que le rocuronium a été utilisé 5 fois. Les modalités
d’administration et d’antagonisation sont résumées dans le tableau 2.
20
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Nombre de patients
Atracurium
Rocuronium
Bolus unique
6
3
Bolus itératifs
5
1
Bolus + IVSE
16
1
0,56±0,08
0,58±0,02
Non
8
0
Prostigmine
19
3
Sugammadex
0
2
Modalités d’administration
Dose bolus initial (mg/kg)
Réversion pharmacologique
Tableau 2, curares utilisés
b. Autres facteurs d’influence potentiels
Variable
Installation TOF watch côté dominant (D)
Hypnotique utilisé
Sévoflurane
Desflurane
Température centrale <35,5°
Nombre de patients
15/32
8/32
24/32
2/32
Tableau 3, facteurs d’influence de la curarisation
B RESULTATS CONCERNANT LA CURARISATION
1. L’intensité supra-maximale :
Pour le TOF watch®, l’intensité supra-maximale obtenue après calibration est en moyenne de 55mA
(avec un écart-type à 8,8 mA).
Pour le TOF scan®, l’intensité de stimulation est fixe à 50mA.
L’intensité de stimulation diffère donc entre les deux appareils chez 29 patients sur 32.
Le graphique suivant représente la répartition de ces intensités supra-maximales pour le TOF watch.
21
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Graphique 2, intensité supra-maximale par patient
2. Phase de curarisation :
Les délais moyens, lors de la phase de curarisation, pour obtenir une décroissance des réponses au
train de quatre puis pour l’obtention de 0 réponse ne sont pas significativement différents entre les
deux appareils (p>0,05 pour toutes les comparaisons de moyenne avec le test de Student).
Ces résultats sont mis en évidence dans un tableau numérique puis sur une représentation sous
forme d’histogramme :
Moyenne et écart-type
T4/T1 <70%
T4/T1 <50%
T4/T1 <10%
Td4 < 4 réponses
Td4 = 0 réponse
Délai TOF watch® (sec)
Délai TOF scan® (sec)
p
121± 49
148± 66
160± 84
165± 85
218± 90
136± 56
154± 64
161± 72
161± 72
191± 87
0,139
0,405
0,935
0,744
0,054
Tableau 4, délais moyens de curarisation et leurs écarts-types
22
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Graphique 3, délais moyens de curarisation et leurs écarts-types
Une représentation graphique de Bland et Altman permet de détailler les résultats concernant le
délai de curarisation suffisant pour l’intubation (T4/T1 = 0) :
Graphique 4, représentation de Bland et Altman pour les délais de curarisation complète pour le TOF watch et le
TOF scan.
Pour T4/T1 = 0, le biais calculé est de -26 secondes avec des limites d’agrément calculées entre -172
et +119 secondes.
8 patients ont un délai entre les 2 appareils < 5 secondes, et 18 patients ont plus d’une minute de
décalage. Cette différence peut aller jusqu’à 200 secondes (plus de 3 minutes) chez un des patients.
23
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). On observe des différences de délai extrêmement variables selon les patients pouvant être positives
ou négatives : le biais est relativement proche de 0 mais les limites d’agrément sont très larges : les 2
appareils ont une mauvaise concordance concernant la détection de la curarisation.
Les différences de délai entre les appareils pour chaque patient sont plus souvent négatives (20
patients) que positives (12 patients) pouvant représenter un retard du TOF watch par rapport au TOF
scan pour détecter la disparition des réponses à la stimulation.
3. Phase de décurarisation :
Le T0 de récupération est l’heure d’obtention d’1 réponse au Td4 avec le TOF watch®.
Lors de la décurarisation, les délais moyens obtenus pour la réapparition des réponses au train-dequatre sont significativement différents pour les deux appareils pour toutes les réponses hormis pour
les réponses T4/T1>25% ; T4/T1>40% et T4/T1>90%.
Le TOF scan® a des délais plus longs que le TOF watch® lors des phases de curarisation profonde
(p<0,05 pour T4/T1 1 réponse, 2 réponses, 3 réponses, 4 réponses et 4/4 >10%).
