l`aaS en prévention primaire des événements
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l`aaS en prévention primaire des événements
MedActuel DPC votre développement professionnel continu La faculté de médecine de l’Université Laval vol. 12 no 6 28 mars 2012 Le Collège québécois des médecins de famille Pharmacothérapie au quotidien Objectifs pédagogiques ◾ Connaître l'efficacité et la sécurité L’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires Affiliations de l’auteure de l'AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires. ◾ Connaître les recommandations des lignes directrices de pratique clinique. * B. Pharm., M.Sc., Ph. D., étudiante au postdoctorat, Université McGill La place de l’acide acétylsalicylique (AAS) est bien établie en prévention secondaire des événements cardiovasculaires. Les données probantes appuyant son rôle en prévention primaire sont, au contraire, beaucoup moins étoffées. Cet article rend compte des résultats d’essais cliniques et d’études observationnelles menés pour évaluer l’efficacité et la sécurité de l’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires. On y présente également un résumé des recommandations des lignes directrices de pratique clinique. En conclusion, cette revue suggère que l’AAS devrait être réservé aux personnes chez lesquelles on a bien soupesé tous les risques et bénéfices. par Caroline Sirois* Les maladies cardiovasculaires et le rôle des antiplaquettaires Les maladies cardiovasculaires (MCV) représentent un important fardeau de santé publique. En 2007, elles étaient responsables d’environ 30 % de l’ensemble des décès au Canada1. On a estimé qu’en 2000, les coûts directs et indirects des MCV se chiffraient à plus de 22,2 milliards $, se situant ainsi au deuxième rang parmi les éléments les plus coûteux des soins de santé au pays2. Les stratégies préventives sont donc souhaitables afin de limiter le nombre de cas atteints. La prévention primaire peut se définir comme l’utilisation de stratégies visant à empêcher les événements vasculaires cliniques chez des individus sans antécédents de telles maladies. Ces maladies comprennent, entre autres, l’angine de poitrine, l’infarctus du myocarde (IM), l’accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique, l’ischémie cérébrale transitoire et la claudication intermittente3. Plusieurs approches pharmacologiques et non pharmacologiques favorisent la prévention primaire des MCV. Les stratégies potentielles incluent des modifications du style de vie (activité physique, cessation tabagique, perte de poids), les médicaments antihypertenseurs, les agents hypolipémiants et les antiplaquettaires. L’utilisation des antiplaquettaires, notamment l’AAS, est toutefois de plus en plus controversée compte tenu des récents résultats de recherche. Sur le plan théorique, les agents antiplaquettaires représentent une option de prévention intéressante. En effet, l’agrégation plaquettaire est un des mécanismes impliqués dans la formation de thrombus. La description du mécanisme d’agrégation et des agents pouvant être utilisés pour le freiner a fait l’objet d’une revue dans l’édition de septembre 2010 de Québec Pharmacie4. Rappelons brièvement que l’AAS empêche l’agrégation plaquettaire en inhibant l’enzyme cyclooxygénase 1 (COX-1) dans les plaquettes Cas clinique 1 Un homme de 35 ans se présente à la pharmacie. Comme sa mère est décédée d’un AVC à 50 ans et que son père a subi un infarctus du myocarde à 45 ans, il se demande s’il ne devrait pas prendre des médicaments en prévention. Il ne présente pas de problème de santé particulier et a peu de facteurs de risque (cholestérol un peu élevé). Est-il un bon candidat pour l’AAS ? (figure 1). L’acétylation de la COX-1 bloque la formation de thromboxane A2, qui conduit normalement à l’agrégation plaquettaire et à la vasoconstriction. Puisque les plaquettes sont incapables de synthétiser la COX-1, la production de thromboxane A2 est inhibée pour la durée de vie de la plaquette, c’est-à-dire entre 7 et 10 jours. L’effet inhibiteur de l’AAS s’observe avec des doses quotidiennes aussi basses que 30 mg d’acide acétylsalicylique5. Les doses quotidiennes recommandées en clinique, variant entre 75 mg et 325 mg, sont donc suffisantes pour assurer l’inhibition de l’agrégation plaquettaire. L’inactivation permanente de l’enzyme COX-1 par l’AAS peut aussi entraîner des complications, principalement des saignements. Ces saignements peuvent être induits par au moins deux mécanismes indépendants : l’inhibition de l’agrégation plaquettaire médiée par le thromboxane et l’altération de la cytoprotection induite par les prostaglandines et les prostacyclines dans la muqueuse intes- tinale5. Le premier mécanisme est indépendant de la dose à partir de 30 mg, mais le second survient plus fréquemment lors de l’utilisation de doses élevées. AAS : quel est son rôle en prévention primaire des MCV ? Premier médicament à être utilisé à titre d’antiplaquettaire, l’AAS joue toujours un rôle primordial dans cet arsenal. Son faible coût et son apparente innocuité le rendent particulièrement intéressant. De fait, l’AAS demeure le traitement de choix dans la prévention des infarctus du myocarde, des AVC ischémiques et de la mortalité vasculaire pour une gamme variée de patients5. Son efficacité a été évaluée tant chez les patients à faible risque de subir des événements cardiovasculaires que chez ceux qui souffraient d’un événement aigu5. Mais les fondements de l’usage de l’AAS en prévention primaire ne sont-ils pavés que de bonnes intentions ou reposent-ils sur de solides assises ? Révision : Odette Grégoire, pharmacienne, M.Sc., M.A.P., Pharmacie Christian Ouellet; et André Roussin, MD, professeur agrégé de médecine et chercheur clinicien, chef adjoint du service de médecine interne, Hôpital Notre-Dame, CHUM, et président de la SSVQ et du GTTC. 1 Est-ce que l’AAS fonctionne dans un