2 GENÈVE Des observateurs suisses au procès de Murad Akincilar
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2 GENÈVE Des observateurs suisses au procès de Murad Akincilar
2 GENÈVE LE COURRIER LUNDI 31 MAI 2010 La Suisse prudente mais «attentive» Le Conseil fédéral accordera «toute l’attention nécessaire au procès» de Murad Akincilar. C’est en ces termes diplomatiques que Berne a répondu il y a une quinzaine de jours à deux interpellations parlementaires concernant le militant genevo-turc incarcéré à Istanbul. Déposés en mars par les socialistes Jean-Claude Rennwald et Liliane Maury Pasquier, les deux textes s’inquiétaient des «démarches entreprises pour obtenir la libération de Murad Akincilar» ou tout du moins «pour que ce procès se déroule dans des conditions dignes de l’Etat de droit». Le conseiller national et sa collègue des Etats s’inquiétaient encore pour sa santé et réclamaient une prise de position politique sur cette «détention totalement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme». La réponse du Conseil fédéral reste sur le terrain juridique, affirmant n’être «pas en position d’exiger la libération de M. Akincilar, qui est citoyen turc et qui a renoncé à son statut de réfugié en 2008», et son «respect de l’indépendance du système judiciaire turc». Le gouvernement concède toutefois «suivre l’affaire» et attendre du procès qu’il «soit mené dans le strict respect des standards internationaux». Il souligne aussi avoir eu «l’occasion de signaler aux autorités turques le haut degré d’attention et les préoccupations que suscite en Suisse la détention de M. Akincilar». «C’est un peu léger!» réagit le conseiller national, «pas du tout satisfait» de la réponse des autorités qui avaient accordé l’asile à cet opposant persécuté par cette même justice turque. «C’est à se demander si le Conseil fédéral mesure réellement les risques encourus par Murad Akincilar», se désespère l’élu jurassien. Sa collègue genevoise préfère voir le côté positif: «Je ne m’attendais pas à un autre discours, Murad n’est pas suisse. Mais cette prudence n’a pas empêché l’ambassadeur suisse d’entreprendre des démarches», rappelle-t-elle. Et de relever que la question a même été évoquée au «plus haut niveau» diplomatique. BPZ Samedi 27 mars 2010, rassemblement de soutien à Murad Akincilar, incarcéré en Turquie depuis le 30 septembre 2009. KEYSTONE Des observateurs suisses au procès de Murad Akincilar SOLIDARITÉ • La Mairie de Genève, la Confédération et le mouvement social seront représentés jeudi à l’audience du syndicaliste genevois. BENITO PEREZ Le procès du syndicaliste d’Unia-Genève Murad Akincilar s’ouvrira jeudi sous l’œil attentif de la Confédération et d’une importante délégation suisse. Le maire de Genève, Rémy Pagani, assistera notamment à l’audience du militant turc incarcéré depuis septembre 2009 pour des liens présumés avec une organisation armée. Ancien syndicaliste, M. Pagani connaît bien Murad Akincilar. S’il se rend à Istan- bul, au-delà d’une réelle solidarité personnelle et politique, c’est qu’il a «l’intime conviction» que celui-ci «ne saurait être mêlé, de près ou de loin, à une activité politique ayant pour stratégie la terreur». «Ses idées se sont toujours déployées hors de ce champ d’intervention», souligne-t-il, à propos de cet ancien professeur d’économie, engagé de longue date au sein de mouvements sociaux pacifiques. Délégué à l’audience par le Conseil administratif, Rémy Pagani sera particulière- ment attentif à ce que Murad Akincilar bénéficie d’un procès équitable. A ce titre, il avait invité l’ambassadeur suisse à assister aux débats. Celui-ci s’est néanmoins excusé pour des motifs d’agenda. Seront en revanche présents aux côtés du maire, le consul suisse Ernst Balzli, le député européen portugais Rui Tavares (membre de la commission des libertés civiles et de la justice du Parlement de l’UE), ainsi qu’une dizaine de militants syndicaux et de défenseurs des droits humains. I Mon anniversaire au pays du lotus REPORTAGE • Le Musée d’ethnographie de Genève organise des anniversaires ludiques et créatifs. Mis sur pied en 2008, ils constituent une alternative aux offres commerciales et favorisent l’accès à la culture. RACHAD ARMANIOS duire de contenu créatif et éducatif. On doit s’adapter, car le but est qu’ils aient du plaisir. On n’est pas à l’école», commente Adriana. «Bouddha caca! Caca boudin!» Evidemment, «le sage qui est parvenu à la connaissance parfaite» provoque auprès des