Puis ces délais ont tendance à devenir plus courts pour une curarisation résiduelle modérée (T4/T1
>25% et T4/T1>40% non significatif) et cette différence redevient significative pour des valeurs de
T4/T1 >70% et T4/T1>75% (p<0,05).
Enfin, cette différence disparaît pour l’obtention d’un T4/T1>90%. Il n’existe donc pas de différence
significative entre les deux appareils pour ce délai correspondant au moment à partir duquel le
patient peut être réveillé et extubé.
Ces résultats sont mis en évidence dans un tableau numérique puis sur une représentation sous
forme d’histogramme :
Moyenne et écart-type
Td4 > 1 réponse
Td4 > 2 réponses
Td4 > 3 réponses
Td4 > 4 réponses
T4/T1 > 10%
T4/T1 > 25%
T4/T1 > 40%
T4/T1 > 70%
T4/T1 > 75%
T4/T1 > 90%
Délai TOF watch® (min)
Délai TOF scan® (min)
Valeur de p
0
8,1 ± 5,6
12,5 ± 7,6
13,4 ± 7,5
15,5 ± 7,7
21,1 ± 10,3
23,7 ± 11,2
28,3 ± 13,4
30 ± 14,6
32,9± 13,3
3,8 ± 7,6
12,9 ± 9,7
17,8 ± 10,8
18,4 ± 10,6
18,6 ± 10,6
20,5 ± 11,1
22,7 ± 12,0
27,5 ± 13,5
29,4 ± 14,4
32,9 ± 16,1
0,008 *
0,0019*
0,0010*
0,0012*
0,0271*
0,2821
0,0865
0,0382*
0,0141*
1
Tableau 5, délais moyens de décurarisation,*p<0,05, différence significative
24
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Graphique 5, délais moyens de décurarisation et leurs écart-types
Ces résultats ont été également exprimés sous forme graphique, selon la méthode de Bland et
Altman aux trois étapes de curarisation résiduelle profonde, modérée et absente (compatible avec
un réveil et une extubation).
Ces graphiques sont représentés sur les pages suivantes.
a. Curarisation profonde :
Le T0 de récupération étant l’heure de survenue de la première réponse au train-de-quatre avec le
TOF watch, ces graphiques ne sont réalisés qu’à partir de la survenue de la deuxième réponse.
25
26
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). [ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Graphiques 6, 7, 8, 9, représentations de Bland et Altman concernant la curarisation profonde
Cette représentation est cohérente avec les résultats exprimés dans le tableau numérique ou sur
l'histogramme : le TOF scan® paraît avoir une vitesse de détection plus lente que le TOF watch® pour
les blocs profonds et la réapparition des premières réponses : les points correspondants aux patients
sont situés majoritairement au dessus du 0, avec des délais plus longs pour le TOF scan® et un biais
positif.
Ce résultat s’inverse à partir de la survenue de la 4/4e réponse avec T4/T1 > 25%, avec un biais qui
devient négatif, soit un TOF watch® qui détecte plus lentement la réapparition des réponses que le
TOF scan® pour la fin de la décurarisation.
Les limites d’agrément restent très larges pour l’étape de curarisation profonde ce qui montre
surtout une grande discordance entre les deux types de mesure.
o 1 réponse : biais 3,78 min (-11,026 ; 18,59)
o 2 réponses : biais 4,78 min (-10,90 ; 20,47)
o 3 réponses : biais 5,28 min (-10,88 ; 21,45)
o 4 réponses : biais 5 min (-10,59 ; 20,59)
o T4/T1> 10 % : biais 3,125 min (-11,80 ; 18,06)
27
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). c. Curarisation modérée :
28
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Graphiques 10, 11, 12, 13, représentations de Bland et Altman représentant la curarisation modérée
On observe moins de discordance lors des valeurs de curarisation modérée, en particulier à partir de
la récupération de T4/T1> 25% :
o T4/T1> 25% : biais -0,63 min (-6,96 ; 5,71)
o T4/T1> 40% : biais -0,97 min (-7,03 ; 5,10)
o T4/T1> 70% : biais -0,84 min (-3,84 ; 2,15)
o T4/T1> 75% : biais -0,59 min (-3,13 ; 1,94)
29
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). c. Absence de curarisation résiduelle :
Graphique 14, représentation de Bland et Altman concernant l’absence de curarisation résiduelle
Enfin, pour la valeur de T4/T1 >90% au TOF,
Le biais est nul et les limites d’agrément sont minimes : 0 (-4,11 ; 4,11).