contexte théorique ? Les effets de l’AAS dans la population à faible risque d’événements cardiovasculaires ne sont pas encore clairement définis. Le tableau I présente neuf études réalisées en prévention primaire des événements cardiovasculaires6-14. Globalement, les résultats individuels des essais cliniques aléatoires ne permettent pas de conclure à un rôle primordial de l’AAS dans la réduction des événements cardiovasculaires. Dans quatre études, on a obtenu des diminutions statistiquement significatives des événements pour le groupe traité par l’A AS6,8,10,11, mais les réductions n’ont été observées que pour certaines sous-catégories d’événements seulement. Dans l’étude Hypertension Optimal Treatment (HOT)6, par exemple, la réduction d’infarctus du myocarde ne s’obtient que si l’on ignore les infarctus silencieux. Dans cette étude, à l’instar de plusieurs autres études, l’effet de l’AAS ne diffère pas de celui du placebo pour les AVC7-10, 12-14 et la mortalité de toutes causes7-12,14. Comme le mentionnent à juste titre Fowkes et coll.14, l’absence de résultats statistiquement significatifs n’exclut pas que l’A AS puisse réduire les événements Suite à la page 54 Figure 1 Mécanisme d’action de l’AAS sur l’agrégation plaquettaire ADP Plaquette COX > Président du conseil Dr François Croteau Médecin de famille, hôpital Santa-Cabrini, Montréal; Membre du Comité de formation médicale continue de Médecins francophones du Canada; Directeur médical du Groupe Santé, Québec, Rogers Média. Dre Johanne Blais Membre du Conseil de FMC de la faculté de médecine de l’Université Laval; Responsable du Comité de FMC du dépt. de médecine familiale de l’Université Laval; Professeur titulaire de clinique, CHUQ, hôpital Saint-François d’Assise. Dr Roger Ladouceur Responsable du Plan d’autogestion de DPC, Collège des médecins du Québec; Professeur agrégé de clinique du dépt. de médecine familiale de l’Université de Montréal; Médecin de famille, Hôpital de Verdun du CSSS du Sud-OuestVerdun. Dre Francine Léger Médecin de famille; Professeur adjoint de clinique au département de médecine familiale de l’Université de Montréal; Service de périnatalité du CHUM. Dre Diane Poirier ADP ACTIVATION GpIIb/IIIa Conseil de rédaction et révision scientifique Collagène Thrombine Médecin, M.Sc.; Chef du service des soins intensifs au CSSS Richelieu-Yamaska; Professeur d’enseignement clinique au CHUS; Membre du comité de formation continue de Médecins francophones du Canada TxA2 AAS www.ProfessionSante.ca – 28 mars 2012 – L’actualité médicale – 53 Medactuel DPC > L’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires Tableau I Essais cliniques aléatoires évaluant les bénéfices de l’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires Étude Population à l’étude Dose d’AAS British Doctor’s Trial (1988)7 5139 hommes médecins apparemment en bonne santé, dont 101 (2 %) diabétiques suivis pendant 6 ans en moyenne Physicians’ Health Study (1989)8 Événements Effets secondaires Commentaires Taux/ 10 000 pa : AAS : 143,5 Pbo : 159,5 (NS) Taux/ 10 000 pa : Saignements non cérébraux : AAS : 10,6 Pbo : 7,4 (NS) Ulcère peptique : AAS : 46,8 Pbo : 29,6 (p < 0,05) Effet neutre de l’AAS sur les événements. Peu d’événements (grands IC). Augmentation des effets secondaires. AAS : 119 Pbo : 98 RR : 1,22 (0,93-1,60) AAS : 217 Pbo : 227 RR : 0,96 (0,80-1,14) Symptômes GI : AAS : 34,8 % Pbo : 34,2 % (NS) Ulcères : AAS : 1,5 % Pbo : 1,3 (p = 0,08) Saignements : AAS : 27,0 % Pbo : 20,4 % (p < 0,0001) Étude terminée précocement. Effet favorable sur les IM, mais effet neutre sur la mortalité et tendance à augmenter les AVC. Augmentation des effets secondaires. Taux MCI/ 1000 pa : AAS : 10,2 Pbo : 13,3 (NS) Taux/ 1000 pa : AAS : 2,2 Pbo : 3,2 (NS) Taux/ 1000 pa : AAS : 13,6 Pbo : 13,1 (NS) Saignements GI majeurs : AAS : 5 Pbo : 1 (NS) Saignements mineurs : AAS : 484 Pbo : 398 (p < 0,001) 4 groupes : AAS, Pbo, warfarine et AAS+warfarine. Effet neutre sur les AVC et la mortalité. Augmentation des effets secondaires. 75 mg die AAS : 157 (4,4/1000 pa) Pbo : 184 (5,2/1000 pa) RR : 0,85 (0,69-1,05) AAS : 146 (4,1/1000 pa) Pbo : 148 (4,2/1000 pa) RR : 0,98 (0,78-1,24) AAS : 284 (8,0/1000 pa) Pbo : 305 (8,6/1000 pa) RR : 0,93 (0,79-1,09) Saignements fatals : AAS : 7 Pbo : 8 Saignements majeurs : AAS : 129 Pbo : 70 Saignements mineurs : AAS : 156 Pbo : 87 Effet neutre sur les événements. Effet significatif sur les événements cv et IM si les IM silencieux ne sont pas pris en compte. Augmentation des effets secondaires. 4495 hommes (42 %) et femmes (58 %) avec ≥1 facteur(s) de risque majeur d’événement cv âgés en moyenne de 64,4 ans (7,6), dont 742 diabétiques suivis pendant 3,6 ans en moyenne 100 mg die AAS : 19 Pbo : 28 RR : 0,69 (0,38-1,23) AAS : 16 Pbo : 24 RR : 0,67 (0,36-1,27) AAS : 62 Pbo : 78 RR : 0,81 (0,58-1,13) Saignements : AAS : 24 Pbo : 6 Maladie GI : AAS : 8 Pbo : 3 Étude arrêtée précocement. Effet neutre sur les événements sauf effet positif sur morts cv et événements cv totaux. Augmentation des effets secondaires. Women’s Health Study (2005)11 39 876 professionnelles de la santé apparemment en bonne santé, âgées en moyenne de 54,6 ans (7,0), dont 1037 diabétiques suivies pendant 10,1 ans en moyenne 100 mg aux 2 jours AAS : 198 Pbo : 193 RR : 1,02 (0,84-1,25) AAS : 221 Pbo : 266 RR : 0,83 (0,69-0,99) AAS : 609 Pbo : 642 RR : 0,95 (0,85-1,06) Saignements GI : AAS : 910 Pbo : 751 (p < 0,001) Ulcère peptique : AAS : 542 Pbo : 413 (p < 0,001) Effet neutre sur événements, sauf réduction AVC. Augmentation des effets secondaires. Popadad (2008)12 1276 adultes de 60 ans en moyenne avec diabète type 1 ou 2 sans MCV (mais maladie vasculaire périphérique asymptomatique). Médiane du suivi : 6,7 années 100 mg die (± anti oxydant) AAS : 55 Pbo : 56 RR : 0,98 (0,68-1,43) AAS : 29 Pbo : 41 RR : 0,71 (0,44-1,14) AAS : 94 Pbo : 101 RR : 0,93 (0,71-1,24) Saignements GI : AAS : 28 