la biographie de Claude Bernard - Salamandre (Collège de France)

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la biographie de Claude Bernard - Salamandre (Collège de France)
Salamandre. Fonds Claude Bernard. Biographie.
CLAUDE BERNARD
Claude Bernard fut professeur au Collège de France vingt trois années durant. Nommé titulaire
de la chaire de Médecine en 1855, il ne quitta sa chaire que l’année de sa mort, en 1878. Alors simple
étudiant en médecine âgé de 28 ans, il devient en 1841 le préparateur de François Magendie, puis son
suppléant en 1847. Sa présence au collège de France s’étend donc en fait sur près de trois décennies.
C’est à François Magendie (1783-1855) qu’il doit son orientation vers l’expérimentation
physiologique. Une vocation à laquelle il consacre non seulement toute sa carrière, mais aussi toute sa
vie tant il travaille sans relâche. Bernard fit progresser cette discipline de façon spectaculaire.
Ses premiers pas au collège de France lui apprennent combien la vivisection animale constitue un outil
pertinent de compréhension du vivant. Magendie l’encourage en lui montrant que les faits expérimentaux
permettent de battre en brèche les fausses doctrines et les esprits empiriques du moment que Bernard n’a de
cesse de dénoncer. L’enseignement de Bernard au Collège de France est volontiers dispensé lors des vivisections
qui attirent de nombreux auditeurs ; on venait de l’étranger visiter son laboratoire. Titulaire d’une chaire de
Médecine, il choisit d’enseigner l’étude de la médecine expérimentale considérant que sa mission était « d’initier
aux mouvements scientifiques du moment ».
De 1843 à 1860, Claude Bernard multiplie les découvertes lesquelles portent le plus souvent sur
deux principaux axes de recherches ; la physiologie de la digestion et les conséquences de la section des
nerfs. Parmi la longue liste de contributions dont Bernard fut l’auteur, citons ici le rôle du sucre dans
l’organisme animal et humain (dont la fameuse théorie de la fonction glycogénique du foie – 1848),
l’expérience du « foie lavé » qui révèle la production post mortem du sucre dans le foie (1855), la
découverte du glycogène (1855) et son isolement (1857), la présence de sucre dans le liquide céphalorachidien (1855). Concernant le système nerveux, retenons l’action vaso-motrice, l’existence de nerfs
vaso-constricteurs et vaso-dilatateurs, le concept de « circulations locales » et l’action du sympathique
sur l’œil (dont les cliniciens rappellent encore aujourd’hui la paternité avec l’appellation sémiologique
« syndrome oculo-papillaire de Claude Bernard et Horner »). Bernard étudie également les actions du
curare et autres poisons (strychnine, opium, oxyde de carbone, anesthésiques) qui permettent des
« dissections chimiques » riches d’enseignements, la physiologie du sang, les phénomènes d’asphyxie, la
cathérisation intra-cardiaque.
La réputation scientifique de Claude Bernard se fit d’abord sur ses nombreuses découvertes,
fruits de son habileté d’expérimentateur (Magendie lui avait dit « vous êtes meilleur que moi ») et de sa
capacité de travail. Mais la contribution de Bernard dépasse de loin le strict périmètre de la physiologie
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Salamandre. Fonds Claude Bernard. Biographie.
et de la médecine expérimentale. A la précision des gestes, à l’ingéniosité de ses protocoles ou à l’analyse
des faits biologiques, Bernard sait ajouter une extraordinaire faculté d’extrapolation. Il voit grand et
l’originalité, comme la solidité, de sa pensée font que Bernard a été - et est toujours - lu par les
philosophes (dont Bachelard, Bergson, Canguilhem, Comte, Dagognet, Popper, Renan, etc.) et les
historiens des sciences (Grmek, Holmes, Kuhn, etc.). C’est par cette dimension philosophique - qui
n’est pas indépendante de son savoir scientifique soulignons le - que l’œuvre de Bernard gagne un statut
d’exception. Chercheur et découvreur en prise avec la réalité du terrain (le laboratoire), ne perdant pas
de vue les applications pratiques de ses recherches (la médecine) Bernard est aussi un maitre à penser.
Chaque expérience a constitué pour lui les morceaux d’un puzzle qui, vu avec recul, reconstitue les
contours et la définition du vivant. Un croquis peint avec agnosticisme, rejetant l’empirisme, pouvant
remettre en cause bien des doctrines dominantes (dont le vitalisme). La physiologie bernardienne a su
unir les organes en leur donnant le concept de « milieu intérieur » (terme remontant à 1857 après
plusieurs années des gestation), lier l’animal et le végétal (on pense aux Leçons sur les phénomènes de la vie
communs aux animaux et aux végétaux de 1878), s’interroger sur les définitions en miroir de la santé et de la
maladie, proposer au corps vivants de suivre un certain déterminisme, offrir aux scientifiques une
méthode. Pédagogue il a su exprimer sa pensée dans des livres magistraux dont l’introduction à la médecine
expérimentale (1865) fut le premier et, les principes de médecine expérimentale d’édition posthume (1947) le
dernier. Claude Bernard est un immense savant (*).
NOTE
* Dans le paysage des sciences biologiques et médicales du XIXe siècle, Bernard n’était évidemment pas
seul. En le considérant ici comme un physiologiste de premier plan, on ne perdra pas de vue que son
travail n’a pas contribué de façon déterminante à l’essor de la pathologie cellulaire, à la théorie des
germes, voire aux statistiques du vivant ou aux travaux l’hérédité (du temps de Bernard on ne disait pas
encore génétique). En affirmant ici sans risque d’être contredit que Bernard compte parmi les plus
grands savants du XIXe siècle, on ne saurait faire de l’ombre à d’autres découvreurs comme Ludwig,
Emil Du Bois-Reymond, Pasteur, Schwann ou Virchow qui furent ses contemporains.
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