La concordance entre les deux appareils est donc très bonne pour la décurarisation complète qui
débouche sur l’extubation.
30
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). DISCUSSION
A INTERPRETATION DES RESULTATS ET PERTINENCE CLINIQUE
1. Curarisation et délai d’intubation :
Lors de la curarisation, on n’observe pas de différence statistiquement significative entre le TOF
watch® avec calibration initiale et le TOF scan sans calibration et à intensité de stimulation fixe, en
particulier pour le délai d’intubation.
Néanmoins on peut noter une mauvaise concordance entre les deux appareils avec des différences
entre les deux mesures élevées pouvant aller jusqu’à plusieurs minutes pour certains patients
(limites d’agrément élevés). Ces différences de délais peuvent avoir des conséquences cliniques
importantes à l’échelle d’une induction anesthésique.
Il existe une grande variabilité interindividuelle dans les délais pour obtenir un TOF à 0 quel que soit
le moniteur utilisé.
2. Décurarisation et délai d’extubation :
Lors de la décurarisation les résultats diffèrent significativement au cours de toute la décurarisation
quasiment. Le TOF watch® est initialement plus sensible pour les blocs profonds, puis c’est le TOF
scan® qui devient plus sensible pour les blocs superficiels.
Néanmoins il existe une grande discordance entre les deux appareils au cours de la curarisation
profonde, s’amenuisant au cours de la décurarisation.
Ceci peut influencer les décisions de réinjection au cours de l’entretien de l’anesthésie et de
réversion pharmacologique en fin d’intervention : les deux appareils montrent des délais ayant des
différences considérables.
Ensuite ces différences s’amendent et on n’observe pas de différence significative pour l’obtention
d’une décurarisation complète (TOF 4/4 réponses >90%).
Le choix du moniteur n’influence donc pas a priori, la décision d’extubation ni le diagnostic de
curarisation résiduelle.
3. Interprétation :
Au total, lors de la curarisation on observe de grandes différences de délai entre le TOF scan®
(intensité fixe, sans calibration) et le TOF watch® (intensité variable déterminée après calibration de
31
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). l’intensité supramaximale) pour obtenir une curarisation complète et pouvoir intuber. De même on
retrouve une grande discordance lors de la curarisation profonde s’amenuisant lors de la
décurarisation et disparaissant pour l’extubation.
Le TOF scan® apparait moins sensible que le TOF watch® pour la curarisation profonde et de
sensibilité meilleure ou équivalente pour la curarisation modérée.
Les raisons pouvant expliquer ces différences sont les suivantes :
-
Le TOF scan® stimule à 50 mA soit une intensité moins forte que le TOF watch® (en moyenne
55 mA). Le fait de stimuler à une plus forte intensité peut recruter d’avantage de fibres
musculaires et afficher une réponse musculaire plus soutenue.
-
Les différences peuvent être liées aux différences de technologie de l’accélérométrie entre
les 2 machines :
o Le capteur de TOF watch® est décrit comme « tridimensionnel » captant les
mouvements dans 3 directions alors que le TOF scan® détecte dans deux dimensions
et peut être plus sensible à la position de la main.
o Par ailleurs, le rapport signal-bruit du TOF scan® dans la version utilisée pour l’étude
a été jugé insuffisant pour les blocs profonds par son concepteur et corrigé depuis.
Cette mauvaise performance pour monitorer les blocs profonds, n’est donc pas
forcément présente sur les versions actuelles.
o En plus de la différence d’intensité de stimulation des deux appareils, une différence
de gain entre les deux appareils pourrait expliquer une sensibilité différente.
o Enfin, le fait même d’avoir un capteur mettant en charge le pouce pour le TOF scan
comparé au TOF watch® qui possède un capteur n’entravant pas les mouvements du
TOF watch® pourrait expliquer la différence de résultats obtenue.