Pbo : 31 RR : 0,90 (0,53-1,52) Symptômes GI : AAS : 73 Pbo : 94 RR : 0,77 (0,55-1,08) Effet neutre sur événements et effets secondaires. Effet neutre aussi pour l’antioxydant. JPAD (2008)13 2539 adultes âgés en moyenne de 65 ans avec diabète type 2 sans MCV, suivi médian de 4,4 années 81 ou 100 mg die AAS : 12 Pbo : 9 RR : 1,34 (0,573,19) AAS : 22 Pbo : 24 RR : 0,93 (0,52-1,66) AAS : 1 Pbo : 10 RR : 0,10 (0,01-0,79)* Saignements GI : AAS : 12 Pbo : 4 Effets GI sans saignements : AAS : 47 Pbo : 4 * Mortalité coronarienne et cérébrovasculaire. Très petit nombre d’événements : prudence, même si résultat statistiquement significatif. Fowkes (2010)14 3350 adultes sans MCV âgés en moyenne de 62 ans, suivis pour une moyenne de 8,2 années 100 mg die AAS : 62 Pbo : 68 (NS) AAS : 37 Pbo : 38 (NS) AAS : 176 Pbo : 186 RR : 0,95 (0,77-1,16) Hémorragie majeure : AAS : 34 Pbo : 20 RR : 1,71 (0,99-2,97) Effet neutre de l’AAS sur les événements. Augmentation du risque de saignements. IM AVC Mortalité 500 mg die Taux IM non mortel/ 10 000 pa : AAS : 42,5 Pbo : 43,3 (NS) Taux AVC non mortel/ 10 000 pa : AAS : 32,4 Pbo : 28,5 (NS) 22 071 hommes médecins apparemment en bonne santé, suivis pendant 5 ans en moyenne 325 mg aux 2 jours AAS : 139 Pbo : 239 RR : 0,56 (IC 95 % : 0,450,70) ThrombosIs Prevention Trial (1998)9 5085 hommes à haut risque de maladie ischémique coronarienne, âgés en moyenne de 57,3 ans (6,6), suivis pendant 6,4 ans en moyenne 75 mg die Hypertension Optimal Treatment Trial (1998)6 18 790 hommes (53 %) et femmes (47 %) hypertendus, âgés en moyenne de 61,5 ans (7,5), dont 1501 (8 %) diabétiques suivis pendant 4 ans en moyenne Primary Prevention Project (2001)10 Note : À moins d’indication contraire, les chiffres représentent le nombre total d’événements (personnes ayant subi l’événement d’intérêt). Abréviations : AVC : accident vasculaire cérébral; cv : cardiovasculaire; GI : gastro-intestinal; i.c. 95 % : intervalle de confiance à 95 %; IM : infarctus du myocarde; MCI : maladie coronarienne ischémique; NS : non significatif; pa : personnes-années; pbo : placebo; RC : rapport de cote. > Suite de la page 53 cardiovasculaires. Toutefois, selon les résultats de ces études, le nombre de personnes qui devraient être traitées pour éviter un événement serait très élevé. Par exemple, pour atteindre une possible réduction du risque de 16 % dans l’étude de Fowkes et coll., 500 à 600 personnes répondant à leurs critères d’inclusion devraient recevoir de l’AAS pendant 8 ans pour prévenir un événement cardiovasculaire ou une revascularisation14. Les ressources requises et les effets secondaires potentiels liés à la thérapie rendent l’exercice injustifiable sur plusieurs plans. Par ailleurs, les conclusions des méta-analyses des précédents essais cli- niques convergent vers les mêmes constatations : l’A AS engendre au mieux de faibles réductions du risque15-22. Les deux plus récentes métaanalyses21,22 comprennent les neuf études citées précédemment6-14. Elles concluent à une réduction statistiquement significative du risque total d’événements cardiovasculaires, avec une réduction du risque relatif d’environ 12 %. La réduction du risque absolu demeure toutefois assez faible (environ 0,32 %)22. Par ailleurs, malgré la puissance conférée par les techniques de méta-analyse, il n’a pas été possible de dégager une réduction statistiquement significative de la mortalité cardiovasculaire21,22. Par contre, l’usage d’AAS a été associé à une augmentation du ris- 54 – L’actualité médicale – 28 mars 2012 – www.ProfessionSante.ca que d’AVC hémorragique, de saignements gastro-intestinaux et de saignements majeurs22. Le dilemme quant à l’utilisation ou non de l’AAS en prévention primaire repose donc sur le frêle équilibre entre ses avantages et ses inconvénients. Par exemple, Berger et coll. soulignent que le traitement de 1000 individus pendant 6,4 ans préviendrait 3 événements cardiovasculaires chez les femmes et 4 chez les hommes20. Il y aurait induction de 2,5 saignements majeurs chez les femmes et de 3 chez les hommes. Ainsi, les auteurs concluent que les individus à faible risque de présenter un événement cardiovasculaire (moins de 5 % de risque à 5 ans) ne profiteraient pas de l’instauration d’une thérapie antiplaquet- taire par l’AAS20. Enfin, la plus récente méta-analyse du groupe Antithrombotic Trialists’ (ATT) Collaboration, publiée en 2009, rapporte que le ratio bénéfice/risque de l’A AS demeure incertain en prévention primaire compte tenu de la faible réduction des événements vasculaires enregistrée avec son usage (0,51 % de réduction par année avec l’AAS par rapport à 0,57 % pour les traitements témoins; p = 0,0001) et du risque plus élevé de saignements majeurs (0,10 % par rapport à 0,07 % par année; p < 0,0001)23. Selon ces auteurs, les risques et les bénéfices de l’usage de l’AAS sont en fait si égaux que l’usage d’AAS pourrait être d’une valeur incertaine, quel que soit le risque cardiovasculaire de base de l’individu23. 2 Est-ce que l’AAS fonctionne dans un contexte de pratique clinique ? Il est toujours intéressant d’évaluer l’effet d’un traitement hors du contexte rigide des essais cliniques aléatoires, de manière à vérifier si les résultats peuvent être reproduits dans la population générale. Malheureusement, seulement deux études observationnelles ont porté sur l’efficacité de l’AAS pour la prévention primaire des événements cardiovasculaires24,25. Ces deux études comprenaient les femmes incluses dans la Nurses Health Study. Dans la première publication24, une analyse de cohorte prospective avec un suivi d’environ six années a permis de constater que l’utilisation d’AAS à raison d’un à six comprimés par semaine était associée à une réduction des infarctus du myocarde (RR = 0,75; IC 95 % : 0,580,99). Toutefois, on n’a noté aucune association entre l’usage d’A AS et les autres événements cardiovasculaires et la mortalité. Dans