bambins un état d’éveil qu’il n’aurait peut-être pas soupçonné. Mais «le principal, c’est qu’ils aient du plaisir et qu’ils aient envie de revenir dans un musée», sourit Adriana Batalhia Martin, artiste peintre qui anime les formules anniversaire du Musée d’ethnographie de Genève. Parallèlement à l’exposition sur la divinité bouddhiste Kannon (notre édition du 30 janvier), l’institution part chaque mercredi et samedi, en compagnie d’une douzaine d’enfants, à la découverte du «pays des lotus». Cette fleur, qui pousse dans la vase comme le sage s’extrait de la boue humaine, constitue le fil rouge du programme. Aujourd’hui, c’est Alexandre qui fête ses cinq printemps. Enchantement Pas plus cher qu’au MacDo Dans un pavillon, les enfants commencent par peindre un lotus en rouge, en or ou en argent. Puis Yulia Velkovskaya Leonelli, la seconde animatrice, leur apprend à faire un origami. Le pliage japonais figure le chat Maneki-neko, un des multiples avatars de Kannon. «Il est où le dragon?» demande un bambin, impatient de plonger plus avant dans ce fascinant univers oriental. «C’est une formule idéale», confiait Ursula de Cerjat, la maman d’Alexandre, au moment de laisser sa progéniture et ses camarades de classe aux bons soins des animatrices. Le mois passé, c’était son fils aîné qui soufflait ses bougies au musée et, peu avant, le fils d’une amie. Mai 2010, un anniversaire culturel au Musée d’ethnographie. Une formule qui rencontre un grand succès. J.-P. DI SILVESTRO «L’aspect éducatif et culturel est très intéressant, c’est une alternative bienvenue aux offres commerciales.» «La base, c’est que ce ne soit pas plus cher qu’un anniversaire au MacDo», explique la responsable Christine Détraz. Pour 250 francs les deux heures trente, le prix est proportionnellement similaire. Mais rien à voir avec les anniversaires «à la chaîne», et surtout, il y a le contenu créatif et culturel, insiste-t-elle. Doit-on comprendre que le musée propose une alternative élitiste? La maman d’Alexandre, qui vit à Champel et travaille dans la banque privée, est, comme ses enfants, une habituée des musées. «La formule attire des parents d’un niveau socio-économique élevé, qui ont fait des études, reconnaît Mme Détraz. Mais, souvent, des camarades de classe invités n’ont jamais mis les pieds dans un musée.» Une façon de démocratiser l’accès à la culture. La formule, mise sur pied en 2008, rencontre un grand succès: «Il y a une vraie demande. Dans notre culture, l’anniversaire est un moment très important.» Travaillant à 100%, Mme de Cerjat a chaque année voulu le meilleur pour ses enfants, allant jusqu’à organiser des fêtes avec soixante gamins à la maison de quartier, louant les services de clowns ou de marionnettistes. «C’est agréable de profiter d’une offre clé en main.» A l’intérieur, les adultes animent un théâtre de marionnettes, racontant la vie de Bouddha et de Kannon. Décor et marionnettes sont faits main, comme tous les supports et les matériels auxquels Adriana et Yulia ont recours. «Tu peux arrêter l’histoire?» interrompt un enfant qui ne croche pas. «Selon les groupes, on arrive plus ou moins à intro- En l’occurrence, les petits sont assez dissipés, juge-t-elle. Pour autant, la visite de l’exposition reste sous contrôle après les recommandations d’usage: ne pas courir, ne pas hurler, etc. «Les enfants sont souvent plus disciplinés que les adultes», exagère un gardien. Dans la salle où trône une magnifique statue d’un Kannon à bras multiples, les enfants tournent autour, admiratifs. Pas sûr qu’ils aient tous saisi l’univers religieux qu’ils visitent, et peu sont capables de répéter que cette incarnation de la compassion universelle «aime aider les autres», comme l’explique Adriana. Mais celle-ci en est certaine, «ils retiennent davantage que ce que l’on pourrait croire». Surtout, ils emporteront l’enchantement qu’on lit dans leurs yeux et qu’ils rendent en retour. Une fillette s’intéresse au grand âge de Bouddha, mais un garçon joue les Schtroumpfs grognons: «J’aime pas les grands âges.» La véritable énigme, toutefois, est de savoir si les dragons ont existé. De retour dans le pavillon, les parents d’Alexandre sont invités à partager le gâteau au chocolat, lui aussi fait maison. A eux, ensuite, de gérer le moment cadeaux. Où le commercial reprend le pas sur la culture, à en juger du tas de jouets en plastique amoncelé. I De 5 à 11 ans, de 13 h 30 à 16 h mercredi ou samedi. Renseignements: ☎022 418 45 54 ou [email protected]