Les délais d’installation du TOF watch® et du TOF scan® diffèrent statistiquement. Le TOF scan® est
plus rapide à mettre en place, ce qui, en pratique clinique est important : la facilité d’utilisation
pourrait être un argument qui permettrait d’augmenter la fréquence d’utilisation ce type de
matériel.
Par ailleurs, sur les 43 patients inclus initialement, 11 ont dû être exclus dont 2 à cause d’un message
d’erreur du TOF watch ou d’un déplacement du capteur du TOF watch®. Sur un si petit effectif il est
important de noter une moindre maniabilité du TOF watch® comparé au TOF scan® en pratique.
32
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). B COMPARAISON AUX ETUDES PRECEDENTES
1. Intensité supra-maximale :
Cette étude est comparable aux études précédentes concernant la dispersion de l’intensité supramaximale.
Kopman, en 198425 a été le premier à rechercher la valeur de l’intensité supra-maximale avec l’aide
d’un neurostimulateur et d’un enregistrement de la force isométrique chez 38 patients. Il retrouvait
des intensités supra-maximales comprises majoritairement entre 20 mA et 60 mA (à l’exception d’un
patient à 70 mA et de trois patients à 15 mA).
Par ailleurs, Helbo-Hansen en 199226 a calculé l’intensité minimale chez 24 patients pour avoir une
bonne précision et répétabilité des mesures du train-de-quatre. La conclusion était qu’il fallait au
moins stimuler à 45 mA pour obtenir une bonne précision.
Driesser27, en 2005 a étudié dans une population de 22 nourrissons et nouveau-nés la dispersion de
cette intensité supra-maximale retrouvée en moyenne à 53+/-10 mA, maximum 60 mA et minimum
25 mA (calibration automatique du TOF watch® ou bien intensité supra-maximale recherchée
manuellement).
L’étude présentée ici retrouve des intensités supra-maximales comparables comprises entre 26 mA
et 60 mA, avec une moyenne de 55 mA+/-8,8. De même le fait de stimuler à une intensité fixe de 50
mA sur le TOF scan est ainsi justifié.
2. Etudes ayant étudié la calibration :
Cette étude retrouve une bonne concordance entre un moniteur de curarisation calibré, le TOF
watch® et un autre moniteur, le TOF scan®, sur le bras controlatéral mais non calibré. Cette
concordance apparait lors de la phase de décurarisation, en particulier au-delà d’un ratio T4/T1>
10%.
Cela s’oppose aux recommandations d’utilisation du monitorage de la curarisation dans les essais
scientifiques parus en 200711 qui recommandent l’utilisation d’une calibration lors des études.
Ces recommandations sont basées sur plusieurs études suggérant l’intérêt d’une calibration ou la
discordance entre accéléromyographe non calibré et méchanomyographe.
-
Samet et al ont publié en 200516 une étude ayant pour objectif principal de comparer en fin
d’intervention chez 40 patients une mesure par méchanomyographie et une mesure
controlatérale par accéléromyographie non calibrée. Ils retrouvent une mauvaise sensibilité
(70%) et spécificité (88%) pour détecter une paralysie résiduelle comparé à la
méchanomyographie, pouvant suggérer que le fait de calibrer améliorerait les mesures.
33
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). -
Capron et al en 200415 avaient aussi travaillé sur ce thème en comparant la
méchanomyographie et l’accéléromyographie en controlatéral en fin d’intervention avec
plusieurs groupes : un groupe calibré, un groupe non calibré et normalisé et un dernier
groupe non calibré et non normalisé. Les résultats de ce groupe montrent dans leur objectif
secondaire que le fait de calibrer et de normaliser augmente la valeur prédictive de
l’accéléromyographe pour éliminer une curarisation résiduelle à condition d’utiliser comme
valeur de décurarisation complète 4/4 100%.
Ces deux études montrent l’intérêt d’une calibration mais ces analyses portent sur les critères de
jugement secondaires.
Enfin, comme l’étude présentée ici, une étude publiée en 2011 par l’équipe de Schreiber22 retrouve
une bonne concordance entre une mesure non calibrée versus une mesure calibrée pour la détection
d’une paralysie résiduelle.