la seconde publication, une étude cas-témoin a été effectuée dans une cohorte suivie pendant 24 années25. L’usage courant d’A AS a été associé à une réduction de la mortalité de toutes causes, de la mortalité cardiovasculaire, de la mortalité due à une maladie coronarienne et de la mortalité due à un AVC. Une relation linéaire a également été observée entre la durée d’utilisation de l’A AS et la diminution de mortalité de toutes causes, bien que pour la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires, le bénéfice associé à la prise d’AAS était obtenu au cours des cinq premières années. Il est toutefois difficile de tirer des conclusions fermes de ces études en raison des limites qu’elles comportent. Il s’agit de recherches effectuées il y a plusieurs années. L’utilisation d’A AS est donc susceptible de différer des conditions d’utilisation actuelles, notamment en ce qui concerne les indications et les doses. La définition même de l’usage d’AAS comporte des limites puisqu’elle repose sur une estimation d’usage autorapportée de façon biannuelle. Par ailleurs, l’usage concomitant de médicaments n’a pas été bien évalué. Il reste donc encore beaucoup d’incertitude quant à l’effet de l’A AS dans un contexte clinique réel et dans la population à large échelle. 3 L’AAS : les experts se prononcent Dans un contexte où les données probantes sur une thérapie ne sont pas nettes, les recommandations des sociétés savantes peuvent s’avérer utiles pour les cliniciens. Comme ces recommandations se fondent habituellement sur les connaissances les plus récentes, appuyées par des opinions d’experts dans le domaine, elles sont gages d’une réflexion éclairée sur le sujet. Plusieurs organismes et sociétés ont émis des recommandations quant à l’usage d’AAS en prévention primaire d’événements cardiovasculaires. Le tableau II présente un résumé simplifié de certaines de ces recommandations. Au vu des recommandations, il apparaît que la place de l’A AS dans un contexte de prévention primaire est généralement assez restreinte. De fait, la majorité des organismes considèrent que le risque cardiovasculaire doit être élevé et le risque de saignement gastrointestinal, faible pour que l’AAS soit utilisé. Il existe toutefois certaines disparités entre les recommandations. Ces différences proviennent probablement d’une part du manque de preuves irréfutables des bénéfices de l’AAS, laissant ainsi place à l’interprétation et aux nuances. D’autre part, les recommandations émises il y a quelques années n’ont pas été influencées par les résultats des plus récentes études cliniques. Les nouvelles lignes directrices émises par la Société canadienne de cardiologie prennent en compte les études cliniques récentes. Publiées en mai Tableau II Résumé des recommandations de différents organismes quant à l’usage d’AAS en prévention primaire d’événements cardiovasculaires Organisme (référence)AnnéeRecommandation résumée Société canadienne de cardiologie3 2011 AAS non recommandé pour usage de routine. Si risque de MCV élevé et faible risque de saignements : 75-162 mg die American Heart Association/ 2011 AAS pour individus dont le risque American Stroke Association45 d’événements CV à 10 ans est > 6-10 % American Heart Association/ 2010 AAS 75-162 mg/jour si diabète + risque 10 ans American Diabetes Association/ MCV > 10 % + faible risque de saignement (i.e. hommes > 50 ans, American College of Cardiology46 femmes > 60 ans avec diabète + autre facteur de risque) U.S. Preventive Services Task Force43 2009 AAS pour hommes 45-79 ans, femmes 55-79 ans si risque de saignements inférieur au risque IM (hommes) ou AVC (femmes) Association canadienne du diabète33 2008 La décision de prescrire un antiagrégant plaquettaire doit être fondée sur le jugement clinique du médecin Au vu des recommandations, il apparaît que la place de l’AAS dans un contexte de prévention primaire est généralement assez restreinte. 2011, ces lignes directrices ont été rédigées dans le but de répondre aux besoins des cliniciens quant à l’obtention de consignes claires, facilement accessibles et fondées sur les données probantes pour prendre des décisions liées à la thérapie antiplaquettaire dans un contexte ambulatoire3. En ce qui concerne l’usage d’AAS en prévention primaire, les auteurs concluent que le bénéfice est faible, voire nul, considérant d’une part la faible réduction du risque absolu que l’A AS engendre et d’autre part, ses effets secondaires. De plus, les auteurs mentionnent que la majorité des études ont été effectuées avant l’introduction massive de stratégies préventives (notamment les statines et les inhibiteurs du système rénineangiotensine-aldostérone) Ainsi, les bénéfices nets réels de l’A AS dans le contexte actuel sont possiblement encore plus faibles. En conséquence, les recommandations de la Société canadienne de cardiologie sont les suivantes : pour les hommes et les femmes ne présentant pas de signes manifestes de maladie vasculaire, l’utilisation d’AAS, quelle que soit la dose, n’est pas recommandée de façon systématique pour la prévention d’événements vasculaires ischémiques3. L’AAS à la dose de 75 à 162 mg par jour peut être envisagé dans des circonstances particulières, chez les hommes et les femmes ne présentant pas de signes manifestes de maladie vasculaire et pour lesquels le risque vasculaire est considéré comme élevé et le risque de saignement, faible3. Plusieurs échelles d’évaluation du risque cardiovasculaire peuvent s’avérer utiles pour établir le profil d’un individu26. Parmi les plus connues, notons celles inspirées des résultats de l’étude de Framingham (il existe plusieurs versions accessibles en ligne, dont celle-ci : http://cvrisk.mvm.ed.ac.uk) et celles du UKPDS, dont les résultats sont axés sur les patients atteints de diabète (le «mUKPDS risk engine » peut être Suite à la page 56 > L’accessibilité aux soins : le grand défi de notre