Quand Lyon devient Beyrouth
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Quand Lyon devient Beyrouth
Quand Lyon devient Beyrouth Terrorisme: é .t de • Terroriser les • terroristes, dit Charles Pasqua. S'attaquer à la « mouvance », renchérit Robert • Pandraud. Et tous deux savent bien que, . faute de moyens, ils passent à côte de la vraie solution... . • • ne ville en état de siège, quadrillée par des policiers mitraillette au poing. Des bâtiments américains et anglais mis sous haute surveillance. Un préfet qui adU jure la population de «garder son sang-froid». Le patron anglais d'une société américaine assassiné. Un immeuble soufflé par une bombe, en pleine nuit. Où sommes-nous ? A Beyrouth ? Non à Lyon, ces jours derniers. La ville du juste Milieu, prise de folie et entraînée dans le tourbillon du terrorisme. Désormais, Paris n'est plus la cible unique des poseurs de bombes. Mieux : Lyon vient d'être étiqueté par les spécialistes « plaque tournante du terrorisme ». 25 avril, 8 heures du matin, à Ecully, dans la banlieue lyonnaise. Kenneth Marston, 43 ans, citoyen anglais, directeur général de Black et Decker France, sort de sa villa pour se rendre à son travail. Soudain un homme en cagoule noire armé d'un fusil canon scié, surgit et tire defois , sur le manager, sous les yeux de sa deux fille, Joan, âgée de 11 ans. Le lendemain en plein centre de Lyon, dans le quartier de la Part-Dieu, l'immeuble de la société American Express est soufflé par une charge de plastic d'un kilo et demi. Tout près du sinistre, dans les caves de l'hôtel Mercure, les pompiers tombent sur un graffiti : « Black et Decker, Control Data, American Express, US go home. » Le message est clair. Est-ce une réponse de Kedhafi au raid de Reagan sur la Libye ? En tout cas, le jour même, un mystérieux Front révolutionnaire arabe revendique les deux attentats. Une signatutre qui ne convainc guère les policiers français. Nombre d'entre eux penchent pour la piste Action directe. Au ministère de l'Intérieur, Lyon est considéré comme une « plaque tournante du terrorisme » et un « sanctuaire d'Action directe ». Pourquoi? C'est à Lyon que le chef des Fractions armées révolutionnaires arabes pour l'Europe, Georges Ibrahim Abdallah, a été arrêté en 1984 par la DST. Il y avait déjà, à l'époque un réseau d'accueil solide. A Lyon aussi qu'André Oli' 32 LE NOUVEL OBSERVATEURIFRANCE vier, 43 ans, un des fondateurs d'Action directe, a été interpellé, le 28 mars dernier. Au cours de cette capture, les policiers ont mis la main sur une véritable mine d'or : 150 kilos d'archives sur les activités d'Action directe et de sa mouvance. Une énorme documentation à débroussailler, classer, interpréter. Et déjà des pistes. La plus importante ? Les enquêteurs sont convaincus qu'Action directe a été mêlée à des hold-up qui ont mal tourné et où l'on a tué. Par trois fois : Henri Delrieu, convoyeur de fonds, le 29 octobre 1980; le brigadier Guy Hubert le 3 novembre 1981,•et le général Delfosse le 27 mars 1984. Trois « bavures », toujours dans la région lyonnaise. Autre certitude tirée de cette pêche miraculeuse : les liens entre terrorisme et banditisme. 'Désormais, il n'y a plus aucun doute : Action directe vit de hold-up juteux et sanglants. « Des êtres asociaux et marginaux, des bandits, parfois de véritables truands », affirme Robert Pandraud, ministre délégué chargé de la Sécurité. Ainsi, le premier flic de France, après •Il n'y a plus de doute : Action directe vit de hold-up juteux et sanglants Kenne,thMarston, directeur général de Black et Decker-France (en haut), et les bureaux de ?American Express à Lyon après ?attentat du 26 avril l'arrestation d'André Olivier, est ravi : « On sait désormais que ces gens n'ont rien à voir avec Robin des Bois. » Quelques jours plus tard, l'actualité va lui donner raison. Le 15 avril, Guy Brana, vice-président du CNPF, échappe miraculeusement à un attentat organisé par Action directe. Le lendemain, l'impétueux juge Jean-Louis Bruguière, chargé du dossier, lance une grande rafle dans la mouvance de l'organisation terroriste. Résultat de cette opération coup de poing : cinq arrestations, dont deux supposés gros poissons d'Action directe : Hamid Lalaoui et Jacques Darmon. Et là encore, la pêche est bonne. Au domicile de Dannon, les policiers saisissent un butin de 170 millions de centimes, cinq pistolets automatiques, quatre revolvers, un fusil à pompe, une carabine et de nombreuses munitions. Chez Lalaoui : 80 millions de centimes, 110 bâtons de 100 grammes de dynamite, des détonateurs, des mèches lentes, un pistolet mitrailleur et un scanner qui permet d'intercepter les messages radio des policiers.