Cette étude était réalisée différemment de l’étude actuelle, avec chez 96 patients la comparaison
d’un monitorage par TOF watch® calibré jusqu’à décurarisation complète, comparé immédiatement
après (par le même moniteur mais en enlevant la calibration) à une mesure non calibrée d’intensité
fixée à 50 mA. Cette étude retrouve une différence de mesure entre calibré et non-calibré chez
88/96 patients, mais retrouve une bonne concordance clinique lorsque les mesures du T4/T1 sont
supérieures à 100% (moins bonne concordance si le T4/T1 est juste supérieur à 90%).
C LIMITES DE L’ETUDE
Cette étude comporte un avantage : c’est la première à comparer sur deux bras deux accéléromètres
dont l’un est calibré et l’autre non, et ce pour tout le temps de l’intervention : de la curarisation à la
décurarisation. Les autres études évaluant l’intérêt de la calibration, le font soit en normalisant sur la
1ere mesure, soit en réalisant une seule mesure non calibrée pour comparer à une mesure préalable
d’accélérométrie calibrée sur la même main.
Néanmoins il existe quelques limites dans la réalisation de notre étude :
1) Tout d’abord, c’est une étude observationnelle sans modification des pratiques habituelles et en
ce sens ne respectant pas les dernières évolutions concernant le monitorage de la curarisation11.
En effet, il est désormais conseillé de décurariser uniquement après la réapparition de la 4e réponse
au train-de-quatre, alors que, dans l’étude, la décurarisation était réalisée dès la récupération d’une
2e réponse au train-de-quatre28. De même le seuil de décurarisation complète permettant un réveil
et une décurarisation fixée dans l’étude était T4/T1>90% alors qu’il a été démontré dans de
nombreuses études ces dernières années qu’il vaut mieux en accéléromyographie utiliser un seuil de
100% contrairement aux résultats observés avec la méchanomyographie11,15,17,20.
34
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). Par ailleurs elle ne respectait pas non plus certaines recommandations11 concernant l’utilisation de
l’accéléromyographie à savoir :
-
L’utilisation d’une précharge de 70 g fixée au niveau du pouce ;
-
Une stabilisation de la valeur de base ;
-
La normalisation des résultats obtenus.
Ces procédés n’ont pas été utilisés dans cette étude, pour rester cohérents avec la pratique clinique
avant l’étude.
3) De plus cette étude manque de précision dans le recueil de données.
A cause de nombreux faux-positifs observés avec les 2 dispositifs (avec des fausses récupérations non
corrélées à la clinique), il a été décidé arbitrairement de choisir la deuxième occurrence d’une
réponse pour noter l’heure comme étant la vraie heure de survenue de cette réponse. Ce biais
d’évaluation est lié au recueil manuel et au fait que cela soit une étude ouverte.
De plus, le recueil de la décurarisation a été relevé en minutes à cause de ces faux-positifs.
3) Une des autres limites de l’étude concerne le fait que la comparaison des deux appareils de
monitorage de la curarisation était hétérolatérale.
Les deux appareils ne sont pas les mêmes modèles, pouvant entrainer des différences dans les
recueils.
Les deux bras ne sont pas non plus strictement égaux au niveau neuromusculaire, cela est lié à
l’existence d’un bras dominant.
Il n’y a pas eu de randomisation concernant l’attribution d’un des appareils au bras dominant. Une
étude publiée par Claudius et al en 201029 retrouvait une absence de biais lors de la décurarisation
entre les mesures par accéléromyographie sur deux bras différents. Néanmoins, une différence
significative était retrouvée dans cette étude lors de la phase de curarisation entre les deux bras,
pouvant expliquer ici les différences retrouvées dans les résultats.
4) De même, les résultats ne sont pas forcément extrapolables à la population générale. En effet,
tous les patients inclus dans cette étude monocentrique étaient porteurs d’une pathologie
cancéreuse, ce qui crée un biais de sélection. Les résultats de cette étude ne sont donc utilisables
que chez une population similaire.
Le fait de n’avoir utilisé que des halogénés comme hypnotique dans cette étude est un autre biais de
sélection, sachant que les halogénés potentialisent la curarisation.