système de santé Colloque francophone de médecine de Montréal 4 mai 2012 Montréal, Québec Colloque international interprofessionnel en santé 23 et 24 mai 2012 Genève, en Suisse Colloque francophone de médecine de Caraquet 2 juin 2012 Caraquet, Nouveau-Brunswick Symposium francophone de médecine – Une réalisation de Médecins francophones du Canada 17 au 19 octobre 2012 Montréal, Québec Colloque francophone de médecine de Moncton 16 novembre 2012 8355, boulevard Saint-Laurent Montréal (Québec) H2P 2Z6 Téléphone : 514 388-2228 Télécopieur : 514 388-5335 [email protected] medecinsfrancophones.ca Les besoins en matière de santé ont bien changé depuis l’institution du programme canadien d’assurance maladie en 1968 et son entrée en vigueur au Québec en 1971. Les clientèles d’alors étaient plus jeunes, présentaient des pathologies aiguës et dans la plupart des cas, une fois traitées, retournaient à la santé rapidement, après une courte hospitalisation si nécessaire. Aux urgences, la clientèle présentait les mêmes caractéristiques. Les patients âgés ne représentaient qu’une minorité des hospitalisations et très souvent retournaient à domicile à leur congé de l’hôpital. Les besoins en hébergement n’étaient pas très grands et les lits de soins actifs n’étaient que rarement occupés par des patients en attente d’une place dans un établissement de longue durée. Pour ce qui est du suivi, les maladies chroniques étaient moins fréquentes et la survie de ces malades beaucoup plus courte que maintenant, laissant ainsi plus de disponibilité pour obtenir un rendez-vous chez le médecin. Faute de s’être adapté aux changements majeurs de la clientèle actuelle, notre système montre maintenant des signes inquiétants de dysfonction. Si la qualité des soins reste excellente dans son ensemble, l’accès aux soins de première ligne, aux soins spécialisés et à l’hospitalisation pose un problème majeur lorsque les soins requis ne sont pas urgents. L’une des caractéristiques fondamentales du système de santé canadien devait pourtant être l’accessibilité aux soins, partout au Canada. Comment s’expliquer alors que 30 % des Québécois n’aient pas de médecins de famille et ne puissent en obtenir un ? Pourquoi ces attentes interminables avant d’être admis pour une opération chirurgicale élective ? Et ces longs mois avant d’obtenir un rendez-vous chez le médecin spécialiste dans plusieurs cas ? Il n’y a pas une cause unique à cette situation. Plusieurs éléments y participent et ont un effet cumulatif, mais tous ont pour origine un manque d’adaptation du système au changement : changement générationnel de culture, désintéressement des jeunes envers la pratique en cabinet, manque de vision quant aux besoins particuliers d’une population vieillissante, encombrement des lits de soins actifs par une clientèle qui n’est pas à la bonne place, faute de ressources adéquates d’hébergement à long terme, manque de ressources pour le maintien à domicile et les soins ambulatoires alors que c’était le but même de la réforme Rochon avec le virage ambulatoire. Non seulement le système ne s’est pas adapté, mais en plus il est paralysé par la lourdeur administrative et la lenteur décisionnelle. On doit se poser la question : manque-t-il d’argent pour faire mieux fonctionner le système de santé ou est-il tout simplement mal utilisé? Alors que la décentralisation, d’abord avec les Centres régionaux de santé et de services sociaux (CRSSS), puis les Régies régionales (RRSSS) et finalement avec les Agences régionales actuelles (ARSSS), prônée par chacune de ces réformes visait justement à rapprocher les centres décisionnels et l’allocation des ressources financières des patients et des centres de soins de santé, cette approche n’a donné aucun résultat. Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a continué de grossir en effectif, tout en créant de nouveaux paliers exigeant personnel, infrastructures administratives et financement. Ce ne fut finalement que des changements de nom, sans modification des responsabilités. Le Ministère est devenu un monstre administratif dont la bureaucratie, comme toujours, entretient elle-même sa propre croissance. Le système est toujours, sinon plus, centralisé au ministère qui fait de la microgestion. La structure bureaucratique a créé énormément de duplications inutiles et l’argent est allé à la structure plutôt qu’aux soins. La situation a été reconnue par l’ensemble des commissions, comités et groupes d’études mis en place par les divers gouvernements depuis plus de 15 ans, qui tous ont fait de nombreuses recommandations qui sont restées lettre morte. Au cours de cette période, chaque nouveau gouvernement arrivant au pouvoir s’engageait à régler le problème des urgences débordantes et des listes d’attente interminables en chirurgie dès les premiers mois suivant son élection. Et pourtant, les mêmes problèmes persistent toujours et sont tout aussi criants. Alors existe-t-il une solution à la situation d’un système qui n’arrive toujours pas à satisfaire les besoins de soins dans des délais médicalement acceptables et socialement raisonnables ? Il n’y a pas de solution simple à un problème aussi complexe, mais un ensemble d’approches synergiques pourrait aider : décentralisation réelle des pouvoirs décisionnels plus près des centres de soins, nettoyage de la structure pour éliminer les duplications de tâches, amélioration de l’efficience des unités de soins, en particulier aux urgences et aux blocs opératoires, décongestion des lits de soins aigus en fournissant les ressources requises pour les patients âgés, introduction du financement des hôpitaux par activités réalisées en remplacement du budget historique qui n’a aucun sens ni lien avec la tâche accomplie, mise en place d’un système de rémunération des médecins qui encourage ceux-ci à accomplir des fonctions essentielles, mais qui sont actuellement délaissées (par exemple le suivi