Critique

Transcription

Critique
2 automne, 3 hivers, la « dramédie » à la française. Présenté dans le cadre de l’ACID au un adulescent de 33 ans et de la belle Festival de Cannes 2013, 2 automnes, 3 Amélie (Maud Wyler) lors de leur hivers, écrit et réalisé par Sébastien jogging Betbeder fait figure d’OFNI dans le nombreuses semaines de recherche paysage cinématographique français. vaines, Arman s’était fait à l’idée de ne Une nouvelle génération de cinéaste plus recroiser Amélie au Jardin du semblait se profiler avec notamment La Luxembourg. Le destin en ayant décidé Bataille de Solférino de Justine Triet ou autrement, Arman retrouve la belle encore La fille du 14 juillet d’Antonin Joggeuse dans une ruelle sous l’emprise Peretjatko, de deux agresseurs sus nommés Sébastien Betbeder hebdomadaire. Après de confirme cette mouvance. « ninjas » par Arman, sauveur malgré lui. 2 automnes, 3 hivers marque le départ Des lors, une histoire d’amour va naître d’un nouveau genre cinématographique entre les deux protagonistes entourés dans la filmographie du réalisateur, en d’un autre couple Benjamin (Bastien effet, cette comédie s’éloigne de ses Bouillon) et Katia (Audrey Bastien). deux précédents longs métrages Derrière cette simple histoire d’amour, (Nuage, 2007, Les nuits avec Théodore, se cache un groupe de trentenaire qui 2012) tout en gardant une mélancolie cherche à résister au sein d’un monde poétique propre au cinéaste. L’intérêt qu’il ne contrôle pas. Ce groupe d’amis, du réalisateur pour les « dramédies » conscients mais idéalistes vivant dans américaines a influencé son œuvre et lui leur bulle, comme le justifie l’utilisation a permis d’importer le concept en du format carré qui permet aux France pour le plus grand plaisir des personnages d’évoluer au centre du amateurs de films à la Judd Apatow cadre et au spectateur de se focaliser sur (Knocked Up, Funny People, This is 40). ces derniers. Le réalisateur va plus loin Outre son inspiration américaine, le et nous intègre dans cette bulle via les cinéaste s’approprie le style tout en y monologues sur fond vert qui mettent incorporant de nombreux partis pris les spectateurs dans la confidence et intéressants pour en ressortir sa crée ainsi une proximité avec les « dramédie » à la française. personnages. Chaque personne va des Ce film débute par la simple rencontre lors annoncer une réalité immédiate, sa d’un homme, Arman (Vincent Macaigne) réalité et va pouvoir offrir une nouvelle vision sur une situation déjà connue du (Alain Tanner, Eugène Green, Mad Men, public. Breaking Bad, The Walking Dead) qui peut par certains côtés aspirer à L’articulation du récit se fait grâce à un l’exclusion du spectateur, ce qui peut chapitrage, pour lequel le réalisateur être facilement irritant. avait déjà adopté avec son court Dans ce film, on retrouve avec plaisir métrage Les mains d’Andréa (2006), tour l’impressionnant Vincent Macaigne qui à tour évocateur (la première rencontre incarne Arman, sorte de cousin éloigné fut un choc), fantasmatique (Sarkozy d’Albert Jeanjean (Dieu seul me voit n’existe pas) et abstrait (Vl’an) suscitant (Versailles-­‐Chantiers) ainsi la surprise du spectateur. Podalydès) par sa maladresse et sa La beauté de ce film réside dans ce subtil douce mélancolie. L’année 2013 aura mélange entre burlesque et mélancolie à été celle de Vincent Macaigne qui l’image de Jan (Thomas Blanchard), apparaît désormais indispensable au cousin suicidaire de Katia qui est une cinéma français et étant un lien fort sorte de musicien raté et qui suite à une unissant cette nouvelle génération de rupture amoureuse décide de se donner cinéastes (Guillaume Brac, Justine Tiret, la mort à l’image de ses idoles (Ian Antonin Curtis et Jeff Buckley) mais chaque appellent à tord la « la nouvelle Nouvelle tentative se concrétise par un échec (la Vague ». N’est-­‐il pas réducteur de pendaison se concrétise par une fracture comparer cette nouvelle génération du bras et finit repêché après s’être jeté avec celle des années Cahiers du à l’eau). Il se retrouve rattrapé par la cinéma ? N’est ce pas là un signe qu’un fatalité, il rate sa vie alors il ratera sa certain cinéma français s’est depuis trop mort. longtemps complu dans un navrant La réussite de 2 automnes, 3 hivers manège des vanités? En tous cas cette réside également dans son écriture très nouvelle génération séduit par les littéraire, telle une évidence les mots moyens qu’elle met en œuvre pour sortent avec justesse et beauté et changer l’ordre établi. viennent empoigner le spectateur qui ne Quoi qu’il en soit, sous ses airs de petit peut rester de marbre. film, 2 automnes, 3 hivers en est un Une réserve est tout de même à émettre grand.
sur le caractère ultra-­‐référencé du film Peretjatko) de que Bruno certains