De même le protocole de curarisation n’est pas standardisé, avec l’utilisation de différents curares et
de différents agents de réversion. Le fait que chaque patient soit son propre témoin limite l’influence
de ces biais.
35
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). 5) Enfin, la taille de l’effectif utilisée est réduite dans cette étude pilote. L’absence de différence
significative retrouvée dans certaines des mesures peut ainsi être imputée à un manque de puissance
certain.
D CONCLUSION DE L’ETUDE
Cette étude, en étudiant la dispersion de l’intensité supra-maximale chez 32 patients avec le TOF
watch®, a retrouvé une valeur d’intensité supra-maximale élevée, en moyenne à 55 mA.
La comparaison des deux moniteurs de curarisation, l’un calibré (le TOF watch®) versus l’autre non
calibré (intensité fixe de stimulation à 50 mA, le TOF scan®) retrouve une faible concordance lors des
phases de curarisation et de décurarisation profonde. Il existe néanmoins une bonne concordance
entre les deux techniques de mesure pour la décurarisation complète permettant d’éviter une
curarisation résiduelle et ses conséquences.
E PERSPECTIVES
Afin de pouvoir conclure avec certitude sur une concordance entre ces deux accéléromyographes, il
serait nécessaire de réaliser la même étude avec un effectif plus important afin d’augmenter sa
puissance, de randomiser la répartition des deux appareils sur chaque patient afin de limiter les biais
liés à la latéralité et de comparer les résultats obtenus avec un halogéné et ceux obtenus avec du
propofol. De plus, un recueil automatique des données permettrait d’augmenter la précision des
résultats.
Des nouveaux accéléromyographes, tels que le TOF scan devraient être utilisés en raison de leur plus
grande simplicité d’installation et la possibilité de calibrer ou non.
Relu par Monsieur le Professeur Christophe Baillard :
36
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). REFERENCES
1.
Christie TH, Churchill-Davidson HC: The St. Thomas’s Hospital nerve stimulator in the diagnosis of
prolonged apnoea. The Lancet 1958; 271:776
2.
Churchill-Davidson HC, Christie TH: The diagnosis of neuromuscular block in man. Br. J. Anaesth. 1959;
31:290–301
3.
Baillard C: Postoperative residual neuromuscular block: a survey of management. Br. J. Anaesth. 2005;
95:622–6
4.
Debaene B, Plaud B, Dilly M-P, Donati F: Residual paralysis in the PACU after a single intubating dose of
nondepolarizing muscle relaxant with an intermediate duration of action. Anesthesiology 2003; 98:1042–8
5.
Murphy GS, Szokol JW, Marymont JH, Greenberg SB, Avram MJ, Vender JS, Nisman M: Intraoperative
acceleromyographic monitoring reduces the risk of residual neuromuscular blockade and adverse respiratory
events in the postanesthesia care unit. Anesthesiology 2008; 109:389–98
6.
Murphy GS, Szokol JW, Avram MJ, Greenberg SB, Marymont JH, Vender JS, Gray J, Landry E, Gupta DK:
Intraoperative acceleromyography monitoring reduces symptoms of muscle weakness and improves quality of
recovery in the early postoperative period. Anesthesiology 2011; 115:946–54
7.
Donati F: Residual paralysis: a real problem or did we invent a new disease? Can. J. Anesth. Can.
Anesth. 2013; 60:714–29
8.
Duvaldestin P, Cunin P, Plaud B, Maison P: Enquête de pratique sur l’utilisation en France des curares
chez l’adulte en anesthésie. Ann. Fr. Anesth. Réanimation 2008; 27:483–9
9.
Naguib M, Kopman AF, Lien CA, Hunter JM, Lopez A, Brull SJ: A Survey of Current Management of
Neuromuscular
Block
in
the
United
States
and
Europe:
Anesth.
Analg.
2009:1doi:10.1213/ANE.0b013e3181c07428
10.
Baillard C: Monitorage de la curarisation. EMC 2011; 37:1–10
11.
Fuchs-Buder T, Claudius C, Skovgaard LT, Eriksson LI, Mirakhur RK, Viby-Mogensen J: Good clinical
research practice in pharmacodynamic studies of neuromuscular blocking agents II: the Stockholm revision.