en cabinet), abandon des activités médicales particulières (AMP) qui n’ont plus leur raison d’être, davantage de médecins à la gestion du système de santé, et surtout implantation généralisée à tous les niveaux de la gestion par résultats et de l’imputabilité essentielle à l’efficacité du système. Conrad L. Pelletier, M.D., MBA, FRCSC Président de Médecins francophones du Canada www.ProfessionSante.ca – 28 mars 2012 – L’actualité médicale – 55 Medactuel DPC > L’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires > Suite de la page 55 téléchargé en ligne à cette adresse : www. dtu.ox. ac.uk/index.php?maindoc=/ riskengine). Selon l’échelle utilisée, le risque de MCV (énoncé sous forme de pourcentage) sera déduit en fonction d’une série de facteurs de risque : l’âge, le sexe, le tabagisme, le taux de cholestérol, la tension artérielle, les antécédents familiaux... Il n’existe malheureusement pas d’échelle bien validée pour évaluer le risque de saignement associé aux antiplaquettaires. L’évaluation sera donc basée sur l’impression clinique, en tenant compte des principaux facteurs de risque : âge avancé (le risque croît de manière importante après 70 ans5), ulcère gastroduodénal actif ou passé, antécédents de saignements, insuffisance rénale, insuffisance hépatique, problèmes de coagulation ou thrombophilies, cancer, usage d’antithrombotiques, d’AINS ou de corticostéroïdes. Retour sur le cas clinique 1 Le jeune homme présente peu de risques de subir un événement cardiovasculaire (moins de 5 % de risque sur 10 ans). Il n’aurait donc pas de bénéfices assez élevés pour justifier une prise d’AAS. Les mesures non pharmacologiques (par exemple, l’exercice physique) devraient être sa priorité pour l’instant. Un traitement hypolipémiant pourrait aussi être envisagé selon sa concentration plasmatique de cholestérol-LDL. Selon les lignes directrices de la Société canadienne de cardiologie, pour les hommes et les femmes ne présentant pas de signes manifestes de maladie vasculaire, l’utilisation d’A AS, quelle que soit la dose, n’est pas recommandée de routine pour la prévention d’événements vasculaires ischémiques. (Classe III [évidence que le traitement n’est pas utile et qu’il peut même, dans certains cas, être délétère], niveau A [données issues de plusieurs essais cliniques aléatoires ou de méta-analyses].) cas clinique 2 Votre tante fête ses 70 ans. Elle mentionne qu’elle dansera pour l’occasion, quitte à calmer ses douleurs d’arthrose à l’aide d’anti-inflammatoires. Votre tante souffre également d’hypertension artérielle, son cholestérol-LDL est élevé, et elle grille quelques cigarettes à l’occasion. Vos bons vœux d’anniversaire seront-ils accompagnés d’AAS ? 4 Et si j’étais « spécial », je prendrais de l’AAS ? Il n’est pas possible, selon l’état des connaissances actuelles, d’énoncer de façon simple quels sont les individus qui devraient sans hésitation recevoir de l’AAS en prévention primaire. Plusieurs conditions peuvent influer sur la décision ultime de traiter ou non un individu. Les prochaines sections abordent trois d’entre elles : le diabète, l’âge avancé et une cothérapie par les anti- Figure 2 Qui devrait recevoir de l’AAS en prévention primaire des événements cardiovasculaires ? Homme < 45-50 ans Femme < 55-60 ans Homme ou femme 80 ans et plus Homme 45/50-79 ans Femme 55/60-79 ans Peu de données. Facteurs risque Diabète ? Évaluer si bénéfices potentiels MCV élevés ? surpassent risques GI OUINONNONOUI Risque GI élevé ? Risque MCV élevé ? Autre facteur risque MCV ? NON OUINONNONOUIOUI Risque GI élevé ? AAS si risque saignement < risque IM (homme) ou AVC (femme) AAS Pas AAS OUI (> risque MCV) NON Pas AASAAS Note : Ce diagramme tente d’amalgamer les recommandations émises par différentes sociétés. Il se veut un outil d’aide à la décision, mais il n’a pas été validé par les instances qui ont énoncé les recommandations. Le jugement clinique est toujours prioritaire dans l’évaluation du risque et des bénéfices attendus. Liste des abréviations : AAS : acide acétylsalicylique; AVC : accident vasculaire cérébral; GI : gastro-intestinal; IM : infarctus du myocarde; MCV : maladie cardiovasculaire. inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Les populations spéciales Individus atteints de diabète La place de l’AAS dans le traitement de la personne atteinte de diabète a beaucoup évolué en quelques années. Rappelons qu’en 1998 l’article de Haffner et coll.27 révolutionne la conception du traitement du diabète : désormais, cette maladie est considérée comme un équivalent cardiovasculaire. En conséquence, l’AAS prend dès lors une place prépondérante comme thérapie préventive. Par exemple, les lignes directrices canadiennes indiquent, dans leur édition 2003, que l’A AS devrait être utilisé par les patients atteints de diabète qui présentent des facteurs de risque athérosclérotique (niveau de certitude A)28. De même, les lignes directrices américaines de 2007 suggèrent de traiter tous les individus de 40 ans et plus et ceux qui ont d’autres facteurs de risque (niveau de certitude A)29. Toutefois, avec les années, les doutes grandissent quant à l’adéquation entre le diabète et l’équivalence de maladie coronarienne30. Howard et coll. précisent notamment en 2006 que seuls les diabétiques qui présentent de multiples autres facteurs de risque connaissent un risque d’événements similaires à celui des individus déjà atteints de MCV31. Par ailleurs, on s’étonnera du niveau de certitude élevé qui accompagne les recommandations dans les lignes directrices32. De fait, les publications récentes des associations du diabète ont réduit le niveau de certitude associé à leurs recommandations (de A à D au Canada en 200833 et de A à C aux États-Unis en 200934). On trouve au tableau II les recommandations de ces deux associations pour le traitement préventif par l’AAS. En fait, la revue de la littérature médicale indique un niveau de certitude faible quant aux bénéfices de l’AAS pour les individus atteints de diabète. Sept méta-analyses d’études ont évalué l’effet de l’AAS en prévention primaire de 56 – L’actualité médicale – 28 mars 2012 – www.ProfessionSante.ca MCV chez les patients atteints de diabète23,35-40. Les réductions de risque obtenues avoisinent 10 % à 15 % pour les événements coronariens et pour les AVC, mais aucune méta-analyse n’a pu mettre en évidence un effet statistiquement significatif. Considérant ces résultats, Pignone et Williams concluent qu’une faible dose d’AAS (75-162 mg) serait raisonnable pour les patients atteints de diabète et dont le risque d’événements cardiovasculaires à 10 ans serait supérieur à 10 %37. La Société canadienne de cardiologie indique, quant à elle, qu’il n’y a actuellement aucune donnée probante permettant de recommander l’usage d’AAS de façon systématique pour la prévention des événements cardiovasculaires chez les personnes atteintes de diabète3. En fait, la Société admet qu’en raison du manque de solidité des études menées chez les diabétiques, il n’est pas possible d’exclure que l’AAS puisse conférer des bénéfices similaires à ceux obtenus chez les individus ne souffrant pas de diabète. Toutefois, même en admettant une réduction potentielle de 10 % dans le risque d’événements, il faudrait traiter 1000 patients pendant un an pour prévenir deux événements cardiovasculaires majeurs. Les bénéfices seraient alors mis en doute compte tenu des effets secondaires. Toujours selon les dernières recommandations de la Société canadienne de cardiologie, pour les patients de plus de 40 ans à faible risque de saignements majeurs, une faible dose (75-162 mg par jour) pourrait être envisagée en présence d’autres facteurs de risque pour lesquels le traitement par l’AAS aurait fait ses preuves3. Ces facteurs de risque de MCV pourraient comprendre entre autres le tabagisme, la dyslipidémie, une tension artérielle élevée et une maladie rénale terminale. Les populations spéciales Les aînés Le dilemme du traitement des aînés repose sur les mêmes interrogations que pour la population plus jeune : à quel moment le ratio risque/bénéfice est-il favorable ? En effet, l’utilité de l’AAS peut être appréciable pour réduire le risque accru de MCV chez les personnes âgées. Toutefois, il est aussi bien admis que le risque de saignement s’accroît fortement avec l’âge. Comme les aînés sont souvent boudés des essais cliniques aléatoires, il est encore plus difficile de prendre une décision basée sur des données probantes. Quelques données expérimentales et des opinions d’experts peuvent néanmoins guider le choix de traitement. Par exemple, dans une modélisation virtuelle d’individus de 70 ans et plus, Nelson et coll. ont estimé que l’usage d’A AS à faible dose générerait plus d’hémorragies qu’il ne préviendrait d’infarctus du myocarde ou d’AVC41. De fait, pour 10 000 hommes de 70 à 74 ans traités par de l’A AS pour le restant de leur vie, 389 (IC 95 % : 213 à 581) infarctus seraient évités, mais 499 (IC 95 % : 266 à 740) hémorragies digestives graves seraient induites41. Parallèlement, pour les femmes, 321 (IC 95 % : 170 à 484) cas de maladie coronarienne seraient évités, tout en engendrant 572 (IC 95 % : 308 à 849) hémorragies digestives majeures 41. Ainsi, comme le rapportent Boland et coll. dans un article traitant de la thérapie préventive chez la personne âgée, l’AAS ne peut être recommandé puisqu’il induit autant d’accidents graves qu’il en prévient42. C’est aussi la position du U.S. Preventive Services Task Force, qui souligne que les données probantes sont insuffisantes pour recommander l’usage d’A AS en prophylaxie chez les patients de 80 ans et plus43. L’ étude ASPREE (ASPirin in Reducing Events in the Elderly) permettra peut-être de mieux situer la place de l’A AS en prévention primaire chez la personne âgée. Cet essai clinique randomisé australien, dans lequel on compare 100 mg d’A AS quotidien au placebo, est présentement mené auprès de 18 000 patients de 70 ans et plus dans la communauté44. En somme, dans l’état actuel des connaissances, il existe peu de situations où le risque cardiovasculaire serait si appréciable pour une personne du quatrième âge qu’il supplanterait le risque hémorragique. La place de l’AAS en prévention primaire chez les octogénaires est donc très limitée. Les populations spéciales La cothérapie par les AINS Enfin, il convient de bien peser les avantages et les inconvénients de traiter un individu par l’AAS s’il reçoit également un AINS. En effet, les AINS traditionnels pourraient affecter l’efficacité et l’innocuité du traitement préventif par l’A AS. L’interaction est avant tout pharmacodynamique : les AINS traditionnels se lient de manière réversible à l’enzyme COX-1, empêchant l’AAS d’exercer sa propre action3. Le problème survient lorsque les niveaux plasmatiques d’AINS diminuent, puisque la dissociation du complexe AINS-COX-1 restaure l’activité normale de la plaquette3. Or, comme la demi-vie plasmatique de l’A AS est courte, elle n’est alors plus disponible pour exercer son action sur la plaquette3. L’usage concomitant d’AINS et d’A AS est donc susceptible de créer une inhibition plaquettaire éphémère. Il n’existe pas à notre connaissance d’essais cliniques aléatoires qui auraient confirmé l’effet de cette inter action pharmacodynamique sur les événements cardiovasculaires. Les données issues d’études observationnelles sont, quant à elles, contradictoires47. Néanmoins, la Société canadienne de cardiologie considère que les résultats de ces études suggèrent un impact potentiellement négatif sur les événements cardiovasculaires3. La Société recommande donc d’éviter l’usage d’AINS traditionnels chez les individus qui reçoivent de l’A AS à faible dose pour la protection vasculaire3. Enfin, l’augmentation du risque de saignement lors de l’usage conjoint d’AINS traditionnels et d’A AS consti- Retour sur le cas clinique 2 Trois éléments doivent être pris en compte dans l’évaluation. 