Acta Anaesthesiol. Scand. 2007; 51:789–808
12.
Mogensen JV, Jensen E, Werner M, Nielsen HK: Measurement of acceleration: a new method of
monitoring neuromuscular function. Acta Anaesthesiol. Scand. 1988; 32:45–8
13.
Gätke MR, Viby-Mogensen J, Rosenstock C, Jensen FS, Skovgaard LT: Postoperative muscle paralysis
after rocuronium: less residual block when acceleromyography is used. Acta Anaesthesiol. Scand. 2002;
46:207–13
14.
Mortensen CR, Berg H, El-Mahdy A, Viby-Mogensen J: Perioperative monitoring of neuromuscular
transmission using acceleromyography prevents residual neuromuscular block following pancuronium. Acta
Anaesthesiol. Scand. 1995; 39:797–801
15.
Capron F, Alla F, Hottier C, Meistelman C, Fuchs-Buder T: Can acceleromyography detect low levels of
residual paralysis?: a probability approach to detect a mechanomyographic train-of-four ratio of 0.9.
Anesthesiology 2004; 100:1119–24
37
[ins%tut-­‐anesthesie-­‐reanima%on.org]. Document sous License Crea%ve Commons (by-­‐nc-­‐sa). 16.
Samet A, Capron F, Alla F, Meistelman C, Fuchs-Buder T: Single acceleromyographic train-of-four, 100Hertz tetanus or double-burst stimulation: which test performs better to detect residual paralysis?
Anesthesiology 2005; 102:51–6
17.
Claudius C, Viby-Mogensen: Acceleromyography for Use in Scientific and Clinical Practice.
Anesthesiology 2008; 108:1117–40
18.
Lee G, Lyengar S, Sznohradszky J: Improving The Design Of Muscle Relaxant Studies. Anesthesiology
1997; 86:48–54
19.
Kopman AF, Kumar S, Klewicka MM, Neuman GG: The staircase phenomenon: implications for
monitoring of neuromuscular transmission. Anesthesiology 2001; 95:403–7
20.
Claudius C, Skovgaard LT, Viby-Mogensen J: Is the Performance of Acceleromyography Improved with
Preload and Normalization?: A Comparison with Mechanomyography. Anesthesiology 2009; 110:1261–70
21.
Suzuki T: Normalization of acceleromyographic train-of-four ratio by baseline value for detecting
residual neuromuscular block. Br. J. Anaesth. 2005; 96:44–7
22.
Schreiber J-U, Mucha E, Fuchs-Buder T: Acceleromyography to assess neuromuscular recovery: is
calibration before measurement mandatory?: Residual paralysis and acceleromyography. Acta Anaesthesiol.
Scand. 2011; 55:328–31
23.
Bland JM, Altman DG: Statistical methods for assessing agreement between two methods of clinical
measurement. The Lancet 1986:307–10
24.
Journois D: Concordance de deux variables : l’approche graphique. Méthode de Bland et Altman. Rev.
Mal. Respir. 2004; 21:127–30
25.
Kopman AF, Lawrence D: Milliamperage Requirements for Supramaximal Stimulation of the Ulnar
Nerve with Surface Electrode. Anesthesiology 1984; 61:83–5
26.
Helbo-Hansen, Bang, Nielsen: The Accuracy of Train-of-four Monitoring at Varying Stimulating Current.
Anesthesiology 1992; 76:199–203
27.
Driessen JJ, Robertson EN, Booij L: Acceleromyography in neonates and small infants: baseline
calibration and recovery of the responses after neuromuscular blockade with rocuronium. Eur. J. Anaesthesiol.
2005; 22:11–5
28.
Plaud B, Debaene B, Donati: Residual paralysis after emergence from anesthesia. Anesthesiology
2010; 112:1013–22
29.
Claudius C, Skovgaard LT, Viby-Mogensen J: Arm-to-arm variation when evaluating neuromuscular
block: an analysis of the precision and the bias and agreement between arms when using mechanomyography
or acceleromyography. Br. J. Anaesth. 2010; 105:310–7
38