1Le risque cardiovasculaire de votre tante est élevé; 2Elle présente deux facteurs de risque de saignement : l’âge avancé et l’utilisation d’AINS; 3Une interaction potentielle AINS-AAS est susceptible de se produire. Selon les informations, le bénéfice qu’elle pourrait retirer de la thérapie à ce moment est possiblement plus important que les effets secondaires. Elle pourrait donc recevoir une prévention primaire par l’AAS à raison de 81 mg par jour. Si tel est le cas, on devra éviter l’interaction avec les AINS. Pour ce faire, on pourra suggérer l’acétaminophène. Autrement, un inhibiteur spécifique de la COX-2 pourrait convenir si votre tante utilise les AINS de manière sporadique. Il sera nécessaire de réévaluer la pertinence de l’AAS régulièrement (notamment quant à la survenue de facteurs de risque de saignement, dont l’avancement en âge, et quant aux douleurs d’arthrose pouvant commander une utilisation d’AINS quotidienne). La base pour la recommandation provient des lignes directrices de la Société canadienne de cardiologie : dans des circonstances spéciales, chez les hommes et les femmes ne présentant pas de signes manifestes de maladie vasculaire et pour Les références bibliographiques sont disponibles sur professionsanté.ca/ medecins/formation/ medactuel TROP DE HAUTS ET DE BAS ? Les études cliniques ont montré que Glucerna contribue à réduire la réponse glycémique1,2* Variation moyenne ajustée de la glycémie en fonction du temps1 Variation moyenne ajustée de la glycémie (mmol/L) tue un autre argument pour limiter son emploi. Les AINS non traditionnels (inhibiteurs de la COX-2) pourraient s’avérer une autre solution pour les individus qui doivent recevoir de l’A AS en prévention primaire. Comme l’enzyme COX-2 est absente des plaquettes, l’interaction précédemment décrite ne devrait pas être en cause3. Dans une revue systématique de la littérature scientifique, Strand a conclu que les inhibiteurs de la COX-2 à faible dose, conjointement avec l’AAS à faible dose, procurent un soulagement aussi efficace que les AINS traditionnels, tout en présentant moins de risques cardiovasculaires et gastro-intestinaux48. D’autres données seront nécessaires pour quantifier le risque cardiovasculaire de l’usage conjoint de ces deux traitements. Néanmoins, la Société canadienne de cardiologie suggère que, si un patient prenant de l’A AS à faible dose (75-162 mg par jour) pour la protection vasculaire a besoin d’un anti-inflammatoire, un inhibiteur spécifique de la COX-2 (coxib) devrait être choisi au lieu d’un AINS traditionnel3. Elle rappelle toutefois que les coxibs et les AINS traditionnels augmentent le risque cardiovasculaire et devraient être évités dans la mesure du possible chez les patients à risque de subir des événements vasculaires ischémiques3. lesquels le risque vasculaire est considéré comme élevé et le risque de saignement, faible, de l’AAS 75-162 mg par jour peut être envisagé. (Classe IIb [données conflictuelles ou divergence d’opinion sur l’utilité/efficacité du traitement, l’utilité/efficacité étant moins bien établie], niveau C [Consensus d’opinion d’experts ou petites études, études rétrospectives et registres]) Si un patient prenant de l’AAS à faible dose (75-162 mg par jour) pour la protection vasculaire a besoin d’un anti-inflammatoire, un inhibiteur spécifique de la COX-2 (coxib) devrait être choisi au lieu d’un AINS traditionnel3 (classe IIb, niveau C). Autant les coxibs que les AINS traditionnels augmentent le risque cardiovasculaire et devraient être évités dans la mesure du possible chez les patients à risque de subir des événements vasculaires ischémiques (classe III, niveau A). La figure 2 tente de façon schématique de résumer les recommandations discutées précédemment quant à la décision d’instaurer ou non de l’AAS en prévention primaire. Boisson nutritive ordinaire Bouteille Glucerna 4,4 3,3 p<0,001†† % 2,2 66 plus faible qu’avec une boisson nutritive ordinaire 1,1 0,0 30 60 90 -2,2 240 120 -1,1 Temps en minutes 180 †† À 60 minutes seulement ment Conclusion L’usage d’A AS en prévention primaire des événements cardiovasculaires n’est-il fondé que sur de bonnes intentions ou repose-t-il sur des bases solides ? Jusqu’à récemment, les bonnes intentions ont influencé la conduite clinique. Les résultats d’essais cliniques aléatoires sont décevants quant au rôle de l’A AS dans la prévention primaire d’événements cardiovasculaires, notamment dans le contexte où d’autres stratégies préventives sont bien en place (statines, inhibiteurs du système rénine-angiotensine aldostérone). Les données probantes laissent croire que l’usage d’A AS chez l’adulte n’est pas recommandable à large échelle en tant que stratégie de prévention primaire des MCV. Les bénéfices et les risques doivent être évalués de façon individuelle. On doit réserver l’usage d’A AS aux individus ayant d’importants risques cardiovasculaires et un faible risque de subir des saignements gastro-intestinaux. > Aidez vos patients à réduire les pics glycémiques postprandiaux de glucose et d’insuline1,2* Idéale comme collation ou bonne comme substitut de repas, la boisson nutritive Glucerna peut aider vos patients à prendre en charge leur diabète. Glucerna respecte les lignes directrices nutritionnelles de l’Association canadienne du diabète3. Recommandez Glucerna à vos patients dans le cadre de leur plan de prise en charge nutritionnelle du diabète. *Comparativement à une boisson nutritive ordinaire. Références : 1. J.A. Williams, J. Garcia Almeida, M. Matia Martin et al. Lack of Glycemic Response at 120 minutes postprandial with a New Diabetes Specific Nutritional Formula (résumé). Clinical Nutrition Supplements. Sept 2009; 4(S2). LB003. 2. Association canadienne du diabète 2008. 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